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Document 61996TJ0100

Wyrok Sądu pierwszej instancji (druga izba) z dnia 21 października 1998 r.
Miguel Vicente-Nuñez przeciwko Komisji Wspólnot Europejskich.
Urzędnicy.
Sprawa T-100/96.

ECLI identifier: ECLI:EU:T:1998:245

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

21 octobre 1998 ( *1 )

«Fonctionnaires — Classement — Bonification d'ancienneté d'échelon — Expérience professionnelle et formation universitaire antérieures au recrutement»

Dans l'affaire T-100/96,

Miguel Vicente-Nuñez, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Krainem (Belgique), représenté par Me Marc-Albert Lucas, avocat au barreau de Liège, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de Me Evelyne Korn, 21, rue de Nassau,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. Julian Currall, conseiller juridique, en qualité d'agent, assisté de Me Bertrand Wägenbaur, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet principal une demande d'annulation de la décision de la Commission du 24 mai 1995 portant révision du classement en échelon du requérant et fixation de celui-ci au grade A 7, échelon 2, à la date du 1er juin 1991 et non au grade A 7, échelon 3,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (deuxième chambre),

composé de MM. C. W. Bellamy, président, A. Potocki et J. Pirrung, juges,

greffier: M. J. Palacio Gonzalez, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 15 juillet 1998,

rend le présent

Arrêt

Cadre juridique

1

Aux termes de l'article 5, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après «statut»):

«Les emplois relevant du présent statut sont classés, suivant la nature et le niveau des fonctions auxquelles ils correspondent, en quatre catégories désignées dans l'ordre hiérarchique décroissant par les lettres A, B, C, D.

La catégorie A [... nécessite] des connaissances de niveau universitaire ou une expérience professionnelle d'un niveau équivalent.»

Le paragraphe 3 du même article dispose:

«Les fonctionnaires appartenant à une même catégorie [...] sont soumis respectivement à des conditions identiques de recrutement et de déroulement de carrière.»

2

L'article 32 du statut se lit comme suit:

«Le fonctionnaire recruté est classé au premier échelon de son grade.

Toutefois, l'autorité investie du pouvoir de nomination peut, pour tenir compte de la formation et de l'expérience professionnelle spécifique de l'intéressé, lui accorder une bonification d'ancienneté d'échelon dans ce grade; cette bonification ne peut excéder [...] 48 mois dans les [...] grades [autres que les grades A 1 à A 4, LA 3 et LA 4].»

3

C'est en application, notamment, des articles 5 et 32 du statut que la Commission a arrêté, le 1er septembre 1983, une décision générale relative aux critères applicables à la nomination en grade et au classement en échelon lors du recrutement (ci-après «décision de 1983»).

4

L'article 2, deuxième alinéa, de cette décision précise:

«La durée minimum d'expérience professionnelle pour le classement au premier échelon dans le grade de base de chaque carrière est de [...] trois ans pour les grades A 7 et LA 7».

Son article 3, premier alinéa, dispose:

«Pour tenir compte de l'expérience professionnelle dépassant celle indiquée à l'article 2, deuxième alinéa, l'autorité investie du pouvoir de nomination accorde, sous réserve des maxima prévus à l'article 32 du statut, une bonification d'ancienneté d'échelon selon le tableau figurant en annexe II.»

5

Le tableau figurant en annexe II à la décision de 1983 indique, pour le grade A 7, que trois ans d'expérience professionnelle donnent droit au classement à l'échelon de base, quatre ans à douze mois de bonification d'ancienneté, cinq ans à 24 mois, six ans à 36 mois et sept ans à 48 mois.

6

L'article 3, deuxième alinéa, de la décision de 1983 prévoit toutefois que, même si l'expérience professionnelle n'atteint pas la durée indiquée (c'est-à-dire trois ans pour le grade A 7), le classement est néanmoins fixé au premier échelon.

7

L'article 2, troisième à huitième alinéa de la décision de 1983 se lit comme suit:

«3)

L'expérience professionnelle est appréciée en prenant en considération l'activité exercée antérieurement à la date de l'offre d'emploi [...]

4)

Une même période ne peut être valorisée qu'une seule fois.

5)

L'expérience professionnelle doit être utilisable dans un des secteurs d'activité de la Commission.

6)

L'expérience professionnelle n'est décomptée qu'à partir de l'obtention du premier diplôme donnant accès, conformément à l'article 5 du statut, à la catégorie dans laquelle l'emploi est à pourvoir, [...] et elle doit être d'un niveau correspondant à cette catégorie.

7)

Peut être assimilée à l'expérience professionnelle une formation postérieure d'un niveau au moins équivalent au diplôme qui donne accès à cette catégorie. Cette formation doit être sanctionnée par un diplôme ou un acte équivalent.

8)

Au cas où un diplôme n'est pas exigé pour l'accès à l'emploi à pourvoir, la durée de l'expérience professionnelle justifiée est considérée comme étant égale à la période pendant laquelle a été exercée une activité à temps plein exigeant normalement un tel diplôme. Pour l'appréciation de cette expérience professionnelle entrent en ligne de compte notamment:

le niveau des responsabilités;

la nature des fonctions exercées;

les publications, les travaux de recherches ou d'autres activités.»

Faits à l'origine du litige

Formation suivie et expérience professionnelle acquise par le requérant antérieurement à son recrutement

8

Du 1er février 1976 jusqu'au 30 septembre 1986, le requérant, de nationalité espagnole, a travaillé aux services sociaux de l'ambassade d'Espagne à Bruxelles. A partir du 1er décembre 1979, il y a excercé les fonctions de «chef de bureau».

9

Le 5 juillet 1982, le requérant a obtenu une licence en sciences commerciales et consulaires après avoir suivi, entre 1977 et 1982, des cours du soir à l'Institut supérieur de commerce Saint-Louis à Bruxelles, qui dispense un enseignement supérieur économique de plein exercice, de type long et de niveau universitaire.

Carrière du requérant à la Commission

10

Le requérant est entré au service de la Commission en 1986 en qualité de fonctionnaire de catégorie B.

11

Par la suite, il a réussi le concours général CES/A/6/89 organisé par le Comité économique et social des Communautés européennes pour la constitution d'une liste de réserve d'administrateurs de catégorie A, grades 7 et 6. Pour être admis à ce concours, les candidats devaient «a) avoir accompli des études universitaires sanctionnées par un diplôme [...] ou posséder une expérience professionnelle d'un niveau équivalent; b) posséder une expérience professionnelle d'au moins cinq ans en rapport avec la nature des fonctions».

12

Après avoir été nommé administrateur à la Commission, par décision dite de «nomination-transfert», au titre de l'article 29, paragraphe 1, sous c), du statut, le requérant a, par décision adoptée en application de l'article 46 du statut, qui ne permet pas la prise en compte de l'expérience professionnelle acquise par l'intéressé antérieurement à son entrée en service, été classé au grade A 7, échelon 1, avec effet au 1er juin 1991. Le requérant a été affecté à un emploi qui, aux termes de l'avis de vacance COM/2430/90, requérait un diplôme universitaire ou une expérience professionnelle d'un niveau équivalent.

