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Document 62012CO0357

    Rješenje Suda (sedmo vijeće) od 30. svibnja 2013.
    Harald Wohlfahrt protiv Ureda za usklađivanje na unutarnjem tržištu (žigovi i dizajni) (OHIM).
    Žalba - Žig Zajednice.
    Predmet C-357/12 P.

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2013:356

    ORDONNANCE DE LA COUR (septième chambre)

    30 mai 2013 (*)

    «Pourvoi – Marque communautaire – Règlement (CE) nº 40/94 – Articles 8, paragraphe 1, sous b), et 43, paragraphe 2 – Signe verbal ‘Kindertraum’ – Opposition du titulaire de la marque nationale verbale antérieure Kinder»

    Dans l’affaire C‑357/12 P,

    ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 26 juillet 2012,

    Harald Wohlfahrt, demeurant à Rothenburg ob der Tauber (Allemagne), représenté par Mes M. Loschelder et V. Schoene, Rechtsanwälte,

    partie requérante,

    les autres parties à la procédure étant:

    Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mme D. Walicka, en qualité d’agent,

    partie défenderesse en première instance,

    Ferrero SpA, établie à Alba (Italie), représentée par Mes F. Jacobacci et L. Ghedina, avvocati,

    partie intervenante en première instance,

    LA COUR (septième chambre),

    composée de M. G. Arestis, président de chambre, MM. A. Arabadjiev et J. L. da Cruz Vilaça (rapporteur), juges,

    avocat général: M. P. Mengozzi,

    greffier: M. A. Calot Escobar,

    vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 181 du règlement de procédure de la Cour,

    rend la présente

    Ordonnance

    1        Par son pourvoi, M. Wohlfahrt demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 16 mai 2012, Wohlfahrt/OHMI – Ferrero (Kindertraum) (T‑580/10, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 20 octobre 2010 (affaire R 815/2009-4), relative à une procédure d’opposition entre Ferrero SpA et M. Wohlfahrt (ci-après la «décision litigieuse»).

     Le cadre juridique

    2        Le règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), a été abrogé et remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1), qui est entré en vigueur le 13 avril 2009. Néanmoins, étant donné que la date pertinente dans le cadre du présent litige est celle à laquelle la demande d’enregistrement a été introduite (voir, en ce sens, arrêt du 10 novembre 2011, LG Electronics/OHMI, C‑88/11 P, point 2 et jurisprudence citée), le présent litige demeure régi par le règlement n° 40/94, à tout le moins en ce qui concerne les dispositions à caractère non strictement procédural.

    3        L’article 8, paragraphe 1, du règlement nº 40/94 prévoit:

    «Sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement:

    [...]

    b)      lorsqu’en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée; le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.»

    4        L’article 43, paragraphe 2, dudit règlement dispose:

    «Sur requête du demandeur, le titulaire d’une marque communautaire antérieure qui a formé opposition, apporte la preuve que, au cours des cinq années qui précèdent la publication de la demande de marque communautaire, la marque communautaire antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux dans la Communauté pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels l’opposition est fondée, ou qu’il existe de justes motifs pour le non-usage, pour autant qu’à cette date la marque antérieure était enregistrée depuis cinq ans au moins. À défaut d’une telle preuve, l’opposition est rejetée. Si la marque communautaire antérieure n’a été utilisée que pour une partie des produits ou des services pour lesquels elle est enregistrée, elle n’est réputée enregistrée, aux fins de l’examen de l’opposition, que pour cette partie des produits ou services.»

     Les antécédents du litige

    5        Le 11 juillet 2002, M. Wohlfahrt a présenté à l’OHMI une demande d’enregistrement, en tant que marque communautaire, du signe verbal «Kindertraum».

    6        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent, notamment, des classes 16 et 28 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante:

    –        classe 16: «Papier et carton et produits en ces matières, compris dans la classe 16, à savoir cahiers, serviettes, papier à lettres et papier d’emballage, décorations pour cadeaux, emballages et sacs d’emballage, produits de l’imprimerie, papeterie», et

    –        classe 28: «Décorations pour arbres de Noël».

