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Dokuments 62015TJ0767

Vispārējās tiesas spriedums (ceturtā palāta), 2017. gada 28. februāris.
Labeyrie pret Eiropas Savienības Intelektuālā īpašuma biroju.
Eiropas Savienības preču zīme – Atcelšanas process – Eiropas Savienības grafiska preču zīme, kuru veido nārstojošu gaišu zivtiņu uz tumša fona attēls – Paziņojums par atcelšanu – Preču zīmes faktiska izmantošana – Regulas (EK) Nr. 207/2009 15. panta 1. punkta a) apakšpunkts un 51. panta 1. punkta a) apakšpunkts – Forma, kas atšķiras elementos, kuri nemaina atšķirtspēju.
Lieta T-767/15.

Eiropas judikatūras identifikators (ECLI): ECLI:EU:T:2017:122

Édition provisoire

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

 28 février 2017(*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de déchéance – Marque de l’Union européenne figurative représentant un semis de poissons clairs sur fond foncé – Déclaration de déchéance – Usage sérieux de la marque – Article 15, paragraphe 1, sous a), et article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement (CE) n° 207/2009 – Forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif »

Dans l’affaire T‑767/15,

Labeyrie, établie à Saint-Geours-de-Maremne (France), représentée par Me A. Lecomte, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Delpeyrat, établie à Saint-Pierre-du-Mont (France), représentée par M. J. Ennochi, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’EUIPO du 15 octobre 2015 (affaire R 2694/2014-1), relative à une procédure de déchéance entre Delpeyrat et Labeyrie,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de MM. H. Kanninen, président, L. Calvo‑Sotelo Ibáñez‑Martín (rapporteur) et Mme I. Reine, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 28 décembre 2015,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 21 avril 2016, 

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 20 avril 2016,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties principales dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Antécédents du litige

2        Le 5 juillet 2004, la requérante, Labeyrie, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1)].

3        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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4        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 29 et 30 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 29 : « Poissons et crustacés, préparations culinaires à base d’œufs de poisson, de légumes et/ou de fruits frais, conservés ou séchés, à savoir tarama, tzatziki, caviar d’aubergines, houmous, ktipiti, guacamole, tapenade ; plats préparés ou cuisinés à base de gelées, confitures, compotes, préparations culinaires à base de produits laitiers et/ou de lait, potages, bouillons, salades de légumes, tous ces produits pouvant être en conserves ou semi-conserves, surgelés, congelés ou frais ; huiles et graisses comestibles, à savoir graisse d’oie et de canard ; pickles » ;

–        classe 30 : « Farine et préparations faites de céréales, blinis, galettes, crêpes, pita, muffin, scones, brioches, pain, sel, moutarde, épices, sauces (condiments), plats préparés ou cuisinés à base de pâtes, de pâtes alimentaires ou de riz ; tous ces produits pouvant être en conserves ou semi-conserves, surgelés, congelés ou frais ».

5        La marque contestée a été enregistrée le 16 novembre 2005 sous le numéro 3916533 pour les produits visés au point 4 ci-dessus.

6        Le 12 mars 2014, l’intervenante, Delpeyrat, a déposé une demande en déchéance de la marque contestée sur le fondement de l’article 51, paragraphe 1, point a), du règlement nº 207/2009, au motif que ladite marque n’avait pas fait l’objet d’un usage sérieux pendant cinq années consécutives pour aucun des produits couverts par l’enregistrement.

7        Par décision rendue le 1er octobre 2014, la division d’annulation a déclaré la déchéance de la marque contestée pour tous les produits pour lesquels elle avait été enregistrée, avec effet à compter de la date de la demande en déchéance.

8        Le 22 octobre 2014, la requérante a introduit un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’annulation.

