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Document 62014FJ0112

Civildienesta tiesas (pirmā palāta) spriedums, 2015. gada 16. jūlijs.
EJ u.c. pret Eiropas Komisiju.
Civildienests – Ierēdņi – Civildienesta noteikumu reforma – Regula Nr. 1023/2013 – Amatu veidi – Pārejas noteikumi attiecībā uz klasificēšanu amatu veidos – Civildienesta noteikumu XIII pielikuma 30. panta 2. punkts – Komisijas juridiskā dienesta AD 13 pakāpes administratori juristi – “Juridisko padomdevēju” un “juridiskā dienesta darbinieku” situācija – Piekļuves AD 13 pakāpei kārtība atbilstoši 2004. gada Civildienesta noteikumiem – Paaugstināšana amatā atbilstoši Civildienesta noteikumu 45. pantam – Iecelšana amatā, piemērojot Civildienesta noteikumu 29. panta 1. punktu – Klasificēšana amata veidos “padomdevējs vai līdzvērtīgs amats” un “administrators pārejas posmā” – Nelabvēlīgs akts – “Atbildības par būtiskiem jautājumiem” jēdziens – “Īpašu pilnvaru” jēdziens – Vienlīdzīga attieksme – Tiesības tikt paaugstinātiem amatā AD 14 pakāpē – Tiesiskā paļāvība – Tiesiskās drošības princips.
Lieta F-112/14.

ECLI identifier: ECLI:EU:F:2015:90

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE DE L’UNION EUROPÉENNE (première chambre)

16 juillet 2015 ( *1 )

«Fonction publique — Fonctionnaires — Réforme du statut — Règlement no 1023/2013 — Emplois types — Règles transitoires relatives au classement dans les emplois types — Article 30, paragraphe 2, de l’annexe XIII du statut — Administrateurs juristes de grade AD 13 du service juridique de la Commission — Situation des ‘conseillers juridiques’ et des ‘membres du service juridique’ — Modalités d’accès au grade AD 13 sous l’empire du statut de 2004 — Promotion au titre de l’article 45 du statut — Nomination en application de l’article 29, paragraphe 1, du statut — Classement dans les emplois types ‘conseiller ou équivalent’ et ‘administrateur en transition’ — Acte faisant grief — Notion de ‘responsabilités importantes’ — Notion de ‘responsabilités particulières’ — Égalité de traitement — Vocation à la promotion au grade AD 14 — Confiance légitime — Principe de sécurité juridique»

Dans l’affaire F‑112/14,

ayant pour objet un recours introduit au titre de l’article 270 TFUE, applicable au traité CEEA en vertu de son article 106 bis,

EJ, fonctionnaire de la Commission européenne, demeurant à Bruxelles (Belgique), et les autres requérants dont les noms anonymisés figurent en annexe, représentés par Me S. Orlandi, avocat,

parties requérantes,

contre

Commission européenne, représentée par M. J. Currall, Mme C. Ehrbar et M. G. Gattinara, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

Conseil de l’Union européenne, représenté par M. M. Bauer et Mme M. Veiga, en qualité d’agents,

partie intervenante,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE (première chambre),

composé de MM. R. Barents, président, E. Perillo et J. Svenningsen (rapporteur), juges,

greffier : Mme X. Lopez Bancalari, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 9 juin 2015,

rend le présent

Arrêt

1

Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 17 octobre 2014, EJ et les 19 autres requérants dont les noms anonymisés figurent en annexe demandent en substance l’annulation des décisions individuelles qui ont été adoptées, selon eux, postérieurement à l’entrée en vigueur, le 1er janvier 2014, du règlement (UE, Euratom) no 1023/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2013, modifiant le statut des fonctionnaires de l’Union européenne et le régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (JO L 287, p. 15), par l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») de la Commission européenne et qui les classent dans l’emploi intitulé, au sein de la Commission, « administrateur principal en transition » correspondant à l’emploi type « administrateur en transition » tel qu’introduit par le règlement susmentionné.

Cadre juridique

Dispositions pertinentes de l’ancien statut

2

Il résulte de l’article 5 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, dans sa version applicable jusqu’à l’entrée en vigueur du règlement (CE, Euratom) no 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004, modifiant le statut des fonctionnaires des Communautés européennes ainsi que le régime applicable aux autres agents de ces Communautés (ci-après l’« ancien statut »), ainsi que de l’annexe I dudit statut, établissant le tableau de correspondance entre les emplois types et les carrières visé audit article 5, que, à cette époque, la catégorie d’emploi des administrateurs (catégorie A) comportait, notamment, des « administrateur[s] principa[ux] », des « administrateur[s] » et des « administrateur[s] adjoint[s] », lesquels évoluaient dans leur carrière entre les grades A 8 et A 4, ce qui correspond, respectivement, aux grades actuels AD 7 à AD 12.

Dispositions pertinentes du statut de 2004

3

L’article 5 du statut des fonctionnaires de l’Union européenne dans sa version applicable du 1er mai 2004 au 31 décembre 2013 (ci-après le « statut de 2004 ») prévoyait :

« 1.   Les emplois relevant du présent statut sont classés, suivant la nature et le niveau des fonctions auxquelles ils correspondent, en un groupe de fonctions des administrateurs (ci-après dénommés ‘AD’) et un groupe de fonctions des assistants (ci-après dénommés ‘AST’).

[…]

4.   Un tableau descriptif des différents emploi[s t]ypes figure à l’annexe I, section A. Sur la base de ce tableau, chaque institution arrête, après avis du comité du statut, la description des fonctions et attributions associées à chaque emploi type.

5.   Les fonctionnaires appartenant au même groupe de fonctions sont soumis à des conditions identiques de recrutement et de déroulement de carrière. »

4

Au tableau descriptif figurant à l’annexe I, section A, du statut de 2004, visé à l’article 5 dudit statut, il était indiqué que les administrateurs (AD) de grade AD 13 exerçaient « par exemple » les fonctions de « chef d’unité/conseiller/expert linguiste ; expert économique ; expert juridique […] ». S’agissant des administrateurs de grade AD 14, il était précisé qu’ils exerçaient « par exemple » les fonctions de « [d]irecteur/chef d’unité/conseiller/expert linguiste ; expert économique ; expert juridique […] ». Il ressort également dudit tableau que, s’agissant des juristes, les administrateurs de grade AD 12 étaient désignés en tant que « juriste[s] principa[ux] ».

5

Il ressort de l’annexe I, section A, du statut de 2004 que, d’une part, les administrateurs pouvaient progresser du grade AD 5 au grade AD 14 par promotion en vertu de l’article 45 dudit statut et, d’autre part, que la fonction de « conseiller » était associée à des emplois d’administrateurs de grade AD 13 et de grade AD 14. En outre, sous l’empire du statut de 2004, le fonctionnaire occupant un tel poste ou un poste équivalent de grade AD 13 avait vocation à la promotion au grade AD 14 en vertu de l’article 45 dudit statut.

6

L’article 45, paragraphe 1, du statut de 2004 disposait :

« La promotion est attribuée par décision de l’[AIPN] en considération de l’article 6, paragraphe 2[, du statut de 2004]. Elle entraîne pour le fonctionnaire la nomination au grade supérieur du groupe de fonctions auquel il appartient. Elle se fait exclusivement au choix, parmi les fonctionnaires justifiant d’un minimum de deux ans d’ancienneté dans leur grade, après examen comparatif des mérites des fonctionnaires ayant vocation à la promotion. […] »

Dispositions pertinentes du nouveau statut

7

Le règlement no 1023/2013 est entré en vigueur le 1er janvier 2014. Les considérants 17, 18 et 19 de ce règlement se lisent comme suit :

« (17)

Le Conseil [de l’Union européenne] a demandé à la Commission de réaliser une étude et de présenter des propositions appropriées concernant l’article 5, paragraphe 4, l’annexe I, section A, et l’article 45, paragraphe 1, du statut [de 2004], afin que soit établi un lien clair entre les responsabilités et le grade et que l’accent soit davantage mis sur le niveau de responsabilités lors de la comparaison des mérites dans le cadre de la promotion.

(18)

Compte tenu de cette demande, il convient de faire en sorte que la promotion à un grade plus élevé soit subordonnée à l’implication personnelle, à l’amélioration des qualifications et des compétences, ainsi qu’à l’exercice de fonctions dont l’importance justifie la nomination du fonctionnaire à ce grade supérieur.

(19)

Le parcours de carrière dans les groupes de fonctions [des administrateurs (AD)] et [des assistants (AST)] devrait être restructuré de telle sorte que les grades les plus élevés soient réservés à un nombre limité de fonctionnaires exerçant des responsabilités au plus haut niveau. Dès lors, les administrateurs peuvent progresser uniquement jusqu’au grade AD 12, sauf s’ils sont nommés à un poste spécifique d’un grade supérieur, et les grades AD 13 et AD 14 devraient être réservés au personnel exerçant un rôle comportant des responsabilités importantes. De la même manière, les fonctionnaires de grade AST 9 ne peuvent être promus au grade AST 10 que conformément à la procédure prévue [aux] article[s] 4 et […] 29, paragraphe 1, du statut. »

8

L’article 5, paragraphes 4 et 5, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne, dans sa version applicable à partir du 1er janvier 2014 (ci-après le « nouveau statut » ou le « statut »), dispose :

« 4.   Un tableau descriptif des différents emploi[s t]ypes figure à l’annexe I, section A[, du nouveau statut]. Sur la base de ce tableau, l’[AIPN] de chaque institution peut, après avis du comité du statut, décrire plus en détail les fonctions et attributions associées à chaque emploi type.

