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Document 62023CJ0039

    Arrêt de la Cour (première chambre) du 29 juillet 2024.
    Keva e.a. contre Skatteverket.
    Demande de décision préjudicielle, introduite par le Högsta förvaltningsdomstolen.
    Renvoi préjudiciel – Article 63 TFUE – Libre circulation des capitaux – Imposition de dividendes perçus par des fonds de pension de droit public – Différence de traitement entre les fonds de pension de droit public résidents et les fonds de pension de droit public non-résidents – Exonération des seuls fonds de pension de droit public résidents – Comparabilité des situations – Justification – Nécessité de sauvegarder l’objectif poursuivi par la politique sociale – Nécessité de préserver une répartition équilibrée du pouvoir d’imposition des États membres.
    Affaire C-39/23.

    Court reports – general – 'Information on unpublished decisions' section

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2024:648

     ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

    29 juillet 2024 ( *1 )

    « Renvoi préjudiciel – Article 63 TFUE – Libre circulation des capitaux – Imposition de dividendes perçus par des fonds de pension de droit public – Différence de traitement entre les fonds de pension de droit public résidents et les fonds de pension de droit public non‑résidents – Exonération des seuls fonds de pension de droit public résidents – Comparabilité des situations – Justification – Nécessité de sauvegarder l’objectif poursuivi par la politique sociale – Nécessité de préserver une répartition équilibrée du pouvoir d’imposition des États membres »

    Dans l’affaire C‑39/23,

    ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Högsta förvaltningsdomstolen (Cour suprême administrative, Suède), par décision du 24 janvier 2023, parvenue à la Cour le 26 janvier 2023, dans la procédure

    Keva,

    Landskapet Ålands pensionsfond,

    Kyrkans Centralfond

    contre

    Skatteverket,

    LA COUR (première chambre),

    composée de M. A. Arabadjiev, président de chambre, MM. T. von Danwitz, P. G. Xuereb (rapporteur), A. Kumin et Mme I. Ziemele, juges,

    avocat général : M. A. M. Collins,

    greffier : Mme A. Lamote, administratrice,

    vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 11 janvier 2024,

    considérant les observations présentées :

    pour Keva, Landskapet Ålands pensionsfond et Kyrkans Centralfond, par Mme K. Äimä et M. K. Grüssner,

    pour Skatteverket, par Mmes K. Hjelmberg et U. Vretendahl,

    pour le gouvernement suédois, par Mmes C. Meyer-Seitz et R. Shahsavan Eriksson, en qualité d’agents,

    pour le gouvernement espagnol, par Mme A. Pérez-Zurita Gutiérrez, en qualité d’agent,

    pour la Commission européenne, par Mme P. Carlin, MM. A. Ferrand et W. Roels, en qualité d’agents,

    ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 21 mars 2024,

    rend le présent

    Arrêt

    1

    La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 63 TFUE.

    2

    Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Keva, le Landskapet Ålands pensionsfond (fonds de pension de la province d’Åland, Finlande) et le Kyrkans Centralfond (fonds central de l’Église, Finlande), trois caisses de retraite de droit public qui ont été créées dans le cadre du régime finlandais de pension professionnelle, au Skatteverket (administration fiscale, Suède) au sujet du traitement fiscal en Suède des dividendes distribués par des sociétés suédoises aux requérantes au principal.

    Le cadre juridique

    Le droit international

    Le modèle de convention fiscale de l’OCDE

    3

    Le Conseil de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a adopté, le 30 juillet 1963, une recommandation concernant la suppression des doubles impositions et a invité les gouvernements des pays membres à se conformer, à l’occasion de la conclusion ou de la révision de conventions bilatérales, à un « modèle de convention en vue d’éviter les doubles impositions en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune », élaboré par le comité des affaires fiscales de l’OCDE et annexé à ladite recommandation (ci-après le « modèle de convention fiscale de l’OCDE »). Ce modèle de convention fiscale est réexaminé et modifié régulièrement. Il fait l’objet de commentaires approuvés par le Conseil de l’OCDE.

    4

    L’article 24 du modèle de convention fiscale de l’OCDE, intitulé « Non-discrimination », prévoit, à son paragraphe 1 :

    « Les nationaux d’un État contractant ne sont soumis dans l’autre État contractant à aucune imposition ou obligation y relative, qui est autre ou plus lourde que celles auxquelles sont ou pourront être assujettis les nationaux de cet autre État qui se trouvent dans la même situation, notamment au regard de la résidence. [...] »

    5

    Le point 10 des commentaires sur l’article 24 du modèle de convention fiscale de l’OCDE énonce :

    « [...] les dispositions du paragraphe 1 [de cet article 24] n’impliquent pas qu’un État accordant des avantages fiscaux spéciaux à ses propres organismes ou services publics en raison de leur nature soit tenu de faire bénéficier des mêmes avantages les organismes et services publics de l’autre État ».

