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Document 62022CC0147

Conclusions de l'avocat général M. N. Emiliou, présentées le 6 juillet 2023.
Procédure pénale contre contre Terhelt5.
Demande de décision préjudicielle, introduite par la Fővárosi Törvényszék.
Renvoi préjudiciel – Convention d’application de l’accord de Schengen – Article 54 – Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – Article 50 – Principe ne bis in idem – Admissibilité de poursuites pénales pour des faits de corruption d’un prévenu dans un État membre après la clôture de la procédure pénale engagée contre lui pour les mêmes faits par le parquet d’un autre État membre – Conditions devant être remplies afin de pouvoir considérer que le prévenu a été définitivement jugé – Condition d’une appréciation portée sur le fond de l’affaire – Exigence d’une instruction approfondie – Absence d’interrogation du prévenu.
Affaire C-147/22.

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2023:549

 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NICHOLAS EMILIOU

présentées le 6 juillet 2023 ( 1 )

Affaire C‑147/22

Központi Nyomozó Főügyészség

autre partie à la procédure :

Terhelt5

[demande de décision préjudicielle formée par la Fővárosi Törvényszék (cour de Budapest-Capitale, Hongrie)]

« Renvoi préjudiciel – Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – Article 50 – Convention d’application de l’Accord de Schengen – Article 54 – Principe ne bis in idem – Classement sans suite de la procédure – Décision d’un procureur – Appréciation au fond – Instruction approfondie – Examen des éléments de preuve »

I. Introduction

1.

Le principe ne bis in idem – qui, en résumé, interdit un cumul tant de poursuites que de sanctions présentant une nature pénale pour les mêmes faits et contre une même personne – est consacré, entre autres, à l’article 50 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») et à l’article 54 de la convention d’application de l’accord de Schengen, du 14 juin 1985, entre les gouvernements des États de l’Union économique Benelux, de la République fédérale d’Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, signée à Schengen le 19 juin 1990 (ci-après la « CAAS ») ( 2 ).

2.

Dans sa jurisprudence, la Cour a précisé que des décisions de classer sans suite la procédure adoptées par des procureurs au cours de la phase d’instruction peuvent également déclencher l’application du principe ne bis in idem, mais uniquement si ces décisions ont été rendues à la suite d’une appréciation portée sur le fond de l’affaire, après une instruction approfondie ( 3 ). En l’espèce, la juridiction de renvoi demande à la Cour, notamment, de préciser les critères en vertu desquels une instruction devrait être considérée comme « approfondie » aux fins du principe ne bis in idem.

II. Le cadre juridique

A.   Le droit de l’Union

3.

L’article 54 de la CAAS, qui figure au chapitre 3 de celle-ci, est intitulé « Application du principe ne bis in idem » et dispose :

« Une personne qui a été définitivement jugée par une Partie Contractante ne peut, pour les mêmes faits, être poursuivie par une autre Partie Contractante, à condition que, en cas de condamnation, la sanction ait été subie ou soit actuellement en cours d’exécution ou ne puisse plus être exécutée selon les lois de la Partie Contractante de condamnation. »

B.   Le droit hongrois

4.

Le paragraphe 6 de l’article XXVIII de la Magyarország Alaptörvénye (Loi fondamentale, Hongrie) dispose que, sous réserve des cas exceptionnels de recours prévus par la loi, nul ne peut être poursuivi ou condamné en raison d’une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné par un jugement pénal définitif en Hongrie ou – dans la mesure déterminée par un traité international ou par un instrument juridique de l’Union – dans un autre État.

5.

Conformément à l’article 4, paragraphe 3, de l’a büntetőeljárásról szóló 2017. évi XC. törvény (loi no XC de 2017 sur la procédure pénale, ci-après le « code de procédure pénale »), l’action publique ne peut pas être exercée ou, si elle a été engagée, doit être close si l’auteur de l’infraction a déjà fait l’objet d’un jugement définitif, sous réserve des voies de recours extraordinaires et de certaines procédures spéciales. L’article 4, paragraphe 7, de ce code prévoit, quant à lui, que l’action publique ne peut pas être exercée ou, si elle a été engagée, doit être close si l’auteur de l’infraction a déjà fait l’objet d’un jugement définitif dans un État membre de l’Union, ou qu’une décision sur le fond des faits a été prise dans un État membre, qui, en vertu du droit de l’État membre où la décision a été prise, fait obstacle à ce que de nouvelles poursuites pénales soient engagées pour les mêmes faits, ou à ce que la procédure soit poursuivie d’office ou sur la base des voies de recours ordinaires.

C.   Le droit autrichien

6.

L’article 190 de la Strafprozessordnung (code de procédure pénale, ci-après la « StPO »), intitulé « Clôture de la procédure d’instruction », dispose :

« Le parquet doit mettre fin aux poursuites pénales et clôturer la procédure d’instruction lorsque :

1.

l’infraction à la base de la procédure d’instruction n’est pas passible d’une sanction judiciaire ou il serait illégal, pour des motifs juridiques, de continuer les poursuites à l’encontre du prévenu, ou

2.

il n’existe aucun motif réel de continuer les poursuites à l’encontre du prévenu. »

7.

L’article 193 de la StPO, intitulé « Poursuite de la procédure », dispose :

« (1)   Une fois la procédure clôturée, aucune autre instruction ne peut être menée à l’encontre du prévenu ; le cas échéant, le parquet ordonne sa libération. Toutefois, si la décision relative à la poursuite de la procédure requiert certains actes d’instruction ou d’administration des preuves, le parquet peut, ponctuellement, en ordonner la réalisation ou les mener à bien.