5.   Les fonctionnaires appartenant au même groupe de fonctions sont soumis à des conditions identiques de recrutement et de déroulement de carrière. »

9

Il ressort du point 1 de l’annexe I, section A, intitulée « Emplois types dans chaque groupe de fonctions visés à l’article 5, paragraphe 4 », du nouveau statut que, s’agissant du groupe de fonctions AD :

les fonctionnaires nouvellement recrutés sur l’emploi type « administrateur » peuvent progresser du grade AD 5 au grade AD 12 ;

les fonctionnaires nouvellement recrutés sur l’emploi type « chef d’unité ou équivalent » peuvent progresser du grade AD 9 au grade AD 14 ; et

les fonctionnaires nouvellement recrutés sur l’emploi type « conseiller ou équivalent » peuvent progresser du grade AD 13 au grade AD 14.

10

Dans le cadre des mesures transitoires faisant l’objet de l’annexe XIII du nouveau statut, l’article 30 de ladite annexe dispose en son paragraphe 1 :

« Par dérogation à l’annexe I, section A, point [1], le tableau suivant des emplois types dans le groupe de fonctions AD s’applique aux fonctionnaires en service au 31 décembre 2013 :

[…]

[…]

Chef d’unité ou équivalent

AD 9 – AD 14

Conseiller ou équivalent

AD 13 – AD 14

Administrateur confirmé en transition

AD 14

Administrateur en transition

AD 13

Administrateur

AD 5 – AD 12

»

11

Les paragraphes 2, 3 et 4 de l’article 30 de l’annexe XIII du nouveau statut se lisent comme suit :

« 2.   Avec effet au 1er janvier 2014, l’[AIPN] classe les fonctionnaires en service au 31 décembre 2013 au sein du groupe de fonctions AD dans les emplois types suivants :

[…]

b)

le fonctionnaire de grade AD 13 au 31 décembre 2013 et qui n’était pas [‘]chef d’unité ou équivalent[’] ou encore [‘]conseiller ou équivalent[’] est classé dans l’emploi type [‘]administrateur en transition[’] ;

c)

le fonctionnaire des grades AD 9 à AD 14 au 31 décembre 2013 et qui était [‘]chef d’unité ou équivalent[’] est classé dans l’emploi type [‘]chef d’unité ou équivalent[’] ;

d)

le fonctionnaire de grade AD 13 ou AD 14 au 31 décembre 2013 et qui était [‘]conseiller ou équivalent[’] est classé dans l’emploi type [‘]conseiller ou équivalent[’] ;

e)

le fonctionnaire des grades AD 5 à AD 12 au 31 décembre 2013 et qui n’était pas [‘]chef d’unité ou équivalent[’] est classé dans l’emploi type [‘]administrateur[’].

3.   Par dérogation au paragraphe 2, le fonctionnaire des grades AD 9 à AD 14 investi de responsabilités particulières peut être classé, avant le 31 décembre 2015, par l’[AIPN] dans l’emploi type ‘chef d’unité ou équivalent’ ou ‘conseiller ou équivalent’. Chaque [AIPN] arrête les dispositions d’exécution du présent article. Toutefois, le nombre total de fonctionnaires bénéficiant de la présente disposition n’excède pas 5 % des fonctionnaires du groupe de fonctions AD au 31 décembre 2013.

4.   Le classement dans un emploi type est valide jusqu’à ce que le fonctionnaire soit affecté à une nouvelle fonction correspondant à un autre emploi type. »

Dispositions relatives, d’une part, à la promotion et, d’autre part, à la nomination sur un emploi de grade supérieur d’un fonctionnaire promouvable

12

L’article 45, paragraphe 1, du nouveau statut prévoit :

« La promotion est attribuée par décision de l’[AIPN] en considération de l’article 6, paragraphe 2[, du nouveau statut]. À moins que la procédure prévue [aux] article[s] 4 et […] 29, paragraphe 1, [du nouveau statut] ne s’applique, les fonctionnaires ne peuvent être promus que s’ils occupent un emploi qui correspond à l’un des emplois types indiqués à l’annexe I, section A, [du nouveau statut] pour le grade immédiatement supérieur. La promotion entraîne pour le fonctionnaire la nomination au grade supérieur du groupe de fonctions auquel il appartient. […] »

13

L’article 29 du nouveau statut, en substance analogue sur ces points à celui du statut de 2004 et de l’ancien statut, prévoit, d’une part, en son paragraphe 1, que, en vue de pourvoir aux vacances d’emploi dans une institution, l’AIPN de cette dernière n’ouvre la procédure de concours sur titres, sur épreuves ou sur titres et épreuves qu’après avoir examiné les possibilités de pourvoir l’emploi concerné par voie de mutation, de nomination conformément à l’article 45 bis du statut ou de promotion au sein de l’institution. D’autre part, il prévoit, en son paragraphe 2, qu’« [u]ne procédure de recrutement autre que celle du concours peut être adoptée par l’[AIPN] pour le recrutement du personnel d’encadrement supérieur (les directeurs généraux ou leurs équivalents aux grades AD 16 ou [AD] 15 et les directeurs ou leurs équivalents aux grades AD 15 ou [AD] 14), ainsi que, dans des cas exceptionnels, pour des emplois nécessitant des qualifications spéciales ».

Décision de la Commission du 16 décembre 2013 relative aux emplois types et aux intitulés d’emploi

14

Dans sa décision C(2013) 8979 final, du 16 décembre 2013, entrée en vigueur le 1er janvier 2014, relative aux emplois types et aux intitulés d’emploi, publiée aux Informations administratives no 70‑2013 du 19 décembre 2013 (ci-après la « décision sur les emplois types »), la Commission, faisant usage de la faculté prévue à l’article 5, paragraphe 4, seconde phrase, du nouveau statut, a adopté des tableaux établissant la correspondance entre les emplois types et les « intitulés d’emploi utilisés pour les fonctionnaires de la Commission ». Dans le tableau B, intitulé « Emplois types transitoires » et figurant à l’annexe de cette décision, il est indiqué que l’emploi type « administrateur en transition » correspond à « l’intitulé d’emploi utilisé pour les fonctionnaires de la Commission » d’« administrateur principal en transition ». Il ressort également du tableau A de l’annexe de la décision sur les emplois types que les intitulés d’emploi « conseiller » et « expert confirmé » correspondent à l’emploi type statutaire « conseiller ou équivalent ».

Décision de la Commission du 16 décembre 2013 portant dispositions générales d’exécution de l’article 45 du nouveau statut

15

La décision C(2013) 8968 final de la Commission, du 16 décembre 2013, portant dispositions générales d’exécution de l’article 45 du nouveau statut, publiée aux Informations administratives no 55‑2013 du 19 décembre 2013 (ci-après les « DGE de l’article 45 »), prévoit en son article 1er :

« 1.   Les [DGE de l’article 45] s’appliquent à la promotion des fonctionnaires, à l’exception des fonctionnaires d’un grade supérieur [au grade] AD 13.

2.   Elles ne s’appliquent pas aux promotions décidées en application de l’article 29, paragraphe 1, [sous] a), iii), du [nouveau] statut. »

16

L’article 3 des DGE de l’article 45 dispose :

« Un fonctionnaire peut faire l’objet d’une décision de promotion si, de façon cumulative :

il a acquis, au plus tard le 31 décembre de l’année de l’exercice de promotion, le minimum d’ancienneté dans le grade requis par l’article 45, paragraphe 1, du [nouveau] statut ;

au moment du lancement de l’exercice [annuel] de promotion en vertu de l’article 2, paragraphe 2, [des DGE de l’article 45], il occupe un emploi qui correspond à l’un des emplois types pour le grade auquel il est susceptible d’être promu, indiqués à l’annexe I, section A, [du nouveau statut,] à l’article 30, paragraphe 1, […] de l’annexe XIII du [nouveau] statut ;

[…] »

Décision de la Commission du 18 décembre 2013

17

Par la décision SEC(2013) 691, du 18 décembre 2013, adoptée par procédure orale (ci-après la « décision du 18 décembre 2013 »), la Commission a, faisant suite à une communication de son président, modifié comme suit, avec effet au 1er janvier 2014, les règles relatives à la composition des cabinets des membres de la Commission et au service du porte-parole :

« Type de poste : les fonctionnaires de la Commission de grades AD 9 à AD 14 (à l’exception des fonctionnaires occupant un poste correspondant à [l’emploi type ‘directeur’]) et détachés au sein de la Commission […] conformément au second tiret de l’article 37, [sous] a), du statut […] occupent, durant la période de leur détachement, un poste correspondant à [l’emploi type] ‘chef d’unité ou équivalent’ dans leur carrière de base. […] »

Faits à l’origine du litige

18

Les requérants, fonctionnaires de grade AD 13, sont affectés au service juridique de la Commission (ci-après le « service juridique »), lequel est rattaché au collège des commissaires et relève de l’autorité hiérarchique du président de la Commission, et y exercent les fonctions de juristes. Ce service ne connaît pas, du moins en ce qui concerne le traitement des questions juridiques de fond et abstraction faite des juristes réviseurs ou linguistes, une structure caractérisée par la présence d’unités et, par conséquent, aucun juriste de grade AD 13, tels les requérants, n’exerce stricto sensu une fonction d’encadrement.

