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Document 62013CJ0682

    Arrest van het Hof (Vierde kamer) van 4 juni 2015.
    Andechser Molkerei Scheitz GmbH tegen Europese Commissie.
    Hogere voorziening – Volksgezondheid – Lijst van voor gebruik in levensmiddelen goedgekeurde levensmiddelenadditieven – Steviolglycosiden – Voorwaarden voor ontvankelijkheid – Procesbelang.
    Zaak C-682/13 P.

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2015:356

    ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

    4 juin 2015 (*)

    «Pourvoi – Santé publique – Liste des additifs alimentaires autorisés dans les denrées alimentaires – Glycosides de stéviol – Conditions de recevabilité – Intérêt à agir»

    Dans l’affaire C‑682/13 P,

    ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 20 décembre 2013,

    Andechser Molkerei Scheitz GmbH, représentée par Me H. Schmidt, Rechtsanwalt,

    partie requérante,

    l’autre partie à la procédure étant:

    Commission européenne, représentée par Mme S. Grünheid et M. P. Ondrůšek, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

    partie défenderesse en première instance,

    LA COUR (quatrième chambre),

    composée de M. L. Bay Larsen (rapporteur), président de chambre, Mme K. Jürimäe, MM. J. Malenovský, M. Safjan et Mme A. Prechal, juges

    avocat général: M. N. Jääskinen,

    greffier: M. K. Malacek, administrateur,

    vu la procédure écrite,

    vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

    rend le présent

    Arrêt

    1        Par son pourvoi, Andechser Molkerei Scheitz GmbH demande, d’une part, l’annulation partielle de l’ordonnance du Tribunal de l’Union européenne Andechser Molkerei Scheitz/Commission (T-13/12, EU:T:2013:567, ci-après l’«ordonnance attaquée»), par laquelle celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation du règlement (UE) n° 1131/2011 de la Commission, du 11 novembre 2011, modifiant l’annexe II du règlement (CE) n° 1333/2008 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les glycosides de stéviol (JO L 295, p. 205, ci-après le «règlement litigieux»), et, d’autre part, l’annulation de ce règlement.

     Les antécédents du litige

    2        Les glycosides de stéviol sont des substances extraites des feuilles de la plante Stevia rebaudiana Bertoni. Tout en n’ayant pratiquement aucune valeur calorique, les glycosides de stéviol offrent, selon leurs variétés, un pouvoir sucrant jusqu’à 300 fois plus élevé que le sucre, qui leur permet de remplacer le sucre et d’autres édulcorants riches en calories.

    3        Durant la période 2007-2008, trois producteurs de glycosides de stéviol ont saisi la Commission européenne de demandes visant à obtenir l’autorisation des glycosides de stéviol en tant qu’édulcorants conformément à la directive 94/35/CE du Parlement européen et du Conseil, du 30 juin 1994, concernant les édulcorants destinés à être employés dans les denrées alimentaires (JO L 237, p. 3).

    4        À la suite de l’instruction desdites demandes, la Commission a arrêté le règlement litigieux.

    5        Ce règlement autorise l’utilisation des glycosides de stéviol extraits de la plante Stevia rebaudiana Bertoni en tant qu’édulcorants sous la dénomination «E 960 glycosides de stéviol» (ci-après l’«E960») dans certaines catégories de denrées alimentaires, en particulier dans les produits laitiers aromatisés fermentés, à valeur énergétique réduite ou sans sucres ajoutés, et fixe leurs conditions d’utilisation.

    6        La requérante est une entreprise qui collecte le lait de divers producteurs de lait biologique et fabrique, à partir de ce lait, différents produits biologiques, dont des yaourts.

     Le recours devant le Tribunal et l’ordonnance attaquée

    7        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 9 janvier 2012, la requérante a introduit un recours tendant, notamment, à l’annulation du règlement litigieux en tant qu’il n’autorise l’utilisation des glycosides de stéviol extraits des feuilles de Stevia rebaudiana Bertoni que comme additifs alimentaires et non comme ingrédients végétaux d’origine agricole ou comme préparations aromatisantes.

