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Document 61996TJ0176

Hotărârea Tribunalului de Primă Instanță din data de 13 ianuarie 1998.
Cornelis Volger împotriva Parlamentului European.
Funcționari - Acțiune în anulare - Admisibilitate.
Cauza T-176/96.

ECLI identifier: ECLI:EU:T:1998:1

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

13 janvier 1998 ( *1 )

«Fonctionnaires — Recours en annulation — Recevabilité — Décision de mise en disponibilité — Article 41 du statut — Devoir de sollicitude»

Dans l'affaire T-176/96,

Cornells Volger, fonctionnaire du Parlement européen en position de disponibilité, demeurant à Heffingen (Luxembourg), représenté par Mes Jean-Noël Louis, Thierry Demaseure et Ariane Tornei, avocats au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de la fiduciaire Myson SARL, 30, rue de Cessange,

partie requérante,

contre

Parlement européen, représenté par M. Manfred Peter, chef de division, et Mme Evelyn Waldherr, membre du service juridique, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg au secrétariat général du Parlement européen, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d'annulation, d'une part, de la décision du Parlement, du 1er décembre 1995, de mettre le requérant en disponibilité à compter du 30 novembre 1995 ainsi que de toutes les décisions subséquentes et connexes adoptées en exécution de cette décision et, d'autre part, de la décision du Parlement, du 3 septembre 1996, portant modification au 31 janvier 1996 de la date de prise d'effet de la décision du 1er décembre 1995,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (première chambre),

composé de MM. A. Saggio, président, B. Vesterdorf et R. M. Moura Ramos, juges,

greffier: M. H. Jung,

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 19 novembre 1997,

rend le présent

Arrêt

Contexte réglementaire

1

Aux termes de l'article 41, paragraphes 1 à 3, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après «statut»):

«1.

La disponibilité est la position du fonctionnaire touché par une mesure de réduction du nombre des emplois dans son institution.

2.

La réduction du nombre des emplois dans un grade est décidée par l'autorité budgétaire compétente dans le cadre de la procédure budgétaire.

L'autorité investie du pouvoir de nomination, après avis de la commission paritaire, détermine la nature des emplois qui seront affectés par cette mesure.

L'autorité investie du pouvoir de nomination fixe la liste des fonctionnaires touchés par cette mesure après avis de la commission paritaire et en prenant en considération la compétence, le rendement, la conduite dans le service, la situation de famille et l'ancienneté des fonctionnaires. Tout fonctionnaire occupant un des emplois visés à l'alinéa ci-dessus et qui exprimerait le désir d'être mis en disponibilité est inscrit d'office sur cette liste.

Les fonctionnaires figurant sur cette liste sont mis en disponibilité par décision de l'autorité investie du pouvoir de nomination.

3.

Dans cette position, le fonctionnaire cesse d'exercer ses fonctions et de bénéficier de ses droits à la rémunération et à l'avancement d'échelon, mais continue, pendant une période ne pouvant excéder cinq années, à acquérir de nouveaux droits à pension d'ancienneté sur la base du traitement afférent à son grade et à son échelon.

Pendant une durée de deux ans, à compter de sa mise en disponibilité, ce fonctionnaire a un droit de priorité pour être réintégré dans tout emploi de sa catégorie ou de son cadre correspondant à son grade, qui deviendrait vacant ou viendrait à être créé, sous réserve qu'il possède les aptitudes requises.

Le fonctionnaire mis en disponibilité bénéficie d'une indemnité calculée dans les conditions fixées à l'annexe IV.

[...]»

Faits à l'origine du litige

2

Par lettre du 21 mars 1995, le directeur général de la direction générale du personnel, du budget et des finances du Parlement (DG 5) informait le requérant que l'institution avait décidé d'appliquer l'article 41 du statut à plusieurs fonctionnaires et que l'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après «AIPN») envisageait la suppression de son poste.

3

Dans cette même lettre, le requérant était invité à faire savoir, avant le 3 avril 1995, s'il était volontaire pour une mise en disponibilité, conformément aux dispositions de l'article 41, paragraphe 2, troisième alinéa, du statut. En cas de réponse positive ou en l'absence de réponse à la date indiquée, il était précisé qu'il serait inscrit d'office sur la liste des fonctionnaires affectés par la mesure de réduction du nombre des emplois. En cas de réponse négative, il était invité à faire part, avant le 3 avril 1995, de ses observations, sur la base desquelles il était prévu que l'AIPN, après avis de la commission paritaire et du comité des rapports, adopterait soit une décision de mise en disponibilité, soit une décision de réaffectation.

