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Document 62011TJ0281
JUDGMENT OF THE GENERAL COURT (Appeal Chamber) 16 May 2013.#Diego Canga Fano v Council of the European Union.#Appeal — Civil service — Officials — Promotion — 2009 promotion exercise — Decision not to promote the applicant to grade AD 13 — Comparison of merits — Review by the Courts of manifest error of assessment.#Case T‑281/11 P.
WYROK SĄDU (izba ds. odwołań) z dnia 16 maja 2013 r.
Diego Canga Fano przeciwko Radzie Unii Europejskiej.
Odwołanie – Służba publiczna – Urzędnicy – Awans – Postępowanie w sprawie awansu za 2009 r. – Decyzja o nieawansowaniu wnoszącego odwołanie do grupy zaszeregowania AD 13 – Porównanie osiągnięć – Dokonywana przez sąd kontrola oczywistego błędu w ocenie.
Sprawa T‑281/11 P.
WYROK SĄDU (izba ds. odwołań) z dnia 16 maja 2013 r.
Diego Canga Fano przeciwko Radzie Unii Europejskiej.
Odwołanie – Służba publiczna – Urzędnicy – Awans – Postępowanie w sprawie awansu za 2009 r. – Decyzja o nieawansowaniu wnoszącego odwołanie do grupy zaszeregowania AD 13 – Porównanie osiągnięć – Dokonywana przez sąd kontrola oczywistego błędu w ocenie.
Sprawa T‑281/11 P.
Court reports – Reports of Staff Cases
ECLI identifier: ECLI:EU:T:2013:252
ARRÊT DU TRIBUNAL (chambre des pourvois)
16 mai 2013 (*)
« Pourvoi – Fonction publique – Fonctionnaires – Promotion – Exercice de promotion 2009 – Décision de ne pas promouvoir le requérant au grade AD 13 – Comparaison des mérites – Contrôle par le juge de l’erreur manifeste d’appréciation »
Dans l’affaire T‑281/11 P,
ayant pour objet un pourvoi formé contre l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (première chambre) du 24 mars 2011, Canga Fano/Conseil (F‑104/09), et tendant à l’annulation de cet arrêt,
Diego Canga Fano, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté par Mes S. Rodrigues et C. Bernard-Glanz, avocats,
partie requérante,
l’autre partie à la procédure étant
Conseil de l’Union européenne, représenté par MM. M. Bauer et J. Herrmann, en qualité d’agents,
partie défenderesse en première instance,
LE TRIBUNAL (chambre des pourvois),
composé de MM. M. Jaeger, président, N. J. Forwood (rapporteur) et L. Truchot, juges,
greffier : Mme C. Kristensen, administrateur,
rend le présent
Arrêt
1 Par son pourvoi introduit au titre de l’article 9 de l’annexe I du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, le requérant, M. Diego Canga Fano, demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (première chambre) du 24 mars 2011, Canga Fano/Conseil (F‑104/09, ci-après l’« arrêt attaqué »), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant, d’une part, à l’annulation de la décision du Conseil de l’Union européenne de ne pas le promouvoir au grade AD 13 au titre de l’exercice de promotion 2009 et, d’autre part, à la condamnation du Conseil à lui verser la somme de 200 000 euros en réparation des préjudices moral et professionnel qu’il allègue avoir subis du fait de l’illégalité de cette décision.
Faits à l’origine du litige
2 Les faits essentiels qui sont à l’origine du litige sont énoncés aux points 3 à 10 de l’arrêt attaqué, dans les termes suivants :
« 3 [L]e requérant est entré en service auprès du secrétariat général du Conseil (ci-après le ‘SGC’) le 1er septembre 1991 en tant que fonctionnaire de grade A 7. Il a été promu en dernier lieu au grade A 4 (devenu AD 12) le 1er juin 2001. Depuis le 1er avril 1994, il est affecté au service juridique du Conseil. Toutefois, pendant la période comprise entre le 1er octobre 1999 et le 30 septembre 2003, il a été détaché dans l’intérêt du service auprès du cabinet de Mme de Palacio, membre de la Commission des Communautés européennes. Au terme de ce détachement, le requérant a réintégré le service juridique dans l’équipe ‘Relations extérieures’, puis à partir du 1er octobre 2007, dans l’équipe 1B ‘Coreper I’. Depuis le 1er juin 2008, il se trouve en situation de détachement dans l’intérêt du service auprès du cabinet de M. Tajani, membre de la Commission, où il occupe le poste de chef de cabinet adjoint.
4 Par communication au personnel no 50/09 du 5 mars 2009, le SGC a informé les fonctionnaires des éléments mis à la disposition des commissions consultatives de promotion pour l’exercice de promotion 2009, ainsi que des mesures adoptées pour mettre en œuvre les dispositions de l’article 45 du statut [des fonctionnaires des Communautés européennes]. L’annexe 2 de cette communication précisait, pour chaque grade, le nombre de promotions possibles en 2009 et l’annexe 3 comportait la liste des fonctionnaires promouvables. Ainsi, selon l’annexe 2, il y avait 19 emplois de grade AD 13 à pourvoir pour des administrateurs affectés à des fonctions généralistes, alors que 91 fonctionnaires de grade AD 12 affectés à des fonctions généralistes figuraient sur la liste de l’annexe 3, où le requérant occupait la 20e place par ordre d’ancienneté dans le grade.
5 Selon la communication au personnel no 50/09, les commissions consultatives de promotion disposaient, notamment, des rapports de notation dont chaque fonctionnaire promouvable avait fait l’objet depuis sa nomination dans le grade AD 12 jusqu’au dernier rapport disponible, à savoir celui de l’exercice allant du 1er juillet 2006 au 31 décembre 2007 (ci-après le ‘rapport de notation 2006-2007’).
6 Le SGC a joint à la communication au personnel no 54/09 du 10 mars 2009 des statistiques relatives à l’exercice de notation 2006-2007, notamment le tableau 2.1, qui contient des statistiques établies selon les grades des fonctionnaires (ci-après le ‘tableau 2.1’), et le tableau 3.1, qui correspond aux statistiques par direction générale/direction/grand service (ci-après le ‘tableau 3.1’). Il ressort de la communication au personnel no 54/09 que ces statistiques avaient également été communiquées aux commissions consultatives de promotion.
7 Au terme de ses travaux, la commission consultative de promotion pour le groupe de fonctions AD (fonctionnaires affectés à des emplois d’administrateur) a soumis à l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’‘AIPN’) une liste – relative aux administrateurs affectés à des fonctions généralistes – comprenant les noms des dix-neuf fonctionnaires proposés pour une promotion au grade AD 13 (ci-après la ‘liste des fonctionnaires promus au grade AD 13’), dont dix détenaient une ancienneté dans le grade inférieure à celle du requérant. Ce dernier ne figurait pas sur cette liste.
8 Par communication au personnel no 94/09, du 27 avril 2009, l’AIPN a informé les fonctionnaires de sa décision de suivre l’avis exprimé par la commission consultative de promotion et de promouvoir au grade AD 13 les dix-neuf fonctionnaires proposés.
9 Par courrier du 27 mai 2009, le requérant, faisant référence à l’article 90, paragraphe 1, du statut [des fonctionnaires des Communautés européennes], a contesté la décision de ne pas le promouvoir révélée par la communication au personnel no 94/09.
10 Par décision du 24 septembre 2009, notifiée au requérant le lendemain, l’AIPN a qualifié le courrier du 27 mai 2009 de réclamation, au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut [des fonctionnaires des Communautés européennes], et a rejeté cette dernière. »
Procédure en première instance et arrêt attaqué
3 Par requête parvenue au greffe du Tribunal de la fonction publique le 21 décembre 2009, le requérant a introduit un recours visant à ce qu’il plût notamment audit Tribunal :
– annuler la décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») de ne pas l’inclure dans la liste des fonctionnaires promus au grade AD 13, telle que cette décision ressort de la communication au personnel no 94/09 ;
– annuler, en tant que de besoin, la décision de l’AIPN rejetant sa réclamation ;
– condamner le Conseil à lui verser, d’une part, une somme fixée ex aequo et bono à 150 000 euros, en réparation de son préjudice moral, à majorer des intérêts de retard au taux légal à dater du moment où cette somme deviendra exigible, et d’autre part, une somme fixée ex aequo et bono à 50 000 euros, en réparation de son préjudice professionnel, à majorer des intérêts de retard au taux légal à dater du moment où cette somme deviendra exigible ;
– condamner le Conseil aux dépens.
4 Le Conseil a conclu au rejet du recours comme étant non fondé et a invité le Tribunal de la fonction publique à condamner le requérant aux dépens.
5 Le Tribunal de la fonction publique a ordonné diverses mesures d’organisation de la procédure. Ainsi, il a notamment invité le Conseil à produire les rapports de notation anonymisés des dix fonctionnaires ayant une ancienneté dans le grade inférieure à celle du requérant et dont le nom apparaissait sur la liste des fonctionnaires promus au grade AD 13 (ci-après les « dix fonctionnaires »). Outre lesdits rapports, le Conseil a transmis au Tribunal un tableau synoptique reprenant les informations découlant des deux derniers rapports de notation du requérant et de chacun des dix fonctionnaires concernés, identifiés par les lettres A à J. Ce tableau contient, pour chacun de ces rapports de notation, la description des fonctions et/ou le niveau des responsabilités exercées, un extrait des appréciations d’ordre général, la moyenne des appréciations analytiques ainsi que les langues utilisées dans l’exercice des fonctions. Les parties ont, à la demande du Tribunal de la fonction publique, formulé leurs observations sur ces documents.
6 Dans l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique a jugé, à titre liminaire, que les conclusions en annulation dirigées contre la décision de l’AIPN du 24 septembre 2009, portant rejet de la réclamation introduite par le requérant, n’avaient pas de contenu autonome et qu’elles se confondaient avec celles dirigées contre la décision de ne pas inclure celui-ci dans la liste des fonctionnaires promus au grade AD 13.
7 S’agissant du premier moyen, pris d’une violation de l’article 45, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut »), en ce que l’AIPN aurait commis plusieurs erreurs d’appréciation lors de la comparaison des mérites du requérant avec ceux des dix fonctionnaires concernés dans le cadre de l’exercice de promotion au grade AD 13, le Tribunal de la fonction publique a commencé par rappeler les principes encadrant la mise en œuvre de cette disposition par l’administration. Ainsi, il a souligné que c’était en principe à l’aune des trois critères mentionnés à l’article 45, paragraphe 1, du statut que s’effectuait désormais l’examen comparatif des mérites des fonctionnaires promouvables. Il a ajouté que ce n’était qu’à titre subsidiaire, en cas d’égalité des mérites des fonctionnaires concernés, que l’administration pouvait prendre en considération d’autres éléments, tels que l’âge ou l’ancienneté dans le grade ou le service.
8 Le Tribunal de la fonction publique a ensuite indiqué que, si l’administration disposait d’un large pouvoir d’appréciation s’agissant de l’examen comparatif des mérites de fonctionnaires promouvables, le contrôle opéré par le juge de l’Union devant se limiter à la censure d’erreurs manifestes d’appréciation, elle était néanmoins tenue de procéder à un tel examen avec soin et impartialité, dans l’intérêt du service et conformément au principe d’égalité de traitement.