    8        La Commission a soutenu que ce recours, qu’il vise l’annulation du règlement litigieux ou une autorisation plus large des glycosides de stéviol, était irrecevable.

    9        La requérante a fait valoir qu’elle était recevable à demander l’annulation du règlement litigieux en ce qu’il a autorisé l’utilisation des glycosides de stéviol uniquement en tant qu’additifs alimentaires, dans la mesure où, en tant que productrice de produits biologiques, elle ne pourrait utiliser les glycosides de stéviol dans ses propres produits. La requérante reprochait à la Commission de n’avoir pas veillé en parallèle, en vue du rétablissement de la cohérence du droit de l’Union, à ce que les fabricants de denrées alimentaires biologiques bénéficient eux aussi de l’autorisation conférée par le règlement litigieux.

    10      Le Tribunal a d’abord rappelé que, selon une jurisprudence constante, la recevabilité d’un recours en annulation est subordonnée à la condition que la personne physique ou morale qui en est l’auteur ait un intérêt à voir annuler l’acte attaqué. Cet intérêt doit être né et actuel, s’apprécie au jour où le recours est formé et suppose que l’annulation de cet acte soit susceptible, par elle-même, d’avoir des conséquences juridiques ou, selon une autre formule, que le recours soit susceptible, par son résultat, de procurer un bénéfice à la partie qui l’a intenté.

    11      Ensuite, le Tribunal a constaté que le règlement litigieux ne produit aucun effet sur la situation juridique de la requérante autre que celui, favorable, de lui ouvrir la possibilité, comme à n’importe quel autre opérateur économique, d’utiliser l’additif E960 dans les denrées alimentaires dans le respect des conditions d’utilisation prescrites par le règlement litigieux.

    12      Le Tribunal a également relevé que l’impossibilité pour les opérateurs économiques, en l’état de la réglementation de l’Union lors de l’introduction du recours, d’utiliser les glycosides de stéviol dans les denrées alimentaires biologiques ne découle en rien du règlement litigieux et qu’une annulation de ce dernier ne procurerait d’ailleurs à la requérante aucun droit d’utiliser les glycosides de stéviol dans ses produits biologiques.

    13      Enfin, le Tribunal a constaté que, en tout état de cause, la requérante n’a rapporté aucune preuve au soutien des allégations selon lesquelles, d’une part, des yaourts conventionnels à faible valeur énergétique édulcorés au E960 seraient mis sur le marché dans le futur et, d’autre part, de tels produits seraient alors dans un rapport de concurrence avec les yaourts biologiques qu’elle produit et commercialise.

    14      Aussi, le Tribunal a-t-il conclu que, faute pour la requérante d’établir, lors de l’introduction du recours, l’existence d’un intérêt né et actuel à l’annulation du règlement litigieux, le recours, en ce qu’il visait cette annulation, devait être rejeté comme irrecevable.

     Sur le pourvoi

    15      À l’appui de son pourvoi, la requérante invoque plusieurs moyens, certains d’entre eux ayant trait à de prétendues erreurs qu’aurait commises le Tribunal en déclarant le recours irrecevable pour défaut d’intérêt à agir, d’autres moyens portant sur le fond du recours introduit devant le Tribunal.

     Sur le premier moyen, tiré d’une erreur de droit relative à la condition de l’intérêt à agir

     Argumentation des parties

    16      Par son premier moyen, la requérante soutient que le Tribunal, en jugeant qu’elle n’avait pas établi, lors de l’introduction de son recours, l’existence d’un intérêt né et actuel à l’annulation du règlement litigieux, a commis une erreur de droit. Ce moyen comporte trois branches.