19

Les juristes de grade AD 13 du service juridique, en charge des questions juridiques de fond, sont dénommés, selon une terminologie propre à la Commission, soit « conseillers juridiques », soit « membres du service juridique ».

20

Les juristes dénommés « conseillers juridiques » ont été nommés et ont concomitamment obtenu leur grade AD 13 à la suite d’une procédure, dite du « panel », fondée sur un avis de vacance publié en application des articles 4 et 29, paragraphe 1, sous a), du statut de 2004 et menée conformément à la décision C(2008) 5028/2 de la Commission du 9 septembre 2008 sur l’encadrement intermédiaire. En l’occurrence, ainsi que l’a confirmé la Commission, les actuels « conseillers juridiques » étaient tous, à l’exception de l’un d’entre eux, fonctionnaires de grade AD 12 au sein du service juridique et promouvables au grade AD 13 avant leur nomination, en ce sens qu’ils avaient déjà deux années d’ancienneté dans le grade AD 12. En d’autres termes, ils ont été promus au grade AD 13 concomitamment et, pour les besoins de leur nomination, sur les emplois vacants au grade AD 13 ayant fait l’objet d’avis de vacance, et ce en application conjointe de l’article 29, paragraphe 1, et de l’article 45 du statut de 2004 appelée « nomination promotion ». La seule exception concerne un membre du service juridique qui était déjà classé au grade AD 13 et qui aurait également obtenu de cette manière le statut de « conseiller juridique », au même grade, lui permettant, postérieurement à l’entrée en vigueur de la réforme issue du règlement no 1023/2013, de conserver une vocation à la promotion au grade AD 14.

21

En revanche, les juristes AD 13 dénommés « membres du service juridique », tels que les requérants, sont des fonctionnaires qui ont été promus à ce grade AD 13 par promotion depuis le grade AD 12, et ce uniquement en vertu de l’article 45, paragraphe 1, du statut de 2004.

22

Selon les requérants, la seule distinction entre ces deux groupes de juristes, tous affectés au service juridique, exerçant les mêmes fonctions et investis des mêmes responsabilités, est finalement la voie statutaire par laquelle ils ont obtenu leur classement au grade AD 13. Dans ses écrits et lors de l’audience, la Commission a concédé que tel était effectivement le cas.

23

À ce jour, les responsabilités de tous les fonctionnaires de grade AD 13 du service juridique, ayant accédé à ces emplois sous l’empire de l’ancien statut ou de celui de 2004, sont ainsi les mêmes, comme le confirme d’ailleurs une comparaison des descriptions de poste des « conseillers juridiques » et des « membres du service juridique » que les requérants ont jointes au dossier.

24

Avec effet au 1er janvier 2014 et conformément à l’article 30, paragraphe 2, de l’annexe XIII du nouveau statut, l’AIPN devait classer tous les fonctionnaires du groupe de fonctions AD, en service à la Commission au 31 décembre 2013, dans les différents emplois types énumérés à ladite disposition et prévus à l’article 30, paragraphe 1, de cette annexe.

25

Par lettre du 9 décembre 2013, ayant constaté que, en application de l’article 30, paragraphe 2, sous b), de l’annexe XIII du statut, un fonctionnaire de grade AD 13, qui, au 31 décembre 2013, n’était ni « chef d’unité ou équivalent » ni « conseiller ou équivalent », allait être classé dans l’emploi type « administrateur en transition », les requérants, à l’exception de deux d’entre eux, ont décidé, avec trois autres de leurs collègues qui ne sont pas partie à la cause, d’attirer l’attention du chef du service juridique sur le fait que leur situation statutaire pourrait être négativement affectée, car, à défaut de considérer leur emploi de « membre du service juridique » de grade AD 13 comme étant équivalent à l’emploi de « conseiller » de grade AD 13, l’article 30, paragraphe 2, sous b), de l’annexe XIII du statut s’appliquerait à leur cas, de sorte qu’ils seraient classés dans l’emploi type résiduel « administrateur en transition » dont la carrière est, ipso jure, bloquée au grade AD 13, sans possibilité d’obtenir de promotion au grade AD 14 en vertu de l’article 45 du nouveau statut.

26

Par la suite, à une date indéterminée, mais postérieure à la décision sur les emplois types, l’administration a modifié, dans le système informatique de gestion du personnel dénommé « SysPer 2 » (ci-après « SysPer 2 »), les dossiers individuels des requérants en y indiquant, dans l’onglet « Carrière », la mention suivante :

« Emploi type de la personne : [a]dministrateur principal en transition. »

27

Les requérants ont pris connaissance de la modification intervenue dans leurs dossiers individuels informatisés à une date indéterminée, mais postérieure au 1er janvier 2014.

28

Le 11 mars 2014, les requérants ont, sur le fondement de l’article 90, paragraphe 2, du statut, présenté des réclamations formulées à l’identique contre « l[es] décision[s] de l’[AIPN], résultant de la page ‘Historique de carrière – Résumé’ du site [SysPer 2,] de [les] classer, à partir du 1er janvier 2014, comme ‘administrateur[s] principa[ux] en transition’ sur la base de l’article 30, paragraphe 2, [sous] b), de l’annexe XIII du [nouveau statut] ». L’adjectif qualificatif « principa[ux] » y était souligné. À l’appui de leurs réclamations, ils faisaient valoir, à titre principal, que, du fait des décisions contestées, ils faisaient l’objet d’un traitement discriminatoire injustifié par rapport à leurs collègues « conseillers juridiques » de grade AD 13 au sein du service juridique qui, eux, avaient conservé leur vocation à la promotion au grade AD 14 postérieurement au 1er janvier 2014. À titre subsidiaire, ils invoquaient l’illégalité de l’article 30, paragraphe 2, sous b), de l’annexe XIII du nouveau statut en ce que, en méconnaissance du principe d’égalité de traitement, du principe de la confiance légitime et de l’obligation de motivation, le législateur de l’Union européenne avait décidé que tous « le[s] fonctionnaire[s] de grade AD 13 au 31 décembre 2013 et qui n’étai[en]t pas [‘]chef[s] d’unité ou équivalent[s’] ou encore [‘]conseiller[s] ou équivalent[s’] [son]t classé[s] dans l’emploi type [‘]administrateur en transition[’] ».

29

Par des décisions individuelles du 7 juillet 2014, rédigées en des termes identiques, la Commission a rejeté les réclamations des requérants comme étant, à titre principal, irrecevables en raison de l’absence d’acte faisant grief et, en tout état de cause, comme étant non fondées.

Conclusions des parties et procédure

30

Les requérants demandaient, initialement et en substance, au Tribunal :

d’annuler les décisions individuelles de l’AIPN de les classer dans l’emploi intitulé « administrateur principal en transition » correspondant à l’emploi type statutaire « administrateur en transition » (ci-après les « décisions attaquées ») ;

de constater, à titre conservatoire et, pour autant que de besoin, que l’article 30, paragraphe 3, de l’annexe XIII du nouveau statut est illégal ;

de condamner la Commission aux dépens.

31

La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le recours comme étant irrecevable ;

à titre subsidiaire, rejeter le recours comme étant non fondé ;

condamner les requérants aux dépens.

32

Par décision du président de la première chambre du Tribunal du 6 mars 2015, le Conseil de l’Union européenne a été admis à intervenir au soutien de la Commission. Dans son mémoire en intervention déposé le 16 avril 2015, le Conseil a conclu à ce qu’il plaise au Tribunal rejeter le recours et, en particulier, rejeter comme manifestement dépourvue de tout fondement en droit l’exception d’illégalité de l’article 30, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut soulevée à titre conservatoire par les requérants.

33

Dans le rapport préparatoire d’audience qui leur a été signifié le 30 avril 2015, les parties ont été invitées à répondre à des questions posées par le Tribunal dans le cadre de mesures d’organisation de la procédure. Elles y ont dûment déféré et ont, chacune, déposé des observations sur leurs réponses écrites respectives.

34

Lors de l’audience tenue le 9 juin 2015, les requérants ont déclaré renoncer à soulever l’exception d’illégalité concernant l’article 30, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut.

En droit

Sur la recevabilité du recours

Arguments des parties

35

Dans la requête, les requérants abordent la question de la recevabilité de leur recours et exposent que, en modifiant leurs dossiers individuels informatisés par l’insertion d’une mention, dans SysPer 2, selon laquelle leur emploi type est « administrateur principal en transition » à compter du 1er janvier 2014, l’AIPN a de la sorte adopté des actes leur faisant grief. À cet égard, ils soutiennent que les décisions attaquées leur font grief en ce qu’ils perdent, en raison du classement dans ledit emploi type, la vocation qu’ils avaient auparavant à être promus au grade AD 14 au titre de l’article 45 du statut de 2004. Ainsi, les décisions attaquées affecteraient leur situation juridique de manière directe, immédiate et suffisamment caractérisée. Ces décisions auraient également un caractère définitif, car toute éventuelle décision ultérieure leur indiquant qu’ils ne sont pas susceptibles de bénéficier d’une promotion au grade AD 14 au titre de l’article 45 du nouveau statut ne pourrait être que confirmative desdites décisions.