    6

    Le point 12 de ces commentaires dispose :

    « [...] les immunités fiscales qu’un État accorde à ses propres organismes et services publics trouvent leur justification dans le fait que ces organismes et services en constituent des parties intégrantes et que leur situation ne peut à aucun moment être comparable à celle des organismes et services publics de l’autre État. [...] »

    La convention fiscale entre les pays nordiques

    7

    En vertu de l’article 10, paragraphe 3, de la convention entre les pays nordiques tendant à éviter la double imposition en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune, signée à Helsinki le 23 septembre 1996 (ci‑après la « convention fiscale entre les pays nordiques »), les dividendes versés par une société résidente d’un État contractant à une personne résidente d’un autre État contractant sont également imposables dans l’État contractant dans lequel la société qui verse les dividendes est résidente. Si le bénéficiaire effectif du dividende est une personne résidente de l’autre État contractant, l’impôt perçu ne peut excéder 15 % du montant brut du dividende.

    8

    L’article 25 de la convention fiscale entre les pays nordiques prévoit des méthodes pour éviter la double imposition. En ce qui concerne les personnes ayant leur résidence en Finlande, il est prévu que ces personnes ont, en règle générale, le droit de déduire de l’impôt sur le revenu finlandais un montant égal à l’impôt sur le revenu payé en application de la législation d’un autre État contractant et conformément à ladite convention.

    Le droit suédois

    9

    En vertu de l’article 1er, premier alinéa, de la kupongskattelagen (1970:624) [loi (1970:624) relative à l’impôt sur les dividendes], l’impôt sur les dividendes doit, en règle générale, être acquitté au profit de l’État pour toute distribution de dividendes d’actions de sociétés anonymes suédoises.

    10

    Aux termes de l’article 4, premier alinéa, de cette loi, sont redevables de cet impôt les personnes morales étrangères qui ont droit à des dividendes si les dividendes versés ne se rapportent pas aux revenus d’une activité économique ou commerciale exercée par l’intermédiaire d’un établissement stable exploité en Suède.

    11

    L’article 5 de ladite loi prévoit que l’impôt sur les dividendes est perçu au taux de 30 % des dividendes distribués. Toutefois, il ressort de l’article 27, premier alinéa, de la même loi que si l’impôt sur les dividendes a été perçu au-delà du montant dû conformément à une convention visant à éviter la double imposition, le bénéficiaire a droit au remboursement des sommes retenues en excès.

    12

    Les articles 3 et 4 du chapitre 6 de l’inkomstskattelagen (1999:1229) [loi (1999:1229) relative à l’impôt sur le revenu] disposent que les personnes morales suédoises sont, en règle générale, assujetties à l’impôt sur le revenu sur tous leurs revenus en Suède et à l’étranger.

    13

    L’article 7 du chapitre 6 de cette loi prévoit que les personnes morales étrangères sont partiellement assujetties à l’impôt sur le revenu, c’est‑à‑dire qu’elles ne sont assujetties qu’au titre des revenus visés à l’article 11, premier alinéa, de ce chapitre, dont il découle que cet assujettissement partiel couvre, entre autres, les revenus provenant d’un établissement fixe ou d’un bien immeuble situés en Suède.

    14

    Aux termes de l’article 2, premier alinéa, point 1, du chapitre 7 de ladite loi, l’État est totalement exonéré de l’obligation fiscale. Cette dérogation s’applique à l’État suédois en tant que tel, mais non aux entreprises publiques.

    15

    L’article 2, premier alinéa, du chapitre 2 de la loi (1999:1229) relative à l’impôt sur le revenu dispose que les termes et les expressions figurant dans cette loi comprennent également les situations étrangères équivalentes, à moins qu’il ne soit indiqué ou qu’il ne ressorte du contexte que seules les situations suédoises sont visées. Le second alinéa de cet article 2 précise que le premier alinéa ne s’applique pas aux dispositions relatives à l’État.

    16

    L’article 9, premier alinéa, du chapitre 6 de ladite loi prévoit que les États étrangers et les collectivités étrangères doivent être traités comme étant des sociétés étrangères.

    Le litige au principal et les questions préjudicielles

    17

    En Suède, les fonds de pension de droit public font partie de l’État et bénéficient de l’exonération fiscale accordée aux revenus de celui-ci. La tâche principale de ces fonds de pension est de gérer le capital qui constitue pour partie les pensions de vieillesse fondées sur le revenu et fait partie de la pension de vieillesse suédoise. Le régime général de pension de vieillesse fait lui-même partie du système de sécurité sociale public et obligatoire.

    18

    Keva est la caisse de retraite qui gère les pensions des employés du secteur municipal en Finlande. Elle a pour mission principale de gérer les fonds de l’assurance pension professionnelle prévue par la loi. Keva collecte des cotisations de retraite et effectue le paiement des pensions. Elle est une personne morale de droit public au sens du droit finlandais et est exonérée d’impôt en Finlande.