(2)   Le parquet peut ordonner la poursuite d’une instruction clôturée en vertu de l’article 190 ou 191 aussi longtemps que les poursuites pénales relatives à l’infraction ne sont pas prescrites et si :

1.

le prévenu n’a pas été interrogé en ce qui concerne cette infraction [...] et aucune contrainte ne lui a été imposée à cet égard, ou

2.

de nouveaux faits ou éléments de preuve surviennent ou apparaissent qui, seuls ou en combinaison avec d’autres résultats de la procédure, semblent propres à justifier la condamnation de l’inculpé [...]

[...] »

III. Les faits, la procédure au principal et les questions préjudicielles

8.

Le 22 août 2012, le Zentrale Staatsanwaltschaft zur Verfolgung von Wirtschaftsstrafsachen und Korruption (parquet central autrichien chargé des poursuites contre la délinquance financière et la corruption, ci-après le « WKStA ») a ouvert des instructions pénales à l’encontre d’un ressortissant hongrois (ci-après le « prévenu 5 ») pour des faits de corruption ainsi qu’à l’encontre de deux coprévenus pour des faits de blanchiment de capitaux, de détournement de fonds et de corruption.

9.

Les instructions portaient sur des faits qui ont eu lieu entre les années 2005 et 2010 et qui impliquaient des pots-de-vin dont on soupçonnait le versement à des responsables publics par l’intermédiaire de plusieurs sociétés établies dans différents États membres dans le but d’influencer la décision à prendre dans le cadre d’une procédure de passation de marchés publics pour la livraison de nouvelles rames pour deux lignes de métro à Budapest, en Hongrie. Cela incluait des transferts de, globalement, plusieurs millions d’euros à titre de paiement pour des services de consultance pour lesquels il était soupçonné qu’ils n’avaient jamais été fournis.

10.

Aux fins de remporter ce marché public, le prévenu 5 – qui aurait eu connaissance des objectifs réels et du caractère fictif des contrats de consultance – est soupçonné de s’être engagé à procurer un avantage illicite en vue de corrompre la ou les personnes en mesure d’influencer les responsables de la prise de décisions pour ce marché. Plus précisément, entre le 5 avril 2007 et le 8 février 2010, le prévenu 5 aurait effectué, à partir d’une société, plusieurs versements pour un montant total de plus de 7000000 euros à des responsables publics qui étaient auteurs de l’infraction de corruption passive et qui sont restés inconnus.

11.

Les soupçons concernant le prévenu 5 se fondaient sur les informations d’instruction fournies à la suite d’une demande d’entraide judiciaire introduite par le Serious Fraud Office (Service des fraudes graves, Royaume-Uni) ainsi que sur des données fournies en relation avec des comptes bancaires et sur les auditions des deux ressortissants autrichiens poursuivis.

12.

Le prévenu 5 n’a pas été entendu en tant que suspect durant l’instruction du WKStA étant donné que la mesure d’instruction prise par le WKStA le 26 mai 2014 pour le localiser – une mesure pouvant être qualifiée de « mesure de contrainte » aux fins de l’article 193, paragraphe 2, de la StPO – s’est avérée infructueuse.

13.

Par ordonnance du 3 novembre 2014, le WKStA a mis fin à l’instruction pour absence de preuves. Le WKStA a, par la suite, réexaminé la situation à plusieurs reprises, mais a conclu à chaque fois que les conditions permettant de poursuivre l’instruction et d’engager des poursuites en vertu du droit national n’étaient pas réunies. En particulier, il a considéré que les faits de corruption reprochés au prévenu 5 étaient prescrits en Autriche au moins depuis l’année 2015.

14.

Les 10 avril et 29 août 2019, le Központi Nyomozó Főügyészség (Parquet national, Hongrie, ci-après le « KNF ») a déposé devant la Fővárosi Törvényszék (cour de Budapest-Capitale, Hongrie) un réquisitoire contre le prévenu 5 pour corruption au sens de l’article 254, paragraphes 1 et 2, de l’a büntető törvénykönyv (code pénal, Hongrie).

15.

Par ordonnance du 8 décembre 2020, la Fővárosi Törvényszék (cour de Budapest-Capitale) a clôturé la procédure pénale engagée contre le prévenu 5 par application du principe ne bis in idem au motif que les faits qui lui étaient reprochés correspondaient à ceux qui avaient fait l’objet de l’instruction devant le WKStA.

16.

L’ordonnance de la Fővárosi Törvényszék (cour de Budapest-Capitale) a, par la suite, été annulée en appel par une ordonnance de la Fővárosi Ítélőtábla (cour d’appel régionale de Budapest-Capitale, Hongrie) du 15 juin 2021. Cette juridiction a jugé que la décision du WKStA du 3 novembre 2014 clôturant l’instruction ne pouvait être considérée comme un jugement définitif au sens de l’article 50 de la Charte et de l’article 54 de la CAAS. À cet égard, ladite juridiction a considéré que les documents disponibles ne permettaient pas de déterminer clairement si la décision du WKStA de clôturer l’instruction reposait sur une appréciation suffisamment détaillée et approfondie des éléments de preuve. Selon elle, il n’était pas établi que le WKStA avait recueilli des éléments de preuve en dehors de l’audition des deux suspects autrichiens qui étaient coprévenus avec le prévenu 5, ou qu’il avait entendu une quelconque des près de 90 personnes citées par le KNF dans son réquisitoire en vue de les interroger ou de recueillir des éléments de preuve. En outre, le prévenu 5 n’a pas été interrogé en tant que suspect. La Fővárosi Ítélőtábla (cour d’appel régionale de Budapest‑Capitale) a donc renvoyé l’affaire à la Fővárosi Törvényszék (cour de Budapest-Capitale).