36

Les requérants contestent l’argument avancé dans les décisions de rejet de leurs réclamations selon lequel leur nouveau classement en tant qu’« administrateur principal en transition » ne constituerait qu’une simple application directe à leur cas de l’article 30, paragraphe 2, sous b), de l’annexe XIII du nouveau statut. En effet, cette disposition serait muette sur l’emploi type dans lequel il conviendrait de classer « les juristes de grade AD 13 du [s]ervice juridique ». De plus, ils observent que même la décision sur les emplois types ne commanderait pas que les juristes de grade AD 13 du service juridique n’ayant pas le titre formel de « conseiller juridique » soient nécessairement classés en tant qu’« administrateur[s] principa[ux] en transition » et non comme « conseiller[s] ou équivalent[s] » ou, éventuellement, comme « expert[s] confirmé[s] ».

37

À ce dernier égard, ils soulignent, d’une part, que l’emploi type « expert confirmé », qui n’a pas été prévu par l’article 30 de l’annexe XIII du nouveau statut, a été créé par la décision sur les emplois types. Ceci corroborerait la conclusion selon laquelle c’est bien la Commission, en sa qualité d’AIPN, qui a choisi de reclasser les requérants comme « administrateur[s] principa[ux] en transition », ce qui ne lui était nullement imposé par le règlement no 1023/2013, et qu’elle dispose concrètement d’un pouvoir d’appréciation et de décision autonome en la matière. D’autre part, les requérants observent que, par la décision SEC(2013) 691 du 18 décembre 2013, la Commission a choisi de classer tous les membres des cabinets des commissaires, de grade AD 9 à AD 14, dans l’emploi type « chef d’unité ou équivalent ». Or, ces fonctionnaires n’exerçant pas tous des fonctions équivalentes à celles d’un chef d’unité, ce classement intervenu pour tous les fonctionnaires et agents occupant un emploi au sein du cabinet d’un membre de la Commission prouverait également que l’AIPN dispose d’une certaine marge d’appréciation en la matière, dont elle a fait usage, et que, partant, le classement des requérants comme « administrateur[s] principa[ux] en transition » ne résulte pas d’une prétendue simple application automatique de l’article 30, paragraphe 2, sous b), de l’annexe XIII du nouveau statut.

38

La Commission conclut à titre principal à l’irrecevabilité du recours pour défaut d’acte faisant grief. Sans contester que les requérants n’ont désormais plus vocation à être promus au grade AD 14 au titre de l’article 45 du nouveau statut, la Commission soutient que les requérants ne démontrent pas que ce sont les actes qu’ils attaquent qui ont entraîné leur exclusion des procédures annuelles de promotion au grade AD 14. Selon la Commission, le classement des requérants est le résultat d’une application automatique à leur situation de l’article 30, paragraphe 2, de l’annexe XIII du nouveau statut.

39

En outre, la Commission observe, par rapport à une potentielle décision future de promotion, que le classement intervenu n’est au mieux qu’un acte préparatoire et se prévaut, à cet égard, de la jurisprudence résultant de l’arrêt du 18 décembre 1992, Cimenteries CBR e.a./Commission (T‑10/92 à T‑12/92 et T‑15/92, EU:T:1992:123, points 47 et 48). Ainsi, à la différence de ce qu’elle soutient sur cette problématique dans une autre affaire (voir ordonnance du 16 juillet 2015, FG/Commission, F‑20/15, points 33 à 37), la Commission affirme en l’espèce que les requérants seront libres de contester une éventuelle décision à venir leur refusant une promotion au grade AD 14 dans le cadre d’un prochain exercice de promotion. À cette occasion, les intéressés pourront, selon elle, mettre en cause les actes préparatoires à une telle décision, tels que le classement litigieux dans l’emploi type « administrateur en transition ». Cependant, ils ne pourraient pas, dans les circonstances de l’espèce où pareille décision de refus de promotion fait pour le moment défaut, prétendre que leurs intérêts ont d’ores et déjà été affectés par les seuls actes préparatoires que constitueraient les prétendues décisions attaquées. En définitive, il leur incomberait d’attendre qu’une décision les excluant du bénéfice d’une promotion au grade AD 14 intervienne à proprement parler.

Appréciation du Tribunal

40

L’existence d’un acte faisant grief au sens de l’article 90, paragraphe 2, et de l’article 91, paragraphe 1, du statut est une condition indispensable de la recevabilité de tout recours formé par les fonctionnaires contre l’institution dont ils relèvent. Selon une jurisprudence constante, seules les mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter directement et immédiatement les intérêts de la partie requérante, en modifiant de façon caractérisée la situation juridique de celle-ci, constituent des actes susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation précédé, ainsi que l’exige l’article 91 du statut, d’une réclamation (arrêts du 14 février 1989, Bossi/Commission, 346/87, EU:C:1989:59, point 23, et du 18 septembre 2008, Angé Serrano e.a./Parlement, T‑47/05, EU:T:2008:384, point 61, et la jurisprudence citée).

41

En l’espèce, il ressort du libellé de l’article 30, paragraphe 2, de l’annexe XIII du nouveau statut que, avec effet au 1er janvier 2014, l’AIPN « classe » les fonctionnaires en service au 31 décembre 2013 au sein du groupe de fonctions AD dans différents emplois types énumérés par la disposition susmentionnée, ce qui implique que l’AIPN adopte formellement de telles décisions de classement dans les emplois types et que, conformément à l’article 25, paragraphe 2, du nouveau statut, elle communique par écrit lesdites décisions aux fonctionnaires concernés. Pour autant, contrairement à ce que soutient la Commission, même si, dans le cadre de l’énumération des différents emplois types figurant dans la disposition en cause, il est indiqué que « le fonctionnaire […] est classé dans l’emploi type […] » et, s’agissant en particulier des fonctionnaires de grade AD 13, que « le fonctionnaire de grade AD 13 […] est classé dans l’emploi type [‘]administrateur en transition[’] », la disposition en cause n’impliquait pas que, s’agissant précisément des fonctionnaires de grade AD 13 tels que les requérants, l’AIPN ait été tenue, en vertu d’une compétence liée, de les classer nécessairement dans l’emploi type « administrateur en transition ».

42

En effet, force est de constater que le libellé de l’article 30, paragraphe 2, sous c) et d), de l’annexe XIII du statut, de même qu’il permettait à l’AIPN de considérer, avec effet au 1er janvier 2014, les « conseillers juridiques » de grade AD 13 affectés au service juridique comme occupant des postes « équivalent[s] » à ceux de « conseiller[s] » au sens du nouveau statut ou encore les membres des cabinets des commissaires comme exerçant des activités équivalentes à celles de « chef[s] d’unité », n’excluait pas légalement la possibilité de considérer que les « membres du service juridique » de grade AD 13, également affectés au service juridique et compte tenu des fonctions qu’ils exerçaient à ce titre, analogues à celles des « conseillers juridiques » affectés au même service juridique, soient également classés dans l’emploi type « conseiller ou équivalent », le terme « équivalent » étant à cet égard déterminant aux fins du classement dans cet emploi type.

43

Ainsi, dans les circonstances particulières de la présente affaire, le Tribunal estime que, en renonçant à considérer, au même titre que celles exercées par les conseillers juridiques de grade AD 13, les fonctions exercées à raison des postes occupés à la date du 31 décembre 2013 par les requérants, « membres du service juridique » de grade AD 13, comme étant « équivalent[es] » à celles afférentes à l’emploi de « conseiller » de grade AD 13, au sens des dispositions de l’article 30, paragraphe 2, sous b), de l’annexe XIII du statut – alors que, s’agissant des fonctions exercées au 31 décembre 2013 par les « conseillers juridiques » de grade AD 13 du même service juridique, elle les a considérées comme « équivalent[es] » à celles de « conseiller » –, l’AIPN a nécessairement procédé à une qualification juridique traduisant, en l’occurrence, un choix en termes de classement dans les emplois types. D’ailleurs, la Commission a implicitement admis, lors de l’audience, qu’elle disposait de la faculté d’adopter de telles décisions et qu’elle a fait usage d’une telle faculté s’agissant de membres des cabinets des commissaires en détachement ou encore des personnes qu’elle a considérées comme occupant un poste d’« expert confirmé », intitulé d’emploi figurant dans la décision sur les emplois types, et qu’elle a classées dans l’emploi type « conseiller ou équivalent » prévu par le nouveau statut.

44

Il y a lieu de constater que, contrairement à ce que soutient la Commission, le législateur de l’Union n’avait pas d’ores et déjà spécifiquement décidé, dans les modifications apportées au statut de 2004, que les « membres du service juridique » de grade AD 13 devaient être classés dans l’emploi type « administrateur en transition », dénomination expressément prévue dans le nouveau statut et qui correspond, selon la décision sur les emplois types, à l’intitulé d’emploi « administrateur principal en transition », intitulé qui a été inséré dans les dossiers individuels des requérants dans SysPer 2. En effet, c’est uniquement en raison du refus de la Commission de considérer que, à la date du 31 décembre 2013, ils exerçaient des fonctions « équivalent[es] » à celles des « conseiller[s] » ou des « chef[s] d’unité », emplois types prévus par le statut de 2004, que les requérants ont, en application de l’article 30, paragraphe 2, sous b), de l’annexe XIII du nouveau statut, été classés par défaut dans l’emploi type « administrateur en transition » tel que prévu par le nouveau statut, ledit emploi type recouvrant l’ancien emploi type « administrateur » tel que prévu par le statut de 2004.