    7        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 75/2003, du 29 septembre 2003.

    8        Le 29 décembre 2003, Ferrero SpA (ci-après «Ferrero») a formé opposition, au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94, à l’enregistrement de ladite marque.

    9        L’opposition était fondée, notamment, sur la marque nationale verbale Kinder, enregistrée en Italie le 8 juillet 2002 sous le numéro 872247 (ci-après la «marque antérieure»), pour des produits relevant, notamment, des classes 16 et 28 au sens dudit arrangement de Nice, et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante:

    –        classe 16: «Papier et carton et produits en ces matières, non compris dans d’autres classes; produits de l’imprimerie; articles pour reliures; photographies; papeterie; adhésifs (matières collantes) pour la papeterie ou le ménage; matériel pour les artistes; pinceaux; machines à écrire et articles de bureau (à l’exception des meubles); matériel d’instruction ou d’enseignement (à l’exception des appareils); matières plastiques pour l’emballage (non comprises dans d’autres classes); caractères d’imprimerie; clichés», et

    –        classe 28: «Jeux, jouets; articles de gymnastique et de sport non compris dans d’autres classes; décorations pour arbres de Noël».

    10      Par décision du 27 mai 2009, la division d’opposition de l’OHMI a fait droit à l’opposition et a rejeté la demande d’enregistrement dudit signe verbal en tant que marque communautaire pour les produits visés au point 6 de la présente ordonnance.

    11      Le 22 juillet 2009, M. Wohlfahrt a formé un recours devant l’OHMI contre ladite décision de la division d’opposition. Par la décision litigieuse, la quatrième chambre de recours de l’OHMI a rejeté ce recours, au motif que la demande de preuve de l’usage de la marque antérieure présentée par M. Wohlfahrt n’était pas recevable, dès lors que le délai de cinq ans visé à l’article 43, paragraphe 2, du règlement n° 40/94 ne s’était pas écoulé à la date de la publication de la demande de marque communautaire. Elle a également estimé que, eu égard à la présence dans les signes en conflit de l’élément commun «Kinder», au degré moyen de similitude visuelle et phonétique entre les signes en conflit induit par ledit élément ainsi qu’à l’identité des produits en cause, il existait un risque de confusion entre ces signes, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du même règlement.

     La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

    12      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 22 décembre 2010, M. Wohlfahrt a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse. À l’appui de son recours, il a invoqué, en substance, trois moyens, tirés, le premier, d’une violation de l’article 43, paragraphe 2, du règlement n° 40/94, le deuxième, d’un défaut de motivation de cette décision ainsi que du caractère abusif de l’enregistrement de la marque antérieure et, le troisième, d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du même règlement.

    13      Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté ces trois moyens et, partant, le recours dans son intégralité.

    14      S’agissant du premier moyen du recours, le Tribunal s’est prononcé comme suit au point 18 de l’arrêt attaqué:

    «[...] il suffit de relever que l’article [43, paragraphe 2, du règlement n° 40/94], qui est applicable aux marques antérieures nationales en vertu du paragraphe 3 de ce même article, ne prévoit l’obligation pour l’opposant de fournir, sur requête du demandeur, la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure que ‘pour autant qu’à [la date de la publication de la demande d’enregistrement] la marque antérieure était enregistrée depuis cinq ans au moins’. Par conséquent, lorsque la marque antérieure invoquée à l’appui d’une opposition est enregistrée depuis moins de cinq ans avant la publication de la demande d’enregistrement d’une marque communautaire, la preuve de l’usage sérieux ne peut pas encore être exigée et la marque antérieure doit être réputée avoir été utilisée [...]»

    15      Le Tribunal a donc conclu, au point 20 de l’arrêt attaqué, que c’était sans commettre d’erreur que la chambre de recours avait estimé que la demande de preuve de l’usage de la marque antérieure n’était pas recevable.