17.

C’est dans ce contexte que la Fővárosi Törvényszék (cour de Budapest‑Capitale), nourrissant des doutes quant à l’interprétation correcte des dispositions pertinentes du droit de l’Union, a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

Est-il contraire au principe “non bis in idem” consacré à l’article 50 de la [Charte] et à l’article 54 de la [CAAS] d’exercer des poursuites pénales consistant, par rapport à une procédure pénale qui s’est déjà déroulée dans un État membre de l’Union et qui a été définitivement clôturée par une décision du ministère public mettant fin à l’instruction, à engager, dans un autre État membre, une procédure pénale à l’encontre de la même personne et pour les mêmes faits ?

2)

Le fait que des poursuites pénales soient à nouveau engagées dans un autre État membre à l’encontre de la même personne et pour les mêmes faits, lorsque, malgré la décision du ministère public d’un État membre mettant fin à une procédure pénale (instruction), il est possible de poursuivre la procédure d’instruction jusqu’à ce que les faits soient prescrits, mais que le ministère public n’a vu aucune raison de poursuivre la procédure d’office est-il conforme au principe “non bis in idem” consacré à l’article 50 de la [Charte] et à l’article 54 de la [CAAS] et ce principe fait-il définitivement obstacle à ce qu’une telle procédure soit ainsi à nouveau engagée ?

3)

Le fait que l’instruction est clôturée également à l’encontre d’un prévenu qui, certes, n’a pas été interrogé en tant que suspect de faits pénaux dont sont suspectées d’autres personnes, mais à l’encontre duquel, en tant que prévenu, des actes d’instruction ont été posés et que la clôture de l’instruction est fondée sur les données d’instruction dont il a été pris connaissance à la suite d’une demande d’entraide judiciaire, sur des données fournies en relation avec des comptes bancaires et sur l’audition des autres suspects est-il conforme au principe “non bis in idem” consacré à l’article 50 de la [Charte] et à l’article 54 de la [CAAS] et une telle instruction doit-elle être considérée comme une instruction suffisamment détaillée et approfondie ? »

18.

Des observations écrites ont été déposées dans la présente procédure par le KNF, le prévenu 5, les gouvernements hongrois, autrichien et suisse ainsi que par la Commission européenne. Ces parties ont également répondu à une question pour réponse écrite qui leur a été adressée par la Cour à titre de mesure d’organisation de la procédure, les interrogeant sur les critères qu’une juridiction nationale devrait, selon elles, appliquer aux fins d’apprécier s’il est satisfait à l’exigence d’une « instruction approfondie » au sens de l’arrêt du 29 juin 2016, Kossowski ( 4 ).

19.

Conformément à la demande de la Cour, je n’examinerai, dans les présentes conclusions, que la troisième question préjudicielle.

IV. Analyse

20.

Par sa troisième question, la juridiction de renvoi cherche à obtenir des clarifications sur la composante « bis » du principe ne bis in idem : le cumul de poursuites.

21.

La juridiction de renvoi demande à la Cour, en substance, si une décision d’un procureur de classer sans suite la procédure à l’encontre d’un prévenu qui n’a pas été interrogé au cours de l’instruction, mais à l’encontre duquel des actes d’enquête ont été posés et au sujet duquel des informations ont été recueillies dans le cadre d’une entraide judiciaire avec des autorités d’autres États membres, de l’examen d’un compte bancaire et de l’audition de deux prévenus, doit être considérée comme étant fondée sur une instruction approfondie et, par conséquent, fait relever le prévenu du champ d’application du principe ne bis in idem en vertu de l’article 50 de la Charte et de l’article 54 de la CAAS.

22.

Je ne suis pas certain que la Cour puisse et doive répondre à une question formulée en ces termes. En effet, la juridiction de renvoi demande à la Cour de se livrer à une appréciation juridique qui revient, de facto, à une application des dispositions pertinentes du droit de l’Union aux circonstances spécifiques de l’affaire. Tel n’est toutefois pas le rôle de la Cour dans le cadre d’une procédure au titre de l’article 267 TFUE.

23.

Le rôle de la Cour dans le cadre d’une procédure préjudicielle est de fournir à la juridiction de renvoi tous les éléments d’interprétation du droit de l’Union qui lui permettront de résoudre le litige dont elle est saisie ( 5 ). Cela signifie que, dans une affaire telle que la présente, la Cour doit préciser les conditions dans lesquelles le principe ne bis in idem consacré à l’article 50 de la Charte et à l’article 54 de la CAAS est applicable, ce qui permet à la juridiction de renvoi d’apprécier elle‑même si une décision d’un procureur de clôturer une procédure d’instruction et de classer l’affaire sans suite peut déclencher l’application de ce principe ( 6 ).

24.

En revanche, c’est à la juridiction de renvoi qu’il appartient, notamment, d’interpréter le droit national, d’examiner les actes de procédure figurant dans le dossier de l’affaire, le cas échéant d’interroger les parties (procureur et/ou prévenu) en ce qui concerne le poids et l’importance des actes spécifiques d’instruction, et, sur la base de ce qui précède, d’appliquer les dispositions (nationales et de l’Union) pertinentes en l’espèce.

25.

