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Document 62019CJ0033

Acórdão do Tribunal de Justiça (Décima Secção) de 28 de maio de 2020.
Comissão Europeia contra República da Bulgária.
Incumprimento de Estado — Segurança dos caminhos de ferro — Diretiva 2004/49/CE — Artigo 21.°, n.os 1 e 2 — Não adoção das medidas necessárias para garantir a independência organizacional do organismo responsável pelos inquéritos e o seu acesso independente a recursos suficientes.
Processo C-33/19.

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2020:405

ARRÊT DE LA COUR (dixième chambre)

28 mai 2020 (*)

« Manquement d’État – Sécurité des chemins de fer – Directive 2004/49/CE – Article 21, paragraphes 1 et 2 – Absence d’adoption des dispositions nécessaires afin d’assurer l’indépendance organisationnelle de l’organisme d’enquête ainsi que son accès autonome à des ressources suffisantes »

Dans l’affaire C‑33/19,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, introduit le 18 janvier 2019,

Commission européenne, représentée par Mmes C. Vrignon, C. Georgieva-Kecsmar et J. Hottiaux, en qualité d’agents,

partie requérante,

contre

République de Bulgarie, représentée par Mmes L. Zaharieva et E. Petranova, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LA COUR (dixième chambre),

composée de M. I. Jarukaitis, président de chambre, MM. E. Juhász et C. Lycourgos (rapporteur), juges,

avocat général : M. G. Hogan,

greffier : M. M. Longar, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 29 janvier 2020,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que, en n’ayant pas pris, conformément à l’article 21, paragraphes 1 et 2, de la directive 2004/49/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, concernant la sécurité des chemins de fer communautaires et modifiant la directive 95/18/CE du Conseil concernant les licences des entreprises ferroviaires, ainsi que la directive 2001/14/CE concernant la répartition des capacités d’infrastructure ferroviaire, la tarification de l’infrastructure ferroviaire et la certification en matière de sécurité (directive sur la sécurité ferroviaire) (JO 2004, L 164, p. 44, et rectificatif JO 2004, L 220, p. 16), toutes les mesures nécessaires pour que soit assurée l’indépendance de l’organisme d’enquête par rapport au gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire, la République de Bulgarie a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de ces dispositions.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

2        Le considérant 24 de la directive 2004/49 énonce :

« L’enquête de sécurité devrait être séparée de l’enquête judiciaire menée sur le même incident et les enquêteurs devraient avoir accès aux preuves et aux témoins. Elle devrait être effectuée par un organisme permanent indépendant des acteurs du secteur ferroviaire. Cet organisme devrait fonctionner de manière à éviter tout conflit d’intérêts et tout lien éventuel avec les causes de l’événement faisant l’objet de l’enquête ; en particulier, son indépendance fonctionnelle ne devrait pas être compromise au cas où il serait étroitement lié à l’autorité de sécurité nationale ou à l’organisme de réglementation des chemins de fer pour des raisons de structures organisationnelle et juridique. Ses enquêtes devraient être effectuées dans la plus grande transparence possible. Pour chaque incident, l’organisme d’enquête devrait établir un groupe d’enquête ayant les compétences nécessaires pour trouver les causes immédiates et sous-jacentes. »

3        L’article 3 de cette directive prévoit :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

b)      “gestionnaire de l’infrastructure”, toute entité ou entreprise chargée en particulier de l’établissement et de l’entretien de l’infrastructure ferroviaire, ou d’une partie de celle-ci, telle qu’elle est définie à l’article 3 de la directive 91/440/CEE [du Conseil, du 29 juillet 1991, relative au développement de chemins de fer communautaires (JO 1991, L 237, p. 25)] ; ceci peut comprendre également la gestion des systèmes de régulation et de sécurité de l’infrastructure. Les fonctions du gestionnaire de l’infrastructure sur un réseau ou une partie de réseau peuvent être attribuées à des entités ou des entreprises différentes ;

[...] »

4        Aux termes de l’article 19 de ladite directive :

« 1.      Les États membres veillent à ce qu’une enquête soit effectuée par l’organisme d’enquête visé à l’article 21 après les accidents graves survenus sur le système ferroviaire, l’objectif de ces enquêtes étant l’amélioration éventuelle de la sécurité ferroviaire et la prévention des accidents.

2.      En plus des accidents graves, l’organisme d’enquête visé à l’article 21 peut effectuer des enquêtes sur les accidents et incidents qui, dans des circonstances légèrement différentes, auraient pu conduire à des accidents graves, y compris les défaillances techniques au niveau des sous-systèmes structurels ou des constituants d’interopérabilité du système ferroviaire transeuropéen à grande vitesse ou conventionnel.

[...] »

5        L’article 21 de la même directive dispose :

« 1.      Chaque État membre veille à ce que les enquêtes sur les accidents et les incidents visés à l’article 19 soient menées par un organisme permanent, qui comprend au moins un enquêteur capable de remplir la fonction d’enquêteur principal en cas d’accident ou d’incident. Dans son organisation, sa structure juridique et ses décisions, cet organisme est indépendant de tout gestionnaire de l’infrastructure, entreprise ferroviaire, organisme de tarification, organisme de répartition et organisme notifié, et de toute partie dont les intérêts pourraient être en conflit avec les tâches confiées à l’organisme d’enquête. Il est en outre indépendant fonctionnellement de l’autorité de sécurité et de tout organisme de réglementation des chemins de fer.

2.      L’organisme d’enquête accomplit ses tâches de manière indépendante vis-à-vis des organismes visés au paragraphe 1 et peut obtenir des ressources suffisantes à cet effet. Les enquêteurs obtiennent un statut leur donnant les garanties d’indépendance nécessaires.

[...] »

6        Selon l’article 22, paragraphe 3, de la directive 2004/49 :

« L’enquête est menée de manière aussi ouverte que possible, en permettant à toutes les parties d’être entendues et en mettant les résultats en commun. Le gestionnaire de l’infrastructure et les entreprises ferroviaires concernés, l’autorité de sécurité, les victimes et leurs proches, les propriétaires de biens endommagés, les fabricants, les services d’urgence et les représentants du personnel et des usagers sont informés à intervalles réguliers de l’enquête et de ses progrès et, dans toute la mesure du possible, ont la possibilité de donner leur avis dans le cadre de l’enquête et de commenter les informations contenues dans les projets de rapports. »

7        L’article 23 de cette directive prévoit :

« 1.      Chaque enquête sur un accident ou un incident au sens de l’article 19 fait l’objet d’un rapport établi sous une forme appropriée au type et à la gravité de l’accident ou de l’incident ainsi qu’à l’importance des résultats de l’enquête. Ce rapport indique l’objectif de l’enquête, comme mentionné à l’article 19, paragraphe 1, et contient, le cas échéant, des recommandations en matière de sécurité.

2.      L’organisme d’enquête publie le rapport final dans les meilleurs délais et normalement au plus tard douze mois après la date de l’événement. La structure du rapport est aussi proche que possible de la structure définie à l’annexe V. Le rapport, y compris les recommandations en matière de sécurité, est communiqué aux parties concernées visées à l’article 22, paragraphe 3, ainsi qu’aux parties et organismes intéressés dans d’autres États membres.

