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Document 62012CJ0090
Judgment of the Court (Ninth Chamber) of 7 November 2013. # European Commission v Republic of Poland. # Failure of a Member State to fulfil obligations - Air transport - Agreements relating to air services between Member States and third countries - Obligation on Member States to distribute traffic rights among eligible Community air carriers on the basis of a non-discriminatory and transparent procedure and to inform the Commission of that procedure without delay. # Case C-90/12.
Sodba Sodišča (deveti senat) z dne 7. novembra 2013.
Evropska komisija proti Republiki Poljski.
Neizpolnitev obveznosti s strani države - Letalski prevoz - Sporazumi o letalskih prevozih med državami članicami in tretjimi državami - Obveznost držav članic, da zagotovijo razdelitev prometnih pravic med upravičene letalske prevoznike Evropske unije na podlagi nediskriminatornega in preglednega postopka in da o tem postopku nemudoma obvestijo Komisijo.
Zadeva C-90/12.
Sodba Sodišča (deveti senat) z dne 7. novembra 2013.
Evropska komisija proti Republiki Poljski.
Neizpolnitev obveznosti s strani države - Letalski prevoz - Sporazumi o letalskih prevozih med državami članicami in tretjimi državami - Obveznost držav članic, da zagotovijo razdelitev prometnih pravic med upravičene letalske prevoznike Evropske unije na podlagi nediskriminatornega in preglednega postopka in da o tem postopku nemudoma obvestijo Komisijo.
Zadeva C-90/12.
ECLI identifier: ECLI:EU:C:2013:724
ARRÊT DE LA COUR (neuvième chambre)
7 novembre 2013 (*)
«Manquement d’État – Transport aérien – Accords relatifs à des services aériens entre les États membres et les pays tiers – Obligation des États membres de procéder à une répartition des droits de trafic entre les transporteurs aériens de l’Union européenne concernés selon une procédure non discriminatoire et transparente et de notifier ladite procédure sans délai à la Commission»
Dans l’affaire C‑90/12,
ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, introduit le 21 février 2012,
Commission européenne, représentée par M. K. Simonsson et Mme M. Owsiany-Hornung, en qualité d’agents,
partie requérante,
contre
République de Pologne, représentée par MM. B. Majczyna et M. Szpunar, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
LA COUR (neuvième chambre),
composée de M. M. Safjan, président de la neuvième chambre, faisant fonction de président de chambre, M. J. Malenovský (rapporteur) et Mme A. Prechal, juges,
avocat général: M. M. Wathelet,
greffier: M. A. Calot Escobar,
vu la procédure écrite,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que, en n’ayant pas pris les mesures nécessaires pour se conformer aux articles 5 et 6 du règlement (CE) n° 847/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, concernant la négociation et la mise en œuvre d’accords relatifs à des services aériens entre les États membres et les pays tiers (JO L 157, p. 7), et, en tout état de cause, en n’en n’ayant pas informé la Commission, la République de Pologne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de ces articles.
Le cadre juridique
Le droit de l’Union
2 Aux termes du considérant 12 du règlement n° 847/2004:
«Les États membres devraient mettre en place des procédures non discriminatoires et transparentes pour la répartition des droits de trafic entre les transporteurs aériens communautaires. Dans le cadre de la mise en œuvre de ces procédures, les États membres devraient tenir dûment compte de la nécessité d’assurer la continuité des services aériens.»
3 L’article 5 de ce règlement, intitulé «Répartition des droits de trafic», dispose:
«Lorsqu’un État membre conclut un accord ou des modifications à un accord ou à ses annexes prévoyant une limitation de l’utilisation des droits de trafic ou du nombre de transporteurs aériens communautaires admis à faire valoir des droits de trafic, ledit État membre procède à une répartition des droits de trafic entre des transporteurs aériens communautaires concernés selon une procédure non discriminatoire et transparente.»
