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Document 62002TJ0218
Judgment of the Court of First Instance (Fifth Chamber) of 29 September 2005. # Daniela Napoli Buzzanca v Commission of the European Communities. # Officials - Statement of reasons. # Case T-218/02.
Wyrok Sądu Pierwszej Instancji (piąta izba) z dnia 29 września 2005 r.
Daniela Napoli Buzzanca przeciwko Komisji Europejskiej.
Sprawa T-218/02.
Wyrok Sądu Pierwszej Instancji (piąta izba) z dnia 29 września 2005 r.
Daniela Napoli Buzzanca przeciwko Komisji Europejskiej.
Sprawa T-218/02.
Zbiór Orzeczeń – Służba Publiczna 2005 I-A-00267; II-01221
ECLI identifier: ECLI:EU:T:2005:343
ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)
29 septembre 2005
Affaire T-218/02
Daniela Napoli Buzzanca
contre
Commission des Communautés européennes
« Fonctionnaires – Poste de directeur – Procédure de pourvoi aux vacances d’emploi – Décision de rejet de candidature – Motivation »
Objet : Recours ayant pour objet, d’abord, une demande d’annulation des décisions de la Commission du 30 janvier 2002 de nommer Mme S. directeur, au grade A 2, de la direction « Relations multilatérales et droits de l’homme » de la direction générale « Relations extérieures » et de ne pas retenir sa candidature pour le pourvoi de cet emploi, ainsi que d’annulation, en tant que de besoin, de la décision implicite de rejet, par la Commission, de sa réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, ensuite, une demande tendant à la condamnation de la défenderesse au paiement de dommages et intérêts évalués, à la date du recours, à 23 213,96 euros, sous réserve d’ampliation, et, enfin, une demande tendant à ce que le Tribunal ordonne à la Commission de produire son dossier administratif.
Décision : Les décisions de la Commission du 30 janvier 2002 portant nomination de Mme S. au poste concerné par l’avis de vacance COM/156/01 et rejet de la candidature de la requérante à ce poste sont annulées. Le recours est rejeté pour le surplus. La Commission est condamnée aux dépens.
Sommaire
1. Fonctionnaires – Recours – Moyens – Insuffisance de motivation – Constatation d’office
2. Fonctionnaires – Décision faisant grief – Rejet d’une candidature – Obligation de motivation au plus tard au stade du rejet de la réclamation – Portée – Non‑respect – Régularisation au cours de la procédure contentieuse – Condition
(Statut des fonctionnaires, art. 25, alinéa 2, 45 et 90, § 2)
3. Fonctionnaires – Recours – Recours en indemnité – Annulation de l’acte illégal attaqué – Réparation adéquate du préjudice moral
(Statut des fonctionnaires, art. 91)
1. Le juge communautaire est tenu de rechercher si une institution a satisfait à l’obligation qui lui incombait de motiver la décision attaquée. Les moyens tirés d’un défaut ou d’une insuffisance de motivation sont d’ordre public et peuvent, d’une part, être soulevés d’office par le juge et, d’autre part, être invoqués par les parties à tout stade de la procédure. Un requérant ne saurait donc être forclos à se prévaloir de ce moyen au motif qu’il ne l’a pas soulevé dans sa réclamation.
(voir point 55)
Référence à : Cour 20 février 1997, Commission/Daffix, C‑166/95 P, Rec. p. I‑9834, points 24 et 25 ; Tribunal 14 juillet 1994, Grynberg et Hall/Commission, T‑534/93, RecFP p. I‑A‑183 et II‑595, point 59 ; Tribunal 9 juillet 1997, S/Cour de justice, T‑4/96, Rec. p. II‑1125, points 52 et 53 ; Tribunal 21 septembre 2004, Soubies/Commission, T‑325/02, non encore publié au Recueil, point 30
2. Aux termes de l’article 45 du statut, l’autorité investie du pouvoir de nomination n’est pas tenue de motiver les décisions de promotion à l’égard des candidats non promus, auxquels une telle motivation risquerait d’être préjudiciable. Il en va de même en ce qui concerne les décisions de ladite autorité de ne pas retenir une candidature. L’autorité investie du pouvoir de nomination a, en revanche, l’obligation de motiver sa décision portant rejet d’une réclamation introduite en vertu de l’article 90, paragraphe 2, du statut par le candidat écarté contre la décision rejetant sa candidature et/ou contre celle portant nomination d’un autre candidat, la motivation de cette décision de rejet étant censée coïncider avec la motivation de la décision contre laquelle la réclamation était dirigée, en sorte que l’examen des motifs de l’une et de l’autre se confond.
L’absence totale de motivation avant l’introduction d’un recours ne peut être couverte par des explications fournies par l’autorité investie du pouvoir de nomination après l’introduction du recours. À ce stade, de telles explications ne rempliraient plus leur fonction. L’introduction d’un recours met donc un terme à la possibilité, pour ladite autorité, de régulariser sa décision par une réponse portant rejet de la réclamation.
En revanche, une insuffisance de la motivation fournie dans le cadre de la procédure précontentieuse n’est pas de nature à justifier l’annulation de la décision entreprise lorsque des précisions complémentaires sont apportées par l’autorité investie du pouvoir de nomination en cours d’instance, étant entendu toutefois que l’institution n’est pas autorisée à substituer une motivation entièrement nouvelle à la motivation initiale erronée.
L’étendue de l’obligation de motiver doit, dans chaque cas, être appréciée en fonction de circonstances concrètes. En particulier, une décision est suffisamment motivée dès lors qu’elle est intervenue dans un contexte connu du fonctionnaire concerné, qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard. Ainsi, pour décider s’il est satisfait à l’exigence de motivation prévue par le statut, il convient de prendre en considération non seulement les documents par lesquels la décision a été communiquée, mais également les circonstances dans lesquelles celle‑ci a été prise et portée à la connaissance de l’intéressé. Ainsi, il peut suffire que l’intéressé ait pu connaître, notamment par des notes de service et autres communications, les éléments essentiels qui ont guidé l’administration dans sa décision. Des entretiens avec l’administration peuvent également permettre au fonctionnaire intéressé de connaître le contexte dans lequel une décision lui faisant grief a été prise.
Enfin, ce n’est que très exceptionnellement et au vu de circonstances spécifiques que des explications orales fournies au cours d’une réunion interservices organisée à la suite de l’introduction d’une réclamation peuvent être considérées comme un début de motivation pouvant être complété au cours de la procédure contentieuse.
(voir points 58, 59, 61, 63 à 65 et 79)
Référence à : Cour 13 juillet 1972, Bernardi/Parlement, 90/71, Rec. p. 603, point 15 ; Cour 30 octobre 1974, Grassi/Conseil, 188/73, Rec. p. 1099, point 13 ; Cour 14 juillet 1977, Geist/Commission, 61/76, Rec. p. 1419, points 23 et 28 ; Cour 27 octobre 1977, Moli/Commission, 121/76, Rec. p. 1971, point 12 ; Cour 13 avril 1978, Ganzini/Commission, 101/77, Rec. p. 915, point 10 ; Cour 29 octobre 1981, Arning/Commission, 125/80, Rec. p. 1539, point 13 ; Cour 26 novembre 1981, Michel/Parlement, 195/80, Rec. p. 2861, point 22 ; Cour 30 mai 1984, Picciolo/Parlement, 111/83, Rec. p. 2323, point 22 ; Cour 9 décembre 1993, Parlement/Volger, C‑115/92 P, Rec. p. I‑6549, points 22 et 23 ; Cour 23 septembre 2004, Hectors/Parlement, C‑150/03 P, non encore publié au Recueil, point 40 ; Tribunal 12 février 1992, Volger/Parlement, T‑52/90, Rec. p. II‑121, points 36, 40 et 41 ; Tribunal 3 mars 1993, Vela Palacios/CES, T‑25/92, Rec. p. II‑201, points 26 et 27 ; Tribunal 23 février 1994, Coussios/Commission, T‑18/92 et T‑68/92, RecFP p. I‑A‑47 et II‑171, points 74 à 76 ; Tribunal 6 juillet 1995, Ojha/Commission, T‑36/93, RecFP p. I‑A‑161 et II‑497, points 60 et 61 ; Tribunal 29 mai 1997, Contargyris/Conseil, T‑6/96, RecFP p. I‑A‑119 et II‑357, point 147 ; Tribunal 23 novembre 1999, Sabbioni/Commission, T‑129/98, RecFP p. I‑A‑223 et II‑1139, point 30 ; Tribunal 9 mars 2000, Vicente Nuñez/Commission, T‑10/99, RecFP p. I‑A‑47 et II‑203, point 44 ; Tribunal 6 mars 2001, Campoli/Commission, T‑100/00, RecFP p. I‑A‑71 et II‑347, point 53 ; Tribunal 20 juillet 2001, Brumter/Commission, T‑351/99, RecFP p. I‑A‑165 et II‑757, points 33 et 34 ; Tribunal 20 février 2002, Roman Parra/Commission T‑117/01, RecFP p. I‑A‑27 et II‑121, point 32 ; Tribunal 23 avril 2002, Campolargo/Commission, T‑372/00, RecFP p. I‑A‑49 et II‑223, point 58 ; Tribunal 12 décembre 2002, Morello/Commission, T‑338/00 et T‑376/00, RecFP p. I‑A‑301 et II‑457, points 48 et 55 ; Tribunal 18 septembre 2003, Callebaut/Commission, T‑241/02, RecFP p. I‑A‑215 et II‑1061, point 42 ; Tribunal 6 juillet 2004, Huygens/Commission, T‑281/01, non encore publié au Recueil, point 108 ; Tribunal 3 février 2005, Heurtaux/Commission, T‑172/03, non encore publié au Recueil, point 47
3. L’annulation d’un acte attaqué peut constituer, en elle‑même, une réparation adéquate du préjudice moral résultant du défaut de motivation de cet acte.
