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Dokument 61995TJ0166
Judgment of the Court of First Instance (Fourth Chamber) of 17 December 1997. # Mary Karagiozopoulou v Commission of the European Communities. # Officials - Internal competition for appointing category C staff to category B - Decision of the selection board listing candidates who failed the oral test - Principle of equality of treatment - Assessment by the selection board. # Case T-166/95.
1997 m. gruodžio 17 d. Pirmosios instancijos teismo (ketvirtoji kolegija) sprendimas.
Mary Karagiozopoulou prieš Europos Bendrijų Komisiją.
Pareigūnai.
Byla T-166/95.
1997 m. gruodžio 17 d. Pirmosios instancijos teismo (ketvirtoji kolegija) sprendimas.
Mary Karagiozopoulou prieš Europos Bendrijų Komisiją.
Pareigūnai.
Byla T-166/95.
Euroopa kohtulahendite tunnus (ECLI): ECLI:EU:T:1997:201
ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)
17 décembre 1997 ( *1 )
«Fonctionnaires — Concours interne de passage de la catégorie C à la catégorie B — Décision du jury constatant l'échec de candidats à l'épreuve orale — Principe d'égalité de traitement — Appréciation du jury»
Dans l'affaire T-166/95,
Mary Karagiozopoulou, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Bruxelles, représentée par Mes Ariane Tornei et Thierry Demaseure, et lors de la procédure orale, par Me Jean-Noël Louis, avocats au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de la fiduciaire Myson SARL, 30, rue de Cessange,
partie requérante,
contre
Commission des Communautés européennes, représentée par M. Gianluigi Valsesia, conseiller juridique principal, en qualité d'agent, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,
partie défenderesse,
ayant pour objet une demande d'annulation de la décision du jury du concours interne COM/B/9/93 d'attribuer à la requérante, pour l'épreuve orale, une note inférieure au minimum requis et de ne pas l'inscrire sur la liste d'aptitude,
LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),
composé de M. K. Lenaerts, président, Mme P. Lindh et M. J. D. Cooke, juges,
greffier: M. A. Mair, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 9 juillet 1997,
rend le présent
Arrêt
Faits à l'origine du litige
1 |
La requérante, fonctionnaire de la Commission de catégorie C, a présenté sa candidature au concours interne COM/B/9/93 permettant le passage de la catégorie C à la catégorie B et ayant pour but d'établir une liste d'aptitude d'assistants adjoints de grades 5 et 4 de la catégorie B pour l'exercice de fonctions d'application, sous contrôle, consistant en des travaux de bureau courants en qualité d'assistant adjoint, d'assistant de secrétariat adjoint et d'assistant technique adjoint. |
2 |
L'avis de concours prévoyait:
|
3 |
La requérante, ayant obtenu un résultat satisfaisant à l'épreuve de présélection et à l'épreuve rédactionnelle, a été admise à l'épreuve orale qui a eu lieu le 17 octobre 1994. |
4 |
Par lettre du 18 novembre 1994, la requérante a été informée que, faute d'avoir obtenu le minimum de points requis à l'épreuve orale, son nom n'avait pu être inscrit sur la liste d'aptitude. |
5 |
Le 13 décembre 1994, la requérante a introduit une demande au titre de l'article 90 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après «statut») tendant à obtenir une modification de la décision négative du jury du concours. Cette demande a été ensuite requalifiée de réclamation et complétée par une note additionnelle du 28 février 1995. Elle a fait l'objet d'une réponse explicite de rejet de la Commission, notifiée à la requérante le 27 juin 1995. |
Procédure
6 |
C'est dans ces circonstances que, par requête déposée au greffe du Tribunal le 30 août 1995, la requérante a introduit le présent recours. |
7 |
Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale sans procéder à des mesures d'instruction préalables. Toutefois, la Commission a été invitée à produire certains documents concernant le déroulement du concours litigieux. |
8 |
La Commission a produit les documents demandés par lettre déposée au greffe du Tribunal le 27 juin 1997. |
9 |
Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l'audience du 9 juillet 1997. |
Conclusions des parties
10 |
La requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:
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11 |
La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:
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Sur le fond
12 |