3.      Chaque année, l’organisme d’enquête publie, le 30 septembre au plus tard, un rapport annuel qui rend compte des enquêtes effectuées l’année précédente, les recommandations en matière de sécurité qui ont été formulées et les mesures qui ont été prises à la suite des recommandations formulées précédemment. »

 Le droit bulgare

 La loi relative au transport ferroviaire

8        L’article 3, paragraphe 1, du Zakon za zhelezopatnia transport (loi relative aux chemins de fer, DV no 97, du 28 novembre 2000), tel que modifié (ci-après la « loi relative au transport ferroviaire »), dispose :

« Les éléments de l’infrastructure ferroviaire et le sol sur lequel ils sont construits ou qui est destiné à leur construction sont une propriété publique de l’État et leur exploitation est effectuée par la Natsionalna kompaniya “Zhelezopatna infrastruktura” (NK “ZhI”) [(compagnie nationale des infrastructures ferroviaires)], ou par des entités commerciales auxquelles a été octroyée une concession, selon les modalités fixées par la loi relative aux concessions. »

9        L’article 5 de la loi relative au transport ferroviaire prévoit :

« Le ministre des Transports, des Technologies de l’information et des Communications] met en œuvre la politique publique en matière de transport ferroviaire comme suit :

[...]

5.      il adopte le règlement de la société nationale de l’“infrastructure ferroviaire”, nomme et révoque le directeur général et le conseil d’administration [de cette société] ;

6.      il institue l’organisme permettant une enquête indépendante sur les accidents ferroviaires graves ;

[...] »

10      L’article 9, paragraphe 1, de cette loi prévoit la création de la NK ZhI, en lui reconnaissant le statut d’entreprise publique.

11      Aux termes de l’article 11 de ladite loi :

« Les instances dirigeantes de la NK ZhI sont :

1.      le ministre des Transports, des Technologies de l’information et des Communications ;

2.      le conseil d’administration [de la NK ZhI] ;

3.      le directeur général [de la NK ZhI]. »

12      En vertu de l’article 13 de la même loi :

« (1)      Le conseil d’administration [de la NK ZhI] se compose de trois membres, nommés par le ministre des Transports, des Technologies de l’information et des Communications pour un mandat de 5 ans au maximum.

(2)      Le ministre des Transports, des Technologies de l’information et des Communications conclut un contrat de gestion avec chacun des membres du conseil d’administration [de la NK ZhI]. »

13      En vertu de l’article 19 de la loi relative au transport ferroviaire :

« (1)      Le ministre des Transports, des Technologies de l’information et des Communications nomme le directeur général [de la NK ZhI] pour un mandat de 5 ans au maximum ; celui-ci est membre de droit du conseil d’administration [de la NK ZhI]. »

14      En vertu de l’article 20, paragraphe 1, point 8, de cette loi :

« Le directeur général [de la NK ZhI] :

[...]

8.      rend compte de son activité au conseil d’administration [de celle-ci] et au ministre des Transports, des Technologies de l’information et des Communications ;

[...] »

15      L’article 29 de ladite loi prévoit :

« [...]

(4)      [...] le ministre des Transports, des Technologies de l’information et des Communications :

[...]

9.      détermine le régime de l’enquête sur les accidents et les incidents ;

10.      détermine les responsabilités et les obligations lors du déroulement de l’enquête. »

16      Aux termes de l’article 115 decies de la même loi :

« (1)      L’enquête technique sur les causes des accidents ferroviaires graves, accidents et incidents est effectuée conformément à la présente loi.

(2)      L’enquête visée au paragraphe 1 est indépendante et consiste à établir les causes de l’accident ou de l’incident à la suite de la collecte et de l’analyse d’informations, sans déterminer de faute.

(3)      L’enquête visée au paragraphe 1 sur les accidents ferroviaires graves est effectuée par une unité spécialisée d’enquête sur les accidents et incidents ferroviaires, établie au sein du ministère des Transports, des Technologies de l’information et des Communications.

(4)      Dans son organisation et lors de la prise de décisions, l’unité spécialisée visée au paragraphe 3 est indépendante de l’agence exécutive “administration des chemins de fer”, du gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire, des entreprises ferroviaires ainsi que de toute autre personne dont les intérêts pourraient être en conflit avec les tâches confiées à cette unité. »

17      En vertu de l’article 115 duodecies de la loi relative au transport ferroviaire :

« [...]

(8)      L’unité spécialisée d’enquête est financée sur le budget du ministre des Transports, des Technologies de l’information et des Communications. »

18      L’article 115 quaterdecies de cette loi dispose :

« (1)      Après la clôture de l’enquête, l’unité d’enquête émet des recommandations et des instructions en vue d’améliorer la sécurité et d’éviter de nouveaux accidents et incidents.

[...]

(3)      L’enquête de l’unité spécialisée est diligentée séparément et indépendamment de celle menée par les autorités d’enquête étatiques compétentes ou par les parties impliquées dans l’accident ou incident.

(4)      Les modalités de l’enquête sont définies par voie d’ordonnance du ministre des Transports, des Technologies de l’information et des Communications. »

 L’ordonnance relative à la gestion de la sécurité ferroviaire

19      Conformément à l’article 1er, point 8, de la Naredba no 59 za upravlenie na bezopasnostta v zhelezopatnia transport (ordonnance no 59 relative à la gestion de la sécurité ferroviaire, DV no 102, du 19 décembre 2006), telle que modifiée (ci-après l’« ordonnance relative à la gestion de la sécurité ferroviaire »), cette ordonnance définit le régime de l’enquête sur les accidents et incidents, ainsi que les droits et les obligations pendant le déroulement de cette enquête.

20      En vertu de l’article 74 de ladite ordonnance :

« (1)      L’enquête technique sur les accidents et incidents ferroviaires est effectuée [...] en vue d’en déterminer les causes ainsi que les conditions de survenance.

(2)      L’enquête visée au paragraphe 1er est effectuée indépendamment de l’enquête juridictionnelle.

(3)      L’enquête vise à améliorer la sécurité du transport ferroviaire, à prévenir et à éviter les accidents, en privilégiant la prévention d’accidents graves. »

21      L’article 76 de l’ordonnance relative à la gestion de la sécurité ferroviaire dispose :

« (1)      L’unité spécialisée d’enquête sur les accidents et incidents […] enquête sur :

1.      les accidents ferroviaires graves ;

2.      les accidents et incidents qui, selon son appréciation, auraient pu, dans d’autres circonstances, entraîner les conséquences d’un accident ferroviaire grave, notamment des défaillances techniques dans les sous-systèmes structurels ou les éléments du système ferroviaire ;

3.      selon son appréciation, les accidents et incidents autres que ceux visés aux points 1 et 2.

[...]

(3)      L’enquête visée au paragraphe 1 est effectuée conformément à la loi relative au transport ferroviaire, à la présente ordonnance et aux règles approuvées par le directeur de la direction “Unité d’enquête sur les accidents dans les transports aériens, ferroviaires et par voies navigables” du ministère des Transports, des Technologies de l’information et des Communications [(ci-après la “direction ‘Unité d’enquête sur les accidents dans les transports aériens, ferroviaires et par voies navigables’”)].