(voir point 101)
Référence à : Cour 7 octobre 1985, Van der Stijl/Commission, 128/84, Rec. p. 3281, point 26 ; Cour 9 juillet 1987, Hochbaum et Rawes/Commission, 44/85, 77/85, 294/85 et 295/85, Rec. p. 3259, point 22 ; Hectors/Parlement, précité, point 61
ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)
29 septembre 2005(*)
« Fonctionnaires – Poste de directeur – Procédure de pourvoi aux vacances d’emploi – Décision de rejet de candidature – Motivation »
Dans l’affaire T-218/02,
Daniela Napoli Buzzanca, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Bruxelles (Belgique), représentée par Mes G. Vandersanden et L. Levi, avocats,
partie requérante,
contre
Commission des Communautés européennes, représentée par MM. J. Currall et V. Joris, en qualité d’agents, assistés de Mes D. Waelbroeck et V. Dehin, avocats, ayant élu domicile à Luxembourg,
partie défenderesse,
ayant pour objet, d’abord, une demande d’annulation des décisions de la Commission du 30 janvier 2002 de nommer Mme S. directeur, au grade A 2, de la direction « Relations multilatérales et droits de l’homme » de la direction générale « Relations extérieures » et de ne pas retenir sa candidature pour le pourvoi de cet emploi, ainsi que d’annulation, en tant que de besoin, de la décision implicite de rejet par la Commission de sa réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, ensuite, une demande tendant à la condamnation de la défenderesse au paiement de dommages et intérêts évalués, à la date du recours, à 23 213,96 euros, sous réserve d’ampliation et, enfin, une demande tendant à ce que le Tribunal ordonne à la Commission de produire son dossier administratif,
LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (cinquième chambre),
composé de M. M. Vilaras, président, Mmes M. E. Martins Ribeiro et K. Jürimäe, juges,
greffier : M. I. Natsinas, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 3 mai 2005,
rend le présent
Arrêt
Faits à l’origine du litige
1 La requérante est fonctionnaire de grade A 3 depuis le 1er janvier 1993. Elle est chef de l’unité « Droits de l’homme et démocratisation » de la direction « Relations multilatérales et droits de l’homme » (ci-après la « direction B ») de la direction générale (DG) « Relations extérieures » de la Commission.
2 Le 12 juillet 2001, la Commission a publié, au titre de l’article 4 et de l’article 29, paragraphe 1, sous a), du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, dans sa rédaction applicable au présent litige (ci-après le « statut »), l’avis de vacance d’emploi COM/156/01 en vue de pourvoir le poste de directeur de la direction B (ci-après l’« avis de vacance »).
3 Dans la rubrique « Qualifications minimales requises pour postuler en vue d’une mutation/promotion », mentionnée dans le sommaire des avis de vacance au nombre desquels figurait l’avis de vacance, la condition suivante était prévue : « connaissances et expérience/aptitudes en relation avec les tâches à exercer ».
4 Le poste à pourvoir et les qualifications spécifiques requises pour celui-ci sont décrits comme suit dans l’avis de vacance :
« Directeur en charge de la direction […] B […], responsable de la programmation dans le domaine des droits de l’homme et de la démocratisation. Responsable de la coordination d’ensemble et du leadership politique des relations de la Commission avec les institutions multilatérales et en particulier avec l’[Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe], le Conseil de l’Europe et le système des Nations unies.
Les principaux objectifs de la direction sont :
– de renforcer le rôle et la visibilité de la Commission dans les relations multilatérales et dans un grand nombre d’organisations internationales ;
– de développer et, le cas échéant, de mettre en œuvre les politiques de l’[Union européenne] en mettant en exergue la valeur ajoutée résultant d’une fertilisation croisée avec les organisations internationales ;
– d’assurer le développement de la programmation pluriannuelle ainsi qu’un degré élevé de coopération effective avec [l’Office de coopération de la Commission] [EuropeAid], en particulier dans le domaine des droits de l’homme et de la démocratisation ; de veiller à la cohérence et à la coordination au sein de la Commission s’agissant de ses relations avec les agences multilatérales, notamment les Nations unies ;
– d’assurer l’intégration des problématiques politiques horizontales pertinentes dans tous les aspects des politiques externes et internes de l’[Union européenne] ;
– l’organisation de la direction, la définition des priorités et la gestion des ressources humaines.
Les candidats devraient avoir une connaissance approfondie et solide des politiques et pratiques de travail de l’[Union européenne] et de la Commission, des principes et mécanismes de la [politique étrangère et de sécurité commune] et des activités en matière de relations extérieures et de coopération au développement. Les candidats devraient avoir une expérience établie de la conduite de négociations interservices complexes et une capacité à se focaliser sur des objectifs politiques de long terme clairs. Des capacités éprouvées de négociation et de représentation sont fondamentales. L’expérience de la gestion budgétaire et des relations extérieures constituerait un atout. Le poste requiert une personnalité dynamique. De solides capacités de gestion et de décision sont essentielles.
Une bonne connaissance de l’anglais et du français est importante. »
5 La requérante s’est portée candidate à ce poste.
6 Le 5 octobre 2001, le comité consultatif des nominations (ci-après le « CCN »), au terme d’une première phase de sélection portant sur les huit candidatures à ce poste, a rendu l’avis préalable nº 159/2001, retenant quatre d’entre elles, dont celle de la requérante et celle de Mme S., en vue de leur convocation à un entretien approfondi avec le CCN dans sa formation élargie.
7 Le 25 octobre 2001, le CCN, dans sa formation élargie, incluant M. L., directeur général de la DG « Relations extérieures » et un expert externe, a procédé à l’audition des quatre candidats présélectionnés. À l’issue de ces auditions, le CCN a émis l’avis nº 159/2001, selon lequel trois candidatures réunissaient « pleinement les qualifications requises pour l’emploi en cause et pourraient être prises en considération ». La requérante et Mme S. faisaient partie des trois personnes sélectionnées et en ont été averties par une lettre du secrétaire du CCN du 29 octobre 2001.
8 Le 7 novembre 2001, à la suite des auditions du 25 octobre 2001 et de l’établissement de fiches d’évaluation sommaires pour chaque candidat le 29 octobre 2001, dont celles de la requérante et de Mme S. (ci-après les « fiches d’évaluation »), le CCN a adopté son avis formel.
9 Les trois candidats sélectionnés ont été conviés à un entretien avec M. C. Patten, alors membre de la Commission. L’entretien de la requérante avec ce dernier a eu lieu le 16 novembre 2001.
10 Le 30 janvier 2002, la Commission, en sa qualité d’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») a décidé de nommer, par voie de promotion, Mme S. au poste de directeur de la direction B et de ne pas retenir la candidature de la requérante à ce poste. Le procès-verbal de la réunion de la Commission du même jour fait état de ce qui suit :
« […]
[direction B de la DG « Relations extérieures »] – Poste de grade A 2 de [d]irecteur
La Commission est saisie des candidatures présentées pour le pourvoi du poste de grade A 2 de [d]irecteur à la [d]irection générale ‘Relations extérieures’, au titre de l’article 29, paragraphe 1, [sous] a), du statut (PERS (2001) 248 à/3).
La Commission prend note des avis du [CCN], rendus les 5 et 25 octobre 2001 (PERS (2001) 248/4 et /5).
La Commission procède à un examen comparatif des mérites des candidats en fonction des caractéristiques du poste. Après avoir également examiné les rapports sur la compétence, le rendement et la conduite dans le service de chacun des candidats, la Commission, sur proposition de M. Kinnock, en accord avec M. le P[résident] et M. P[atten], décide de nommer Mme S. en tant que [d]irecteur de la [d]irection B […] à la DG ‘Relations extérieures’.
La date de prise d’effet de cette décision sera fixée ultérieurement.
