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Document 62023CJ0366

    Sodba Sodišča (sedmi senat) z dne 25. aprila 2024.
    Compagnie industrielle de la matière végétale (CIMV) proti Evropski komisiji.
    Zadeva C-366/23 P.

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2024:351

    ARRÊT DE LA COUR (septième chambre)

    25 avril 2024 (*)

    « Pourvoi – Recherche et développement technologique – Convention de subvention conclue dans le cadre du programme-cadre pour la recherche et l’innovation “Horizon 2020” – Recouvrement d’une créance – Remboursement échelonné – Exactitude matérielle des faits – Erreur manifeste d’appréciation – Obligation de motivation – Confiance légitime – Droit d’être entendu – Proportionnalité »

    Dans l’affaire C‑366/23 P,

    ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 8 juin 2023,

    Compagnie industrielle de la matière végétale (CIMV), établie à Neuilly-sur-Seine (France), représentée par Mes B. Le Bret, R. Rard et P. Renié, avocats,

    partie requérante,

    l’autre partie à la procédure étant :

    Commission européenne, représentée par Mme M. Ilkova et M. S. Romoli, en qualité d’agents,

    partie défenderesse en première instance,

    LA COUR (septième chambre),

    composée de M. F. Biltgen, président de chambre, MM. N. Wahl (rapporteur) et J. Passer, juges,

    avocat général : M. A. Rantos,

    greffier : M. A. Calot Escobar,

    vu la procédure écrite,

    vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

    rend le présent

    Arrêt

    1        Par son pourvoi, la Compagnie industrielle de la matière végétale (CIMV) demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 29 mars 2023, CIMV/Commission (T‑26/22, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2023:172), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision C(2021) 7932 final de la Commission, du 28 octobre 2021, relative au recouvrement d’un montant de 5 888 214,59 euros, majorés des intérêts de retard (ci-après la « décision litigieuse »).

     Les antécédents du litige

    2        Les antécédents du litige ont été exposés par le Tribunal aux points 2 à 29 de l’arrêt attaqué et peuvent, pour les besoins de la présente procédure, être résumés de la manière suivante.

    3        À la suite d’un appel d’offres de l’Agence exécutive pour l’innovation et les réseaux (INEA), la convention de subvention no 657867 a été signée le 22 avril 2015 par cette dernière et la requérante pour la mise en œuvre d’un projet financé dans le cadre du programme-cadre pour la recherche et l’innovation « Horizon 2020 ». La contribution financière maximale de l’Union européenne au titre de ce projet s’élevait à 19 999 544 euros. Un montant de 9 999 772 euros a été versé à la requérante au titre du préfinancement.

    4        Entre le 14 décembre 2015 et le 1er mars 2018, date à laquelle l’INEA a adressé une lettre à la requérante lui notifiant la résiliation de cette convention, l’INEA a accepté de suspendre, à la demande de la requérante, ledit projet en raison de la non-réalisation de la condition de cofinancement de celui-ci.

    5        Le 24 avril 2019, l’INEA a informé la requérante de son intention de recouvrer la contribution financière de l’Union indûment versée et lui a adressé, en sa qualité de coordonnateur du consortium, la note de débit no 3241905087 (ci-après la « note de débit »). Cette dernière invitait la requérante à s’acquitter du montant dû avant le 3 juin 2019. L’attention de la requérante était attirée sur le fait que, à défaut de paiement à cette dernière date, sa dette envers l’Union serait majorée d’intérêts et que la Commission européenne se réservait le droit de procéder au recouvrement forcé de cette dette en vertu de l’article 299 TFUE.

    6        Par une lettre du 20 mai 2019, la requérante a invoqué des difficultés financières pour rembourser ladite dette dans le délai fixé par cette note de débit et a demandé, premièrement, un report de six mois de la date limite de paiement fixée par ladite note sans que lui soient appliqués des intérêts de retard et, deuxièmement, la négociation d’un échelonnement du remboursement de la même dette à définir d’un commun accord avec la Commission.

    7        La Commission a répondu par une lettre du 4 juin 2019 informant la requérante des conditions fixées par le règlement (UE, Euratom) 2018/1046 du Parlement européen et du Conseil, du 18 juillet 2018, relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union, modifiant les règlements (UE) no 1296/2013, (UE) no 1301/2013, (UE) no 1303/2013, (UE) no 1304/2013, (UE) no 1309/2013, (UE) no 1316/2013, (UE) no 223/2014, (UE) no 283/2014 et la décision no 541/2014/UE, et abrogeant le règlement (UE, Euratom) no 966/2012 (JO 2018, L 193, p. 1), conditions qui régissaient l’octroi d’un paiement échelonné et parmi lesquelles figurait la constitution d’une garantie financière.