À la lumière des considérations qui précèdent, je suis d’avis que la troisième question préjudicielle doit être reformulée comme visant à déterminer dans quelles conditions une décision d’un procureur de classer sans suite la procédure à l’encontre d’un prévenu se fonde sur une « instruction approfondie » – au sens de la jurisprudence de la Cour – et confère, par conséquent, à cette personne la protection du principe ne bis in idem, conformément à l’article 50 de la Charte et à l’article 54 de la CAAS.

26.

Cette question soulève une problématique que j’ai récemment abordée dans mes conclusions dans l’affaire Parchetul de pe lângă Curtea de Apel Craiova e.a. ( 7 ). Dans les présentes conclusions, je me référerai, dès lors, aux passages pertinents de mes conclusions dans l’affaire Parchetul, tout en tenant compte des spécificités de l’affaire actuellement pendante devant la juridiction de renvoi ainsi que des arguments avancés par les parties qui ont présenté des observations dans la présente procédure.

A.   Sur la condition « bis » en ce qu’elle exige une appréciation sur le fond de l’affaire ( 8 )

27.

L’article 50 de la Charte interdit le dédoublement des poursuites et des sanctions lorsque la personne « a déjà été acquitté[e] ou condamné[e] [...] par un jugement [...] définitif ». L’article 54 de la CAAS garantit, quant à lui, la protection du principe ne bis in idem à toute personne « qui a été définitivement jugée ». À cet égard, la Cour a clairement indiqué dans sa jurisprudence que, pour qu’une décision pénale puisse être regardée comme ayant définitivement statué sur les faits soumis à une seconde procédure, « il est nécessaire, non seulement que cette décision soit devenue définitive, mais également qu’elle ait été rendue à la suite d’une appréciation portant sur le fond de l’affaire » ( 9 ).

28.

Il convient donc d’examiner deux aspects de la décision concernée pour déterminer si une procédure ultérieure donne lieu à un cumul de poursuites interdit par le principe ne bis in idem : l’un concerne la nature définitive de la décision (son « caractère définitif ») et l’autre son contenu (la question de savoir si « le fond de l’affaire » a été examiné dans cette décision). La troisième question posée dans la présente affaire porte sur le second aspect.

29.

Pour que l’application du principe ne bis in idem soit déclenchée, une décision de justice doit être rendue à la suite d’une appréciation portée sur le fond de l’affaire ; cela découle – ainsi que la Cour l’a relevé – du libellé même de l’article 50 de la Charte, puisque les notions de « condamnation » et d’« acquittement » auxquelles se réfère cette disposition impliquent nécessairement que la responsabilité pénale de la personne concernée ait été examinée et qu’une décision à cet égard ait été adoptée ( 10 ).

30.

La Cour a également eu l’occasion de préciser qu’une décision des autorités judiciaires d’un État membre par laquelle un prévenu a été définitivement acquitté pour insuffisance ou absence de preuves doit être considérée, en principe, comme étant fondée sur une appréciation portée sur le fond de l’affaire ( 11 ).

31.

Dans le même ordre d’idées, j’ajouterais que l’appréciation au fond couvre les situations dans lesquelles il est mis fin à la procédure et les poursuites sont abandonnées en raison du fait que – si les éléments factuels de l’infraction ont été constatés – il existait des motifs exonérant la personne suspectée d’être l’auteur de l’infraction (par exemple la légitime défense, l’état de nécessité ou la force majeure) ou la rendant irresponsable (par exemple le fait qu’elle était mineure ou souffrait d’un trouble mental grave) ( 12 ).

32.

En revanche, la Cour a également précisé que les décisions dans lesquelles une personne est acquittée, les poursuites sont abandonnées ou la procédure est classée sans suite pour de simples motifs procéduraux, ou qui, en tout état de cause, n’impliquent aucune appréciation de la responsabilité pénale de la personne concernée ne sauraient être considérées comme « définitives » aux fins du principe ne bis in idem ( 13 ). Cela est typiquement le cas, selon moi, des procédures clôturées pour des motifs, par exemple, d’amnistie, d’immunité, d’abolitio criminis ou de prescription des poursuites ( 14 ).

33.

Dans ce contexte, je tiens à préciser qu’il ressort de la jurisprudence que l’exigence selon laquelle la décision doit contenir une appréciation du fond de l’affaire – à savoir la responsabilité pénale de la personne poursuivie – ne peut être satisfaite sur une base purement formelle.

34.

Naturellement, lorsqu’une décision de classement sans suite est expressément fondée sur des motifs procéduraux, il n’est pas besoin d’une quelconque vérification supplémentaire : la décision est intrinsèquement inapte à déclencher l’application du principe ne bis in idem. Cependant, lorsqu’une décision est fondée sur une absence ou une insuffisance de preuves, une étape supplémentaire est requise. En effet, comme la Cour l’a constaté dans l’arrêt Kossowski ( 15 ), auquel a fait écho la Cour européenne des droits de l’homme (ci‑après la « Cour EDH ») dans l’arrêt Mihalache ( 16 ), une véritable appréciation portée sur le fond de l’affaire implique nécessairement une instruction approfondie. Par conséquent, il y a lieu de déterminer si une telle instruction approfondie a eu lieu ou non.

35.

Ces constatations, auxquelles je souscris pleinement, exigent quelques explications.

1. Nécessité de vérifier l’existence d’une instruction approfondie

36.

