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Document 62011TJ0107
JUDGMENT OF THE GENERAL COURT (Appeal Chamber) 4 December 2013.#European Training Foundation (ETF) v Gisela Schuerings.#Appeal — Civil service — Members of the temporary staff — Contract for an indefinite period — Decision terminating the contract — Jurisdiction of the Civil Service Tribunal — Articles 2 and 47 of the CEOS — Duty of care — Concept of interests of the service — Prohibition on ruling ultra petita — Rights of defence.#Case T‑107/11 P.
ARREST VAN HET GERECHT (Kamer voor hogere voorzieningen) 4 december 2013.
Europese Stichting voor opleiding (ETF) tegen Gisela Schuerings.
Hogere voorziening – Openbare dienst – Tijdelijk functionarissen – Overeenkomst voor onbepaalde tijd – Besluit tot opzegging – Bevoegdheid van het Gerecht voor ambtenarenzaken – Artikelen 2 en 47 RAP – Zorgplicht – Begrip ‚dienstbelang’ – Verbod om ultra petita te beslissen – Rechten van de verdediging.
Zaak T‑107/11 P.
ARREST VAN HET GERECHT (Kamer voor hogere voorzieningen) 4 december 2013.
Europese Stichting voor opleiding (ETF) tegen Gisela Schuerings.
Hogere voorziening – Openbare dienst – Tijdelijk functionarissen – Overeenkomst voor onbepaalde tijd – Besluit tot opzegging – Bevoegdheid van het Gerecht voor ambtenarenzaken – Artikelen 2 en 47 RAP – Zorgplicht – Begrip ‚dienstbelang’ – Verbod om ultra petita te beslissen – Rechten van de verdediging.
Zaak T‑107/11 P.
Jurisprudentie 2013 -00000
ECLI-code: ECLI:EU:T:2013:624
ARRÊT DU TRIBUNAL (chambre des pourvois)
4 décembre 2013 (*)
« Pourvoi – Fonction publique – Agents temporaires – Contrat à durée indéterminée – Décision de résiliation – Compétence du Tribunal de la fonction publique – Articles 2 et 47 du RAA – Devoir de sollicitude – Notion d’intérêt du service – Interdiction de statuer ultra petita – Droits de la défense »
Dans l’affaire T‑107/11 P,
ayant pour objet un pourvoi formé contre l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (deuxième chambre) du 9 décembre 2010, Schuerings/ETF (F‑87/08), et tendant à l’annulation de cet arrêt,
Fondation européenne pour la formation (ETF), représentée par Me L. Levi, avocat,
partie requérante,
soutenue par
Commission européenne, représentée par MM. J. Currall et D. Martin, en qualité d’agents,
par
Agence européenne des médicaments (EMA), représentée initialement par M. V. Salvatore, puis par M. T. Jabłoński, en qualité d’agents,
par
Agence européenne pour l’environnement (AEE), représentée par M. O. Cornu, en qualité d’agent,
par
Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA), représentée par M. P. Goudou, en qualité d’agent,
par
Agence de l’Union européenne chargée de la sécurité des réseaux et de l’information (ENISA), représentée par M. E. Maurage, en qualité d’agent,
par
Centre de traduction des organes de l’Union européenne (CdT), représenté par Mme J. Rikkert et M. M. Garnier, en qualité d’agents,
par
Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC), représenté par M. M. Sprenger, en qualité d’agent,
par
Agence européenne des produits chimiques (ECHA), représentée par Mme M. Heikkilä, en qualité d’agent,
et par
Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), représentée par M. D. Detken, en qualité d’agent,
parties intervenantes,
l’autre partie à la procédure étant
Gisela Schuerings, représentée par Me N. Lhoëst, avocat,
partie demanderesse en première instance,
LE TRIBUNAL (chambre des pourvois),
composé de MM. M. Jaeger, président, O. Czúcz (rapporteur) et S. Papasavvas, juges,
greffier : Mme C. Heeren, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 14 mars 2013,
rend le présent
Arrêt
1 Par son pourvoi introduit au titre de l’article 9 de l’annexe I du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, la Fondation européenne pour la formation (ETF) demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (deuxième chambre) du 9 décembre 2010, Schuerings/ETF (F‑87/08, ci-après l’« arrêt attaqué ») en tant que celui-ci, d’une part, a accueilli le recours de Mme Gisela Schuerings tendant notamment à l’annulation de la décision de l’ETF portant résiliation de son contrat d’agent temporaire à durée indéterminée et, d’autre part, a, rejeté sa demande de réparation du préjudice matériel subi comme étant prématurée.
Faits à l’origine du litige et procédure en première instance
2 Les faits à l’origine du litige et la procédure en première instance sont énoncés aux points 9 à 33 de l’arrêt attaqué.
3 Le 7 mai 1990, le Conseil des communautés européennes a adopté la décision 90/233/CEE établissant un programme de mobilité transeuropéenne pour l’enseignement supérieur (Tempus) (JO L 131, p. 21), dont la mise en œuvre a été confiée à la Commission des communautés européennes. En 1995, la Commission a décidé de déléguer l’activité d’appui technique à la mise en œuvre du programme Tempus à l’ETF par convention annuelle renouvelable.
4 Par contrat signé le 1er décembre 1994, l’ETF a recruté Mme Schuerings comme agent temporaire au titre de l’article 2, sous a), du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (ci-après le « RAA »). Ce contrat stipulait qu’elle était recrutée comme administratrice principale de grade A 5, échelon 1, pour une durée de cinq ans à compter du 16 décembre 1994, sans toutefois mentionner à quel poste ou dans quel département elle serait affectée. Dans les faits, elle a été affectée au poste de chef de l’unité « Information et communication ».
5 Par un avenant en date du 21 juillet 1999, le contrat de travail de Mme Schuerings a été reconduit pour une nouvelle période de cinq ans, soit jusqu’au 15 décembre 2004. Le 7 octobre 2002, elle a été réaffectée au sein du département chargé de mettre en œuvre le programme Tempus, en qualité de responsable principal du contrôle qualité. Par un nouvel avenant, en date du 28 juin 2004, son contrat de travail est devenu un contrat à durée indéterminée.
6 Le 14 janvier 2005, la Commission a adopté la décision 2005/56/CE, instituant l’Agence exécutive « Éducation, audiovisuel et culture » pour la gestion de l’action communautaire dans les domaines de l’éducation, de l’audiovisuel et de la culture, en application du règlement (CE) nº 58/2003 du Conseil (JO L 24, p. 35). L’Agence exécutive « Éducation, audiovisuel et culture » (EACEA) a reçu pour mandat la gestion de l’action de l’Union dans les domaines de l’éducation, de l’audiovisuel et de la culture.
7 Le 21 novembre 2006, l’ETF a pris connaissance de l’intention de la Commission de déléguer désormais l’appui technique à la mise en œuvre du programme Tempus à l’EACEA. Durant le mois de mars 2007, la date d’application de la décision 2005/56, initialement fixée au 31 décembre 2007, a été reportée au 30 juin 2008.
8 Le 17 octobre 2007, Mme Schuerings a assisté à une réunion du personnel du département « Tempus » organisée à la demande du directeur de l’ETF, en présence du chef de l’unité « Ressources humaines » et d’un membre du comité du personnel, au cours de laquelle le directeur de l’ETF a indiqué aux agents présents que, en raison de ce que l’appui technique à la mise en œuvre du programme Tempus serait dorénavant délégué à l’EACEA, ils seraient licenciés.
9 Le 23 octobre 2007, le directeur de l’ETF a pris la décision de résilier le contrat d’engagement à durée indéterminée de Mme Schuerings (ci-après la « décision de résiliation ») ainsi que les contrats d’engagement de sept autres agents du département « Tempus », avec effet au 31 août 2008. La décision de résiliation a été notifiée à Mme Schuerings le 24 octobre 2007.
10 Le 16 janvier 2008, Mme Schuerings a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») contre la décision de résiliation et afin d’obtenir réparation des préjudices matériel et moral qu’elle affirme avoir subis en raison de l’illégalité de cette décision.
11 Par décision en date du 10 juillet 2008, l’ETF a rejeté la réclamation de Mme Schuerings.
12 C’est dans ces circonstances que Mme Schuerings a introduit, le 20 octobre 2008, un recours auprès du Tribunal de la fonction publique visant, en substance, d’une part, l’annulation de la décision de résiliation et, d’autre part, la réparation des préjudices matériel et moral causés par ladite décision. Ce recours a été enregistré sous la référence F‑87/08.