    16      En ce qui concerne le deuxième moyen du recours, le Tribunal a constaté, au point 30 de l’arrêt attaqué, que, dans le cadre d’une procédure d’opposition, il n’appartient pas à la division d’opposition ou, le cas échéant, à la chambre de recours d’examiner l’éventuel caractère abusif de l’enregistrement invoqué à l’appui de l’opposition ou l’intérêt que porterait le titulaire de celui-ci. En effet, selon le Tribunal, ni l’article 8 du règlement n° 40/94, lequel concerne les motifs relatifs de refus d’enregistrement d’une marque, ni aucune disposition de ce règlement ne prévoyaient une base juridique pour que l’OHMI rejette une opposition au motif que la marque nationale antérieure invoquée constituait un abus de droit. Le Tribunal a ajouté, au même point 30, qu’aucune disposition ne permettait à l’OHMI d’apprécier le bien-fondé d’un enregistrement national, que ce soit, notamment, au regard de son caractère abusif ou de l’intérêt que pouvait avoir son titulaire à procéder à un tel enregistrement pour certains produits.

    17      Quant au troisième moyen du pourvoi, le Tribunal, après avoir constaté, au point 41 de l’arrêt attaqué, que «le requérant ne conteste pas les appréciations de la chambre de recours concernant la circonstance que le public pertinent est le grand public italien, que le risque de confusion doit être apprécié par rapport au public italien et que les produits en cause sont identiques», a jugé ce qui suit au point 42 du même arrêt:

    «Quant à la comparaison des signes en conflit, le requérant n’avance, dans la requête, aucun grief visant à réfuter spécifiquement l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle ces signes présenteraient un degré moyen de similitude sur les plans visuel et phonétique. [...]. En tout état de cause, le fait, évoqué par le requérant, que la marque demandée puisse être perçue comme un tout n’est pas en mesure de remettre en cause l’appréciation de la chambre de recours, laquelle est fondée, en particulier, sur la similitude issue de l’identité de la partie initiale, en l’occurrence ‘[K]inder’, des signes en conflit. Il en va de même, par identité de motifs, de l’affirmation selon laquelle l’élément ‘traum’ comporterait une syllabe et non deux, comme l’a relevé la chambre de recours, cette affirmation étant au demeurant erronée. [...]»

    18      Le Tribunal a également examiné, aux points 44 à 50 de l’arrêt attaqué, si c’était à bon droit que la chambre de recours avait conclu à l’existence d’un risque de confusion.

    19      À cet égard, le Tribunal a analysé l’argumentation de M. Wohlfahrt selon laquelle le terme «Kinder» était descriptif, et donc pourvu d’un caractère distinctif très faible, de sorte que la protection dont la marque antérieure devrait bénéficier serait réduite. Il s’est notamment prononcé comme suit aux points 47 à 49 de l’arrêt attaqué:

    «47      [...] le terme ‘[K]inder’ est un terme de la langue allemande signifiant ‘enfants’.

    48      Aussi, même si ce terme pourrait être compris par un public germanophone comme une référence aux enfants, il doit être considéré que, pour le public pertinent, lequel est composé du grand public italien, ainsi que l’a en substance relevé la chambre de recours sans être contestée à cet égard par le requérant, ce terme n’a aucune signification.

    49      Le fait, allégué par le requérant, que, dans la province italienne de Bolzano, la langue allemande soit également une langue officielle et qu’une partie de la population italienne soit germanophone est sans influence à cet égard. En effet, il ressort du dossier que le nombre total d’habitants de la province en cause ne représente qu’environ 1 % du nombre total des habitants de l’Italie et que, de surcroît, environ 30 % d’entre eux ne sont pas germanophones. C’est donc à bon droit que la chambre de recours a relevé qu’un très faible pourcentage de la population italienne était germanophone. Il s’ensuit que le public pertinent est, dans sa très grande majorité, italophone, de sorte que, pour ce dernier, le terme ‘[K]inder’ ne sera pas descriptif.»