Dans leur jurisprudence, la Cour de justice et la Cour EDH ont chacune étendu la portée de la protection issue du principe ne bis in idem au-delà du domaine des décisions de justice stricto sensu. Elles ont toutes deux jugé que des décisions d’autres autorités publiques participant à l’administration de la justice pénale au niveau national, auxquelles le droit national attribue des prérogatives pour constater et sanctionner des comportements illégaux, telles que les procureurs, pouvaient également être considérées comme des décisions « définitives » aux fins du principe ne bis in idem. Tel est le cas bien qu’aucune juridiction n’intervienne dans le processus et que la décision en question ne revête pas la forme d’une décision de justice ( 17 ).

37.

Cette extension constitue une amélioration significative pour la protection des droits des justiciables en matière de droit pénal et de procédure pénale. Néanmoins, je n’ai guère besoin de souligner qu’une décision d’un procureur de classer sans suite la procédure au cours de la phase d’instruction ne saurait être ipso facto assimilée à une décision d’acquittement d’un justiciable rendue par une juridiction après la tenue d’un procès en bonne et due forme, dans le cadre duquel des éléments de preuve sont présentés au juge (ou au jury), débattus par les parties et, enfin, appréciés par le juge (ou le jury).

38.

Comme on le sait, les systèmes pénaux des États membres présentent une diversité de règles et principes établissant, d’une part, les conditions dans lesquelles les procureurs peuvent ou doivent enquêter sur des infractions alléguées et, le cas échéant, engager des poursuites pénales contre les personnes suspectées d’être les auteurs d’infractions, et, d’autre part, les motifs pour lesquels des procédures pénales peuvent être classées sans suite. Par exemple, dans un certain nombre d’États membres, des raisons tenant à l’absence d’intérêt public, de gravité suffisante de l’infraction ou de plainte de la victime, au comportement passé du prévenu, voire à des contraintes budgétaires, constituent des motifs valables pour qu’un procureur puisse clore l’enquête ( 18 ).

39.

De plus, indépendamment de la question de savoir si, dans le système pénal d’un État membre, les poursuites sont en principe obligatoires ou discrétionnaires, il est inévitable que des considérations d’opportunité, d’économie ou de politique judiciaire (par exemple la charge de travail à un moment déterminé, les priorités en matière de répression ou les coûts financiers et en matière de personnel de l’instruction) puissent influencer les décisions des procureurs d’enquêter, de manière plus ou moins proactive, sur une infraction alléguée ou, inversement, de classer sans suite la procédure. Supposer que chaque procureur au sein de l’Union décide du sort des instructions et des poursuites dont il est chargé sur la seule base de son intime conviction quant à la culpabilité de la personne suspectée d’être l’auteur de l’infraction, et de sa capacité à établir cette culpabilité en justice, ne serait à peine mieux qu’un vœu pieux.

40.

Il me semble que des considérations de ce type peuvent avoir un poids encore plus important lorsque des procureurs sont confrontés à des infractions transnationales, qui surviennent dans et/ou affectent deux États membres ou plus, et qui sont commises par des auteurs d’infractions faisant usage de leur droit tiré de l’ordre juridique de l’Union pour circuler librement au-delà des frontières nationales. Dans de telles situations, il est clair que certains procureurs peuvent être mieux placés que d’autres pour mener une instruction avec succès et, le cas échéant, engager des poursuites contre les éventuels auteurs d’infractions. Il est tout aussi évident que la coordination effective de plusieurs procureurs, établis dans différents États membres, éventuellement à des milliers de kilomètres de distance, travaillant chacun dans sa propre langue et ignorant potentiellement l’existence de procédures parallèles, n’est pas quelque chose qui peut être considéré comme acquis, nonobstant l’existence d’instruments spécifiques en la matière ( 19 ).

41.

Par conséquent, dans un système fondé sur une confiance mutuelle qui s’applique au niveau transnational, il est, à mon avis, absolument crucial que le principe ne bis in idem ne soit applicable que si la décision d’un procureur de classer sans suite la procédure est fondée sur une appréciation du fond de l’affaire, découlant d’une instruction approfondie, qui se manifeste par une évaluation exhaustive d’un ensemble d’éléments de preuve suffisamment complet.

42.

En effet, lorsque la responsabilité pénale de la personne poursuivie a été exclue sur la base d’un ensemble d’éléments de preuve inadéquat et fragmentaire, on peut supposer sans prendre de risques que la décision du procureur était fondée, dans une large mesure, sur des raisons d’opportunité, d’économie ou de politique judiciaire.

43.

Naturellement, le fait qu’un procureur a procédé à une évaluation exhaustive d’un ensemble d’éléments de preuve suffisamment complet ne signifie pas que, au moment de prendre la décision de mettre fin à la procédure, tous les doutes quant à la responsabilité pénale de la personne poursuivie doivent nécessairement être dissipés. En réalité, un procureur peut être amené à tirer les conséquences nécessaires du fait que, indépendamment de son opinion personnelle concernant la culpabilité de la personne concernée, une instruction approfondie n’a pas fait apparaître un ensemble d’éléments de preuve susceptible de justifier une condamnation.

44.

Toutefois, tant que l’instruction a été raisonnablement exhaustive et méticuleuse, la décision de mettre fin à la procédure peut de facto être assimilée à un acquittement. Comme indiqué au point 30 des présentes conclusions, la Cour a admis que des décisions fondées sur l’insuffisance ou l’absence de preuves doivent être considérées, en principe, comme étant fondées sur une appréciation portée sur le fond de l’affaire. Il s’agit, selon moi, d’une conséquence logique, notamment, du principe de la présomption d’innocence ( 20 ).

45.