(4)      L’enquête visée aux paragraphes 1 et 2 n’a pas pour objet de déterminer une faute, ni d’établir une responsabilité. »

22      L’article 91, paragraphe 2, de cette ordonnance énonce :

« L’unité spécialisée accomplit ses tâches de manière efficace et objective, à l’abri de toute pression ou influence, l’indépendance de son activité étant garantie. Le ministre des Transports, des Technologies de l’information et des Communications, ainsi que le fonctionnaire du ministère des Transports, des Technologies de l’information et des Communications qui n’a pas la qualité d’inspecteur enquêteur ne peuvent participer ni à l’enquête, ni à l’établissement du rapport définitif sur les causes de l’accident ou incident ferroviaire, ni à la formulation de recommandations de sécurité émises par l’unité spécialisée d’enquête sur les accidents et incidents. »

 Le règlement intérieur du ministère des Transports

23      En vertu de l’article 5, point 1, du Ustroystven pravilnik na Ministerstvoto na transporta, informatsionnite tehnologii i saobshteniata (règlement intérieur du ministère des Transports, DV no 78, du 2 octobre 2009), tel que modifié, le ministre des Transports des Technologies de l’Information et des Communications (ci-après le « ministre des Transports ») exerce ses compétences dans le respect de la Konstitutsiya (Constitution) et des lois ainsi que met en œuvre la politique de l’État dans le domaine des transports.

24      L’article 6 de ce règlement intérieur prévoit :

« Le ministre exerce comme suit ses compétences dans le domaine des transports :

[...]

5.      il organise et contrôle les enquêtes techniques [...] sur les accidents et incidents ferroviaires ; [...]

[...] »

25      Conformément à l’article 32, premier alinéa, dudit règlement intérieur, la structure du ministère des Transports, des Technologies de l’information et des Communications (ci-après le « ministère des Transports ») comprend notamment la direction « Unité d’enquête sur les accidents dans les transports aériens, ferroviaires et par voies navigables ».

26      Aux termes de l’article 35 du même règlement intérieur :

« (1)      La direction “Unité d’enquête sur les accidents dans les transports aériens, ferroviaires et par voies navigables” est soumise à l’autorité directe du ministre [des Transports] et réalise les enquêtes sur les événements en matière de sécurité dans le secteur de l’aviation, sur les accidents dans les zones maritimes et sur les accidents et incidents ferroviaires. »

(2)      La direction visée au paragraphe 1 :

1.      coordonne les services et personnes morales qui participent aux enquêtes [...] sur les accidents et incidents ferroviaires ;

[...]

(10)      Chaque enquête se termine par un rapport au ministre [des Transports] comportant des recommandations de mesures à prendre pour assurer la sécurité.

[...]

(13)      Le directeur de la direction fait rapport directement au ministre [des Transports]. »

 Les règles internes relatives à l’activité et à l’organisation de la gestion des ressources humaines au ministère des Transports

27      Les Vatreshnite pravila za deynostta i organisatsiata na upravlenieto na choveshkite resursi v ministerstvoto na transporta (règles internes relatives à l’activité et à l’organisation de la gestion des ressources humaines au ministère des Transports) ont été approuvées par le ministre des Transports le 11 mars 2013.

28      Selon les indications du gouvernement bulgare, un complément à ces règles internes a été apporté le 15 juillet 2016 par l’insertion d’un article 19 bis dans la section IV A desdites règles internes (ci-après les « règles internes »), intitulée « Nomination du directeur de la direction “Unité d’enquête sur les accidents dans les transports aériens, ferroviaires et par voies navigables” et des inspecteurs de ladite direction ».

29      En vertu de l’article 19 bis, paragraphe 1, des règles internes, une agence indépendante de sélection du personnel participe à l’organisation des concours en vue de recruter le directeur de cette direction ainsi que les inspecteurs qui y exercent leurs fonctions. Sur le fondement de l’article 19 bis, paragraphe 2, de ces règles, cette agence établit les conditions de participation aux concours, qui comportent des exigences générales et spécifiques, conformément à la description des postes à pourvoir. Ladite agence désigne ses représentants au sein de la commission chargée du concours organisé, lesquels y sont majoritaires.

30      L’article 19 bis, paragraphe 3, desdites règles dispose que la commission chargée du concours fixe le classement des trois meilleurs candidats sur la base des résultats du concours organisé. Le procès-verbal de ce concours et tous les documents des candidats classés sont transmis au ministre des Transports, qui approuve ces résultats et nomme la personne désignée à l’issue du concours.

31      Conformément à l’article 19 bis, paragraphe 4, des mêmes règles, la sélection de ladite agence est effectuée dans le respect de la loi relative aux marchés publics.

32      L’article 19 bis, paragraphe 5, des règles internes prévoit que les concours doivent se dérouler dans le respect des dispositions de la Naredba za provezhdane na konkursite za darzhavni sluzhiteli (ordonnance relative à l’organisation des concours des fonctionnaires).

 Les règles d’enquête

33      Les règles de l’unité spécialisée d’enquête sur les accidents et incidents ferroviaires (ci-après : l’« unité spécialisée »), approuvées par le directeur de la direction « Unité d’enquête sur les accidents dans les transports aériens, ferroviaires et par voies navigables » (ci-après les « règles d’enquête »), sont entrées en vigueur le 1er août 2015.

34      Aux termes de l’article 1er, paragraphe 2, de ces règles :

« L’unité spécialisée jouit d’une indépendance organisationnelle et décisionnelle par rapport à l’agence exécutive “Administration des chemins de fer”, au gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire, aux entreprises ferroviaires ainsi qu’à toute autre personne dont les intérêts pourraient être en conflit avec les tâches confiées à cette unité. »

35      Selon l’article 2 desdites règles :

« L’unité spécialisée fait partie de la structure de la direction “Unité d’enquête sur les accidents dans les transports aériens, ferroviaires et par voies navigables” [du ministère des Transports]. »

36      L’article 8 des mêmes règles dispose :

« [...]

(5)      Les travaux de [l’unité spécialisée] sont couverts par le budget du [ministère des Transports]. »

37      Selon l’article 24 des règles d’enquête :

« Les frais engagés pour des analyses de laboratoire, des expertises, des avis et des décryptages d’enregistreurs de données ferroviaires, y compris à l’étranger, en lien avec la recherche des causes d’un accident ou d’un incident ferroviaire menée par l’[unité spécialisée] sont pris en charge par le [ministère des Transports]. »

38      En vertu de l’article 25 de ces règles :

« Le [ministère des Transports] met à disposition les moyens nécessaires à la formation professionnelle continue des inspecteurs enquêteurs de l’unité spécialisée. »

 La procédure précontentieuse

39      Le 21 juin 2013, la Commission a adressé à la République de Bulgarie une lettre de mise en demeure portant à l’attention de cette dernière les éléments de sa réglementation qu’elle estimait non conformes à la directive 2004/49.

40      Le 21 août suivant, les autorités bulgares ont répondu à la Commission en l’informant notamment que la République de Bulgarie avait l’intention d’apporter des modifications à sa réglementation.

41      Le 27 février 2015, la Commission a envoyé un avis motivé à la République de Bulgarie, invitant cette dernière à prendre les mesures nécessaires pour remédier aux incompatibilités entre sa réglementation et la directive 2004/49.

42      En juillet et en août 2015, la République de Bulgarie a informé la Commission qu’elle estimait avoir satisfait à son engagement de se conformer aux exigences posées par la directive 2004/49 compte tenu de premières modifications apportées à sa réglementation nationale, en particulier à la suite de l’adoption de l’ordonnance relative à la gestion de la sécurité ferroviaire et de celle des règles d’enquête.