    20      Le Tribunal a ainsi conclu, au point 50 de l’arrêt attaqué, que c’était sans commettre aucune erreur que la chambre de recours avait constaté l’existence d’un risque de confusion entre les signes en conflit.

     Les conclusions des parties devant la Cour

    21      M. Wohlfahrt demande à la Cour:

    –        d’annuler l’arrêt attaqué ainsi que de faire droit à ses conclusions présentées en première instance, et

    –        de condamner l’OHMI aux dépens.

    22      L’OHMI conclut au rejet du pourvoi et à la condamnation de M. Wohlfahrt aux dépens.

    23      Ferrero demande à la Cour:

    –        de rejeter le pourvoi;

    –        à titre subsidiaire, en cas d’annulation de l’arrêt attaqué, de renvoyer l’affaire devant la chambre de recours pour qu’elle statue sur l’opposition fondée sur l’article 8, paragraphe 5, du règlement nº 40/94, et

    –        de condamner M. Wohlfahrt aux dépens.

     Sur le pourvoi

    24      En vertu de l’article 181 de son règlement de procédure, lorsqu’un pourvoi est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, la Cour peut, à tout moment, sur rapport du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de le rejeter totalement ou partiellement par voie d’ordonnance motivée, et ce sans ouvrir la procédure orale. 

    25      À l’appui de son pourvoi, M. Wohlfahrt invoque trois moyens tirés, premièrement, de la violation de l’article 43, paragraphe 2, du règlement nº 40/94, deuxièmement, d’erreurs de droit commises par le Tribunal dans l’appréciation de la motivation de la décision litigieuse, laquelle n’est, selon ce dernier, entachée d’aucun défaut, et du caractère abusif de la demande d’enregistrement de la marque antérieure ainsi que, troisièmement, d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du même règlement.

     Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 43, paragraphe 2, du règlement nº 40/94

     Argumentation des parties

    26      M. Wohlfahrt soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en refusant d’examiner si la marque antérieure a fait l’objet d’un usage alors que plus de cinq années s’étaient écoulées entre l’enregistrement de celle-ci et la décision de la chambre de recours. L’interprétation littérale de l’article 43, paragraphe 2, du règlement nº 40/94, aux termes duquel doit être apportée la preuve de l’usage de la marque antérieure au cours des cinq années qui précèdent la demande de marque communautaire, serait contraire à la finalité de l’obligation d’usage, telle que prévue au neuvième considérant de ce règlement. Selon M. Wohlfahrt, cette obligation vise à garantir que seules les marques effectivement utilisées sont vraiment protégées. Un tel objectif ne pourrait être atteint que si le titulaire de la marque antérieure était tenu de produire des preuves de l’usage de celle-ci, et ce même dans le cas où le délai de cinq ans relatif à l’usage prend fin pendant la procédure devant l’OHMI.

    27      L’article 43, paragraphe 2, du règlement nº 40/94 contiendrait donc une lacune qui devrait être comblée par une interprétation téléologique, sur le modèle des réglementations allemande et italienne relatives aux marques.

    28      L’OHMI fait valoir que les dispositions concernant la preuve de l’usage, énoncées à l’article 43, paragraphe 2, du règlement nº 40/94, constituent, en vertu de leur libellé même, une règle exhaustive et concluante ne comportant pas de lacune. À cet égard, l’OHMI rappelle que les règles de procédure relatives à la procédure d’opposition, telles qu’établies par le règlement (CE) nº 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement nº 40/94 (JO L 303, p. 1), prévoient un délai pour déposer la demande de preuve de l’usage propre à assurer la protection des droits. Le respect de ce délai ne serait pas possible si, au cours de la procédure d’opposition, la preuve de l’usage pouvait encore être demandée à n’importe quel moment. L’interprétation systématique, fondée sur l’ensemble des règles relatives à la demande de preuve de l’usage dans la procédure d’opposition, confirmerait ainsi l’interprétation littérale de l’article 43, paragraphe 2, du règlement nº 40/94.