Les considérations qui précèdent soulèvent la question suivante : comment procéder pour constater qu’une décision telle que celle en cause est fondée ou non sur une instruction approfondie ?

2. Examen de la décision de classer sans suite la procédure

46.

La question de savoir si une décision d’un procureur de classer sans suite la procédure était fondée sur une instruction approfondie devrait être tranchée principalement sur la base de la motivation contenue dans le corps même de la décision ( 21 ) (le cas échéant, lu en combinaison avec les documents visés dans cette décision et/ou joints en annexe à celle-ci ( 22 )). C’est d’ailleurs ce document qui explique les motifs du classement sans suite et les éléments de preuve invoqués à cet effet.

47.

Par exemple, comme la Cour l’a constaté dans son arrêt Kossowski, le défaut d’audition de la victime et celui d’un éventuel témoin au cours des instructions peut être considéré comme constituant un indice qu’une instruction approfondie n’a pas été menée dans une affaire donnée ( 23 ). En revanche, ainsi que la Cour EDH l’a indiqué dans l’arrêt Mihalache, lorsqu’une instruction pénale a été ouverte après qu’une plainte a été déposée contre l’intéressé, que la victime a été interrogée et que des preuves ont été rassemblées et examinées par l’autorité compétente et qu’une décision motivée s’appuyant sur ces preuves a été rendue, on se trouve en présence d’éléments susceptibles de conduire au constat qu’il y a eu une appréciation du fond de l’affaire ( 24 ).

48.

Ainsi, une appréciation au cas par cas doit être effectuée, à la lumière, principalement, du contenu même de la décision de clôturer la procédure ( 25 ). Si quelque chose devait ne pas être clair dans cette décision, rien n’empêche les autorités du second État membre de recourir aux instruments de coopération mis en place au sein du système juridique de l’Union ( 26 ) afin de demander les éclaircissements nécessaires de la part des autorités du premier État membre ( 27 ).

49.

Toutefois, pour des raisons de sécurité juridique et de prévisibilité, il est essentiel que les principaux éléments permettant de comprendre les motifs pour lesquels une décision de classement sans suite de la procédure est prise soient inclus dans le corps de la décision (tels qu’ils sont complétés par les documents visés et/ou annexés, selon le cas). En effet, la personne suspectée d’être l’auteur de l’infraction doit être en mesure de vérifier si, à la lumière du droit de l’Union et du droit national pertinents, la décision en question est susceptible de déclencher l’application du principe ne bis in idem ( 28 ). Ainsi, des échanges d’informations ex post peuvent être utiles pour clarifier la portée et le sens de la décision, ou pour en compléter la motivation, mais ils ne sauraient en modifier fondamentalement le contenu.

50.

À ce stade, il peut être utile de souligner un point important. L’analyse faite aux points précédents des présentes conclusions ne saurait être interprétée comme permettant, en substance, aux autorités pénales agissant dans le cadre d’une seconde procédure de contrôler la régularité des décisions adoptées dans le cadre d’une première procédure. Cela irait à l’encontre du principe de confiance mutuelle, qui est au cœur des règles de l’Union relatives à l’espace de liberté, de sécurité et de justice, et priverait largement le principe ne bis in idem de son effet utile ( 29 ).

51.

Les autorités agissant dans le cadre d’une seconde procédure sont uniquement habilitées à vérifier les raisons (matérielles et/ou procédurales) pour lesquelles le premier procureur a décidé de classer sans suite la procédure. À cette fin, ces autorités devraient être autorisées à vérifier que le procureur a pris une telle décision après avoir examiné un ensemble complet d’éléments de preuve, et sans omettre, au motif que cela a été considéré comme impossible, trop difficile ou tout simplement non nécessaire, de recueillir des éléments de preuve supplémentaires qui étaient susceptibles d’être d’une pertinence particulière aux fins de l’appréciation.

52.

Pour le reste, les constatations opérées dans la décision de classement sans suite de la procédure adoptée par le premier procureur (par exemple sur la valeur probante des éléments de preuve examinés) devraient être prises au pied de la lettre. Les autorités agissant dans le cadre d’une seconde procédure ne peuvent se livrer à une nouvelle appréciation des éléments de preuve déjà examinés par le premier procureur ( 30 ). La confiance mutuelle dans le fonctionnement des systèmes pénaux des États membres exige que les autorités pénales nationales respectent les constatations opérées par d’autres autorités nationales, quel que soit le verdict auquel il est parvenu ( 31 ).

53.

À cet égard, un autre point de clarification pourrait être utile. La nécessité de vérifier qu’une décision de classement sans suite de la procédure a impliqué une appréciation du fond de l’affaire sur la base d’une instruction approfondie est une exigence qui concerne, de toute évidence, de « simples » décisions de classement sans suite de la procédure, c’est-à-dire les décisions par lesquelles il est mis fin à la procédure et la personne qui était poursuivie est, pour utiliser un langage imagé, « libre de ses mouvements ».

54.

En effet, en vertu du droit de tous les États membres, il existe un certain nombre de mécanismes alternatifs de règlement des litiges qui peuvent conduire au classement sans suite des procédures pénales en échange de l’acceptation, par la personne suspectée d’être l’auteur de l’infraction, de l’imposition d’une sanction administrative ou d’une mesure punitive alternative (plus) légère. Il va de soi que ce type de décisions de classement sans suite de la procédure devrait normalement être considéré, aux fins du principe ne bis in idem, comme équivalant à des condamnations. Tel est le cas indépendamment de la question de savoir si ces décisions impliquent une constatation formelle de la responsabilité de la personne suspectée d’être l’auteur de l’infraction. La jurisprudence sur ce point étant relativement claire, il n’y a pas lieu, selon moi, d’approfondir davantage l’examen de cette question ( 32 ).