La requérante invoque deux moyens à l'appui de son recours. Le premier est tiré d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une violation du principe d'égalité de traitement et de non-discrimination, et le second d'une violation de l'article 5, cinquième alinéa, de l'annexe III du statut. |
Sur le premier moyen, tiré d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une violation du principe d'égalité de traitement et de non-discrimination
Arguments des parties
13 |
La requérante soutient que la composition du jury était entachée d'une irrégularité en ce que ses membres, par manque de connaissance de la langue grecque, n'avaient pas pu apprécier personnellement et objectivement ses performances à l'épreuve orale au regard de ses qualités professionnelles, et notamment sa clarté et son esprit de synthèse. |
14 |
Elle invoque d'abord les arrêts du Tribunal du 22 juin 1990, Marcopoulos/Cour de justice (T-32/89 et T-39/89, Rec. p. II-281, points 37, 40 et 41), et du 17 mars 1994, Hoyer/Commission (T-43/91, RecFP p. II-297, points 51 et suivants), desquels il ressort que la composition d'un jury de concours pour interprètes de conférence est irrégulière si aucun membre avec voix deliberative n'a la maîtrise, à la fois, de la langue vers laquelle le candidat travaille et de la pratique effective de la profession d'interprète de conférence. Une telle composition ne permet pas, en effet, de garantir une appréciation objective et égale entre les candidats. La requérante fait remarquer que, selon cette jurisprudence, le fait que le jury s'entoure des avis de plusieurs assesseurs interprètes n'est pas de nature à pouvoir compenser ce manque de connaissances linguistiques. |
15 |
La requérante fait également référence à l'arrêt du Tribunal du 16 octobre 1990, Gallone/Conseil (T-132/89, Rec. p. II-549, point 28), dans lequel le Tribunal a énoncé que «le jury peut recourir à l'assistance d'assesseurs dans tous les cas où il l'estime nécessaire. La régularité des opérations est respectée dès lors que les méthodes de correction ne diffèrent pas selon les candidats et que le jury conserve le pouvoir d'appréciation final». |
16 |
Elle conteste la thèse, exprimée par la Commission dans sa décision explicite de rejet, selon laquelle son cas serait différent de celui en cause dans les arrêts Marcopoulos/Cour de justice et Hoyer/Commission, précités, dès lors que son épreuve orale devait permettre au jury d'apprécier la capacité d'exprimer oralement des idées et non la capacité linguistique stricte. A cet égard, elle fait observer que ladite décision explicite de rejet indique que le candidat devait faire preuve de clarté et d'esprit de synthèse lors de l'épreuve orale. Selon elle, étant donné que chaque langue a sa structure propre, aucun interprète ne saurait reproduire fidèlement la clarté et l'esprit de synthèse des candidats. |
17 |
La requérante renvoie aussi, à cet égard, au Guide à l'attention des jurys de concours de la Cour de justice, qui indique, pour ce qui est du déroulement de l'épreuve orale: «Il est important de mettre à l'aise le candidat et de le faire parler. Le président du jury dirige l'entretien, fait ou laisse intervenir les membres et/ou assesseurs du jury, de préférence selon un schéma convenu préalablement. Il est important aussi que le président du jury veille à ce que l'égalité de traitement de tous les candidats ainsi que la constance d'approche par le jury soient maintenues pendant toute la durée des épreuves.» |
18 |
La requérante ajoute que l'annexe F à ce guide («Modèles de grille d'évaluation pour l'épreuve orale») mentionne, dans le cadre de la grille relative aux «connaissances linguistiques», en premier lieu, l'appréciation de la compréhension et de l'expression orale dans la langue maternelle. |
19 |
Or, en l'espèce, il lui semble évident que l'intervention d'un interprète n'a pu permettre aux membres du jury d'apprécier valablement tant la maîtrise qu'elle possède de sa langue maternelle que sa capacité d'expression orale. |
20 |
En outre, loin de mettre la requérante en confiance lors des épreuves, la présence d'un interprète aurait eu pour conséquence de la déstabiliser. En effet, ses réponses étant traduites simultanément, il lui était impossible de se concentrer en même temps sur ses propos et sur la traduction qui en était faite, et donc de pouvoir apprécier la fiabilité de la traduction. |
21 |