    19

    Le fonds de pension de la province d’Åland est la caisse de retraite chargée de la gestion des pensions des salariés employés par la province d’Åland. Sa mission principale est de gérer les fonds du régime légal de l’assurance pension professionnelle. Toutefois, c’est la province d’Åland qui est responsable, entre autres, du paiement des pensions des salariés. Les ressources du fonds de pension de la province d’Åland sont séparées du budget de la province d’Åland. Ce fonds ne possède pas de personnalité juridique distincte, mais fait partie de la province d’Åland. Il est en partie exonéré d’impôt en Finlande et ne paie pas d’impôts sur les dividendes versés par des sociétés par actions.

    20

    Le fonds central de l’Église était la caisse de retraite des employés de l’Église évangélique luthérienne de Finlande jusqu’au 1er janvier 2016. Il gérait les fonds versés dans le cadre du régime légal de l’assurance pension professionnelle. Le paiement des pensions de retraite pour son compte était géré par Keva. Le fonds central de l’Église n’a pas de personnalité juridique distincte, mais fait partie de l’Église évangélique luthérienne de Finlande. Il est en pratique exonéré d’impôt sur le revenu en Finlande.

    21

    Au cours de la période allant de l’année 2003 à l’année 2016, les requérantes au principal ont perçu des dividendes de sociétés suédoises qui ont été soumis à l’impôt sur les dividendes en Suède. Dans la mesure où ces dividendes n’ont pas été imposés en Finlande, l’impôt sur les dividendes auquel elles ont été soumises en Suède n’a pas pu être déduit comme il est prévu par la convention fiscale entre les pays nordiques.

    22

    Par suite, les requérantes au principal ont demandé à l’administration fiscale suédoise le remboursement de l’impôt sur les dividendes auquel elles avaient été soumises en Suède. À l’appui de leurs demandes, elles ont fait valoir que la perception de l’impôt sur les dividendes était contraire à la libre circulation des capitaux, au sens de l’article 63 TFUE, dans la mesure où elles étaient comparables aux fonds de pension de droit public suédois, lesquels sont exonérés d’obligation fiscale en Suède.

    23

    L’administration fiscale a rejeté ces demandes au motif que la situation des requérantes au principal n’était pas objectivement comparable à celle des fonds de pension de droit public suédois.

    24

    Les requérantes au principal ont saisi le Förvaltningsrätten i Falun (tribunal administratif siégeant à Falun, Suède) de recours contre les décisions de l’administration fiscale, lesquels ont été rejetés au motif que les caisses de retraite finlandaises et les fonds de pension de droit public suédois présentent certaines différences en ce qui concerne leurs tâches et leur organisation. En outre, l’exonération fiscale des fonds de pension de droit public suédois se justifierait par le fait qu’ils feraient partie de l’État suédois. Étant donné qu’il s’agirait d’une exonération se justifiant pour des raisons autres que purement fiscales, le prélèvement de l’impôt sur les dividendes ne pourrait pas être considéré comme étant discriminatoire au regard de l’article 63 TFUE.

    25

    Les requérantes au principal ont interjeté appel de ces jugements devant le Kammarrätten i Sundsvall (Cour administrative d’appel de Sundsvall, Suède). Ces recours ont été rejetés au motif que le droit de l’Union n’obligerait pas la Suède à traiter fiscalement un autre État membre ou un organisme public non-résident de la même manière que l’État suédois. En outre, l’exonération fiscale dont bénéficie l’État suédois ne ferait qu’éviter une circulation de fonds au sein du secteur public. Les caisses de retraite de droit public finlandaises et les fonds de pension de droit public suédois ne se trouveraient donc pas dans des situations objectivement comparables.

    26

    Les requérantes au principal se sont pourvues en cassation contre ces arrêts devant le Högsta förvaltningsdomstolen (Cour suprême administrative, Suède), qui est la juridiction de renvoi. Celle-ci les a autorisées à former un pourvoi portant sur la compatibilité du prélèvement de l’impôt sur les dividendes versés par des sociétés résidentes à des caisses de retraite de droit public non-résidentes avec la libre circulation des capitaux, au sens de l’article 63 TFUE.

    27

    En premier lieu, la juridiction de renvoi se demande si le traitement des institutions de retraite de droit public non-résidentes percevant des dividendes de sociétés résidentes est moins favorable que celui dont bénéficient les fonds de pension de droit public résidents.

    28

    D’une part, les fonds de pension de droit public suédois feraient partie de l’État, en tant qu’entité juridique, et les actifs qu’ils détiennent constitueraient des ressources d’État. Or, l’exonération fiscale dont bénéficie les dividendes de sociétés résidentes perçus par ces fonds permettrait d’éviter la circulation en boucle de ces ressources sans réel avantage économique pour l’État. Ainsi, le fait que l’État suédois exerce son droit d’imposer les institutions de retraite de droit public non‑résidentes sans se soumettre lui-même à l’impôt ne pourrait donc pas être considéré comme dissuadant les autres États membres d’investir en Suède par l’intermédiaire de leurs institutions de retraite de droit public.