4

Le 30 mars 1995, le requérant a fait savoir qu'il ne s'opposait pas à la suppression de son poste, «pour autant que [ses] intérêts personnels ne soient pas mis en cause». Dans cette optique, il proposait que la mise en disponibilité n'intervienne qu'à la fin de l'année budgétaire et que son institution le dispense d'exercer ses fonctions à moins qu'une promotion ne lui soit, entre-temps, accordée.

5

Par lettre du 26 avril 1995, le directeur général de la DG 5 accusait réception de la réponse du requérant et l'informait, d'une part, de ce qu'il serait proposé que l'article 41 du statut lui soit appliqué à compter du 1er décembre 1995 et, d'autre part, qu'il était impossible de le libérer de l'obligation d'exercer ses fonctions avant la date effective de mise en disponibilité, conformément à l'article 55 du statut, sauf s'il prenait congé ou demandait à bénéficier d'un congé de convenance personnelle.

6

Par lettre du 30 octobre 1995 adressée au président du comité du personnel, le requérant indiquait avoir appris que, «lors d'une réunion récente de la commission paritaire, il [avait] été affirmé [qu'il serait] inconditionnellement volontaire pour une mise en disponibilité selon l'article 41 du statut». Il poursuivait en précisant qu'une telle affirmation était fausse et qu'il n'était pas volontaire pour une mise en disponibilité.

7

Le 24 novembre 1995, après avoir reçu une «communication (‘mededeling’ en néerlandais) aux fonctionnaires et agents temporaires qui cessent définitivement leurs fonctions», le requérant a écrit à M. A. du service des pensions de la division des affaires sociales au sein de la DG 5 en ces termes:

«Comme j'ai déclaré ne pas être inconditionnellement volontaire à être mis. éventuellement, en disponibilité, je vous serais reconnaissant de bien vouloir me faire savoir sur quelle décision se base l'envoi de cette mededeling.»

8

Par lettre du 28 novembre 1995, le chef de la division du personnel a écrit au requérant pour lui confirmer les termes de la lettre du 26 avril 1995 et lui signaler que, après avoir recueilli l'avis de la commission paritaire et du comité des rapports, l'administration avait proposé à l'AIPN sa mise en disponibilité à compter du 1er décembre 1995. Il y était également précisé que la décision formelle lui serait communiquée dès son adoption.

9

Par lettre du 27 décembre 1995, réceptionnée le 8 janvier 1996, le Parlement a notifié au requérant sa décision datée du 1er décembre 1995 relative à sa mise en disponibilité «à compter du 30 novembre 1995 au soir» et son admission au bénéfice de l'indemnité prévue à l'annexe IV du statut à compter du 1er décembre 1995 (ci-après «décision du 1er décembre 1995»).

10

Par note du 9 janvier 1996, contresignée par le contrôleur financier le 17 janvier suivant, le service des pensions a fixé les droits du requérant en application de l'article 41 du statut.

11

Le 1er avril 1996, le requérant a introduit une réclamation au sens de l'article 90, paragraphe 2, du statut contre la décision du 1er décembre 1995 et contre toutes les décisions subséquentes et connexes (ci-après «réclamation»).

12

Le 10 septembre 1996. le chef du service «statut et gestion du personnel» de la division du personnel au sein de la DG 5 a adressé une lettre au requérant l'informant que l'AIPN avait décidé, à «la suite de la décision de l'autorité budgétaire de proroger sur l'exercice 1996 les possibilités d'application de l'article 41 du statut [...] qui avaient été décidées pour 1995 et compte tenu de [sa] réclamation relative à la date de prise d'effet de la décision de mise en disponibilité [le] concernant», de modifier la décision du 1er décembre 1995«pour la rendre effective à compter du premier jour suivant sa notification, à savoir le 1er février 1996».

13

La décision du Parlement du 3 septembre 1996 annexée à cette lettre, dispose:

«Article premier:

La prise d'effet de la décision de mise en disponibilité de M. Cornells Volger est fixée au 31 janvier 1996 au soir. A compter du 1er février 1996, l'intéressé est donc admis au bénéfice de l'indemnité prévue à l'annexe IV du statut et le poste no II/A/1632 est supprimé.

Article 2:

La décision du 1er décembre 1995 est modifiée en conséquence.»