Ensuite, la requérante affirme que les candidats grecs, portugais et danois n'ont été ni invités ni autorisés à s'exprimer dans une autre langue que leur langue maternelle. A l'audience, son conseil a prétendu que la requérante avait, pour sa part, demandé au jury de s'exprimer en anglais ce qui lui avait été refusé. |
22 |
Dans ce contexte, la requérante fait également remarquer qu'aucun des autres candidats qui s'étaient exprimés en grec, en portugais ou en danois, langues dont aucun membre du jury n'avait connaissance, n'avait été inscrit sur la liste d'aptitude. |
23 |
Enfin, la requérante soutient que sa thèse est confirmée par le fait qu'elle a obtenu d'excellentes appréciations de la part de ses supérieurs, qui ont eu la possibilité d'apprécier quotidiennement, depuis près de cinq ans, ses qualités et notamment son sens des relations humaines, sa capacité d'initiative et son aptitude à travailler tant comme membre d'une équipe que d'une manière indépendante et autonome. A cet égard, elle s'appuie notamment sur son rapport de notation pour la période de 1991 à 1993, qui fait apparaître douze appréciations «excellent» et deux appréciations «très bien», et sur une note du 28 avril 1995 du directeur général de la direction générale Politiques régionales (DG XVI) la proposant pour une promotion au grade C 2. |
24 |
La requérante déduit de tout ce qui précède que le jury, en estimant qu'elle ne possédait pas les aptitudes requises pour s'adapter à de nouvelles tâches exercées à un niveau supérieur, s'est rendue coupable d'une erreur manifeste d'appréciation. |
25 |
En agissant ainsi, le jury aurait également violé le principe d'égalité de traitement et de non-discrimination. En effet, n'étant pas en mesure d'évaluer objectivement la qualité des réponses de la requérante quant aux deux principaux éléments, fixés préalablement par l'avis de concours, à savoir la clarté et l'esprit de synthèse, il n'aurait pas utilisé la même méthode d'appréciation que pour les autres candidats lors de l'épreuve orale. |
26 |
La Commission fait observer que, dans les affaires Marcopoulos/Cour de justice et Hoyer/Commission, précitées, invoquées par la requérante, étaient en cause des concours visant à constituer une réserve de recrutement d'interprètes. L'appréciation du Tribunal serait, dès lors, clairement circonscrite à une situation dans laquelle la composition du jury n'apparaissait pas à même de garantir une appréciation objective des performances des candidats à l'épreuve orale, au regard de leurs qualités professionnelles et des fonctions qu'ils pouvaient être appelés à exercer. |
27 |
En se référant au libellé de l'avis de concours, selon lequel l'épreuve orale consistait en un entretien avec le jury visant à apprécier, en fonction des éléments qui s'étaient dégagés des épreuves écrites, la capacité d'expression orale et l'aptitude des candidats à l'exercice de fonctions de catégorie B, la Commission soutient que le cas d'espèce est tout à fait différent. En effet, le jugement exprimé sur les aptitudes des candidats, au stade oral de la procédure de sélection, était essentiellement axé sur la substance de leurs réponses, filtrées à travers la capacité de raisonnement qu'elles démontraient, l'approche logique qu'elles impliquaient et la clarté et l'esprit de synthèse dont elles témoignaient. |
28 |
La Commission affirme qu'il est parfaitement possible d'évaluer ces paramètres, même à travers une interprétation simultanée des réponses fournies, et que le jury était donc en mesure de se prononcer sur l'aptitude des candidats à s'adapter à des tâches nouvelles au niveau de la catégorie supérieure. |
29 |
La Commission en conclut qu'il ne saurait être question d'une erreur manifeste d'appréciation du jury, imputable à l'intervention d'un interprète, ni d'un traitement discriminatoire de certains candidats, par rapport à d'autres, en ce qui concerne la méthode d'appréciation de l'épreuve orale. |
30 |
Sur la base de cette constatation, elle fait valoir que les passages du Guide à l'attention des jurys de concours invoqués par la requérante sont dénués de pertinence, car l'égalité de traitement des candidats, en l'espèce, n'aurait pas été rompue par l'intervention des interprètes lors des épreuves orales des candidats s'exprimant dans certaines langues. |
31 |
La Commission conteste aussi l'argument de la requérante selon lequel la présence d'un interprète, lors de son oral, aurait été de nature à la déstabiliser. En effet, au vu de l'économie générale et de la nature de l'épreuve orale en cause, la présence d'un interprète ne pourrait être considérée comme un élément de trouble pour le candidat concerné, susceptible d'affecter les conditions d'égalité de traitement entre ce dernier et les autres candidats en lice. |