B.   Sur la raison d’être et l’objectif du principe ne bis in idem ( 33 )

55.

L’interprétation susmentionnée du principe ne bis in idem me paraît la plus conforme à sa raison d’être et à son objectif. À cet égard, je rappellerai qu’un tel principe est une construction juridique très ancienne, dont des traces ont été trouvées, entre autres, dans le code de Hammurabi, l’œuvre de Démosthène, le Digeste de Justinien et de nombreux droits canoniques médiévaux ( 34 ). Dans l’(actuelle) Union, même en l’absence de toute disposition en ce sens, il a été énoncé dès le milieu des années 1960 et est considéré comme étant lié à l’idée d’équité ( 35 ).

56.

Il semblerait que, si le sens et la portée précis du principe ne bis in idem ont quelque peu varié au fil des siècles, l’approche quant à sa double raison d’être est restée relativement constante : égalité et sécurité juridique ( 36 ).

57.

D’une part, il est généralement considéré comme injuste et arbitraire que l’État, « avec toutes les ressources et le pouvoir dont il dispose, multipli[e] les tentatives en vue de faire condamner une personne en raison d’une infraction alléguée, l’exposant ainsi à des difficultés, des frais et des épreuves et la contraignant à vivre dans un état permanent d’anxiété et d’insécurité » ( 37 ). Le principe ne bis in idem vise ainsi, d’abord, à éviter une situation dans laquelle une personne est exposée au risque d’être « mise en péril » plus d’une fois ( 38 ).

58.

D’autre part, le principe ne bis in idem est également indissociablement lié au principe de l’autorité de la chose jugée : l’idée selon laquelle, en vue de garantir aussi bien la stabilité du droit et des relations juridiques qu’une bonne administration de la justice, les décisions juridictionnelles devenues définitives ne devraient plus être remises en cause ( 39 ).

59.

Dans le système juridique de l’Union, la protection du principe ne bis in idem trouve une troisième raison d’être : garantir la libre circulation des personnes au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice. La Cour a souligné, en lien avec l’article 54 de la CAAS, qu’une personne qui a déjà été définitivement jugée doit pouvoir circuler librement sans devoir craindre de nouvelles poursuites pénales pour les mêmes faits dans un autre État membre ( 40 ).

60.

Ces objectifs plaident ainsi contre une interprétation excessivement restrictive du principe ne bis in idem. Dans le même temps, toutefois, une application excessivement large de ce principe irait à l’encontre d’autres intérêts publics dignes de protection.

61.

Je vise, en particulier, l’intérêt général de la société à poursuivre efficacement les auteurs d’infractions ( 41 ), ainsi que l’intérêt spécifique des victimes d’infractions non seulement à obtenir réparation de la part des auteurs de celles-ci, mais également à voir que la « justice est rendue » ( 42 ). Après tout, le nom même d’« espace de liberté, de sécurité et de justice » implique que la liberté ne peut pas s’exprimer au détriment de la sécurité et de la justice. Cette dernière doit, sans aucun doute, être comprise comme la justice pour tous les justiciables : les personnes suspectées d’être les auteurs d’infractions ainsi que les victimes présumées. C’est pourquoi, en vertu de l’article 3, paragraphe 2, TUE, au sein de cet espace, la libre circulation des personnes doit être garantie en liaison avec des mesures appropriées en matière, notamment, de prévention de la criminalité et de lutte contre ce phénomène ( 43 ).

62.

À cet égard, on ne saurait ignorer qu’une approche superficielle de l’application du principe ne bis in idem pourrait conduire à certains abus et manipulations de la part d’auteurs d’infractions, qui pourraient pratiquer – comme l’a correctement souligné le gouvernement hongrois – un forum shopping afin de s’assurer de l’impunité de leurs actes. En effet, lorsque des infractions donnent lieu à des instructions de la part de plusieurs procureurs de manière simultanée, il existe un risque réel que le parquet le moins bien placé (ou confronté au sous‑effectif le plus important ou à la charge de travail la plus lourde) puisse, de facto, empêcher qu’une instruction sérieuse soit menée concernant cette infraction, dès lors qu’une décision de ce parquet de classer sans suite la procédure pourrait devancer l’action de tout autre parquet.

63.

En outre, de ce côté de la balance également, il existe un intérêt lié à l’Union qui mérite une attention particulière : la confiance mutuelle. Il ressort d’une jurisprudence constante que la confiance mutuelle ne peut être maintenue et renforcée que si les autorités d’un État membre sont en mesure de s’assurer que, dans un autre État membre, la responsabilité pénale d’une personne suspectée d’avoir commis une infraction a été dûment examinée ( 44 ). En l’absence d’un tel examen, il n’y a tout simplement pas de base pour que la confiance mutuelle opère. Comment une juridiction nationale pourrait-elle se fonder sur une évaluation, ou s’en remettre à une telle évaluation, par une autre juridiction, de la responsabilité d’une personne qui, en fait, n’a pas été effectuée de manière exhaustive ?

64.