14

Le 18 novembre 1996, le requérant a introduit une réclamation au sens de l'article 90, paragraphe 2, du statut contre la décision du 3 septembre 1996. Le Parlement a rejeté cette réclamation par décision du 9 janvier 1997.

Procédure

15

Par requête déposée au greffe du Tribunal le 4 novembre 1996, le requérant a introduit le présent recours.

16

Le 18 novembre 1996, le conseil du requérant a sollicité une demande de suspension de la procédure dans l'attente de la décision du Parlement en réponse à sa réclamation, introduite ce même jour contre la décision du 3 septembre 1996. Cette demande de suspension a été retirée après que le Parlement a rejeté ladite réclamation le 9 janvier 1997.

17

Le requérant n'ayant pas déposé de réplique dans le délai imparti, la procédure écrite s'est terminée le 28 janvier 1997.

18

Par requête déposée au greffe du Tribunal le 11 avril 1997, le requérant a introduit un recours, enregistré sous le numéro T-108/97, ayant pour objet une demande d'annulation de la décision du Parlement du 3 septembre 1996 de le mettre en disponibilité avec effet au 31 janvier 1996.

19

Par ordonnance du 17 juillet 1997, le président de la troisième chambre du Tribunal a décidé de joindre les affaires T-176/96 et T-108/97 aux fins de la procédure orale et de l'arrêt.

20

Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (première chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale dans les affaires jointes T-176/96 et T-108/97 sans procéder à des mesures d'instruction préalables. Dans le cadre des mesures d'organisation de la procédure prévues par l'article 64 du règlement de procédure, le Tribunal a toutefois posé certaines questions écrites à la partie défenderesse et lui a demandé de produire les décisions de mise en disponibilité adoptées en 1995. La partie défenderesse a répondu aux questions et a produit les documents demandés dans le délai qui lui était imparti.

21

Lors de la procédure orale qui s'est déroulée le 19 novembre 1997, le requérant s'est désisté de son recours dans l'affaire T-108/97.

22

Par ordonnance du 4 décembre 1997, le président de la première chambre du Tribunal a radié l'affaire T-108/97 du registre du Tribunal.

Conclusions des parties

23

La partie requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

annuler la décision du 1er décembre 1995 de mettre le requérant en disponibilité à compter du 30 novembre 1995, ainsi que toutes les décisions connexes et subséquentes;

pour autant que de besoin, annuler la décision du 3 septembre 1996 fixant au 1er février la date de prise d'effet de la décision du 1er décembre 1995;

condamner la partie défenderesse aux dépens.

24

Le Parlement conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

déclarer qu'il n'y a pas lieu de statuer;

pour autant que de besoin, rejeter le recours comme non fondé;

statuer sur les dépens comme de droit.

Sur la recevabilité

Arguments des parties

25

Le requérant soutient que l'acte faisant grief est la décision du 1er décembre 1995 le plaçant en position de disponibilité en application de l'article 41 du statut.

26

La réclamation dirigée contre cet acte aurait été partiellement accueillie. En effet, par décision du 3 septembre 1996, 1'AIPN aurait modifié la date de prise d'effet de la décision du 1er décembre 1995 en la fixant au 31 janvier 1996. L'AIPN aurait cependant rejeté la réclamation en ce qu'elle visait au retrait de la décision du 1er décembre 1995.

27

Le requérant estime qu'il est également recevable à attaquer la décision du 3 septembre 1996 sans procédure précontentieuse préalable car elle modifie une décision antérieure ayant le même objet. La nouvelle décision ne serait donc qu'un élément nouveau dont le requérant pourrait tenir compte pour adapter ses conclusions et moyens (arrêt de la Cour du 3 mars 1982, Alpha Steel/Commission, 14/81, Rec. p. 749, point 8).

28

Selon le Parlement, la décision du 3 septembre 1996 accueille la réclamation du réclamant. En effet, la réclamation aurait été essentiellement dirigée contre l'effet rétroactif de la décision du 1er décembre 1995 et le requérant n'aurait eu aucunement l'intention de contester la décision de le mettre en disponibilité en tant que telle. La réclamation n'ayant pas fait l'objet d'une décision de rejet, les conditions de recevabilité prévues par l'article 91, paragraphe 2, du statut ne seraient pas remplies.