9        Par décision du 15 octobre 2015 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours et a confirmé la déchéance de la marque contestée avec effet à compter de la date de la demande en déchéance. Tout d’abord, la chambre de recours a considéré, aux points 16 et 17 de la décision attaquée, que les preuves de l’usage présentées par la requérante ne concernaient que l’usage de la marque contestée par rapport au saumon fumé et que, ce produit n’étant couvert que par l’indication « poissons », la déchéance de la marque contestée pour les produits restants, couverts par l’enregistrement, devait être confirmée. Ensuite, la chambre de recours a considéré qu’il découlait des preuves fournies par la requérante que la marque contestée avait fait l’objet d’un usage sous une forme qui différait de ladite marque telle qu’enregistrée par des éléments altérant son caractère distinctif au sens de l’article 15, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009. À cet égard, la chambre de recours a constaté que la marque contestée présentait un caractère distinctif inférieur à la normale et que les différences entre la marque enregistrée et la marque telle qu’utilisée, à savoir la surimposition du cartouche contenant le nom Labeyrie et la manière de représenter le semis de poissons, étaient de nature à altérer le caractère distinctif de la marque contestée.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée en ce qu’elle a confirmé la décision de la division d’annulation ayant prononcé la déchéance de la marque contestée pour désigner des poissons ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

11      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

12      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal de rejeter le recours.

 En droit

13      Il convient, à titre liminaire, de relever, à l’instar de l’EUIPO, que la requérante demande l’annulation de la décision attaquée seulement en ce que cette dernière a conclu à la déchéance de la marque contestée à l’égard des « poissons ». En revanche, la requérante ne conteste pas la conclusion de la chambre de recours, figurant au point 17 de la décision attaquée, qui confirme la déchéance de la marque contestée pour tous les autres produits visés à l’enregistrement. Il s’ensuit que le contrôle de légalité de la décision attaquée, auquel il convient de procéder en l’espèce, portera exclusivement sur ses conclusions concernant la déchéance de la marque contestée à l’égard des « poissons ».

14      À l’appui de son recours, la requérante soulève un moyen unique, tiré de la violation de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement nº 207/2009, lu conjointement avec l’article 15 , paragraphe 1, sous a), dudit règlement, ainsi que de la règle 22 et de la règle 40, paragraphe 5, du règlement (CE) nº 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement (CE) nº 40/94 du Conseil sur la marque communautaire (JO 1995, L 303, p. 1).

15      Ce moyen peut être divisé en deux branches. En effet, la requérante soutient, en substance, que la chambre de recours a conclu à tort, premièrement, que la marque contestée présentait un caractère distinctif inférieur à la normale et, deuxièmement, que les différences entre la marque utilisée et la marque contestée altéraient le caractère distinctif de cette dernière.

16      Il convient de rappeler qu’il résulte du considérant 10 du règlement n° 207/2009 que le législateur a considéré que la protection de la marque antérieure n’était justifiée que dans la mesure où celle-ci était effectivement utilisée. En conformité avec ce considérant, l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 prévoit que le titulaire de la marque de l’Union européenne est déclaré déchu de ses droits, notamment sur demande présentée auprès de l’EUIPO, si, pendant une période ininterrompue de cinq ans, la marque n’a pas fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union européenne pour les produits et les services pour lesquels elle a été enregistrée et qu’il n’existe pas de justes motifs pour le non-usage.

17      Par ailleurs, selon l’article 15, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement n° 207/2009, est considéré comme usage de la marque de l’Union européenne son emploi « sous une forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de la marque [sous] la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée ».