    17      En premier lieu, la requérante fait valoir que, en considérant que l’autorisation des glycosides de stéviol n’aurait qu’un effet positif et qu’il lui appartiendrait d’user ou non de cet effet positif en produisant des yaourts conventionnels additionnés de glycosides de stéviol comme ses concurrentes, le Tribunal admet qu’est soustraite au contrôle du juge toute différence de traitement de situations similaires opérée par le législateur de l’Union. La reconnaissance, par le Tribunal, de la nullité du règlement litigieux serait utile à la requérante, dans la mesure où elle ne permettrait plus aux concurrents de celle-ci, fabriquant des produits laitiers conventionnels, de la concurrencer de manière injuste.

    18      En deuxième lieu, la requérante reproche au Tribunal d’avoir rejeté le recours comme irrecevable au motif que l’utilisation des glycosides de stéviol sur le marché n’aurait pas encore pu être démontrée. Or, il aurait été certain que, déjà durant le délai de recours de deux mois, même si cela ne s’est concrétisé qu’ultérieurement, il existait un rapport concurrentiel entre la requérante et les autres entreprises du marché en cause, dès lors qu’il pouvait être présumé que ces dernières useraient de la faculté d’utiliser des glycosides de stéviol dans des produits laitiers. L’existence de ce rapport concurrentiel concrètement pronostiqué suffirait à justifier la nécessité d’une protection juridictionnelle effective contre les actes juridiques de la Commission. Une telle protection serait compromise si la recevabilité d’un recours introduit dans ce délai restreint était soumise à des conditions encore plus strictes, qui ne permettraient d’exercer un recours que contre un acte dont l’effet discriminatoire et entravant pour le fonctionnement du marché, qui s’annonce déjà et est pratiquement certain, s’est déjà matérialisé au moment de l’introduction du recours ou durant le délai de soumission des mémoires.

    19      En troisième lieu, la requérante fait grief au Tribunal d’avoir violé le droit fondamental à la garantie d’une protection juridictionnelle effective au titre de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la «Charte»), dès lors que le recours, en ce qu’il a été rejeté comme irrecevable, sans examen au fond, n’a pas été traité comme une voie de droit effective.

    20      À cet égard, la Commission fait observer que la prétendue discrimination invoquée par la requérante repose sur l’hypothèse erronée selon laquelle les producteurs de produits laitiers biologiques et les producteurs de produits laitiers conventionnels se trouveraient dans une situation comparable et que, en l’espèce, il y aurait lieu de considérer qu’il existe un traitement différent par le législateur de situations comparables. Or, les produits biologiques, d’une part, et les produits non biologiques, d’autre part, relèveraient de groupes de produits différents, qui seraient soumis à des régimes juridiques différents. Le fait que les dispositions relatives à la production biologique contiennent des prescriptions plus strictes que celles concernant la production de produits non biologiques serait inhérent au système. Les producteurs de produits biologiques respecteraient volontairement ces règles plus strictes afin de répondre à la demande de produits biologiques émanant des consommateurs sur un marché spécifique.

    21      Selon la Commission, l’argument de la requérante selon lequel son recours devait être déclaré recevable, notamment en raison du fait que le règlement litigieux la priverait de quelque chose, est dénué de tout fondement, puisque le seul effet juridique du règlement litigieux est d’accorder à tous les opérateurs la possibilité d’utiliser les glycosides de stéviol comme additifs alimentaires. Cette institution relève que la décision de la requérante de ne pas recourir à la possibilité offerte par le règlement litigieux d’utiliser les glycosides de stéviol n’engage que cette dernière, qui ne peut donc prétendre qu’elle serait contrainte d’agir à l’encontre de ses convictions. Ainsi, la requérante ne serait pas empêchée de produire et de commercialiser des yaourts édulcorés avec l’additif E960 à faible valeur énergétique.

    22      Ne serait‑ce que pour cette raison, le Tribunal aurait rejeté, à juste titre, le recours en annulation comme irrecevable, car la requérante n’a aucun intérêt à agir en annulation du règlement litigieux.