9 Estimant que le requérant visait, par son premier moyen, à critiquer l’appréciation comparative de ses mérites et de ceux des dix fonctionnaires promus ayant une ancienneté dans le grade inférieure à la sienne telle qu’elle avait été effectuée par l’AIPN, le Tribunal de la fonction publique a examiné successivement les rapports de notation produits par le Conseil, l’utilisation des langues par les fonctionnaires concernés ainsi que le niveau des responsabilités exercées par ces derniers.
10 En ce qui concerne les rapports de notation, le Tribunal de la fonction publique a indiqué que la commission consultative de promotion avait essentiellement pris en compte les appréciations analytiques correspondant au rapport établi pour l’exercice allant du 1er juillet 2006 au 31 décembre 2007 (ci-après le « rapport de notation 2006-2007 ») en ce qui concernait le requérant et les dix fonctionnaires. À cet égard, il a observé, d’une part, que la moyenne des appréciations analytiques obtenues par le requérant pour la période comprise entre le 1er juillet 2006 et le 31 décembre 2007 était nettement meilleure que la cote moyenne de l’ensemble des fonctionnaires de grade AD12 et, d’autre part, que quatre des dix fonctionnaires concernés avaient obtenu, pour la même période, une meilleure moyenne que celle du requérant, alors que trois avaient obtenu une moyenne identique. Le Tribunal de la fonction publique a en outre relevé que, si trois des dix fonctionnaires concernés avaient obtenu, dans leurs appréciations analytiques, une moins bonne moyenne que celle du requérant, l’écart entre ces diverses moyennes était à ce point réduit qu’il pouvait être considéré comme négligeable en l’espèce.
11 Le Tribunal de la fonction publique a également rejeté l’argument pris de la circonstance que les quatre fonctionnaires concernés qui avaient obtenu une meilleure moyenne appartenaient à des directions générales dans lesquelles la notation moyenne des fonctionnaires était globalement meilleure qu’au service juridique, ce qui aurait témoigné d’une tendance des notateurs à évaluer les fonctionnaires desdites directions générales de façon plus généreuse qu’au sein de ce dernier service. À l’appui de ce rejet, il a été souligné, d’une part, que ces notations moyennes étaient calculées sans faire de distinction selon le grade des fonctionnaires évalués, selon le groupe de fonctions auquel ils appartenaient ou encore selon qu’ils étaient ou non promouvables au cours de l’exercice en cause, et, d’autre part, que la moyenne des appréciations analytiques ne constituait qu’une partie des données dont la commission consultative de promotion tenait compte lors de l’examen comparatif des mérites.
12 Au demeurant, le Tribunal de la fonction publique a considéré que le grief pris de l’absence de prise en compte de la présidence du jury de deux concours EPSO par le requérant n’était pas fondé. Il ressortirait en effet des rapports de notation de ce dernier que les notateurs étaient conscients de cette circonstance et que celle-ci a eu une influence positive sur son évaluation.
13 Le Tribunal de la fonction publique a ensuite indiqué que, s’il était certes exact que les appréciations générales dont le requérant avait fait l’objet étaient très élogieuses, tel était tout autant le cas en ce qui concernait les dix fonctionnaires, depuis leur nomination au grade AD12. Aux termes de l’arrêt attaqué, ce constat ne saurait être remis en cause par la circonstance que le premier notateur du requérant, pour la période comprise entre le 1er juillet 2006 et le 31 décembre 2007, a indiqué, dans son rapport de notation, que celui-ci « mérit[ait] une promotion vers le grade supérieur », de telles appréciations n’ayant pas pour effet de lier l’AIPN.
14 Le Tribunal de la fonction publique en a déduit que l’examen comparatif des rapports de notation ne faisait pas apparaître à l’évidence que les dix fonctionnaires n’étaient pas plus méritants que le requérant.
15 En ce qui concerne l’utilisation des langues, le Tribunal de la fonction publique a commencé par rappeler que, au regard de l’article 45, paragraphe 1, du statut, il apparaissait que le critère relatif à l’utilisation par les fonctionnaires, dans l’exercice de leurs fonctions, de langues autres que la langue dont ils ont justifié posséder une connaissance approfondie, ne présentait pas un caractère subsidiaire.
16 Il a ensuite précisé que l’administration disposait d’une certaine marge de manœuvre quant à l’importance qu’elle accordait à chacun des trois critères prévus à l’article 45, paragraphe 1, du statut, les dispositions de celui-ci n’excluant pas la possibilité d’une pondération.
17 Selon le Tribunal de la fonction publique, il ressort de la feuille d’information des connaissances linguistiques jointe au rapport de notation 2006-2007 du requérant que ce dernier, dont la langue maternelle est l’espagnol, a déclaré avoir de très bonnes connaissances du français et de l’anglais, mais, s’agissant de l’allemand, seulement de bonnes capacités de compréhension, un bon niveau en langue parlée et un niveau passable en langue écrite et, s’agissant de l’italien, de bonnes capacités de compréhension et un niveau passable en langue parlée et écrite. Toujours selon cette feuille d’information, les notions de portugais du requérant se limiteraient à un niveau passable en compréhension.
18 De surcroît, le Tribunal de la fonction publique a observé que, si le requérant avait indiqué avoir amélioré sa connaissance de l’italien depuis 2008, cette circonstance était sans pertinence en l’espèce dès lors, entre autres, que la commission consultative de promotion ne pouvait prendre en considération des éléments se rapportant à une période postérieure au dernier rapport de notation des fonctionnaires promouvables.
19 Le Tribunal de la fonction publique a déduit de ces circonstances que les affirmations du requérant lors de l’audience, concernant ses connaissances linguistiques orales en italien et en portugais, ne coïncidaient pas avec les informations relatives aux connaissances linguistiques dont il avait fait état lors de son évaluation pour l’exercice de notation 2006-2007. Il a également constaté que le requérant n’avait apporté aucune preuve aux fins de démontrer que, au terme dudit exercice de notation, ses connaissances orales en italien et en portugais s’étaient améliorées depuis janvier 2007, époque à laquelle il avait complété la feuille d’information relative aux connaissances linguistiques. Il s’ensuit, selon le Tribunal de la fonction publique, que l’AIPN a pu considérer que les compétences orales du requérant en italien et en portugais n’étaient pas suffisamment importantes pour être prises en compte aux fins de la comparaison des mérites linguistiques.
20 Tout en constatant que le requérant employait seulement deux langues de façon régulière dans son travail, à savoir le français et l’anglais, le Tribunal de la fonction publique a observé que, parmi les dix fonctionnaires, tous employaient l’anglais et le français dans l’exercice de leurs fonctions et tous avaient au moins une bonne connaissance de ces langues. Partant, le Tribunal de la fonction publique a considéré que les mérites du requérant étaient, pour l’essentiel, équivalents à ceux des dix fonctionnaires s’agissant du critère de l’utilisation de langues étrangères dans l’exercice des fonctions.
21 En ce qui concerne le niveau des responsabilités exercées, le Tribunal de la fonction publique a tout d’abord relevé que neuf des dix fonctionnaires exerçaient des fonctions d’encadrement pendant l’exercice compris entre le 1er juillet 2006 et le 31 décembre 2007. L’un des dix fonctionnaires (ci-après « le fonctionnaire B ») ainsi que le requérant travaillaient, durant cette période, en qualité de juristes au service juridique du Conseil. Le Tribunal de la fonction publique en a déduit que neuf des dix fonctionnaires concernés exerçaient des fonctions impliquant, en termes de management, un niveau de responsabilités supérieur à celui du requérant, tandis que les fonctions du fonctionnaire B se situaient au même niveau.
22 S’agissant du grief tiré d’une prise en compte insuffisante, par la commission consultative, du surcroît de travail et de responsabilités qu’a impliqué, pour le requérant, la présidence du jury de deux concours de l’Office européen de sélection du personnel (EPSO) pendant l’exercice 2006-2007, le Tribunal de la fonction publique, tout en confirmant cette charge de travail accrue, a souligné que le fait d’assurer la présidence d’un jury de concours était une tâche temporaire. Certes, cette tâche aurait, en l’espèce, duré un an et demi. Le Tribunal de la fonction publique a néanmoins considéré que cette circonstance n’était pas déterminante, puisque neuf des dix fonctionnaires assumaient des fonctions d’encadrement de façon permanente et depuis plus longtemps.
23 Quant au fonctionnaire promu qui était membre du service juridique, tout comme le requérant, le Tribunal de la fonction publique a souligné qu’il avait également assumé des tâches additionnelles pendant la période comprise entre le 1er janvier 2004 et le 31 décembre 2007. Ainsi, il aurait été correcteur de certaines épreuves d’un concours EPSO et aurait participé au secrétariat de la conférence intergouvernementale qui a notamment préparé le projet de traité établissant une constitution pour l’Europe. Partant, selon le Tribunal de la fonction publique, il n’apparaît pas de façon aisément perceptible que, sur la base de l’appréciation globale des critères prévus à l’article 45, paragraphe 1, du statut, les mérites du fonctionnaire B n’aient pas été supérieurs à ceux du requérant.
24 Le Tribunal de la fonction publique a dès lors rejeté le premier moyen comme étant non fondé.
25 S’agissant du second moyen, pris d’un détournement de pouvoir et de procédure, en ce que le Conseil aurait, en refusant de promouvoir le requérant, entendu sanctionner de manière déguisée le fait que ce dernier avait été détaché auprès du cabinet d’un commissaire européen, le Tribunal de la fonction publique a commencé par rappeler que ledit détachement avait eu lieu à une date postérieure à la fin de la période couverte par le dernier rapport de notation pris en compte au titre de l’exercice de promotion 2009, à savoir le rapport de notation 2006-2007. Le Tribunal de la fonction publique en a déduit que ce détachement n’avait pu faire l’objet d’une appréciation par la commission consultative pour l’exercice de promotion 2009. Le Tribunal de la fonction publique a ensuite jugé que le requérant n’avait pas établi ni même allégué que l’acte dont il poursuivait l’annulation remplissait les conditions posées par la jurisprudence aux fins de conclure que celui-ci était entaché d’un détournement de pouvoir, le requérant s’étant borné à alléguer qu’il était plus méritant que les dix fonctionnaires. Le Tribunal de la fonction publique a dès lors rejeté le second moyen comme étant non fondé.
26 S’agissant enfin des conclusions aux fins d’indemnisation, le Tribunal de la fonction publique les a rejetées au motif qu’elles présentaient un lien étroit avec les conclusions en annulation qui ont elles-mêmes été rejetées comme non fondées.
Sur le pourvoi
1. Procédure et conclusions des parties
27 Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 3 juin 2011, le requérant a formé le présent pourvoi.
28 Le 19 septembre 2011, le Conseil a déposé le mémoire en réponse.
29 Par lettre enregistrée au greffe du Tribunal le 27 octobre 2011, le requérant a, en vertu de l’article 146 du règlement de procédure du Tribunal, demandé à celui-ci d’ouvrir la phase orale de la procédure.