13

Le 12 novembre suivant, le requérant a introduit une réclamation à l'encontre de cette décision de classement, au motif que le changement de catégorie était assimilable à un recrutement et que, dès lors, l'article 32 du statut - et donc la bonification d'ancienneté d'échelon qu'il prévoit - devait trouver à s'appliquer, afin que sa formation et son expérience professionnelle puissent être prises en compte. Il n'a pas introduit de recours contre le rejet implicite de sa réclamation, de sorte que la décision de classement est devenue définitive.

14

Dans son arrêt du 28 septembre 1993, Baiwir e.a./Commission (T-103/92, T-104/92 et T-105/92, Rec. p. II-987, ci-après «arrêt Baiwir»), le Tribunal a considéré que le respect du principe d'égalité de traitement impliquait que le classement en échelon de l'ensemble des lauréats «internes» et «externes» d'un concours général soit établi sur le fondement de l'article 32 du statut, sous réserve de l'hypothèse dans laquelle l'application de l'article 46 du statut permet de préserver les droits acquis par les fonctionnaires, en cette qualité, antérieurement à leur passage à une nouvelle catégorie.

15

Le 10 février 1994, la Commission a publié aux Informations administratives une communication à destination de son personnel relative audit arrêt Baiwir. Elle a notamment prié «les fonctionnaires se trouvant dans la même situation que les requérants dans cet arrêt (fonctionnaires étant passés dans la catégorie supérieure à la suite d'un concours externe) et estimant pouvoir bénéficier d'un classement supérieur, [...] de se faire connaître par écrit auprès du secrétariat du comité de classement [...] Leur classement pourrait donc être réexaminé à la lumière de l'arrêt ci-dessus mentionné. En cas de révision du classement des intéressés, l'effet pécuniaire ne pourrait être calculé qu'à partir de la date du prononcé de l'arrêt par le Tribunal (28.9.1993) [...]»

16

Le 4 mai 1994, le requérant a introduit une demande de révision de son classement. Il revendiquait la prise en considération, au titre de l'article 32 du statut, de toute l'expérience professionnelle de niveau A qu'il avait acquise antérieurement à son entrée au service de la Commission, avec effet au 1er juin 1991.

17

Par une note du 17 juin suivant, le président du comité de classement a informé le requérant que le comité avait donné pour avis à 1'AIPN de le reclasser, avec effet au 1er juin 1991, au grade A 7, échelon 1, avec douze mois d'ancienneté. Ce faisant, le comité a considéré que l'expérience professionnelle du requérant ne pouvait être prise en compte qu'à partir de la date d'obtention de son diplôme universitaire.

18

Le 27 juin, le requérant a adressé une note en réponse au président du comité de classement pour revendiquer un classement au grade A 7, échelon 3, au motif que la totalité de son expérience professionnelle devait être prise en compte, y compris celle qui précédait l'obtention de son diplôme.

19

Le comité de classement a alors sollicité l'avis du service juridique de la Commission. Dans son avis, rendu le 18 octobre 1994, ledit service juridique préconisait une solution plus favorable au requérant, consistant à lui reconnaître une partie de son expérience professionnelle antérieure à l'obtention du diplôme. Le comité de classement a apparemment suivi cet avis et a proposé de classer le requérant au grade A 7, échelon 2.

20

Le 24 mai 1995, la Commission a adopté une décision selon laquelle le classement du requérant:

a été révisé et fixé au grade A 7, échelon 2, à la date du 1er juin 1991;

a été, en conséquence, établi à la date du 28 septembre 1993 (date de l'arrêt Baiwir) au grade A 7, échelon 3 (ancienneté d'échelon au 1er juin 1993).

Il a été ajouté que la décision prendrait effet à compter de la date de prononcé de l'arrêt et qu'elle commencerait à produire ses conséquences pécuniaires à la même date.

21

Le 29 juin 1995, le requérant a reçu l'acte de notification de cette décision.

22

Le 27 septembre 1995, il a introduit une réclamation à l'encontre de la décision du 24 mai, dans laquelle il demandait l'annulation de la décision le reclassant au grade A 7, échelon 3, au 1er juin 1991 avec effet à la même date et l'octroi d'intérêts au taux de 8 % l'an sur les sommes dues.

23

Cette réclamation a fait l'objet d'une décision explicite de rejet du 27 mars 1996, notifiée au requérant le 28 mars 1996.

Procédure et conclusions des parties

24

C'est dans ces circonstances que, par requête enregistrée le 27 juin 1996 au greffe du Tribunal, le requérant a introduit le présent recours. Dans sa requête, il conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

annuler la décision de la Commission du 24 mai 1995 portant révision de son classement, en ce qu'elle arrête ce classement au grade A 7, échelon 2, à la date du 1er juin 1991 et au grade A 7, échelon 3, au 1er juin 1993, avec effet au 28 septembre 1993, et non au grade A 7, échelon 3, au 1er juin 1991 et A 7, échelon 4, aux mêmes dates, avec effet au 1er juin 1991;

condamner la Commission à lui verser des intérêts au taux de 8 % l'an sur les sommes qui lui seraient dues, à partir de la date à laquelle il aurait dû en bénéficier;

condamner la Commission aux dépens.

25

Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 24 juillet 1996, la Commission a soulevé une exception d'irrecevabilité qui, par ordonnance du Tribunal (deuxième chambre) du 10 décembre 1996, a été jointe au fond.

26

Dans ses observations sur l'exception d'irrecevabilité, déposées le 24 septembre 1996, le requérant a estimé nécessaire de modifier ses conclusions. Il conclut désormais à ce qu'il plaise au Tribunal:

à titre principal, annuler la décision de la Commission du 24 mai 1995 en ce qu'elle fixe par révision son classement à l'échelon 2 du grade A 7 au 1er juin 1991 et à l'échelon 3 du grade A 7 au 28 septembre 1993, alors qu'elle aurait dû le fixer à l'échelon 3 du grade A 7 au 1er juin 1991 et à l'échelon 4 du grade A 7 au 28 septembre 1993, et en ce qu'elle fait courir les effets, notamment pécuniaires, de cette décision à compter du 28 septembre 1993, alors qu'elle aurait dû les faire remonter au 1er juin 1991;

à titre subsidiaire, annuler la décision de la Commision du 24 mai 1995 en ce qu'elle fixe par révision son classement à l'échelon 2 du grade A 7 au 1er juin 1991 et à l'échelon 3 du grade A 7 au 28 septembre 1993, alors qu'elle aurait dû le fixer à l'échelon 3 du grade A 7 au 1er juin 1991 et à l'échelon 4 du grade A 7 au 28 septembre 1993;

en toute hypothèse, condamner la Commission à lui verser des intérêts au taux de 8 % l'an sur les sommes qui lui seraient dues, à partir de la date à laquelle il aurait dû en bénéficier;

condamner la Commission aux dépens.