    29

    D’autre part, une autre approche serait de considérer que, si seuls les dividendes perçus par les institutions de retraite de droit public résidentes sont exonérés de l’impôt, alors que les dividendes versés à des institutions de même nature mais non-résidentes sont imposés, ces dernières seraient désavantagées, ce qui pourrait constituer un obstacle à la libre circulation des capitaux, au sens de l’article 63 TFUE.

    30

    En deuxième lieu, la juridiction de renvoi éprouve des doutes concernant la question de savoir si, en l’occurrence, les fonds de pensions de droit public résidents et les fonds de pension de droit public non-résidents se trouvent dans des situations objectivement comparables.

    31

    D’une part, dans le système de sécurité sociale suédois, les fonds de pension de droit public résidents serviraient de fonds de stabilisation pour l’État en ce qui concerne les pensions de vieillesse fondées sur le revenu. Ainsi, il n’existerait aucune situation dans laquelle une institution de retraite de droit public non-résidente pourrait de facto se voir confier la même tâche que les fonds de pension de droit public résidents. Par conséquent, une institution de retraite de droit public non‑résidente ne pourrait jamais se trouver dans une situation objectivement comparable à celle de l’État suédois et de ses fonds de pension de droit public.

    32

    D’autre part, il pourrait être considéré que, si l’objectif déclaré de l’exonération fiscale dont bénéficient l’État suédois et ses fonds de pension de droit public est la simplification administrative, l’objectif serait également de réduire la nécessité d’allouer aux autorités publiques les montants correspondant aux taxes qu’elles seraient tenues de payer si elles n’étaient pas exonérées d’impôt pour accomplir leurs missions d’intérêt général. En ce qui concerne ce dernier objectif, les institutions qui sont réglementées de la même manière et qui ont la même mission dans d’autres États membres se trouveraient dans une situation objectivement comparable.

    33

    Par ailleurs, la juridiction de renvoi se demande si la comparaison doit être faite avec l’État suédois en tant que tel ou seulement avec les fonds de pension de droit public eux-mêmes. En effet, les requérantes au principal accompliraient certaines tâches qui seraient différentes de celles accomplies par les fonds de pension de droit public suédois. Plus précisément, ces derniers ne seraient pas chargés de percevoir les cotisations de retraite ni de verser les pensions, mais auraient pour seule mission de gérer les fonds du régime d’assurance des pensions de vieillesse fondées sur le revenu. Toutefois, ces autres tâches seraient effectuées par d’autres organismes, au sein de l’État suédois, qui bénéficient également de l’exonération fiscale.

    34

    En troisième et dernier lieu, la juridiction de renvoi nourrit des doutes quant à la question de savoir si une restriction éventuelle peut être justifiée par une raison impérieuse d’intérêt général.

    35

    À cet égard, deux approches seraient également envisageables. D’une part, la différence de traitement en cause pourrait être justifiée par la nécessité de sauvegarder l’objectif poursuivi par la politique sociale suédoise et son financement. Or, l’imposition des fonds de pension de droit public résidents signifierait que l’État suédois devrait allouer les recettes fiscales correspondantes à ces fonds pour éviter qu’ils n’utilisent leurs fonds propres. D’autre part, la perte de revenus ou des difficultés administratives ne constitueraient pas de raisons valables pouvant justifier une restriction à la libre circulation des capitaux, au sens de l’article 63 TFUE.

    36

    Dans ces conditions, le Högsta förvaltningsdomstolen (Cour suprême administrative) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

    « 1)

    La circonstance que les dividendes distribués par des sociétés résidentes aux institutions de retraite publiques étrangères fassent l’objet d’une retenue à la source, alors que de tels dividendes ne font pas l’objet d’une imposition s’ils reviennent à l’État lui-même par l’intermédiaire de ses fonds de pension publics, entraîne-t-elle une différence de traitement défavorable constitutive d’une restriction à la libre circulation des capitaux qui est en principe interdite par l’article 63 TFUE ?

    2)

    S’il est répondu par l’affirmative à la première question, quels sont les critères à prendre en considération lors de l’examen visant à établir si une institution de retraite publique étrangère se trouve dans une situation objectivement comparable à celle de l’État concerné et de ses fonds de pension publics ?

    3)

    Une restriction éventuelle peut-elle être considérée comme étant justifiée par une raison impérieuse d’intérêt général ? »

    Sur les questions préjudicielles

    37

    Par ses trois questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 63 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une législation d’un État membre en vertu de laquelle les dividendes distribués par des sociétés résidentes à des institutions de retraite de droit public non-résidentes font l’objet d’une retenue à la source, tandis que les dividendes distribués à des fonds de pension de droit public résidents sont exonérés d’une telle retenue.