13 Par ordonnance du président de la deuxième chambre du Tribunal de la fonction publique du 15 septembre 2009, l’affaire F‑87/08 a été jointe à l’affaire Vandeuren/ETF, enregistrée sous la référence F‑88/08, aux fins de la procédure orale et de la décision mettant fin à l’instance.
14 L’audience a eu lieu le 9 février 2010.
15 Par lettre du greffe du 23 février 2010, le Tribunal de la fonction publique, sur le fondement de l’article 68 de son règlement de procédure, a informé les parties de sa décision d’explorer avec elles les possibilités d’un règlement amiable du litige, proposition que Mme Schuerings a acceptée mais qui a été déclinée par l’ETF, cette dernière soulignant notamment qu’il était important que les obligations qui pèsent sur une agence, lorsque celle-ci envisage de mettre fin à un contrat à durée indéterminée, soient précisées dans une décision de justice.
16 À la suite de l’échec du règlement amiable et après que les parties ont répondu à plusieurs mesures d’organisation de la procédure du Tribunal de la fonction publique, l’affaire a été disjointe de l’affaire F‑88/08, aux fins de l’arrêt, par ordonnance du président de la deuxième chambre du Tribunal de la fonction publique du 29 juin 2010.
Sur l’arrêt attaqué
17 S’agissant du bien-fondé des conclusions en annulation de la décision de résiliation, le Tribunal de la fonction publique a examiné, en les regroupant, les trois moyens soulevés par la requérante en première instance, tirés, le premier, de la violation du principe d’égalité de traitement, le deuxième, de la violation du principe de bonne administration et du devoir de sollicitude ainsi que d’un détournement de pouvoir et, le troisième, d’un défaut de motivation de la décision de résiliation. Il a notamment retenu au point 55 de l’arrêt attaqué que, au travers de ses différents moyens et arguments, et notamment dans le cadre de la branche du deuxième moyen tirée de la violation du devoir de sollicitude, Mme Schuerings entendait, en substance, contester le motif avancé par l’ETF pour fonder la décision de résiliation, à savoir la suppression du département auquel elle avait été affectée à la suite du transfert de l’appui technique à la mise en œuvre du programme Tempus à l’EACEA.
18 Le Tribunal de la fonction publique a considéré, au point 59 de l’arrêt attaqué, que la réduction du périmètre des activités d’une agence pouvait être considérée comme étant susceptible de constituer un motif valable de licenciement, à la condition cependant que ladite agence n’ait pas disposé d’un poste auquel l’agent concerné aurait pu être réaffecté. À cet égard, après avoir écarté, aux points 60 et 61 de l’arrêt attaqué, les arguments de l’ETF tirés, d’une part, de l’existence de règles internes prévoyant des procédures particulières de sélection et, d’autre part, des mesures d’accompagnement prises à l’égard de Mme Schuerings, le Tribunal de la fonction publique a précisé, au point 62 dudit arrêt, que l’agence concernée était dans l’obligation d’examiner si l’intéressée ne pouvait pas être réaffectée à un autre poste existant ou devant être prochainement créé à la suite, notamment, de l’attribution de nouvelles compétences à l’agence concernée.
19 Le Tribunal de la fonction publique a précisé, au point 63 de l’arrêt attaqué, les critères dont l’autorité compétente devait tenir compte en effectuant l’examen mentionné au point 18 ci-dessus et, notamment, la façon dont elle devait mettre en balance l’intérêt du service et celui de l’agent concerné. Ensuite, il a examiné les circonstances concrètes du cas d’espèce en soulignant, au point 64 de l’arrêt attaqué, que des mutations et des recrutements d’agents temporaires avaient eu lieu à l’ETF entre le 21 novembre 2006 et le 31 août 2008 sans que l’examen mentionné au point 18 ci-dessus ait été effectué en faveur de Mme Schuerings, ce qui l’avait amené à considérer que l’ETF avait manqué à ses obligations. Après avoir rejeté comme non pertinente la circonstance que Mme Schuerings n’aurait pas réellement cherché des alternatives pour éviter son licenciement (point 65 de l’arrêt attaqué), le Tribunal de la fonction publique a conclu que la décision de résiliation était illégale et devait être annulée (point 66 de l’arrêt attaqué).
20 Aux points 67 et 68 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique, à titre surabondant, d’une part, a ajouté que, pendant la période entourant le licenciement, plusieurs postes parmi ceux libérés au sein de l’ETF correspondaient aux compétences de Mme Schuerings ou, à tout le moins, étaient susceptibles d’être occupés par elle après une rapide formation et, d’autre part, a relevé certains autres éléments pertinents dans le cadre de l’examen mentionné au point 63 de l’arrêt attaqué.
21 Enfin, le Tribunal de la fonction publique a rejeté la demande de réparation du préjudice prétendument subi par Mme Schuerings en considérant, s’agissant du préjudice matériel, que la somme correspondant à la rémunération dont elle avait été privée ne saurait faire l’objet de conclusions indemnitaires visant à « réparer un dommage » et que, par ailleurs, s’agissant du montant demandé afin de couvrir la perte de revenu que Mme Schuerings supporterait postérieurement au prononcé de l’arrêt, il ne saurait anticiper les suites que chacune des parties réserverait à l’arrêt, de sorte que les conclusions tendant à réparer ce préjudice matériel devaient être rejetées comme prématurées (points 71 et 72 de l’arrêt attaqué). Il a également rejeté les conclusions visant la réparation du préjudice moral, Mme Schuerings n’ayant pas allégué, et encore moins prouvé, que son préjudice résultait d’un comportement de l’ETF l’ayant affecté moralement au-delà de ce qu’une personne licenciée ressentait habituellement (points 73 et 74 de l’arrêt attaqué).
Sur le pourvoi
Procédure et conclusions des parties
22 Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 18 février 2011, l’ETF a introduit le présent pourvoi. Le 29 juillet 2011, Mme Schuerings a déposé le mémoire en réponse. À la suite d’une demande motivée de l’ETF, un deuxième échange de mémoires a été autorisé. Ces mémoires ont été déposés dans les délais impartis.
23 Par actes déposés au greffe du Tribunal respectivement les 10, 26, 31 mai et 3 juin 2011, la Commission, l’Agence européenne des médicaments (EMA), l’Agence européenne pour l’environnement (AEE) et l’Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA) ont demandé à intervenir au soutien des conclusions de l’ETF. Le 6 juin 2011, l’Agence de l’Union européenne chargée de la sécurité des réseaux et de l’information (ENISA) et le Centre de traduction des organes de l’Union européenne (CdT) ainsi que, le 7 juin 2011, le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC), l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) et l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) ont présenté des demandes aux mêmes fins. Par ordonnance du président de la chambre des pourvois du 21 septembre 2011, ces neuf demandes d’intervention au soutien des conclusions de l’ETF ont été admises.
24 Tous les intervenants à l’exception de l’ENISA ont déposé un mémoire en intervention dans le délai qui leur avait été imparti. Le mémoire en intervention de l’EFSA ayant été déposé dans une autre langue que la langue de procédure, il n’a pas été versé au dossier.
25 L’ETF et Mme Schuerings ont été invitées à formuler des observations sur les mémoires en intervention, ce à quoi elles ont déféré dans le délai imparti.
26 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (chambre des pourvois) a décidé d’ouvrir la procédure orale.
27 Par ordonnance du président de la chambre des pourvois du 1er mars 2013, les parties entendues, les affaires T‑107/11 P et T‑108/11 P ont été jointes aux fins de la procédure orale, conformément à l’article 50 du règlement de procédure du Tribunal.
28 Lors de l’audience du 14 mars 2013, les parties principales ainsi que la Commission, l’ENISA, le CdT et l’EFSA ont été entendus en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal.
29 L’ETF, soutenue par la Commission, l’EMA, l’AEE, l’AESA, l’ENISA, le CdT, l’ECDC, l’ECHA et l’EFSA, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler l’arrêt attaqué ;
– en conséquence, rejeter le recours en première instance ;
– condamner Mme Schuerings aux dépens des deux instances.
30 Mme Schuerings conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le pourvoi ;
– condamner l’ETF aux dépens.