27

Dans son mémoire en défense, la Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

rejeter le recours comme irrecevable, et subsidiairement comme non fondé;

condamner le requérant aux entiers dépens de l'instance.

28

Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (deuxième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale sans procéder à des mesures d'instruction préalables. Il a toutefois demandé aux parties de répondre par écrit, avant la date de l'audience, à certaines questions. Les parties ont déféré à cette invitation dans le délai imparti.

29

Le mandat du juge M. A. Kalogeropoulos, président de la deuxième chambre, ayant pris fin le 17 septembre 1998, le président du Tribunal a, par décision du 17 juin 1998, désigné le juge M. A. Potocki pour remplacer le juge sortant, le juge M. C. W. Bellamy s'étant vu attribuer les fonctions de président de chambre.

30

Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l'audience qui s'est déroulée le 15 juillet 1998.

Sur la recevabilité du recours

Arguments des parties

31

La Commission souligne, en premier lieu, que sa décision du 24 mai 1995 avait pour objet de fixer le classement du requérant au grade A 7, échelon 2, avec effet au 1er juin 1991. Auparavant, il aurait été classé au grade A 7, échelon 1, avec effet à la même date. Or, le requérant aurait reconnu que cette décision faisait partiellement droit à sa demande du 4 mai 1994. Il admettrait donc que cette décision était liée à sa demande, laquelle aurait le même objet que le présent recours, par lequel il cherche à obtenir son classement au grade A 7, échelon 3, avec effet au 1er juin 1991. En confirmant que la décision du 24 mai 1995 faisait partiellement droit à sa demande, le requérant confirmerait que cette dernière tendait à obtenir un classement supérieur au grade A 7, échelon 2. Admettre que l'on puisse introduire un recours ayant le même objet qu'une demande dont le rejet implicite n'a pas été attaqué dans les délais supposerait que l'on fasse abstraction du principe de sécurité juridique que ces délais d'ordre public visent à sauvegarder. La Commission relève que ce n'est pas parce qu'elle a décidé, pour des motifs d'équité et malgré l'expiration des délais, le classement de l'intéressé à un échelon supérieur que les débats s'en sont, pour autant, trouvés rouverts.

32

La Commission se réfère, à cet égard, à l'ordonnance du Tribunal du 15 février 1995, Grassi/Commission (T-552/93, RecFP p. II-125), dans laquelle le Tribunal a constaté que le requérant n'avait pas contesté dans les délais la décision implicite de rejet de sa demande et qu'il ne pouvait, dès lors, pas attaquer la décision explicite confirmative notifiée postérieurement. La situation, dans la présente espèce, serait la même que dans cette affaire, la décision attaquée confirmant la décision implicite de rejet de la demande du requérant de se voir accorder un classement au grade A 7, échelon 3, au 1er juin 1991. L'approche retenue dans l'affaire Grassi serait d'autant plus pertinente en l'espèce que la décision attaquée, outre qu'elle confirme la décision implicite de rejet de la demande du requérant, améliore sa situation par rapport à celle qui résultait de la décision initiale.

33

La Commission estime, en second lieu, que le requérant ne saurait éviter les conséquences du défaut d'introduction d'une réclamation contre le rejet implicite de sa demande du 4 mai 1994 en invoquant un fait nouveau. En effet, si la communication du 10 février 1994 constituait sans doute un fait nouveau par rapport aux décisions de classement adoptées antérieurement, la décision dont le présent recours poursuit l'annulation daterait de 1995 et serait donc postérieure. Or, il serait impossible de comprendre en quoi la communication du 10 février 1994, qui était connue du requérant à l'époque, peut constituer un fait nouveau par rapport à une décision de mai 1995.

34

Dans son mémoire en défense, la Commission se réfère à l'ordonnance de la Cour du 16 juin 1988, Progoulis/Commission (371/87, Rec. p. 3081, point 19). Dans cette affaire, la Cour aurait constaté qu'une décision explicite de la Commission, intervenant à la suite du rejet implicite d'une demande et faisant droit, pour l'essentiel, à cette demande, n'était pas un acte attaquable. La Commission est d'avis que cette jurisprudence est applicable en l'espèce, puisque la décision du 24 mai 1995 accorde au requérant - alors que le délai pour contester le rejet implicite de sa demande de modification de son classement était depuis longtemps écoulé - un reclassement à l'échelon 2 du grade A 7.

35

La Commission souligne, enfin, que le présent recours a été introduit nonobstant les avertissements très clairs qu'elle avait formulés dans le rejet explicite de la réclamation en ce qui concerne son irrecevabilité. Il viserait d'ailleurs un acte que la Commission n'avait nullement l'obligation de prendre. Ces circonstances justifieraient de considérer les dépens engagés dans la présente affaire comme étant vexatoires. La Commission ajoute que le requérant attaque une décision qui améliore sa situation, même si elle ne va pas aussi loin qu'il l'aurait souhaité. Il ne faudrait pas que la Commission soit pénalisée du fait qu'elle a pris une décision favorable au requérant, en équité et postérieurement au terme du délai dans lequel la situation préexistante aurait pu être contestée.

36

Le requérant estime, en revanche, que la décision du 24 mai 1995 est intervenue sur la base d'éléments d'appréciation nouveaux et affecte sa situation juridique, en ce qu'elle ne fait pas pleinement droit à sa demande de reclassement.

Appréciation du Tribunal

37

Le présent recours, dirigé contre la décision de reclassement du 24 mai 1995, ne saurait être déclaré recevable que si cette décision constitue un acte faisant grief au sens de l'article 91, paragraphe 1, du statut et non pas un acte purement confirmatif. En effet, selon une jurisprudence bien établie, un recours en annulation formé contre un acte purement confirmatif d'une décision antérieure non attaquée dans les délais est irrecevable, étant entendu que cette qualification suppose que l'acte ne contienne aucun élément nouveau par rapport à cette décision et n'ait pas été précédé d'un réexamen de la situation du destinataire de celle-ci (arrêt du Tribunal du 15 octobre 1997, IPK/Commission, T-331/94, Rec. p. II-1665, point 24, ainsi que la jurisprudence de la Cour et du Tribunal citée).

38

II y a donc lieu d'examiner si la décision du 24 mai 1995 comporte des éléments nouveaux et a été précédée d'un réexamen au sens de la jurisprudence susmentionnée ou si elle se borne, au contraire, à confirmer la décision du 4 septembre 1994 portant rejet implicite, en vertu de l'article 90, paragraphe 1, du statut, de la demande de reclassement introduite par le requérant le 4 mai 1994, rejet qui, à défaut d'avoir fait l'objet d'une réclamation conformément à l'article 90, paragraphe 2, du statut, est devenu définitif le 4 décembre 1994.