45

Puisqu’un tel classement a pour conséquence de bloquer la carrière des requérants au grade AD 13, les décisions de la Commission intervenues dans le contexte de l’entrée en vigueur, le 1er janvier 2014, du nouveau statut ont indubitablement produit des effets juridiques obligatoires, de nature à affecter directement et immédiatement les intérêts des requérants, et ce en modifiant de façon caractérisée leur situation juridique.

46

Par ailleurs, il est constant que, par leur lettre du 9 décembre 2013 au chef du service juridique, les requérants, à l’exception de deux d’entre eux, avaient invité l’AIPN à considérer leur emploi de « membre du service juridique » de grade AD 13 comme étant, à l’instar des « conseillers juridiques » du même service, équivalent à celui de « conseiller » de grade AD 13 et de les classer ainsi dans l’emploi type « conseiller ou équivalent ». Par conséquent, la modification de la désignation de leur emploi type par l’ajout, dans leur dossier individuel dans SysPer 2, de la mention « administrateur principal en transition » peut en tout état de cause être considérée comme ayant été faite à la suite d’une décision de rejet de la demande formulée par ces fonctionnaires, au sens de l’article 90, paragraphe 1, seconde phrase, du statut, et contre laquelle ils ont introduit leur réclamation dans les délais statutaires.

47

Enfin, quant à l’argument de la Commission qui vise à qualifier les décisions attaquées d’« actes préparatoires » au regard de la jurisprudence résultant de l’arrêt du 18 décembre 1992, Cimenteries CBR e.a./Commission (T‑10/92 à T‑12/92 et T‑15/92, EU:T:1992:123), le Tribunal constate que, contrairement aux circonstances factuelles qui prévalaient dans cette affaire, les actes attaqués en l’espèce sont susceptibles de produire des effets juridiques de nature à affecter d’ores et déjà les intérêts des requérants, et ce indépendamment de l’intervention d’une éventuelle décision future portant refus de promotion au grade AD 14 sur le fondement de l’article 45 du nouveau statut. En particulier, le Tribunal relève que, en application des décisions attaquées et du nouveau statut, il est constant que les requérants ne peuvent plus participer aux exercices de promotion au grade AD 14 en vertu de l’article 3 des DGE de l’article 45.

48

Il résulte de tout ce qui précède que, en raison de l’assimilation des emplois des requérants à l’emploi type « administrateur en transition » et au blocage consécutif de leurs carrières au grade AD 13, les décisions attaquées, matérialisées par une modification effectuée dans SysPer 2 dans leurs dossiers individuels informatisés, constituent des actes faisant individuellement grief aux requérants. À ce titre, les réclamations formées en l’espèce n’ont donc pas été introduites de manière prématurée puisque la modification effectuée dans les dossiers individuels des requérants dans SysPer 2 reflétait effectivement une décision adoptée par l’AIPN, mise en œuvre, techniquement, par ses services, et qui, au regard du droit à une bonne administration prévu à l’article 41 de la Charte des droits fondamentaux et en application de l’article 25, paragraphe 2, du statut, devait être communiquée par écrit aux intéressés. Partant, le recours doit être déclaré recevable et l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission rejetée.

Sur les conclusions tendant à l’annulation des décisions attaquées

49

À l’appui de leur recours, les requérants invoquent en substance deux moyens, qu’il convient d’examiner conjointement, tirés de la violation, respectivement, d’une part, du principe de sécurité juridique et de celui de la confiance légitime ainsi que, d’autre part, du principe d’égalité de traitement.

Arguments des parties

50

D’une manière générale, les requérants considèrent que, dans l’exercice du pouvoir d’appréciation qui lui a été laissé par le législateur dans le cadre de la mise en œuvre de la réforme statutaire entrée en vigueur le 1er janvier 2014, la Commission a méconnu la confiance légitime qu’ils avaient pu placer dans leur vocation à une promotion au grade AD 14 et que, par ailleurs, les décisions attaquées consacrent une différence de traitement non justifiée entre les requérants et les autres membres du personnel du service juridique dénommés « conseillers juridiques ».

51

Premièrement, les requérants soutiennent que le seul fait qu’ils ont obtenu leur grade AD 13 en vertu exclusivement de l’article 45 plutôt qu’au titre de l’article 29, paragraphe 1, du statut de 2004 ne constitue pas une raison suffisante pouvant justifier que, désormais et contrairement à ce qui a été fait pour les « conseillers juridiques » du même grade qui ont été considérés comme « conseiller[s] ou équivalent[s] », ils soient exclus des exercices annuels de promotion au grade AD 14. Selon eux, tous les juristes de grade AD 13 qui étaient affectés au service juridique le 31 décembre 2013 doivent être considérés comme constituant un seul et même groupe de fonctionnaires aux fins du respect du principe d’égalité de traitement.

52

Deuxièmement, en se référant aux considérants 17 à 19 du règlement no 1023/2013, les requérants soutiennent que l’AIPN a manifestement méconnu la ratio legis de l’article 30, paragraphes 1 et 2, de l’annexe XIII du nouveau statut. En effet, leur classement dans un emploi type aurait dû davantage être fondé sur leurs responsabilités et non, uniquement ou essentiellement, en fonction de la base légale ayant servi à leur octroyer le grade AD 13. À cet égard, les requérants invoquent plusieurs motifs pour contester que la base juridique suivie afin de pourvoir les postes de « conseillers juridiques » puisse constituer, à elle seule, un élément permettant de distinguer ces derniers des requérants. Le premier motif tiendrait au fait que les avis de vacance publiés pour les postes de « conseillers juridiques » n’auraient jamais indiqué que de tels postes pourraient placer leurs titulaires dans une position juridique ou professionnelle distincte par rapport à celle des « membres du service juridique ». Le deuxième motif serait lié au fait que les fonctions exercées par les requérants sont « rigoureusement identiques » à celles confiées aux « conseillers juridiques ». En troisième lieu, les requérants rappellent la situation des « expert[s] confirmé[s] », intitulé d’emploi nouvellement créé par la décision sur les emplois types et appelant un classement dans l’emploi type « conseiller ou équivalent » du nouveau statut, qui peuvent prétendre poursuivre leur carrière jusqu’au grade AD 14 sans avoir jamais été soumis à la procédure dite du « panel » à laquelle ont été soumis les « conseillers juridiques » ayant bénéficié d’un classement en vertu de l’article 30, paragraphe 2, sous d), de l’annexe XIII du nouveau statut. Partant, le fait que les « membres du service juridique » n’ont pas obtenu leur promotion au grade AD 13 à l’issue de la procédure dite du « panel », prétendument plus exigeante, serait sans pertinence.

53

Troisièmement, s’appuyant sur l’arrêt du 1er décembre 2010, Nolin/Commission (F‑82/09, EU:F:2010:154), les requérants notent que le mode de promotion au grade AD 13 est dépourvu de pertinence aux fins de l’appréciation des effets juridiques attachés à cette promotion et que les fonctionnaires promus se trouvent tous dans la même situation.

54

Quatrièmement, les requérants soutiennent qu’il n’existe aucune justification objective pouvant expliquer un traitement différencié entre les juristes de grade AD 13 qualifiés de « conseiller[s] ou équivalent[s] » ou d’« expert[s] confirmé[s] », d’une part, et les « administrateur[s] principa[ux] en transition », d’autre part, étant donné qu’ils exercent exactement les mêmes fonctions, et ce au sein du service juridique.

55

En défense, la Commission concède que, à l’heure actuelle, les « membres du service juridique » et les « conseillers juridiques » exercent les mêmes fonctions au sein du service juridique et ont les mêmes responsabilités, tout en soulignant que cet état de fait est susceptible d’évoluer à l’avenir. Cela étant, cette institution estime que, à la différence des requérants, fonctionnaires promus au grade AD 13 en vertu de l’article 45 du statut de 2004, les « conseillers juridiques » ont pour leur part été nommés à ce même grade à la suite d’une procédure exigeante, en l’occurrence celle dite du « panel », qui est fondée sur une application conjointe de l’article 29, paragraphe 1, et de l’article 45 du statut de 2004. Ainsi, du fait qu’ils ont été promus aux fins de leur nomination sur un emploi vacant de grade AD 13 à l’issue d’une procédure de sélection ayant donné lieu à un avis de vacance d’un emploi à ce grade, ces derniers seraient dans une situation différente et, en tout état de cause, non comparable à celle des « membres du service juridique ». À cet égard, la Commission précise que ce qui divise les parties au litige est uniquement le point de savoir si la manière de nommer un fonctionnaire au grade AD 13 au sein du service juridique constitue une différence juridique permettant de justifier la distinction qu’elle a opérée entre les « conseillers juridiques » et les « membres du service juridique » et qui l’a conduite à classer les requérants, « membres du service juridique », dans l’emploi type « administrateur principal en transition » prévu par le nouveau statut, ce qui a eu des conséquences sur leur éligibilité à la promotion au grade supérieur.