18      Il convient de relever qu’il découle directement des termes de l’article 15, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement n° 207/2009 que l’usage de la marque sous une forme qui diffère de la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée est considéré comme un usage au sens du premier alinéa de cet article, pour autant que le caractère distinctif de la marque sous la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée ne soit pas altéré [arrêt du 18 juillet 2013, Specsavers International Healthcare e.a., C‑252/12, EU:C:2013:497, point 21 ; voir également, en ce sens, arrêts du 8 décembre 2005, Castellblanch/OHMI – Champagne Roederer (CRISTAL CASTELLBLANCH), T‑29/04, EU:T:2005:438, point 30 ; du 10 juin 2010, Atlas Transport/OHMI – Hartmann (ATLAS TRANSPORT), T‑482/08, non publié, EU:T:2010:229, points 28 et 29, et du 24 mai 2012, TMS Trademark-Schutzrechtsverwertungsgesellschaft/OHMI – Comercial Jacinto Parera (MAD), T‑152/11, non publié, EU:T:2012:263, point 15].

19      Le caractère distinctif d’une marque au sens du règlement nº 207/2009 signifie que cette marque permet d’identifier le produit pour lequel l’enregistrement est demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ce produit de ceux d’autres entreprises (voir arrêt du 18 juillet 2013, Specsavers International Healthcare e.a., C‑252/12, EU:C:2013:497, point 22 et jurisprudence citée ; voir également, en ce sens, arrêts du 29 avril 2004, Procter & Gamble/OHMI, C‑468/01 P à C‑472/01 P, EU:C:2004:259, point 32 ; du 8 mai 2008, Eurohypo/OHMI, C‑304/06 P, EU:C:2008:261, point 66, et du 12 juillet 2012, Smart Technologies/OHMI, C‑311/11 P, EU:C:2012:460, point 23).

20      Il y a lieu de préciser que l’article 15, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement n° 207/2009 vise l’hypothèse où une marque enregistrée, nationale ou de l’Union européenne, est utilisée dans le commerce sous une forme légèrement différente par rapport à la forme sous laquelle l’enregistrement a été effectué. L’objet de cette disposition, qui évite d’imposer une conformité stricte entre la forme utilisée de la marque et celle sous laquelle la marque a été enregistrée, est de permettre au titulaire de cette dernière d’apporter au signe, à l’occasion de son exploitation commerciale, les variations qui, sans en altérer le caractère distinctif, permettent de mieux l’adapter aux exigences de commercialisation et de promotion des produits ou des services concernés. Conformément à son objet, le champ d’application matériel de cette disposition doit être considéré comme limité aux situations dans lesquelles le signe concrètement utilisé par le titulaire d’une marque pour désigner les produits ou les services pour lesquels celle-ci a été enregistrée constitue la forme sous laquelle cette même marque est commercialement exploitée. Dans de pareilles situations, lorsque la forme du signe utilisé dans le commerce diffère de la forme sous laquelle celui-ci a été enregistré uniquement par des éléments négligeables, de sorte que les deux signes peuvent être considérés comme globalement équivalents, la disposition susvisée prévoit que l’obligation d’usage de la marque enregistrée peut être remplie en rapportant la preuve de l’usage du signe qui en constitue la forme utilisée dans le commerce [arrêts du 23 février 2006, Il Ponte Finanziaria/OHMI – Marine Enterprise Projects (BAINBRIDGE), T‑194/03, EU:T:2006:65, point 50 ; du 10 juin 2010, ATLAS TRANSPORT, T‑482/08, non publié, EU:T:2010:229, point 30, et du 5 décembre 2013, Olive Line International/OHMI – Carapelli Firenze (Maestro de Oliva), T‑4/12, non publié, EU:T:2013:628, point 23 ; voir également, en ce sens, arrêt du 18 juillet 2013, Specsavers International Healthcare e.a., C‑252/12, EU:C:2013:497, point 29, et, par analogie, arrêt du 25 octobre 2012, Rintisch, C‑553/11, EU:C:2012:671, points 21 et 22].