    23      En ce qui concerne la deuxième branche de ce moyen, la Commission soutient que le Tribunal a exigé non pas la preuve qu’il existait déjà des yaourts conventionnels sur le marché, mais une preuve de la future commercialisation de tels produits. Le Tribunal n’aurait commis aucune erreur de droit, mais se serait fondé sur la jurisprudence constante selon laquelle, si l’intérêt dont se prévaut un requérant concerne une situation juridique future, ce dernier doit établir que l’atteinte à cette situation se révèle, d’ores et déjà, certaine. Selon la Commission, si, ainsi que l’affirme la requérante dans sa requête en pourvoi, durant le délai de recours et le délai de présentation des mémoires, les cercles spécialisés envisageaient le fait que les yaourts conventionnels contenant des glycosides de stéviol soient introduits sur le marché, elle aurait pu en apporter la preuve, dès le dépôt de la requête auprès du Tribunal. Par ailleurs, la requérante omettrait le fait que le Tribunal a également considéré qu’il n’était pas établi que sa situation juridique était affectée par le règlement litigieux, puisqu’elle n’avait pas prouvé l’existence d’un lien de concurrence entre les produits laitiers conventionnels édulcorés avec l’additif E960 et ses propres produits biologiques.

    24      Par ailleurs, s’agissant de la troisième branche du premier moyen, la Commission rétorque qu’il est irrecevable, car la requérante se borne à affirmer que le rejet d’un recours pour irrecevabilité constitue en lui‑même une violation des droits fondamentaux du justiciable. Par ailleurs, ledit moyen serait manifestement dénué de fondement, puisque les conditions de recevabilité d’un recours en annulation, conformément à l’article 263 TFUE, et l’exigence d’un intérêt à agir à la date de l’introduction du recours, découlant de la jurisprudence constante de la Cour, ne peuvent pas être écartées par l’effet de la Charte.

     Appréciation de la Cour

    25      À cet égard, il convient de rappeler qu’un recours en annulation intenté par une personne physique ou morale n’est recevable que dans la mesure où cette dernière a un intérêt à voir annuler l’acte attaqué. Un tel intérêt suppose que l’annulation de cet acte soit susceptible, par elle‑même, d’avoir des conséquences juridiques et que le recours puisse ainsi, par son résultat, procurer un bénéfice à la partie qui l’a intenté (voir arrêt Stichting Woonlinie e.a./Commission, C‑133/12 P, EU:C:2014:105, point 54).

    26      L’intérêt à un recours en annulation s’apprécie au jour où le recours est formé (voir arrêt Forges de Clabecq/Haute Autorité, 14-63, EU:C:1963:60, p. 748).

    27      Il appartient au requérant d’apporter la preuve de son intérêt à agir, qui constitue la condition essentielle et première de tout recours en justice (voir, en ce sens, ordonnance du président de la deuxième chambre de la Cour, S/Commission, C‑206/89 R, EU:C:1989:333, point 8).

    28      En particulier, pour qu’un recours en annulation d’un acte, présenté par une personne physique ou morale, soit recevable, il faut que la partie requérante justifie de façon pertinente l’intérêt que présente pour elle l’annulation de cet acte (voir, en ce sens, arrêt De Gezamenlijke Steenkolenmijnen in Limburg/Haute Autorité, 30-59, EU:C:1961:2, p. 35).

    29      Il convient également de relever que l’article 47 de la Charte n’a pas pour objet de modifier le système de contrôle juridictionnel prévu par les traités, et notamment les règles relatives à la recevabilité des recours formés directement devant la juridiction de l’Union, ainsi qu’il découle également des explications afférentes à cet article 47, lesquelles doivent, conformément aux articles 6, paragraphe 1, troisième alinéa, TUE et 52, paragraphe 7, de la Charte, être prises en considération pour l’interprétation de celle-ci (voir arrêt Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Parlement et Conseil, C-583/11 P, EU:C:2013:625, point 97).