En droit
31 À titre liminaire, il y a lieu de préciser que, compte tenu de l’argumentation développée par l’ETF dans le cadre du pourvoi, ce dernier doit être regardé comme visant l’annulation de l’arrêt attaqué en tant que celui-ci, d’une part, a accueilli le recours de Mme Schuerings tendant notamment à l’annulation de la décision de résiliation et, d’autre part, a rejeté sa demande de réparation du préjudice matériel subi comme étant prématurée. À l’appui de son pourvoi, l’ETF invoque quatre moyens.
32 Le premier moyen est tiré d’une mauvaise application des notions d’intérêt du service et de poste ainsi que d’une violation des articles 2 et 47 du RAA et de l’obligation de motivation. Il comporte, en substance, cinq branches. Par la première branche, l’ETF reproche, principalement, au Tribunal de la fonction publique d’avoir commis une erreur de droit dans l’interprétation des articles 2 et 47 du RAA. Dans le cadre de la deuxième branche, elle soutient que le Tribunal de la fonction publique a méconnu l’intérêt du service. La troisième branche est tirée d’une violation de l’obligation de motivation. Par la quatrième branche, l’ETF reproche au Tribunal de la fonction publique une mauvaise interprétation de la notion de poste. Dans le cadre de la cinquième branche, l’ETF soutient que le Tribunal de la fonction publique a dépassé les limites de ses compétences.
33 Le deuxième moyen est tiré d’une violation des principes de proportionnalité et de sécurité juridique. Il concerne, en substance, les critères retenus par le Tribunal de la fonction publique pour réaliser une mise en balance entre l’intérêt du service et l’intérêt de l’agent.
34 Le troisième moyen est tiré, en substance, d’une violation de l’interdiction de statuer ultra vires et ultra petita ainsi que d’une violation du principe du contradictoire. Il est composé, en substance, de quatre branches. Dans le cadre de la première branche, l’ETF soutient que le Tribunal de la fonction publique a statué ultra petita et a violé ses droits de la défense en examinant la légalité du motif de licenciement. La deuxième branche est tirée d’une violation de l’interdiction de statuer ultra petita et d’une violation de ses droits de la défense s’agissant des critères à prendre en compte dans l’examen obligatoire de la possibilité de réaffectation que le Tribunal de la fonction publique a définis. La troisième branche est tirée de la violation de l’interdiction de statuer ultra petita en ce que le Tribunal de la fonction publique a obligé l’ETF à réintégrer Mme Schuerings. La quatrième branche est tirée d’une violation de l’interdiction de statuer ultra vires en ce que le Tribunal de la fonction publique a substitué sa propre appréciation à celle de l’ETF.
35 Le quatrième moyen est tiré d’une violation de l’article 266 TFUE ainsi que d’une violation de l’obligation de motivation. Il concerne, en substance, l’examen des conclusions indemnitaires de Mme Schuerings pour autant que le Tribunal de la fonction publique, en tirant les conclusions de la décision d’annulation, a seulement rejeté la demande en réparation du préjudice matériel subi comme étant prématurée.
36 Il convient d’examiner ensemble le premier moyen et la quatrième branche du troisième moyen, cette dernière se rapprochant, notamment, de la cinquième branche du premier moyen.
37 Le Tribunal estime toutefois opportun d’examiner préalablement la première branche du troisième moyen, tirée d’une violation de l’interdiction de statuer ultra petita et des droits de la défense de l’ETF, en ce que le Tribunal de la fonction publique a examiné la légalité du motif de licenciement opposé à Mme Schuerings. En effet, s’il s’avérait que le Tribunal de la fonction publique a statué ultra petita en examinant si le motif de la décision de résiliation était illégal, cette conclusion mènerait à l’annulation de l’arrêt attaqué pour autant qu’il a annulé la décision de résiliation et rejeté, par conséquent, comme prématurée la demande en réparation du préjudice matériel, sans qu’il y ait lieu d’examiner les autres moyens du recours.
Sur la première branche du troisième moyen
38 L’ETF, soutenue par les intervenants, fait valoir que le Tribunal de la fonction publique n’a pas respecté le cadre du litige défini par les parties en première instance, dès lors que le motif d’annulation de la décision de résiliation ne se rapporte pas à l’un des moyens invoqués dans la requête en première instance, mais à des moyens distincts. Ainsi, Mme Schuerings n’aurait pas soutenu, au titre des moyens soulevés, que la décision de résiliation était dépourvue de motif valable, parce que l’ETF aurait eu la possibilité de la réaffecter à un autre poste, mais elle aurait avancé qu’un contrat à durée indéterminée ne saurait être résilié que pour raison d’incompétence ou de mauvaise conduite de l’intéressé ou pour raison d’intérêt du service, en s’attachant par la suite à démontrer qu’aucun de ces motifs n’était satisfait en l’espèce. Quant au moyen tiré de la violation du devoir de sollicitude, la requérante ne l’aurait pas invoqué pour fonder le reproche à l’ETF de ne pas avoir recherché à la réaffecter, mais seulement, dans une approche traditionnelle de ce principe général, pour ne pas avoir tenu compte de sa situation personnelle. Ce serait d’ailleurs en ce sens que l’ETF aurait répondu dans son mémoire en réponse. Par ailleurs, selon l’ETF, les débats n’ont jamais porté sur le caractère non valable du motif de licenciement en l’absence d’examen des possibilités de réaffecter Mme Schuerings.
39 Mme Schuerings conteste ne pas avoir soulevé l’absence de motif valable à la décision de résiliation ou la violation du devoir de sollicitude. Elle rappelle, par ailleurs, que le juge de l’Union, tout en ne devant statuer que sur la demande des parties, ne saurait être tenu par les seuls arguments invoqués par celles-ci au soutien de leurs prétentions, sauf à se voir contraint, le cas échéant, de fonder sa décision sur des considérations juridiques erronées.
40 Lorsque l’ETF soutient que le Tribunal de la fonction publique a statué ultra petita, elle lui reproche, d’une part, de ne pas avoir respecté le cadre du litige défini par les parties. Elle fait valoir, d’autre part, que, en se fondant sur une argumentation non débattue entre les parties, il a violé ses droits de la défense.
41 À cet égard, il y a lieu de rappeler la jurisprudence selon laquelle, dans la mesure où le juge de l’Union saisi d’un recours en annulation ne peut pas statuer ultra petita, il n’est pas habilité à redéfinir l’objet principal du recours, ni à relever un moyen d’office en dehors des cas particuliers dans lesquels l’intérêt public exige son intervention (voir arrêt du Tribunal du 5 octobre 2009, Commission/Roodhuijzen, T‑58/08 P, Rec. p. II‑3797, point 34, et la jurisprudence citée).
42 Il ressort également de la jurisprudence que l’examen du grief tiré de la violation de l’interdiction de statuer ultra petita mène à vérifier si les motifs litigieux de l’arrêt attaqué, qui ont conduit à l’annulation de la décision de résiliation tout en écartant l’argumentation invoquée par l’ETF en première instance, constituent un développement du raisonnement du Tribunal de la fonction publique se rapportant à des moyens invoqués en première instance ou s’ils se rapportent à des moyens distincts (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 19 novembre 1998, Parlement/Gutiérrez de Quijano y Lloréns, C‑252/96 P, Rec. p. I‑7421, points 32 à 34, et arrêt Commission/Roodhuijzen, point 41 supra, point 37).
43 En l’espèce, le Tribunal de la fonction publique a annulé la décision de résiliation, parce qu’il a considéré que le motif de licenciement invoqué était illégal pour les raisons énoncées, notamment, au point 59 de l’arrêt attaqué. Il en ressort que, selon le Tribunal de la fonction publique, la réduction du périmètre des activités d’une agence n’est un motif valable de licenciement que si celle-ci ne dispose pas d’un poste auquel l’agent dont le licenciement est envisagé peut être réaffecté. Selon le Tribunal de la fonction publique, l’agence doit donc préalablement examiner si l’agent concerné peut être réaffecté en mettant en balance l’intérêt du service et l’intérêt dudit agent. L’ETF n’ayant pas procédé à un tel examen dans le cas de la requérante, le Tribunal de la fonction publique a conclu qu’il n’y avait pas de motif valable de licenciement et a annulé la décision de résiliation.