Appréciation du Tribunal

56

À titre liminaire, il convient de rappeler qu’il résulte tant de l’annexe I, section A, point 1, du nouveau statut que de l’article 30 de l’annexe XIII du nouveau statut que les fonctionnaires de grade AD 13 en service au 31 décembre 2013 devaient être classés dans différents emplois types. Ainsi, dès l’entrée en vigueur du nouveau statut, les requérants, tous fonctionnaires de grade AD 13 en service à la date du 31 décembre 2013, devaient être classés, par décision de l’AIPN, dans l’un des trois emplois types prévus de manière dérogatoire par l’article 30, paragraphe 2, de l’annexe XIII du nouveau statut pour les administrateurs occupant à cette date un poste de grade AD 13, à savoir, respectivement, « chef d’unité ou équivalent », « conseiller ou équivalent » ou « administrateur en transition ».

57

À cet égard, s’agissant de l’argument des requérants fondé sur leur prétendue confiance légitime à conserver leur vocation à la promotion au grade AD 14 qu’ils détenaient en raison de leur promotion au grade AD 13 obtenue en application du seul article 45 du statut de 2004, il y a lieu de relever que le législateur de l’Union, en confiant à chaque AIPN le soin de classer, selon des critères qu’il avait lui-même arrêtés, les fonctionnaires en service au 31 décembre 2013, a décidé que des fonctionnaires, tels que les requérants, pouvaient potentiellement perdre, à la suite de ce classement, leur vocation à la promotion au grade supérieur, étant entendu notamment que, désormais, « les grades AD 13 et AD 14 devraient être réservés au personnel exerçant un rôle comportant des responsabilités importantes ».

58

Sur cet aspect, il convient de rappeler que le lien juridique entre les fonctionnaires et l’administration est de nature statutaire et non contractuelle (voir, en ce sens, arrêt du 19 mars 1975, Gillet/Commission, 28/74, EU:C:1975:46, point 4), de sorte que les droits et les obligations des fonctionnaires peuvent être modifiés à tout moment par le législateur et, à cet égard, que les lois modificatives d’une disposition législative, telles que les règlements de modification du statut, s’appliquent en principe, sauf dérogation, aux effets futurs des situations nées sous l’empire de la loi ancienne, sauf pour les situations nées et définitivement réalisées sous l’empire de la règle précédente, lesquelles créent des droits acquis (voir arrêt du 22 décembre 2008, Centeno Mediavilla e.a./Commission, C‑443/07 P, EU:C:2008:767, points 60 à 62, et la jurisprudence citée).

59

Or, la Cour de justice de l’Union européenne a déjà indiqué, dans un contexte de réforme statutaire, qu’un droit est considéré comme acquis lorsque le fait générateur de celui-ci s’est produit avant la modification législative et que tel n’est pas le cas d’un droit dont le fait constitutif ne s’est pas réalisé sous l’empire de la législation qui a été modifiée. Ainsi, lorsque, comme en l’espèce, des fonctionnaires avaient, jusqu’à la date d’entrée en vigueur du nouveau statut, uniquement vocation à une promotion et que celle-ci était subordonnée à une décision procédant du pouvoir de l’AIPN que cette dernière n’avait pas encore adoptée, en l’occurrence au 1er janvier 2014, de tels fonctionnaires ne peuvent pas faire valoir un droit acquis quant au maintien d’une vocation à cette promotion postérieurement à cette date (voir arrêt du 22 décembre 2008, Centeno Mediavilla e.a./Commission, C‑443/07 P, EU:C:2008:767, points 63 à 65, et la jurisprudence citée).

60

Ainsi, étant donné que les particuliers ne sauraient se prévaloir du principe de protection de la confiance légitime pour s’opposer à l’application d’une disposition réglementaire nouvelle, surtout dans un domaine dans lequel le législateur dispose d’un large pouvoir d’appréciation (arrêt du 22 décembre 2008, Centeno Mediavilla e.a./Commission, C‑443/07 P, EU:C:2008:767, point 91), les arguments relatifs à une méconnaissance du principe de la confiance légitime par le législateur de l’Union et/ou par la Commission, en raison du plafonnement des carrières résultant du classement dans les emplois types « administrateur » ou « administrateur en transition », doivent être rejetés.

61

Cela étant dit, la perte de la vocation des requérants à une promotion au grade AD 14 qu’ils détenaient sous l’empire du statut de 2004 réside, pour l’essentiel, dans la circonstance que la Commission a décidé, contrairement à ce qu’elle a fait s’agissant des « conseillers juridiques » également en fonctions au service juridique, de ne pas considérer que les fonctions que les requérants exerçaient, au 31 décembre 2013, en qualité de « membres du service juridique » de grade AD 13, étaient équivalentes à celles de « conseiller » et, par conséquent, de les classer non pas dans l’emploi type « conseiller ou équivalent » en application de l’article 30, paragraphe 2, sous d), de l’annexe XIII du nouveau statut, mais dans l’emploi type « administrateur en transition » en application de l’article 30, paragraphe 2, sous b), de l’annexe XIII du nouveau statut, qui correspond, selon la décision sur les emplois types, à celui d’« administrateur principal en transition » en vigueur à la Commission.

62

Toutefois, l’article 30, paragraphe 2, de l’annexe XIII du nouveau statut doit être interprété en ce sens qu’il n’imposait pas, dans le cas spécifique des requérants, que, à partir du 1er janvier 2014, ils soient nécessairement classés par défaut dans l’emploi type « administrateur en transition ».

63

En effet, au regard du libellé de l’article 30 de l’annexe XIII du nouveau statut et compte tenu de la manière dont elle avait procédé s’agissant du classement des fonctionnaires occupant des fonctions atypiques tels que les « conseillers juridiques », les membres des cabinets des commissaires ou encore ceux répondant au qualificatif d’« expert confirmé », l’AIPN se trouvait dans l’obligation de vérifier, comme ils l’avaient invitée à le faire dans leur lettre du 9 décembre 2013 adressée au chef du service juridique, si les postes de grade AD 13 occupés par les requérants pouvaient être qualifiés d’« équivalent[s] » à ceux de même grade qu’occupaient leurs collègues « conseillers juridiques » avec pour effet que, dans l’affirmative, ils auraient dû être également classés, à l’instar de ces derniers, dans l’emploi type « conseiller ou équivalent ». En d’autres termes, l’AIPN se trouvait dans l’obligation de déterminer si, par analogie avec les emplois de grade AD 13 intitulés « conseillers juridiques » au sein de la Commission qu’elle avait estimés, au regard de la nature et de l’étendue des fonctions exercées, comme équivalents à ceux de « conseillers », les emplois de grade AD 13 occupés par les requérants pouvaient eux aussi être considérés, au regard de la nature et de l’étendue des fonctions exercées dans ces emplois spécifiques, comme équivalents à ceux de « conseillers » et, partant, être classés dans l’emploi type « conseiller ou équivalent » au sens de l’article 30, paragraphe 2, sous d), du nouveau statut.

64

À cet égard, le Tribunal relève que l’article 30, paragraphe 2, de l’annexe XIII du nouveau statut ne contient aucun critère permettant à l’AIPN de déterminer si un juriste de grade AD 13 qui, à l’instar des requérants, occupait à la date du 31 décembre 2013 un poste intitulé au sein de son institution « membre du service juridique » se trouvait affecté sur un poste « équivalent » à l’emploi type « conseiller », prévu au tableau des emplois types figurant à l’annexe I du statut et qui concerne toutes les institutions et tous leurs services et non uniquement leurs services juridiques tels que celui de l’espèce. Partant, il doit être considéré que, pour apprécier l’équivalence susmentionnée, l’AIPN dispose d’une certaine liberté, autrement dit d’une marge d’appréciation, devant être exercée à la lumière des considérants 17 à 19 du règlement no 1023/2013 et, en tout état de cause, dans le respect du principe d’égalité de traitement.

65

Cela étant, il ressort de la jurisprudence qu’il y a violation du principe d’égalité de traitement, principe général du droit de l’Union, consacré par les articles 20 et 21 de la Charte et applicable au droit de la fonction publique de l’Union, lorsque deux catégories de personnes dont les situations factuelles et juridiques ne présentent pas de différence essentielle se voient appliquer un traitement différent lors de leur classement et qu’une telle différence de traitement n’est pas objectivement justifiée. Lors de l’application de ce principe, l’examen des situations à comparer doit tenir compte de l’ensemble des éléments qui les caractérisent (voir, en ce sens, arrêts du 22 décembre 2008, Centeno Mediavilla e.a./Commission, C‑443/07 P, EU:C:2008:767, point 76, et la jurisprudence citée, ainsi que du 15 novembre 2011, Nolin/Commission, T‑58/11 P, EU:T:2011:664, points 37 et 38).