    8        À la suite du remboursement direct, par les autres membres du consortium, d’un montant total de 1 111 601,12 euros, au mois de juin 2019, la somme due au principal par la requérante a été ramenée à 5 951 772,39 euros.

    9        Par un courriel du 27 juin 2019, la Commission a accordé à la requérante un plan de paiement échelonné sur douze mois à condition qu’un premier paiement de 994 211,20 euros soit effectué le 15 janvier 2020 au plus tard et qu’une garantie financière soit constituée. À cette fin, la Commission invitait la requérante à produire cette garantie afin que ce plan de paiement puisse entrer en vigueur. Cette dernière ayant, par un courriel du 12 août 2019, informé la Commission du refus de sa banque de constituer ladite garantie et n’ayant pas payé la somme due au titre de la note de débit dans le délai prescrit, la Commission lui a envoyé une lettre de rappel le 19 septembre 2019.

    10      En raison du défaut de paiement de cette somme par la requérante, la Commission a exigé, par une lettre de mise en demeure du 24 octobre 2019, le paiement immédiat du principal exigible, majoré des intérêts de retard. Cette lettre indiquait que, en cas de non-remboursement de ladite somme dans un délai de quinze jours, la Commission procéderait au recouvrement forcé de la créance principale et des intérêts.

    11      Entre le mois de janvier et le mois de décembre 2020, la Commission et la requérante ont été en contact à plusieurs reprises au sujet de la demande de cette dernière d’obtenir un nouveau report du remboursement de sa dette au titre de la note de débit et de la décision de la première de continuer la procédure de recouvrement forcé.

    12      Entre le mois de juin et le mois de décembre 2020, la requérante a effectué trois paiements partiels de 100 000 euros et elle a, par un courriel du 30 décembre 2020, présenté une demande d’échelonnement du remboursement de cette dette par tranches annuelles d’un million d’euros sur six ans (ci-après la « dernière demande d’échelonnement »). Dans ce courriel, la requérante a fait une nouvelle proposition de plan de remboursement et s’est engagée à effectuer un paiement de 500 000 euros au mois de juin 2021, puis un paiement d’une somme identique tous les six mois.

    13      Par un courriel du 5 janvier 2021 (ci-après le « courriel du 5 janvier 2021 »), la Commission a accusé réception dudit courriel du 30 décembre 2020 et a indiqué qu’elle allait recontacter la requérante.

    14      Après avoir, le 29 septembre 2021, encaissé un paiement de 250 000 euros de la part de la requérante, la Commission a, le 28 octobre 2021, adopté la décision litigieuse. L’article 3 de cette décision indique que, si la requérante, en tant que débitrice, n’exécute pas entièrement le paiement dans un délai de quinze jours à compter de la réception de ladite décision, il sera procédé à l’exécution forcée sur le fondement de l’article 299, troisième alinéa, TFUE.

     La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

    15      Par un acte déposé au greffe du Tribunal le 13 janvier 2022, la requérante a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse.

    16      À l’appui de ce recours, la requérante a soulevé quatre moyens, tirés, le premier, de l’erreur matérielle résultant de la non-prise en compte de la dernière demande d’échelonnement et de l’insuffisance de motivation de la décision litigieuse, le deuxième, de la violation des principes de protection de la confiance légitime et de sécurité juridique, le troisième, de la violation des droits de la défense, du droit d’être entendu et du principe de bonne administration ainsi que, le quatrième, de la violation du principe de proportionnalité et de l’objectif de protection effective des intérêts financiers de l’Union.

    17      Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté ces quatre moyens comme étant non fondés. Seuls les deuxième et troisième moyens sont pertinents pour l’appréciation des moyens soulevés dans le présent pourvoi.

    18      S’agissant du deuxième moyen, le Tribunal a estimé que, même si, par son courriel du 5 janvier 2021, la Commission avait pu, en indiquant à la requérante qu’elle la recontacterait « dès que possible », créer une attente de réponse de la part de la Commission, ce courriel ne pouvait être interprété comme fournissant l’assurance que la Commission donnerait une suite favorable à la dernière demande d’échelonnement. Par conséquent, selon le Tribunal, la requérante était en mesure de prévoir que sa nouvelle proposition de plan de remboursement n’aboutirait pas, et ce notamment en raison du fait qu’elle n’avait pas apporté la garantie financière sollicitée par la Commission. Le Tribunal a, dès lors, jugé que la Commission n’avait pas créé d’attentes précises, inconditionnelles et concordantes en ce qui concernait la possibilité d’accorder des facilités de paiement.

