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Document 62021TO0042(02)

A Törvényszék végzése (ötödik tanács), 2023. október 13.
Fundacja Instytut na rzecz Kultury Prawnej Ordo Iuris kontra Európai Parlament.
Megsemmisítés iránti kereset – Az abortuszhoz való jog de facto lengyelországi betiltásáról szóló parlamenti állásfoglalás – Keresettel meg nem támadható aktus – Elfogadhatatlanság.
T-42/21. RENV. sz. ügy.

ECLI identifier: ECLI:EU:T:2023:666

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

13 octobre 2023 (*)

« Recours en annulation – Résolution du Parlement sur l’interdiction de fait du droit à l’avortement en Pologne – Acte non susceptible de recours – Irrecevabilité »

Dans l’affaire T‑42/21 RENV,

Fundacja Instytut na rzecz Kultury Prawnej Ordo Iuris, établie à Varsovie (Pologne), représentée par Mes K. Koźmiński et T. Siemiński, avocats,

partie requérante,

contre

Parlement européen, représenté par MM. G. Corstens et W. Kuzmienko, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. J. Svenningsen, président, C. Mac Eochaidh (rapporteur) et Mme M. Stancu, juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’ordonnance du 15 février 2023, Fundacja Instytut na rzecz Kultury Prawnej Ordo Iuris/Parlement (C‑546/21 P, non publiée, EU:C:2023:123),

rend la présente

Ordonnance

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Fundacja Instytut na rzecz Kultury Prawnej Ordo Iuris, demande l’annulation de la résolution du Parlement européen du 26 novembre 2020 sur l’interdiction de fait du droit à l’avortement en Pologne [2020/2876(RSP)] (ci-après la « résolution attaquée »).

 Antécédents du litige et procédure devant les juridictions de l’Union européenne

2        La requérante est une organisation non gouvernementale de droit polonais dont le siège est établi à Varsovie (Pologne) et qui a pour objet la défense des valeurs protégées par la Constitution polonaise.

3        Le 26 novembre 2020, le Parlement a adopté la résolution attaquée, dans laquelle il considère notamment que l’arrêt du 22 octobre 2020 du Trybunał Konstytucyjny (Cour constitutionnelle, Pologne) rendant illégal l’avortement dans les cas de malformations fœtales graves et irréversibles (ci-après l’« arrêt de la Cour constitutionnelle »), compromet la santé et les droits des femmes et met leur vie en danger, étant donné que la plupart des avortements légaux dans le pays sont pratiqués pour ces raisons. Selon la résolution attaquée, l’arrêt de la Cour constitutionnelle entraîne de fait une interdiction presque totale du droit à l’avortement en Pologne. Le Parlement indique que cette décision a été prise par des juges élus par la coalition au pouvoir et qui en dépendent entièrement. Il relève également que la requérante, étroitement liée à la coalition au pouvoir, joue un rôle moteur dans les campagnes visant à porter atteinte aux droits de l’homme et à l’égalité entre les hommes et les femmes en Pologne, et ce, entre autres, par des tentatives d’interdire l’avortement. Aussi, le Parlement demande notamment, d’une part, à la Commission européenne d’évaluer la composition illégale du Trybunał Konstytucyjny (Cour constitutionnelle) et, d’autre part, au Conseil de l’Union européenne de prendre des mesures concernant cette question et d’autres allégations de violation des droits fondamentaux en Pologne en élargissant la portée de ses auditions alors actuelles sur la situation en Pologne, conformément à l’article 7, paragraphe 1, TUE.

4        Par ordonnance du 25 juin 2021, Fundacja Instytut na rzecz kultury prawnej Ordo Iuris/Parlement (T‑42/21, non publiée, EU:T:2021:385), le Tribunal a rejeté le recours comme étant manifestement irrecevable, dès lors que les avocats de la requérante n’avaient pas la qualité de tiers indépendant.