4 L’article 6 dudit règlement, intitulé «Publication des procédures», prévoit:
«Les États membres notifient sans délai à la Commission les procédures qu’ils appliqueront aux fins de l’article 5 et, le cas échéant, de l’article 2. À des fins d’information, la Commission veille à ce que ces procédures soient publiées au Journal officiel de l’Union européenne dans les huit semaines de leur réception. Toute nouvelle procédure et toute modification ultérieure des procédures sont portées à la connaissance de la Commission au plus tard huit semaines avant leur entrée en vigueur, afin que la Commission puisse assurer leur publication au Journal officiel de l’Union européenne dans le délai de huit semaines susmentionné.»
5 Conformément à son article 10, le règlement n° 847/2004 est entré en vigueur le trentième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l’Union européenne, laquelle est intervenue le 30 avril 2004.
Le droit polonais
6 L’article 191 de la loi relative au droit aérien (prawo lotnicze), du 3 juillet 2002 (Dz. U n° 130, position 1112, ci-après la «loi relative au droit aérien»), dispose:
«[…]
2. L’exploitation de services réguliers ou d’une série de services occasionnels sur des routes ou dans des zones données entre la République de Pologne et un pays tiers par un transporteur aérien polonais requiert l’obtention d’une autorisation délivrée par le président de l’Autorité.
[…]
7. Si l’autorisation d’exploiter des services aériens sur une route donnée visée au paragraphe 2 est demandée par deux ou plusieurs transporteurs aériens, en cas de droits de trafic limités, le président de l’Autorité octroie l’autorisation à un transporteur à l’issue d’une mise en concurrence, en se fondant en particulier sur les critères d’évaluation suivants:
1) l’aptitude du transporteur aérien à assurer un niveau de service adéquat, à des conditions tarifaires concurrentielles, ainsi qu’à concurrencer efficacement les transporteurs aériens autres que ceux visés au paragraphe 1 et à l’article 192a;
2) les investissements déjà réalisés pour le développement de la liaison faisant l’objet de la mise en concurrence et les résultats obtenus jusqu’alors par le transporteur aérien.
[…]
14. Le ministre compétent en matière de transport définit, par voie de règlement, la procédure de mise en concurrence visée au paragraphe 7, en exposant les conditions précises de répartition des droits de trafic limités, et, en particulier, les informations qui doivent figurer dans la demande d’autorisation, les documents nécessaires à l’octroi de l’autorisation, les critères particuliers pour l’attribution des droits de trafic limités et les motifs de retrait de l’autorisation, en tenant compte des dispositions et accords internationaux contraignants, des dispositions de l’Union européenne concernant la négociation et la mise en œuvre d’accords relatifs à des services aériens et dans le respect du principe de non-discrimination.»
La procédure précontentieuse
7 Le 4 juin 2010, la Commission a adressé à la République de Pologne une lettre de mise en demeure dans laquelle elle a rappelé la nécessité, pour cet État membre, de prendre les mesures prévues aux articles 5 et 6 du règlement n° 847/2004.
8 Par une lettre du 2 août 2010, la République de Pologne a répondu que la loi relative au droit aérien faisait obligation au président de l’Autorité de l’aviation civile de procéder à une mise en concurrence lorsque deux ou plusieurs transporteurs aériens demandaient une autorisation ou leur désignation pour exploiter des services aériens sur une même route, en cas de droits de trafic limités. Cet État membre a toutefois précisé que les dispositions régissant l’application d’une procédure de mise en concurrence non discriminatoire et transparente, telle que celle prévue à l’article 5 du règlement n° 847/2004, figuraient dans une proposition d’amendement au projet de loi portant modification de la loi relative au droit aérien. La République de Pologne a ajouté que l’adoption de ces nouvelles dispositions permettrait de satisfaire à l’obligation visée à l’article 5 de ce règlement. Elle a précisé que cet amendement et la notification de celui-ci à la Commission interviendraient à la fin de l’année 2010.