    19      S’agissant du troisième moyen, d’une part, le Tribunal a indiqué que les documents fournis au cours de la procédure et l’examen des deux premiers moyens démontraient que la requérante avait pu faire connaître de manière utile et effective son point de vue à de nombreuses reprises préalablement à l’adoption de la décision litigieuse. D’autre part, s’agissant de la dernière demande d’échelonnement, le Tribunal a considéré que, compte tenu des circonstances de l’espèce, la Commission n’était pas tenue d’entendre de nouveau la requérante avant d’adopter la décision litigieuse.

     Les conclusions des parties au pourvoi

    20      Par son pourvoi, la requérante demande à la Cour :

    –        de déclarer le pourvoi recevable et fondé ;

    –        d’annuler l’arrêt attaqué ;

    –        de statuer définitivement sur le fond, conformément à l’article 61 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, et, à titre principal, de faire droit à ses conclusions en première instance, ou, à titre subsidiaire, d’annuler l’article 3 de la décision litigieuse en ce qu’elle prévoit le recours à l’exécution forcée ;

    –        à titre encore plus subsidiaire, de renvoyer l’affaire devant le Tribunal, et

    –        de condamner la Commission aux dépens.

    21      La Commission demande à la Cour :

    –        de rejeter le pourvoi dans son ensemble comme étant non fondé et

    –        de condamner la requérante aux dépens de la procédure.

     Sur le pourvoi

    22      À l’appui de son pourvoi, la requérante invoque deux moyens. Le premier est tiré d’une erreur de droit et d’une dénaturation des faits dans l’appréciation, par le Tribunal, de la violation du principe de protection de la confiance légitime. Le second moyen est pris d’une erreur de droit et d’une dénaturation des faits dans l’appréciation, par le Tribunal, de la violation des droits de la défense et du droit d’être entendu.

     Sur le premier moyen

     Argumentation des parties

    23      Par son premier moyen, la requérante fait valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit et une dénaturation des faits dans l’appréciation de la violation du principe de protection de la confiance légitime.

    24      La requérante considère que, comme elle l’a indiqué dans son recours devant le Tribunal, les éléments communiqués par la Commission le 5 janvier 2021 étaient suffisamment précis pour faire naître des espérances fondées que cette dernière allait donner suite à ses propositions.

    25      En outre, le point 81 de l’arrêt attaqué serait entaché d’une contradiction. Dès lors que, à ce point, le Tribunal a admis que l’indication par la Commission, dans le courriel du 5 janvier 2021, qu’elle recontacterait la requérante « dès que possible » avait pu créer une attente de réponse de la part de la Commission, il aurait dû en déduire que la requérante était fondée à s’attendre à échanger avec la Commission avant l’adoption de la décision litigieuse.

    26      La Commission conteste l’argumentation de la requérante et conclut au rejet du premier moyen.

     Appréciation de la Cour

    27      S’agissant de l’allégation selon laquelle le Tribunal aurait commis une dénaturation des faits, il convient de rappeler que, lorsqu’il allègue une dénaturation des faits ou des éléments de preuve par le Tribunal, un requérant doit, en application de l’article 256 TFUE, de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 168, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure de la Cour, indiquer de façon précise les éléments qui auraient été dénaturés par celui-ci et démontrer les erreurs d’analyse qui, dans son appréciation, auraient conduit le Tribunal à cette dénaturation. Par ailleurs, il est de jurisprudence constante qu’une dénaturation doit ressortir de façon manifeste des pièces du dossier, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves (arrêt du 28 avril 2022, Yieh United Steel/Commission, C‑79/20 P, EU:C:2022:305, point 53 et jurisprudence citée).

    28      En l’espèce, bien que la requérante invoque une dénaturation des faits par le Tribunal, elle n’indique, dans son pourvoi, ni quels sont les faits que le Tribunal aurait dénaturés ni en quoi consisterait précisément cette dénaturation.