5        Par ordonnance du 15 février 2023, Fundacja Instytut na rzecz Kultury Prawnej Ordo Iuris/Parlement (C‑546/21 P, non publiée, EU:C:2023:123), la Cour a annulé l’ordonnance du 25 juin 2021, Fundacja Instytut na rzecz kultury prawnej Ordo Iuris/Parlement (T‑42/21, non publiée, EU:T:2021:385), renvoyé l’affaire devant le Tribunal et réservé les dépens.

 Conclusions des parties

6        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la résolution attaquée ;

–        à titre subsidiaire, annuler partiellement le considérant W de la résolution attaquée, en ce qu’il précise que la requérante est « étroitement liée à la coalition au pouvoir, joue un rôle moteur dans les campagnes visant à porter atteinte aux droits de l’homme et à l’égalité entre les hommes et les femmes en Pologne, notamment par des tentatives d’interdire l’avortement, des demandes de retrait de la Pologne de la convention d’Istanbul et de création de “zones sans LGBTI” » ;

–        condamner le Parlement aux dépens.

7        Le Parlement conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme étant irrecevable ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

8        Aux termes de l’article 130, paragraphes 1 et 7, du règlement de procédure du Tribunal, si la partie défenderesse le demande, le Tribunal peut statuer sur l’irrecevabilité ou l’incompétence sans engager le débat au fond. En l’espèce, le Parlement ayant demandé qu’il soit statué sur l’irrecevabilité, le Tribunal, s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier, décide de statuer sur cette demande sans poursuivre la procédure.

9        Le Parlement excipe de l’irrecevabilité du présent recours au motif que la résolution attaquée ne serait pas un acte susceptible de faire l’objet d’un recours en annulation sur le fondement de l’article 263 TFUE. Selon le Parlement, la résolution attaquée ne contiendrait que des déclarations politiques et ne produirait pas d’effets juridiques à l’égard des tiers.

10      Selon le Parlement, le Tribunal a d’ailleurs souscrit à cette argumentation en rejetant comme étant irrecevable le recours en annulation de la requérante introduit à l’encontre de la résolution du Parlement européen du 11 novembre 2021 sur le premier anniversaire de l’interdiction de fait de l’avortement en Pologne [2021/2925(RSP)] (ordonnance du 11 octobre 2022, Fundacja Instytut na rzecz Kultury Prawnej Ordo Iuris/Parlement, T‑41/22, non publiée, EU:T:2022:666).

11      La requérante estime, au contraire, que la résolution attaquée est un acte attaquable, qui la concerne directement et individuellement. À titre subsidiaire, elle fait valoir que la résolution attaquée est un acte règlementaire qui la concerne directement et qui ne comporte pas de mesures d’exécution.

12      En substance, dans sa requête, elle soutient que, même si la résolution attaquée ne produit pas formellement d’effets juridiques, n’est pas un acte formellement contraignant et ne crée pas d’obligations expresses, ces circonstances ne sauraient exclure sa qualification d’acte destiné à produire des effets juridiques à l’égard des tiers au sens de l’article 263, premier alinéa, TFUE. En particulier, la résolution attaquée pourrait produire des effets juridiques obligatoires dans le cadre de ce que la requérante dénomme la « gouvernance mondiale », dans la mesure où ladite résolution pourrait influencer diverses décisions législatives ou d’application du droit, notamment, relatives à l’octroi ou au refus de subventions, au détriment de la requérante. De plus, la résolution attaquée pourrait influencer l’interprétation du droit primaire et du droit dérivé et contribuer à façonner le droit international. En outre, les appréciations figurant dans la résolution attaquée pourraient servir de fondement à l’application de la procédure prévue à l’article 7 TUE et du mécanisme prévu par le règlement (UE, Euratom) 2020/2092 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2020, relatif à un régime général de conditionnalité pour la protection du budget de l’Union (JO 2020, L 433 I, p. 1). Dans ce cadre, elle revendique une révision de l’interprétation de la notion d’actes « destinés à produire des effets juridiques à l’égard des tiers » figurant à l’article 263, premier alinéa, TFUE, de sorte que ladite notion englobe des actes dont les effets juridiques ne seraient pas contraignants. Enfin, la résolution attaquée produirait des effets juridiques de droit privé à l’égard de la requérante, dès lors que ladite résolution, notamment son considérant W, porterait atteinte à ses droits de la personnalité, à savoir à sa réputation et à sa renommée, ce qui aurait une incidence négative sur sa situation financière.