29

De plus, la décision du 3 septembre 1996 ayant donné entièrement satisfaction au requérant, celui-ci n'aurait plus d'intérêt à agir, l'objet du recours aurait disparu et il n'y aurait donc plus lieu de statuer (ordonnance du Tribunal du 25 octobre 1993, B./Commission, T-41/93. Rec. p. II-1037, point 19). Le Parlement soutient, poulies mêmes raisons, que la décision du 3 septembre 1996 ne constitue pas un acte faisant grief.

30

Toutefois, le Parlement estime que, au cas où la décision du 3 septembre 1996 serait interprétée comme un rejet partiel de la réclamation, il ne devrait pas être tenu compte des arguments du requérant concernant la rétroactivité de la décision du 1er décembre 1995 et des allégations liées puisque celles-ci seraient dépourvues d'objet.

Appréciation du Tribunal

31

Selon l'article 91, paragraphe 2, du statut, un recours n'est recevable que si la réclamation, dont a été préalablement saisie 1'AIPN, a fait l'objet d'une décision explicite ou implicite de rejet.

32

En l'espèce, le recours a pour objet une demande d'annulation de la décision du 1er décembre 1995 et de la décision du 3 septembre 1996. Cette dernière décision a été adoptée après une décision implicite de rejet de la réclamation, survenue à l'expiration du délai de quatre mois prévu à l'article 90 du statut, mais dans le délai de recours de trois mois prévu par l'article 91, paragraphe 3, du statut et avant l'introduction du présent recours.

33

II y a donc lieu de vérifier si la décision du 3 septembre 1996 constitue bien un acte attaquable ou bien si elle se borne à confirmer la décision implicite de rejet qui l'a précédée.

34

A cette fin, il convient, au préalable, de circonscrire l'objet de la réclamation. En particulier, il doit être vérifié si, comme le soutient le Parlement, la réclamation n'avait pas pour objet le retrait de la décision de mise en disponibilité mais visait essentiellement à contester l'effet rétroactif de la décision du 1er décembre 1995.

35

A cet égard, il y a lieu de constater que la réclamation (point 22) indiquait qu'elle était «dirigée contre la décision de l'AIPN adoptée le 1er décembre 1995, et communiquée au réclamant le 8 janvier 1996. de le mettre en disponibilité en application de l'article 41 du statut avec effet rétroactif au 30 novembre 1995». Le réclamant concluait à ce qu'il plût à l'AIPN «retirer sa décision du 1er décembre 1995 de le mettre en disponibilité à compter du 30 novembre 1995 au soir, ainsi que toutes les décisions connexes et subséquentes».

36

Au vu de ces éléments, le Tribunal considère que la réclamation avait pour objet principal le retrait de la décision, fondée sur l'article 41 du statut, de mettre le requérant en position de disponibilité. Il convient d'ailleurs de souligner que la motivation de la réclamation relative à la rétroactivité de la décision du 1er décembre 1995 constituait une argumentation développée au soutien de cette conclusion.

37

Il s'ensuit que l'AIPN, par la décision du 3 septembre 1996, n'a pas donné entièrement satisfaction au requérant. En effet, par cette décision, l'AIPN a modifié la date de prise d'effet de la décision du 1er décembre 1995 mais n'a pas retiré la décision de mettre le requérant en position de disponibilité. La décision du 3 septembre 1996 porte donc rejet explicite partiel de la réclamation.

38

En conséquence, l'objet du recours n'a pas totalement disparu car la décision du 1er décembre 1995 n'a pas été remplacée par une nouvelle décision donnant entièrement satisfaction au requérant (ordonnance B./Commission, précitée, point 19) mais a seulement été modifiée en tenant compte de la contestation par le requérant de la date de prise d'effet de la décision de mise en disponibilité.

39

Le Tribunal relève que la réclamation et le recours ont été introduits dans les délais statutaires.

40

En conséquence, le recours, pour autant qu'il vise à contester la légalité de la décision du 1er décembre 1995 de placer le requérant en position de disponibilité, est recevable.

41

La décision du 3 septembre 1996 ayant constitué une réponse positive aux griefs soulevés dans la réclamation relatifs au caractère rétroactif de la décision du 1er décembre 1995, les arguments de la partie requérante concernant ces griefs invoqués dans le cadre du présent recours sont dépourvus d'objet.