21      Ainsi, le constat d’une altération du caractère distinctif de la marque enregistrée requiert un examen du caractère distinctif et dominant des éléments ajoutés en se fondant sur les qualités intrinsèques de chacun de ces éléments ainsi que sur la position relative des différents éléments dans la configuration de la marque [voir arrêt du 10 juin 2010, ATLAS TRANSPORT, T‑482/08, non publié, EU:T:2010:229, point 31 et jurisprudence citée ; arrêts du 5 décembre 2013, Maestro de Oliva, T‑4/12, non publié, EU:T:2013:628, point 24, et du 12 mars 2014, Borrajo Canelo/OHMI – Tecnoazúcar (PALMA MULATA), T‑381/12, non publié, EU:T:2014:119, point 30].

22      Il convient, aux fins d’un tel constat, de tenir compte également des qualités intrinsèques et, en particulier, du degré plus ou moins élevé de caractère distinctif de la marque enregistrée si elle est utilisée uniquement en tant que partie d’une marque complexe ou conjointement avec une autre marque. En effet, plus le caractère distinctif de celle-ci est faible, plus il sera aisément altéré par l’adjonction d’un élément lui-même distinctif et plus la marque en question perdra son aptitude à être perçue comme une indication de l’origine du produit. La considération inverse s’impose également [voir, en ce sens, arrêt du 24 septembre 2015, Klement/OHMI – Bullerjan (Forme d’un fourneau), T‑317/14, non publié, EU:T:2015:689, point 33].

23      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner les deux branches du moyen unique soulevées par la requérante, à savoir, la première, concernant le caractère distinctif de la marque contestée et, la seconde, concernant l’altération dudit caractère distinctif.

 Sur le caractère distinctif de la marque contestée

24      La requérante fait valoir que la chambre de recours a fondé son analyse sur une description erronée des caractéristiques de la marque contestée. À cet égard, la requérante soutient que la marque contestée n’est pas caractérisée par une forme carrée, un fond de couleur foncée et un alignement régulier de minuscules poissons de couleur claire, comme l’a considéré la chambre de recours au point 33 de la décision attaquée, mais par le dessin stylisé d’un poisson clair reproduit sur plusieurs lignes disposées en quinconce sur un fond de couleur foncée sous la forme d’une frise. De plus, selon la requérante, la chambre de recours n’a pas effectué une appréciation du caractère distinctif de la marque contestée prise dans son ensemble, mais a effectué une analyse de chacun des éléments la composant pris individuellement.

25      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

26      Aux points 33 à 37 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué que la marque contestée était une marque figurative composée d’une forme carrée, d’un fond de couleur foncée et d’un alignement régulier de minuscules poissons de couleur claire. Elle a considéré ce qui suit :

« Le carré est l’une des formes géométriques de base et n’est donc que faiblement distinctif en soi. Les motifs dessinés sur le fond rappellent que les produits en question sont du poisson et sont donc descriptifs des produits en cause. La couleur foncée du fond peut facilement évoquer la couleur bleue, qui est celle dans laquelle l’eau (milieu dans lequel vivent les poissons) est conventionnellement représentée, ce qui fait que cette caractéristique est faiblement distinctive. La couleur claire, utilisée pour les poissons, sert à rendre visibles ces derniers, puisque le fond est représenté en une couleur foncée ; cette couleur claire en fait, donc, également une caractéristique faiblement distinctive du point de vue du public concerné. »

27      À cet égard, s’agissant, en premier lieu, de la forme de la marque contestée, il y a lieu de relever qu’il peut être admis, ainsi qu’il est reconnu par l’EUIPO, que la marque contestée ne se présente pas sous une forme carrée laquelle correspondait au cadre des formulaires en papier pour le dépôt d’une marque de l’Union européenne de l’époque. Toutefois, contrairement à ce que soutient la requérante, aucun élément du dossier ne permet de conclure que la marque contestée a été enregistrée sous la forme d’une frise, c’est-à-dire d’une bande continue contenant un décor. Dans ces circonstances, il peut être conclu que ladite marque n’a pas été enregistrée sous une forme précise, mais en tant que motif sans contours.