43      Le 29 avril 2016, la Commission a adressé à la République de Bulgarie une lettre de mise en demeure complémentaire, dans laquelle elle exprimait des doutes notamment quant à l’indépendance de l’organisme d’enquête, au sens de l’article 21, paragraphes 1 et 2, de la directive 2004/49. Tout en informant la Commission de nouvelles modifications de sa réglementation, les autorités bulgares ont maintenu leur point de vue selon lequel l’unité spécialisée était indépendante et disposait des ressources nécessaires pour garantir son indépendance.

44      Le 4 octobre 2017, la Commission a adressé à la République de Bulgarie un avis motivé en estimant que cette dernière ne s’était pas conformée aux obligations qui lui incombaient en vertu, notamment, de l’article 21, paragraphes 1 et 2, de la directive 2004/49. La Commission a invité cet État membre à prendre les mesures qui lui incombaient pour se conformer à l’avis motivé dans un délai de deux mois à compter de la réception de celui-ci.

45      Après que d’autres dispositions du droit national lui ont été communiquées, la Commission a considéré que, si l’ensemble des modifications apportées à la réglementation bulgare permettait de mettre fin à un certain nombre de manquements visés dans l’avis motivé, ces modifications n’avaient toutefois pas remédié aux griefs tirés du manque d’indépendance de l’organisme d’enquête. Dans ces conditions, la Commission a introduit le présent recours.

 Sur le recours

 Observations liminaires

46      Par son recours, la Commission vise, en substance, à faire constater que la République de Bulgarie a manqué, d’une part, à son obligation, découlant de l’article 21, paragraphe 1, de la directive 2004/49, de garantir l’indépendance organisationnelle et décisionnelle de l’organisme d’enquête par rapport au gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire et, d’autre part, à son obligation, découlant de l’article 21, paragraphe 2, de cette directive, de garantir à cet organisme d’enquête un accès aux ressources financières nécessaires à l’accomplissement de ses tâches qui soit indépendant de ce gestionnaire.

47      À cet égard, premièrement, il importe de relever que, selon l’article 19 de la directive 2004/49, l’organisme d’enquête visé à l’article 21 de celle-ci est chargé d’enquêter sur les accidents graves survenus sur le système ferroviaire afin d’améliorer, le cas échéant, la sécurité ferroviaire et de prévenir les accidents. Il peut également décider d’enquêter sur les autres accidents et incidents qui, dans des circonstances légèrement différentes, auraient pu conduire à des accidents graves.

48      En l’espèce, il n’est pas contesté que l’unité spécialisée, établie au sein du ministère des Transports, constitue, en Bulgarie, l’organisme d’enquête visé à l’article 21 de la directive 2004/49.

49      Deuxièmement, l’article 21, paragraphe 1, de la directive 2004/49 prévoit que, dans sa structure juridique, son organisation et ses décisions, cet organisme d’enquête est indépendant de certains acteurs du secteur ferroviaire qui y sont expressément énumérés, dont le gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire. Selon le considérant 24 de cette directive, ledit organisme d’enquête devrait fonctionner de manière à éviter tout conflit d’intérêts et tout lien éventuel avec les causes de l’événement faisant l’objet de l’enquête.

50      S’agissant de la notion d’« indépendance », il convient de relever qu’elle n’est pas définie par la directive 2004/49. Il y a donc lieu de tenir compte de son sens habituel. Ainsi, en ce qui concerne les organes publics, l’indépendance désigne normalement un statut qui assure à l’organe concerné la possibilité d’agir en toute liberté par rapport aux organismes à l’égard desquels son indépendance doit être assurée, à l’abri de toute instruction et de toute pression (arrêt du 13 juin 2018, Commission/Pologne, C‑530/16, EU:C:2018:430, point 67).

51      Troisièmement, il ressort de la requête que la Commission reproche à la République de Bulgarie de ne pas avoir garanti l’indépendance de l’unité spécialisée par rapport au gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire, uniquement en raison des pouvoirs que la réglementation nationale reconnaît au ministre des Transports dans l’organisation, le fonctionnement et le financement de cette unité.

52      Toutefois, c’est uniquement à l’égard du gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire, et non du ministre des Transports en tant que tel, que la Commission fait grief à la République de Bulgarie de ne pas avoir assuré l’indépendance de l’unité spécialisée. C’est donc dans cette limite que la Cour est appelée à examiner le présent recours en manquement.

53      Il s’ensuit que, avant d’examiner le bien-fondé des griefs formulés par la Commission, il convient de déterminer si, comme celle-ci le soutient, le ministre des Transports contrôle le gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire en l’espèce.

 Sur le contrôle du gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire par le ministre des Transports

 Argumentation des parties

54      La Commission considère que le ministre des Transports exerce un contrôle complet sur l’activité du gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire en l’espèce, la NK ZhI, dans la mesure où il nomme et révoque les membres du conseil d’administration ainsi que le directeur général de cette dernière, conclut et résilie les contrats de gestion avec ceux-ci, exerce les droits liés aux participations de l’État dans la société, promulgue les statuts élaborés par le conseil d’administration et approuve le rapport financier annuel de cette société adopté par le conseil d’administration. Le ministre des Transports disposerait d’une influence déterminante sur toutes les questions importantes et stratégiques qui concernent ladite société, l’État étant le seul propriétaire du gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire et le ministre des Transports étant le seul organe public exerçant le contrôle de l’État sur ce gestionnaire.

55      La République de Bulgarie répond que, selon l’article 13, paragraphe 1, et l’article 19, paragraphe 1, de la loi relative au transport ferroviaire, le ministre des Transports n’est qu’un des organes du gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire. En outre, ce ne serait pas le ministre des Transports, mais le directeur général de la NK ZhI qui organiserait, dirigerait et contrôlerait l’ensemble de l’activité de la même société. Par ailleurs, les compétences du ministre des Transports à l’égard dudit gestionnaire seraient liées à la garantie accordée par l’État, qui dispose d’un droit de propriété publique sur l’infrastructure ferroviaire utilisée par ce gestionnaire, conformément à la loi relative au transport ferroviaire.

 Appréciation de la Cour

56      Il n’est pas contesté que la NK ZhI est gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire, au sens de l’article 3, sous b), de la directive 2004/49.

57      En vertu de l’article 5, point 5, de la loi relative au transport ferroviaire, le ministre des Transports adopte le règlement de la NK ZhI ainsi que nomme et révoque le directeur général et le conseil d’administration de celle-ci. L’article 19, paragraphe 1, de cette loi précise que ce directeur général n’est nommé que pour une durée maximale de cinq ans. L’article 20, paragraphe 1, de ladite loi prévoit que ledit directeur général rend compte de son activité tant au conseil d’administration de la NK ZhI qu’au ministre des Transports.

58      La République de Bulgarie a par ailleurs admis, dans ses écrits de procédure, que le ministre des Transports était une instance dirigeante de la NK ZhI et a confirmé, lors de l’audience, que cette société appartenait à l’État.

59      Il s’ensuit que, comme le soutient la Commission, l’État, représenté par le ministre des Transports, exerce un contrôle sur la NK ZhI.

60      La circonstance que la gestion opérationnelle de cette société n’incombe pas au ministre des Transports, mais au directeur général de celle-ci, n’est pas de nature à modifier ce constat. Il suffit en effet de relever que c’est le ministre des Transports qui nomme ce directeur général pour un mandat d’une durée déterminée, que ledit directeur général rend compte de son activité au ministre des Transports et que ce dernier est en mesure de révoquer le même directeur général.