9 Le 28 janvier 2011, constatant que de telles dispositions n’avaient pas encore été adoptées, la Commission a adressé à la République de Pologne un avis motivé invitant cet État membre à respecter les obligations lui incombant en vertu des articles 5 et 6 dudit règlement dans un délai de deux mois à compter de la réception de cet avis motivé.
10 Dans sa réponse du 23 mars 2011 audit avis motivé, la République de Pologne a informé la Commission que les mesures en question n’avaient pas encore été prises.
11 C’est dans ces conditions que la Commission a décidé d’introduire le présent recours.
Sur le recours
Argumentation des parties
12 La République de Pologne soutient que l’application de l’article 5 du règlement n° 847/2004 est soumise à la condition que l’État membre concerné ait conclu un accord prévoyant une limitation de l’utilisation des droits de trafic. Or, la République de Pologne n’aurait conclu aucun accord non plus qu’aucune modification à un accord ou à ses annexes prévoyant une limitation de l’utilisation des droits de trafic ou du nombre de transporteurs aériens communautaires admis à faire valoir des droits de trafic. Par conséquent, elle ne serait pas tenue d’instaurer la procédure prévue à cet article 5.
13 Selon la République de Pologne, cette interprétation découle des termes mêmes dudit article 5, en particulier de la présence de la conjonction «lorsque» au début de celui-ci. Une interprétation téléologique de cette disposition conforterait également cette thèse, dans la mesure où le principal objectif du règlement n° 847/2004 consisterait à garantir aux transporteurs de l’Union un accès illimité et égalitaire au marché des liaisons entre les États membres et les États tiers. Le législateur de l’Union aurait donc souhaité éviter l’introduction, dans des accords bilatéraux, de tous types de limitations en matière d’accès de ces transporteurs aux liaisons entre les États membres et les États tiers.
14 Or, ce serait en garantissant l’élimination de tous types de limitations et en s’abstenant d’introduire de telles limitations dans des accords bilatéraux nouveaux ou déjà en vigueur qu’un État membre se conformerait au mieux aux exigences fixées aux articles 5 et 6 du règlement n° 847/2004. Ainsi, l’absence de procédure de répartition des droits de trafic dont l’utilisation est limitée ne porterait nullement atteinte à l’égalité de traitement des transporteurs de l’Union dès lors qu’un État membre n’introduit pas de tels droits de trafic dans un accord conclu avec un État tiers.
15 Enfin, la République de Pologne souligne qu’elle a d’ores et déjà établi un cadre législatif comportant une habilitation aux fins d’adopter un règlement d’exécution, dans l’hypothèse où elle introduirait dans un accord en vigueur ou dans un nouvel accord des limitations à des droits de trafic. Elle pourrait ainsi prendre les mesures qui s’avéreraient nécessaires, au moment de la négociation d’un accord bilatéral. En effet, la durée de la négociation en vue de la conclusion d’un tel accord étant en général assez longue et la répartition des droits de trafic constituant l’étape ultime de cette négociation, cet État membre considère qu’il pourrait adopter ces mesures en temps utile, tout en respectant le délai de publication imposé à l’article 6 du règlement n° 847/2004.
16 La Commission soutient que l’obligation d’instaurer la procédure transparente et non discriminatoire visée à l’article 5 du règlement n° 847/2004 et d’en informer la Commission n’est soumise à aucune condition. La République de Pologne ferait une interprétation erronée du sens qu’il convient de donner à la présence de la conjonction «lorsque» au début de cet article 5. Cette conjonction, qui ne saurait être interprétée comme soumettant à des conditions l’adoption des dispositions en cause, indiquerait les conditions dans lesquelles les procédures mises en place trouvent à s’appliquer.
17 Par ailleurs, la Commission précise que, afin que soit respecté l’objectif de sécurité juridique visé par le règlement n° 847/2004, l’instauration et la publication des procédures en cause doivent intervenir avant que ne débute la négociation d’accords ayant pour effet de limiter l’utilisation des droits de trafic.