44 Force est de constater que, en statuant en ce sens, le Tribunal de la fonction publique n’a pas modifié l’objet principal du recours, qui visait notamment à l’annulation de la décision de résiliation.
45 Cependant, pour arriver à sa conclusion d’annulation, le Tribunal de la fonction publique a reformulé les moyens soulevés dans la requête en première instance. Ainsi, au point 55 de l’arrêt attaqué, il a considéré ce qui suit :
« Au travers des différents moyens et arguments que [Mme Schuerings] soulève au soutien de ses conclusions en annulation, notamment la branche du deuxième moyen, tirée de la violation du devoir de sollicitude, celle-ci entend en substance contester le motif avancé par l’ETF pour fonder la [décision de résiliation], à savoir la suppression, à la suite du transfert de l’appui technique à la mise en œuvre du programme ‘Tempus' à l’EACEA, du département auquel elle était affectée. En effet, selon [Mme Schuerings], ce motif n’était pas valable, car l’ETF avait la possibilité de la réaffecter à un autre poste soit en son sein, soit au sein de l’EACEA. »
46 Dans la requête en première instance, par son deuxième moyen, pris en particulier dans sa branche tirée de la violation du devoir de sollicitude, Mme Schuerings a fait valoir qu’une décision de résiliation du contrat d’engagement à durée indéterminée d’un agent temporaire ne pouvait être justifiée que pour raison d’incompétence ou de mauvaise conduite de l’intéressé ou pour raison d’intérêt du service. À cet égard, elle critiquait, en particulier, l’affirmation de l’ETF, dans la réponse à la réclamation, selon laquelle l’autorité habilitée à conclure des contrats (AHCC), après avoir réfléchi à la possibilité de sa réaffectation interne, n’avait pas pu prendre une décision différente autre que celle de son licenciement, compte tenu de la perspective budgétaire, des futurs défis de l’ETF et des compétences requises pour y répondre. Mme Schuerings a fait valoir à l’encontre de cette motivation que les effectifs de l’ETF étaient restés inchangés après le transfert du programme Tempus à l’EACEA, que ses compétences et aptitudes professionnelles n’avaient jamais été contestées et que son expérience aurait aisément pu être utilisée dans le cadre d’autres services de l’ETF. Selon elle, la décision de résiliation avait été prise en violation du devoir de sollicitude, car l’ETF n’avait pas tenu compte de l’intérêt du service, ni de son intérêt personnel, aucun plan de redéploiement ou de développement personnel n’ayant notamment été établi.
47 Certes, comme le fait valoir l’ETF, Mme Schuerings a ainsi soutenu, en substance, que l’ETF aurait dû tenir compte de sa situation personnelle. Néanmoins, compte tenu du contenu de la requête en première instance tel que décrit au point 46 ci-dessus et de la jurisprudence citée au point 42 ci-dessus, le moyen reformulé par le Tribunal de la fonction publique, relatif à la légalité du motif de licenciement invoqué, tiré de ce que l’ETF n’avait pas examiné si Mme Schuerings pouvait être réaffectée préalablement au licenciement, ne se rapporte pas à un moyen distinct de ceux soulevés dans la requête.
48 En outre, ainsi qu’il ressort du mémoire en défense en première instance, l’ETF, contrairement à ce qu’elle allègue dans le cadre du présent pourvoi, a bien analysé le deuxième moyen avancé dans la requête en première instance comme étant relatif à la légalité du motif de licenciement invoqué. Ainsi, il a été dit dans le mémoire en défense, en réponse à la branche du deuxième moyen tirée de la violation du devoir de sollicitude et d’un détournement de pouvoir, que « en réalité, sous cette branche, [Mme Schuerings] critiqu[ait] les motifs du licenciement » et que « en outre, [Mme Schuerings] sout[enait], à nouveau, qu’il y a[vait] eu licenciement, parce qu’il n’y a[vait] pas eu de réaffectation et développ[ait] une série de griefs dirigés non pas contre la [décision de résiliation] elle-même, mais contre une non-réaffectation ». L’ETF ajoutait que la résiliation unilatérale du contrat en cause, expressément prévue à l’article 47, paragraphe 2, du RAA, relevait du large pouvoir d’appréciation de l’autorité compétente et trouvait sa justification dans le contrat d’emploi.
49 Dans ces circonstances, l’ETF ne saurait raisonnablement prétendre que le motif d’annulation selon lequel il n’y avait pas de motif valable au licenciement s’il existait une possibilité de réaffecter Mme Schuerings ne se rapportait pas à des moyens invoqués en première instance, mais à des moyens distincts. Même si le Tribunal de la fonction publique a rendu les moyens de Mme Schuerings plus concrets en les reformulant tel que mentionné au point 45 ci-dessus, le moyen ainsi reformulé se rapporte à ceux avancés dans la requête en première instance, de sorte que le Tribunal de la fonction publique n’a pas relevé un moyen d’office et n’a donc pas statué ultra petita à cet égard.
50 Il doit d’ailleurs également être rappelé que, comme le fait valoir Mme Schuerings, il est de jurisprudence constante que, dans le cadre du litige circonscrit par les parties, le juge de l’Union, tout en ne devant statuer que sur la demande des parties, ne saurait être tenu par les seuls arguments invoqués par celles-ci au soutien de leurs prétentions, sauf à se voir contraint, le cas échéant, de fonder sa décision sur des considérations juridiques erronées (voir arrêt Commission/Roodhuijzen, point 41 supra, point 35, et la jurisprudence citée) et que, donc, le Tribunal de la fonction publique a pu considérer ne pas pouvoir répondre aux griefs soulevés dans la requête en première instance sans se prononcer sur le moyen tel que reformulé au point 55 de l’arrêt attaqué.
51 S’agissant du grief de l’ETF selon lequel elle n’a pas pu s’exprimer sur le moyen reformulé, alléguant une violation de ses droits de la défense, il ressort de la jurisprudence que les droits de la défense occupent une place éminente dans l’organisation et le déroulement d’un procès équitable et incluent le principe du contradictoire. Ce principe s’applique à toute procédure susceptible d’aboutir à une décision d’une institution affectant de manière sensible les intérêts d’une personne. Il implique, en règle générale, le droit pour les parties à un procès d’être en mesure de prendre position sur les faits et les documents sur lesquels sera fondée une décision judiciaire ainsi que de discuter les preuves et les observations présentées devant le juge et les moyens de droit relevés d’office par le juge, sur lesquels celui-ci entend fonder sa décision. En effet, pour satisfaire aux exigences liées au droit à un procès équitable, il importe que les parties puissent débattre contradictoirement tant des éléments de fait que des éléments de droit qui sont décisifs pour l’issue de la procédure (voir arrêt de la Cour du 17 décembre 2009, Réexamen M/EMEA, C‑197/09 RX‑II, Rec. p. I‑12033, points 39 à 41, et la jurisprudence citée).
52 Ce grief ne saurait pas non plus prospérer, les éléments contenus dans le mémoire en défense en première instance mentionnés au point 48 ci-dessus faisant ressortir que l’ETF a pu prendre position sur la question juridique examinée dans le cadre du moyen reformulé par le Tribunal de la fonction publique et que, donc, les éléments de droit décisifs pour l’issue de la procédure ont été débattus entre les parties.
53 Enfin, pour les mêmes motifs, l’argument de l’ETF selon lequel les débats n’ont jamais porté sur le caractère non valable du motif de licenciement en l’absence d’examen par elle des possibilités de réaffectation de Mme Schuerings doit être rejeté, ainsi que, sans devoir les examiner davantage, ses arguments relatifs au fait que ni le rapport d’audience du Tribunal de la fonction publique, ni les mesures d’organisation de la procédure décidées le 19 mars 2010, ni l’audience, ni la réouverture des débats ne visaient cette question.
54 Il en résulte que la première branche du troisième moyen doit être rejetée.
Sur le premier moyen et sur la quatrième branche du troisième moyen
– Sur la recevabilité
55 Selon Mme Schuerings, le premier moyen est irrecevable, parce qu’il vise à faire réexaminer la validité du motif du licenciement, remettant en question l’appréciation des faits effectuée par le Tribunal de la fonction publique. Quant à la quatrième branche du troisième moyen, elle serait également irrecevable, parce qu’elle ne serait pas étayée à suffisance de droit.