30 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (chambre des pourvois) a fait droit à cette demande et a ouvert la procédure orale.
31 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 15 janvier 2013.
32 Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler l’arrêt attaqué et faire droit à ses conclusions en annulation et en indemnité présentées devant le Tribunal de la fonction publique, le requérant déclarant toutefois qu’il se satisferait de la condamnation du Conseil à lui verser un euro symbolique en réparation des dommages qui lui ont été causés si l’arrêt attaqué devait être annulé ;
– condamner le Conseil aux dépens des deux instances.
33 Le Conseil conclut au rejet du pourvoi comme étant non fondé ainsi qu’à la condamnation du requérant aux dépens.
2. En droit
34 En introduction à son pourvoi, le requérant expose que l’arrêt attaqué s’écarte de la jurisprudence relative au contrôle exercé par le juge de l’Union sur l’exercice, par l’administration, de son pouvoir d’appréciation en matière de promotion. Selon lui, cet arrêt accorde un « chèque en blanc » à l’administration en écartant, en pratique, tout contrôle juridictionnel effectif de l’exercice du pouvoir en question.
35 Le requérant soulève, à titre principal, un moyen pris d’une erreur d’interprétation des limites du pouvoir d’appréciation de l’administration en matière de promotion. À titre subsidiaire, le requérant dénonce diverses inexactitudes matérielles dont serait entaché l’arrêt attaqué ainsi que la dénaturation ou l’absence de prise en compte d’éléments de preuve par le Tribunal de la fonction publique. À titre également subsidiaire, il soulève un moyen pris de l’erreur qu’aurait commise le Tribunal de la fonction publique en ne tirant pas les conséquences des erreurs ou anomalies qu’il a lui-même constatées dans l’exercice de comparaison des mérites des fonctionnaires promouvables effectué par l’administration.
36 À titre liminaire, le requérant soulève un moyen pris de l’absence de prise en compte du critère de l’ancienneté par le Tribunal de la fonction publique, en cas d’égalité de mérites entre divers fonctionnaires promouvables. C’est par ce dernier moyen qu’il convient de débuter l’examen du pourvoi.
Sur le moyen pris de l’absence de prise en compte de l’ancienneté par le Tribunal de la fonction publique en cas d’égalité de mérites entre plusieurs fonctionnaires promouvables
37 Par son moyen invoqué à titre liminaire, le requérant soutient que l’arrêt attaqué a pour effet de rendre inutile la prise en considération de l’ancienneté dans l’examen comparatif des mérites de fonctionnaires promouvables. En effet, le Tribunal de la fonction publique n’aurait en l’espèce pas constaté que les fonctionnaires promus ayant moins d’ancienneté dans le grade que le requérant étaient plus méritants que celui-ci. Or, le Tribunal de la fonction publique aurait reconnu que l’AIPN, en présence de mérites équivalents, s’était abstenue de prendre en compte l’ancienneté dans le grade plus importante du requérant, sans toutefois en déduire que la décision visant à ne pas le promouvoir au grade AD 13 était entachée d’une erreur manifeste d’appréciation.
38 Le Conseil s’oppose à ce moyen.
39 Par le présent moyen, le requérant critique, en substance, la nature du test qui a été réalisé par le Tribunal de la fonction publique dans l’arrêt attaqué, aux fins de déterminer si l’AIPN n’avait pas commis d’erreur manifeste en promouvant les dix fonctionnaires plutôt que lui. Ainsi, au lieu d’examiner si l’AIPN n’avait commis aucune erreur manifeste en concluant que lesdits fonctionnaires étaient plus méritants que le requérant, le Tribunal de la fonction publique se serait borné à constater que ces mêmes fonctionnaires étaient au moins aussi méritants que celui-ci. Ce serait donc à tort que le Tribunal de la fonction publique, après avoir constaté une telle équivalence des mérites, n’a pas annulé la décision litigieuse au motif que l’AIPN aurait dû tenir compte de l’ancienneté dans le grade du requérant, supérieure à celle desdits fonctionnaires.
40 À cet égard, il convient tout d’abord de rappeler les principes qui encadrent l’office du juge de l’Union lorsqu’il est saisi de recours en annulation de décisions prises par les institutions en matière de promotion de fonctionnaires.
41 Selon une jurisprudence constante, pour évaluer les mérites à prendre en considération dans le cadre d’une décision de promotion au titre de l’article 45 du statut, l’AIPN dispose d’un large pouvoir d’appréciation et le contrôle du juge de l’Union doit se limiter à la question de savoir si, eu égard aux voies et moyens qui ont pu conduire l’administration à son appréciation, celle-ci s’est tenue dans des limites non critiquables et n’a pas usé de son pouvoir de manière manifestement erronée. Le juge ne saurait donc substituer son appréciation des qualifications et mérites des fonctionnaires à celle de l’AIPN (arrêts de la Cour du 3 décembre 1981, Bakke-d’Aloya/Conseil, 280/80, Rec. p. 2887, point 10, et du 3 avril 2003, Parlement/Samper, C‑277/01 P, Rec. p. I‑3019, point 35 ; voir arrêt du Tribunal du 16 décembre 2010, Conseil/Stols, T‑175/09 P, point 23, et la jurisprudence citée). Il doit se limiter à contrôler l’objectivité et l’exactitude de l’examen comparatif des mérites prévu par l’article 45, paragraphe 1, du statut, à l’aune des précisions apportées par l’AIPN au sujet de l’exercice de promotion, préalablement audit examen (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 11 décembre 1991, Frederiksen/Parlement, T‑169/89, Rec. p. II‑1403, point 70). Ainsi, il n’appartient pas au juge de l’Union de contrôler le bien-fondé de l’appréciation, comportant des jugements de valeur complexes, qui, par leur nature, ne sont pas susceptibles d’une vérification objective, portée par l’administration sur les aptitudes professionnelles d’un fonctionnaire (voir arrêt du Tribunal du 29 février 1996, Lopes/Cour de justice, T‑547/93, RecFP p. I‑A‑63 et II‑185, point 133, et la jurisprudence citée).
42 Le pouvoir d’appréciation ainsi reconnu à l’administration est néanmoins limité par la nécessité de procéder à l’examen comparatif des mérites avec soin et impartialité, dans l’intérêt du service et conformément au principe d’égalité de traitement. Si l’AIPN dispose du pouvoir statutaire de procéder à un tel examen selon la procédure ou la méthode qu’elle estime la plus appropriée (arrêt de la Cour du 1er juillet 1976, de Wind/Commission, 62/75, Rec. p. I‑1167, point 17 ; arrêt du Tribunal du 15 septembre 2005, Casini/Commission, T‑132/03, RecFP p. I‑A‑253 et II‑1169, point 54), ledit examen doit, en pratique, être conduit sur une base égalitaire et à partir de sources d’informations et de renseignements comparables (arrêt de la Cour du 19 mars 1964, Raponi/Commission, 27/63, Rec. p. 247, 268 ; arrêts du Tribunal du 30 novembre 1993, Tsirimokos/Parlement, T‑76/92, Rec. p. II‑1281, point 21 ; du 9 avril 2003, Tejada Fernández/Commission, T‑134/02, RecFP p. I‑A‑125 et II‑609, point 41, et du 27 septembre 2006, Lantzoni/Cour de justice, T‑156/05, RecFP p. I‑A‑2‑189 et II‑A‑2‑969, point 46).
43 L’obligation pour l’AIPN de procéder à un examen comparatif des mérites des fonctionnaires susceptibles d’être promus, prévu par l’article 45 du statut, est l’expression à la fois du principe d’égalité de traitement des fonctionnaires et de leur vocation à la carrière, l’appréciation de leurs mérites constituant ainsi le critère déterminant (arrêts du Tribunal du 12 février 1992, Volger/Parlement, T‑52/90, Rec. p. II‑121, point 24 ; du 5 mars 1998, Manzo-Tafaro/Commission, T‑221/96, RecFP p. I‑A‑115 et II‑307, point 17, et du 10 juin 2004, Liakoura/Conseil, T‑330/03, RecFP p. I‑A‑191 et II‑859, point 46). À cet égard, l’article 45, paragraphe 1, du statut prévoit que, aux fins de l’examen comparatif des mérites, l’AIPN prend en considération, outre les rapports dont les fonctionnaires ont fait l’objet, l’utilisation par ceux-ci, dans l’exercice de leurs fonctions, des langues autres que la langue dont ils ont justifié avoir une connaissance approfondie et, le cas échéant, le niveau des responsabilités exercées. L’article 45, paragraphe 1, du statut laisse une certaine marge d’appréciation à l’AIPN quant à l’importance que celle-ci entend accorder à chacun des trois critères mentionnés dans cette disposition lors de l’examen comparatif des mérites, dans le respect toutefois du principe d’égalité.
44 Comme l’a rappelé à juste titre le Tribunal de la fonction publique au point 32 de l’arrêt attaqué, l’AIPN peut, à titre subsidiaire, en cas d’égalité de mérites entre les fonctionnaires promouvables à l’aune des trois critères visés expressément à l’article 45, paragraphe 1, du statut, prendre d’autres éléments en considération, tels que l’âge des fonctionnaires et leur ancienneté dans le grade ou le service, auquel cas de tels critères peuvent constituer un facteur décisif dans son choix (arrêts du Tribunal Lopes/Cour de justice, point 41 supra, point 138 ; du 27 avril 1999, Thinus/Commission, T‑283/97, RecFP p. I‑A‑69 et II‑353, points 48 et 49, et du 18 septembre 2003, Callebaut/Commission, T‑241/02, RecFP p. I‑A‑215 et II‑1061, point 44).
45 En l’espèce, il était constant devant le Tribunal de la fonction publique que l’AIPN, dans sa décision prise sur réclamation le 24 septembre 2009, avait utilisé l’ancienneté dans le grade pour départager des fonctionnaires de mérites égaux lors de l’exercice de promotion litigieux. Toutefois, il était tout aussi constant que, selon la décision attaquée, l’application de ce critère n’avait pas été nécessaire en vue de départager le requérant et les fonctionnaires promus. L’AIPN a en effet considéré, après avoir procédé à un examen comparatif des rapports de notation, des connaissances linguistiques et des niveaux de responsabilité, que les dix fonctionnaires, qui ont été promus et avaient une ancienneté dans le grade inférieure à celle du requérant, étaient plus méritants que celui-ci.
46 Dans ce contexte, le Tribunal de la fonction publique, afin d’établir que c’était en restant dans des limites non critiquables et sans commettre d’erreur manifeste que l’AIPN n’avait pas promu le requérant, ne pouvait se limiter au seul constat que les mérites de ce dernier n’étaient pas supérieurs à ceux des dix fonctionnaires. Il appartenait en revanche au Tribunal de la fonction publique de vérifier que, en affirmant dans la décision prise sur réclamation que les dix fonctionnaires étaient plus méritants que le requérant, l’AIPN était demeurée dans des limites non critiquables et n’avait pas commis d’erreur manifeste d’appréciation.