Sur le fond

Sur le moyen tiré de la violation de l'article 25 du statut, des principes de confiance légitime, de non-rétroactivité et de sécurité juridique

Arguments des parties

42

Le requérant, invoquant les dispositions de l'article 25, deuxième et troisième alinéas, du statut et l'arrêt de la Cour du 13 novembre 1990, Fedesa e.a. (C-331/88, Rec. p. I-4023, point 45), soutient qu'un acte communautaire ne peut, en application du principe de la sécurité des situations juridiques, voir son point de départ fixé à une date antérieure à sa publication. En vertu de ce principe, toute décision individuelle relative à la fixation de la position administrative et à la cessation des fonctions d'un fonctionnaire devrait faire l'objet d'un affichage immédiat et être communiquée par écrit et sans délai au fonctionnaire intéressé. Dans ce contexte, il fait valoir que la cessation de ses fonctions n'a été portée à la connaissance du personnel que dans le Bulletin mensuel du personnel des Communautés du mois de février 1996. A la lumière de ces considérations, le requérant souligne que la décision adoptée le 1er décembre 1995 a pris effet le 30 novembre précédent, sans que cela ait été expliqué, et a été réceptionnée le 8 janvier 1996. Le fait que cette décision a sorti ses effets trente-neuf jours avant qu'il en ait pris connaissance constituerait une violation du principe de sécurité juridique (arrêt du Tribunal du 16 décembre 1993, Turner/Commission, T-80/92, Rec. p. II-1465).

43

Quant à la décision du 3 septembre 1996, elle démontrerait que le Parlement, en modifiant sa décision du 1er décembre 1995, a voulu corriger l'effet rétroactif de celle-ci.

44

La décision du 3 septembre 1996 aurait également modifié avec effet rétroactif la situation juridique du requérant puisque cette décision a été rendue effective plus de sept mois avant son adoption, sans que le Parlement en explique la raison.

45

En outre, la décision de l'AIPN du 3 septembre 1996 et la lettre du 10 septembre 1996 seraient entachées d'un défaut de motivation car elles ne permettraient pas de vérifier si l'autorité budgétaire a prorogé sur l'exercice 1996 les possibilités d'application de l'article 41 du statut dans le respect des dispositions énoncées aux articles 203 et suivants du traité CE.

46

Le Parlement rétorque que la décision du 3 septembre 1996 n'a pas modifié la situation juridique du requérant. En effet, cette décision aurait seulement visé à éviter que la décision du 1er décembre 1995 ne produisît des effets à une date antérieure à sa notification à l'intéressé. A cette fin, la date de prise d'effet de la décision de mise en disponibilité aurait été reportée à un moment où le requérant connaissait cette décision.

47

De plus, le Parlement conteste qu'il ait existé une confiance légitime quelconque dans le chef du requérant. Il considère enfin que la décision du 3 septembre 1996 est suffisamment motivée.

Appréciation du Tribunal

48

Le Tribunal relève que les griefs tirés respectivement de l'effet rétroactif de la décision du 1er décembre 1995 et de la publication tardive dans le Bulletin mensuel du personnel des Communautés (voir point 42 ci-dessus) sont dépourvus d'objet, l'AIPN ayant fixé au 1er février 1996 la date de prise d'effet de la décision du 1er décembre 1995.

49

Le requérant fait, par ailleurs, valoir que la décision du 3 septembre 1996 a modifié sa situation juridique avec effet rétroactif et sans motivation.

50

A cet égard, il suffit de relever que la décision du 3 septembre 1996 ne constitue pas une nouvelle décision de mise en disponibilité, ce que reconnaît d'ailleurs le requérant en soulignant que le Parlement a voulu corriger l'effet rétroactif de sa décision du 1er décembre 1995 en adoptant la décision du 3 septembre 1996 (voir point 43 ci-dessus). Dès lors, en adoptant la décision du 3 septembre 1996, l'AIPN n'a pas modifié la situation juridique du requérant mais s'est limitée à modifier la date à partir de laquelle la position de disponibilité est devenue effective.

51

De plus, le grief selon lequel la décision du 3 septembre 1996 ne serait pas suffisamment motivée, pour autant qu'elle produit des effets rétroactifs, est dépourvu de fondement.

52

En effet, le Parlement n'était pas tenu de motiver le fait que la nouvelle date de prise d'effet n'avait pas été fixée à une date postérieure à l'adoption de la décision du 3 septembre 1996. Dans ce contexte, il doit être rappelé que la décision du 3 septembre 1996 est un acte qui fait suite à une réclamation critiquant notamment le caractère rétroactif de la décision du 1er décembre 1995. Cela ressort de la lettre du 10 septembre 1996 accompagnant la décision du 3 septembre 1996 qui explique le motif du choix de la nouvelle date de prise d'effet de la décision de mise en disponibilité du requérant. Selon cette lettre, «compte tenu de [la] réclamation relative à la date de prise d'effet de la décision de mise en disponibilité concernant [le réclamant], l'AIPN a décide de modifier certe décision pour la rendre effective à compter du premier jour suivant sa notification, à savoir le 1er février 1996».