[…] »
11 Par lettres des 31 janvier et 19 février 2002, la requérante a fait part à M. L. de sa profonde déception à la suite de la décision de la Commission de nommer Mme S. au poste vacant. Elle a notamment indiqué que le curriculum vitae de la candidate nommée ne répondait que de manière fictive à l’ensemble des qualifications et conditions requises par l’avis de vacance. Elle s’interrogeait sur l’opportunité de rester dans ses fonctions actuelles et informait M. L. de ce qu’elle introduirait une réclamation et de ce qu’elle avait fait acte de candidature à d’autres fonctions, à la suite d’un appel à manifestation d’intérêt pour la création de la « Task Force » de la Commission appelée à suivre les travaux de la convention pour l’avenir de l’Union. Elle sollicitait à ce dernier égard l’avis de M. L. Ces deux lettres sont restées sans réponse.
12 Le 28 février 2002, la requérante a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut contre la décision de l’AIPN du 30 janvier 2002 de nommer Mme S. directeur de la direction B. La réclamation a été enregistrée le 15 mars 2002.
13 En substance, la requérante a soutenu, dans sa réclamation, que la décision de nomination avait été prise en violation de l’avis de vacance et était entachée d’une erreur manifeste d’appréciation des qualifications respectives des candidats, constituant une violation des articles 29 et 45 du statut et des principes de vocation à la carrière et d’égalité de traitement.
14 Le 27 mai 2002, le chef de l’unité « Statut » de la direction « Droits et obligations » de la DG « Personnel et administration » a adressé à la requérante une note relative à sa réclamation, l’informant que cette dernière serait examinée lors d’une réunion interservices le 5 juin 2002. Cette note contenait des informations quant à la qualité des participants à la réunion et à son déroulement. Elle précisait en outre que la réunion avait un caractère consultatif et que la décision finale serait prise par l’AIPN.
15 Par lettre émanant de l’unité « Organigramme et personnel d’encadrement » de la direction « Politique du personnel » de la DG « Personnel et administration » du 3 juin 2002, la requérante a été informée de la décision de l’AIPN de ne pas retenir sa candidature à l’emploi ayant fait l’objet de l’avis de vacance.
16 Le 5 juin 2002, la réclamation de la requérante a fait l’objet d’un examen lors d’une réunion interservices rassemblant la requérante, des représentants de la DG « Relations extérieures », de la DG « Personnel et administration » et du médiateur.
17 Par lettre du 19 juin 2002, adressée au directeur général de la DG « Personnel et administration » et se référant au fait que, à l’issue de la réunion du 5 juin 2002, le président du groupe interservices avait signalé à la requérante qu’elle pouvait faire valoir tous arguments ou éléments complémentaires à l’appui de sa réclamation, les conseils de la requérante ont formulé des demandes et des observations complémentaires. Ils ont d’abord demandé communication, d’une part, des avis du CCN des 5 et 25 octobre 2001 sur la base desquels l’AIPN a pris la décision de nommer Mme S. au poste de directeur de la direction B et, d’autre part, des fiches d’évaluation de chaque candidat sur le fondement desquelles l’examen comparatif des mérites des candidats a été effectué. Ensuite, les conseils de la requérante ont apporté, quoique, selon eux, cela transparaisse de la réclamation, deux précisions. En premier lieu, ils ont souligné que la requérante fondait également sa prétention sur une absence totale de motivation de la décision de rejet de sa candidature, telle qu’elle lui a été notifiée par la note, rédigée selon un modèle type, du 3 juin 2002. En second lieu, ils ont fait valoir que la demande de la requérante était également fondée sur une violation du principe de non-discrimination dans la mesure où la Commission aurait fait prévaloir la candidature d’une personne dont les compétences et l’expérience professionnelle n’étaient pas adéquates par rapport au poste à pourvoir ou, à tout le moins, inférieures à celles dont pouvait se prévaloir la requérante. Enfin, ils ont indiqué que la requérante assortissait sa réclamation d’une demande en réparation du préjudice moral subi, provisoirement fixé à 20 000 euros, qui serait dû au fait que la requérante n’aurait jamais été informée de la décision prise à son égard et aurait reçu sans autre commentaire la lettre du 3 juin 2002 de notification de la décision de rejet de sa candidature, ainsi qu’au fait que la Commission se serait comportée avec légèreté et sans aucune reconnaissance, alors que la requérante se serait toujours dévouée depuis de nombreuses années à son service.
18 Par lettre du 12 juillet 2002, adressée au directeur général de la DG « Personnel et administration », les conseils de la requérante ont attiré l’attention de la Commission sur le fait que la réclamation de la requérante visait également « la décision déjà connue et critiquée […] de ne pas […] retenir [sa candidature] pour [l’] emploi [en cause] » qui lui a été notifiée, de façon formelle, le 3 juin 2002.
19 Le 16 juillet 2002, la décision de rejet implicite de la réclamation de la requérante est intervenue, le délai de quatre mois imparti à l’AIPN pour prendre position sur la réclamation, conformément à l’article 90, paragraphe 2, du statut, ayant expiré le 15 juillet 2002.
Procédure
20 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 18 juillet 2002, la requérante a introduit le présent recours.
21 Par décision du 30 octobre 2002, notifiée à la requérante le 6 novembre 2002, l’AIPN a répondu à la réclamation de la requérante.
22 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale. Le Tribunal a invité la Commission à produire certains documents et à répondre à des questions écrites au titre de l’article 64 du règlement de procédure du Tribunal, ce qui a été fait dans le délai imparti.
23 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales du Tribunal lors de l’audience publique du 3 mai 2005.
Conclusions des parties
24 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– juger le présent recours recevable ;
– annuler les décisions de l’AIPN du 30 janvier 2002 de nommer Mme S. directeur de la direction B de la DG « Relations extérieures » et de ne pas retenir sa candidature à cet emploi ;
– annuler, pour autant que de besoin, la décision implicite de rejet de sa réclamation ;
– condamner la Commission au paiement de dommages et intérêts évalués, à la date du recours, à 23 213,96 euros, sous réserve d’ampliation ;
– ordonner à la Commission de produire son dossier administratif ;
– condamner la Commission à l’ensemble des dépens.
25 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours comme non fondé ;
– statuer sur les dépens comme de droit.
Sur la demande en annulation de la décision implicite de rejet de la réclamation
26 En ce qui concerne la demande en annulation, en tant que de besoin, de la décision implicite de rejet de la réclamation de la requérante, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, la réclamation administrative et son rejet explicite ou implicite par l’AIPN font partie d’une procédure complexe. Dans ces conditions, le recours au Tribunal, même formellement dirigé contre le rejet de la réclamation du fonctionnaire, a pour effet de saisir le Tribunal de l’acte faisant grief contre lequel la réclamation a été présentée (voir, notamment, arrêts de la Cour du 17 janvier 1989, Vainker/Parlement, 293/87, Rec. p. 23, point 8, et du 7 février 1990, Culin/Commission, C‑343/87, Rec. p. I‑225, point 7 ; arrêts du Tribunal du 16 octobre 1996, Capitanio/Commission, T‑36/94, RecFP p. I‑A‑449 et II‑1279, point 33, et du 10 juin 2004, Eveillard/Commission, T‑258/01, non encore publié au Recueil, point 30).
27 Il y a donc lieu de considérer que le présent recours tend à l’annulation des décisions de l’AIPN du 30 janvier 2002 de nommer Mme S. directeur de la direction B et de ne pas retenir la candidature de la requérante à cet emploi.
Sur la demande en annulation des décisions de l’AIPN du 30 janvier 2002 de nommer Mme S. directeur de la direction B de la DG « Relations extérieures » et de ne pas retenir la candidature de la requérante à cet emploi
28 La requérante invoque deux moyens à l’appui de ses conclusions en annulation. Le premier moyen est tiré de ce que les décisions attaquées seraient entachées d’une violation de l’obligation de motivation. Le second moyen est tiré de ce que ces décisions auraient été prises en violation de l’avis de vacance ainsi que des articles 7 et 27, de l’article 29, paragraphe 1, sous a), et de l’article 45 du statut et des principes de vocation à la carrière et de non-discrimination.
Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation
Arguments des parties
29 La requérante rappelle la jurisprudence concernant la finalité de l’obligation de motivation, notamment en matière de fonction publique communautaire (arrêt du Tribunal du 17 décembre 1997, Bareth/Comité des régions, T‑110/96, RecFP p. I‑A‑435 et II‑1163, point 46), ainsi que l’obligation pour l’AIPN de motiver sa décision portant rejet d’une réclamation formée, sur le fondement de l’article 90, paragraphe 2, du statut, par un candidat non promu (arrêt de la Cour du 27 octobre 1977, Moli/Commission, 121/76, Rec. p. 1971, point 12).