61      Par ailleurs, les motifs pour lesquels le droit bulgare a octroyé un tel pouvoir de contrôle du ministre des Transports sur la NK ZhI sont sans pertinence aux fins de l’examen du présent recours en manquement. En effet, pour les besoins de cet examen, il suffit de constater que ce pouvoir existe.

62      Compte tenu du contrôle que le ministre des Transports exerce sur le gestionnaire de l’infrastructure que constitue la NK ZhI, l’article 21 de la directive 2004/49 impose que l’organisation, le processus de décision et le financement de l’unité spécialisée soient également indépendants à l’égard du ministre des Transports. À défaut, l’indépendance de l’unité spécialisée par rapport à ce gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire ne serait en effet pas garantie.

  Sur le premier grief, tiré d’un manquement à l’article 21, paragraphe 1, de la directive 2004/49

 Argumentation des parties

63      S’agissant, en premier lieu, du manque d’indépendance organisationnelle de l’unité spécialisée, la Commission, après avoir relevé que cette unité fait partie de la direction « Unité d’enquête sur les accidents dans les transports aériens, ferroviaires et par voies navigables » du ministère des Transports, considère, premièrement, que ladite unité n’est pas autonome en ce qui concerne la nomination et la révocation de ses membres.

64      Ainsi, si l’adoption de l’article 19 bis des règles internes a renforcé l’indépendance du personnel de l’unité spécialisée en introduisant une procédure de nomination indépendante du chef de l’organisme d’enquête et des inspecteurs, le résultat de cette procédure dépendrait toutefois du seul ministre des Transports, dans la mesure où ce dernier serait responsable de la désignation de la personne retenue à l’issue de la procédure de sélection.

65      En outre, la République de Bulgarie n’aurait fourni aucune preuve, d’une part, qu’un concours a effectivement été organisé et, d’autre part, que les exigences générales et spécifiques de la sélection ainsi organisée satisfont à la condition d’indépendance exigée par la directive 2004/49, la procédure prévue à l’article 19 bis des règles internes n’instaurant pas de contrôle des candidatures au regard de cette condition.

66      La Commission estime par ailleurs qu’une transposition de la directive 2004/49 au moyen des règles internes, susceptibles d’être modifiées à tout moment par le ministre des Transports, ne constitue pas une mesure de transposition suffisante de cette directive dans le droit bulgare.

67      Quant à la révocation des membres de l’unité spécialisée, la Commission relève, dans le mémoire en réplique, que les dispositions générales de la loi relative à la fonction publique, invoquées par la République de Bulgarie, ne limitent pas le pouvoir du ministre des Transports de révoquer, de manière discrétionnaire, les membres de la direction « Unité d’enquête sur les accidents dans les transports aériens, ferroviaires et par voies navigables ».

68      Deuxièmement, la Commission relève que les questions liées à l’évolution de carrière des membres de l’unité spécialisée dépendent en définitive du ministre des Transports. Or, l’évolution de carrière du personnel de l’organisme d’enquête devrait être un processus transparent, qui ne devrait pas dépendre d’organes dotés de pouvoirs décisionnels au sein du gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire.

69      S’agissant, en second lieu, de l’indépendance décisionnelle de l’unité spécialisée, la Commission relève que, en vertu de l’article 35, paragraphe 10, du règlement intérieur du ministère des Transports, chaque enquête se termine par la production d’un rapport au ministre comportant des recommandations de mesures à prendre pour assurer la sécurité, ce qui impliquerait que le ministre soit en mesure de modifier les conclusions du rapport établi à la suite d’une enquête. La Commission observe encore que, en vertu de l’article 35, paragraphe 13, du règlement intérieur du ministère des Transports, le directeur de la direction « Unité d’enquête sur les accidents dans les transports aériens, ferroviaires et par voies navigables » fait directement rapport au ministre.

70      La République de Bulgarie répond, s’agissant, en premier lieu, de l’indépendance organisationnelle de l’unité spécialisée, que tant la nomination et la révocation des membres de cette unité que l’évolution de carrière de ceux-ci font l’objet de critères objectifs, vérifiables et énumérés de manière claire et détaillée, le ministre des Transports ne disposant pas d’un large pouvoir d’appréciation.

71      En ce qui concerne, premièrement, la procédure de nomination et de révocation des membres de l’unité spécialisée, la République de Bulgarie souligne que les conditions de nomination et de cessation de la relation statutaire entre l’État et un fonctionnaire sont régies par la zakon za darzhavnia sluzhitel du 27 juillet 1999 (loi relative à la fonction publique), dont l’article 107 réglementerait explicitement les hypothèses de cessation unilatérale sans préavis de la relation statutaire.

72      Cet État membre considère en outre que l’indépendance des membres de l’unité spécialisée est garantie par l’article 19 bis des règles internes. En vertu de cette disposition, le classement des candidats serait déterminé selon leur présentation au moment de la procédure de concours. Le ministre des Transports nommerait la personne ainsi désignée, son pouvoir d’appréciation étant dès lors limité par les résultats du concours organisé.

73      Deuxièmement, la République de Bulgarie souligne que la question de l’évaluation professionnelle du directeur et des inspecteurs au sein de l’unité spécialisée est régie par l’ordonnance déterminant les modalités d’évaluation de l’exercice des fonctions des fonctionnaires dans l’administration de l’État, cette ordonnance établissant les objectifs généraux de l’évaluation des fonctionnaires et de leur promotion, parmi lesquels figure l’établissement de procédures justes et transparentes.

74      S’agissant, en deuxième lieu, de l’autonomie décisionnelle de l’unité spécialisée, cet État membre fait valoir que, en vertu de sa réglementation, le ministre des Transports ne peut ni participer à l’enquête, ni donner d’instructions, ni exercer une pression sur l’unité spécialisée dans l’organisation de l’enquête, ou dans l’établissement du rapport comportant les résultats de l’enquête.

75      Compte tenu du rôle et des missions du ministre des Transports, il serait du reste parfaitement logique et approprié de communiquer à ce dernier le rapport final de l’unité spécialisée, qu’il ne pourrait cependant ni modifier ni influencer, mais qu’il pourrait uniquement utiliser comme base pour prendre des mesures dans le cadre de la mise en œuvre de la politique des transports.

76      En troisième lieu, la République de Bulgarie fait état de modifications apportées à sa réglementation qui soit sont encore en cours d’élaboration, soit ont été adoptées après l’expiration du délai prévu dans l’avis motivé qui lui a été adressé par la Commission.

 Appréciation de la Cour

77      La Commission reproche à la République de Bulgarie de ne pas avoir veillé à ce que l’unité spécialisée, établie au sein du ministère des Transports, soit indépendante du ministre des Transports tant d’un point de vue organisationnel que d’un point de vue décisionnel.

78      À cet égard, s’il convient de prendre en compte, comme y invite la République de Bulgarie, l’article 115 decies, paragraphes 2 et 4, de la loi relative au transport ferroviaire, l’article 91, paragraphe 2, de l’ordonnance relative à la gestion de la sécurité ferroviaire ainsi que l’article 1er, paragraphe 2, des règles d’enquête, en vertu desquels l’unité spécialisée exerce ses compétences de manière indépendante par rapport notamment au gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire, l’affirmation de principe contenue dans ces dispositions ne peut toutefois être dissociée des autres éléments du cadre juridique dans lequel évolue cet organisme. C’est donc à la lumière de l’ensemble des dispositions nationales pertinentes qu’il convient d’examiner si la République de Bulgarie a manqué à son obligation de garantir l’indépendance organisationnelle et décisionnelle de l’organisme d’enquête à l’égard de tout gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire (voir, par analogie, arrêt du 13 juin 2018, Commission/Pologne, C‑530/16, EU:C:2018:430, point 71).