39

II importe à cette fin de comparer la décision implicite de rejet du 4 septembre 1994 avec le contenu de la décision du 24 mai 1995, en tenant compte de tous les événements intervenus au cours de la procédure précontentieuse.

40

II convient de rappeler que, par sa décision implicite du 4 septembre 1994, la Commission a rejeté la demande du requérant du 4 mai 1994 l'invitant à procéder à son reclassement au titre de l'article 32 du statut et à prendre en considération, à cet effet, toute l'expérience professionnelle de niveau A qu'il a acquise antérieurement à son entrée en service, cette décision devant produire ses effets administratifs à compter du 1er juin 1991, date de sa nomination au grade A 7. Le rejet implicite de cette demande avait donc pour effet de refuser son reclassement et de confirmer ainsi son classement initial au grade A 7, échelon 1, au 1er juin 1991, effectué en application de l'article 46 du statut, qui ne permet la prise en compte d'aucune expérience professionnelle antérieure à l'entrée en service.

41

II y a lieu de constater ensuite que la décision attaquée du 24 mai 1995 a expressément «révisé» le classement initial du requérant en lui accordant un échelon supérieur, et cela en application de l'article 32 du statut. En outre, elle est intervenue à la suite de l'avis du service juridique de la Commission du 18 octobre 1994 et d'une proposition en ce sens du comité de classement. Il s'avère donc que la décision attaquée a été précédée de l'examen continu de la demande, ce qui correspond, en substance, à un réexamen, et comporte de nouveaux éléments par rapport au rejet implicite susmentionné, en ce qu'elle est le résultat d'une nouvelle analyse de la valeur à attribuer à l'expérience professionnelle du requérant, une telle analyse faisant par définition défaut dans la décision implicite qui s'était limitée à ignorer totalement cette expérience. La décision implicite a ainsi fait l'objet d'une modification substantielle au sens de l'arrêt de la Cour du 9 mars 1978, Herpels/Commission (54/77, Rec. p. 585, points 11 à 14).

42

Le caractère nouveau et substantiel de cet examen est confirmé par la décision du 27 mars 1996, rejetant la réclamation dirigée contre la décision attaquée, qui précise, au sujet de la phase d'examen précédant l'adoption de la décision attaquée, que «la question essentielle [...] [était] de savoir la date à partir de laquelle l'expérience professionnelle [pouvait] être prise en considération. En l'espèce, lors du réexamen à la suite de l'arrêt Baiwir, l'administration a tenu compte de tous les éléments du dossier qui portaient sur l'expérience professionnelle de M. Vicente-Nuñez auprès de l'ambassade d'Espagne [...]»

43

II s'ensuit que la décision attaquée ne saurait être qualifiée d'acte purement confirmatif.

44

La Commission fait toutefois valoir que la décision attaquée, par laquelle l'AIPN a accordé au requérant l'échelon 2, ne constitue pas un acte faisant grief, étant domié que le classement de ce dernier à l'échelon 1 était devenu définitif le 4 décembre 1994 et que, dans ces circonstances, l'octroi spontané de l'échelon 2 représentait exclusivement un avantage pour le requérant.

45

Une telle argumentation méconnaît cependant que la décision attaquée, ayant été adoptée à l'issue d'un véritable examen des circonstances de la cause et ne revêtant donc pas un caractère purement confirmatif, se substitue à la décision précédente (voir, par exemple, l'arrêt de la Cour du 11 mars 1986, Adams e.a./Commission,294/84, Rec. p. 977, point 16, ainsi que les arrêts du Tribunal du 11 février 1992, Panagiotopoulou/Parlement, T-16/90, Rec. p. II-89, point 20, et du 3 mars 1994, Cortes Jimenez e.a./Commission, T-82/92, RecFP p. II-237, point 17), l'institution concernée renonçant ainsi, dans l'intérêt d'une réponse plus juste à la demande initiale, à l'avantage procédural que constitue le caractère inattaquable du rejet implicite.

46

II résulte de cette substitution que la décision attaquée en l'espèce ne peut pas être considérée comme ayant conféré au requérant exclusivement un avantage, et cela de manière spontanée, sans aucun lien avec le rejet, devenu en principe définitif, de sa demande de reclassement. En effet, d'une part, la décision attaquée est juridiquement censée remplacer la décision implicite de rejet et constituer ainsi une réponse à la demande de reclassement. D'autre part, sur le plan factuel, le rejet implicite de cette demande n'a pas empêché la continuation du processus administratif d'examen ou de réexamen par le comité de classement, le service juridique de la Commission et l'AIPN elle-même, qui se réfère, dans la décision attaquée, aux demandes introduites à la suite de l'arrêt Baiwir. Par ailleurs, la décision du 27 mars 1996, rejetant la réclamation du requérant, admet [p. 5, sous a)] que, à l'époque où le rejet implicite de la demande de reclassement du requérant (4 septembre 1994) est devenu définitif (4 décembre 1994), «la Commission s'employait toujours à examiner le cas» et que la préparation d'«un avis était en cours».

47

Dans cette optique, la décision attaquée est, à l'évidence, un acte faisant grief, dans la mesure où elle emporte refus d'octroi au requérant du maximum objectivement possible de la bonification d'échelon prévue à l'article 32, deuxième alinéa, du statut, à savoir l'échelon 3. La seule circonstance que, par l'octroi de l'échelon 2, ladite décision ait amélioré le classement initial du requérant et, ainsi, partiellement fait droit à sa demande de reclassement, n'est pas susceptible de remettre en cause cette analyse (voir, en ce sens, l'arrêt de la Cour du 28 mai 1980, Kuhner/Commission, 33/79 et 75/79, Rec. p. 1677, point 9).

48

Cette conclusion n'est pas infirmée par l'ordonnance Progoulis/Commission, précitée (point 19), invoquée par la Commission (voir ci-dessus point 34). En effet, contrairement à ce que la Cour a pu constater dans cette affaire, la décision attaquée en l'espèce - reclassant, certes, le requérant de l'échelon 1 à l'échelon 2, mais refusant son reclassement à l'échelon 3 - ne saurait être considérée comme ayant «essentiellement fait droit» à la demande du requérant. En outre, si la Cour a jugé, dans l'affaire Progoulis, que la réponse explicite litigieuse n'était pas un acte faisant grief indépendant du «prétendu» grief fait par le rejet implicite de la demande originale, il convient de préciser que la plupart des revendications de cette demande auxquelles la réponse explicite n'avait pas fait droit - à savoir l'adoption de mesures disciplinaires contre des tiers, le renvoi de ceux-ci devant les juridictions pénales et l'établissement de la preuve que ces mesures avaient été prises - ne concernaient pas la situation statutaire individuelle du requérant, de sorte que leur rejet, tant implicite qu'explicite, n'était pas susceptible de lui faire grief. Or, la situation du cas d'espèce ne présente pas de telles particularités. Ainsi qu'il a été constaté ci-dessus (points 41 et 42), la décision attaquée dans le cadre du présent recours a été adoptée à l'issue d'un véritable examen, comporte des éléments nouveaux par rapport au rejet implicite antérieur et s'est donc substituée à celui-ci.