    29      En ce qui concerne l’argument du requérant relatif aux réglementations allemande et italienne sur les marques, l’OHMI rappelle que, au point 101 de l’arrêt du 13 septembre 2007, Il Ponte Finanziaria/OHMI (C‑234/06 P, Rec. p. I‑7333), la Cour a déjà refusé l’utilisation de dispositions nationales pour l’interprétation de l’article 43, paragraphe 2, du règlement nº 40/94.

     Appréciation de la Cour

    30      Il convient de relever d’emblée que, ainsi que le Tribunal l’a rappelé, au point 18 de l’arrêt attaqué, l’article 43, paragraphe 2, du règlement nº 40/94 ne prévoit d’obligation pour l’opposant de fournir, sur requête du demandeur, la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure que pour autant que, à la date de la publication de la demande d’enregistrement de la marque communautaire, la marque antérieure était enregistrée depuis cinq ans au moins.

    31      Dès lors, le Tribunal a constaté à bon droit, au point 21 dudit arrêt, que, en instituant cette règle, le législateur de l’Union a explicitement fixé un critère concernant la date de référence pour établir la recevabilité des demandes de preuve de l’usage, à savoir la date à laquelle est intervenue la publication de la demande d’enregistrement de la marque, sans que l’éventuelle ouverture ultérieure d’une procédure d’opposition puisse avoir une quelconque influence sur cette date de référence.

    32      En outre, ainsi que l’OHMI l’a relevé, il n’existe pas de contradiction entre l’article 43, paragraphe 2, du règlement nº 40/94 et la finalité de l’obligation de faire usage de la marque, car les parties disposent d’autres voies de recours pour se protéger d’une opposition fondée sur une marque qui risque la déchéance pour non-usage au cours de la procédure d’opposition. En effet, dans le cas d’une marque communautaire, une demande de déchéance pour non-usage pourrait à tout moment être déposée, y compris pendant la procédure d’opposition relative à cette marque. Dans le cas d’une marque nationale, la demande se conformerait aux dispositions nationales que les États membres étaient tenus d’adopter.

    33      Quant aux références aux dispositions du droit allemand et du droit italien relatives aux marques, le Tribunal a jugé, au point 22 de l’arrêt attaqué, qu’elles n’étaient pas pertinentes dès lors que le régime communautaire des marques est un système autonome, constitué d’un ensemble de règles et poursuivant des objectifs qui lui sont spécifiques, son application étant indépendante de tout système national. Ce faisant, le Tribunal a fait une application correcte d’un principe consacré par la jurisprudence constante de la Cour (voir arrêts du 16 juillet 2009, American Clothing Associates/OHMI et OHMI/American Clothing Associates, C‑202/08 P et C‑208/08 P, Rec. p. I‑6933, point 58, ainsi que du 22 mars 2012, Génesis, C‑190/10, non encore publié au Recueil, point 36), et n’a donc commis aucune erreur de droit.

    34      Dans ces conditions, il convient de rejeter le premier moyen du pourvoi comme manifestement non fondé.

     Sur le deuxième moyen, tiré d’erreurs de droit commises par le Tribunal dans l’appréciation de la motivation de la décision litigieuse et du caractère abusif de la demande d’enregistrement de la marque antérieure

     Argumentation des parties

    35      En ce qui concerne la première branche du deuxième moyen, relative au défaut de motivation de la décision litigieuse, M. Wohlfahrt fait grief au Tribunal d’avoir jugé, au point 31 de l’arrêt attaqué, que la chambre de recours n’était pas obligée de répondre, dans cette décision, à l’allégation du requérant, soulevée dans le cadre de son recours contre la décision de la division d’opposition, selon laquelle la demande d’enregistrement de la marque antérieure était abusive, au motif qu’une telle allégation était manifestement dénuée de toute pertinence dans le cadre dudit recours.