79      En outre, il convient de ne pas prendre en compte les modifications de la réglementation nationale mentionnées au point 76 du présent arrêt. En effet, selon une jurisprudence constante, l’existence d’un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l’État membre telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé et les changements intervenus par la suite ne sauraient être pris en compte par la Cour [arrêt du 5 novembre 2019, Commission/Pologne (Indépendance des juridictions de droit commun), C‑192/18, EU:C:2019:924, point 45 et jurisprudence citée].

–       En ce qui concerne l’indépendance de l’unité spécialisée quant à son organisation

80      La Commission reproche à la République de Bulgarie de ne pas avoir adopté les mesures nécessaires pour garantir que les procédures de nomination, d’évolution de carrière et de révocation des membres de l’unité spécialisée se déroulent de manière indépendante par rapport au ministre des Transports.

81      En premier lieu, il y a lieu de relever que ce grief doit être déclaré irrecevable en ce qu’il vise la procédure de révocation des membres de l’unité spécialisée.

82      En effet, en vertu de l’article 120, sous c), du règlement de procédure de la Cour, toute requête introductive d’instance doit indiquer de manière claire et précise l’objet du litige et contenir l’exposé sommaire des moyens invoqués pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et à la Cour d’exercer son contrôle. Il en découle que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels un tel recours est fondé doivent ressortir d’une façon cohérente et compréhensible du texte même de la requête et que les conclusions de cette dernière doivent être formulées de manière non équivoque afin d’éviter que la Cour ne statue ultra petita ou bien qu’elle n’omette de statuer sur un grief (voir, notamment, arrêt du 31 octobre 2019, Commission/Pays-Bas, C‑395/17, EU:C:2019:918, point 52).

83      Or, dans sa requête, la Commission n’a avancé aucun élément au soutien de son allégation selon laquelle les procédures de révocation des membres de l’unité spécialisée ne se déroulent pas de manière indépendante par rapport au ministre des Transports. Ce n’est que dans le mémoire en réplique que la Commission expose les raisons pour lesquelles elle estime que la procédure de révocation des membres de l’unité spécialisée méconnaît l’article 21, paragraphe 1, de la directive 2004/49.

84      En deuxième lieu, s’agissant de la procédure de nomination des membres de l’unité spécialisée, il importe de rappeler que, si aucune disposition de la directive 2004/49 n’interdit que le ministre chargé des transports puisse nommer et révoquer l’intégralité des membres de l’organisme d’enquête, l’article 21, paragraphe 1, de cette directive, en tant qu’il exige que cet organisme dispose d’une indépendance organisationnelle à l’égard notamment de tout gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire, s’oppose à ce que l’autorité qui contrôle un gestionnaire de l’infrastructure puisse nommer l’intégralité des membres de l’organisme d’enquête, lorsque ce pouvoir n’est pas régi par la loi de manière stricte, de sorte que cette autorité soit tenue de prendre des décisions sur la base de critères objectifs, clairement et limitativement énumérés, et vérifiables (voir, en ce sens, arrêt du 13 juin 2018, Commission/Pologne, C‑530/16, EU:C:2018:430, point 86).

85      En l’espèce, il convient de constater, d’une part, que les règles générales régissant la nomination des fonctionnaires de l’État, invoquées par la République de Bulgarie, ne constituent pas des mesures encadrant suffisamment le pouvoir de nomination reconnu au ministre des Transports. Comme le soutient à juste titre la Commission, ces dispositions génériques, même si elles consacrent certains principes fondamentaux, tels que la transparence, l’objectivité ou le caractère non discriminatoire du processus de recrutement, ne permettent pas de garantir que la nomination des membres de l’organisme d’enquête ait lieu sur la base de critères suffisamment objectifs, clairs, exhaustifs et vérifiables pour garantir l’indépendance organisationnelle de cet organisme à l’égard du ministre des Transports.

86      D’autre part, il découle des réponses apportées par la République de Bulgarie lors de l’audience que, au cours de la procédure de sélection instaurée en vertu de l’article 19 bis des règles internes, il appartient au directeur de la direction « Unité d’enquête sur les accidents dans les transports aériens, ferroviaires et par voies navigables » de définir les compétences exigées qui devront être appréciées au cours de cette procédure. Or, s’il paraît approprié que le responsable des services d’enquête soit en mesure de déterminer le profil des postes à pourvoir, il n’en demeure pas moins que ce directeur se situe, comme l’a également confirmé la République de Bulgarie, dans un lien de subordination hiérarchique avec le ministre des Transports. Ce dernier dispose dès lors indirectement d’une influence déterminante sur la procédure de sélection, prévue à l’article 19 bis des règles internes, qui, au vu du dossier soumis à la Cour, n’est pas suffisamment encadrée par la réglementation pertinente.

87      De surcroît, les règles internes peuvent être modifiées à tout moment par le ministre des Transports, comme la République de Bulgarie l’a confirmé lors de l’audience.

88      Il s’ensuit que la procédure de nomination des membres de l’unité spécialisée n’offre pas de garanties suffisantes d’indépendance par rapport au ministre des Transports, ce qui constitue une violation de l’article 21, paragraphe 1, de la directive 2004/49 lorsque ce ministre exerce un contrôle sur le gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire.

89      En troisième lieu, s’agissant de la procédure d’évaluation des membres de l’unité spécialisée, il convient de veiller, par analogie à ce qui a été précisé au point 84 du présent arrêt, à ce que le ministre chargé des transports, lorsqu’il contrôle le gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire, ne puisse exercer une influence sur cette procédure qui n’est pas suffisamment encadrée.

90      Or, il n’est pas contesté par la République de Bulgarie que l’évaluation des membres de l’unité spécialisée est, d’une part, réalisée par le directeur de la direction « Unité d’enquête sur les accidents dans les transports aériens, ferroviaires et par voies navigables », lequel est directement soumis au ministre des Transports, et, d’autre part, validée par ce ministre. Dès lors, la procédure d’évaluation des membres de l’unité spécialisée ne permet pas de garantir suffisamment l’indépendance organisationnelle de cette unité.

91      En outre, la circonstance que cette procédure d’évaluation doit avoir lieu conformément aux règles générales applicables à la fonction publique de l’État, telles qu’elles ont été exposées par la République de Bulgarie, ne permet pas d’écarter le risque que l’évolution de carrière des membres de l’unité spécialisée dépende de décisions prises par le ministre des Transports, sans que ce pouvoir soit encadré par des critères suffisamment objectifs, clairs, exhaustifs et vérifiables pour garantir l’indépendance organisationnelle de cette unité.

92      Il résulte des considérations qui précèdent que, s’agissant de la nomination et de l’évaluation des membres de l’unité spécialisée, la République de Bulgarie n’a pas adopté toutes les mesures nécessaires afin de garantir l’indépendance de cette unité par rapport au gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire contrôlé par le ministre des Transports.