56 L’ETF fait valoir qu’elle ne demande pas un réexamen du motif de licenciement et que, par ailleurs, un tel réexamen n’emporterait pas l’irrecevabilité du premier moyen. Elle conteste, par ailleurs, que la quatrième branche du troisième moyen ne soit pas étayée à suffisance de droit.
57 En premier lieu, s’agissant de la recevabilité du premier moyen, il résulte d’une jurisprudence constante que le juge de première instance est seul compétent, d’une part, pour constater les faits, sauf dans le cas où une inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et, d’autre part, pour apprécier ces faits (arrêt du Tribunal du 8 septembre 2008, Kerstens/Commission, T‑222/07 P, RecFP p. I‑B‑1‑37 et II‑B‑1‑267, point 60). L’appréciation des faits par le juge de première instance ne constitue donc pas, sous réserve du cas de la dénaturation des éléments de preuve produits devant ce juge, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle du Tribunal (arrêt Kerstens/Commission, précité, point 61). Lorsque le juge de première instance a constaté ou apprécié les faits, le juge du pourvoi est compétent pour exercer un contrôle sur la qualification juridique de ces faits et les conséquences de droit qui en ont été tirées par le premier juge (arrêt du Tribunal du 7 juillet 2011, Longinidis/Cedefop, T‑283/08 P, point 43).
58 En l’espèce, dans la mesure où, dans le cadre du premier moyen, l’ETF conteste l’appréciation du Tribunal de la fonction publique précisant les conditions limitées dans lesquelles le motif de licenciement, tiré de la réduction de son périmètre d’activité, aurait pu être légal, elle vise un réexamen de la validité dudit motif.
59 Toutefois, il ne saurait être allégué que cette demande de l’ETF concerne une nouvelle appréciation des faits plutôt que des questions de droit. En effet, l’ETF doit pouvoir contester, dans le cadre d’un pourvoi, la validité de l’analyse du Tribunal de la fonction publique à cet égard au regard des règles et des principes du statut et du RAA et de la jurisprudence qui y est afférente, conformément à l’article 11 de l’annexe I du statut de la Cour, selon lequel le pourvoi devant le Tribunal peut porter sur des violations du droit de l’Union par le Tribunal de la fonction publique.
60 Dès lors, dans la mesure où le premier moyen concerne une violation alléguée du droit de l’Union par le Tribunal de la fonction publique, il est recevable.
61 En second lieu, s’agissant de la recevabilité de la quatrième branche du troisième moyen, l’ETF indique dans le pourvoi, au soutien de ladite branche, qu’il résulte de l’examen des trois premiers moyens du pourvoi que le Tribunal de la fonction publique a substitué sa propre appréciation à celle de l’ETF. Ledit Tribunal empiéterait ainsi sur la politique du personnel qui relève de sa seule compétence, ce qui mènerait à une violation de l’interdiction de statuer ultra vires.
62 Contrairement à ce que fait valoir Mme Schuerings, de cette façon, l’ETF précise quels éléments de l’arrêt attaqué sont critiqués ainsi que les arguments juridiques au soutien de sa thèse, conformément à l’article 11, paragraphe 1, de l’annexe I du statut de la Cour et à l’article 138, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure, de sorte que la branche en cause du troisième moyen est également recevable.
– Sur le fond
63 Dans le cadre de la première branche du premier moyen, l’ETF, soutenue par les intervenants, avance, en substance, que, en considérant que le motif de licenciement tiré de la réduction du périmètre de ses activités ne pouvait être considéré comme étant un motif valable qu’à la condition qu’elle n’ait pas disposé de poste auquel Mme Schuerings pouvait être réaffectée, le Tribunal de la fonction publique a accordé une protection trop large à l’intéressée, commettant une erreur de droit dans l’interprétation des articles 2 et 47 du RAA et méconnaissant ainsi la différence de nature entre la relation contractuelle issue d’un contrat à durée indéterminée et la relation statutaire entre un fonctionnaire et une autorité administrative.
64 L’ETF, tout en admettant que le licenciement d’un agent engagé sur la base d’un contrat à durée indéterminée doive se fonder sur un motif valable, soutient que la disparition des activités auxquelles l’agent temporaire est affecté est nécessairement un motif valable pour résilier le contrat. Elle rappelle que, dans le droit du travail, le licenciement économique est considéré comme justifié si l’entreprise a été obligée de réduire ou de supprimer les activités dans lesquelles le travailleur a été occupé.
65 Dans le cadre de la deuxième branche du premier moyen, l’ETF, soutenue par les intervenants, fait valoir que l’intérêt du service consiste à affecter les fonctionnaires et autres agents de la manière la plus efficace par rapport au travail à accomplir et doit seul guider les décisions prises en application de l’article 47 du RAA. Elle rappelle également qu’une institution ou une agence dispose d’un large pouvoir d’appréciation dans l’organisation de ses services.
66 La troisième branche du premier moyen vise, en particulier, une violation de l’obligation du Tribunal de la fonction publique de motiver son arrêt à suffisance de droit, dans la mesure où la jurisprudence invoquée au point 60 de l’arrêt attaqué n’étayerait pas son appréciation selon laquelle l’administration a toujours la possibilité de procéder d’office à une réaffectation et où ledit Tribunal ignorerait certains autres arrêts pertinents, tandis que la quatrième branche de ce moyen concerne une confusion alléguée entre le concept budgétaire de poste et la notion de tâche ou de fonction.
67 Enfin, la cinquième branche du premier moyen concerne, comme la quatrième branche du troisième moyen, le dépassement par le Tribunal de la fonction publique de ses compétences en ce que, en substance, ledit Tribunal ne se serait pas limité à contrôler l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation. Le Tribunal de la fonction publique aurait « ajouté au droit plutôt que de [l’avoir interprété] », empiétant sur les compétences du législateur ainsi que sur celles de l’ETF, seule compétente pour décider de sa politique du personnel.
68 S’agissant de la première branche du premier moyen, Mme Schuerings conteste que le Tribunal de la fonction publique ait méconnu la différence entre le statut d’un fonctionnaire et celui d’un agent temporaire et rappelle que l’institution doit justifier d’un motif valable pour mettre fin à une relation de travail à durée indéterminée et respecter son devoir de sollicitude.
69 Selon elle, la comparaison avec le licenciement économique ne saurait prospérer, le Tribunal de la fonction publique ayant considéré à juste titre qu’il n’était pas établi que l’ETF avait été contrainte de réduire le nombre de son personnel, compte tenu des mutations internes et des recrutements ayant eu lieu pendant la période concernée. Par ailleurs, elle considère que les standards liés à la protection sociale ont considérablement évolué, de sorte qu’il ne suffirait pas de notifier un préavis de licenciement en respectant le délai prévu par les dispositions pertinentes pour que ce licenciement soit valable. Elle se réfère, à cet égard, à l’article 30 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ainsi qu’à certains instruments juridiques relevant du droit du travail.
70 S’agissant de la deuxième branche du premier moyen relative à l’intérêt du service, Mme Schuerings fait valoir que cet intérêt peut tout aussi bien justifier qu’une personne dont la fonction a été supprimée se voit attribuer d’autres tâches afin que son employeur puisse continuer à bénéficier de ses compétences. Par ailleurs, le Tribunal de la fonction publique n’aurait pas fait primer son intérêt personnel sur celui de l’ETF, ledit Tribunal n’ayant notamment pas considéré que l’ETF avait l’obligation de la maintenir en service.
71 S’agissant de la troisième branche du premier moyen, Mme Schuerings conteste que le Tribunal de la fonction publique ait mal interprété la jurisprudence.
72 S’agissant de la notion de poste, en cause dans la quatrième branche du premier moyen, Mme Schuerings considère, en substance, que la suppression des tâches d’un agent ne donne pas lieu à la suppression de l’emploi auquel il était affecté.
73 S’agissant de la cinquième branche du premier moyen et de la quatrième branche du troisième moyen relatives à un prétendu dépassement par le Tribunal de la fonction publique de ses compétences, Mme Schuerings fait valoir que l’analyse dudit Tribunal selon laquelle l’ETF ne pouvait mettre fin à son contrat, à durée indéterminée, au seul motif que les tâches auxquelles elle était affectée avaient été supprimées ou transférées à une autre entité, sans examiner au préalable la possibilité de la réaffecter, est conforme aux dispositions réglementaires et à la jurisprudence. Selon elle, le Tribunal de la fonction publique n’a notamment pas dépassé ses compétences en se prononçant sur la légalité de la décision de résiliation.