30 Il ressortirait d’une jurisprudence constante que l’absence totale de motivation du rejet de la candidature d’un fonctionnaire candidat à un emploi à pourvoir par voie de promotion ne saurait être couverte par des explications fournies par l’administration après l’introduction d’un recours juridictionnel (arrêt de la Cour du 9 décembre 1993, Parlement/Volger, C‑115/92 P, Rec. p. I‑6549 ; arrêts du Tribunal du 9 mars 2000, Vicente Nuñez/Commission, T‑10/99, RecFP p. I‑A‑47 et II‑203, point 47, et du 20 février 2002, Roman Parra/Commission, T‑117/01, RecFP p. I‑A‑27 et II‑121), laquelle mettrait donc un terme à la possibilité pour l’AIPN de régulariser sa décision par une réponse motivée portant rejet de la réclamation (arrêts du Tribunal du 12 février 1992, Volger/Parlement, T‑52/90, Rec. p. II‑121, point 40, confirmé sur pourvoi par l’arrêt Parlement/Volger, précité, et du 20 juillet 2001, Brumter/Commission, T‑351/99, RecFP p. I‑A‑165 et II‑757, point 33).
31 En l’espèce, la requérante aurait pris connaissance de la décision de l’AIPN du 30 janvier 2002 de nommer Mme S. au poste à pourvoir et, partant, de ne pas la promouvoir, par le biais du procès-verbal de la réunion de la Commission du même jour. Ce n’est en revanche que le 3 juin 2002 qu’elle se serait vu notifier la décision de rejet de sa candidature de façon formelle, par un formulaire type dépourvu de toute motivation.
32 En outre, la Commission aurait omis de répondre à la réclamation, au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut, introduite par la requérante le 28 février 2002 et enregistrée le 15 mars 2002, en sorte que celle-ci aurait été rejetée implicitement. À aucun stade de la procédure précontentieuse, la Commission n’aurait exposé par écrit les motifs de sa décision de ne pas promouvoir la requérante. Ce n’est en effet que le 6 novembre 2002 que la requérante aurait reçu notification d’une réponse à sa réclamation, alors qu’elle avait déjà été conduite à saisir le Tribunal. À la date d’introduction du présent recours, les décisions attaquées auraient donc été dépourvues de toute motivation.
33 Par ailleurs, les éléments contenus dans le procès-verbal de la réunion de la Commission du 30 janvier 2002 ne sauraient être considérés comme un début de motivation. Ledit procès-verbal se limiterait en effet à indiquer, d’abord, que la Commission a pris note des avis du CCN des 5 et 25 octobre 2001, dont la requérante n’aurait pas eu communication, ensuite, que l’AIPN a procédé à un examen comparatif des mérites en fonction des caractéristiques du poste sans préciser celles qui ont retenu son attention et, enfin, que la Commission a pris en considération les rapports sur la compétence, le rendement et la conduite dans le service de chacun des candidats, à savoir les rapports de notation, visés par l’article 43 du statut, qui sont les éléments de base qui doivent, selon la requérante, guider l’AIPN lorsqu’elle se prononce sur une promotion au titre de l’article 45 du statut, ainsi que le prévoit cette dernière disposition.
34 Dans la mesure où il ne ferait état d’aucun élément propre à la situation spécifique de la requérante, le procès-verbal de la réunion de la Commission du 30 janvier 2002 constituerait une formulation générale et stéréotypée, calquée sur la rédaction de l’article 45 (arrêt Roman Parra/Commission, point 3042 supra, point 31). Quant à la notification à la requérante, le 3 juin 2002, de la décision de rejet de sa candidature, elle ne contiendrait pas davantage d’éléments spécifiques puisque cette dernière consisterait en un formulaire type. Il y aurait donc eu, au moment de l’introduction du recours, absence totale de motivation.
35 La requérante fait valoir en outre que l’argument de la Commission, selon lequel la requérante aurait eu connaissance des circonstances de la décision de rejet de sa candidature, est dénué de tout fondement. D’abord, le fait qu’elle a eu un entretien avec le CCN dans sa formation élargie ainsi qu’avec M. Patten ne refléterait que la procédure interne prévue pour le pourvoi d’un poste A 2 et n’impliquerait nullement que la motivation d’une décision non encore prise ait été portée à sa connaissance. Ensuite, s’agissant du contenu de la réunion interservices ayant eu lieu le 5 juin 2002, consécutivement au dépôt de sa réclamation, la requérante fait valoir qu’elle en a un souvenir très différent de celui de la Commission et soutient que la représentante de la DG « Relations extérieures » y aurait affirmé que, pour la sélection des candidatures, d’autres éléments que ceux énoncés par l’avis de vacance avaient été pris en considération, ce qui aurait conduit le représentant du personnel participant à la réunion à noter qu’une telle affirmation indiquait que le choix entre les candidats était fondé sur d’autres éléments que les qualifications et le mérite. Enfin, la requérante conteste formellement l’allégation, formulée par la Commission pour la première fois lors de l’audience, selon laquelle des contacts intervenus entre la requérante et M. L. postérieurement au 30 janvier 2002 auraient permis à la requérante de saisir le contexte du rejet de sa candidature.
36 Sachant que le rejet de sa candidature, dont elle avait pu avoir connaissance par le procès-verbal de la réunion de la Commission du 30 janvier 2002, ne lui a été notifié que le 3 juin 2002 au moyen d’un formulaire type dépourvu de toute motivation, que sa demande de communication, le même mois, des avis et fiches individuelles relatifs aux autres candidats n’a pas reçu de suite dans les délais requis et qu’elle a dû, dès lors, introduire un recours à défaut de réponse à sa réclamation, laquelle ne lui est parvenue que le 6 novembre 2002, soit plus de huit mois plus tard, la requérante se serait trouvée confrontée à une absence totale de motivation ne pouvant être considérée que comme la conséquence d’une erreur manifeste d’appréciation.
37 Enfin, l’invocation par la Commission du fait que la communication tardive de la motivation n’aurait pu, à elle seule, affecter la légalité intrinsèque de la décision portant rejet de la candidature (arrêt du Tribunal du 26 janvier 2000, Gouloussis/Commission, T‑86/98, RecFP p. I‑A‑5 et II‑23, point 76) serait vaine. Dans son arrêt Brumter/Commission, point 30 supra (points 33 et 34), le Tribunal aurait en effet indiqué qu’un candidat non retenu a un intérêt manifeste à être informé des motifs du rejet de sa candidature avant l’introduction d’un recours, dès lors que ces motifs doivent lui permettre de savoir si la décision est bien fondée ou si elle est éventuellement entachée d’un vice permettant d’en contester la légalité.
38 La Commission fait observer en premier lieu que, en vertu d’une jurisprudence constante, l’AIPN n’était pas tenue de motiver la décision de nomination à l’égard de la requérante (arrêts Moli/Commission, point 29 supra, point 12, et Vicente Nuñez/Commission, point 30 supra, point 42).
39 En second lieu, s’agissant de la décision de rejet de la candidature de la requérante, il serait satisfait à l’obligation de motivation au sens de l’article 25, deuxième alinéa, du statut dès lors que les circonstances dans lesquelles l’acte mis en cause a été arrêté et notifié à l’intéressé, ainsi que les notes de service et les autres communications l’accompagnant, permettent de connaître les éléments essentiels qui ont guidé l’administration dans sa décision (arrêt de la Cour du 13 décembre 1989, Prelle/Commission, C‑169/88, Rec. p. 4335, points 9 et 10).
40 Les promotions se faisant, aux termes de l’article 45 du statut, « au choix », il suffirait que la motivation du rejet de la réclamation concerne la réunion des conditions légales auxquelles le statut subordonne la régularité de la promotion (arrêts du Tribunal Vicente Nuñez/Commission, point 30 supra, point 42, et du 21 septembre 1999, Oliveira/Parlement, T‑157/98, RecFP p. I‑A‑163 et II‑851, point 50).
41 Or, en l’espèce, la requérante aurait connu les circonstances de la décision de rejet de sa candidature. Elle aurait en effet personnellement été conviée à un entretien, le 25 octobre 2001, avec le CCN dans sa formation élargie, lequel aurait procédé à un examen comparatif des mérites des candidats et estimé que la candidature de la requérante réunissait, avec celle de deux autres candidats, dont Mme S., les qualifications requises pour l’emploi à pourvoir, ce dont elle aurait été informée. La requérante aurait également été entendue par M. Patten le 16 novembre 2001. À ce stade, la requérante aurait été informée que les candidatures au poste à pourvoir avaient fait l’objet d’un examen comparatif quant à leurs mérites respectifs et que les qualifications de chacun des candidats avaient été prises en considération.
42 Lors de l’audience, la Commission a par ailleurs ajouté que, d’une part, le procès-verbal de la réunion de la Commission du 30 janvier 2002, qui fait état d’un examen comparatif des mérites entre la requérante et les deux autres candidats et, d’autre part, les contacts intervenus, postérieurement au 30 janvier 2002, entre la requérante et M. L., auraient permis à celle-ci de saisir le contexte dans lequel le rejet de sa candidature est intervenu.