13      La requérante soutient disposer de la qualité pour agir et d’un intérêt à agir à l’encontre de la résolution attaquée. En effet, ladite résolution la concernerait directement et individuellement dès lors qu’elle y est nommément désignée au considérant W. De plus, la résolution porterait atteinte à ses droits de la personnalité et pourrait servir de fondement à des décisions qui lui seraient défavorables.

14      La requérante fait également valoir qu’elle ne disposerait d’aucun autre recours qui pourrait aboutir au retrait erga omnes de la résolution attaquée.

15      Enfin, selon la requérante, les conditions de recevabilité du recours devraient être interprétées à la lumière du droit à une protection juridictionnelle effective.

16      Il est de jurisprudence constante que le recours en annulation prévu à l’article 263 TFUE est ouvert à l’égard de tout acte des institutions, quelle que soit sa forme, qui, contrairement à ce que soutient la requérante, vise à produire des effets de droit obligatoires de nature à affecter les intérêts de la partie requérante, en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique (arrêt du 19 janvier 2017, Commission/Total et Elf Aquitaine, C‑351/15 P, EU:C:2017:27, points 35 et 36, et ordonnance du 22 janvier 2020, Daimler/Commission, T‑751/18, EU:T:2020:5, points 38 et 39).

17      Pour déterminer si un acte produit de tels effets et est, partant, susceptible de faire l’objet d’un recours en annulation sur le fondement de l’article 263 TFUE, il y a lieu de s’attacher à la substance de cet acte et d’apprécier lesdits effets au regard de critères objectifs, tels que le contenu de ce même acte, en tenant compte, le cas échéant, du contexte de l’adoption de ce dernier ainsi que des pouvoirs de l’institution qui en est l’auteur (voir arrêt du 9 juillet 2020, République tchèque/Commission, C‑575/18 P, EU:C:2020:530, point 47 et jurisprudence citée).

18      En l’espèce, la forme de la résolution attaquée n’étant pas déterminante, il y a lieu d’examiner la substance de cette résolution afin d’apprécier si elle produit des effets juridiquement contraignants, en tenant compte notamment de son libellé, de son contenu, du contexte dans lequel elle s’inscrit et de l’intention de son auteur.

19      Il convient tout d’abord de relever que celle-ci porte sur la prétendue interdiction de fait de l’avortement en Pologne résultant de l’arrêt de la Cour constitutionnelle.

20      Premièrement, en ce qui concerne le libellé de la résolution attaquée, ainsi que l’indique le Parlement, il doit être noté que les points 1, 5 à 7, 9 à 13, 15, 16, 20 et 22 de celle-ci, expressément visés par la requérante dans sa requête, sont libellés en des termes non impératifs. Dans ces points, les expressions suivantes doivent être relevées : « condamne vivement l’arrêt [de la Cour constitutionnelle] » (point 1), « relève que l’excès injustifié de restrictions à l’accès à l’avortement » (point 5), « souligne que l’accès sans entrave et en temps utile aux services de santé génésique » (point 6), « insiste sur la nécessité de dispenser à chacun une éducation sexuelle et relationnelle complète » (point 7), « regrette que l’accès aux services de soins de santé reste limité dans certaines régions de Pologne » (point 9), « déplore le recours accru à la clause de conscience », « regrette également le fait que les gynécologues invoquent fréquemment [cette] clause » (point 10), « est profondément préoccupé » (point 11), « témoigne son soutien et sa solidarité à l’égard de milliers de citoyens polonais », « relève que les revendications des manifestants » (point 12), « condamne fermement le recours excessif et disproportionné à la force et à la violence contre les manifestants » (point 13), « demande à la Commission de procéder à une évaluation approfondie de la composition de [la Cour constitutionnelle] » (point 15), « demande au Conseil d’agir dans ce domaine » (point 16), « invite la Commission à aider les États membres à garantir l’accès universel aux services de santé sexuelle et génésique », « prie instamment la Commission de garantir la santé sexuelle et génésique et les droits en la matière » (point 20), et « invite la Commission à confirmer » (point 22).