49

Cette substitution, qui emporte disparition de la décision implicite de rejet, s'oppose à l'argumentation de la Commission, selon laquelle le caractère confirmatif de la décision attaquée consiste en ce qu'elle maintient, par l'octroi de l'échelon 2, le refus de faire droit à la demande du requérant visant le maximum de la bonification d'échelon prévue, à savoir l'octroi de l'échelon 3. Il convient d'ajouter que rien dans le dossier ne permet de constater que l'examen ou le réexamen de la demande de reclassement du requérant aurait effectivement eu lieu à deux niveaux différents: celui de la demande maximale et celui d'une demande inférieure. Il apparaît plutôt que l'AIPN, après avoir refusé tout reclassement du requérant, a analysé dans la décision attaquée, à la lumière de l'arrêt Baiwir, la totalité de l'expérience professionnelle acquise par le requérant et en a finalement tenu compte partiellement. Par ailleurs, la décision attaquée renvoie, de manière générale, aux fonctionnaires, dont le requérant, «ayant présenté une demande [...] afin que leur classement puisse être revu», ce qui confirme que l'AIPN n'a pas entendu limiter son examen dans le sens voulu par la Commission.

50

II résulte de ce qui précède que le recours tendant à l'annulation de la décision du 24 mai 1995 doit être déclaré recevable, sans qu'il soit nécessaire de se prononcer, dans ce contexte, sur la rétroactivité du reclassement demandé, cette dernière question relevant de l'examen au fond.

51

Le Tribunal estime, enfin, que les nouvelles conclusions formulées à titre principal par le requérant dans ses observations sur l'exception d'irrecevabilité ne font que préciser les conclusions figurant dans la requête et doivent, dès lors, être déclarées recevables. Il en va de même pour les conclusions formulées à titre subsidiaire. S'il est vrai qu'elles n'ont été présentées que dans les observations sur l'exception d'irrecevabilité, elles demeurent toutefois en retrait par rapport aux conclusions principales, en ce qu'elles réduisent la période de validité rétroactive sollicitée patees dernières pour l'échelon d'ancienneté du requérant.

Sur le fond

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision de la Commission du 24 mai 1995 portant révision du classement du requérant

52

A l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision de la Commission du 24 mai 1995 portant révision de son classement, le requérant invoque, en substance, un moyen unique tiré, à titre principal, d'une violation de l'article 2, huitième alinéa, de la décision de 1983, ainsi que, à titre subsidiaire, d'une violation de l'article 32, deuxième alinéa, du statut et du principe d'égalité de traitement. Patce moyen, le requérant reproche s. la Commission de ne pas avoir tenu compte du diplôme universitaire qu'il avait obtenu et de l'expérience professionnelle de plus de dix aimées, équivalente au niveau A, qu'il avait acquise.

Arguments des parties

53

Le requérant soutient que c'est l'article 2, huitième alinéa, de la décision de 1983 qui trouve à s'appliquer au calcul de la durée de son expérience professionnelle. En effet, ni l'avis de concours général CES/A/6/89 ni l'avis de vacance COM/2430/90 n'auraient «exigé» la possession d'un diplôme universitaire. Selon ces deux avis, il aurait été suffisant de justifier d'une expérience professionnelle équivalente à un tel diplôme.

54

Dans la mesure où la Commission considère que sa décision de 1983 couvre uniquement les deux hypothèses dans lesquelles l'intéressé possède soit le diplôme requis (article 2, sixième alinéa), soit une expérience équivalente (article 2, huitième alinéa), alors qu'elle ne s'appliquerait pas au cas du fonctionnaire qui répond à la fois à la condition du diplôme et à celle de l'expérience professionnelle, le requérant soutient que cette argumentation ne correspond pas à l'article 32, deuxième alinéa, du statut, que la décision de 1983 vise à appliquer. Le requérant rappelle que cette disposition statutaire prévoit que l'administration doit prendre en considération, aux fins d'une bonification d'échelon, tant l'expérience professionnelle que la formation de l'intéressé, et non pas l'une ou l'autre.

55

Le requérant précise que la décision de 1983 distingue les cas dans lesquels un diplôme est une condition indispensable pour accéder à l'emploi à pourvoir (article 2, sixième alinéa) de ceux dans lesquels une expérience professionnelle équivalente peut pallier l'absence de diplôme (article 2, huitième alinéa). La première hypothèse ne viserait que les fonctionnaires titulaires d'un diplôme; la seconde, si elle vise certes les fonctionnaires non titulaires de diplôme mais possédant une expérience équivalente, viserait également, comme la première, les fonctionnaires diplômés, puisque les avis de concours et de vacance qui ne font plus de la possession d'un diplôme une condition indispensable continuent néanmoins à permettre l'accès des fonctionnaires diplômés.

56

Le requérant en conclut que les avis de concours et de vacance admettant en l'espèce qu'une expérience professionnelle équivalente puisse pallier l'absence de diplôme, l'article 2, huitième alinéa, de la décision de 1983 permet de valoriser la période durant laquelle il a exercé des activités exigeant normalement un tel diplôme, c'est-à-dire la période comprise entre février 1976 et juin 1982 inclus, soit six ans et cinq mois. Il n'y aurait pas lieu de déduire de cette période d'expérience professionnelle de niveau A une période équivalant à la durée d'études universitaires, car le texte de l'article 2, huitième alinéa, ne le prévoit pas. En ajoutant l'expérience professionnelle acquise après l'obtention du diplôme, à savoir la période comprise entre juillet 1982 et septembre 1986 inclus, soit quatre ans et trois mois, on aboutirait à un total de dix ans et huit mois, soit à un classement à l'échelon 3.

57

A supposer que le raisonnement de la Commission relatif à la non-applicabilité de l'article 2, huitième alinéa, de la décision de 1983 doive être admis, il convient alors, de l'avis du requérant, d'en revenir à l'article 32 du statut lui-même et au principe d'égalité de traitement. Par ailleurs, toute disposition de la décision de 1983 qui ne serait pas conforme à l'article 32 du statut ou au principe d'égalité de traitement devrait être écartée.

58

La Commission admet que l'activité professionnelle exercée par le requérant auprès de l'ambassade d'Espagne après l'obtention de son diplôme universitaire, soit entre juillet 1982 et septembre 1986, constitue une expérience professionnelle équivalant au niveau A. En ce qui concerne l'activité professionnelle antérieure à l'obtention de ce diplôme, soit celle exercée entre février 1976 et juillet 1982, la Commission estime, en revanche, qu'il convient de distinguer deux aspects, le premier consistant à déterminer si l'intégralité de cette période constitue une expérience professionnelle correspondant au niveau A, le second consistant à établir si l'AIPN était, le cas échéant, obligée de prendre en compte l'intégralité de cette période.