43 En outre, à la suite du dépôt de sa réclamation, la requérante aurait pu discuter des circonstances du rejet de sa candidature lors de la réunion interservices du 5 juin 2002, en présence du secrétaire du CCN et du chef de l’unité « Ressources humaines et administration » de la direction « Ressources au siège, information, relations interinstitutionnelles » de la DG « Relations extérieures » et recevoir tous les éléments d’explication désirés sur le rejet de sa candidature en raison de la préférence accordée à celle de Mme S. Cette réunion aurait été conduite sur le fondement du tableau des mérites comparés de la requérante et de Mme S., établi à partir du curriculum vitae de cette dernière et produit par la requérante dans sa réclamation. Les différents griefs formulés dans la réclamation de la requérante et repris dans son recours auraient été abordés à cette occasion. La requérante aurait pu s’exprimer et se serait vu communiquer des éléments de comparaison entre sa candidature et celle de Mme S., ainsi que les raisons qui ont conduit la Commission à préférer cette dernière. Il aurait ainsi été indiqué que les deux candidatures réunissaient l’ensemble des conditions posées dans l’avis de vacance et que, dès lors, l’AIPN avait fait usage de son pouvoir d’appréciation pour départager les candidats. En l’occurrence, l’expérience professionnelle de Mme S., beaucoup plus large et variée que celle de la requérante dans le domaine des relations extérieures, aurait conduit au choix de sa candidature.
44 La Commission fait valoir que les réunions interservices ayant pour objet la discussion des réclamations sont informelles, de façon à ce que la personne ayant déposé la réclamation puisse exposer les arguments contenus dans celle-ci dans un contexte serein. Pour cette raison, il n’en existerait pas de compte rendu. La Commission produit toutefois une attestation de Mme G., chef de l’unité « Ressources humaines et administration » de la direction « Ressources au siège, information, relations interinstitutionnelles » de la DG « Relations extérieures », présente lors de cette réunion, qui en confirme la teneur. Mme G., de par ses fonctions et son statut de représentante de la DG « Relations extérieures » lors de cette réunion, aurait été bien placée pour exprimer le point de vue de son directeur général. Or, les directeurs généraux joueraient un rôle clé dans la procédure de sélection aux emplois de directeur, en établissant, le cas échéant avec un panel de sélection, une évaluation préliminaire des candidats, en transmettant, en accord avec le rapporteur, une liste restreinte (short list) de candidats présélectionnés au CCN et en participant activement aux travaux de celui-ci. En l’espèce, M. L. aurait été présent à la réunion du CCN du 25 octobre 2001 lorsque celui-ci a interrogé les quatre candidats présélectionnés. L’avis du CCN incorporerait donc certainement son point de vue. Il serait en outre de pratique constante que les décisions de nomination aux emplois de directeur sont prises en accord avec le directeur général concerné, comme en l’espèce. Mme G. se serait donc fait l’interprète d’une personne ayant joué un rôle essentiel dans la procédure de sélection en cause.
45 La situation de la requérante différerait donc de celle ayant donné lieu à l’arrêt Roman Parra/Commission, point 30 supra, puisque, dans cette affaire, le requérant n’avait pas disposé d’éléments d’information similaires.
46 Connaissant le contexte spécifique de la décision de rejet de sa candidature, la requérante n’aurait pas été empêchée de contester utilement ce rejet par l’introduction d’un recours devant le Tribunal (arrêt Gouloussis/Commission, point 3752 supra, point 76) ni d’exposer précisément les raisons pour lesquelles elle estimait que Mme S. ne satisfaisait manifestement pas aux conditions mentionnées dans l’avis de vacance et ne pouvait manifestement pas lui être préférée après comparaison de leurs mérites respectifs (arrêts de la Cour du 26 novembre 1981, Michel/Parlement, 195/80, Rec. p. 2861, point 22, et Culin/Commission, point 26 supra, point 15). En tout état de cause, on ne saurait conclure à une absence totale de motivation.
47 Dans ces circonstances, conformément à la jurisprudence, la communication tardive de la motivation n’aurait pu, à elle seule, affecter la légalité intrinsèque de la décision portant rejet de la candidature (arrêt Gouloussis/Commission, point 37 supra, point 76). Il en serait d’autant plus ainsi que la requérante n’aurait formulé le grief d’absence de motivation que par lettre de ses conseils du 19 juin 2002, bien après le dépôt de la réclamation et n’aurait précisé que la réclamation s’étendait également au rejet de sa candidature que par une autre lettre de ses conseils du 12 juillet 2002.
48 En troisième lieu, la Commission soutient qu’il convient de distinguer soigneusement les faits de l’espèce de ceux de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Brumter/Commission, point 30 supra (point 34), dans laquelle le requérant n’aurait non seulement jamais bénéficié d’une décision explicite de rejet de sa réclamation, mais aurait également jugé la motivation dudit rejet – au stade du mémoire en défense – incomplète. Or, en l’espèce, la requérante aurait connu les circonstances de la décision de rejet de sa candidature et aurait reçu une décision explicite de rejet de sa réclamation.
49 La décision attaquée, procédant au pourvoi d’un emploi vacant par voie de promotion, au titre de l’article 29, paragraphe 1, sous a), du statut, aurait été prise, en vertu de l’article 45 du statut, « au choix », l’exigence de motivation la concernant ne devant, dès lors, pas porter sur les qualités respectives des candidats mais seulement sur la régularité de la promotion (arrêt de la Cour du 30 octobre 1974, Grassi/Conseil, 188/73, Rec. p. 1099, point 14). Il suffisait donc, pour que la motivation soit suffisante, que la requérante obtienne communication d’éléments lui permettant d’apprécier si les conditions légales auxquelles le statut subordonne la régularité de la procédure de promotion ont été respectées (arrêts du Tribunal du 12 décembre 2002, Morello/Commission, T‑135/00, RecFP p. I‑A‑265 et II‑1313, point 35 ; T‑136/00, RecFP p. I‑A‑275 et II‑1349, point 34, et T‑164/00, RecFP p. I‑A‑285 et II‑1385, point 34). Or, tel aurait été le cas, ainsi qu’il résulterait des points 41 et 43 ci-dessus.
50 En outre, les éléments dont la requérante aurait ainsi obtenu la communication auraient été complétés par la suite. La requérante aurait reçu notification du rejet explicite de sa réclamation – qui reprendrait les motifs indiqués lors de la réunion interservices du 5 juin 2002 – et communication de sa fiche individuelle d’évaluation ainsi que de celle de Mme S., établies par le CCN à la suite de ses entretiens, le 25 octobre 2001, avec les candidats encore en lice et résultant de l’examen comparatif de chaque candidature. La requérante aurait également eu accès à de nombreux éléments factuels illustrant les qualifications et les compétences de Mme S., contenus dans les divers rapports de notation annexés au mémoire en défense.
51 Par conséquent, conformément à la jurisprudence relative à la motivation des décisions de promotion à l’égard des candidats non promus (voir points 38 à 40 ci-dessus), la requérante aurait disposé de tous les éléments lui permettant de vérifier la régularité de la procédure ayant mené à la décision attaquée.
52 En dernier lieu, la Commission rappelle qu’il est de jurisprudence constante que, en vertu du principe de proportionnalité, il y a lieu de concilier les intérêts des requérants, victimes d’une illégalité, et les intérêts des tiers et, par conséquent, de prendre en considération non seulement la nécessité de rétablir les requérants dans leurs droits, mais également la confiance légitime des tiers (arrêt de la Cour du 5 juin 1980, Oberthür/Commission, 24/79, Rec. p. 1743, point 13, et arrêt du Tribunal du 10 juillet 1992, Barbi/Commission, T‑68/91, Rec. p. II‑2127, point 36). Le moyen devrait donc être rejeté.
53 La Commission fait enfin valoir, à titre subsidiaire, que si le Tribunal devait accueillir le moyen tiré de la violation de l’obligation de motivation, la conséquence devrait être non pas l’annulation de la décision de nomination, mais la condamnation de la défenderesse au paiement d’une indemnité, sur le fondement du principe de proportionnalité, qui commande de prendre en considération non seulement les intérêts des requérants victimes d’une illégalité, mais aussi ceux des tiers, dont la confiance légitime pourrait être lésée si les conclusions en annulation étaient accueillies (arrêt du Tribunal du 12 mai 1998, Wenk/Commission, T‑159/96, RecFP p. I‑A‑193 et II‑593, points 121 et 122). Il serait en effet excessif d’annuler la nomination de Mme S. pour un motif de forme, alors qu’au fond cette nomination serait légalement fondée.
Appréciation du Tribunal
– Sur la recevabilité
54 La Commission, sans exciper formellement de l’irrecevabilité du moyen tiré de la violation de l’obligation de motivation, fait néanmoins observer que la requérante n’a formé le grief d’absence de motivation que par lettre du 19 juin 2002, bien après le dépôt de la réclamation du 28 février 2002.