–       En ce qui concerne l’indépendance de l’unité spécialisée quant à son processus décisionnel

93      La Commission reproche à la République de Bulgarie d’avoir prévu, d’une part, à l’article 35, paragraphe 10, du règlement intérieur du ministère des Transports, que chaque enquête se termine par un rapport au ministre des Transports et, d’autre part, à l’article 35, paragraphe 13, de ce règlement intérieur, que le directeur de la direction « Unité d’enquête sur les accidents dans les transports aériens, ferroviaires et par voies navigables » adresse un rapport directement à ce ministre.

94      L’indépendance décisionnelle de l’unité spécialisée nécessite de prémunir cette dernière contre toute influence, directe ou indirecte, du ministre des Transports dans la conduite des enquêtes qu’il lui revient de diligenter ou dans l’adoption ou la diffusion des rapports d’accident, d’accident grave ou d’incident qu’il lui revient d’établir, conformément aux articles 21 et 23 de la directive 2004/49.

95      À cet égard, il convient de souligner, en premier lieu, que certaines dispositions de la réglementation bulgare, telles que l’article 29, paragraphe 4, points 9 et 10, et l’article 115 quaterdecies, paragraphe 4, de la loi relative au transport ferroviaire ainsi que l’article 35, paragraphe 1, du règlement intérieur du ministère des Transports, pourraient être interprétées comme conférant au ministre des Transports un pouvoir d’instruction quant à la manière dont l’unité spécialisée réalise son enquête.

96      Néanmoins, aucune de ces dispositions n’ayant été visée dans la requête, il n’y a pas lieu de les prendre en compte dans le cadre du présent recours.

97      S’agissant, en deuxième lieu, de l’obligation, en vertu de l’article 35, paragraphe 10, du règlement intérieur du ministère des Transports, faite à l’unité spécialisée de transmettre au ministre des Transports le rapport clôturant chaque enquête, il y a lieu de relever que la Commission n’est pas parvenue à démontrer qu’une telle obligation implique, en vertu du droit national, que ce ministre puisse influer sur le contenu du rapport qui lui est présenté. Plus particulièrement, la Commission n’a pas déterminé sur quelle base juridique un tel pouvoir serait reconnu au ministre des Transports, dans le droit bulgare, nonobstant les dispositions visées au point 78 du présent arrêt.

98      Dans de telles conditions, l’article 21, paragraphe 1, de la directive 2004/49 ne saurait s’opposer à ce que le droit bulgare prévoie que l’unité spécialisée transmette ses rapports, une fois finalisés, au ministre des Transports. Au contraire, une telle démarche paraît appropriée dans la mesure où, conformément à l’article 23, paragraphe 1, de la directive 2004/49, ces rapports contiennent, le cas échéant, des recommandations en matière de sécurité, lesquelles peuvent s’adresser, notamment, au ministre chargé de la politique des transports. À cet égard, la seule circonstance que le ministre des Transports ne figure pas parmi les personnes et entités auxquelles le rapport final sur l’enquête doit être communiqué, en vertu de l’article 23, paragraphe 2, de la directive 2004/49, n’est pas de nature à modifier ce constat, cette disposition ne fixant pas une liste limitative des personnes et entités auxquelles ce rapport final peut être adressé. Il en va d’autant plus ainsi que, parmi les entités auxquelles ledit rapport final doit être transmis, en vertu de cet article 23, paragraphe 2, figure le gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire, sur lequel le ministre des Transports exerce son contrôle.

99      S’agissant, en troisième lieu, de l’obligation, découlant de l’article 35, paragraphe 13, du règlement intérieur du ministère des Transports, pour le directeur de la direction « Unité d’enquête sur les accidents dans les transports aériens, ferroviaires et par voies navigables » de faire rapport au ministre des Transports, il y a lieu de relever que la Commission n’expose aucunement les raisons pour lesquelles une telle obligation méconnaîtrait l’indépendance décisionnelle de l’unité spécialisée.

100    Il s’ensuit que la Commission n’est pas parvenue à démontrer que la République de Bulgarie avait manqué à son obligation de garantir l’indépendance décisionnelle de l’unité spécialisée.

101    Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que, si la Commission est restée en défaut de démontrer une violation, par la République de Bulgarie, de son obligation de garantir l’indépendance décisionnelle de l’organisme d’enquête, il n’en demeure pas moins, ainsi qu’il a été souligné au point 92 du présent arrêt, que cet État membre a manqué à son obligation d’en garantir l’indépendance organisationnelle. Le premier grief est donc fondé.

 Sur le second grief, tiré d’un manquement à l’article 21, paragraphe 2, de la directive 2004/49

 Argumentation des parties

102    La Commission relève que l’unité spécialisée n’a pas la personnalité morale et ne dispose pas d’un budget propre, mais est financée sur le budget du ministère des Transports. Elle souligne à cet égard que l’article 115 duodecies de la loi relative au transport ferroviaire confère des compétences budgétaires au ministre des Transports et que le directeur de la direction « Unité d’enquête sur les accidents dans les transports aériens, ferroviaires et par voies navigables » doit présenter un budget pour l’exercice suivant à la direction des finances du ministère des Transports.

103    La République de Bulgarie serait ainsi restée en défaut de démontrer que sa réglementation garantit à l’organisme d’enquête le pouvoir d’utiliser à sa convenance le budget qui lui est alloué.

104    La Commission considère également que cette réglementation comporte un risque réel de limitation des ressources, en cas d’accident grave ayant des conséquences sérieuses, l’enquête pouvant dans ce cas nécessiter des moyens financiers supplémentaires qui pourraient excéder les crédits budgétaires annuels. Or, l’obtention de moyens supplémentaires pourrait poser des difficultés, dans la mesure où l’organisme d’enquête dépendrait du ministère des Transports et où il ne pourrait ainsi négocier ses ressources directement avec le ministère des Finances.

105    La République de Bulgarie répond que l’obligation d’indépendance organisationnelle n’impose pas que l’organisme d’enquête dispose d’une ligne budgétaire autonome, pour autant que l’accès indépendant de cet organisme aux ressources financières qui doivent lui être reconnues pour l’exercice de ses tâches lui est garanti. Or, elle considère que sa réglementation nationale garantit l’accès immédiat de l’unité spécialisée aux ressources nécessaires à l’exercice de ses activités.

106    À cet égard, cet État membre fait valoir, en se fondant sur les articles 99 bis à 102 de l’ordonnance relative à la gestion de la sécurité ferroviaire, que, au début de chaque exercice budgétaire, conformément à la proposition du directeur de la direction « Unité d’enquête sur les accidents dans les transports aériens, ferroviaires et par voies navigables », le ministre des Transports approuve un compte budgétaire autonome pour les dépenses de l’unité spécialisée. En cas de besoins excédant le compte budgétaire autonome, le ministre des Transports apporterait les rectifications nécessaires au compte budgétaire autonome à partir de différentes sources.

107    La République de Bulgarie souligne que les dispositions en vertu desquelles les différents frais de l’activité de l’unité spécialisée doivent être garantis par le ministère des Transports ne laissent pas de marge d’appréciation quant à la question de savoir si les fonds concernés seront accordés. Il ressortirait de l’article 99 bis de l’ordonnance relative à la gestion de la sécurité ferroviaire que ce ministre ne participe pas à la procédure d’établissement du budget de l’unité spécialisée.

108    Elle ajoute que la zakon za publichnite finansi du 15 février 2013 (loi de finances) prévoit la possibilité, pour l’unité spécialisée, de disposer de fonds supplémentaires s’avérant nécessaires en cours d’exercice. Des fonds supplémentaires pourraient ainsi être alloués soit au moyen d’une restructuration interne des dépenses, au détriment d’autres budgets, soit en utilisant des fonds du budget central prévus en matière de protection civile pour des dépenses imprévues et urgentes.