59

Sur le premier aspect, la Commission admet que l'intégralité de l'activité professionnelle exercée par le requérant entre février 1976 et juillet 1982 était en principe - c'est-à-dire abstraction faite de la question de savoir combien d'années devaient être prises en compte - équivalente au niveau A, alors que les éléments objectifs du dossier ne plaidaient pas en faveur de cette appréciation. Au titre de ces éléments défavorables, la Commission relève que les attestations de l'ambassade d'Espagne relatives au niveau de l'activité professionnelle du requérant n'étaient ni très détaillées ni très explicites, que le requérant n'a été «chef de bureau» qu'à partir du 1er décembre 1979 et non pas pendant toute la période litigieuse et que, en février 1976, le requérant n'avait que 22 ans et ne disposait d'aucun diplôme universitaire, ce qui rendrait très peu vraisemblable son affirmation selon laquelle il aurait, dès le début, acquis une expérience professionnelle de niveau A. La Commission déclare que, en dépit de ces éléments, elle a considéré l'activité professionnelle exercée pendant la période litigieuse comme étant, en principe, équivalente au niveau A.

60

En ce qui concerne le second aspect, la Commission juge erronée la thèse du requérant, selon laquelle elle devait tenir compte, pour le calcul de l'ancienneté en échelon, non seulement de l'expérience acquise après l'obtention du diplôme universitaire, mais aussi de l'intégralité de son expérience professionnelle acquise auparavant. De l'avis de la Commission, le cas de figure du requérant n'est réglé ni par l'article 2, sixième alinéa, ni par l'article 2, huitième alinéa, de la décision de 1983.

61

La Commission en conclut que le cas du requérant doit être apprécié en tenant compte des particularités de l'espèce et du principe d'égalité de traitement. Or, ces particularités résideraient dans le fait que le requérant disposait, au moment de sa candidature au concours général CES/A/6/89, à la fois d'un diplôme universitaire et d'une expérience professionnelle d'au moins cinq ans d'un niveau équivalent. Le point de départ de l'approche de la Commission serait que le requérant a été admis au concours et nommé au poste qu'il occupe parce qu'il remplissait l'une ou l'autre des conditions, mais non parce qu'il les remplissait simultanément. En effet, les avis de concours et de vacance pertinents en l'espèce auraient exigé des candidats soit un diplôme universitaire, soit une expérience professionnelle équivalente, leur laissant ainsi le choix de faire acte de candidature en invoquant soit l'un, soit l'autre. Dans ces circonstances, la Commission estime qu'il faut distinguer deux hypothèses.

62

Si l'on part de l'hypothèse que le requérant a été admis en considération de son diplôme universitaire, l'expérience professionnelle ne serait décomptée, conformément à l'article 2, sixième alinéa, de la décision de 1983, qu'à partir de l'obtention du diplôme, soit à partir de juillet 1982.

63

En revanche, si l'on part de l'hypothèse que le requérant a été admis en considération de son expérience professionnelle, ce serait parce que tant l'avis de concours que l'avis de vacance permettaient de «compenser» l'absence de diplôme universitaire par une expérience professionnelle équivalente. Une telle «compensation» impliquerait nécessairement que l'on prenne en compte, afin de «remplacer» le diplôme universitaire, un certain nombre d'années d'expérience professionnelle. Ces années ayant été prises en compte pour l'accès à la carrière de niveau A, l'on ne saurait les prendre en compte une seconde fois, pour le calcul de l'ancienneté d'échelon, puisqu'un tel cumul reviendrait à valoriser deux fois les mêmes années d'expérience professionnelle. Le nombre d'années d'expérience professionnelle à prendre en compte pour «remplacer» le diplôme universitaire devrait être au moins égal au nombre d'années d'études nécessaires en moyenne à l'obtention d'un tel diplôme. Cette approche correspondrait au critère fixé par l'avis de concours et l'avis de vacance, à savoir que le candidat doit disposer d'une expérience professionnelle «d'un niveau équivalent» à un diplôme universitaire.

64

La Commission affirme avoir suivi cette approche en déduisant des années d'expérience professionnelle du requérant cinq années sur les six années entre 1976 et 1982, soit une période équivalente à la durée approximative des études universitaires. Ce faisant, elle aurait été généreuse à l'égard du requérant, puisqu'elle a compté les années pendant lesquelles le requérant a, à la fois, poursuivi des études universitaires et travaillé auprès de l'ambassade d'Espagne comme années d'expérience professionnelle à part entière, alors qu'on pouvait considérer que les études universitaires poursuivies en cours du soir affectaient ou réduisaient même, du moins pendant certaines périodes tels les examens, la durée du temps de travail et donc l'expérience professionnelle acquise pendant cette période.

65

La Commission estime, par ailleurs, que, en admettant que le requérant ait pu concourir puis accéder à son poste grâce à son diplôme universitaire, l'article 32, deuxième alinéa, du statut ne l'oblige pas à prendre en compte l'expérience professionnelle antérieure à l'obtention d'un tel diplôme. Au contraire, cette disposition impliquerait que la Commission ne peut prendre en compte que l'«expérience professionnelle spécifique». Or, la Commission considère que, dans le cadre de la présente hypothèse, une expérience professionnelle ne peut être qualifiée de spécifique que lorsqu'elle a été acquise après l'obtention du diplôme universitaire. En admettant que le requérant ait accédé aux concours et poste en question grâce à son expérience professionnelle équivalant à un diplôme universitaire, nulle disposition de l'article 32, deuxième alinéa, du statut ne ferait obstacle à ce que la Commission déduise cinq ans d'expérience professionnelle, afin de «compenser» l'absence de diplôme universitaire.

66

En réponse à une question posée par écrit et à l'audience par le Tribunal, la Commission a souligné que sa pratique constante en matière de concours de carrière A 7/A 6 consiste à n'admettre que des candidats possédant un diplôme universitaire et trois années d'expérience professionnelle postérieures à ce diplôme, de sorte que leur bonification d'ancienneté d'échelon s'opère en vertu des dispositions plus restrictives de l'article 2, sixième alinéa, de la décision de 1983. En l'espèce, elle aurait dû tenir compte du fait que le requérant avait participé à un concours de carrière A 7/A 6 organisé par le Comité économique et social, ouvert aux candidats non titulaires de diplôme universitaire à condition qu'ils justifient d'une expérience professionnelle équivalente. Afin de respecter le principe d'égalité de traitement vis-à-vis des fonctionnaires de grade A 7, lauréats de concours de la Commission dont les conditions d'accès sont plus restrictives, celle-ci aurait donc considéré que cinq des dix années d'expérience professionnelle dont se prévalait le requérant, à savoir le nombre d'années nécessaires pour obtenir un diplôme universitaire, devaient être déduites pour compenser l'absence d'un tel diplôme.