55 À cet égard, il suffit de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le juge communautaire est tenu de rechercher si la Commission a satisfait à l’obligation qui lui incombait de motiver la décision attaquée. Les moyens tirés d’un défaut ou d’une insuffisance de motivation sont d’ordre public et peuvent, d’une part, être soulevés d’office par le juge et, d’autre part, être invoqués par les parties à tout stade de la procédure (arrêt de la Cour du 20 février 1997, Commission/Daffix, C‑166/95 P, Rec. p. I‑983, points 24 et 25 ; arrêts du Tribunal du 14 juillet 1994, Grynberg et Hall/Commission, T‑534/93, RecFP p. I‑A‑183 et II‑595, point 59 ; du 9 juillet 1997, S/Cour de justice, T‑4/96, Rec. p. II‑1125, points 52 et 53, et du 21 septembre 2004, Soubies/Commission, T‑325/02, non encore publié au Recueil, point 30). La requérante ne saurait donc être forclose à se prévaloir de ce moyen au motif qu’elle ne l’a pas soulevé dans sa réclamation.
56 Le moyen tiré de la violation de l’obligation de motivation est dès lors recevable.
– Sur le fond
57 Selon une jurisprudence constante, l’obligation de motivation prescrite par l’article 25, paragraphe 2, du statut, qui ne constitue que la reprise de l’obligation générale édictée à l’article 253 CE, a pour but, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour apprécier le bien-fondé de l’acte lui faisant grief et l’opportunité d’introduire un recours devant le Tribunal et, d’autre part, de permettre à ce dernier d’exercer son contrôle sur la légalité de l’acte. Il s’ensuit que l’obligation de motivation ainsi édictée constitue un principe essentiel du droit communautaire auquel il ne saurait être dérogé qu’en raison de considérations impérieuses (arrêt Michel/Parlement, point 46 supra, point 22 ; arrêts du Tribunal du 18 mars 1997, Picciolo et Caló/Comité des régions, T‑178/95 et T‑179/95, RecFP p. I‑A‑51 et II‑155, point 33, et du 6 juillet 2004, Huygens/Commission, T‑281/01, non encore publié au Recueil, point 105).
58 Aux termes de l’article 45 du statut, l’AIPN n’est pas tenue de motiver les décisions de promotion à l’égard des candidats non promus, auxquels une telle motivation risquerait d’être préjudiciable (arrêt de la Cour du 13 juillet 1972, Bernardi/Parlement, 90/71, Rec. p. 603, point 15, et arrêt du Tribunal du 12 décembre 2002, Morello/Commission, T‑338/00 et T‑376/00, RecFP p. I‑A‑301 et II‑1457, point 48). Il en va de même en ce qui concerne les décisions de l’AIPN de ne pas retenir une candidature (arrêt de la Cour du 13 avril 1978, Ganzini/Commission, 101/77, Rec. p. 915, point 10, et arrêt du Tribunal du 29 mai 1997, Contargyris/Conseil, T‑6/96, RecFP p. I‑A‑119 et II‑357, point 147).
59 L’AIPN a, en revanche, l’obligation de motiver sa décision portant rejet d’une réclamation introduite en vertu de l’article 90, paragraphe 2, du statut par le candidat écarté contre la décision rejetant sa candidature et/ou contre celle portant nomination d’un autre candidat [voir, pour un candidat non promu, arrêts de la Cour Grassi/Conseil, point 49 supra, point 13 ; Parlement/Volger, point 30 supra, point 22 (à propos du rejet de la candidature d’un fonctionnaire), et du 23 septembre 2004, Hectors/Parlement, C‑150/03 P, non encore publié au Recueil, point 40 (à propos du rejet de la candidature d’un agent temporaire)], la motivation de cette décision de rejet étant censée coïncider avec la motivation de la décision contre laquelle la réclamation était dirigée, en sorte que l’examen des motifs de l’une et de l’autre se confond (arrêts Moli/Commission, point 29 supra, point 12, et Parlement/Volger, point 30 supra, point 22 ; arrêts du Tribunal Volger/Parlement, point 30 supra, point 36, et du 18 septembre 2003, Callebaut/Commission, T‑241/02, RecFP p. I‑A‑215 et II‑1061, point 42).
60 Le caractère suffisant de la motivation est apprécié au regard du contexte factuel et juridique dans lequel s’est inscrite l’adoption de l’acte attaqué (arrêt de la Cour du 14 février 1990, Delacre e.a./Commission, C‑350/88, Rec. p. I‑395, point 16). Les promotions se faisant au choix, conformément à l’article 45 du statut, il suffit que la motivation du rejet de la réclamation se rapporte à l’application des conditions légales et statutaires de promotion qui a été faite à la situation individuelle du fonctionnaire (arrêt Roman Parra/Commission, point 30 supra, point 27).
61 En cas d’absence totale de motivation avant l’introduction d’un recours, il est de jurisprudence que ladite absence ne peut être couverte par des explications fournies par l’AIPN après l’introduction du recours. À ce stade, de telles explications ne rempliraient plus leur fonction. L’introduction d’un recours met donc un terme à la possibilité pour l’AIPN de régulariser sa décision par une réponse portant rejet de la réclamation (arrêts Michel/Parlement, point 46 supra, point 22, et Parlement/Volger, point 30 supra, point 23 ; arrêts du Tribunal Volger/Parlement, point 30 supra, points 40 et 41 ; du 23 février 1994, Coussios/Commission, T‑18/92 et T‑68/92, RecFP p. I‑A‑47 et II‑171, points 74 à 76 ; Brumter/Commission, point 30 supra, points 33 et 34 ; Roman Parra/Commission, point 30 supra, point 32, et Huygens/Commission, point 57 supra, point 108).
62 En effet, la possibilité de régulariser l’absence totale de motivation après la formation d’un recours porterait atteinte aux droits de la défense, puisque le requérant disposerait uniquement de la réplique pour présenter ses moyens à l’encontre de la motivation dont il ne prendrait connaissance qu’après l’introduction de la requête. Le principe d’égalité des parties devant le juge communautaire s’en trouverait ainsi affecté (arrêts Volger/Parlement, point 30 supra, point 41, et Huygens/Commission, point 57 supra, point 109).
63 En revanche, une insuffisance de la motivation fournie dans le cadre de la procédure précontentieuse n’est pas de nature à justifier l’annulation de la décision entreprise lorsque des précisions complémentaires sont apportées par l’AIPN en cours d’instance, étant entendu toutefois que l’institution n’est pas autorisée à substituer une motivation entièrement nouvelle à la motivation initiale erronée (arrêt de la Cour du 30 mai 1984, Picciolo/Parlement, 111/83, Rec. p. 2323, point 22 ; arrêts du Tribunal du 3 mars 1993, Vela Palacios/CES, T‑25/92, Rec. p. II‑201, points 26 et 27, et Morello/Commission, T‑338/00 et T‑376/00, point 58 supra, point 55).
64 À cet égard, l’étendue de l’obligation de motiver doit, dans chaque cas, être appréciée en fonction de circonstances concrètes (arrêt de la Cour du 14 juillet 1977, Geist/Commission, 61/76, Rec. p. 1419, point 28, et arrêt du Tribunal du 6 juillet 1995, Ojha/Commission, T‑36/93, RecFP p. I‑A‑161 et II‑497, point 60). En particulier, une décision est suffisamment motivée dès lors qu’elle est intervenue dans un contexte connu du fonctionnaire concerné, qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (arrêt de la Cour du 29 octobre 1981, Arning/Commission, 125/80, Rec. p. 2539, point 13 ; arrêts du Tribunal Ojha/Commission, précité, point 60, et du 6 mars 2001, Campoli/Commission, T‑100/00, RecFP p. I‑A‑71 et II‑347, point 53).
65 Ainsi, pour décider s’il est satisfait à l’exigence de motivation prévue par le statut, il convient de prendre en considération non seulement les documents par lesquels la décision a été communiquée, mais également les circonstances dans lesquelles celle-ci a été prise et portée à la connaissance de l’intéressé. Ainsi, il peut suffire que l’intéressé ait pu connaître, notamment par des notes de services et d’autres communications, les éléments essentiels qui ont guidé l’administration dans sa décision (arrêt Geist/Commission, point 64 supra, point 23, et arrêt du Tribunal du 23 novembre 1999, Sabbioni/Commission, T‑129/98, RecFP p. I‑A‑223 et II‑1139, point 30). Le Tribunal a précisé en particulier que des entretiens avec l’administration pouvaient également permettre au fonctionnaire intéressé de connaître le contexte dans lequel une décision lui faisant grief avait été prise (voir, en ce sens, arrêt Ojha/Commission, point 64 supra, point 61).
66 En l’espèce, il y a d’abord lieu de constater que c’est par la voie d’un formulaire type dépourvu de toute motivation que la requérante s’est vu notifier, le 3 juin 2002, le rejet de sa candidature. Dans ce formulaire, l’AIPN se limite en effet à informer la requérante, par le biais d’une croix portée en face d’un libellé standard, de ce qu’elle n’a pu retenir sa candidature à l’emploi à pourvoir.