28      En tout état de cause, il convient de souligner que ni la forme d’un carré, ni la forme d’une frise, ni un motif sans contours ne sauraient être considérés comme particulièrement distinctifs.

29      S’agissant, en deuxième lieu, de l’argumentation de la requérante selon laquelle le dessin stylisé d’un poisson de couleur claire reproduit au sein de la marque contestée a une forme spécifique qui s’avère particulièrement distinctive, elle ne saurait non plus prospérer. En effet, dans aucune des preuves de l’usage présentées devant le Tribunal le motif répétitif consistant en des poissons de couleur claire ne présente une forme particulièrement distinctive, en ce que la taille de chaque dessin de poisson n’est pas suffisamment grande pour permettre au consommateur moyennement attentif de distinguer plus qu’une forme générique de poisson.

30      S’agissant, en troisième lieu, de la disposition en quinconce des poissons sur la marque contestée, il suffit de relever, à l’instar de l’EUIPO, que cette disposition en quinconce est, en substance, un alignement régulier de poissons caractérisé par le fait que chaque ligne horizontale ou verticale est légèrement décalée par rapport à la ligne qui la précède. Il s’ensuit que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant que les poissons dans la marque contestée étaient disposés dans un alignement régulier et a considéré à juste titre que cette disposition n’avait pas un caractère particulièrement distinctif.

31      En quatrième lieu, pour ce qui est de la couleur foncée de fond de la marque contestée, cette couleur n’a pas non plus un caractère particulièrement distinctif, en ce que ladite couleur évoque la couleur bleue représentant, comme le relève la chambre de recours, la couleur de l’eau dans laquelle vivent les poissons.

32      Enfin, en ce qui concerne l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours n’a pas effectué une appréciation du caractère distinctif de la marque contestée prise dans son ensemble, il suffit de constater que la chambre de recours, après avoir effectué une analyse de chacun des éléments de la marque contestée, a indiqué expressément aux points 37 et 38 de la décision attaquée que ladite marque « appréciée dans son ensemble » présentait un caractère distinctif inférieure à la normale.

33      À la lumière des considérations qui précèdent, il y a lieu de conclure que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que la marque contestée présentait un caractère distinctif inférieur à la normale.

34      Cette conclusion n’est pas remise en cause par les autres arguments de la requérante.

35      S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours aurait déduit de la seule absence d’éléments « hautement distinctifs » dans la marque contestée le caractère distinctif inférieur à la normale de cette dernière , il suffit de relever que cette conclusion est le résultat des considérations effectuées par la chambre de recours tant au point 36 qu’au point 37 de la décision attaquée. Or, dans ces points, la chambre de recours ne se limite pas à considérer que la marque contestée ne présente pas des éléments hautement distinctifs, mais explique clairement les raisons qui l’ont amenée à conclure que ladite marque présente un caractère distinctif inférieur à la normale, à savoir que cette marque, appréciée dans son ensemble, ne fait que répéter des motifs descriptifs des produits (poissons), en couleur claire sur un fond foncé et à l’intérieur d’un cadre géométrique banal (carré). Il est certes vrai que l’utilisation des termes « hautement distinctif » est inappropriée dans le cadre du point 37 de la décision attaquée. Toutefois, la motivation qui a conduit la chambre de recours à tirer sa conclusion est correcte. Partant, cet argument ne saurait prospérer.

36      S’agissant de l’utilisation de l’étude présentée par la requérante, laquelle, selon cette dernière, démontrerait que la marque contestée présente incontestablement un caractère distinctif élevé, il y a lieu de souligner que, ainsi qu’il a été relevé par la chambre de recours aux points 39 et 40 de la décision attaquée, d’une part, cette étude était limitée au public français et, d’autre part, son objet n’était pas la reconnaissance de la marque contestée telle qu’enregistrée, mais la reconnaissance d’un emballage de saumon sur lequel, par ailleurs, la marque n’était pas représentée de façon identique à son enregistrement (voir « Étude Labeyrie – Reconnaissance emballage “Semis de saumon” », annexe A10.2 de la requête).