109    Enfin, la République de Bulgarie fait état de projets de modifications de la réglementation applicable.

 Appréciation de la Cour

110    En premier lieu, il convient de relever que les articles 99 bis à 102 de l’ordonnance relative à la gestion de la sécurité ferroviaire ne sont entrés en vigueur que le 30 mars 2018, soit à une date postérieure à l’expiration du délai de deux mois fixé dans l’avis motivé adressé à la République de Bulgarie par la Commission.

111    Il s’ensuit que, conformément à la jurisprudence rappelée au point 79 du présent arrêt, les articles 99 bis à 102 de l’ordonnance relative à la gestion de la sécurité ferroviaire ne peuvent être pris en compte, dans le cadre de l’examen du présent recours, afin d’apprécier l’existence d’un manquement de la République de Bulgarie aux obligations découlant de l’article 21, paragraphe 2, de la directive 2004/49. Il en va a fortiori de même des projets de modifications de la réglementation applicable mentionnés au point 109 du présent arrêt.

112    En deuxième lieu, il résulte de l’article 21, paragraphe 2, de la directive 2004/49 que l’organisme d’enquête doit, afin d’accomplir ses tâches de manière indépendante, pouvoir obtenir les ressources humaines et financières nécessaires à cet effet.

113    Il est vrai qu’une telle indépendance ne va pas, en principe, jusqu’à exiger que l’organisme d’enquête dispose d’une ligne budgétaire autonome, pour autant que l’accès indépendant de cet organisme aux ressources financières qui doivent lui être reconnues pour l’exercice de ses tâches lui est garanti. Toutefois, il ressort également de la jurisprudence de la Cour que, lorsque le ministre chargé des transports contrôle le gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire et que l’organisme d’enquête ne dispose pas de la personnalité juridique et est structurellement intégré au sein du ministère dont ledit ministre est responsable, l’indépendance quant à l’accès à ces ressources financières ne peut être garantie qu’en attribuant à cet organisme une ligne budgétaire propre (voir, en ce sens, arrêt du 13 juin 2018, Commission/Pologne, C‑530/16, EU:C:2018:430, points 100 et 101).

114    Or, il n’est pas contesté par la République de Bulgarie que l’unité spécialisée est intégrée au ministère des Transports.

115    Dans ces conditions, il importe de constater que l’article 115 duodecies, paragraphe 8, de la loi relative au transport ferroviaire ainsi que l’article 8, paragraphe 5, des règles d’enquête prévoient que le financement de l’unité spécialisée est pris en charge par le budget du ministère des Transports, ce qui est confirmé aux articles 24 et 25 de ces règles en ce qui concerne, plus particulièrement, certains frais de nature technique ou de formation professionnelle.

116    La République de Bulgarie a également reconnu que, en vertu de la réglementation applicable à l’échéance du délai fixé dans l’avis motivé, le directeur de la direction « Unité d’enquête sur les accidents dans les transports aériens, ferroviaires et par voies navigables » présente un projet de budget pour l’exercice budgétaire suivant à la direction financière du ministère des Transports et que le ministre des Transports approuve un tel budget.

117    Il s’ensuit que le projet du budget de l’unité spécialisée est élaboré par une personne qui est hiérarchiquement subordonnée au ministre des Transports, que ce projet est examiné par les services dépendant directement de ce ministre et que ledit projet est approuvé par ce dernier.

118    Dans ces conditions, il ne saurait être considéré que l’unité spécialisée dispose d’une ligne budgétaire autonome et, partant, qu’elle dispose, malgré le fait qu’elle fait partie intégrante du ministère des Transports, d’un accès autonome aux ressources financières dont elle a besoin pour exercer ses tâches.

119    En troisième lieu, s’agissant des ressources budgétaires supplémentaires susceptibles d’être allouées à l’unité spécialisée, il convient de relever que l’article 21, paragraphe 2, de la directive 2004/49 n’exige pas que la ligne budgétaire autonome, dont l’organisme d’enquête doit pouvoir disposer dans les circonstances exposées au point 113 du présent arrêt, soit d’un montant supérieur à celui qui est nécessaire au fonctionnement normal et habituel de cet organisme. L’obligation d’indépendance financière qui découle de cette disposition impose néanmoins que, lorsque des sommes supplémentaires doivent être allouées audit organisme, en raison notamment d’une surcharge de travail imprévue causée par les besoins d’une enquête importante, celles-ci puissent lui être attribuées, sans que le processus d’octroi de ces moyens supplémentaires nécessite l’intervention d’une entité à l’égard de laquelle son indépendance doit être assurée, à moins que cette dernière ne soit tenue légalement d’accorder de tels moyens ou de défendre leur octroi devant l’instance compétente pour les accorder.

120    Or, la République de Bulgarie a admis, lors de l’audience, que les sommes supplémentaires dont aurait besoin l’unité spécialisée ne pourraient lui être attribuées que si le ministre des Transports décidait de solliciter l’allocation de ces sommes, sans qu’il soit tenu de le faire, auprès de l’instance responsable de leur octroi.

121    Il résulte des considérations qui précèdent que la République de Bulgarie n’a pas adopté les mesures nécessaires pour garantir l’accès autonome de l’unité spécialisée aux ressources financières nécessaires pour exercer ses tâches et a, partant, manqué aux obligations lui incombant en vertu de l’article 21, paragraphe 2, de la directive 2004/49.

122    Le recours de la Commission doit dès lors être accueilli, de telle sorte qu’il y a lieu de constater que, en n’adoptant pas les mesures nécessaires pour garantir l’indépendance organisationnelle de l’organisme d’enquête à l’égard du gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire contrôlé par le ministre des Transports ainsi que l’indépendance de cet organisme à l’égard de ce gestionnaire quant à l’accès aux ressources nécessaires à l’exercice de ses tâches, la République de Bulgarie a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 21, paragraphes 1 et 2, de la directive 2004/49.

 Sur les dépens

123    Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

124    La Commission ayant conclu à la condamnation de la République de Bulgarie aux dépens et celle-ci ayant succombé, en ce qui concerne tant le grief tiré de l’article 21, paragraphe 1, de la directive 2004/49 que le grief tiré de l’article 21, paragraphe 2, de cette directive, il y a lieu de condamner cet État membre aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (dixième chambre) déclare et arrête :

1)      En n’adoptant pas les mesures nécessaires pour garantir l’indépendance organisationnelle de l’organisme d’enquête à l’égard du gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire contrôlé par le ministre des Transports, des Technologies de l’information et des Communications ainsi que l’indépendance de cet organisme à l’égard de ce gestionnaire quant à l’accès aux ressources nécessaires à l’exercice de ses tâches, la République de Bulgarie a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 21, paragraphes 1 et 2, de la directive 2004/49/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, concernant la sécurité des chemins de fer communautaires et modifiant la directive 95/18/CE du Conseil concernant les licences des entreprises ferroviaires, ainsi que la directive 2001/14/CE concernant la répartition des capacités d’infrastructure ferroviaire, la tarification de l’infrastructure ferroviaire et la certification en matière de sécurité (directive sur la sécurité ferroviaire).

2)      La République de Bulgarie est condamnée aux dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : le bulgare.

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