53

La lettre du 10 septembre 1996 fournit également des explications suffisantes concernant le fait que l'autorité budgétaire a prorogé sur l'exercice 1996 les possibilités d'application de l'article 41 du statut (voir point 12 ci-dessus).

54

Enfin, le requérant n'est pas fondé à invoquer la violation du principe de la confiance légitime. Il suffit, à cet égard, de constater que le requérant n'a reçu de l'administration aucune assurance quant au retrait de la décision de mise en disponibilité du 1er décembre 1995.

55

Le moyen doit donc être rejeté comme non fondé.

Sur le moyen tiré de la violation de l'article 41 du statut et du devoir de sollicitude

Arguments des parties

56

Le requérant estime que la décision du 1er décembre 1995 a été adoptée en violation de l'article 41, paragraphes 2 et 3, du statut.

57

Il fait valoir que, à la suite de la lettre du Parlement du 21 mars 1995 l'invitant à faire part de ses observations sur la suppression éventuelle de son poste, il ne s'est pas opposé formellement à cette suppression mais n'a cependant pas exprimé le désir d'être mis en disponibilité. Dès lors, faute d'avoir exprimé le désir d'être mis en disponibilité, il n'aurait pas pu être inscrit d'office sur la liste des fonctionnaires mis en disponibilité.

58

Le Parlement aurait aussi violé le principe de sollicitude en ne tenant pas compte de l'intérêt de son fonctionnaire (arrêt du Tribunal du 20 juin 1990, Burban/Parlement, T-133/89, Rec. p. II-245, point 27, et ordonnance du Tribunal du 7 juin 1991, Weyrich/Commission, T-14/91, Rec. p. II-235, point 50) et en ne cherchant pas à satisfaire les souhaits de celui-ci (arrêt Turner/Commission, précité, points 38 et 78). A cet égard, la proposition du requérant contenue dans sa lettre du 30 mars 1995 aurait été écartée par le Parlement sans qu'une solution amiable ait été recherchée.

59

Enfin, le requérant soutient que l'effet rétroactif des décisions attaquées a pour conséquence la violation du droit du requérant, fondé sur l'article 41, paragraphe 3, deuxième alinéa, du statut, d'être réintégré par priorité dans tout emploi de son grade qui deviendrait vacant ou viendrait à être créé, sous réserve qu'il possède les aptitudes requises.

60

Le Parlement souligne que le requérant n'a pas avancé le moyen tiré d'une prétendue violation de l'article 41 du statut au stade de la première réclamation et que ce moyen devrait, par conséquent, être rejeté comme irrecevable.

61

Néanmoins, le Parlement affirme que le requérant n'a pas été considéré comme volontaire pour une mise en disponibilité en raison de son attitude ambiguë et n'a donc pas été inscrit d'office sur la liste des fonctionnaires touchés par la disponibilité. Il affirme, de plus, que la mise en disponibilité du requérant a été décidée pour des nécessités de service.

62

Le Parlement soutient, enfin, que le devoir de sollicitude, tel qu'interprété par le Tribunal (arrêt du 15 mars 1994, La Pietra/Commission, T-100/92, RecFP p. II-275, point 58), n'impliquerait pas que l'administration doive faire sien le point de vue de l'intéressé. De plus, le devoir de sollicitude n'empêcherait pas l'administration d'adopter une décision qu'elle considère comme nécessaire (arrêt de la Cour du 16 décembre 1987, Delauche/Commission, 111/86, Rec. p. 5345) ni de supprimer un poste (arrêt de la Cour du 29 octobre 1981, Arning/Commission. 125/80, Rec. p. 2539).

63

En l'espèce, le requérant a eu l'occasion de présenter ses observations sur la suppression de son poste et le Parlement affirme qu'il en a été tenu compte puisque la décision n'a pas pris effet avant la fin de l'année 1995. En revanche, la demande d'une libération anticipée du requérant de ses fonctions ne pouvait pas être accueillie parce qu'elle était incompatible avec les dispositions du statut. De surcroît, le Parlement estime que l'application de l'article 41 du statut ne peut pas être assujettie à des négociations entre l'administration et le fonctionnaire qui occupe un poste concerné par une mesure de réduction.