Appréciation de la Cour
18 Il y a lieu, tout d’abord, de relever que la République de Pologne ne conteste pas que, à la date d’expiration du délai imparti dans l’avis motivé, elle n’avait pas adopté la mesure prévue à l’article 5 du règlement n° 847/2004, à savoir l’instauration d’une procédure non discriminatoire et transparente applicable lorsqu’un État membre procède à une répartition des droits de trafic.
19 En revanche, la République de Pologne conteste le fait que ce règlement impose une obligation inconditionnelle. À cet égard, elle fait valoir que dans la mesure où elle s’est abstenue de modifier ou de conclure tout accord prévoyant une répartition des droits de trafic, elle n’est pas tenue d’instaurer une telle procédure. Cet État membre souligne qu’il lui sera possible d’adopter cette procédure au moment où il engagera des négociations en vue de la conclusion d’un accord prévoyant la répartition des droits de trafic.
20 Or, d’une part, il ressort du libellé de l’article 5 du règlement n° 847/2004 que la répartition des droits de trafic entre des transporteurs aériens de l’Union doit être assurée selon une procédure non discriminatoire et transparente. Une telle procédure doit donc nécessairement avoir été instaurée préalablement à cette répartition des droits de trafic.
21 D’autre part, aux termes de l’article 6 de ce règlement, les États membres notifient «sans délai» à la Commission les procédures qu’«ils appliqueront» aux fins de cet article 5. Il en résulte que la procédure en cause doit être adoptée dans les meilleurs délais et, à la suite de cette adoption, être notifiée sans délai à la Commission, indépendamment de la conclusion ultérieure effective d’un accord visé audit article 5.
22 Par conséquent, contrairement à ce que fait valoir la République de Pologne, l’adoption de la procédure prévue à l’article 5 du règlement n° 847/2004 constitue une obligation inconditionnelle.
23 En l’occurrence, alors que le règlement n° 847/2004 est entré en vigueur le 30 mai 2004, la République de Pologne n’avait pas encore adopté la procédure en cause à la date d’expiration du délai imparti dans l’avis motivé.
24 Dès lors, il y a lieu de constater que, en violation des articles 5 et 6 du règlement n° 847/2004, cet État membre n’a pas instauré la procédure en cause.
25 En ce qui concerne, enfin, l’argument de la République de Pologne, selon lequel, en s’abstenant de conclure ou de modifier tout accord mettant en œuvre une répartition des droits de trafic, elle remplit au mieux les obligations qui lui incombent en vertu du droit de l’Union, il résulte d’une jurisprudence constante de la Cour que l’inexistence dans un État membre déterminé d’une certaine activité visée par une réglementation du droit de l’Union ne saurait libérer cet État de son obligation de prendre des mesures législatives ou réglementaires afin d’assurer une transposition adéquate de cette réglementation (voir, par analogie, arrêt du 14 janvier 2010, Commission/République tchèque, C‑343/08, Rec. p. I‑275, point 39 et jurisprudence citée).
26 Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de considérer le recours introduit par la Commission comme fondé.
27 Par conséquent, il convient de constater que, en n’ayant pas pris les mesures nécessaires pour se conformer aux articles 5 et 6 du règlement n° 847/2004, la République de Pologne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de ces articles.
Sur les dépens
28 Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République de Pologne et cette dernière ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.
Par ces motifs, la Cour (neuvième chambre) déclare et arrête:
1) En n’ayant pas pris les mesures nécessaires pour se conformer aux articles 5 et 6 du règlement (CE) n° 847/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, concernant la négociation et la mise en œuvre d’accords relatifs à des services aériens entre les États membres et les pays tiers, la République de Pologne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de ces articles.
2) La République de Pologne est condamnée aux dépens.
Signatures
* Langue de procédure: le polonais.