    36      M. Wohlfahrt ajoute à cet égard que c’est à tort que le Tribunal a affirmé, au point 32 de l’arrêt attaqué, que, au demeurant, il importait de tenir compte de la motivation plus détaillée concernant ladite allégation figurant dans la décision de la division d’opposition. En effet, le Tribunal aurait considéré à tort que, compte tenu de la continuité fonctionnelle entre les divisions d’opposition et les chambres de recours, dont attesterait l’article 62, paragraphe 1, du règlement n° 40/94, la décision de la division d’opposition ainsi que sa motivation feraient partie du contexte dans lequel la décision litigieuse a été adoptée, contexte qui était connu du requérant et qui permettait au juge d’exercer pleinement son contrôle de la légalité de cette dernière décision.

    37      Quant à la deuxième branche du deuxième moyen, tirée du caractère abusif de la demande d’enregistrement de la marque antérieure, M. Wohlfahrt allègue qu’il doit être possible, même si l’objection tirée de l’abus de droit n’est pas expressément mentionnée dans le texte du règlement n° 40/94, de rejeter une opposition en raison de son caractère abusif au titre de ce règlement. Il ajoute que, si le Tribunal avait effectué une juste appréciation, il aurait dû reconnaître que l’objection tirée de l’abus de droit était fondée en l’espèce. L’unique but de Ferrero serait en effet de monopoliser le plus largement possible, pour lui-même, le signe verbal «Kinder» et d’en empêcher toute utilisation par des tiers pour leurs produits.

    38      L’OHMI estime que ce que M. Wohlfahrt considère comme un abus de droit correspond, en réalité, au contenu même du droit des marques, tel qu’il résulte de l’article 9 du règlement nº 40/94. Les oppositions aux marques similaires ne constitueraient qu’un exercice recevable de ce droit.

    39      Ferrero souligne que la notion d’«enregistrement abusif» invoquée par M. Wohlfahrt à l’encontre de la marque antérieure, qui doit se distinguer du dépôt d’une demande de marque effectué de mauvaise foi, est entièrement étrangère à la notion de marque communautaire telle que régie par le règlement nº 40/94.

     Appréciation de la Cour

    40      Concernant la première branche du deuxième moyen, il importe de relever d’emblée que, au point 29 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que la chambre de recours avait, dans la décision litigieuse, et plus particulièrement dans les considérants 8 à 21 de celle-ci, exposé les faits et les considérations juridiques qui l’ont amenée à rejeter le recours de M. Wohlfahrt.

    41      Le Tribunal a également souligné, au point 30 de l’arrêt attaqué, que, dans le cadre d’une procédure d’opposition, il n’appartient pas à la division d’opposition ou, le cas échéant, à la chambre de recours d’examiner l’éventuel caractère abusif de la demande d’enregistrement invoqué à l’appui de l’opposition ou l’intérêt que détiendrait le titulaire de celui-ci. En effet, selon le Tribunal, ni l’article 8 du règlement n° 40/94, lequel concerne les motifs relatifs de refus d’enregistrement d’une marque, ni aucune disposition de ce règlement ne prévoient une base juridique permettant à l’OHMI de rejeter une opposition au motif que la marque nationale antérieure invoquée constitue un abus de droit.

    42      C’est donc sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal a conclu, au point 31 de l’arrêt attaqué, que la chambre de recours n’était pas obligée de répondre, dans la décision litigieuse, à l’allégation de M. Wohlfahrt, soulevée dans le cadre de son recours contre la décision de la division d’opposition, selon laquelle l’enregistrement de la marque antérieure était abusif, étant donné que cette allégation était manifestement dénuée de toute pertinence dans le cadre dudit recours.

    43      Le Tribunal a ajouté à juste titre, au point 32 de l’arrêt attaqué, que ladite allégation avait déjà fait l’objet d’une appréciation dans la décision de la division d’opposition et que cette décision ainsi que sa motivation faisaient partie du contexte dans lequel la décision litigieuse a été adoptée, contexte qui était connu de M. Wohlfahrt et permettait au juge d’exercer pleinement son contrôle de légalité.