Appréciation du Tribunal

67

Il convient de rappeler que la décision de 1983, ainsi qu'il ressort de son deuxième considérant, a été adoptée aux fins de l'exécution, notamment, de l'article 32, deuxième alinéa, du statut. La décision de 1983 vise donc à établir des règles pour l'exercice du large pouvoir discrétionnaire dont l'AIPN dispose dans le cadre fixé par cette dernière disposition statutaire. A ce titre, elle constitue une directive interne qui, même si elle ne peut pas être regardée comme une disposition générale d'exécution au sens de l'article 110 du statut, doit être considérée comme une règle de conduite indicative que l'administration s'impose à elle-même et dont elle ne peut s'écarter sans préciser les raisons qui l'y ont amenée, sous peine d'enfreindre le principe d'égalité de traitement (voir, par exemple, l'arrêt du Tribunal du 7 février 1991, Ferreira de Freitas/Commission, T-2/90, Rec. p. II-103, points 56 et 61, ainsi que les références à la jurisprudence de la Cour citées).

68

En l'espèce, la Commission invoque le caractère exceptionnel de la situation du requérant, dont les particularités feraient obstacle à l'application de l'article 2, huitième alinéa, de la décision de 1983 (ci-après «disposition litigieuse»). Il y a donc lieu d'examiner s'il s'agit là d'une raison valable permettant à la Commission de s'écarter des règles qu'elle s'est fixées ou si, au contraire, la disposition litigieuse couvre la situation du requérant, de sorte que la Commission était tenue de l'appliquer. A cet effet, il importe de tenir compte du libellé et de la finalité de la disposition litigieuse ainsi que de sa place dans l'économie de la décision de 1983.

69

De par son libellé, la disposition litigieuse s'applique, de manière générale, à toutes les catégories au sens de l'article 5 du statut, dans les «cas où un diplôme n'est pas exigé pour l'accès à l'emploi à pourvoir», tout en prévoyant que, dans ces cas, la totalité de l'expérience professionnelle acquise dans le cadre d'une activité à temps plein exigeant normalement un tel diplôme peut être prise en considération aux fins d'une bonification d'ancienneté d'échelon.

70

Afin de déterminer la portée de ce texte à l'égard d'un concours général et d'un emploi relevant de la catégorie A, comme en l'espèce, il convient de le lire à la lumière de l'article 2, sixième alinéa, de la décision de 1983 lequel, ainsi que le Tribunal l'a constaté dans son arrêt Ferreira de Freitas/Commission (précité, point 57), ne s'applique qu'aux fonctionnaires recrutés à la suite d'un avis de concours imposant comme condition d'accès l'achèvement d'études universitaires complètes sanctionnées par un diplôme. Ledit sixième alinéa ne permet de prendre en compte que l'expérience professionnelle acquise par les intéressés à partir de l'obtention du diplôme ouvrant l'accès au concours ayant conduit à leur recrutement.

71

II résulte d'une lecture combinée des deux dispositions que le sixième alinéa, en ce qu'il limite toute bonification d'ancienneté d'échelon à l'expérience professionnelle acquise après l'obtention du diplôme requis, est plus restrictif que la disposition litigieuse, qui ne connaît pas une telle limitation. Cette différenciation dans la valorisation de l'expérience professionnelle n'encourt cependant aucune critique au regard du principe d'égalité de traitement. En effet, les concours relevant du sixième alinéa et ceux relevant de la disposition litigieuse présentent une différence fondamentale dans leurs critères d'admission, au point qu'il s'agit de deux types de concours distincts. Or, le principe d'égalité de traitement se limite à exiger le traitement égal de tous les fonctionnaires recrutés au terme d'un même concours (voir l'arrêt de la Cour du 15 janvier 1985, Samara/Commission, 266/83, Rec. p. 189, points 12 et 15, ainsi que l'arrêt Ferreira de Freitas/Commission, précité, points 58 et 61), seuls ces lauréats se trouvant dans une situation identique.

72

En ce qui concerne le concours général CES/A/6/89 en cause dans le présent litige, il y a lieu de rappeler qu'il était accessible tant aux titulaires qu'aux non-titulaires d'un diplôme universitaire, à condition que ces derniers justifient d'une expérience professionnelle d'un niveau équivalent. L'avis de concours n'imposait donc pas la possession d'un diplôme universitaire, mais autorisait la participation de candidats non titulaires d'un tel diplôme. Il en va de même pour ce qui est de l'emploi auquel le requérant a été affecté, l'avis de vacance COM/2430/90 exigeant comme condition d'aptitude soit un diplôme universitaire, soit une expérience professionnelle d'un niveau équivalent. Le Tribunal en conclut que, contrairement à l'argumentation de la Commission, le requérant s'est trouvé dans une situation «où un diplôme n'[était] pas exigé pour l'accès à l'emploi à pourvoir» au sens de la disposition litigieuse. Cette dernière couvre donc la situation du requérant et aurait dû être appliquée par la Commission.

73

II y a toutefois lieu d'examiner l'argument de la Commission consistant à soutenir que, dans l'hypothèse où le requérant aurait été admis au concours en cause sur la base de sa seule expérience professionnelle, il faudrait déduire cinq années de la totalité de ses années d'expérience professionnelle, afin de compenser l'absence de diplôme universitaire, de sorte qu'il n'aurait en aucun cas pu justifier des sept années d'expérience professionnelle prescrites par l'article 3 et l'annexe II à la décision de 1983 pour l'octroi de l'échelon 3.

74

A cet égard, le Tribunal admet que le principe selon lequel les lauréats d'un même concours doivent faire l'objet d'un traitement égal peut justifier l'orientation générale suivie par l'AIPN consistant, dans le cas d'un concours «mixte», accessible aux titulaires comme aux non-titulaires d'un diplôme universitaire, à mettre sur un pied d'égalité, en matière de bonification d'ancienneté d'échelon, les lauréats relevant de la première catégorie et ceux relevant de la seconde en «compensant» l'absence de diplôme des derniers par un nombre adéquat d'années d'expérience professionnelle.

75

Dans le cas d'espèce, une telle compensation doit toutefois être écartée, puisque le requérant justifiait, à la date pertinente pour l'application de la décision de 1983, à savoir celle de sa nomination au grade A 7, à la fois d'une expérience professionnelle et de la possession d'un diplôme universitaire. Il s'ensuit que la durée de l'expérience professionnelle du requérant, qui doit être prise en considération en application de la disposition litigieuse, ne peut pas être réduite au titre d'une quelconque compensation. Par ailleurs, la Commission bénéficiait, en définitive, d'un double avantage, en ce que le requérant justifiait à la fois d'une expérience professionnelle de longue durée et d'études universitaires sanctionnées par un diplôme.