    38

    Selon la jurisprudence de la Cour, les États membres doivent exercer leur compétence en matière de fiscalité directe dans le respect du droit de l’Union et, notamment, des libertés fondamentales garanties par le traité FUE (arrêts du 27 avril 2023, L Fund, C‑537/20, EU:C:2023:339, point 41 et jurisprudence citée, ainsi que du 7 septembre 2023, Cartrans Preda, C‑461/21, EU:C:2023:632, point 61).

    39

    S’agissant de la libre circulation des capitaux, la Cour a déjà jugé que les dispositions du traité relatives à cette liberté fondamentale n’opèrent pas de distinction entre les entreprises privées et les entreprises publiques (voir, en ce sens, arrêt du 2 juin 2005, Commission/Italie, C‑174/04, EU:C:2005:350, point 32). Dès lors, ces dispositions n’excluent pas le secteur public de leur champ d’application.

    40

    L’article 63, paragraphe 1, TFUE interdit de manière générale les entraves aux mouvements de capitaux entre les États membres. Les mesures interdites par cette disposition, en tant que restrictions aux mouvements de capitaux, comprennent celles qui sont de nature à dissuader les non-résidents de faire des investissements dans un État membre ou à dissuader les résidents de cet État membre d’en faire dans d’autres États [arrêts du 27 avril 2023, L Fund, C‑537/20, EU:C:2023:339, point 42 et jurisprudence citée, ainsi que du 18 janvier 2024, JD (Condition de résidence), C‑562/22, EU:C:2024:55, point 34 et jurisprudence citée].

    41

    Cela étant, en vertu de l’article 65, paragraphe 1, sous a), TFUE, l’article 63 TFUE ne porte pas atteinte au droit qu’ont les États membres « d’appliquer les dispositions pertinentes de leur législation fiscale qui établissent une distinction entre les contribuables qui ne se trouvent pas dans la même situation en ce qui concerne leur résidence ou le lieu où leurs capitaux sont investis ».

    42

    Cette disposition, en tant qu’elle constitue une dérogation au principe fondamental de la libre circulation des capitaux, doit faire l’objet d’une interprétation stricte. Partant, elle ne saurait être interprétée en ce sens que toute législation fiscale comportant une distinction entre les contribuables en fonction du lieu où ils résident ou de l’État dans lequel ils investissent leurs capitaux est automatiquement compatible avec le traité FUE. En effet, la dérogation prévue à l’article 65, paragraphe 1, sous a), TFUE est elle-même limitée par l’article 65, paragraphe 3, TFUE, qui prévoit que les dispositions nationales visées au paragraphe 1 de cet article « ne doivent constituer ni un moyen de discrimination arbitraire ni une restriction déguisée à la libre circulation des capitaux et des paiements telle que définie à l’article 63 [TFUE] » [arrêts du 27 avril 2023, L Fund, C‑537/20, EU:C:2023:339, point 44 et jurisprudence citée, ainsi que du 12 octobre 2023, BA (Successions – Politique sociale de logement dans l’Union), C‑670/21, EU:C:2023:763, point 54].

    43

    La Cour a également jugé qu’il y a lieu, dès lors, de distinguer les différences de traitement permises au titre de l’article 65, paragraphe 1, sous a), TFUE des discriminations interdites par l’article 65, paragraphe 3, TFUE. Or, pour qu’une législation fiscale nationale puisse être considérée comme étant compatible avec les dispositions du traité FUE relatives à la libre circulation des capitaux, il faut que la différence de traitement qui en résulte concerne des situations qui ne sont pas objectivement comparables ou qu’elle soit justifiée par une raison impérieuse d’intérêt général [arrêts du 27 avril 2023, L Fund, C‑537/20, EU:C:2023:339, point 45 et jurisprudence citée, ainsi que du 12 octobre 2023, BA (Successions – Politique sociale de logement dans l’Union), C‑670/21, EU:C:2023:763, point 55].

    44

    Il y a lieu donc d’examiner, tout d’abord, l’existence éventuelle d’une différence de traitement, ensuite, la comparabilité éventuelle des situations en cause au principal et, le cas échéant, enfin, la possibilité de justifier le traitement différencié.

    Sur l’existence d’une restriction à la libre circulation des capitaux

    45

    En l’occurrence, il ressort de la décision de renvoi que, s’agissant du traitement fiscal des dividendes distribués par des sociétés résidentes en Suède, prévu à l’article 2, premier alinéa, du chapitre 7 de la loi (1999:1229) relative à l’impôt sur le revenu, les fonds de pension de droit public résidents sont exonérés de la retenue à la source prévue sur ce type de dividendes, tandis que les institutions de retraite de droit public non-résidentes ne bénéficient pas d’une telle exonération.

    46

    Une telle différence de traitement fiscal conduit à un traitement désavantageux des dividendes versés aux institutions de retraite de droit public non-résidentes, susceptible de dissuader ces institutions de procéder à des investissements dans des sociétés établies en Suède (voir, par analogie, arrêt du 17 mars 2022, AllianzGI-Fonds AEVN, C‑545/19, EU:C:2022:193, point 39).