66

Pour statuer sur le bien-fondé du moyen tiré de la violation du principe d’égalité de traitement, il convient donc de déterminer si les fonctionnaires de grade AD 13 affectés au service juridique et exerçant des fonctions de juristes, à l’exception des juristes réviseurs et des juristes linguistes qui ne sont pas en cause en l’espèce, doivent être considérés comme relevant d’une seule et même catégorie de personnes, et ce nonobstant le fait que, formellement, ils occupaient à la date du 31 décembre 2013 des emplois de grade AD 13 répondant à des intitulés d’emploi différents, selon la terminologie de la Commission, à savoir respectivement « conseillers juridiques » ou « membres du service juridique », et avaient accédé à ces emplois sur le fondement de dispositions statutaires différentes, à savoir, respectivement, sur le fondement de l’article 29, paragraphe 1, et de l’article 45 du statut de 2004 ou uniquement sur celui de l’article 45 du statut de 2004 voire de l’ancien statut.

67

D’emblée, le Tribunal relève que, outre le fait qu’ils sont classés au même grade AD 13, voire au même grade AD 14, ces derniers n’étant toutefois pas en cause en l’espèce, les « conseillers juridiques » et les « membres du service juridique » en fonctions au service juridique à la date du 31 décembre 2013 avaient été recrutés en vue d’exercer des fonctions pour l’essentiel identiques. À cet égard, même si la Commission prétend que les fonctions et les responsabilités des « conseillers juridiques » pourraient évoluer à l’avenir, force est de constater que, au regard du libellé de l’article 30 de l’annexe XIII du nouveau statut, et notamment de l’usage de l’imparfait de l’indicatif « était » au paragraphe 2, sous a) à e), dudit article, ce sont les fonctions effectivement exercées par les intéressés à la date du 31 décembre 2013 qui doivent être prises en compte pour le classement dans les emplois types. Or, ainsi que le concède d’ailleurs la Commission dans son mémoire en défense, à cette date, les « conseillers juridiques » et les « membres du service juridique », tous de grade AD 13, exerçaient effectivement les mêmes fonctions et responsabilités au sein du service juridique.

68

Partant, en considérant les emplois et/ou fonctions de « conseillers juridiques », selon la terminologie propre à la Commission, de grade AD 13, comme étant « équivalent[s] » aux emplois et/ou aux fonctions correspondant à l’emploi type « conseiller », tel que le prévoyait le statut de 2004, l’AIPN a implicitement, mais nécessairement, considéré que, par leurs fonctions, les « conseillers juridiques » en service au 31 décembre 2013« exerça[ie]nt un rôle comportant des responsabilités importantes » au sens du considérant 19 du règlement no 1023/2013. Par conséquent, l’AIPN aurait dû, en application du principe d’égalité de traitement, être amenée à porter une appréciation similaire en ce qui concerne leurs homologues de grade AD 13 exerçant, à la même date du 31 décembre 2013, sous l’intitulé d’emploi propre à la Commission de « membre du service juridique », les mêmes fonctions et les mêmes responsabilités au sein du même service. Ce constat s’impose d’autant plus que, ainsi que l’a confirmé la Commission, il n’existe pas de hiérarchie entre ces deux groupes de juristes et, contrairement à ce qui est le cas des « conseiller[s] » au sens statutaire stricto sensu, ni les « conseillers juridiques », malgré leur modalité de recrutement analogue à celle des « conseiller[s] », selon la nomenclature des emplois types du statut de 2004, par application de la décision C(2008) 5028/2 du 9 septembre 2008 sur l’encadrement intermédiaire, ni les « membres du service juridique » n’exercent de fonctions d’encadrement, intermédiaire ou supérieur.

69

En définitive, la seule différence existant, à la date du 31 décembre 2013, entre les « conseillers juridiques » et les « membres du service juridique » de grade AD 13 tient à la manière dont ils ont été nommés à ce grade, la Commission ayant confirmé que, parmi les « conseillers juridiques » de ce grade, tous avaient été auparavant fonctionnaires de grade AD 12 et que, en d’autres termes, ils avaient tous bénéficié d’une nomination promotion au titre d’une application conjointe de l’article 29, paragraphe 1, et de l’article 45 du statut de 2004. Un membre du service juridique, initialement promu au grade AD 13 en application du seul article 45 du statut de 2004, aurait toutefois ultérieurement participé à la procédure dite du « panel », organisée en vertu de l’article 29, paragraphe 1, du statut de 2004, et aurait ainsi été nommé, en 2011, au même grade AD 13, mais sur un poste formellement intitulé « conseiller juridique », ce qui lui aurait ainsi permis de conserver la vocation à la promotion au grade AD 14 sous l’empire du nouveau statut.

70

À cet égard, le Tribunal a déjà jugé, premièrement, que des fonctionnaires promus au grade AD 13, les uns au titre de l’article 29 du statut de 2004, les autres au titre de l’article 45 dudit statut, sont dans des situations juridiques qui ne diffèrent pas de façon essentielle au sens de la jurisprudence rappelée au point 65 du présent arrêt (voir arrêt du 1er décembre 2010, Nolin/Commission, F‑82/09, EU:F:2010:154, point 46). Le Tribunal a jugé, deuxièmement, que le législateur, bien qu’ayant prévu des procédures de promotion distinctes, n’a pas pour autant entendu conférer aux promotions au grade AD 13 fondées sur l’article 29, paragraphe 1, et l’article 45 du statut de 2004 des effets juridiques différents de ceux des promotions fondées exclusivement sur l’article 45 dudit statut (voir arrêt du 1er décembre 2010, Nolin/Commission, F‑82/09, EU:F:2010:154, point 47). Le Tribunal a jugé, troisièmement, que, puisque le principe d’égalité de traitement implique que l’ensemble des fonctionnaires promus à un même grade doivent, à mérite égal, bénéficier des mêmes chances d’être promus au grade supérieur, une interprétation du statut permettant aux fonctionnaires promus au grade AD 13 sur la base de l’article 29, paragraphe 1, du statut de 2004 de bénéficier d’une chance d’être rapidement promus au grade AD 14 plus grande que celle de leurs collègues promus exclusivement sur la base de l’article 45 dudit statut serait contraire à ce principe (voir arrêt du 1er décembre 2010, Nolin/Commission, F‑82/09, EU:F:2010:154, point 91). Pareilles considérations valent a fortiori lorsqu’il est question de maintenir la vocation à la promotion au grade AD 14 pour les uns, tout en en privant les autres.

71

En particulier, le fait que la promotion des requérants au grade AD 13 a été obtenue en application du seul article 45 du statut de 2004 ne constitue pas, au regard de l’objectif de garantir à l’ensemble des fonctionnaires, dans le respect du principe d’égalité de traitement, une perspective d’évolution de carrière, une différence pertinente justifiant que, nonobstant l’exercice de fonctions rigoureusement identiques à la date du 31 décembre 2013, identité de fonctions pourtant reconnue par la Commission, leur classement comme « membres du service juridique » dans les emplois types prévus par le nouveau statut puisse donner lieu à des conséquences inégales par rapport au classement de leurs collègues « conseillers juridiques » dont la promotion au même grade AD 13 avait été obtenue par une application conjointe de l’article 29, paragraphe 1, et de l’article 45 du statut de 2004 ou de l’ancien statut (arrêt du 15 novembre 2011, Nolin/Commission, T‑58/11 P, EU:T:2011:664, point 39).

72

S’agissant enfin de l’argument de la Commission, qui s’appuie à cet égard sur l’arrêt du 11 juillet 2007, Konidaris/Commission (T‑93/03, EU:T:2007:209), selon lequel les « conseillers juridiques » auraient obtenu leur grade AD 13 à l’issue d’une procédure plus exigeante que celle résultant uniquement d’un exercice de promotion au titre de l’article 45 du statut de 2004 ou de l’ancien statut, justifiant qu’un sort statutaire différent leur soit réservé dans le cadre de la mise en œuvre des dispositions transitoires prévues par l’annexe XIII du nouveau statut, il a certes déjà été jugé que des différences existent entre la procédure de pourvoi d’un emploi vacant par voie de mutation ou de promotion, qui se déroule conformément à l’article 29, paragraphe 1, sous a), du statut de 2004 ou de l’ancien statut, et la procédure de promotion prévue à l’article 45 de ces statuts. Dans l’arrêt susmentionné, le Tribunal de première instance des Communautés européennes a ainsi précisé que, si cette dernière procédure vise à moduler la carrière des fonctionnaires à raison des efforts déployés et des mérites démontrés dans l’exercice de leurs fonctions, c’est-à-dire à récompenser les fonctionnaires ayant fait preuve, dans le passé, de mérites globalement supérieurs, la procédure de pourvoi d’un emploi vacant vise à la recherche, dans le seul intérêt du service, du fonctionnaire le plus apte à exercer les fonctions inhérentes à l’emploi à pourvoir (arrêt du 11 juillet 2007, Konidaris/Commission, T‑93/03, EU:T:2007:209, point 91, et la jurisprudence citée).

73

Cela étant, force est de constater que, contrairement à ce que fait valoir la Commission, il ne peut pas être déduit de l’arrêt du 11 juillet 2007, Konidaris/Commission (T‑93/03, EU:T:2007:209), ni d’ailleurs de la jurisprudence citée au point 91 de ce dernier, que le juge de l’Union aurait reconnu que la procédure de nomination promotion, au titre de l’application conjointe de l’article 29, paragraphe 1, et de l’article 45 du statut de 2004 ou de l’ancien statut, à un emploi de grade AD 13 ou AD 14, notamment conduite par un « panel », serait plus exigeante que la procédure de promotion prévue à l’article 45 du statut de 2004 ou de l’ancien statut. Tout au plus le juge de l’Union a-t-il souligné, dans cet arrêt, les différences existant entre ces deux procédures.