37      Dans ces circonstances, ladite étude ne saurait remettre en cause la conclusion de la chambre de recours selon laquelle la marque contestée présentait un caractère distinctif inférieur à la normale.

 Sur l’altération du caractère distinctif de la marque contestée

38      La requérante considère, en substance, que, même en considérant que le nom Labeyrie figurant sur les emballages produits à titre de preuve de l’usage de la marque contestée puisse être perçu « par un consommateur raisonnablement perspicace comme le signe principal », cela ne signifie pas que ce même consommateur n’accordera aucune importance au semis de poissons ni, a fortiori, qu’il ne le percevra pas comme une indication de l’origine commerciale du produit.

39      La requérante admet que le nom Labeyrie occupe effectivement une position centrale sur l’emballage en question. Cependant, elle considère que le bandeau présentant le semis de poissons reproduit les caractéristiques visuelles de la marque en cause constituées par le dessin des poissons disposés en quinconce sur un fond foncé. Elle fait valoir que ce dessin est positionné sur l’emballage au niveau où les éléments distinctifs sont apposés pour permettre aux consommateurs de reconnaître le produit parmi ceux de la concurrence. De plus, elle indique que l’emballage se caractérise par une combinaison d’éléments distinctifs dénominatifs et visuels, chacun ayant une fonction d’identification, et que le semis de poissons, par sa physionomie propre et son impact visuel proéminent occupant un large espace sur toute la longueur de l’emballage, exerce de manière effective la fonction d’identification des produits ayant pour origine la société Labeyrie.

40      En outre, la requérante considère que l’étude citée au point 36 ci-dessus démontre, elle aussi, que la marque contestée, telle qu’utilisée dans la forme de l’emballage, conserve son caractère distinctif.

41      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

42      En l’espèce, il y a lieu, tout d’abord, de constater que la chambre de recours a fondé son raisonnement relatif à l’altération du caractère distinctif de la marque contestée sur un des emballages de saumon fumé présentés par la requérante en tant que preuves de l’usage de ladite marque devant l’EUIPO. Ledit emballage correspond à l’image suivante :

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43      Au point 43 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré qu’il y avait deux différences entre la marque utilisée et la marque contestée, à savoir la surimposition du cartouche contenant le nom Labeyrie et la manière de représenter le semis de poissons.

44      Au point 44 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué que ces deux différences étaient de nature à altérer le caractère distinctif de la marque contestée.

45      Aux points 45 à 47 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que l’apposition du nom Labeyrie était de nature à interrompre ou à couvrir une partie du semis de poissons et que ce nom serait, pour cette raison, perçu comme appliqué en surimpression. De ce fait, cet élément serait interprété par un consommateur raisonnablement perspicace comme le signe principal figurant en premier plan sur l’emballage, alors que le semis de poissons serait interprété comme un élément moins important figurant en arrière-plan. Selon la chambre de recours, le fait que le nom Labeyrie apparaisse, en lettres majuscules, à l’intérieur d’un cartouche qui en rehausse l’importance, au centre du semis de poissons, et le fait, surtout, qu’il soit représenté de façon à occulter, en partie, ledit semis, montrent bien que c’est à ce nom – et non au semis – qu’est attribuée une fonction distinctive qui renseigne le consommateur sur l’origine commerciale du produit. En ce qui concerne le semis de poissons, la chambre de recours a indiqué que, si la marque telle qu’enregistrée montrait sans ambiguïté une forme déterminée, à savoir un carré, cette forme n’était aucunement respectée lors de l’utilisation. Or, selon la chambre de recours, le fait qu’une marque figurative de forme carrée n’apparaisse jamais dans cette forme sur les emballages mais toujours comme une bannière étroite et longue sur le bord desdits emballages était de nature à en altérer le caractère distinctif. En effet, le public percevrait cette bannière comme un élément décoratif ou destiné à servir d’arrière-plan et non comme un signe distinctif, d’autant plus que sa longueur variait en fonction de la taille de l’emballage et que le motif représenté faisait une allusion directe au produit.