    30      Or, l’intérêt à agir d’un requérant, tel qu’il a été rappelé au point 25 du présent arrêt, figure au nombre des conditions de recevabilité d’un recours en annulation.

    31      Il s’ensuit que l’article 47 de la Charte ne s’oppose pas à ce qu’un recours soit déclaré irrecevable pour défaut d’intérêt à agir du requérant.

    32      Il importe de rappeler que la requérante a, devant le Tribunal, tenté de justifier de son intérêt à agir en soutenant en substance que, dès lors que, à la date d’introduction du recours contre le règlement litigieux, il ne faisait aucun doute que des yaourts conventionnels contenant des glycosides de stéviol seraient mis sur le marché et seraient en concurrence avec les yaourts biologiques ne pouvant pas contenir de tels édulcorants, l’annulation dudit règlement lui procurerait un bénéfice dans la mesure où elle rétablirait une situation de concurrence non faussée dans le secteur concerné.

    33      En outre, les arguments développés par la requérante au soutien du premier moyen de son pourvoi devant la Cour sont également fondés sur l’existence d’un rapport de concurrence entre lesdits yaourts conventionnels et les yaourts biologiques.

    34      Ainsi, à supposer même que les circonstances de l’espèce fussent de nature à permettre de considérer qu’il ne faisait pas de doute que, à la date de l’introduction du recours contre le règlement litigieux, des yaourts conventionnels contenant des glycosides de stéviol seraient mis sur le marché ainsi qu’il s’est avéré par la suite, force est de constater qu’aucun indice pertinent quant à l’existence d’un rapport de concurrence entre ces yaourts et les yaourts biologiques n’a été fourni aux fins de justifier l’intérêt à agir de la requérante.

    35      En effet, il est constant que la requérante s’est bornée à alléguer que les yaourts contenant des glycosides de stéviol et les yaourts biologiques ne pouvant pas en contenir seraient dans un rapport de concurrence, sans aucunement étayer son allégation.

    36      Par ailleurs, il n’est pas contesté que, dans le cadre du droit de l’Union, les produits biologiques et les produits non biologiques relèvent, ainsi que l’a fait observer la Commission, de régimes juridiques différents, les premiers étant soumis à des prescriptions relatives à la production plus strictes que celles concernant les seconds. En outre, il est rappelé au considérant 1 du règlement (CE) n° 834/2007 du Conseil, du 28 juin 2007, relatif à la production biologique et à l’étiquetage des produits biologiques et abrogeant le règlement (CEE) n° 2092/91 (JO L 189, p. 1), que le mode de production biologique approvisionne un marché spécifique répondant à la demande de produits biologiques émanant des consommateurs.

    37      C’est donc sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal, ayant constaté, au point 40 de l’ordonnance attaquée, que la requérante n’avait apporté aucun élément au soutien des allégations selon lesquelles des yaourts conventionnels à faible valeur énergétique édulcorés avec l’additif E960 seraient dans un rapport de concurrence avec les yaourts biologiques qu’elle produit et commercialise, a jugé, au point 41 de cette ordonnance, que le recours en annulation du règlement litigieux devait être rejeté comme irrecevable pour défaut d’intérêt à agir dans le chef de la requérante.

    38      Dès lors, il y a lieu de rejeter le premier moyen comme non fondé.

     Sur le deuxième moyen, tiré de la méconnaissance du droit à un procès équitable

     Argumentation des parties

    39      Par son deuxième moyen, la requérante soutient que le Tribunal, en ayant examiné son recours sans procéder à la tenue d’une audience publique, a méconnu l’article 47, deuxième alinéa, de la Charte et, partant, le droit à une procédure équitable.

    40      Selon la Commission, ce moyen est irrecevable, car la requérante n’expose pas les raisons pour lesquelles son droit de se faire conseiller, défendre et représenter, au sens de l’article 47, deuxième alinéa, troisième phrase, de la Charte, a été violé par l’ordonnance attaquée ou la procédure en première instance.