32 |
Quant à l'assertion de la requérante, selon laquelle elle n'a pas été autorisée à s'exprimer dans une autre langue que sa langue maternelle, la Commission affirme qu'elle est inexacte. Lors de l'audience, elle a mis en doute l'affirmation du conseil de la requérante selon laquelle la requérante aurait demandé à s'exprimer en anglais. A cet égard, elle a produit un document du 3 juin 1994, intitulé «COM/B/9/93, choix de la langue pour l'épreuve orale», dont il ressort que la requérante a choisi la langue grecque pour l'épreuve orale. |
33 |
Enfin, pour ce qui est des mérites de la requérante, la Commission souligne que ceux-ci ne peuvent apporter le moindre élément de preuve décisif quant à l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation dont elle aurait été victime lors de l'épreuve orale du concours. En effet, indépendamment des aléas qui caractérisent nécessairement un concours, l'appréciation portée, dans le cadre d'un concours interne, sur l'aptitude d'un candidat à exercer des tâches relevant d'une catégorie supérieure et l'appréciation portée sur la capacité d'un fonctionnaire à exercer les fonctions correspondant à la catégorie à laquelle il appartient sont très différentes. |
Appréciation du Tribunal
34 |
Le jury d'un concours, pour être constitué conformément aux dispositions du statut et de l'article 3 de son annexe III, doit être composé de façon à garantir une appréciation objective de la performance des candidats aux épreuves (voir arrêt Marcopoulos/Cour de justice, précité, point 37). Les exigences auxquelles doivent satisfaire les compétences des membres du jury varient, cependant, en fonction des circonstances propres à chaque concours (voir arrêt du Tribunal du 27 juin 1991, Valverde Mordt/Cour de justice, T-156/89, Rec. p. II-407, point 106). |
35 |
II s'ensuit, notamment, que les exigences concernant les connaissances linguistiques des membres d'un jury varient en fonction de l'importance que revêt la maîtrise d'une langue dans l'emploi à pourvoir. S'agissant d'un concours pour interprètes de conférence, la maîtrise linguistique constitue évidemment une exigence primordiale, et le jury doit être composé en conséquence. Pour un tel concours, la jurisprudence impose qu'au moins un membre avec voix deliberative ait la maîtrise, à la fois, de la langue vers laquelle le candidat travaille et de la pratique effective de sa profession d'interprète de conférence (voir arrêts Marcopoulos/Cour de justice et Hoyer/Commission, précités). |
36 |
Cependant, il en va autrement si, comme en l'espèce, le concours concerne le passage de la catégorie C à la catégorie B, ayant pour but d'établir une liste d'aptitude d'assistants adjoints. Dans ce cas, la maîtrise de la langue des candidats ne constitue pas une qualité toute particulière, comme c'est le cas dans le cadre d'un concours pour interprètes. C'est au vu de cela qu'il y a lieu de regarder le libellé de l'avis de concours selon lequel l'entretien du jury avec les candidats visait à apprécier «en fonction des éléments qui s'étaient dégagés des épreuves écrites, la capacité d'expression orale et d'aptitude des candidats à l'exercice de fonctions de la catégorie B». Comme la Commission l'a affirmé ajuste titre, le jugement exprimé sur les aptitudes des candidats, au stade oral de la procédure de sélection, est essentiellement fondé sur la substance de leurs réponses ainsi que sur la capacité de raisonnement et l'approche logique dont témoignent ces réponses. C'est d'ailleurs ainsi que le jury a pu compléter son appréciation des candidats qui ont réussi l'épreuve écrite sur d'autres bases que celles de la connaissance théorique et de la rédaction et, partant, a été en mesure d'évaluer leur aptitude générale à exercer des fonctions de la catégorie B. |
37 |
Dans ces conditions, le souci du jury d'assurer une égalité absolue de traitement entre les candidats doit être concilié avec les exigences d'une bonne administration. En effet, exiger que l'un au moins des membres du jury maîtrise la langue utilisée par chacun des candidats dans un cas comme celui d'espèce alourdirait le système de recrutement d'une manière disproportionnée. Il s'ensuit que l'interprétation, permettant à tous les candidats de s'exprimer dans leur langue maternelle, assure d'une façon satisfaisante le traitement égal des candidats. |