    47

    Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument du gouvernement suédois selon lequel le principe de non-discrimination, au sens de l’article 24 du modèle de convention fiscale de l’OCDE, n’implique pas qu’un État accordant des avantages fiscaux spéciaux à ses propres organismes publics soit tenu de faire bénéficier des mêmes avantages les organismes publics d’un autre État, ainsi qu’il ressort des points 10 et 12 des commentaires sur cet article 24.

    48

    À cet égard, il suffit de relever que ce gouvernement ne saurait exciper de ces points des commentaires sur l’article 24 du modèle de convention fiscale de l’OCDE aux fins d’échapper aux obligations qui lui incombent en vertu du traité (voir, par analogie, arrêt du 16 juillet 2009, Damseaux, C‑128/08, EU:C:2009:471, point 34).

    49

    S’agissant de l’argument du gouvernement suédois selon lequel, en l’absence d’harmonisation du droit de l’Union en la matière, celui-ci n’impose aucune obligation commune aux États membres pour qu’ils contribuent au financement des systèmes de sécurité sociale des autres États membres, il y a lieu de rappeler que, s’il est constant que le droit de l’Union respecte la compétence des États membres pour aménager leurs systèmes de sécurité sociale, il demeure toutefois que, dans l’exercice de cette compétence, les États membres doivent respecter le droit de l’Union, et notamment, les dispositions du traité FUE relatives aux libertés fondamentales [voir, en ce sens, arrêts du 28 avril 2022, Gerencia Regional de Salud de Castilla y León, C‑86/21, EU:C:2022:310, point 18, et du 30 juin 2022, INSS (Cumul de pensions d’invalidité professionnelle totale), C‑625/20, EU:C:2022:508, point 30 et jurisprudence citée].

    50

    Dans ces conditions, il y a lieu de considérer qu’une législation nationale telle que celle en cause au principal constitue une restriction à la libre circulation des capitaux, prohibée, en principe, par l’article 63 TFUE.

    Sur la comparabilité des situations

    51

    Il découle de la jurisprudence de la Cour, d’une part, que le caractère comparable ou non d’une situation transfrontalière avec une situation interne doit être examiné en tenant compte de l’objectif poursuivi par les dispositions nationales en cause ainsi que de l’objet et du contenu de ces dernières et, d’autre part, que seuls les critères de distinction pertinents établis par la législation en cause doivent être pris en compte afin d’apprécier si la différence de traitement résultant d’une telle législation reflète une différence de situation objective [arrêts du 27 avril 2023, L Fund, C‑537/20, EU:C:2023:339, point 54 et jurisprudence citée, ainsi que du 12 octobre 2023, BA (Successions – Politique sociale de logement dans l’Union), C‑670/21, EU:C:2023:763, point 59].

    52

    S’agissant, en premier lieu, des objectifs et de l’objet du régime suédois en matière d’imposition des dividendes, il ressort, en substance, de la décision de renvoi que l’exonération fiscale dont bénéficie les dividendes de sociétés perçus par les fonds de pension de droit public résidents vise à éviter la circulation en boucle des ressources publiques de l’État suédois.

    53

    À cet égard, le gouvernement suédois confirme que l’exonération prévue à l’article 2, premier alinéa, du chapitre 7 de la loi (1999:1229) relative à l’impôt sur le revenu a pour objectif d’éviter une circulation en boucle des ressources publiques de l’État suédois et ajoute que cette exonération vise à promouvoir la stabilité et la viabilité du régime suédois de pensions.

    54

    En revanche, la Commission européenne soutient, dans ses observations écrites, que ladite exonération n’a pas pour finalité de contribuer au financement du système de sécurité sociale suédois, mais qu’elle vise bien à éviter une imposition des dividendes versés par des sociétés et perçus par les fonds de pensions de droit public résidents qui entraînerait une circulation en boucle des ressources publiques. En effet, cette institution estime que l’objectif implicite de la même exonération est d’éviter de devoir accorder aux organismes publics tels que les fonds de pension de droit public suédois des ressources puisées dans le budget de l’État pour compenser l’impôt dont ils devraient autrement s’acquitter.

    55

    Dans ce contexte, pour autant que le régime suédois en matière d’exonération des dividendes reçus par des fonds de pension de droit public vise à éviter une circulation en boucle des ressources publiques de l’État suédois, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier, il convient de considérer que le fait qu’un tel fonds de pension fasse partie de l’État suédois ne le place pas nécessairement dans une situation différente de celle d’une institution de retraite de droit public non-résidente.

    56

    En effet, cet objectif pourrait également être atteint si les institutions de retraite de droit public non-résidentes bénéficiaient en Suède d’une exonération de la retenue à la source sur les dividendes versés par des sociétés résidentes au même titre que les fonds de pension de droit public résidents.