47 Or, sans préjudice de l’analyse des autres moyens présentés à l’appui du pourvoi, le Tribunal considère que l’argument du requérant selon lequel le Tribunal de la fonction publique n’a pas constaté, dans l’arrêt attaqué, que les fonctionnaires promus ayant moins d’ancienneté dans le grade que lui étaient néanmoins plus méritants repose sur une lecture erronée dudit arrêt.
48 Certes, le Tribunal de la fonction publique a observé, au point 58 de l’arrêt attaqué, que les appréciations générales exprimées dans les rapports de notation dont les dix fonctionnaires ont fait l’objet depuis leur nomination au grade AD 12 étaient équivalentes à celles du requérant. Au point 79 de l’arrêt attaqué, il a également constaté que les compétences linguistiques du requérant apparaissaient, pour l’essentiel, équivalentes à celles des dix fonctionnaires dans l’exercice de leurs fonctions. Il a par ailleurs conclu, aux points 81 et 87 de l’arrêt attaqué, que le requérant et le fonctionnaire B, tous deux rattachés au service juridique du Conseil, exerçaient, en dehors de leurs tâches additionnelles respectives, des fonctions impliquant un niveau de responsabilité similaire.
49 Toutefois, ces constats d’équivalence ne concernaient pas la comparaison globale des mérites des fonctionnaires concernés avec ceux du requérant, mais des aspects spécifiques de ladite comparaison. Ainsi, sans préjudice de l’examen des critiques formulées par le requérant dans le cadre des autres moyens au soutien du pourvoi, il y a lieu de relever que ces constats n’ont pas empêché le Tribunal de la fonction publique de conclure, au point 63 de l’arrêt attaqué, que l’examen comparatif des rapports de notation ne faisait pas apparaître à l’évidence que les dix fonctionnaires n’étaient pas plus méritants que le requérant et, au point 90 du même arrêt, qu’il n’apparaissait pas à l’évidence que, à l’aune d’une appréciation globale des critères prévus à l’article 45, paragraphe 1, du statut, les mérites du fonctionnaire B n’étaient pas supérieurs à ceux du requérant. De même, il ressort des points 83 à 85 de l’arrêt attaqué que le Tribunal de la fonction publique a cherché à vérifier si, au vu de l’exercice de fonctions d’encadrement par neuf des dix fonctionnaires concernés et du niveau élevé des responsabilités assumées par ceux-ci, les mérites desdits fonctionnaires apparaissaient supérieurs à ceux du requérant en dépit du fait que ce dernier avait présidé le jury de deux concours EPSO durant la période de référence. S’agissant de ce dernier point, le Tribunal de la fonction publique a souligné qu’il ressortait des pièces du dossier que ces neuf fonctionnaires, à la différence du requérant, assumaient des fonctions d’encadrement de façon permanente et depuis plus longtemps que lui.
50 Ainsi, sans préjudice de l’analyse, aux points 53 à 66 ci-après, du moyen tiré, sur pourvoi, d’une erreur d’interprétation des limites du pouvoir d’appréciation de l’administration en matière de promotion, l’examen auquel a procédé le Tribunal de la fonction publique, dans le cadre du premier moyen d’annulation présenté devant lui, a bien porté sur la question de savoir si l’AIPN était demeurée dans des limites non critiquables et n’avait pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en considérant que les dix fonctionnaires étaient plus méritants que le requérant.
51 La décision de ne pas promouvoir le requérant étant fondée, en substance, sur le fait que les mérites des fonctionnaires promus étaient supérieurs aux siens et le Tribunal de la fonction publique ayant par ailleurs estimé que l’AIPN, en adoptant cette décision, s’était tenue dans des limites non critiquables et n’avait pas commis d’erreur manifeste, la question de l’utilisation par l’AIPN du critère de l’ancienneté dans le grade aux fins de départager des fonctionnaires présentant des mérites égaux ne se posait pas en l’espèce. Il ne saurait dès lors être reproché audit Tribunal de ne pas avoir contrôlé si l’ancienneté du requérant lui aurait permis de bénéficier d’une promotion dans l’hypothèse où ses mérites avaient été équivalents à ceux de certains des fonctionnaires finalement promus (voir, par analogie, arrêt du Tribunal de la fonction publique du 28 septembre 2011, AC/Conseil, F‑9/10, points 87 à 91). Par ailleurs, outre qu’un tel contrôle et les appréciations qui auraient pu en découler étaient en tout état de cause inutiles, si le Tribunal de la fonction publique avait néanmoins entrepris d’effectuer ce contrôle en l’espèce, il aurait substitué sa propre appréciation des mérites du requérant et des dix fonctionnaires à celle effectuée par l’AIPN et, de cette façon, outrepassé les limites de son contrôle juridictionnel telles qu’elles résultent de la jurisprudence rappelée au point 41 ci-dessus.
52 Par conséquent, le moyen pris de l’absence de prise en compte de l’ancienneté par le Tribunal de la fonction publique doit être rejeté comme étant non fondé.
Sur le moyen pris d’une erreur d’interprétation des limites du pouvoir d’appréciation de l’administration en matière de promotion
53 Le requérant fait valoir que, selon la jurisprudence, le contrôle par le juge de l’Union de l’action de l’administration dans le domaine de la promotion des fonctionnaires implique la vérification par celui-ci que l’administration, d’une part, a agi dans des limites non critiquables et, d’autre part, n’a pas usé de son pouvoir d’appréciation de manière manifestement erronée.
54 Or, par un premier grief, le requérant soutient que le Tribunal de la fonction publique, dans l’arrêt attaqué, s’est abstenu d’examiner si l’administration avait agi dans des limites non critiquables, alors même que le dossier contiendrait des éléments suffisants pour constater que tel n’a pas été le cas. Ainsi, selon le requérant, c’est à tort que le premier juge n’a pas vérifié l’existence du système de promotion prétendument appliqué par le Conseil ainsi que la compatibilité dudit système avec la jurisprudence de la Cour et du Tribunal. Or, il y aurait lieu, selon le requérant, de constater que le Conseil n’a pas appliqué les critères retenus de manière cohérente dans le cadre de l’exercice de promotion litigieux, de sorte que ce dernier ne s’est pas déroulé d’une manière conforme à la jurisprudence.
55 Par un second grief, le requérant reproche au Tribunal de la fonction publique d’avoir jugé qu’une erreur manifeste de l’administration supposait, d’une part, que ladite erreur ait été aisément perceptible et, d’autre part, qu’elle ait pu être détectée à l’évidence. Ce faisant, le premier juge aurait donné de la notion d’erreur manifeste une définition trop restrictive. Plus particulièrement, le Tribunal de la fonction publique n’exposerait pas pourquoi la reconnaissance de l’existence d’une telle erreur suppose, outre le constat que celle-ci s’impose à l’évidence à un esprit raisonnable, que ladite erreur soit « aisément perceptible ». Cette condition ne serait pas claire et, de surcroît, permettrait à l’administration d’échapper au contrôle juridictionnel en tentant de dissimuler ses erreurs. L’application de ce critère au cas d’espèce aurait, de plus, privé le requérant de son droit à un recours effectif, consacré par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (JO 2010, C 83, p. 389).
56 Le Conseil s’oppose à ces critiques.
57 Il convient d’examiner, en premier lieu, le grief selon lequel c’est à tort que le Tribunal de la fonction publique, dans l’arrêt attaqué, n’a pas cherché à vérifier si l’AIPN s’était tenue dans des limites non critiquables lors de son examen comparatif des mérites des fonctionnaires promouvables. Par ce grief, le requérant soutient, en substance, que le premier juge aurait dû constater que l’AIPN n’avait pas fondé son examen comparatif des mérites sur un système objectif et cohérent. L’AIPN aurait, selon le requérant, appliqué les critères visés à l’article 45, paragraphe 1, du statut de manière aléatoire selon le fonctionnaire considéré, le résultat de l’exercice de promotion litigieux apparaissant comme un ensemble de décisions individuelles contradictoires, davantage que comme le reflet d’une comparaison objective des mérites des fonctionnaires promouvables.
58 À cet égard, il convient de relever que, au point 31 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique a rappelé que les dispositions de l’article 45, paragraphe 1, du statut, applicables à compter du 1er mai 2004, avaient clarifié les éléments qui devaient être pris en considération en vue de la promotion dès lors qu’elles se référaient, au-delà des rapports de notation, à l’utilisation des langues autres que la langue dont les fonctionnaires concernés avaient justifié avoir une connaissance approfondie et, le cas échéant, au niveau des responsabilités exercées. Il a également rappelé, au même point, sa jurisprudence en vertu de laquelle c’était en principe à la lumière de ces trois éléments que l’AIPN effectuait désormais l’examen comparatif des mérites des fonctionnaires promouvables, le terme « mérites » figurant à l’article 45, paragraphe 1, du statut ayant ainsi une portée différente et en substance plus large que le terme identique utilisé dans la version de cet article applicable avant le 1er mai 2004.
59 Le Tribunal de la fonction publique a par ailleurs rappelé, au point 34 de l’arrêt attaqué, que la large marge d’appréciation reconnue à l’administration en matière de promotion était limitée par la nécessité de procéder à l’examen comparatif des candidatures avec soin et impartialité, dans l’intérêt du service et conformément au principe d’égalité de traitement, ledit examen devant être conduit sur une base égalitaire et à partir de sources d’informations et de renseignements comparables.
60 Or, c’est à l’aune de ces principes qu’il convient tout d’abord de comprendre le constat figurant au point 37 de l’arrêt attaqué selon lequel la commission consultative de promotion pour le groupe de fonctions AD, en vue d’émettre son avis sur lequel s’est fondée l’AIPN, avait notamment à sa disposition les rapports de notation dont chaque fonctionnaire promouvable avait fait l’objet depuis sa nomination au grade AD 12 jusqu’à sa notation pour l’exercice allant du 1er juillet 2006 au 31 décembre 2007, des historiques de carrière, des relevés récapitulatifs de congés pour raison de maladie ou d’accident portant sur les trois dernières années, ainsi que deux tableaux contenant des statistiques de notation par grade et par direction générale, direction et grand service.
61 Ensuite, il y a lieu de constater que le Tribunal de la fonction publique, dans l’arrêt attaqué, ne s’est pas borné à relever mécaniquement que l’AIPN avait fait application des trois critères visés à l’article 45, paragraphe 1, du statut lors de l’examen comparatif des mérites du requérant et de ceux des dix fonctionnaires. Sans préjudice de l’analyse des autres moyens présentés à l’appui du pourvoi, le Tribunal relève en effet que le premier juge s’est attaché à vérifier si cet examen comparatif reflétait une application objective desdits critères, effectuée sur une base égalitaire et à partir de sources d’informations et de renseignements comparables.