Appréciation du Tribunal

64

En ce qui concerne l'affirmation du Parlement selon laquelle le moyen est irrecevable, il y a lieu de relever que le requérant a invoqué, dans sa réclamation, un moyen tiré de la violation de l'article 41 du statut et du devoir de sollicitude dans lequel il se réfère au texte de l'article 41, paragraphe 2, du statut. De plus, la violation de l'article 41 du statut est invoquée en termes explicites au point 25 de la réclamation.

65

Dans ces circonstances et eu égard à la jurisprudence constante selon laquelle l'administration doit examiner les réclamations dans un esprit d'ouverture (voir, notamment, arrêts de la Cour du 14 mars 1989, Del Amo Martinez/Parlement, 133/88, Rec. p. 689, point 11. et du Tribunal du 21 février 1995, Moat/Commission, T-506/93, RecFP p. II-147, point 18), il convient de constater que le moyen tiré de la violation de l'article 41 du statut a été préalablement soulevé, dans le cadre de la procédure administrative, d'une manière suffisamment claire pour que l'AIPN ait été en mesure de connaître les critiques que l'intéressé formulait à ľ encontre de la décision contestée.

— Sur la prétendue violation de l'article 41 du statut

66

Le Tribunal estime que ce grief doit être compris en ce sens que l'article 41 du statut aurait été violé en raison de l'inscription d'office du requérant sur la liste des fonctionnaires touchés par la mesure de réduction du nombre des emplois alors qu'il n'aurait pas exprimé le désir d'être mis en disponibilité. Il ressort, en effet, du mémoire introductif d'instance que le requérant «n'a pas exprimé le désir d'être mis en disponibilité» et «ne pouvait, dès lors, être inscrit d'office sur la liste des fonctionnaires mis en disponibilité».

67

Les pièces du dossier constitué durant la procédure écrite devant le Tribunal ne font pas explicitement apparaître si l'administration et l'AIPN ont considéré le requérant comme volontaire ou non pour une mise en disponibilité.

68

II ressort de ces pièces que la commission paritaire aurait considéré le requérant comme étant «inconditionnellement volontaire» (lettre du requérant du 30 octobre 1995 adressée au président du comité du personnel) et que la commission paritaire et le comité des rapports l'auraient considéré comme «volontaire de facto» (note du 15 mai 1996 du directeur général de la DG 5 adressée au jurisconsulte du Parlement) pour une mise en disponibilité. De plus, il apparaît que «ni l'AIPN, ni l'administration n'ont considéré M. Volger comme volontaire pour une mise en disponibilité et la décision ne se réfère pas dans ses considérants au souhait ou à l'accord exprimé par l'intéressé, contrairement à d'autres décisions de mise en disponibilité [...] Pour sa part, l'administration a décidé de considérer que les fonctionnaires qui s'étaient abstenus d'une manifestation claire de volonté n'étaient pas volontaires pour une mise en disponibilité [...]» (note du 15 mai 1996 précitée).

69

Toutefois, lors de l'audience, le Parlement a produit une note du directeur général de la DG 5 au président de la commission paritaire, datée du 26 septembre 1995 et ayant pour objet l'«[établissement de la liste des fonctionnaires mis en disponibilité en vertu de l'article 41 du statut». Cette note a été portée à la connaissance du représentant du requérant, lequel a ainsi eu la possibilité, lors de l'audience, de se prononcer à cet égard.

70

Ce document établit que l'AIPN n'a pas considéré que le requérant était volontaire pour une mise en disponibilité.

71

Il en ressort que la commission paritaire a émis, le 9 mars 1995, un avis favorable pour la suppression de onze emplois et que cette commission a constaté, le 11 mai 1995, que trois titulaires de ces emplois s'étaient portés volontaires pour une mise en disponibilité. Le requérant ne figurait pas parmi les trois titulaires volontaires.

72

Il est ensuite précisé qu'un «dossier comprenant la liste des huit autres personnes affectées par l'article 41 a été soumis au comité des rapports qui s'est prononcé le 25 juillet 1995» et que celui-ci a émis un avis favorable pour la désignation du requérant.