    41      Si l’argumentation de la requérante devait être comprise en ce sens qu’une erreur de procédure, voire une violation de l’article 47, deuxième alinéa, de la Charte, est imputable au fait que le Tribunal a statué par voie d’ordonnance sans procédure orale, elle devrait être également rejetée comme irrecevable, puisque la requérante n’a pas démontré en quoi le Tribunal aurait commis une erreur de droit à cet égard.

    42      Ledit moyen serait également manifestement dénué de fondement, car, en l’espèce et conformément aux articles 111 et 113 du règlement de procédure du Tribunal, la procédure orale ne serait pas nécessaire.

     Appréciation de la Cour

    43      La requérante contestant, en substance, le caractère équitable de la procédure devant le Tribunal, au regard de l’article 47, deuxième alinéa, première phrase, de la Charte, en raison du fait que le Tribunal a statué à l’issue d’une procédure ne comportant pas d’audience publique, il convient de rappeler que cette disposition prévoit que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi.

    44      Or, l’article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950, n’impose pas une obligation absolue de tenir une audience publique et n’exige pas nécessairement la tenue d’une audience dans toutes les procédures (voir Cour EDH, arrêt Jussila c. Finlande, du 23 novembre 2006, § 41). De même, ni l’article 47, deuxième alinéa, de la Charte ni aucune autre disposition de celle-ci n’imposent une telle obligation.

    45      Tel est notamment le cas, dans l’hypothèse, prévue à l’article 111 du règlement de procédure du Tribunal, où le recours formé devant le Tribunal est manifestement irrecevable, ce dernier pouvant dès lors, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée.

    46      En tout état de cause, ainsi qu’il ressort de l’ordonnance attaquée, la requérante a eu la possibilité de présenter ses observations écrites sur les fins de non‑recevoir soulevées par la Commission et s’en est prévalue. À cet égard, il peut, au demeurant, être rappelé que, selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, la tenue d’une audience n’est pas nécessaire lorsque l’affaire ne soulève pas de questions de fait ou de droit ne pouvant être adéquatement résolues sur le fondement du dossier et des observations écrites des parties (voir Cour EDH, arrêt Döry c. Suède, du 12 novembre 2002, § 37).

    47      Il découle de ce qui précède que le fait que le Tribunal a, à l’issue d’une procédure ne comportant pas d’audience publique, déclaré le recours irrecevable n’est pas contraire à l’article 47, deuxième alinéa, première phrase, de la Charte.

    48      Dès lors, le deuxième moyen doit être écarté comme non fondé.

     Sur le cinquième moyen, tiré de l’absence de droit au recours s’agissant de l’utilisation des glycosides de stéviol comme additifs pour les aliments biologiques

     Argumentation des parties

    49      Par son cinquième moyen, la requérante fait grief au Tribunal de s’être fondé, au point 37 de l’ordonnance attaquée, sur l’hypothèse erronée qu’elle aurait été libre de demander à la Commission l’autorisation d’utiliser des glycosides de stéviol comme additifs pour les aliments biologiques, alors que seule la Commission a, ici, le droit d’initiative pour prévoir l’autorisation des additifs pour les aliments biologiques dans l’annexe au règlement (CE) n° 889/2008 de la Commission, du 5 septembre 2008, portant modalités d’application du règlement n° 834/2007 en ce qui concerne la production biologique, l’étiquetage et les contrôles (JO L 250, p. 1).

    50      Or, la requérante expose qu’elle ne peut pas obtenir l’accès à la justice en ce qui concerne le rejet ou l’absence de traitement d’une demande tendant à obtenir que les glycosides de stéviol soient autorisés comme additifs pour les aliments biologiques. Elle ne pourrait donc qu’attaquer l’autorisation d’utiliser des glycosides de stéviol qui profiterait exclusivement à ses concurrents fabriquant des produits conventionnels et non à elle-même en tant qu’entreprise d’aliments biologiques.