    29      Il s’ensuit que cette allégation de la requérante doit être écartée.

    30      S’agissant de l’allégation selon laquelle le Tribunal a commis une erreur de droit dans l’appréciation de la violation du principe de protection de la confiance légitime, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constance, le droit de se prévaloir de ce principe suppose que des assurances précises, inconditionnelles et concordantes, émanant de sources autorisées et fiables, ont été fournies à l’intéressé par les autorités compétentes de l’Union. En effet, ce droit appartient à tout justiciable dans le chef duquel une institution, un organe ou un organisme de l’Union, en lui fournissant des assurances précises, a fait naître à son égard des espérances fondées (arrêt du 19 juillet 2016, Kotnik e.a., C‑526/14, EU:C:2016:570, point 62 ainsi que jurisprudence citée).

    31      Premièrement, l’argument par lequel la requérante soutient que, comme elle l’a indiqué dans son recours devant le Tribunal, les éléments communiqués par la Commission le 5 janvier 2021 étaient suffisamment précis pour faire naître, dans le chef de la requérante, des espérances fondées que cette institution allait donner suite à ses propositions doit être rejeté comme étant irrecevable.

    32      En effet, ne répond pas aux exigences de motivation résultant de l’article 168, paragraphe 1, sous d), et de l’article 169, paragraphe 2, du règlement de procédure un pourvoi qui se limite à répéter ou à reproduire textuellement les moyens et les arguments qui ont été présentés devant le Tribunal (arrêt du 17 décembre 2020, Allemagne/Commission, C‑475/19 P et C‑688/19 P, EU:C:2020:1036, point 33).

    33      Deuxièmement, force est de constater que, contrairement à ce que la requérante soutient, le point 81 de l’arrêt attaqué n’est entaché d’aucune contradiction ou erreur de droit.

    34      En effet, bien qu’une indication isolée telle que celle figurant dans le courriel du 5 janvier 2021, selon laquelle la Commission recontacterait la requérante « dès que possible », puisse, comme le Tribunal l’a relevé à ce point 81, créer une attente de réponse de la part de la Commission, une telle indication ne saurait, au regard de la jurisprudence rappelée au point 30 du présent arrêt, être interprétée comme fournissant l’assurance que la Commission répondrait à la requérante et lui permettrait d’échanger avec elle avant l’adoption de la décision litigieuse. Cette indication donnée par la Commission constitue une simple formule de politesse dont la requérante ne pouvait inférer qu’elle donnerait lieu à d’autres échanges avec la Commission avant l’adoption de cette décision. En outre, ainsi que le Tribunal l’a considéré à juste titre audit point 81, ladite indication ne saurait être interprétée comme fournissant l’assurance que la Commission donnerait une suite favorable à la dernière demande d’échelonnement.

    35      Par conséquent, l’allégation de la requérante selon laquelle le Tribunal a commis une erreur de droit dans l’appréciation de la violation du principe de protection de la confiance légitime doit également être écartée.

    36      Il résulte de l’ensemble de ces considérations que le premier moyen doit être rejeté.

     Sur le second moyen

     Argumentation des parties

    37      Par son second moyen, la requérante fait valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit ainsi qu’une dénaturation des faits dans l’appréciation de la violation des droits de la défense et du droit d’être entendu.

    38      Premièrement, contrairement à ce que le Tribunal a indiqué au point 98 de l’arrêt attaqué, il aurait été possible, pour la Commission, d’entendre de nouveau la requérante sans pour autant devoir reporter la clôture de la procédure administrative et la requérante aurait dû avoir la possibilité de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue, dès lors que dix mois s’étaient écoulés entre la date de la dernière communication entre les parties et celle de l’adoption de la décision litigieuse.

    39      Deuxièmement, en étayant son raisonnement par le caractère peu crédible de la nouvelle proposition de plan de remboursement présentée par la requérante sans tenir compte, pour apprécier l’existence d’une possible violation du droit d’être entendu et de l’article 41, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), du fait qu’une période de dix mois s’était écoulée entre la date de la dernière communication de la requérante avec la Commission et celle de l’adoption de la décision litigieuse, le Tribunal aurait dénaturé les faits et commis une erreur de droit.

    40      La Commission conteste l’argumentation de la requérante et conclut au rejet du second moyen.

     Appréciation de la Cour

    41      S’agissant, en premier lieu, de l’allégation selon laquelle le Tribunal aurait commis une dénaturation des faits, force est de constater que, dans son pourvoi, la requérante n’indique ni quels sont les faits que le Tribunal aurait dénaturés ni en quoi consisterait précisément cette dénaturation.