    57

    En ce qui concerne l’argument du gouvernement suédois et de l’administration fiscale tiré, en substance, de ce que, sous l’angle de l’objectif de promouvoir la stabilité et la viabilité du régime suédois de pensions, à la différence des fonds de pension de droit public résidents, les institutions de retraite de droit public non-résidentes n’ont pas pour finalité de promouvoir la stabilité financière et la viabilité du système de sécurité sociale suédois, il suffit de relever, ainsi que M. l’avocat général l’a, en substance, fait au point 30 de ses conclusions, que, si, par définition, chaque fonds a pour objectif de protéger la stabilité et la viabilité d’un système de pension national distinct, une telle circonstance ne saurait rendre impossible la comparaison transfrontalière des fonds de pension.

    58

    Par ailleurs, l’objectif visant à promouvoir la stabilité et la viabilité du régime suédois de pensions est défini de telle manière que les fonds de pension de droit public résidents le remplissent, tandis que toutes les institutions de retraite de droit public non-résidentes sont automatiquement exclues du bénéfice de l’exonération prévue à l’article 2, premier alinéa, du chapitre 7 de la loi (1999:1229) relative à l’impôt sur le revenu (voir, par analogie, arrêt du 16 juin 2011, Commission/Autriche, C‑10/10, EU:C:2011:399, point 34).

    59

    En ce qui concerne, en second lieu, les critères de distinction pertinents établis par la législation nationale en cause, l’administration fiscale suédoise ainsi que les gouvernements suédois et espagnol ont fait valoir que le seul critère de distinction établi par cette législation n’est pas fondé sur le lieu de résidence, mais sur le fait que les fonds de pension de droit public résidents partagent la personnalité juridique de l’État suédois.

    60

    À cet égard, il ressort de la décision de renvoi que les régimes généraux de pension de vieillesse suédois et finlandais ont le même objectif social, la même fonction ainsi que le même type d’organisation juridique. Leur mode de financement est identique et ils possèdent un mode de fonctionnement similaire. Néanmoins, les institutions de retraite de droit public finlandaises présentent certaines caractéristiques qui diffèrent de celles des fonds de pension de droit public suédois en ce que ces institutions revêtent des formes juridiques variées. En outre, les fonds de pension de droit public suédois ne sont pas chargés de percevoir les cotisations de retraite et de payer des pensions, cette tâche étant néanmoins effectuée par les autorités publiques suédoises.

    61

    Or, ainsi que la Commission l’a soutenu, en substance, lors de l’audience, il suffit de relever, à cet égard, que, sous réserve des vérifications qu’il incombe à la juridiction de renvoi d’effectuer, la collecte des cotisations de retraite, le paiement des pensions ainsi que la forme juridique du fonds concerné ne semblent pas présenter de lien direct avec le traitement fiscal des dividendes perçus de la part des sociétés suédoises.

    62

    Partant, il y a lieu de considérer que, dès lors que seuls les fonds de pensions de droit public résidents bénéficient de l’exonération prévue à l’article 2, premier alinéa, du chapitre 7 de la loi (1999:1229) relative à l’impôt sur le revenu, les institutions de retraite de droit public non‑résidentes étant exclues du bénéfice de cette exonération, le seul critère susceptible d’opérer une distinction entre les fonds de pension de droit public suédois et les institutions de retraite de droit public non-résidentes est en réalité le lieu de résidence des fonds.

    63

    Au vu de l’ensemble des éléments qui précèdent, il convient de constater que, en l’occurrence, la différence de traitement entre les institutions de retraite de droit public non-résidentes et les fonds de pension de droit public résidents, telle que constatée au point 46 du présent arrêt, concerne des situations objectivement comparables.

    Sur l’existence d’une raison impérieuse d’intérêt général

    64

    Il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence constante, une restriction à la libre circulation des capitaux peut être admise si elle se justifie par des raisons impérieuses d’intérêt général, qu’elle est propre à garantir la réalisation de l’objectif qu’elle poursuit et ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif [arrêts du 27 avril 2023, L Fund, C‑537/20, EU:C:2023:339, point 66 et jurisprudence citée, ainsi que du 16 novembre 2023, Autoridade Tributária e Aduaneira (Plus-values sur cessions de parts), C‑472/22, EU:C:2023:880, point 35 et jurisprudence citée].

    65

    En l’occurrence, le gouvernement suédois fait valoir, dans ses observations écrites, que, à supposer que la législation nationale en cause au principal constitue une restriction à la libre circulation des capitaux, la limitation de l’exonération, prévue à l’article 2, premier alinéa, du chapitre 7 de la loi (1999:1229) relative à l’impôt sur le revenu, aux fonds de pension de droit public résidents serait justifiée au regard de deux raisons impérieuses d’intérêt général, à savoir, d’une part, la nécessité de sauvegarder l’objectif poursuivi par la politique sociale suédoise et son financement ainsi que, d’autre part, le principe de territorialité combiné à la nécessité de préserver une répartition équilibrée des pouvoirs entre les États membres en ce qui concerne le régime général des pensions de vieillesse fondées sur le revenu.