62 Il ressort ainsi de l’arrêt attaqué que le Tribunal de la fonction publique a bien vérifié si l’AIPN s’était tenue dans des limites non critiquables lors de l’examen de la comparaison des mérites litigieux, de sorte que le premier grief soulevé à cet égard par le requérant ne saurait être retenu. Quant à l’argument du requérant selon lequel c’est à tort que le premier juge a omis de constater que l’AIPN n’avait pas appliqué de manière cohérente les trois critères visés à l’article 45, paragraphe 1, du statut lors dudit examen, il se confond tant avec le moyen pris de diverses inexactitudes matérielles dont serait entaché l’arrêt attaqué et de la dénaturation ou de l’absence de prise en compte d’éléments de preuve qu’avec le moyen visant l’absence de prise en compte d’erreurs ou d’anomalies entachant ce même examen, alors même que celles-ci ont été constatées par le premier juge. Ces moyens sont examinés, respectivement, aux points 67 à 96 et aux points 97 à 128 ci-après.
63 S’agissant du second grief, il y a lieu de constater que le requérant vise par celui-ci à dénoncer, en substance, une interprétation trop étroite dans l’arrêt attaqué de la notion d’erreur manifeste d’appréciation dans l’exercice de comparaison des mérites des fonctionnaires promouvables effectué par l’AIPN et, partant, le contrôle juridictionnel indûment restreint qu’aurait exercé sur ce point le Tribunal de la fonction publique.
64 À cet égard, il convient de relever que le Tribunal de la fonction publique a certes entendu préciser, au point 35 de l’arrêt attaqué, la notion d’erreur manifeste telle qu’elle devait être entendue en ce qui concernait la marge d’appréciation reconnue à l’administration en matière de promotion. Aux termes dudit point, « une erreur est manifeste lorsqu’elle est aisément perceptible et peut être détectée à l’évidence, à l’aune des critères auxquels le législateur a entendu subordonner les décisions en matière de promotion ».
65 Toutefois, le Tribunal constate que ce grief, de même que celui tiré d’une violation par le Tribunal de la fonction publique du droit à un recours effectif garanti par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux, se confond, en substance, avec le moyen par lequel le requérant reproche au Tribunal de la fonction publique de ne pas avoir déduit des diverses erreurs ou anomalies qu’il a constatées dans l’exercice de comparaison des mérites des fonctionnaires promouvables effectué par l’AIPN que celui-ci était entaché d’erreur manifeste, justifiant l’annulation de la décision litigieuse. Il est dès lors renvoyé, pour l’examen de ces griefs, à l’analyse dudit moyen aux points 97 à 128 ci‑après.
66 Il s’ensuit que, dans les limites décrites aux points 62 et 65 ci-dessus, le présent moyen n’est pas fondé et doit dès lors être rejeté.
Sur le moyen pris de diverses inexactitudes matérielles dont serait entaché l’arrêt attaqué ainsi que de la dénaturation ou de l’absence de prise en compte d’éléments de preuve
67 Ce moyen se subdivise en deux branches, qui correspondent à deux inexactitudes matérielles distinctes dont le requérant fait grief au Tribunal de la fonction publique dans le cadre de la décision attaquée.
Sur la première branche, tirée d’une inexactitude matérielle ainsi que d’une dénaturation d’éléments de preuve s’agissant de la comparaison du niveau des responsabilités du requérant avec celui de neuf fonctionnaires
68 Dans une première branche, le requérant estime que c’est à tort que le Tribunal de la fonction publique a jugé, dans l’arrêt attaqué, que, dès lors que neuf des dix fonctionnaires exerçaient des fonctions de chef d’unité ou coordonnaient de facto les travaux d’une équipe dans des domaines sensibles, ces mêmes fonctionnaires assumaient, en termes de management, des responsabilités d’un niveau supérieur au sien.
69 Ainsi, tout d’abord, il résulterait de la jurisprudence que l’AIPN ne peut valablement apprécier le niveau des responsabilités exercées avant tout par l’importance des tâches de management assumées, un fonctionnaire pouvant exercer un niveau de responsabilité élevé sans encadrer de nombreux subordonnés. Or, c’est sur une telle prémisse liant le niveau de responsabilité à l’importance des tâches de management et d’encadrement que reposerait le raisonnement du Tribunal de la fonction publique dans l’arrêt attaqué.
70 Ensuite, le requérant reproche au Tribunal de la fonction publique d’avoir dénaturé sur ce point les éléments de preuve produits devant lui. Il ne ressortirait pas des rapports de notation produits par le Conseil que, parmi les neuf fonctionnaires concernés, ceux qui n’étaient pas chefs d’unité coordonnaient néanmoins de facto les travaux d’une équipe dans des domaines sensibles, ainsi que l’a affirmé le Tribunal de la fonction publique. Ce serait à tort également que le Tribunal de la fonction publique a cru pouvoir conclure que la présidence du jury de deux concours EPSO assumée par le requérant pendant la période de référence ne l’emporterait pas, dans le bilan global des mérites, sur les fonctions d’encadrement exercées de manière permanente et depuis plus longtemps par les neuf fonctionnaires concernés, une telle conclusion n’étant possible qu’à l’égard des fonctionnaires exerçant une fonction de chef d’unité. Cette partie de l’arrêt attaqué serait, en tout état de cause, insuffisamment motivée.
71 Enfin, à supposer même que le Tribunal de la fonction publique n’ait pas commis d’erreur en retenant l’exercice d’une fonction de coordination de facto comme une circonstance pertinente aux fins de la comparaison des niveaux de responsabilité des fonctionnaires concernés, il aurait néanmoins omis de vérifier si le requérant exerçait lui aussi une telle fonction de coordination. Or, le requérant fait valoir qu’il encadre plusieurs collègues arrivés au service juridique du Conseil depuis le 1er mai 2004, dans le domaine des relations extérieures.
72 Le Conseil s’oppose à cette branche du moyen.
73 À cet égard, il y a lieu d’examiner, en premier lieu, le grief pris de l’erreur qu’aurait commise le premier juge, s’agissant du niveau des responsabilités exercées par le requérant et par les neuf fonctionnaires promus qui n’étaient pas rattachés, tout comme lui, au service juridique du Conseil, en considérant implicitement que le niveau des responsabilités était déterminé avant tout par l’importance des tâches de management exercées par ces fonctionnaires.
74 Le requérant reproche au Tribunal de la fonction publique, sur ce point, d’avoir considéré que la seule circonstance que les neuf fonctionnaires en cause exerçaient des fonctions d’encadrement ou de coordination de subordonnés impliquait nécessairement l’exercice de responsabilités élevées, sans toutefois chercher à vérifier si tel était bien le cas en l’espèce. Selon le requérant, cet aspect de l’arrêt attaqué méconnaîtrait le principe dégagé par le Tribunal dans son arrêt Conseil/Stols, point 41 supra, selon lequel est erronée la prémisse selon laquelle le niveau des responsabilités d’un fonctionnaire est déterminé avant tout par l’importance des tâches de management exercées, un fonctionnaire pouvant assumer un niveau de responsabilité élevé sans encadrer de subordonnés et, à l’inverse, encadrer de nombreux subordonnés sans exercer des responsabilités particulièrement élevées.
75 Toutefois, le Tribunal constate que le requérant, par ce grief, vise à remettre en cause l’appréciation des faits opérée par le Tribunal de la fonction publique. Or, il résulte d’une jurisprudence constante que le juge de première instance est seul compétent, d’une part, pour constater les faits, sauf dans le cas où l’inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et, d’autre part, pour apprécier ces faits. L’appréciation des faits ne constitue donc pas, sous réserve du cas de la dénaturation des éléments de preuve produits devant ce juge, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour ou du Tribunal statuant sur pourvoi (ordonnance de la Cour du 16 septembre 1997, Koelman/Commission, C‑59/96 P, Rec. p. I‑4809, point 31 ; ordonnance du Tribunal du 7 décembre 2011, Mioni/Commission, T‑274/11 P, point 18). Il s’ensuit que ce grief est irrecevable, et ce sans préjudice de l’examen du deuxième grief pris d’une dénaturation des éléments de preuve, examiné aux points 77 à 82 ci-après.
76 Le Tribunal observe encore, sur ce point, que, ainsi que le Conseil le souligne à juste titre au point 31 de son mémoire en réponse, le contexte de la présente affaire se distingue sur un aspect essentiel de celui dans lequel a été prononcé l’arrêt Conseil/Stols, point 41 supra, et invoqué par le requérant au soutien du présent grief. En effet, par son pourvoi, le requérant vise à remettre en cause le rejet par le Tribunal de la fonction publique du recours qu’il a introduit contre la décision du Conseil de ne pas le promouvoir au grade AD 13. Dans l’arrêt Conseil/Stols, précité, en revanche, le Tribunal a notamment constaté que le Tribunal de la fonction publique avait outrepassé les limites de son contrôle en substituant son appréciation des mérites de M. Stols et des fonctionnaires promus à celle de l’AIPN et, partant, en annulant la décision de ne pas promouvoir celui-ci. C’est dans ce cadre spécifique que le Tribunal a pu conclure que la circonstance que M. Stols dirigeait une équipe de 30 personnes et que les fonctionnaires promus n’exerçaient pas des tâches d’encadrement comparables ne pouvait suffire à justifier légalement la conclusion à laquelle avait abouti le Tribunal de la fonction publique, selon laquelle le Conseil avait commis une erreur manifeste d’appréciation dans sa comparaison des mérites des fonctionnaires promouvables s’agissant du niveau des responsabilités exercées.
77 En second lieu, il convient d’examiner le grief tiré d’une dénaturation des éléments de preuve portés devant le Tribunal de la fonction publique, en tant que ce dernier aurait conclu à tort, sur la base desdits éléments, que ceux des neuf fonctionnaires promus visés par la présente branche du moyen et qui n’occupaient pas un poste de chef d’unité coordonnaient néanmoins, en fait, les travaux d’une équipe dans des domaines sensibles. Par ce grief, sur lequel le requérant a apporté des précisions lors de l’audience, il est plus particulièrement reproché au Tribunal de la fonction publique d’avoir fait sienne la thèse du Conseil tenant à l’existence d’une fonction de chef de secteur ou de coordinateur de facto, alors même que cette fonction n’est pas reconnue officiellement.
78 À titre liminaire, il convient de souligner que la circonstance que les fonctions de chef de secteur ou de coordinateur de facto ne correspondent à aucun poste officiel repris dans l’organigramme du Conseil n’exclut pas que les fonctionnaires concernés par de telles fonctions puissent effectuer, en pratique, des tâches de coordination des travaux d’une équipe dans des domaines sensibles. Le niveau des responsabilités assumées par un fonctionnaire étant susceptible de dépendre d’autres facteurs que la qualification juridique donnée à ses fonctions par le statut, c’est sans commettre d’erreur que le Tribunal de la fonction publique, aux points 80 à 85 de l’arrêt attaqué, a tenu compte des fonctions effectivement exercées par les fonctionnaires concernés qui n’étaient pas chefs d’unité aux fins de vérifier que l’appréciation comparative du niveau des responsabilités exercées par ceux-ci et par le requérant, effectuée par l’AIPN, n’était pas entachée d’erreur manifeste.