    44      Il y a donc lieu d’écarter la première branche du deuxième moyen comme manifestement non fondée.

    45      Quant à la seconde branche du deuxième moyen, c’est à bon droit que le Tribunal a considéré, au point 34 de l’arrêt attaqué, que l’argumentation de M. Wohlfahrt relative au caractère abusif de l’enregistrement de la marque antérieure devait être rejetée pour les motifs exposés au point 30 de l’arrêt attaqué.

    46      En effet, il découle de la coexistence des marques communautaires et des marques nationales, ainsi que du fait que l’enregistrement de ces dernières ne relève pas de la compétence de l’OHMI, ni leur contrôle juridictionnel de la compétence du Tribunal, que, lors d’une procédure d’opposition à une demande d’enregistrement d’une marque communautaire, la validité des marques nationales ne peut être mise en cause (arrêt du 24 mai 2012, Formula One Licensing/OHMI, C‑196/11 P, non encore publié au Recueil, point 40).

    47      Il s’ensuit que la seconde branche du deuxième moyen doit être rejetée comme manifestement non fondée et, partant, l’ensemble de celui-ci ne saurait prospérer.

     Sur le troisième moyen, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94

     Argumentation des parties

    48      Par son troisième moyen, M. Wohlfahrt soutient que c’est à tort que le Tribunal a constaté, au point 42 de l’arrêt attaqué, qu’il n’avait invoqué aucun grief visant à réfuter l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle les signes en conflit présentaient un degré moyen de similitude sur les plans visuel et phonétique. Or, au point 34 de la requête en première instance, le requérant aurait indiqué que le signe «Kindertraum» formait un mot unique, dont la seconde partie «traum» était un mot composé non pas de deux syllabes, mais d’une seule. Cet argument devrait nécessairement être compris comme indiquant qu’il n’existait pas de similitude entre «Kindertraum» et «Kinder» étant donné les différences visuelle et phonétique.

    49      M. Wohlfahrt conteste, par ailleurs, l’appréciation du Tribunal concernant les similitudes visuelle et phonétique entre les signes en conflit. Contrairement à ce que le Tribunal a jugé, une très grande partie du public italien comprendrait le mot «Kinder» comme une indication de la destination des produits qu’il désigne. Au demeurant, même à supposer que le public italien ne perçoive pas la signification de ce mot, la partie sonore de la marque dont l’enregistrement est demandé, «traum», occulterait la partie aux sonorités faibles, «Kinder», et le public ne ferait pas d’association avec la marque Kinder.

    50      Selon l’OHMI, le troisième moyen est manifestement irrecevable puisqu’il constitue une tentative de soumettre de nouveau à l’appréciation de la Cour des questions de fait déjà soulevées en première instance.

    51      Ferrero fait valoir que M. Wohlfahrt n’explique pas quelle erreur de droit le Tribunal aurait commise dans l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94, mais allègue des faits non susceptibles de contrôle dans le cadre d’un pourvoi, en se bornant à ajouter ses appréciations factuelles à celles qu’il avait exposées au cours des instances précédentes. Ce moyen serait donc manifestement irrecevable.

     Appréciation de la Cour

    52      Par la première branche de son troisième moyen, M. Wohlfahrt fait valoir que le Tribunal a dénaturé le contenu du dossier, en jugeant que, dans sa requête en première instance, il ne contestait pas les constatations de la chambre de recours relatives à la similitude phonétique et visuelle des signes en conflit.