    42      Il s’ensuit que, en application de la jurisprudence citée au point 27 du présent arrêt, cette allégation de la requérante doit être écartée.

    43      S’agissant, en second lieu, de la prétendue violation du droit d’être entendu et de l’article 41, paragraphe 2, de la Charte, il y a lieu de rappeler que ce droit garantit à toute personne la possibilité de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours de la procédure administrative et avant l’adoption de toute décision susceptible d’affecter de manière défavorable ses intérêts (arrêt du 12 mai 2022, Boshab/Conseil, C‑242/21 P, EU:C:2022:375, point 58 et jurisprudence citée) et que cet article 41, paragraphe 2, sous a), dispose que le droit à une bonne administration comporte notamment le droit de toute personne d’être entendue avant qu’une mesure individuelle qui l’affecterait défavorablement ne soit prise contre elle.

    44      Premièrement, l’argument de la requérante visant le point 98 de l’arrêt attaqué repose sur une lecture erronée de ce point. En effet, le Tribunal a considéré que, en l’espèce, la Commission pouvait adopter la décision litigieuse sans entendre de nouveau la requérante, mais il ne s’est pas prononcé sur la question de savoir s’il était possible, pour la Commission, d’entendre de nouveau la requérante sans pour autant devoir reporter la clôture de la procédure administrative.

    45      En outre et en tout état de cause, la requérante n’a pas démontré que, contrairement à l’appréciation du Tribunal, le droit d’être entendu et l’article 41, paragraphe 2, de la Charte exigent, par principe, qu’une personne soit entendue juste avant l’adoption d’une décision susceptible d’affecter de manière défavorable ses intérêts, alors même que cette personne a déjà été entendue à de nombreuses reprises au cours de la procédure administrative menant à l’adoption d’une telle décision.

    46      Deuxièmement, l’argument selon lequel le Tribunal aurait indûment limité la portée du droit d’être entendu et aurait, de ce fait, commis une erreur de droit, en s’appuyant, au point 99 de l’arrêt attaqué, sur le caractère peu crédible de la nouvelle proposition de plan de remboursement présentée par la requérante, doit être écarté.

    47      En effet, la requérante n’a pas démontré que le droit d’être entendu et l’article 41, paragraphe 2, de la Charte exigent, dans une situation telle que celle en cause en l’espèce, qu’une personne qui a déjà été entendue à de nombreuses reprises au cours d’une procédure administrative soit de nouveau entendue chaque fois qu’elle soumettrait une telle proposition à la Commission.

    48      En outre, ainsi qu’il ressort des points 94 à 99 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré que la requérante avait eu la possibilité de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue avant l’adoption de la décision litigieuse et n’a mentionné le caractère peu crédible de la nouvelle proposition de plan de remboursement présentée par la requérante qu’afin de rejeter un argument de celle-ci.

    49      Troisièmement, contrairement à ce que la requérante fait valoir, il découle des motifs figurant à ces points 94 à 99 que le Tribunal a pris en compte le fait que la décision litigieuse a été adoptée dix mois après la date de la dernière communication entre les parties.

    50      En outre, la requérante n’a pas démontré que le droit d’être entendu et l’article 41, paragraphe 2, de la Charte exigent, par principe, qu’une personne qui a déjà été entendue à de nombreuses reprises au cours d’une procédure administrative soit de nouveau entendue juste avant l’adoption d’une décision susceptible d’affecter de manière défavorable ses intérêts lorsqu’une période d’une telle durée s’est écoulée entre la date de la dernière communication entre les parties et celle de l’adoption d’une telle décision.

    51      Par conséquent, l’allégation de la requérante relative à une violation du droit d’être entendu et de l’article 41, paragraphe 2, de la Charte doit également être écartée.

    52      Eu égard aux considérations qui précèdent, le second moyen et, partant, le pourvoi dans son ensemble doivent être rejetés.

     Sur les dépens

    53      En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens.

    54      Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui–ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

    55      En l’espèce, la requérante ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission, conformément aux conclusions de cette dernière.

    Par ces motifs, la Cour (septième chambre) déclare et arrête :

    1)      Le pourvoi est rejeté.

    2)      La Compagnie industrielle de la matière végétale (CIMV) est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission européenne.

    Biltgen

    Wahl

    Passer


    Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 25 avril 2024.

    Le greffier

     

    Le président de chambre

    A. Calot Escobar

     

    F. Biltgen


    *      Langue de procédure : le français.

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