76

Pour autant que la Commission souligne encore qu'elle ne pouvait pas reconnaître l'intégralité de l'expérience professionnelle du requérant, sous peine de défavoriser les fonctionnaires lauréats des concours aux conditions d'accès plus sévères qu'elle organise (voir ci-dessus point 66), il suffit de rappeler que le reclassement en échelon faisant l'objet du présent litige est régi par les dispositions sur le recrutement (article 32 du statut et décision de 1983), qui visent à garantir un traitement égal à tous les lauréats d'un même concours général, alors que les dispositions sur la promotion (article 46 du statut), qui obligent 1'AIPN à respecter l'égalité entre le fonctionnaire lauréat d'un concours général et les autres fonctionnaires, ne trouvent précisément pas à s'appliquer en l'espèce (voir, en ce sens, l'arrêt Samara/Commission, précité, points 11 et 12, ainsi que l'arrêt Baiwir, point 49). Or, la Commission n'a pas démontré, ni même allégué, que le reclassement sollicité par le requérant en vertu de la disposition litigieuse porterait atteinte aux intérêts légitimes d'autres lauréats du concours général CES/A/6/89.

77

Par ailleurs, la Commission est elle-même responsable du caractère extraordinaire que le reclassement du requérant en vertu de la disposition litigieuse peut être susceptible de constituer pour son système général de classement en échelon. En effet, c'est volontairement que la Commission a nommé le requérant, par voie de transfert, administrateur de grade A 7, tirant ainsi parti de sa réussite ä un concours organisé par le Comité économique et social selon des modalités que la Commission elle-même ne pratique normalement pas. La Commission ne saurait se soustraire, à l'occasion du reclassement du requérant plusieurs années après sa «nomination-transfert», aux conséquences juridiques de son choix délibéré. Elle ne saurait, en particulier, refuser au requérant un reclassement sur la base de la disposition litigieuse de la décision de 1983, en invoquant le caractère exceptionnel de sa «nomination-transfert» au grade A 7. En effet, le requérant n'a jamais, en réalité, appartenu au personnel du Comité économique et social. Par conséquent, son reclassement doit être effectué en faisant abstraction des conditions extérieures de son «recrutement» (voir, par analogie, l'arrêt de la Cour du 15 mai 1985, Esly/Commission, 127/84, Rec. p. 1437, points 17 et 18).

78

II y a toutefois lieu de noter que le reclassement du requérant en vertu de la disposition litigieuse ne risque guère d'ébranler l'ensemble du système de classement en échelon généralement appliqué par la Commission aux lauréats de ses propres concours. En effet, la Commission a elle-même souligné, à l'audience, que le cas de figure représenté par le requérant était exceptionnel, au point de le qualifier d'anomalie, la vaste majorité de ses fonctionnaires de catégorie A étant lauréats d'un même type de concours, qui exige toujours un diplôme universitaire, d'une part, et le recrutement par «nomination-transfert» n'ayant lieu que très rarement, d'autre part.

79

II résulte de tout ce qui précède que la décision attaquée doit être annulée pour violation de la disposition litigieuse, en ce qu'elle a refusé de faire droit à la demande de reclassement du requérant au motif que la durée de son expérience professionnelle devait être réduite de cinq années pour compenser l'absence de diplôme universitaire. Dès lors, les conclusions en annulation concernant le reclassement en échelon doivent être déclarées fondées, sans qu'il soit nécessaire de se prononcer sur les griefs soulevés à titre subsidiaire.

Sur les conclusions tendant, d'une part, à l'annulation de la décision de la Commission du 24 mai 1995 en ce qu'elle fixe la date de production de ses effets, notamment pécuniaires, au 28 septembre 1993, date de l'arrêt Baiwir, et, d'autre part, au versement d'intérêts moratoires

80

II y a lieu de constater, tout d'abord, que les conclusions tendant à l'annulation de la décision de la Commission du 24 mai 1995, en ce qu'elle fixe la date de production de ses effets au 28 septembre 1993, et non au 1er juin 1991 ne sont soutenues par aucun moyen de fond. La requête n'est donc pas conforme aux exigences de l'article 19 du statut (CE) de la Cour et de l'article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal. Par conséquent, elles doivent être déclarées irrecevables (arrêt du Tribunal du 13 décembre 1995, Exporteurs in Levende Varkens e.a./Commission, T-481/93 et T-484/93, Rec. p. II-2941, point 75).

81

En tout état de cause, le classement initial du requérant au grade A 7, échelon 1, avec effet au 1er juin 1991, était devenu définitif. Dans ces circonstances, la Commission, ayant repris et réexaminé, des années plus tard, le cas du requérant et celui d'autres fonctionnaires se trouvant dans une situation comparable, pouvait fixer la date à partir de laquelle ses décisions nouvelles, dans la mesure où elles étaient favorables aux intéressés, devaient commencer à produire leurs effets. Le choix de la date du prononcé de l'arrêt Baiwir (28 septembre 1993), qui a déclenché l'ouverture des procédures de réexamen, constitue un point de rattachement adéquat. En particulier, aucun principe du droit communautaire ne saurait être invoqué afin d'obliger la Commission à prévoir une rétroactivité complète avec effet au 1er juin 1991.

82

Par ailleurs, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, une obligation de verser des intérêts de retard ne peut être envisagée qu'à la condition que la créance principale soit certaine quant à son montant ou du moins determinable sur la base d'éléments objectifs établis (arrêt du Tribunal du 26 février 1992, Brazzelli e.a./Commission, T-17/89, T-21/89 et T-25/89, Rec. p. II-293, point 24, et la jurisprudence citée). Or, ainsi qu'il a été constaté ci-dessus, l'annulation de la décision attaquée a pour conséquence immédiate non pas le reclassement automatique du requérant à l'échelon 3, mais l'obligation pour la Commission d'adopter une nouvelle décision sur son reclassement. Dans ces circonstances, les conclusions visant au paiement d'intérêts de retard doivent être qualifiées de prématurées (voir, en ce sens, l'arrêt Baiwir, points 53 à 55).

83

II s'ensuit que les conclusions concernant les effets pécuniaires rétroactifs du reclassement en échelon et celles tendant à obtenir le paiement d'intérêts de retard doivent être rejetées.

Sur les dépens

84

En vertu de l'article 87, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement de procédure, le Tribunal peut répartir les dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs. La Commission ayant succombé en l'essentiel de ses conclusions, il y a lieu de la condamner à supporter l'ensemble des dépens.

85

Le recours ayant été déclaré recevable et, pour l'essentiel, fondé, la demande de la Commission visant à faire application de l'article 87, paragraphe 3, deuxième alinéa, du règlement de procédure et à condamner le requérant à l'ensemble des dépens doit, en tout état de cause, être rejetée, étant donné que le recours n'a évidemment aucune nature frastratoire.

 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête:

 

1)

La décision de la Commission du 24 mai 1995 est annulée pour autant qu'elle classe le requérant à l'échelon 2 du grade A 7 au 1er juin 1991 et à l'échelon 3 du grade A 7 au 28 septembre 1993.

 

2)

Le recours est rejeté pour le surplus.

 

3)

La Commission supportera l'ensemble des dépens.

 

Bellamy

Potocki

Pirrung

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 21 octobre 1998.

Le greffier

H. Jung

Le président

C. W. Bellamy


( *1 ) Langue de procédure: le français.

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