    53      Cet argument repose sur une lecture erronée de l’arrêt attaqué. À cet égard, il suffit de comparer les points 33 et 34 de la requête en première instance avec le point 42 de l’arrêt attaqué pour conclure au bien-fondé de l’affirmation du Tribunal contestée par M. Wohlfahrt. En effet, dans ce point 42, le Tribunal a indiqué que, par les considérations exposées auxdits points 33 et 34 de la requête, «le requérant se limite à se référer à des décisions antérieures de l’OHMI et à soutenir que, comme dans les affaires concernées par ces décisions, la marque demandée forme un mot unique, dont l’élément principal serait la seconde partie (‘traum’), laquelle serait, contrairement à l’avis de la chambre de recours, composée non pas de deux mais d’une seule syllabe, qui serait porteuse de la signification décisive de cette marque». Le Tribunal en a conclu, au même point 42, que «[f]orce est de constater que, telles que présentées dans la requête, ces considérations ne comportent aucune argumentation visant à démontrer en quoi la chambre de recours aurait considéré à tort que les signes en conflit sont similaires sur les plans visuel et phonétique. Il n’est d’ailleurs pas fait référence à cette notion dans l’argumentation relative au troisième moyen».

    54      Au vu de ce qui précède, ladite branche doit être considérée comme manifestement non fondée.

    55      Par la seconde branche de son troisième moyen, M. Wohlfahrt reproche au Tribunal d’avoir confirmé la similitude visuelle et phonétique entre les signes en conflit qui avait été constatée par la chambre de recours. Or, selon lui, l’absence d’une telle similitude résulte notamment du fait qu’une très grande partie du public italien comprend la signification du mot allemand «Kinder». Il en découlerait que, dans les deux marques en cause, l’élément «Kinder» n’aurait qu’un faible caractère distinctif.

    56      Il convient de rappeler, à cet égard, que, aux points 44 à 49 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a vérifié si la chambre de recours n’avait pas commis d’erreur susceptible de remettre en cause la conclusion selon laquelle, compte tenu de la présence dans les signes en question de l’élément commun «Kinder», et eu égard au degré moyen de similitude visuelle et phonétique entre ces signes induit par ledit élément ainsi qu’à l’identité des produits en cause, il existait un risque de confusion entre lesdits signes.

    57      À cette fin, le Tribunal s’est livré à une appréciation des faits et des éléments de preuve concernant la perception par les consommateurs du mot «Kinder» et aux conséquences d’une telle perception sur le caractère distinctif de ce signe (voir, en ce sens, arrêt du 4 octobre 2007, Henkel/OHMI, C‑144/06 P, Rec. p. I‑8109, point 51, et ordonnance du 11 mai 2012, LAN Airlines/OHMI, C‑198/11 P, point 32), sans que M. Wohlfahrt ait allégué que le Tribunal les aurait dénaturés.

    58      Or, selon une jurisprudence bien établie, en vertu des articles 256, paragraphe 1, TFUE et 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, le pourvoi est limité aux questions de droit. Le Tribunal est seul compétent pour constater et apprécier les faits pertinents ainsi que pour apprécier les éléments de preuve. L’appréciation de ces faits et éléments de preuve ne constitue donc pas, sous réserve du cas de leur dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi (voir, notamment, arrêts du 7 octobre 2004, Mag Instrument/OHMI, C‑136/02 P, Rec. p. I‑9165, point 39; du 18 décembre 2008, Les Éditions Albert René/OHMI, C‑16/06 P, Rec. p. I‑10053, point 68, et du 2 septembre 2010, Calvin Klein Trademark Trust/OHMI, C‑254/09 P, Rec. p. I‑7989, point 49).

    59      La seconde branche du troisième moyen doit donc être écartée comme manifestement irrecevable.

    60      Dès lors, il y a lieu de rejeter le troisième moyen comme en partie manifestement non fondé et en partie manifestement irrecevable.

    61      Compte tenu de ce qui précède, il convient de rejeter le présent pourvoi comme en partie manifestement non fondé et en partie manifestement irrecevable. 

     Sur les dépens

    62      Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. M. Wohlfahrt ayant succombé en ses moyens et l’OHMI ayant conclu à sa condamnation, il y a lieu de le condamner aux dépens.

    Par ces motifs, la Cour (septième chambre) ordonne:

    1)      Le pourvoi est rejeté

    2)      M. Harald Wohlfahrt est condamné aux dépens.

    Signatures


    * Langue de procédure: l’allemand.

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