67 Il y a lieu de constater, ensuite, que ce n’est que par décision du 30 octobre 2002, notifiée à la requérante le 6 novembre 2002, soit plus de trois mois après le dépôt de la requête introductive d’instance, que l’AIPN a répondu à la réclamation que la requérante a introduite le 28 février 2002 à l’encontre de la décision de la Commission de nommer Mme S. à l’emploi à pourvoir.
68 Il est donc constant que, à la date d’introduction de son recours, la requérante ne s’était vu notifier aucune décision motivée concernant le rejet de sa candidature ou le rejet de sa réclamation, celui-ci ayant été implicite.
69 Il importe néanmoins de déterminer si d’autres éléments ont pu, lors de la procédure précontentieuse, constituer une motivation de la décision de rejet de candidature de la requérante ou, à tout le moins, le début d’une telle motivation.
70 Selon la Commission, il aurait été satisfait à l’obligation de motivation dans la mesure où la requérante aurait connu les circonstances de la décision de rejet de sa candidature. Ces circonstances auraient été portées à sa connaissance, premièrement, par le biais du procès-verbal de la réunion organisée par la Commission, en date du 30 janvier 2002, deuxièmement, à l’occasion des entretiens qu’elle a eu tant avant la prise de décision, avec le CCN dans sa formation élargie le 25 octobre 2001 et avec M. Patten le 16 novembre 2001, qu’à la suite du rejet de sa candidature, avec M. L. et enfin, troisièmement, lors de la réunion interservices du 5 juin 2002.
71 S’agissant, premièrement, du procès-verbal de la réunion du 30 janvier 2002, il y a d’abord lieu de relever que ce n’est qu’à l’audience que la Commission a soutenu que ledit procès-verbal avait pu tenir lieu, en tant que tel, de motivation de la décision de rejet de la candidature de la requérante.
72 Il importe de relever ensuite que, si le procès-verbal de la réunion organisée par la Commission le 30 janvier 2002 fait, certes, référence aux avis du CCN des 5 et 25 octobre 2001, chacun desdits avis se limite à indiquer que la candidature de la requérante pouvait être prise en considération. En particulier, l’avis du 25 octobre 2001 indique que, « à l’issue [des auditions du 25 octobre 2001], le [CCN] constate que les candidatures de M. […], [de] [la requérante] et [de Mme S.], citées par ordre alphabétique, réunissent pleinement les qualifications requises pour l’emploi en cause et pourraient être prises en considération […] ». La référence à ces avis ne saurait donc en aucun cas motiver le rejet de la candidature de la requérante, quand bien même, comme l’a soutenu la Commission lors de l’audience, des fiches d’évaluation de teneurs différentes, relatives à la prestation orale de chaque candidat, auraient été jointes à l’avis du 25 octobre 2001.
73 En tout état de cause, il résulte du dossier que la requérante n’a pas eu connaissance de la teneur des avis du CCN des 5 et 25 octobre 2001 avant l’introduction de son recours, puisqu’elle a demandé communication desdits avis par lettre de ses conseils du 19 juin 2002 et que la Commission n’a pas déféré à cette demande. En effet, l’avis du CCN du 25 octobre 2001 n’a été communiqué par la Commission qu’en annexe à son mémoire en défense et l’avis préalable du 5 octobre 2001 n’a été communiqué qu’en réponse à une demande de production de documents par le Tribunal. Par ailleurs, dans sa lettre adressée à la requérante, en date du 29 octobre 2001 (voir point 7 ci-dessus), le secrétaire du CCN s’est limité à indiquer que trois candidatures, dont celle de la requérante, « réuniss[aient] pleinement les qualifications requises pour l’emploi en cause et pourraient être prises en considération [pour le pourvoi du poste] ».
74 Enfin, il y a lieu de constater que la référence effectuée dans le procès-verbal de la réunion du 30 janvier 2002 au fait qu’il avait été procédé à un examen comparatif des mérites des candidats en fonction des caractéristiques du poste et que les rapports sur la compétence, le rendement et la conduite dans le service de chacun des candidats avaient été examinés constitue une formulation générale et stéréotypée, calquée sur la rédaction de l’article 45 du statut, qui ne comporte aucun élément d’information spécifique au cas de l’intéressé et équivaut, en réalité, à une absence totale de motivation (voir, en ce sens, arrêt Roman Parra/Commission, point 30 supra, point 31).
75 Il résulte de ce qui précède que le procès-verbal de la réunion du 30 janvier 2002 ne saurait avoir constitué un quelconque début de motivation de la décision de rejet de la candidature de la requérante.
76 S’agissant, deuxièmement, d’une part, des entretiens de la requérante avec le CCN dans sa formation élargie le 25 octobre 2001 et avec M. Patten le 16 novembre 2001, il suffit de constater que, ainsi qu’il ressort tant de l’exposé des faits que du procès-verbal de la réunion du 30 janvier 2002, lesdits entretiens étaient des éléments constitutifs de la procédure de sélection des candidats devant être départagés avant adoption de la décision finale sur le pourvoi de l’emploi en cause et qu’ils visaient à permettre à la Commission d’évaluer la candidature de la requérante à cette fin. Ces entretiens, intervenus préalablement à l’adoption de la décision de rejet de candidature de la requérante, ne sauraient donc en aucun cas avoir explicité les motifs de l’adoption de ladite décision ni, par conséquent, constitué un quelconque début de motivation de celle-ci.
77 D’autre part, s’agissant des entretiens que la requérante aurait eus avec M. L. postérieurement au rejet de sa candidature, le 30 janvier 2002, il y a lieu de relever, d’abord, que la Commission n’a jamais invoqué l’existence de tels entretiens dans ses écritures. Ensuite, il importe de relever qu’il résulte de l’audience, d’une part, que la requérante conteste formellement que des explications sur le rejet de sa candidature lui aient été fournies à cette occasion et, d’autre part, que la Commission, qui ne conteste pas que lesdits entretiens visaient essentiellement à procéder à la réaffectation de la requérante, n’est pas en mesure d’établir que des explications relatives au rejet de sa candidature lui ont été fournies à cette occasion. Enfin, il y a lieu de constater que M. L. n’a participé à la procédure de sélection qu’à un stade au terme duquel la candidature de la requérante était considérée comme devant être prise en considération pour le pourvoi du poste, en sorte que M. L. ne saurait avoir été en mesure de fournir à la requérante des explications quant au rejet de sa candidature.
78 Il y a donc lieu de considérer que les entretiens de la requérante avec M. L. ne sauraient avoir constitué un quelconque début de motivation de la décision de rejet de sa candidature.
79 S’agissant, troisièmement, de la question de savoir si les explications orales fournies à la requérante au cours de la réunion interservices du 5 juin 2002 peuvent être considérées comme un début de motivation de la décision de rejet de sa candidature, il y a lieu de relever, d’abord, que selon la jurisprudence, ce n’est que très exceptionnellement, et au vu de circonstances spécifiques, que des explications orales fournies au cours d’une réunion interservices peuvent être considérées comme un début de motivation pouvant être complété en cours d’instance (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal Vicente Nuñez/Commission, point 30 supra, point 44 ; du 23 avril 2002, Campolargo/Commission, T‑372/00, RecFP p. I‑A‑49 et II‑223, point 58, et du 3 février 2005, Heurtaux/Commission, T‑172/03, non encore publié au Recueil, point 47).
80 À cet égard, il convient de relever que les réunions interservices ont un rôle consultatif, la décision finale quant au sort à réserver à la réclamation étant prise par l’AIPN, et que les propos échangés lors de telles réunions ne sauraient, hormis dans des circonstances exceptionnelles, être constitutifs de la motivation de la décision attaquée. En outre, comme la Commission le souligne elle-même, les réunions interservices sont informelles, afin que la personne ayant déposé la réclamation puisse exposer les arguments contenus dans celle-ci dans un contexte serein. Or, l’absence de formalité de telles réunions, traduite par le fait qu’aucun compte rendu n’en est établi, s’oppose en principe à ce que les propos qui y sont échangés puissent être considérés comme un début de motivation.
81 Par ailleurs, il y a lieu de constater que les parties expriment des positions divergentes sur les explications orales fournies lors de la réunion interservices du 5 juin 2002 et que les éléments qui auraient été avancés au cours de ladite réunion quant à l’examen comparatif qui aurait précédé l’adoption de la décision attaquée apparaissent comme étant incertains.
82 En effet, la requérante a cru comprendre, notamment à partir des affirmations faites au cours de cette réunion par la représentante de la DG « Relations extérieures » que, s’agissant de la sélection des candidatures, d’autres éléments avaient été pris en considération, ce qui aurait conduit le représentant du personnel présent à noter qu’une telle affirmation tendait à montrer que le choix entre les candidats était fondé sur d’autres éléments que les qualifications et le mérite.