74

Par ailleurs, à l’avenir et au regard des exigences du considérant 19 du règlement no 1023/2013, y compris celle tenant à la nature « spécifique » du poste d’un grade supérieur à pourvoir, les « conseillers juridiques » qui seront recrutés en application de l’article 29, paragraphe 1, du nouveau statut, ou encore ceux qui seront recrutés sous l’appellation propre à la Commission d’« expert confirmé », devraient certes exercer des fonctions éventuellement différentes ou complémentaires, voire d’encadrement, se traduisant par des « responsabilités importantes » ou éventuellement plus importantes qu’auparavant et justifiant que, sous l’empire du nouveau statut, les « conseiller[s] juridique[s] » et les « expert[s] confirmé[s] » occupent l’emploi type « conseiller ou équivalent » au grade AD 13 avec vocation à la promotion au grade AD 14. Cependant, le Tribunal considère que, pour les besoins du classement dans les emplois types qui devait être opéré par l’AIPN au 1er janvier 2014 au titre de l’article 30 de l’annexe XIII du nouveau statut, il convenait, dans le cadre des mesures transitoires prévues par cette annexe, de procéder à une appréciation de l’équivalence des postes et fonctions occupés par les fonctionnaires de grade AD 13 à la seule date du 31 décembre 2013 et au regard des anciens emplois types prévus par le statut de 2004.

75

Or, le fait que les « conseillers juridiques » de grade AD 13 en fonctions au 31 décembre 2013 avaient été nommés, sous l’empire du statut de 2004, voire de l’ancien statut, dans les conditions qui étaient alors prévues pour les nominations à des postes d’encadrement intermédiaire, notamment par la décision C(2008) 5028/2 du 9 septembre 2008 sur l’encadrement intermédiaire, ne saurait, en lui-même, démontrer que ceux-ci ont fait preuve de mérites particuliers ou supérieurs à ceux qui avaient dû être démontrés par des candidats à la promotion au grade AD 13, tels que les requérants, ni qu’ils exerçaient nécessairement des « responsabilités importantes » ou « particulières » au sens du nouveau statut.

76

En outre, ainsi que cela est en substance rappelé au considérant 17 du règlement no 1023/2003, la structure des carrières et la liste des emplois types prévues à l’annexe I du statut de 2004 se caractérisaient par un manque de lisibilité et de lien clair, notamment par l’usage des termes « par exemple », entre les responsabilités et le grade occupé. Il en résultait que des fonctionnaires pouvaient occuper, sous l’empire du statut de 2004, des emplois de grade élevé, tels que les grades AD 13 et AD 14, sans pour autant exercer de « responsabilités importantes » ou « particulières », situation à laquelle le législateur de l’Union a entendu remédier dans le cadre du nouveau statut. Par suite, n’a pas pu être déterminant, aux fins du classement dans les emplois types à opérer au 1er janvier 2014 en raison du poste occupé par les intéressés à la date du 31 décembre 2013, le fait que les fonctionnaires juristes de grade AD 13 du service juridique occupaient, selon la terminologie interne à la Commission, des emplois intitulés, respectivement, « conseiller juridique » et « membre du service juridique ».

77

Partant, les exigences afférentes au principe d’égalité de traitement s’opposaient à ce que les « conseillers juridiques » du service juridique de grade AD 13 aient pu conserver leur vocation à la promotion au grade supérieur alors même que des fonctionnaires de même grade et exerçant, à la date du 31 décembre 2013, des fonctions et des responsabilités identiques aux leurs et dans le même service se sont vu, eux, supprimer une telle vocation sans justification objective pertinente (voir, en ce sens, arrêt du 15 novembre 2011, Nolin/Commission, T‑58/11 P, EU:T:2011:664, point 55). En définitive, pour respecter le principe d’égalité de traitement, la Commission pouvait soit considérer que, à la date du 31 décembre 2013, les fonctions indifféremment exercées par les fonctionnaires du service juridique de grade AD 13, « conseillers juridiques » et « membres du service juridique », ne comportaient pas, par rapport à des administrateurs de même grade, de « responsabilités importantes » ou « particulières » au sens du nouveau statut, avec pour conséquence que lesdits fonctionnaires devaient tous être classés dans l’emploi type « administrateur en transition », soit, à l’inverse, reconnaître que ces fonctionnaires exerçaient, y compris éventuellement en raison de leur grade, des « responsabilités importantes » ou « particulières » au sens du nouveau statut, avec pour conséquence qu’ils devaient tous être classés dans le même emploi type prévu par le nouveau statut, en l’occurrence « conseiller ou équivalent ». Or, la Commission a opté pour le classement des seuls « conseillers juridiques » dans l’emploi type « conseiller ou équivalent » prévu par le nouveau statut.

78

Enfin, au regard de la différence de traitement dont procèdent les décisions attaquées, la circonstance, mise en avant par la Commission, selon laquelle des fonctionnaires de grade AD 13, tels que les requérants, pourront toujours participer à l’avenir à des procédures de recrutement, fondées sur l’article 29, paragraphe 1, du nouveau statut, pour des emplois vacants du même grade AD 13 voire de grade AD 14, afin de recouvrer, par nomination promotion en application conjointe de l’article 29, paragraphe 1, et de l’article 45 du nouveau statut ou par nomination, soit un classement au grade AD 14 soit, comme pour le cas isolé du fonctionnaire visé aux points 20 et 69 du présent arrêt, une vocation à la promotion au grade AD 14 est inopérante. En effet, cette évolution de carrière, d’ailleurs aléatoire, ne concerne pas le régime transitoire prévu à l’annexe XIII du nouveau statut et plus particulièrement le classement dérogatoire prévu à l’article 30, paragraphe 2, de cette annexe qui est seul en cause en l’espèce, mais davantage la mise en œuvre de la nouvelle structure des carrières prévue par le nouveau statut.

79

Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que, en estimant que les emplois intitulés « membres du service juridique » selon la terminologie de la Commission, occupés, à la date du 31 décembre 2013, par les requérants, administrateurs de grade AD 13, n’étaient pas des emplois « équivalent[s] », au sens de l’article 30, paragraphe 2, sous d), de l’annexe XIII du nouveau statut, à celui de « conseiller », tel que prévu par la nomenclature du statut de 2004, alors même que les « conseillers juridiques », également administrateurs de grade AD 13 et exerçant les mêmes fonctions, ont bénéficié d’une telle reconnaissance d’équivalence de leurs fonctions, la Commission a méconnu le principe d’égalité de traitement puisqu’elle a traité de manière différente des fonctionnaires se trouvant pourtant dans des situations essentiellement identiques en ce qui concerne le grade, en l’occurrence AD 13, et les fonctions exercées dans ce grade à raison des emplois occupés et répondant, formellement, à des intitulés différents sous l’empire du statut de 2004 et de la terminologie interne à cette institution.

80

Eu égard à ce qui précède, il y a lieu d’accueillir le recours et d’annuler les décisions attaquées pour méconnaissance du principe d’égalité de traitement.

Sur les dépens

81

Aux termes de l’article 101 du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe supporte ses propres dépens et est condamnée aux dépens exposés par l’autre partie, s’il est conclu en ce sens. En vertu de l’article 102, paragraphe 1, du même règlement, le Tribunal peut décider, lorsque l’équité l’exige, qu’une partie qui succombe supporte ses propres dépens, mais n’est condamnée que partiellement aux dépens exposés par l’autre partie, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre. Par ailleurs, en vertu de l’article 103, paragraphe 4, du règlement de procédure, les États membres et les institutions qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens.

82

Il résulte des motifs énoncés dans le présent arrêt que la Commission est la partie qui succombe. En outre, les requérants ont, dans leurs conclusions, expressément demandé que la Commission soit condamnée aux dépens. Les circonstances de l’espèce ne justifiant pas l’application des dispositions de l’article 102, paragraphe 1, du règlement de procédure, la Commission doit supporter ses propres dépens et être condamnée à supporter les dépens exposés par les requérants. Le Conseil doit, pour sa part, supporter ses propres dépens en application de l’article 103, paragraphe 4, du règlement de procédure.

 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE (première chambre)

déclare et arrête :

 

1)

Les décisions individuelles, telles que matérialisées par une mention insérée postérieurement au 1er janvier 2014 dans les dossiers individuels informatisés des requérants, adoptées par l’autorité investie du pouvoir de nomination de la Commission européenne et portant classement de EJ et des autres requérants dont les noms anonymisés figurent en annexe dans l’emploi intitulé, au sein de la Commission européenne, « administrateur principal en transition », correspondant à l’emploi type statutaire « administrateur en transition », sont annulées.

 

2)

La Commission européenne supporte ses propres dépens et est condamnée aux dépens exposés par EJ et les autres requérants dont les noms anonymisés figurent en annexe.

 

3)

Le Conseil de l’Union européenne supporte ses propres dépens.

 

Barents

Perillo

Svenningsen

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 juillet 2015.

Le greffier

W. Hakenberg

Le président

R. Barents

ANNEXE

Compte tenu du nombre de requérants dans la présente affaire, leurs noms anonymisés ne sont pas repris dans la présente annexe.


( *1 ) Langue de procédure : le français.

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