74 Le Tribunal relève que, par son argumentation au soutien de ces différentes branches des premier et troisième moyens, l’ETF remet en cause l’interprétation par le Tribunal de la fonction publique de l’article 47, sous c), i), du RAA, disposition relative à la fin de l’engagement à durée indéterminée d’un agent temporaire en application de laquelle elle a résilié le contrat de Mme Schuerings.
75 L’article 47, sous c), i), du RAA prévoit que, indépendamment du cas de décès de l’agent temporaire, pour les contrats à durée indéterminée, l’engagement prend fin à l’issue du préavis prévu dans le contrat, le préavis ne pouvant être inférieur à un mois par année de service accompli avec un minimum de trois mois et un maximum de dix mois.
76 À cet égard, il est de jurisprudence constante que, s’agissant de la résiliation d’un contrat d’agent temporaire à durée indéterminée, l’autorité compétente dispose, conformément à l’article 47, sous c), i), du RAA et dans le respect du préavis prévu au contrat, d’un large pouvoir d’appréciation, le contrôle du juge de l’Union devant, dès lors, se limiter à la vérification de l’absence d’erreur manifeste ou de détournement de pouvoir (voir arrêt du Tribunal du 8 septembre 2009, ETF/Landgren, T‑404/06 P, Rec. p. II‑2841, point 162, et la jurisprudence citée).
77 Il résulte également de la jurisprudence que la décision de licenciement d’un agent temporaire engagé pour une durée indéterminée, fondée sur l’article 47, sous c), i), du RAA, est soumise aux exigences de motivation prévues à l’article 25 du statut (arrêt ETF/Landgren, point 76 supra, point 170).
78 En l’espèce, il ressort de la décision de résiliation qu’il a été mis fin au contrat d’engagement à durée indéterminée de Mme Schuerings le 27 octobre 2007 avec un préavis de dix mois, conformément à l’article 47, sous c), i), du RAA. Par ailleurs, Mme Schuerings ne conteste pas l’appréciation du Tribunal de la fonction publique, aux points 59 et suivants de l’arrêt attaqué, selon laquelle son licenciement était motivé par la réduction du périmètre des activités de l’ETF et par le transfert des tâches auxquelles elle était affectée à l’EACEA, même si elle avait soulevé un moyen tiré du défaut de motivation de la décision de résiliation dans la requête en première instance.
79 Le Tribunal de la fonction publique a toutefois considéré que ledit motif de résiliation n’était pas valable s’il existait un poste auquel Mme Schuerings aurait pu être réaffectée. Ainsi qu’il ressort du point 59 de l’arrêt attaqué, selon le Tribunal de la fonction publique, dans cette hypothèse, la résiliation au motif d’une réduction de l’activité de l’agence n’était pas justifiée.
80 Par ailleurs, après avoir, aux points 60 et 61 de l’arrêt attaqué, d’une part, écarté les arguments de l’ETF tirés de l’existence de règles internes prévoyant des procédures particulières de sélection en cas de vacance d’emploi pour les mutations internes des agents en indiquant, que, en substance, l’administration avait toujours la possibilité de procéder d’office à une réaffectation dans l’intérêt du service et, d’autre part, indiqué qu’il était également indifférent que des mesures d’accompagnement de l’agent concerné aient été prises, même si l’existence de telles mesures participait au respect du devoir de sollicitude, le Tribunal de la fonction publique a indiqué ce qui suit :
« 62 [A]vant qu’une agence ne procède au licenciement d’un agent bénéficiant d’un contrat à durée indéterminée pour le motif que les tâches auxquelles cet agent était affecté ont été supprimées ou transférées à une autre entité, l’agence concernée est dans l’obligation d’examiner si l’intéressé ne peut pas être réaffecté à un autre poste existant ou devant être prochainement créé à la suite, notamment, de l’attribution de nouvelles compétences à l’agence concernée.
63 Lors de cet examen, l’administration doit mettre en balance l’intérêt du service, lequel commande de recruter la personne la plus apte pour occuper le poste existant ou devant être créé prochainement, avec l’intérêt de l’agent dont le licenciement est envisagé. Pour ce faire, elle doit tenir compte, dans le cadre de son pouvoir d’appréciation, de différents critères parmi lesquels figurent les exigences du poste au regard des qualifications et du potentiel de l’agent, la circonstance que le contrat de travail de l’agent concerné précise ou non que ce dernier a été embauché pour occuper un poste déterminé, ses rapports d’évaluation, ainsi que son âge, l’ancienneté de service et le nombre d’années qui lui reste à cotiser avant de pouvoir faire valoir ses droits à la retraite.
64 En l’espèce, bien que le Parlement ait émis des réserves sur le financement d’un certain nombre de postes et que l’ETF soit une agence de taille modeste, il doit être relevé qu’entre le 21 novembre 2006, date à laquelle elle a été informée de la décision de la Commission de transférer l’appui technique à la mise en œuvre du programme ‘Tempus’ à l’EACEA, et le 31 août 2008, date de prise d’effet du licenciement de [Mme Schuerings], l’ETF a, d’une part, procédé à de nombreuses mutations internes, [et] d’autre part, recruté plusieurs agents temporaires. Or, le Tribunal constate que, avant d’ouvrir les procédures de recrutement pour ces postes, l’ETF n’a pas procédé, dans le cas de [Mme Schuerings], à l’examen décrit au point précédent, mais a exigé de celle-ci qu’elle participe, comme n’importe quel autre candidat, aux procédures internes de sélection mises en place afin de pourvoir aux postes vacants, et que, dès lors, en agissant de la sorte, l’ETF a manqué à ses obligations.
65 Certes, l’ETF indique, pour tenter de justifier la [décision de résiliation], que [Mme Schuerings] n’aurait pas réellement cherché de solutions alternatives pour éviter son licenciement en ce que, notamment, elle n’aurait pas, ou peu, postulé pour occuper l’un des postes vacants au sein de l’ETF. Cependant il doit être relevé que, dès lors que c’est l’ETF qui a pris l’initiative de licencier [Mme Schuerings], il ne saurait être pallié à l’absence de motif valable au licenciement par le reproche, formulé à l’égard de [Mme Schuerings], de ne pas avoir postulé ou de n’avoir postulé qu’à peu d’offres d’emploi au sein de l’ETF. »
81 À cet égard, il y a lieu de relever que, en indiquant que l’autorité compétente devait examiner préalablement au licenciement, conformément à l’article 47, sous c), i), du RAA, d’un agent engagé sur la base d’un contrat à durée indéterminée, si ledit agent ne pouvait pas être réaffecté à un autre poste existant ou devant être prochainement créé, le Tribunal de la fonction publique a formulé à l’égard de ladite autorité une obligation qui n’était pas prévue par le RAA.
82 Certes, ainsi que le Tribunal de la fonction publique le rappelle au point 56 de l’arrêt attaqué, la stabilité d’emploi des contrats à durée indéterminée constitue un élément majeur de la protection des travailleurs concernés (arrêt de la Cour du 22 novembre 2005, Mangold, C‑144/04, Rec. p. I‑9981, point 64), même si elle ne forme pas, en elle-même, un principe général de droit.
83 Toutefois, l’article 2, sous a), du RAA, qui régit le contrat de travail de Mme Schuerings, prévoit qu’est considéré comme agent temporaire l’agent engagé en vue d’occuper un emploi auquel un caractère temporaire a été conféré tandis que le statut confère aux fonctionnaires une plus grande stabilité d’emploi, dès lors que les hypothèses de cessation définitive des fonctions contre le gré de l’intéressé sont strictement encadrées.
84 Même si, ainsi que le considère le Tribunal de la fonction publique au point 57 de l’arrêt attaqué et que Mme Schuerings le fait valoir, les contrats de travail à durée indéterminée se distinguent, sous l’angle de la sécurité de l’emploi, des contrats de travail à durée déterminée, il ne saurait être nié que les agents du service public de l’Union engagés sur la base d’un contrat à durée indéterminée ne peuvent ignorer le caractère temporaire de leur engagement et le fait que celui-ci ne confère pas de garantie d’emploi.