79 S’agissant du grief pris d’une dénaturation proprement dit, il y a lieu de rappeler qu’une dénaturation doit apparaître de manière manifeste des pièces du dossier, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves (arrêts de la Cour du 28 mai 1998, New Holland Ford/Commission, C‑8/95 P, Rec. p. I‑3175, point 72, et du 6 avril 2006, General Motors/Commission, C‑551/03 P, Rec. p. I‑3173, point 54 ; arrêt du Tribunal du 8 septembre 2008, Kerstens/Commission, T‑222/07 P, RecFP p. I‑B‑1‑37 et II‑B‑1‑267, point 62).
80 Or, la lecture des pièces du dossier de première instance ne fait apparaître aucune dénaturation.
81 À cet égard, il y a lieu de relever que le Conseil, au point 35 du mémoire en défense présenté devant le Tribunal de la fonction publique, a soutenu que les fonctionnaires en cause qui n’occupaient pas un poste de chef d’unité coordonnaient néanmoins les travaux d’une équipe dans des domaines sensibles. En réponse à une mesure d’organisation de la procédure décidée par le premier juge, le Conseil a produit, d’une part, les rapports de notation des dix fonctionnaires et, d’autre part, un tableau synoptique reprenant les informations découlant des rapports de notation du requérant et de ces fonctionnaires, pour la période comprise entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2007. Le présent grief concerne les fonctionnaires, désignés par les lettres A, F, G, H et I, qui n’occupaient pas, durant cette période, un poste de chef d’unité et qui, contrairement au requérant ainsi qu’au fonctionnaire B, n’étaient pas rattachés au service juridique du Conseil.
82 Or, c’est sans dénaturer le contenu des rapports de notation des fonctionnaires A, F, G, H et I que le Tribunal de la fonction publique a conclu, au point 80 de l’arrêt attaqué, que ceux-ci coordonnaient de facto les travaux d’une équipe dans des domaines sensibles. En effet, sans qu’il y ait lieu de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves, il apparaît que le Tribunal de la fonction publique a pu constater qu’il ressortait des rapports de notation du fonctionnaire A que ce dernier, durant la période susvisée, dirigeait la section « Activités internationales » de l’unité « Environnement » de la direction générale I, une fonction impliquant la supervision et la coordination du travail de plusieurs fonctionnaires sur des sujets internationaux. S’agissant ensuite du fonctionnaire F, ses rapports de notation font apparaître qu’il coordonnait l’unité « Asie/Océanie » au sein de la direction générale E depuis le mois de juillet 2004. Quant au fonctionnaire G, il ressort de deux rapports de notation le concernant, produits par le Conseil, qu’il dirigeait, au cours de la même période, la section « Planning et opérations » au sein de la direction générale E, ces fonctions impliquant la coordination de onze collaborateurs. S’agissant de la fonctionnaire H, il ressort des pièces produites en première instance qu’elle était détachée auprès du représentant spécial de l’Union pour la région des Grands Lacs depuis le 1er février 2004. Il en ressort également, notamment, que cette fonctionnaire coordonnait à ce titre l’ensemble des activités dudit représentant avec d’autres instances de l’Union européenne, telles que le secrétariat général du Conseil ou la présidence de la Commission, qu’elle assurait la bonne coordination des différents acteurs impliqués dans la mise en œuvre de la politique de l’Union en matière d’assistance à la réforme du secteur de sécurité (RSS) en République démocratique du Congo et qu’elle gérait le bureau du représentant spécial, notamment en ce qui concernait le recrutement de personnel et l’organisation du travail. S’agissant enfin du fonctionnaire I, il ressort des rapports de notation qui le concernent, versés au dossier de première instance, qu’il assumait depuis 2004 la coordination des activités de douze fonctionnaires qui étaient membres du bureau du haut représentant et travaillaient dans le domaine de la non-prolifération des armes.
83 Le grief pris de l’insuffisance de la motivation de cette partie de l’arrêt attaqué ne saurait davantage prospérer. En effet, s’il est certes exact que le Tribunal de la fonction publique n’a pas détaillé les fonctions assumées par chacun des fonctionnaires visés par le présent grief, il demeure que le motif principal ayant justifié la conclusion selon laquelle lesdits fonctionnaires assumaient des responsabilités plus élevées que celles du requérant, en dépit des tâches supplémentaires accomplies par celui-ci durant la période de référence, apparaît au point 84 de l’arrêt attaqué. C’est ainsi que le Tribunal de la fonction publique, prenant explicitement appui sur les pièces du dossier, a indiqué dans ce passage de l’arrêt que lesdits fonctionnaires assumaient des fonctions d’encadrement de façon permanente et depuis plus longtemps que le requérant.
84 S’agissant enfin du grief subsidiaire tiré de ce que c’est à tort que le Tribunal de la fonction publique n’a pas tenu compte, dans l’arrêt attaqué, de la coordination qu’a assurée le requérant à l’égard de plusieurs collègues issus des États membres ayant adhéré à l’Union le 1er mai 2004, il ne saurait être retenu. En effet, ce grief contient une explication nouvelle avancée pour la première fois dans le cadre du pourvoi, le requérant n’ayant notamment pas fait valoir cette circonstance dans la réclamation qu’il a présentée à l’AIPN le 27 mai 2009. Or, le juge de l’Union ne saurait tenir compte d’un tel élément sans outrepasser les limites de son contrôle, qui porte sur la question de savoir si, eu égard aux voies et aux moyens qui ont pu conduire l’administration à son appréciation, celle-ci s’est tenue dans des limites non critiquables et n’a pas usé de son pouvoir de manière manifestement erronée (voir, en ce sens, arrêt Conseil/Stols, point 41 supra, point 47).
85 Partant, la présente branche du moyen doit être rejetée, pour partie, comme irrecevable, et, pour partie, comme non fondée.
Sur la seconde branche, tirée d’une inexactitude matérielle ainsi que d’une dénaturation ou d’une absence de prise en compte d’éléments de preuve s’agissant de la comparaison du niveau de responsabilité du requérant avec celui du fonctionnaire B, également membre du service juridique du Conseil
86 Dans une seconde branche, le requérant soutient que le raisonnement du Tribunal de la fonction publique s’agissant de la comparaison du niveau de ses responsabilités avec celui du fonctionnaire B, également membre du service juridique du Conseil, est non seulement entaché d’une inexactitude matérielle, mais repose de surcroît sur un traitement inégal des éléments de preuve.
87 Selon le requérant, il résulterait des pièces du dossier que les tâches assumées par le fonctionnaire B dans le cadre de la conférence intergouvernementale citée au point 23 ci-dessus ne s’additionnaient pas à ses tâches habituelles, mais faisaient au contraire partie de celles-ci. De surcroît, ces tâches, qui auraient consisté en une révision linguistique de la version allemande d’un projet de traité, n’auraient été assumées que durant cinq mois, soit une durée inférieure aux 18 mois pendant lesquels le requérant a assuré la présidence du jury de deux concours EPSO.
88 Le requérant reproche encore au Tribunal de la fonction publique d’avoir examiné les mérites du fonctionnaire B en se basant sur une période comprise entre le 1er juillet 2003 et le 31 décembre 2004, alors que c’est la période se rapportant au rapport de notation 2006-2007 que la commission consultative de promotion aurait essentiellement prise en compte pour rendre son avis. Selon le requérant, si l’examen comparatif des mérites devait inclure une époque antérieure à cette dernière période, le Tribunal de la fonction publique aurait dû prendre en considération le fait que le requérant a exercé, durant l’année 2003, des fonctions de conseiller chargé des affaires juridiques au sein du cabinet de la vice-présidente de la Commission.
89 Le Conseil conclut au rejet de cette branche du moyen.
90 À cet égard, le Tribunal souligne à titre liminaire que le Tribunal de la fonction publique, dans l’arrêt attaqué, n’a pas fondé son constat selon lequel le Conseil n’avait pas commis d’erreur manifeste en considérant que les mérites du fonctionnaire B étaient supérieurs à ceux du requérant exclusivement sur la circonstance que le fonctionnaire B avait participé au secrétariat de la conférence intergouvernementale dans le cadre de laquelle avait été préparé un projet de traité établissant une constitution pour l’Europe. Il ressort en effet du point 88 de l’arrêt attaqué que le Tribunal de la fonction publique, outre cette circonstance, a tenu compte du fait que le fonctionnaire B, durant la période comprise entre le 1er juillet 2003 et le 31 décembre 2004, avait également été correcteur de certaines épreuves d’un concours EPSO.
91 Cela étant précisé, le Tribunal constate tout d’abord que c’est sans fondement que le requérant reproche à l’arrêt attaqué d’avoir dénaturé par deux fois des éléments de preuve s’agissant de la participation du fonctionnaire B au secrétariat de la conférence intergouvernementale ayant préparé le projet de traité établissant une constitution pour l’Europe.
92 En premier lieu, c’est sans dénaturer le rapport de notation du fonctionnaire B, versé au dossier de première instance, que le premier juge a pu confirmer le point de vue du Conseil selon lequel la participation de ce fonctionnaire au secrétariat de ladite conférence intergouvernementale constituait une tâche additionnelle. Il ressort en effet du libellé de ce rapport, ainsi que le Tribunal de la fonction publique a pu le constater d’après les éléments figurant au point 88 de l’arrêt attaqué, que ce fonctionnaire, jusqu’au 31 mai 2004, travaillait dans l’équipe « Justice et affaires intérieures » au sein du service juridique du Conseil, où il s’occupait de dossiers concernant la coopération judiciaire en matières civile et pénale. Or, ce même rapport ne laisse nullement entendre que les tâches que ce fonctionnaire a également assumées, pendant la période comprise entre le 1er juillet 2003 et le 31 décembre 2004, au sein du secrétariat de la conférence intergouvernementale, impliquant notamment une participation à la mise au point juridique du projet de traité établissant une constitution pour l’Europe, ne s’additionnaient pas à ses fonctions habituelles au sein du service juridique du Conseil, fût-ce même dans une certaine mesure seulement. Par ailleurs, il n’est pas contesté que, ainsi qu’il ressort du point 88 de l’arrêt attaqué, le Conseil a souligné lors de l’audience devant le premier juge que lesdites tâches constituaient bien des tâches additionnelles. Le Tribunal relève encore que l’argument du requérant sur ce point relève de la simple affirmation, le requérant n’ayant avancé à aucun stade de la procédure un élément de preuve au soutien de son allégation selon laquelle les tâches assumées par le fonctionnaire B au sein du secrétariat de la conférence intergouvernementale constituaient ses tâches principales.
93 En second lieu, le grief pris d’une dénaturation dudit rapport de notation, en ce que le Tribunal de la fonction publique en aurait déduit à tort que les tâches assumées par le fonctionnaire B au sein du secrétariat de la conférence intergouvernementale l’ont été jusqu’au 31 décembre 2004, repose sur une lecture erronée de l’arrêt attaqué. Une telle conclusion ne saurait, en effet, être déduite du point 88 de l’arrêt attaqué, dans lequel le Tribunal de la fonction publique s’est borné à constater que la participation du fonctionnaire B audit secrétariat avait eu lieu pendant l’exercice d’évaluation pour la période allant du 1er juillet 2003 au 31 décembre 2004, sans toutefois préciser la durée exacte de cette participation au cours de cette période.