46      Ainsi qu’il a été rappelé au point 21 ci-dessus, le constat d’une altération du caractère distinctif de la marque enregistrée requiert un examen du caractère distinctif et dominant des éléments ajoutés en se fondant sur les qualités intrinsèques de chacun de ces éléments ainsi que sur la position relative des différents éléments dans la configuration de la marque. Il y a donc lieu de vérifier ces éléments dans le cas d’espèce.

47      Tout d’abord, il convient de souligner que le cartouche contenant le nom Labeyrie est en soi une marque de l’Union européenne enregistrée le 19 octobre 2005 sous le numéro 30003886967 pour les produits des classes 29 et 30 (ci-après la « marque LABEYRIE »).

48      À cet égard, il y a lieu de rappeler que la condition d’usage sérieux d’une marque au sens de l’article 15, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 peut être remplie lorsqu’une marque est utilisée conjointement avec une autre marque, pour autant que la marque continue d’être perçue comme une indication de l’origine du produit en cause.

49      Ainsi, le seul fait que le signe LABEYRIE soit également enregistré comme marque de l’Union européenne ne saurait affecter en tant que tel le caractère distinctif de la marque contestée.

50      Il convient néanmoins de vérifier si la surimposition de la marque LABEYRIE sur la marque contestée constitue une utilisation de cette marque sous une forme qui diffère de celle enregistrée sans que son caractère distinctif soit altéré.

51      Il y a lieu de relever que l’emballage fourni en tant que preuve d’usage présente la marque LABEYRIE bien en évidence en position centrale de l’emballage et surimposée au motif de semis de poissons de la marque contestée. Par conséquent, comme le relève à juste titre la chambre de recours, la marque LABEYRIE a une fonction distinctive, étant placée dans une position privilégiée sur l’emballage et cachant partiellement le motif de la marque contestée.

52      De plus, les caractéristiques et la position de l’élément ajouté ne permettent pas de le considérer comme étant négligeable, de sorte que la marque contestée et la marque utilisée ne peuvent pas être considérées comme globalement équivalentes.

53      Il convient, en outre, de rappeler que, selon la jurisprudence, lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence au produit en cause en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif de la marque [voir arrêt du 9 septembre 2008, Honda Motor Europe/OHMI – Seat (MAGIC SEAT), T‑363/06, EU:T:2008:319, point 30 et jurisprudence citée].

54      S’agissant des considérations effectuées par la requérante concernant les caractéristiques de la marque contestée, il convient de rappeler qu’il a déjà été jugé aux points 27 à 33 ci-dessus que cette marque a un caractère distinctif inférieur à la normale et il s’ensuit qu’il ne peut pas être reproché à la chambre de recours de n’avoir pas suffisamment considéré ces caractéristiques. Au contraire, la chambre de recours a examiné les différences entre la marque contestée et la marque utilisée et a conclu, à juste titre, que la distinctivité de l’élément ajouté à la marque contestée en altérait le caractère distinctif.

55      S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours n’aurait pas examiné d’autres preuves produites par la requérante qui démontreraient l’utilisation intensive et ancienne de la marque contestée sous diverses formes , il convient de relever, tout d’abord, que la chambre de recours a, à juste titre, pris en compte seulement les preuves concernant la période pertinente, à savoir la période comprise entre le 12 mars 2009 et le 11 mars 2014.