85 À cet égard, la notion d’« emploi permanent d’une des institutions », au sens de l’article 1er bis, paragraphe 1, du statut, n’englobe que les emplois expressément prévus comme « permanents » ou dénommés de manière semblable dans le budget et toute interprétation contraire conduirait à augmenter considérablement le nombre des emplois permanents consentis par l’autorité budgétaire, mettant ainsi en échec tant les attributions que les intentions de cette dernière (arrêt du Tribunal du 21 septembre 2011, Adjemian e.a./Commission, T‑325/09 P, Rec. p. II‑6515, point 77).
86 Les emplois, compris dans le tableau des effectifs annexé à la section du budget afférente à chaque institution, et auxquels les autorités budgétaires ont conféré un caractère temporaire, doivent, conformément à l’article 2, sous a), et à l’article 9 du RAA, être pourvus par des agents temporaires. Dans la mesure où ces emplois sont compris dans le tableau des effectifs, ils correspondent à des tâches permanentes définies de service public, lesquelles ne correspondent toutefois pas, en vertu du choix de l’autorité budgétaire, à un « emploi permanent », au sens défini au point 85 ci-dessus, qui aurait vocation à être pourvu par un fonctionnaire.
87 Par ailleurs, si le statut prévoit en faveur des fonctionnaires, en son article 41, un régime de disponibilité pour le fonctionnaire touché par une mesure de réduction du nombre des emplois dans son institution, prévoyant, notamment, le droit de priorité, pendant une durée de deux ans à compter de la mise en disponibilité, pour être réintégré dans tout emploi du groupe de fonctions dudit fonctionnaire correspondant à son grade, qui deviendrait vacant ou viendrait à être créé, sous réserve qu’il possède les aptitudes requises, le RAA ne prévoit aucun mécanisme analogue pour les agents temporaires. Pourtant, en l’espèce, c’est un droit de priorité similaire que le Tribunal de la fonction publique a défini en faveur des agents temporaires.
88 Force est donc de constater que le Tribunal de la fonction publique, par l’obligation qu’il a définie aux points 59 et 62 de l’arrêt attaqué, a modifié la nature de l’emploi d’agent temporaire telle qu’elle est définie par le RAA.
89 Reste d’ailleurs sans incidence à cet égard le fait que, ainsi que Mme Schuerings l’avance, son contrat de travail ne spécifiait pas qu’elle était engagée pour une fonction relevant spécifiquement de la gestion du programme Tempus, car il n’en demeure pas moins qu’elle avait été engagée en tant qu’agent temporaire et non en tant que fonctionnaire.
90 Il y a toutefois encore lieu de vérifier si l’interprétation extensive des articles 2 et 47 du RAA à laquelle a procédé le Tribunal de la fonction publique pourrait se justifier compte tenu de l’obligation de l’AHCC de respecter le devoir de sollicitude.
91 En effet, même si l’AHCC dispose d’une large marge d’appréciation dans l’application de l’article 47, sous c), i), du RAA, comme le Tribunal de la fonction publique l’a rappelé à juste titre au point 58 de l’arrêt attaqué, afin de déterminer si une circonstance ou un fait particulier justifie le licenciement d’un agent sous contrat à durée indéterminée, l’autorité compétente doit tenir compte de l’intérêt du service, mais également, pour satisfaire à son devoir de sollicitude, de l’intérêt de l’agent concerné. À cet égard, même s’il est vrai que l’autorité compétente dispose d’un large pouvoir d’appréciation dans l’évaluation de l’intérêt du service et que, partant, le contrôle du juge de l’Union doit se limiter à la question de savoir si l’autorité concernée s’est tenue dans des limites raisonnables et n’a pas usé de son pouvoir d’appréciation de manière manifestement erronée, lorsqu’elle statue à propos de la situation d’un agent, le devoir de sollicitude, qui reflète l’équilibre des droits et des obligations réciproques entre l’autorité publique et ses agents, impose de prendre en considération l’ensemble des éléments qui sont susceptibles de déterminer sa décision, et notamment, l’intérêt de l’agent concerné (arrêt ETF/Landgren, point 76 supra, points 215 et 216).
92 En l’espèce, force est de constater que le Tribunal de la fonction publique a d’abord correctement rappelé cette jurisprudence au point 58 de l’arrêt attaqué en indiquant que le respect du devoir de sollicitude obligeait l’autorité compétente à tenir compte à la fois de l’intérêt du service et de celui de l’agent.
93 Toutefois, par la suite, ainsi qu’il résulte du passage de l’arrêt attaqué cité au point 80 ci-dessus, le Tribunal de la fonction publique a procédé à la mise en balance de l’intérêt du service et de celui de l’agent seulement après avoir défini préalablement l’obligation d’examen préalable de la possibilité de réaffectation de ce dernier. Il a indiqué, notamment, que c’était lors de la mise en œuvre de cet examen qu’il fallait mettre en balance l’intérêt du service, lequel commandait de recruter la personne la plus apte pour le poste existant ou devant être créé prochainement, et celui de l’agent. Ledit Tribunal n’a donc pas pris en compte l’intérêt du service quand il a formulé, au point 59 de l’arrêt attaqué, le principe selon lequel la réduction du périmètre des activités d’une agence ne constituait un motif valable de licenciement que si ladite agence ne disposait pas de poste auquel l’agent concerné aurait pu être réaffecté.
94 Cependant, contrairement à ce qu’a considéré le Tribunal de la fonction publique aux points 60 et 61 de l’arrêt attaqué et à ce que fait valoir Mme Schuerings, l’existence de procédures internes de sélection particulières à l’agence concernée, s’appliquant en cas de vacances d’emploi ou en cas de mutations internes, peut être un élément de politique de gestion de personnel particulièrement adapté à la nature spécialisée des tâches attribuées à l’agence, amenant celle-ci, dans l’intérêt du service, à renvoyer l’agent touché par une réduction d’activité à la participation à de telles procédures pour trouver un nouvel emploi en son sein. Par ailleurs, l’encadrement dudit agent pour l’aider à trouver un nouvel emploi au sein de l’agence en suivant lesdites procédures de sélection standard peut participer à la prise en compte de l’intérêt de l’agent concerné et, donc, au respect du devoir de sollicitude.
95 À cet égard, la question de savoir dans quelles circonstances l’AHCC a la possibilité de procéder à une réaffectation, relevée au point 60 de l’arrêt attaqué, doit être distinguée de celle de savoir s’il existe, dans un cas comme celui de l’espèce, une obligation de procéder à l’examen de la possibilité de réaffectation.
96 De même, peut également être un élément pertinent dans la mise en balance de l’intérêt de l’agent et de celui du service, le fait que l’autorité compétente a examiné les possibilités d’un transfert de l’agent menacé de licenciement au sein d’une autre agence ou institution. À cet égard, le Tribunal de la fonction publique a insuffisamment tenu compte d’éventuels efforts entrepris par l’ETF pour obtenir le transfert à l’EACEA du personnel menacé de licenciement, tels que relevés, notamment, au point 48 de l’arrêt attaqué.
97 Par ailleurs, s’agissant des spécificités des agences de l’Union, le Tribunal de la fonction publique s’est limité, au point 64 de l’arrêt attaqué, à émettre des réserves s’agissant de l’argument de l’ETF tiré de ses contraintes budgétaires en constatant qu’elle avait néanmoins procédé à de nombreuses mutations et au recrutement de plusieurs agents temporaires entre la date à laquelle elle avait été informée de la décision de la Commission de transférer l’activité en cause relative au programme Tempus à l’EACEA et celle de la prise d’effet de la décision de résiliation. Ainsi, ledit Tribunal a fait abstraction du contexte particulier dans le cadre duquel les agences de l’Union opèrent généralement. Comme avancé par l’ETF et plusieurs intervenants, ces agences ne peuvent pas recruter des fonctionnaires, disposent d’un nombre limité de personnel et ont une mission spécifique, impliquant souvent le recrutement de spécialistes, circonstance qui peut rendre particulièrement pertinent le recours à des procédures mettant en concurrence plusieurs candidats pour des emplois non pourvus ou nouvellement créés. Ainsi, l’ETF a notamment fait valoir que la gestion du programme Tempus ne faisait pas partie de ses tâches habituelles.
98 Il en résulte que, dans la mise en balance de l’intérêt du service et de celui de l’agent temporaire menacé de licenciement, le Tribunal de la fonction publique a privilégié l’intérêt dudit agent au détriment de celui de l’ETF et a, ainsi, interprété de manière erronée le devoir de sollicitude qui s’imposait à ladite agence ainsi que la notion d’intérêt du service. Le respect dudit devoir ne pouvait donc pas justifier l’interprétation extensive des articles 2 et 47 du RAA relevée ci-dessus.