    51      Selon la Commission, même si l’affirmation énoncée au point 37 de l’ordonnance attaquée était comprise dans le sens que lui prête à tort la requérante, elle ne saurait constituer un moyen justifié, car la question de savoir si les entreprises peuvent déposer des demandes d’autorisation relatives à l’utilisation des additifs alimentaires dans les denrées alimentaires biologiques n’est pas déterminante pour statuer sur la recevabilité du recours en annulation. Les griefs dirigés contre des motifs surabondants d’une décision en première instance devraient être d’emblée rejetés, puisqu’ils ne sauraient entraîner l’annulation de celle‑ci et seraient donc inopérants.

     Appréciation de la Cour

    52      Il convient de rappeler que le Tribunal a, au point 37 de l’ordonnance attaquée, jugé ce qui suit:

    «Une annulation du règlement attaqué ne procurerait d’ailleurs à la requérante aucun droit d’utiliser les glycosides de stéviol dans ses produits biologiques. Il se trouve que la requérante n’a pas déposé de demande visant à obtenir l’autorisation des glycosides de stéviol dans les denrées alimentaires biologiques, que la Commission aurait pu examiner dans ce contexte distinct. À cet égard, l’argument de la requérante selon lequel elle serait une trop petite entreprise pour pouvoir déposer une telle demande ne saurait, indépendamment même de son caractère non convaincant, fonder un droit à s’opposer à une autorisation donnée par ailleurs en réponse à des demandes différentes déposées par d’autres opérateurs économiques.»

    53      Ainsi, à supposer même que le Tribunal ait, ainsi que le soutient la requérante, commis une erreur de droit en considérant que celle‑ci aurait pu demander à la Commission l’autorisation d’utiliser des glycosides de stéviol comme additifs pour les aliments biologiques et que, en cas de refus ou de carence de la Commission, la requérante aurait pu saisir le Tribunal d’un recours, une telle erreur serait, en l’occurrence, compte tenu de ce qui a été relevé au point 37 du présent arrêt, sans incidence sur l’issue du pourvoi. En effet, le motif figurant au point 37 de l’ordonnance attaquée s’avère être surabondant et ne peut, dès lors, entraîner l’annulation de ladite ordonnance (voir, en ce sens, arrêt OHMI/Kessel medintim, C-31/14 P, EU:C:2014:2436, point 53).

    54      Il en résulte que le cinquième moyen est, en tout état de cause, inopérant et doit être écarté.

     Sur le sixième moyen, tiré de la dénaturation des arguments de la requérante

     Argumentation des parties

    55      Par son sixième moyen, la requérante soutient que le Tribunal, au point 24 de l’ordonnance attaquée, a présenté de manière erronée l’argumentation qu’elle soutenait devant lui. Il aurait affirmé que la requérante reprochait à la Commission d’avoir autorisé l’utilisation des glycosides de stéviol comme additifs. Il aurait dans le même temps également précisé, au même point, que la requérante reconnaissait que la Commission avait uniquement le choix d’autoriser ou non les glycosides de stéviol en tant qu’additifs alimentaires. La requérante souligne qu’elle a fait valoir que la Commission avait choisi de n’autoriser les glycosides de stéviol que comme additifs alimentaires et de ne pas avoir œuvré pour l’autorisation en tant qu’ingrédients alimentaires ou extraits aromatiques, ce qui aurait été possible pour la Commission sur la base de son droit d’initiative d’après le régime juridique applicable à l’Union.

    56      La Commission soutient que ce sixième moyen est dénué de tout fondement, car le Tribunal a reproduit fidèlement l’argumentation de la requérante dans l’ordonnance attaquée. Dès lors, il conviendrait d’écarter ce moyen comme manifestement irrecevable, lequel serait, de surcroît, manifestement non fondé.