21      Certes, le Parlement présente clairement sa position sur la situation actuelle de l’État de droit et des droits fondamentaux des femmes en Pologne et formule un certain nombre d’invitations à agir. Ce faisant, le Parlement espère être entendu. Il reconnaît d’ailleurs que l’adoption de la résolution attaquée peut déboucher sur des actions concrètes. Cependant, l’emploi des formulations citées au point 20 ci-dessus atteste que le Parlement n’a pas cherché à faire peser sur les destinataires de la résolution attaquée une quelconque obligation, mais qu’il exprime son opinion politique et ses souhaits. En effet, de telles formulations consistent en de simples invitations à agir non contraignantes. Il ne résulte donc pas du libellé de ses dispositions que la résolution attaquée est destinée à produire des effets juridiquement contraignants, ni, contrairement à ce que prétend la requérante, qu’elle restreigne la marge d’appréciation de ses destinataires, voire de tierces personnes.

22      Enfin, le fait que le Parlement « charge son Président de transmettre » la résolution attaquée aux destinataires de celle-ci (point 25) n’est pas de nature à infirmer la conclusion selon laquelle ladite résolution n’est pas destinée à produire des effets juridiquement contraignants.

23      Deuxièmement, le contenu de la résolution attaquée corrobore le constat que la résolution attaquée est dépourvue d’effets juridiquement contraignants.

24      Le Tribunal constate que la résolution attaquée est divisée en trois parties.

25      Dans la première partie, à savoir les visas, le Parlement définit le cadre juridique et politique dans lequel s’inscrit la résolution attaquée.

26      Dans la deuxième partie, à savoir les considérants A à AA, le Parlement expose les motifs de la résolution, notamment les risques induits par l’arrêt de la Cour constitutionnelle sur le respect de l’État de droit et des droits fondamentaux des femmes en Pologne, y compris le droit à la santé et les droits génésiques et sexuels, ainsi que, de manière plus générale, l’érosion de l’État de droit en Pologne. Il est vrai que, au considérant W de la résolution attaquée, le Parlement indique que la requérante, qualifiée d’« organisation fondamentaliste », est « étroitement liée à la coalition au pouvoir » en Pologne, qu’elle « joue un rôle moteur dans les campagnes visant à porter atteinte aux droits de l’homme et à l’égalité entre les hommes et les femmes en Pologne » et, enfin, qu’elle appelle à la « création de “zones sans LGBTI” ». Il est également vrai que de tels propos, qu’ils soient vrais ou faux, peuvent porter atteinte à la réputation ainsi qu’à la renommée de la requérante et avoir un impact négatif sur les relations qu’entretient celle-ci avec ses donateurs, y compris potentiels, voire, le cas échéant, sur ses demandes de subventions auprès notamment d’institutions de l’Union.

27      Toutefois, la requérante n’a pas démontré que les observations figurant dans le considérant W et qui la concernent aient constitué le support nécessaire du dispositif de la résolution attaquée. Or, selon une jurisprudence constante, seul le dispositif d’un acte est susceptible de produire des effets juridiques et, par voie de conséquence, de faire grief, quels que soient les motifs sur lesquels repose cet acte. En revanche, les appréciations formulées dans les motifs d’un acte ne sont pas susceptibles de faire, en tant que telles, l’objet d’un recours en annulation et ne peuvent être soumises au contrôle de légalité du juge de l’Union que dans la mesure où, en tant que motifs d’un acte faisant grief, elles constituent le support nécessaire du dispositif de cet acte (voir arrêt du 30 novembre 2022, KN/Parlement, T‑401/21, EU:T:2022:736, point 22 et jurisprudence citée).