99 Par ailleurs, à titre surabondant, une telle interprétation ne saurait pas non plus, contrairement à ce que soutient Mme Schuerings, être fondée sur l’article 30 de la charte des droits fondamentaux, à laquelle l’article 6, paragraphe 1, TUE reconnaît la même valeur juridique que les traités (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 22 novembre 2011, KHS, C‑214/10, Rec. p. I‑11757, point 37 ; du 3 mai 2012, Neidel, C‑337/10, point 40, et du 21 juin 2012, ANGED, C‑78/11, point 17). Cette disposition précise que tout travailleur a droit à une protection contre tout licenciement injustifié, conformément au droit de l’Union et aux législations et pratiques nationales.
100 En effet, il y a lieu de relever que l’article 30 de la charte des droits fondamentaux ne définit pas d’obligations précises. Il ne saurait en être déduit qu’il existe nécessairement pour l’ETF, dans un cas comme celui de l’espèce, une obligation préalable d’examiner la possibilité de réaffectation de l’agent telle que celle définie par le Tribunal de la fonction publique. Cette disposition n’implique pas non plus que, compte tenu de toutes les circonstances factuelles de l’espèce, la décision de résiliation ne puisse pas être considérée comme étant justifiée. À cet égard, les contraintes opérationnelles particulières caractérisant les agences, l’existence de mesures d’accompagnement en faveur de l’agent menacé de licenciement ou l’examen des possibilités de son transfert au sein d’une autre agence ou institution peuvent, notamment, être considérés comme étant des circonstances pertinentes.
101 S’agissant, également à titre surabondant, des instruments juridiques relevant du droit du travail invoqués par Mme Schuerings, il convient de relever que l’article 4 de la convention nº 158 de l’Organisation internationale du travail concernant la cessation de la relation de travail à l’initiative de l’employeur, adoptée le 22 juin 1982, indique qu’« [u]n travailleur ne devra pas être licencié sans qu’il existe un motif valable de licenciement lié à l’aptitude ou à la conduite du travailleur ou fondé sur les nécessités du fonctionnement de l’entreprise, de l’établissement ou du service », et que l’article 24, sous a), de la charte sociale européenne, signée à Turin le 18 octobre 1961, telle que révisée, garantit « le droit des travailleurs à ne pas être licenciés sans motif valable lié à leur aptitude ou conduite, ou fondé sur les nécessités de fonctionnement de l’entreprise, de l’établissement ou du service ». Sans qu’il y ait lieu de trancher la question de savoir si ces instruments juridiques s’appliquent à la relation de travail, régie par le RAA, entre un agent temporaire et une agence de l’Union, il y a lieu de considérer que l’existence d’une obligation telle que celle mise à la charge de l’entité confrontée au transfert d’une de ses activités à une autre entité, comme c’est le cas pour l’ETF en l’espèce, ne peut pas non plus nécessairement être déduite du libellé des textes précités.
102 Enfin, en retenant une interprétation trop large du devoir de sollicitude qui s’impose à l’agence en cause en l’espèce et en formulant à son égard une obligation non prévue dans le RAA qui, de surcroît a, notamment d’un point de vue temporel, des contours flous, le Tribunal de la fonction publique n’a pas respecté les limites de ses compétences telles que rappelées au point 76 ci-dessus, qui consistent à examiner si l’autorité concernée s’est tenue dans des limites raisonnables et n’a pas usé de son pouvoir d’appréciation de manière manifestement erronée, et il a commis une erreur de droit justifiant l’annulation de l’arrêt attaqué. En effet, ainsi que la Commission le fait valoir à juste titre, en écartant d’emblée comme non pertinents, aux points 60 et 61 de l’arrêt attaqué, d’une part, certains arguments avancés par l’ETF en première instance dont, notamment, des considérations relatives à l’existence en son sein de règles internes prévoyant des procédures particulières de sélection en cas de vacance d’emploi pour les mutations internes des agents et, d’autre part, des arguments de l’ETF concernant les mesures d’accompagnement qu’elle avait prévues pour les agents temporaires concernés par le transfert des activités du programme Tempus ainsi que de ceux, mentionnés au point 65 de l’arrêt attaqué, relatifs à l’absence d’initiative concrète de Mme Schuerings pour trouver un autre emploi par le biais des procédures standard de sélection pour les postes vacants au sein de l’ETF, le Tribunal de la fonction publique a vérifié non pas si l’autorité compétente s’était tenue, dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation, dans des limites raisonnables, mais bien si elle n’avait absolument aucune autre possibilité que le licenciement.
103 Or, pour rester dans le cadre fixé par la jurisprudence, le Tribunal de la fonction publique aurait dû examiner si, compte tenu des termes du contrat d’engagement de Mme Schuerings, des dispositions du RAA applicables et de toutes les autres circonstances factuelles de l’espèce, dont, notamment, le transfert du programme Tempus, l’ancienneté de Mme Schuerings, ses compétences et les mesures d’accompagnement prévues par l’ETF, cette dernière n’avait pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en résiliant ledit contrat d’engagement dans le respect de son devoir de sollicitude.
104 Il résulte de tout ce qui précède qu’il y a lieu d’accueillir, d’une part, le premier moyen en ses première, deuxième, troisième et cinquième branches et, d’autre part, la quatrième branche du troisième moyen.
105 Dès lors, sans qu’il y ait lieu d’examiner ni la quatrième branche du premier moyen, ni les deuxième et quatrième moyens ni, par ailleurs, les deuxième et troisième branches du troisième moyen, l’arrêt attaqué doit être annulé pour autant qu’il a annulé la décision de résiliation et rejeté, par conséquent, la demande en réparation du préjudice matériel subi comme étant prématurée.
Sur les conséquences de l’annulation de l’arrêt attaqué
106 Conformément à l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe I du statut de la Cour, lorsque le pourvoi est fondé, le Tribunal annule la décision du Tribunal de la fonction publique et statue lui-même sur le litige. Il renvoie l’affaire devant le Tribunal de la fonction publique pour qu’il statue lorsque le litige n’est pas en état d’être jugé.
107 Il y a lieu de rappeler que le Tribunal a accueilli le premier moyen du pourvoi de l’ETF en ses première, deuxième, troisième et cinquième branches ainsi que la quatrième branche du troisième moyen au motif que l’appréciation du Tribunal de la fonction publique exposée, notamment, aux points 58 à 66 de l’arrêt attaqué, était entachée d’erreurs de droit. Or, étant donné que le Tribunal de la fonction publique a seulement examiné le grief tiré de la validité du motif de licenciement, sous-jacent, notamment, au deuxième moyen invoqué par Mme Schuerings devant lui, sans examiner les autres moyens de la requête en première instance, le Tribunal considère qu’il n’est pas en mesure de juger l’affaire. Dès lors, il y a lieu de renvoyer cette dernière devant le Tribunal de la fonction publique pour qu’il statue sur les conclusions de l’intéressée tendant à l’annulation de la décision litigieuse (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 18 juillet 2007, AER/Karatzoglou, C‑213/06 P, Rec. p. I‑6733, point 47) ainsi que sur la demande de réparation du préjudice matériel subi, en ce qu’elle repose sur celle-ci, et de réserver les dépens.
Sur les dépens
108 L’affaire étant renvoyée devant le Tribunal de la fonction publique, il convient de réserver les dépens afférents à la présente procédure de pourvoi.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (chambre des pourvois)
déclare et arrête :
1) L’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (deuxième chambre) du 9 décembre 2010, Schuerings/ETF (F‑87/08), est annulé en ce qu’il a annulé la décision de la Fondation européenne pour la formation (ETF) du 23 octobre 2007 portant résiliation du contrat d’agent temporaire à durée indéterminée de Mme Gisela Schuerings et a rejeté, par conséquent, sa demande de réparation du préjudice matériel subi comme étant prématurée.
2) Le pourvoi est rejeté pour le surplus.
3) L’affaire est renvoyée devant le Tribunal de la fonction publique.
4) Les dépens sont réservés.
Jaeger |
Czúcz |
Papasavvas |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 4 décembre 2013.
Signatures
* Langue de procédure : le français.