38 |
Quant à l'argument de la requérante selon lequel la présence d'un interprète aurait été de nature à la déstabiliser, il y a lieu d'observer que la requérante, apparemment familiarisée avec les méthodes de travail dans la Communauté et ayant choisi la langue grecque aux fins de l'épreuve orale, n'a pas pu imaginer que cette épreuve puisse se dérouler sans la présence d'un interprète. En conséquence, la requérante ne peut valablement prétendre avoir été surprise par la présence d'un interprète ni davantage en avoir éprouvé un sentiment d'insécurité. |
39 |
En ce qui concerne l'allégation de la requérante selon laquelle elle a demandé au jury de s'exprimer en anglais plutôt qu'en grec, il convient, tout d'abord, d'observer que cette allégation est présentée d'une manière très générale dans la requête et sans la moindre indication qu'elle aurait demandé à s'exprimer dans une autre langue que celle initialement choisie. |
40 |
En effet, le point 53 de la requête indique que «les candidats grecs, portugais et danois n'ont été ni invités ni autorisés, s'ils le souhaitaient, à présenter leur épreuve orale dans l'une des langues maîtrisées par au moins un des membres du jury». Or, une telle affirmation donne davantage l'impression que la requérante a conclu qu'elle n'avait pas la possibilité de changer de langue lors de l'épreuve orale sans pour autant avoir demandé de le faire. Cette hypothèse est corroborée par le fait que, après que la Commission a contesté la thèse de la requérante dans son mémoire en défense, celle-ci n'est pas revenue sur ce point pendant la procédure écrite. Ce n'est que pendant l'audience que le conseil de la requérante a développé cette thèse en affirmant, tout en étant contredit sur ce point par la Commission, que la requérante a demandé au jury de s'exprimer en anglais. |
41 |
Dans ces circonstances, et eu égard au fait que la requérante avait choisi la langue grecque pour l'épreuve orale, il n'y a pas lieu de tenir compte de la thèse de la requérante selon laquelle elle avait demandé au jury de s'exprimer dans une autre langue que sa langue maternelle. |
42 |
Enfin, en ce qui concerne l'affirmation de la requérante selon laquelle elle a obtenu d'excellentes appréciations de ses supérieurs, il importe de souligner qu'il s'agissait en l'espèce d'un concours sur épreuves et que le jury n'a pas octroyé à la requérante le minimum des points requis à l'épreuve orale. |
43 |
Une telle décision du jury constitue l'expression d'un jugement de valeur quant à la prestation d'un candidat lors de l'épreuve orale et s'insère dans le large pouvoir d'appréciation dont dispose le jury. Elle ne saurait être soumise au contrôle du juge communautaire qu'en cas de violation évidente des règles qui président aux travaux du jury (voir arrêts du Tribunal du 1er décembre 1994, Michaël-Chiou/Commission, T-46/93, RecFPp. II-929, point 48, du 14 juillet 1995, Pimley-Smith/Commission, T-291/94, RecFP p. II-637, point 63, et du 21 mai 1996, Kaps/Cour de justice, T-153/95, RecFP p. II-663, point 38). |
44 |
II s'ensuit que, quels que soient les mérites de la requérante, ceux-ci ne sauraient suffire pour établir l'existence d'une erreur manifeste dans l'évaluation de sa prestation par le jury lors de l'épreuve orale. |
45 |
II ressort de ce qui précède que le moyen doit être rejeté. |
Sur le second moyen, tiré d'une violation de l'article 5, cinquième alinéa, de l'annexe III du statut
Arguments des parties
46 |
La requérante rappelle que l'article 5, cinquième alinéa, de l'annexe III du statut énonce que la liste d'aptitude établie par le jury doit comporter, dans toute la mesure du possible, un nombre de candidats au moins double du nombre des emplois à pourvoir. Elle relève ensuite que la Commission s'est engagée, lors des négociations avec les représentants du personnel, à prévoir, pour l'exercice budgétaire litigieux, 60 postes destinés à la revalorisation d'emplois relevant de la catégorie C en emplois de la catégorie B. |
47 |
Elle en conclut que, en application du «système en cascade», la Commission devait prévoir, dans la mesure du possible, d'établir une liste d'aptitude de 120 candidats et, dès lors, d'admettre à l'épreuve orale environ 240 candidats au lieu de décider à l'avance de limiter à 120 le nombre de candidats admis à l'épreuve orale. |
48 |