28      Enfin, dans la troisième partie de la résolution attaquée, à savoir les points 1 à 25, le Parlement en substance, condamne politiquement l’arrêt de la Cour constitutionnelle et invite les destinataires de la résolution attaquée, à savoir la Commission, le Conseil, le président, le gouvernement et le parlement de la République de Pologne ainsi que les gouvernements et les parlements des États membres (ci-après les « destinataires de la résolution attaquée »), à prendre différentes mesures afin de garantir le respect de l’État de droit et des droits fondamentaux en Pologne. Il importe de relever que la résolution attaquée ne comporte aucune indication explicite selon laquelle les destinataires de celle-ci seraient tenus d’agir conformément aux invitations formulées par le Parlement.

29      Par ailleurs, à supposer même que le Parlement présente une interprétation erronée du droit en considérant que le droit à l’avortement constitue une exigence découlant du droit de l’Union ou du droit international, il ne s’agirait que d’une interprétation du droit dépourvue d’effets juridiquement contraignants.

30      Il s’ensuit qu’il ne résulte ni du libellé ni du contenu de la résolution attaquée que celle-ci produit des effets juridiquement contraignants et que le Parlement n’a nullement eu l’intention de lui conférer de tels effets.

31      S’agissant du contexte dans lequel la résolution attaquée s’inscrit, cette résolution a été adoptée sur le fondement de l’article 132, paragraphe 2, du règlement intérieur du Parlement. Conformément à cette disposition, ladite résolution constitue l’acte par lequel le Parlement a clôturé les débats engagés entre ses membres à la suite d’une déclaration faite, en son sein, par des membres de la Commission, du Conseil ou du Conseil européen, et par lequel il présente sa position politique sur une question précise, à savoir, en l’espèce, sur les conséquences résultant de l’arrêt de la Cour constitutionnelle. La résolution attaquée ne s’inscrit donc pas dans le cadre d’une procédure visant à aboutir à l’adoption d’un instrument juridiquement contraignant.

32      Compte tenu de l’ensemble des éléments qui précèdent, il convient de constater que la résolution attaquée constitue la simple manifestation écrite d’une position politique du Parlement sur la situation de l’État de droit et des droits fondamentaux des femmes en Pologne, complétée d’invitations à agir non contraignantes adressées aux destinataires de ladite résolution. La résolution attaquée ne produit pas d’effets juridiques contraignants. La résolution attaquée ne saurait donc faire l’objet d’un recours en annulation sur le fondement de l’article 263 TFUE.

33      Par ailleurs, aucun des autres arguments de la requérante n’est de nature à établir que la résolution attaquée constitue un acte susceptible de faire l’objet d’un recours en annulation sur le fondement de l’article 263 TFUE.

34      Tout d’abord, il y a lieu de rejeter l’argumentation de la requérante tirée de ce que le Parlement aurait outrepassé les compétences de l’Union, dans la mesure où les questions des droits génésiques et du droit à l’avortement ne relèvent pas des compétences de l’Union, et aurait violé l’article 2 TUE en portant atteinte aux droits de la personnalité de la requérante. En effet, dans la mesure où la résolution attaquée ne peut faire l’objet d’un recours en annulation introduit sur le fondement de l’article 263 TFUE, ladite argumentation doit être rejetée comme étant inopérante en ce qu’elle porte sur le bien-fondé du contenu de ladite résolution (voir, en ce sens, arrêt du 25 octobre 2017, Roumanie/Commission, C‑599/15 P, EU:C:2017:801, points 52 et 53).