73

Dans la suite de la note, il est indiqué qu'une distinction est établie entre la catégorie des «fonctionnaires volontaires» et celle des «fonctionnaires non volontaires». Le requérant a été considéré comme relevant de la seconde catégorie. En effet, dans le cadre de 1'«examen de la situation des non-volontaires», il est précisé:

«Sont considérés comme non-volontaires les fonctionnaires qui ont formellement refusé une mise en disponibilité (Mmes A. et C. et M. S.), ceux qui n'ont pas répondu à la lettre de l'administration (M. I.) ainsi que M. Volger en raison de l'ambiguïté de son attitude que vous avez pu relever dans sa lettre du 30 mars 1995. Par lettre du 21 avril 1995, je l'ai informé que l'article 41 lui serait appliqué à compter du 1er décembre 1995. sans susciter d'observations de sa part.»

74

Il est, enfin, conclu que l'«avis de la commission paritaire est sollicité sur l'établissement de [la liste des personnes proposées par l'administration pour l'application de l'article 41] et la mise en disponibilité de MM. Volger. D., I. et J. et de Mme A.».

75

Au vu de ce qui précède, le grief tiré d'une violation de l'article 41 du statut n'est pas fondé. Cette conclusion n'est aucunement affectée par le fait que les comités consultatifs ont considéré, dans l'exercice des compétences qui leur sont dévolues par le statut, le requérant comme volontaire pour la mise en disponibilité, et ce contrairement à la position exprimée par l'administration.

— Sur la prétendue violation du devoir de sollicitude

76

Il résulte d'une jurisprudence bien établie que le devoir de sollicitude de l'administration à l'égard de ses agents reflète l'équilibre des droits et obligations réciproques que le statut a créés dans les relations entre l'autorité publique et les agents du service public et que les exigences du devoir de sollicitude ne sauraient empêcher l'AIPN d'adopter les mesures qu'elle estime nécessaires dans l'intérêt du service (arrêt du Tribunal du 10 juillet 1992, Eppe/Commission, T-59/91 et T-79/91, Rec. p. II-2061, point 66). De plus, si l'autorité qui statue sur la situation d'un fonctionnaire doit tenir compte non seulement de l'intérêt du service mais aussi de celui du fonctionnaire concerné, cette considération ne saurait empêcher que l'autorité procède à une rationalisation des services si elle l'estime nécessaire (arrêt Arning/Commission, précité, point 19).

77

En l'espèce, le Parlement a satisfait aux exigences que lui impose le devoir de sollicitude.

78

II ressort des pièces du dossier que le Parlement a proposé, à la suite des observations du requérant contenues dans sa lettre du 30 mars 1995, que l'article 41 du statut soit appliqué à compter du 1er décembre 1995, conformément à l'un des souhaits émis par le requérant. Quant à la seconde condition posée par le requérant dans sa lettre du 30 mars 1995, à savoir celle d'être dispensé d'exercer ses fonctions à moins qu'une promotion ne lui soit accordée, elle ne pouvait être satisfaite par l'institution, sauf à violer l'article 55 du statut.

79

De plus, le Tribunal estime que le requérant a fait preuve d'une négligence certaine en ne formulant aucune observation en réponse à la lettre du directeur général de la DG 5 du 26 avril 1995.

80

Enfin, le document produit par le Parlement lors de l'audience démontre que la situation du requérant a été considérée à la lumière des éléments figurant à l'article 41, paragraphe 2, troisième alinéa, du stamt, à savoir la compétence, le rendement, la conduite dans le service, la situation de famille et l'ancienneté. Ces éléments, que l'AIPN est tenue de prendre en considération lorsqu'elle fixe la liste des fonctionnaires touchés par la mesure de réduction du nombre des emplois, figurent explicitement dans le document, assortis d'un commentaire. En outre, il est expliqué que le requérant n'a pas été considéré comme pouvant poursuivre sa carrière au sein de l'institution, faute d'être «redéployable» eu égard aux critères exposés dans la même note.

81

En considération de ces éléments, le grief tiré de la violation du devoir de sollicitude n'est pas fondé.

82

Il résulte de tout ce qui précède que le recours doit être rejeté.

Sur les dépens

83

Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s'il est conclu en ce sens. Toutefois, en vertu de l'article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. Le requérant ayant succombé en ses moyens et le Parlement ayant conclu à ce que le Tribunal statue sur les dépens comme de droit, chacune des parties supportera ses propres dépens.

 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête:

 

1)

Le recours est rejeté.

 

2)

Chacune des parties supportera ses propres dépens.

 

Saggio

Vesterdorf

Moura Ramos

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 janvier 1998.

Le greffier

H. Jung

Le président

A. Saggio


( *1 ) Langue de procedure: le français.

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