     Appréciation de la Cour

    57      Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, il résulte des articles 256 TFUE, 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et 168, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure de la Cour qu’un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt ou de l’ordonnance dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande, sous peine d’irrecevabilité du pourvoi ou du moyen concerné (ordonnance Hârulescu/Roumanie, C-78/13 P, EU:C:2013:653, point 12 et jurisprudence citée).

    58      Ne répond pas aux exigences de motivation résultant de ces dispositions un pourvoi qui, sans même comporter une argumentation visant spécifiquement à identifier l’erreur de droit dont seraient entachés l’arrêt ou l’ordonnance attaqués, se limite à répéter ou à reproduire les moyens et les arguments qui ont déjà été présentés devant le Tribunal, y compris ceux qui étaient fondés sur des faits expressément rejetés par cette juridiction. En effet, un tel pourvoi constitue en réalité une demande visant à obtenir un simple réexamen de la requête présentée devant le Tribunal, ce qui échappe à la compétente de la Cour (ordonnance Hârulescu/Roumanie, C-78/13 P, EU:C:2013:653, point 13 et jurisprudence citée).

    59      À cet égard, il convient de relever que, si la requérante fait valoir que son argumentation développée devant le Tribunal a été présentée, par ce dernier, de manière erronée au point 24 de l’ordonnance attaquée, il n’en demeure pas moins que cette même requérante n’identifie aucune erreur de droit découlant de cette présentation prétendument erronée et entachant l’ordonnance attaquée.

    60      Dès lors, le sixième moyen doit être rejeté comme irrecevable.

     Sur les troisième, quatrième, septième et huitième moyens, tirés de la violation du droit à l’égalité de traitement, de la violation de la liberté d’entreprendre et du caractère arbitraire du règlement litigieux

     Argumentation des parties

    61      Par ses troisième, quatrième et septième moyens, la requérante fait valoir, d’une part, la violation du droit fondamental à l’égalité de traitement, l’autorisation des glycosides de stéviol s’étant déroulée d’une manière qui accorde à ses concurrents conventionnels, et notamment aux grandes entreprises opérant à l’échelle mondiale, un avantage concurrentiel injustifié et déloyal, et, d’autre part, la violation du droit fondamental à la liberté d’entreprendre.

    62      Par son huitième moyen, la requérante fait valoir que la circonstance que la Commission a conclu avec les États-Unis d’Amérique, au mois de février 2012, un accord sur la reconnaissance mutuelle des aliments biologiques, dans le cadre duquel les produits biologiques des États‑Unis contenant des glycosides de stéviol peuvent être commercialisés sur le marché intérieur de l’Union avec le logo Bio de l’Union, conduit à discriminer les fabricants de produits biologiques, dont la requérante, à l’extrême, les privant arbitrairement de la faculté d’utiliser les glycosides de stéviol pour leurs produits.

    63      La Commission excipe de l’irrecevabilité de ces moyens au motif qu’ils ne tendraient qu’à l’examen du bien‑fondé du recours formé devant le Tribunal et n’auraient aucun rapport avec les motifs de l’ordonnance attaquée.

     Appréciation de la Cour

    64      À cet égard, il importe, en tout état de cause, de relever que, dès lors que, par son ordonnance, le Tribunal s’est borné à examiner la recevabilité du recours, jugeant, par ailleurs à bon droit, qu’il était irrecevable, les moyens de fond invoqués dans le cadre du pourvoi ne peuvent pas prospérer et, partant, doivent être écartés comme irrecevables.

    65      En conséquence, les troisième, quatrième, septième et huitième moyens sont irrecevables.

    66      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le pourvoi comme étant, en partie, irrecevable et, en partie, non fondé.

     Sur les dépens

    67      Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de Andechser Molkerei Scheitz GmbH et cette dernière ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens afférents au pourvoi.

    Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) dit pour droit :

    1)      Le pourvoi est rejeté.

    2)      Andechser Molkerei Scheitz GmbH est condamnée aux dépens.

    Signatures


    * Langue de procédure: l’allemand.

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