35      Ensuite, l’argument de la requérante tendant à démontrer le caractère recevable du recours en se fondant sur l’allégation selon laquelle le Parlement violerait ses droits de la personnalité, en particulier sa réputation et sa renommée, en diffusant de fausses informations ne saurait, pour les mêmes raisons que celles exposées aux points 27 et 34 ci-dessus, prospérer. En effet, s’il est vrai qu’une simple manifestation d’opinion peut emporter une violation de tels droits, cette circonstance n’est pas davantage de nature à écarter la condition de recevabilité tenant à l’existence d’un acte attaquable.

36      Enfin, s’agissant des arguments de la requérante tirés de l’obligation de garantir une protection juridictionnelle effective qui exigerait une interprétation non restrictive de la condition imposant que, pour qu’il soit attaquable, un acte produise des effets juridiquement contraignants, cette condition doit être interprétée à la lumière du droit à une protection juridictionnelle effective tel que garanti à l’article 47, premier alinéa, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Toutefois, ce droit n’a pas pour objet de modifier le système de contrôle juridictionnel prévu par les traités, et notamment les règles relatives à la recevabilité des recours formés directement devant les juridictions de l’Union, ainsi que cela découle également des explications afférentes à cet article 47, lesquelles doivent, conformément à l’article 6, paragraphe 1, troisième alinéa, TUE et à l’article 52, paragraphe 7, de la charte des droits fondamentaux, être prises en considération pour l’interprétation de celle-ci. Ainsi, l’interprétation de la notion d’« acte attaquable » à la lumière dudit article 47 ne saurait aboutir à écarter cette condition sans excéder les compétences attribuées par le traité aux juridictions de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 25 octobre 2017, Slovaquie/Commission, C‑593/15 P et C‑594/15 P, EU:C:2017:800, point 66 et jurisprudence citée). Or, l’argumentation de la requérante, si elle était retenue, aurait précisément pour effet d’écarter la condition tenant aux effets juridiquement contraignants.

37      Du reste, les justiciables ne sont pas privés d’un accès au juge du fait qu’une mesure ne produisant pas d’effets juridiques obligatoires de nature à affecter leurs intérêts, en modifiant de façon caractérisée leur situation juridique, ne peut pas faire l’objet d’un recours en annulation. Ainsi que l’admet la requérante, le recours en responsabilité non contractuelle prévu à l’article 340, deuxième alinéa, TFUE leur est ouvert si une telle mesure est de nature à engager la responsabilité de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 30 novembre 2022, KN/Parlement, T‑401/21, EU:T:2022:736, point 25 et jurisprudence citée).

38      Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de conclure que le motif d’irrecevabilité soulevé par le Parlement est fondé et que, sur cette base, le recours de la requérante doit être déclaré irrecevable.

 Sur les dépens

39      Selon l’article 133 du règlement de procédure, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance. Aux termes de l’article 219 dudit règlement, dans le cadre du renvoi d’une affaire après annulation, le Tribunal statue sur les dépens relatifs, d’une part, aux procédures engagées devant lui et, d’autre part, à la procédure de pourvoi devant la Cour.

40      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

41      La requérante ayant succombé et le Parlement ayant conclu à la condamnation de la requérante aux dépens, il convient de condamner la requérante à supporter ses propres dépens ainsi que ceux du Parlement afférents à la présente procédure ainsi qu’à la procédure dans l’affaire C‑546/21 P. 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté comme étant irrecevable.

2)      Fundacja Instytut na rzecz Kultury Prawnej Ordo Iuris supportera ses propres dépens ainsi que ceux du Parlement européen afférents à la présente procédure ainsi qu’à la procédure dans les affaires T42/21 et C546/21 P.

Fait à Luxembourg, le 13 octobre 2023.

Le greffier

 

Le président

V. Di Bucci

 

J. Svenningsen


*      Langue de procédure : le polonais.

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