    66

    S’agissant, en premier lieu, de la nécessité de sauvegarder l’objectif poursuivi par la politique sociale suédoise, le gouvernement suédois fait valoir, d’une part, que l’imposition des fonds de pension de droit public résidents impliquerait qu’il faudrait allouer les recettes fiscales correspondantes à ces fonds dans la proposition de budget annuel pour que lesdits fonds n’utilisent pas leurs fonds propres pour financer cette imposition. Dans un tel cas de figure, d’autres domaines de dépenses pourraient être privilégiés au détriment du régime général des pensions de vieillesse fondées sur le revenu, ce qui réduirait la capacité des mêmes fonds à accomplir leur mission.

    67

    D’autre part, ce gouvernement souligne que l’exonération fiscale dont bénéficient les fonds de pension de droit public résidents permet de garantir notamment le statut autonome du régime général suédois des pensions de vieillesse fondées sur le revenu et invoque à cet égard l’arrêt du 22 octobre 2013, Essent e.a. (C‑105/12 à C‑107/12, EU:C:2013:677), dans lequel la Cour aurait jugé qu’une réglementation nationale pourrait constituer une entrave justifiée à une liberté fondamentale lorsqu’elle est dictée par des motifs d’ordre économique poursuivant un objectif d’intérêt général. En outre, cette exonération permettrait d’éviter une circulation en boucle inutilement lourde des ressources publiques.

    68

    À cet égard, il y a lieu de relever que les inconvénients administratifs ne sont pas à eux seuls suffisants pour justifier un obstacle à la libre circulation des capitaux [arrêt du 7 avril 2022, Veronsaajien oikeudenvalvontayksikkö (Exonération des fonds d’investissement contractuels), C‑342/20, EU:C:2022:276, point 90 et jurisprudence citée].

    69

    En outre, il y a lieu de constater que, à la différence de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 22 octobre 2013, Essent e.a. (C‑105/12 à C‑107/12, EU:C:2013:677), qui visait une interdiction de privatisation, dans la présente affaire, la restriction à la libre circulation des capitaux n’affecte pas le régime de propriété des institutions de retraite de droit public non-résidentes.

    70

    En second lieu, s’agissant du principe de territorialité combiné à la nécessité de préserver une répartition équilibrée des pouvoirs entre les États membres en ce qui concerne le régime général des pensions de vieillesse fondées sur le revenu, le gouvernement suédois fait valoir qu’un État membre, en vertu de ce principe, a le droit d’imposer les revenus générés sur son propre territoire. En outre, le droit de l’Union n’imposerait pas à un État membre de contribuer au financement des régimes généraux nationaux de pension de vieillesse des autres États membres.

    71

    Ce faisant, ce gouvernement soutient, en réalité, que la restriction à la libre circulation des capitaux en cause est justifiée par le besoin de préserver la répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres.

    72

    À cet égard, conformément à une jurisprudence constante de la Cour, la justification tirée de la préservation de la répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres peut être admise lorsque le régime en cause vise à prévenir des comportements de nature à compromettre le droit d’un État membre d’exercer sa compétence fiscale en relation avec les activités réalisées sur son territoire (arrêt du 27 avril 2023, L Fund, C‑537/20, EU:C:2023:339, point 76 et jurisprudence citée).

    73

    Toutefois, dès lors qu’un État membre a choisi, comme dans la situation en cause au principal, de ne pas imposer les fonds résidents sur leurs revenus d’origine nationale, il ne saurait invoquer la nécessité d’assurer une répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres afin de justifier l’imposition des fonds non-résidents qui perçoivent de tels revenus (arrêt du 27 avril 2023, L Fund, C‑537/20, EU:C:2023:339, point 77 et jurisprudence citée).

    74

    Il s’ensuit que la justification fondée sur la préservation d’une répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres ne saurait, non plus, être retenue.

    75

    Partant, la législation nationale en cause au principal ne saurait être considérée comme étant compatible avec les dispositions du traité FUE relatives à la libre circulation des capitaux au motif qu’elle serait justifiée par une raison impérieuse d’intérêt général.

    76

    Eu égard à tout ce qui précède, il y a lieu de répondre aux questions posées que l’article 63 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une législation d’un État membre en vertu de laquelle les dividendes distribués par des sociétés résidentes à des institutions de retraite de droit public non-résidentes font l’objet d’une retenue à la source, tandis que les dividendes distribués à des fonds de pension de droit public résidents sont exonérés d’une telle retenue.

    Sur les dépens

    77

    La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

     

    Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit :

     

    L’article 63 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une législation d’un État membre en vertu de laquelle les dividendes distribués par des sociétés résidentes à des institutions de retraite de droit public non-résidentes font l’objet d’une retenue à la source, tandis que les dividendes distribués à des fonds de pension de droit public résidents sont exonérés d’une telle retenue.

     

    Signatures


    ( *1 ) Langue de procédure : le suédois.

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