83 La Commission, sans nier qu’une telle affirmation ait été faite, soutient que la requérante a pu s’exprimer et recevoir des éléments de comparaison entre sa candidature et celle de Mme S. ainsi que des explications sur les raisons qui ont conduit la Commission à préférer cette dernière. Il aurait été expliqué que les candidatures de la requérante et de Mme S. respectaient les exigences de l’avis de vacance mais que les expériences professionnelles de Mme S., qui étaient beaucoup plus larges que celles de la requérante, ont déterminé le choix de sa candidature. À l’appui de cette affirmation, la Commission produit d’ailleurs une attestation de Mme G., chef de l’unité « Ressources humaines et administration » de la direction « Ressources au siège, information, relations interinstitutionnelles » de la DG « Relations extérieures », présente lors de cette réunion, qui en confirmerait la teneur.
84 Or, d’une part, la déclaration de Mme G. émane d’une personne qui indique ne pas avoir participé « aux étapes antérieures de la pré-sélection ou sélection des candidats pour le pourvoi du poste en question ». D’autre part, ladite déclaration n’établit pas, en tout état de cause, qu’un examen comparatif des mérites a été effectué puisque Mme G. se borne à déclarer qu’elle a indiqué que les deux candidates étaient valables par rapport aux termes de l’avis de vacance et que, en termes d’expérience professionnelle, la carrière de [Mme S.] était caractérisée par des expériences beaucoup plus larges, qu’elle avait assumé des postes de responsabilité dans des contextes variés et, à chaque fois, confirmé ses capacités.
85 Il importe donc de constater qu’aucune circonstance spécifique n’est de nature à justifier que la teneur de la réunion interservices puisse à titre exceptionnel être considérée comme un début de motivation.
86 Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que, au moment de l’introduction du recours par la requérante, la décision de rejet de sa candidature était caractérisée par une absence totale de motivation. Dès lors, il y a lieu d’accueillir le présent moyen et d’annuler les décisions attaquées sans qu’il soit nécessaire d’examiner le second moyen invoqué par la requérante.
Sur la demande en indemnité
Arguments des parties
87 La requérante fait valoir que les illégalités invoquées sont constitutives d’autant de fautes fondant une obligation de réparation du préjudice subi dès lors qu’il existe un lien avéré entre le préjudice subi et ces fautes. Elle précise que sa demande de réparation de ce préjudice ne saurait être considérée comme étant subsidiaire à une éventuelle décision d’annulation dans la mesure où cette dernière n’entraînerait pas pour autant la promotion de la requérante au poste en question.
88 En l’occurrence, le préjudice subi serait à la fois matériel et moral.
89 Le préjudice matériel subi résulterait de la perte des droits pécuniaires résultant du refus d’accès au grade A 2 ou, à tout le moins, de la chance d’y accéder, et de l’ensemble des droits et intérêts perdus en termes de carrière, notamment en termes de promotion, de mutation, de transfert et de pension.
90 Si la requérante reconnaît ne pas bénéficier d’un droit à être promue, elle soutient néanmoins que, en raison du faible écart ayant séparé sa candidature de celle de Mme S., il est légitime de considérer que si la décision portant nomination de Mme S. venait à être annulée, elle était le seul candidat à pouvoir prétendre à la promotion au poste vacant.
91 L’annulation demandée des décisions attaquées ne serait d’ailleurs pas susceptible de réparer le préjudice subi, pas même en cas de nouvelle publication du poste, dès lors que la requérante partira à la retraite à la fin de l’année 2005 et ne sera donc pas, de ce fait, en mesure d’être promue à cet emploi.
92 La requérante maintient ainsi sa prétention de réparation du préjudice matériel, lequel, sur le fondement du différentiel existant entre la grille de rémunération d’un fonctionnaire de grade A 2 et celle d’un fonctionnaire de grade A 3 s’élèverait, au jour de l’introduction du recours, à 3 213,96 euros, cette somme augmentant chaque mois.
93 Quant au préjudice moral, il serait grave et résulterait du rejet illicite de la candidature de la requérante. Il tiendrait notamment au fait que la requérante n’a jamais été informée des motifs sous-tendant les décisions attaquées et, en particulier, de la décision de rejet de sa réclamation, alors même qu’elle se serait adressée à plusieurs reprises à l’AIPN pour obtenir des éclaircissements à cet égard. Un tel refus de la Commission de motiver sa décision ne pouvait selon elle s’interpréter que comme une volonté de ne pas dévoiler une motivation contestable. Pour obtenir communication des éléments et des pièces nécessaires à la défense de ses droits et intérêts, la requérante aurait en définitive été contrainte d’introduire le présent recours.
94 En outre, la requérante se serait dévouée depuis de très nombreuses années au service de la Commission, qui se serait en l’occurrence comportée avec légèreté et pour le moins avec négligence, ne lui témoignant, à l’occasion de la procédure de nomination en cause, aucune reconnaissance.
95 La requérante évalue donc son préjudice moral, ex æquo et bono, à 20 000 euros.
96 La Commission conteste avoir commis une quelconque illégalité et rejette l’hypothèse d’une indemnisation de la requérante.
Appréciation du Tribunal
97 Il résulte d’une jurisprudence constante dans le domaine de la fonction publique que l’engagement de la responsabilité de la Communauté est subordonné à la réunion d’un ensemble de conditions, à savoir l’illégalité du comportement reproché à l’institution, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué (arrêt de la Cour du 16 décembre 1987, Delauche/Commission, 111/86, Rec. p. 5345, point 30 ; arrêts du Tribunal du 16 septembre 1998, Rasmussen/Commission, T‑234/97, RecFP p. I‑A‑507 et II‑1533, point 71 ; du 7 mai 2003, Lavagnoli/Commission, T‑327/01, RecFP p. I‑A‑143 et II‑691, point 47 ; Huygens/Commission, point 57 supra, point 51, et du 9 novembre 2004, Montalto/Conseil, T‑116/03, non encore publié au Recueil, point 125).
98 Il s’ensuit que, même dans l’hypothèse où une faute d’une institution est établie, la responsabilité de la Communauté n’est engagée que si le requérant est parvenu à démontrer la réalité de son préjudice (arrêts du Tribunal du 14 mai 1998, Lucaccioni/Commission, T‑165/95, RecFP p. I‑A‑203 et II‑627, point 57, et Montalto/Conseil, point 97 supra, point 126).
99 S’agissant des illégalités qui seraient à l’origine du préjudice matériel invoqué par la requérante, il convient de constater que, la décision de rejet de candidature de la requérante étant dépourvue de motivation, ce qui justifie son annulation ainsi que celle de la décision de nomination de Mme S., il n’est pas possible d’examiner son bien-fondé, en sorte que le Tribunal ne peut se prononcer sur les illégalités alléguées.
100 En outre, il incombe à la Commission, en vertu de l’article 233 CE, de déterminer les mesures que comporte l’exécution du présent arrêt et d’adopter, le cas échéant, une nouvelle décision pourvue d’une motivation. Le Tribunal ne saurait, sans préjuger de la substance de cette nouvelle décision, se prononcer, à l’occasion du présent recours, sur la demande en réparation du préjudice matériel allégué par la requérante (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 5 mars 2002, Le Canne/Commission, T‑241/00, Rec. p. II‑1251, points 62 et 63).
101 S’agissant du préjudice moral résultant du défaut de motivation des décisions litigieuses, il y a lieu de considérer que l’annulation de celles-ci constitue en elle-même une réparation adéquate du préjudice que la requérante a subi dans le cas d’espèce. La demande d’indemnisation de ce chef de préjudice doit, dès lors, être rejetée (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 7 octobre 1985, Van der Stijl/Commission, 128/84, Rec. p. 3281, point 26 ; du 9 juillet 1987, Hochbaum et Rawes/Commission, 44/85, 77/85, 294/85 et 295/85, Rec. p. 3259, point 22, et Hectors/Parlement, point 59 supra, point 61).
102 Il résulte de ce qui précède que la demande en indemnité doit être rejetée.
Sur les dépens
103 Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, la partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la requérante.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (cinquième chambre)
déclare et arrête :
1) Les décisions de la Commission du 30 janvier 2002 portant nomination de Mme S. au poste concerné par l’avis de vacance COM/156/01 et rejet de la candidature de la requérante à ce poste sont annulées.
2) Le recours est rejeté pour le surplus.
3) La Commission est condamnée aux dépens.
Vilaras |
Martins Ribeiro |
Jürimäe |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 29 septembre 2005
Le greffier |
Le président |
H. Jung |
M. Vilaras |
Table des matières
Faits à l’origine du litige
Procédure
Conclusions des parties
Sur la demande en annulation de la décision implicite de rejet de la réclamation
Sur la demande en annulation des décisions de l’AIPN du 30 janvier 2002 de nommer Mme S. directeur de la direction B de la DG « Relations extérieures » et de ne pas retenir la candidature de la requérante à cet emploi
Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation
Arguments des parties
Appréciation du Tribunal
– Sur la recevabilité
– Sur le fond
Sur la demande en indemnité
Arguments des parties
Appréciation du Tribunal
Sur les dépens
* Langue de procédure : le français.