94 Ensuite, dans la mesure où il soutient que la participation du fonctionnaire B au secrétariat de la conférence intergouvernementale en question n’a pas le même poids que la présidence du jury de deux concours EPSO, le requérant vise, en substance, à remettre en cause l’interprétation des faits par le juge de première instance. Or, il résulte de la jurisprudence rappelée au point 75 ci-dessus que, hormis en cas de dénaturation des éléments de preuve produits devant lui, le juge du pourvoi n’est pas compétent pour se prononcer sur un tel grief.
95 Enfin, le requérant ne saurait être suivi lorsqu’il reproche au Tribunal de la fonction publique de ne pas avoir tenu compte des tâches additionnelles qu’il prétend avoir assumées durant l’année 2003, en tant que conseiller juridique de la vice-présidente de la Commission. En effet, ainsi que le Tribunal de la fonction publique l’a relevé au point 3 de l’arrêt attaqué, il ressort du dossier que le requérant a été détaché en qualité de conseiller juridique auprès du cabinet de la vice-présidente de la Commission durant la période comprise entre le 1er octobre 1999 et le 30 octobre 2003. Partant, le travail accompli par le requérant dans ce cadre, contrairement à ce qu’il suggère, ne pouvait s’analyser comme une tâche additionnelle, mais constituait au contraire son activité principale. Or, force est de constater que, ni au cours de la procédure administrative, ni dans le cadre de son recours en annulation, le requérant n’a allégué avoir, en 2003, assumé des fonctions qui dépassaient le cadre de ses attributions lorsqu’il était conseiller juridique de la vice-présidente de la Commission. Il s’ensuit que c’est sans fondement que le requérant reproche au Tribunal de la fonction publique de ne pas avoir tenu compte de prétendues tâches additionnelles qu’il aurait assumées au cours de l’année 2003, en vue d’apprécier si l’examen comparatif de ses mérites avec ceux du fonctionnaire B était entaché d’une erreur manifeste d’appréciation.
96 Partant, la présente branche du moyen doit être rejetée, pour partie, comme irrecevable, et, pour partie, comme non fondée. Compte tenu de la conclusion exposée au point 85 ci-dessus s’agissant du rejet de l’autre branche du moyen, il y a donc lieu de rejeter le moyen dans son ensemble.
Sur le moyen pris de l’erreur qu’aurait commise le Tribunal de la fonction publique en ne tirant pas les conséquences des erreurs ou des anomalies qu’il a constatées dans l’exercice de comparaison des mérites des fonctionnaires promouvables effectué par l’administration
97 Le requérant soutient que, même s’il fallait retenir la définition de l’erreur manifeste contenue dans l’arrêt attaqué, c’est à tort que le Tribunal de la fonction publique a omis de considérer que les quatre erreurs ou anomalies qu’il a lui-même identifiées dans l’exercice de comparaison des mérites des fonctionnaires promouvables effectué par le Conseil répondaient à cette définition.
98 Ainsi, en premier lieu, le Tribunal de la fonction publique aurait constaté à tort que, même s’il existait un écart entre la moyenne des appréciations analytiques du requérant et celle, moins bonne, de trois des dix fonctionnaires, ledit écart pouvait être considéré comme négligeable. En deuxième lieu, après avoir constaté que les notateurs de quatre des fonctionnaires concernés ayant obtenu une meilleure moyenne de notation que celle du requérant se sont montrés globalement plus généreux que ceux du service juridique auquel le requérant était rattaché, le premier juge aurait considéré à tort que la moyenne des appréciations analytiques ne constituait qu’une partie des données dont la commission consultative de promotion tenait compte lors de l’examen comparatif des mérites. L’absence de prise en considération, par l’AIPN, de cette différence entre les moyennes de notation suffirait à démontrer que celle-ci a commis une erreur manifeste d’appréciation en l’espèce. En troisième lieu, le Tribunal de la fonction publique aurait constaté que, contrairement à ce qu’a affirmé le Conseil, la totalité des fonctionnaires concernés ne maîtrisaient pas parfaitement l’anglais et le français et que ceux dont l’une de ces deux langues était la langue maternelle ne maîtrisaient pas au moins une troisième langue. C’est donc à tort que le premier juge, en dépit de ce constat, aurait considéré que les compétences linguistiques du requérant étaient, pour l’essentiel, équivalentes à celles des dix fonctionnaires dans l’exercice de leurs fonctions. Enfin, en quatrième lieu, il ressortirait de l’arrêt attaqué que les appréciations générales exprimées dans les rapports de notation dont les dix fonctionnaires ont fait l’objet depuis leur nomination au grade AD 12 sont équivalentes à celles du requérant. Selon le requérant, c’est à tort que le Tribunal de la fonction publique, dans ces circonstances, a omis de constater que l’AIPN avait commis une erreur manifeste en ne tenant aucunement compte de l’ancienneté dans le grade plus élevée dont pouvait se prévaloir le requérant par rapport aux dix fonctionnaires.
99 Même s’il fallait considérer que ces diverses erreurs ne sont pas déterminantes lorsqu’elles sont envisagées isolément, le requérant estime que c’est à tort que le Tribunal de la fonction publique n’a pas tenu compte de leur effet cumulé sur l’examen comparatif des mérites, en concluant que ce dernier était entaché d’une erreur manifeste d’appréciation.
100 Le Conseil s’oppose à ces critiques.
101 À cet égard, le Tribunal relève à titre liminaire que, s’il est certes exact que le juge du pourvoi n’est pas compétent pour constater les faits ni, en principe, pour examiner les preuves que le juge de première instance a retenues à l’appui de ces faits, il n’en demeure pas moins que, selon une jurisprudence constante, le juge du pourvoi est compétent pour exercer un contrôle sur la qualification juridique de ces faits et les conséquences de droit qui en ont été tirées par le juge de première instance (arrêts de la Cour General Motors/Commission, point 79 supra, point 51, et du 21 septembre 2006, JCB Service/Commission, C‑167/04 P, Rec. p. I‑8935, point 106 ; arrêt Kerstens/Commission, point 79 supra, point 60). Or, en l’espèce, le requérant critique non pas tant la constatation ou l’appréciation des faits par le Tribunal de la fonction publique que la qualification en droit qu’en a donnée celui-ci, le requérant reprochant au premier juge de ne pas avoir déduit de diverses erreurs ou anomalies constatées dans la décision litigieuse que l’examen comparatif des mérites qui en était à la base était entaché d’une erreur manifeste d’appréciation.
102 Sur le fond, il y a lieu de souligner que, conformément aux principes rappelés aux points 40 à 44 ci-dessus, le rôle du Tribunal de la fonction publique devait se limiter en l’espèce à vérifier si, eu égard aux voies et aux moyens qui ont pu conduire l’administration à son appréciation, celle-ci s’est tenue dans des limites non critiquables et n’a pas usé de son pouvoir de manière manifestement erronée dans son appréciation globale des mérites des fonctionnaires concernés, cette appréciation comportant des jugements de valeur complexes qui, par leur nature, ne sont pas susceptibles d’une vérification objective. C’est à l’aune de ce rappel qu’il convient d’apprécier le bien-fondé du présent moyen.
103 Or, le Tribunal constate que le premier juge n’a pas commis l’erreur de qualification juridique que lui reproche le requérant.
104 Les griefs soulevés par le requérant dans le cadre du présent moyen concernent, en substance, deux des trois critères de comparaison des mérites visés à l’article 45, paragraphe 1, du statut, à savoir, d’une part, les rapports de notation dont les fonctionnaires concernés ont fait l’objet et, d’autre part, l’usage dans l’exercice de leurs fonctions de langues autres que celle dont ils ont justifié posséder une connaissance approfondie conformément à l’article 28, sous f), du statut.
105 S’agissant des rapports de notation, il convient d’observer tout d’abord qu’il ressort du point 58 de l’arrêt attaqué que les appréciations générales exprimées dans les rapports dont les dix fonctionnaires ont fait l’objet depuis leur nomination au grade AD 12 sont équivalentes à celles du requérant.
106 Il y a lieu ensuite de souligner que, au point 44 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique a constaté qu’il ressortait des observations qui lui avaient été présentées par le Conseil le 1er septembre 2010 que la commission consultative de promotion avait essentiellement pris en compte les rapports de notation du requérant et des dix fonctionnaires pour l’exercice de notation 2006-2007 aux fins de comparer la moyenne de leurs appréciations analytiques. Cette approche n’a pas été critiquée par le requérant devant le Tribunal de la fonction publique.
107 Le Tribunal de la fonction publique a en outre constaté, au point 47 de l’arrêt attaqué, que trois des dix fonctionnaires, à savoir les fonctionnaires D, F et G, avaient obtenu, dans leurs appréciations analytiques, une moyenne supérieure à celle du requérant et donc moins bonne. Il ressort par ailleurs du point 48 de l’arrêt attaqué que l’écart entre la moyenne des appréciations analytiques du requérant lors de l’exercice de notation 2006-2007 et la moyenne, moins bonne, obtenue par les fonctionnaires D, F et G pour le même exercice de notation, se situe néanmoins dans une marge très étroite puisque celle-ci ne dépasse pas 0,15 point.
108 De surcroît, le Tribunal de la fonction publique a constaté, au point 47 de l’arrêt attaqué, que quatre des dix fonctionnaires, à savoir les fonctionnaires A, E, I et J, avaient obtenu une moyenne, dans leurs appréciations analytiques, moins élevée que celle du requérant et, partant, meilleure.
109 Le requérant fait valoir, sur ce point, que c’est à tort que le Tribunal de la fonction publique n’a pas tenu compte de la circonstance que les fonctionnaires A, E, I et J appartenaient à des directions générales dans lesquelles les notateurs s’étaient montrés, en moyenne, plus généreux que les notateurs du service juridique, dont il relevait.
110 À cet égard, le Tribunal relève qu’il est exact que la prise en compte de telles différences dans les moyennes des évaluations entre divers services peut être de nature à éliminer la subjectivité résultant des appréciations portées par des notateurs différents (voir arrêts du Tribunal du 11 juillet 2002, Perez Escanilla/Commission, T‑163/01, RecFP p. I‑A‑131 et p. II‑717, point 36, et la jurisprudence citée ; voir, en ce sens, arrêt Conseil/Stols, point 41 supra, point 43).
111 Toutefois, même à supposer que le Tribunal de la fonction publique n’ait pas, à tort, tenu compte en l’espèce de l’écart entre la moyenne des notations au sein des directions générales auxquelles appartenaient les fonctionnaires A, E, I et J et la moyenne des notations au sein du service juridique du Conseil, au motif que ces moyennes étaient calculées par rapport au nombre de fonctionnaires de chacune des entités en cause, sans faire de différence entre les fonctionnaires selon leur grade, le groupe de fonctions auquel ils appartenaient, ou encore selon ou non qu’ils étaient promouvables lors de l’exercice en cause, il y aurait lieu de constater que l’écart entre ces moyennes se situait entre, d’une part, 0,05 point, ce résultat étant obtenu en comparant la note moyenne au sein du service juridique et au sein de la direction générale I « Protection de l’environnement et des consommateurs, santé, denrées alimentaires, éducation/jeunesse/culture/audiovisuel », dont relevait le fonctionnaire A, et, d’autre part, 0,14 point, ce résultat étant obtenu en comparant la note moyenne au sein du service juridique du Conseil et au sein de la direction générale E « Affaires extérieures et politico-militaires », dont relevaient les fonctionnaires E et I.