56      En outre, il convient de relever qu’une partie des emballages fournis en tant que preuves de l’usage de la marque contestée sont semblables à l’emballage reproduit au point 42 ci-dessus et que les autres emballages fournis par la requérante présentent des différences encore plus marquées par rapport à la marque contestée. À cet égard, les poissons n’apparaissent pas toujours reproduits de la même façon au sein de la marque contestée dans les emballages de saumon fumé présentés par la requérante. Ainsi, dans un emballage [voir page 206 des annexes de la requête], des canards et des oies sont intercalés entre les poissons. Dans un autre emballage [voir page 153 des annexes de la requête], les poissons ne sont pas entièrement de couleur claire mais sont présentés sous forme de silhouettes bleues à l’intérieur. En outre, dans d’autres emballages [voir pages 214 à 218 des annexes de la requête], la couleur de fond n’est pas foncée mais claire.

57      S’agissant enfin des arguments de la requérante concernant l’absence de forme carrée de la marque utilisée , il convient de rappeler, ainsi qu’il a été constaté aux points 27 et 28 ci-dessus, d’une part, qu’il ne peut pas être exclu que la marque contestée ne se présente pas sous une forme carrée et, d’autre part, que ni la forme d’un carré, ni la forme d’une frise, ni un motif sans contours ne sauraient être considérés comme particulièrement distinctifs.

58      De plus, il y a lieu de constater que la requérante a présenté des preuves qui démontrent un usage de la marque contestée sous des formes différentes. Ainsi, dans certains cas, la marque contestée apparaît en forme de frise dans la partie supérieure ou inférieure de l’emballage . Dans d’autres cas, la marque contestée est utilisée comme un fond couvrant tout l’emballage.

59      Il convient donc de conclure, à l’instar de la chambre de recours, que le public percevra cet élément comme décoratif ou destiné à servir d’arrière-plan et non comme un signe distinctif de la marque contestée.

60      Dans ces conditions, ainsi qu’il est indiqué par la jurisprudence rappelée au point 22 ci-dessus, le faible degré de caractère distinctif de la marque contestée en l’espèce est aisément altéré par l’adjonction d’un élément tel que la marque LABEYRIE lui-même distinctif (voir, en ce sens, arrêt du 24 septembre 2015, Forme d’un fourneau, T‑317/14, non publié, EU:T:2015:689, point 33).

61      Il s’ensuit que, même en admettant que la marque contestée ne se présente pas sous la forme d’un carré, contrairement à ce qu’indique la chambre de recours, sa conclusion selon laquelle les différences entre la marque utilisée et la marque contestée sont de nature à altérer le caractère distinctif de cette dernière ne saurait être remise en cause.

62      À la lumière de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le moyen unique soulevé par la requérante.

63      S’agissant enfin des arguments par lesquels la requérante fait grief à la chambre de recours de ne pas avoir procédé à une appréciation de l’ensemble des éléments qu’elle a produits pour prouver l’intensité de l’usage de sa marque ,il suffit de rappeler, ainsi qu’il a été relevé aux points 47 à 60 ci-dessus, que la chambre de recours a, à juste titre, considéré, sur la base des preuves produites par la requérante, que les différences entre la marque utilisée et la marque enregistrée étaient de nature à altérer le caractère distinctif de cette dernière. Par conséquent, elle a, en substance, conclu, à juste titre, qu’il n’y avait pas lieu d’examiner ces preuves afin d’apprécier l’intensité de l’usage de ladite marque. Dans ces conditions, ces arguments de la requérante sont inopérants.

64      Il résulte de tout ce qui précède qu’il convient de rejeter le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

65      Au titre de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

66      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO.

67      L’intervenante n’ayant pas conclu à ce que la requérante soit condamnée aux dépens, elle supportera, conformément à l’article 138, paragraphe 3, du règlement de procédure, ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Labeyrie est condamnée à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par l’EUIPO.

3)      Delpeyrat supportera ses propres dépens.

Kanninen

Calvo-Sotelo Ibáñez-Martín

Reine

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 28 février 2017.

Le greffier

 

      Le président

E. Coulon

 

      H. Kanninen



*      Langue de procédure : le français.

Augša