La requérante critique enfin la volonté même de limiter à l'avance le nombre de lauréats. Elle estime que cela a conduit le jury à adopter des critères de sélection et d'évaluation trop rigoureux par rapport au but à atteindre. |
49 |
La Commission souligne que l'article 5, cinquième alinéa, de l'annexe III du statut n'implique qu'une recommandation au jury tendant à faciliter les décisions de l'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après «AIPN»), et dont l'appréciation dépend du caractère et des circonstances du concours, du nombre des candidats et de leurs qualifications (voir arrêt de la Cour du 26 octobre 1978, Agneessens e.a./Commission, 122/77, Rec. p. 2085, point 22). |
50 |
Elle rappelle que, sous le titre VIII de l'avis de concours, il est précisé que «le jury arrête la liste d'aptitude comprenant au maximum les 60 candidats ayant obtenu les meilleures notes au total des épreuves a), b) et c). Ceux-ci doivent avoir au minimum la moitié des points pour chacune des épreuves a), b) et c)». |
51 |
Partant, l'établissement d'une liste d'aptitude comprenant moins de 60 candidats n'aurait pas été exclu et le jury, en arrêtant une liste d'aptitude de 37 lauréats, n'aurait donc violé ni ledit avis ni les dispositions de l'article 5, cinquième alinéa, de l'annexe III du statut. |
52 |
En effet, selon la Commission, le jury ne pouvait pas inscrire la requérante sur la liste d'aptitude, dans la mesure où, en agissant ainsi, il aurait modifié substantiellement les conditions du concours. |
53 |
Enfin, quant à son engagement de mettre 60 postes budgétaires à disposition pour les suites à donner aux résultats du concours, la Commission invoque l'arrêt Michaël-Chiou/Commission, précité (point 57), duquel il ressort qu'«un tel engagement ne saurait affecter le devoir du jury, agissant en toute indépendance, de décider, selon son propre pouvoir d'appréciation, du nombre de candidats ayant satisfait aux exigences du concours». |
Appréciation du Tribunal
54 |
L'avis de concours prévoit que «le jury arrête la liste d'aptitude comprenant au maximum les 60 candidats ayant obtenu les meilleures notes au total des épreuves a), b) et c)». Il en résulte que, le jury étant lié par les termes de l'avis de concours, il n'avait pas le droit de dresser une liste comprenant plus de 60 candidats (voir arrêt du Tribunal du 28 novembre 1991, van Hecken/CES, T-158/89, Rec. p. II-1341, point 23). |
55 |
Pour ce qui est de l'article 5, cinquième alinéa, de l'annexe III du statut, il convient de souligner que, s'il est vrai que celui-ci prévoit que la liste d'aptitude établie par le jury doit comporter, dans toute la mesure du possible, un nombre de candidats au moins double du nombre des emplois à pourvoir, il n'implique, cependant, qu'une recommandation au jury tendant à faciliter les décisions de l'AIPN (voir arrêt Agneessens e.a./Commission, précité, point 22), et n'est donc pas susceptible d'autoriser le jury à dépasser le cadre qui lui est imposé par l'avis de concours. |
56 |
Par ailleurs, à supposer qu'il faille interpréter cette branche du moyen comme une exception d'illégalité contre le libellé de l'avis de concours, selon lequel le nombre de candidats à inscrire sur la liste d'aptitude ne peut excéder 60, force est de constater que la requérante n'a pas été inscrite par le jury sur la liste d'aptitude en raison du fait qu'elle n'a pas obtenu la moitié des points à l'épreuve orale, une exigence de l'avis de concours qu'elle n'a aucunement contestée. Il s'ensuit que, en tout état de cause, compte tenu de l'appréciation du jury sur son épreuve orale, elle n'aurait pas pu être inscrite sur la liste d'aptitude, même si l'avis de concours avait permis d'inscrire plus de 60 candidats sur cette liste. L'argument est donc dénué de pertinence. |
57 |
II s'ensuit que ce moyen doit être rejeté. |
58 |
II résulte de tout ce qui précède que le recours doit être rejeté dans son intégralité. |
Sur les dépens
59 |
Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Toutefois, en vertu de l'article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celle-ci. |
Par ces motifs, LE TRIBUNAL (quatrième chambre) déclare et arrête: |
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Lenaerts Lindh Cooke Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 17 décembre 1997. Le greffier H. Jung Le président P. Lindh |
( *1 ) Langue de procédure: le français.
( *2 ) Dans le cas où, pour la dernière place (360e, 120e, 60e respectivement), plusieurs candidats auraient obtenu des notes identiques, le jury prendra en compte tous ces candidats.»