112 Si l’application d’une telle correction au cas d’espèce impliquerait que la moyenne obtenue par le requérant est identique à celle obtenue par l’un de ces fonctionnaires visés au point précédent, à savoir le fonctionnaire J, et meilleure que celle obtenue par deux d’entre eux, à savoir les fonctionnaires E et I, l’écart entre la moyenne des notations de ces deux derniers fonctionnaires et celle obtenue par le requérant s’élèverait toutefois à 0,06 point seulement.
113 Ainsi, bien que, s’agissant du critère des rapports de notation, le requérant ait pu obtenir une meilleure moyenne, en ce qui concernait les appréciations analytiques, que celle obtenue par certains des dix fonctionnaires, l’écart entre ces moyennes se situait, en tout état de cause, dans une marge très étroite.
114 C’est à l’aune de cette considération qu’il convient d’examiner dans quelles conditions le Tribunal de la fonction publique, d’une part, a pris en considération les autres aspects des mérites des fonctionnaires concernés, qui étaient de nature à relativiser l’appréciation portée uniquement au vu des rapports de notation, et, d’autre part, a vérifié si c’était sans commettre d’erreur manifeste que l’AIPN avait choisi de promouvoir, plutôt que le requérant, ceux des dix fonctionnaires qui avaient obtenu une moyenne de notation équivalente à la sienne ou légèrement moins bonne que celle-ci (voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 23 janvier 2007, Tsarnavas/Commission, T‑472/04, RecFP p. I‑A‑2‑5 et II‑A‑2‑21, point 84, et la jurisprudence citée). Conformément à l’article 45, paragraphe 1, du statut, ces autres aspects sont, d’une part, l’utilisation des langues dans l’exercice des fonctions et, d’autre part, le niveau des responsabilités exercées.
115 S’agissant de l’utilisation des langues dans l’exercice des fonctions, le Tribunal de la fonction publique a constaté, au point 77 de l’arrêt attaqué, que, si le requérant parlait occasionnellement l’allemand, il employait seulement deux langues de façon régulière dans son travail, à savoir l’anglais et le français. Au point 78 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique a en outre considéré que c’était à tort que le Conseil avait soutenu que la totalité des fonctionnaires concernés maîtrisaient parfaitement l’anglais et le français et que, parmi ceux dont l’anglais ou le français était la langue maternelle, tous maîtrisaient au moins une troisième langue. En dépit de ces erreurs ou anomalies, le Tribunal de la fonction publique a néanmoins conclu à l’équivalence des mérites des dix fonctionnaires concernés et du requérant, s’agissant du critère de l’utilisation des langues, en se fondant notamment sur la circonstance que lesdits fonctionnaires employaient eux aussi l’anglais et le français dans l’exercice de leurs fonctions et avaient, à tout le moins, une bonne connaissance de ces deux langues.
116 Le constat des erreurs ou anomalies visées au point précédent n’ayant pas été remis en cause dans le cadre du pourvoi, il convient d’examiner si c’est à tort que le Tribunal de la fonction publique a omis de considérer que celles-ci entachaient d’une erreur manifeste d’appréciation l’examen de la comparaison des mérites des fonctionnaires promouvables auquel l’AIPN avait procédé en l’espèce.
117 À cet égard, il y a lieu de souligner, en premier lieu, que l’article 45, paragraphe 1, du statut ne subordonne pas la prise en compte d’une langue au titre du critère tenant aux aptitudes linguistiques à la condition que le fonctionnaire qui s’en prévaut en ait une connaissance parfaite. En effet, le niveau minimal de connaissance requis à cet effet doit être déterminé par seule référence aux besoins du service, en fonction notamment de la nature des tâches à accomplir. Or, il n’a pas été contesté devant le Tribunal de la fonction publique que chacun des dix fonctionnaires concernés avait au moins une bonne connaissance de l’anglais et du français. Contrairement à ce que suggère le requérant, il est par conséquent sans pertinence, dans l’analyse du présent moyen, que ces dix fonctionnaires n’aient pas tous pu justifier d’une connaissance parfaite de ces deux langues au cours de la période de référence.
118 En second lieu, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 45, paragraphe 1, du statut, les langues dont il doit être tenu compte aux fins d’une comparaison des mérites des fonctionnaires promouvables sont celles utilisées dans l’exercice de leurs fonctions, à l’exclusion toutefois de la langue dont lesdits fonctionnaires ont justifié posséder une connaissance approfondie conformément à l’article 28, sous f), du statut.
119 En l’espèce, s’agissant des fonctionnaires A, B, C, D, F, G, H, I et J, le Tribunal de la fonction publique a constaté, aux points 78 et 79 de l’arrêt attaqué, qu’il ressortait du dossier que ces derniers avaient justifié de la connaissance d’au moins deux langues au sens des dispositions visées au point précédent au cours de la période de référence et, partant, de mérites qui, sur le plan linguistique, étaient au moins équivalents à ceux du requérant. De surcroît, comme il a été souligné aux points 111 à 113 ci-dessus, s’il est certes exact que certains de ces fonctionnaires ont obtenu une moins bonne moyenne en ce qui concerne les appréciations analytiques que celle obtenue par le requérant, ces moyennes se situaient dans une marge très étroite, et ce même en appliquant la correction visée au point 112 ci-dessus. Or, au regard notamment des points 80 à 90 de l’arrêt attaqué et des points 73 à 85 et 90 à 96 ci-dessus, il y a lieu de tenir pour établi que ces fonctionnaires assumaient par ailleurs un niveau de responsabilité plus élevé que celui du requérant. Eu égard à la marge d’appréciation dont bénéficie l’AIPN en matière de promotion, conformément aux principes rappelés au point 41 ci-dessus, le requérant ne saurait dès lors être suivi lorsqu’il reproche au Tribunal de la fonction publique de ne pas avoir conclu, s’agissant de ces neuf fonctionnaires, que l’exercice de comparaison des mérites des fonctionnaires promouvables au cœur du présent litige était entaché d’une erreur manifeste d’appréciation.
120 Il ressort toutefois du dossier que la langue maternelle de l’un des dix fonctionnaires, à savoir le fonctionnaire E, est le français. Partant, ainsi que le Tribunal de la fonction publique l’a implicitement constaté au point 78 de l’arrêt attaqué, si ce fonctionnaire remplissait bien la condition d’accès à la promotion fixée à l’article 45, paragraphe 2, du statut, il n’utilisait dans le cadre de ses fonctions qu’une seule langue, au sens du paragraphe 1 de ce même article du statut, à savoir l’anglais. Il s’ensuit que, contrairement à ce que l’AIPN a affirmé dans sa décision prise sur réclamation, ledit fonctionnaire était, au regard de ce critère, moins méritant que le requérant.
121 Cette seule circonstance ne suffit toutefois pas pour considérer que le premier juge aurait nécessairement dû conclure que cette inexactitude avait entaché d’erreur manifeste la comparaison des mérites des fonctionnaires promouvables au cœur du présent litige.
122 En effet, conformément aux principes rappelés au point 102 ci-dessus, une telle erreur ne saurait apparaître qu’à l’aune d’une appréciation globale des mérites des fonctionnaires concernés.
123 Or, il convient tout d’abord de souligner à cet égard, comme l’a fait à juste titre le Tribunal de la fonction publique au point 68 de l’arrêt attaqué, que l’administration dispose d’une certaine marge d’appréciation quant à l’importance qu’elle accorde à chacun des trois critères prévus à l’article 45, paragraphe 1, du statut, le libellé de celui-ci n’excluant pas la possibilité d’une pondération. En l’espèce, ainsi qu’il ressort des explications fournies par le Conseil, auxquelles se réfère le Tribunal de la fonction publique au point 67 de l’arrêt attaqué, le critère de l’usage des langues n’a pas eu un poids aussi important que les deux autres critères mentionnés à l’article 45, paragraphe 1, du statut lors de la comparaison globale des mérites du requérant avec ceux des fonctionnaires promus.
124 Ensuite, même en tenant compte de la correction visée au point 112 ci-dessus, l’écart entre la moyenne de notation obtenue par le requérant au cours de l’exercice de notation 2006-2007, à savoir 2 points, et celle du fonctionnaire E, à savoir 2,06 points, est très étroit.
125 Enfin, il résulte des points 80 à 84 de l’arrêt attaqué et du rejet, aux points 73 à 85 ci-dessus, des critiques adressées par le requérant à l’encontre de cette partie du raisonnement du premier juge, que c’est sans commettre d’erreur que l’AIPN a pu considérer que le fonctionnaire E était plus méritant que le requérant, s’agissant du niveau des responsabilités exercées.
126 Il s’ensuit que c’est sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal de la fonction publique, également en ce qui concernait le fonctionnaire E, a conclu que l’exercice de comparaison des mérites des fonctionnaires promouvables au cœur du présent litige n’était pas entaché d’une erreur manifeste d’appréciation.
127 Au vu de ces divers éléments, il y a lieu de rejeter le grief pris de ce que le Tribunal de la fonction publique aurait fait, en l’espèce, une application restrictive et illégale de la notion d’erreur manifeste qui encadre le contrôle exercé par le juge de l’Union sur les choix opérés par l’administration en matière de promotion, en estimant, au point 35 de l’arrêt attaqué, qu’une erreur est manifeste dans ce contexte lorsqu’elle est aisément perceptible et peut être détectée à l’évidence. Il s’ensuit que le requérant ne saurait pas davantage être suivi lorsqu’il allègue que ledit Tribunal a méconnu son droit à un recours effectif, consacré à l’article 47 de la charte des droits fondamentaux.
128 Partant, le présent moyen n’est pas fondé et le pourvoi doit être rejeté dans sa totalité, y compris en ce qu’il vise à la condamnation du Conseil à verser au requérant des dommages et intérêts en réparation du préjudice que ce dernier allègue avoir subi du fait de l’illégalité de la décision de ne pas l’inclure dans la liste des fonctionnaires promus au grade AD 13, telle que cette décision ressort de la communication au personnel no 94/09.
Sur les dépens
129 Conformément à l’article 148, premier alinéa, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, le Tribunal statue sur les dépens.
130 Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, premier alinéa, du même règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 144 de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
131 Le requérant ayant succombé en ses conclusions et le Conseil ayant conclu en ce sens, il supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par le Conseil dans le cadre de la présente instance.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (chambre des pourvois)
déclare et arrête :
1) Le pourvoi est rejeté.
2) M. Diego Canga Fano supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par le Conseil de l’Union européenne dans le cadre de la présente instance.
Jaeger |
Forwood |
Truchot |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 mai 2013.
Signatures
* Langue de procédure : le français.