Il est donc de la plus haute importance qu’un juste équilibre entre ces intérêts soit trouvé dans le cadre de l’interprétation de l’article 50 de la Charte et de l’article 54 de la CAAS. Il convient, en particulier, de concilier la protection effective des droits des justiciables avec l’intérêt légitime des États membres à éviter l’impunité des criminels ( 45 ). Telle est l’idée centrale qui m’a guidé dans les présentes conclusions (ainsi que dans mes précédentes conclusions) lorsque, après avoir passé en revue et analysé la jurisprudence, j’ai essayé de proposer à la Cour ce qui me semble être une approche « équilibrée » de l’interprétation du principe ne bis in idem.

65.

En particulier, je ne vois pas comment une personne dont la responsabilité pour une infraction alléguée n’a, au cours d’une première procédure, été examinée qu’au stade de l’instruction et que sur la base d’un ensemble d’éléments de preuve inadéquat et fragmentaire pourrait valablement prétendre qu’une procédure ultérieure, dans le cadre de laquelle son implication fait l’objet d’un examen sur la base d’un ensemble d’éléments de preuve solide et complet, l’exposerait au risque d’être mise en péril deux fois et/ou se heurterait au principe de l’autorité de la chose jugée.

C.   Sur la présente affaire

66.

Comme je l’ai souligné aux points 23 et 24 des présentes conclusions, il appartient en principe à la juridiction de renvoi d’apprécier si les conditions énoncées aux points précédents des présentes conclusions sont remplies ou non dans l’affaire dont elle a été saisie. Néanmoins, en vue d’aider au mieux cette juridiction, j’exposerai à présent quelques brèves considérations concernant l’éventuelle application du principe ne bis in idem dans la procédure au principal.

67.

In concreto, l’aspect crucial soulevé par la troisième question préjudicielle est de savoir si les actes d’instruction mentionnés comme ayant été accomplis (collecte d’informations par une coopération avec des autorités d’autres États membres, examen d’un compte bancaire et audition de deux personnes coprévenues) et comme n’ayant pas été accomplis (audition de la personne concernée) indiquent que le procureur autrichien a effectivement mené une instruction suffisamment approfondie.

68.

Je doute fort que la Cour puisse répondre par oui ou par non à une telle question. En fait, une simple liste des actes d’instruction accomplis ou non accomplis nous apprend peu (voire rien) sur le caractère exhaustif et approfondi de l’instruction effectuée par le procureur en question. La Cour n’a pas connaissance, en particulier, premièrement, de la complexité des faits pertinents, deuxièmement, de ce qui a été démontré par les éléments de preuve recueillis et, troisièmement, des preuves supplémentaires qui auraient éventuellement pu être recueillies.

69.

L’évaluation du caractère approfondi d’une instruction est, comme indiqué au point 48 des présentes conclusions, nécessairement une appréciation au cas par cas qui dépend de toutes les circonstances pertinentes. Il n’existe pas de liste de contrôle des actes d’instruction possibles qui pourrait, par le simple fait que des cases sont ou non cochées, indiquer aux autorités si une instruction donnée était adéquate ou non. Non seulement les États membres ont, comme cela a été mentionné dans les développements qui précèdent, des règles juridiques différentes à cet égard, mais, aussi et surtout, chaque affaire est différente.

70.

Certaines affaires peuvent nécessiter de nombreux actes d’instruction et d’autres affaires nettement moins. Dans certaines affaires, le cadre probatoire peut ne pas permettre de tirer des conclusions malgré le fait qu’il comporte plusieurs éléments de preuve, tandis que, dans d’autres affaires, rassembler quelques éléments de preuve essentiels peut permettre d’atteindre une clarté suffisante en ce qui concerne la responsabilité pénale du prévenu.

71.

En outre, le caractère approfondi d’une instruction est déterminé non pas uniquement par le nombre d’actes d’enquête effectués, mais également – comme l’a souligné le gouvernement hongrois – par la minutie avec laquelle les résultats de cette instruction ont été examinés.

72.

Par conséquent, j’invite la Cour à laisser l’appréciation finale sur ces points à la juridiction de renvoi. Cela étant précisé, j’ajouterai seulement deux remarques finales.

73.

Premièrement, il est tout à fait possible que la variété et la nature des actes d’instruction accomplis par le procureur autrichien puissent être considérées comme un indice du fait que – comme le soutient le gouvernement autrichien – ce procureur a effectivement procédé à une instruction approfondie. En revanche, je ne partage certainement pas le point de vue de ce gouvernement selon lequel une instruction ne devrait être considérée comme insuffisante et donc inapte à déclencher l’application du principe ne bis in idem que dans des circonstances tout à fait extrêmes ou spéciales. Selon moi, il ne saurait y avoir de présomption à cet égard. Les données publiques permettent de penser qu’un grand nombre d’instructions pénales dans les États membres qui sont clôturées en raison de l’insuffisance ou l’absence de preuves le sont également pour des raisons d’opportunité, d’économie ou de politique judiciaire.

74.

En outre, je comprends que le procureur autrichien a décidé de ne pas poursuivre l’instruction ni d’engager de poursuites au motif, notamment, que l’instruction des infractions dont le prévenu 5 était suspecté était prescrite en Autriche. Comme je l’ai expliqué au point 32 des présentes conclusions, les décisions mettant fin à une procédure en raison d’une prescription n’impliquent généralement aucune évaluation de la responsabilité pénale de la personne et, comme telles, doivent être considérées comme étant intrinsèquement inaptes à déclencher l’application du principe ne bis in idem. Il s’agit là d’un élément que la juridiction de renvoi pourrait, selon moi, devoir prendre en considération.

75.

Deuxièmement, je partage l’avis du gouvernement suisse selon lequel le simple fait que le prévenu n’ait pas pu être entendu n’indique pas, à lui seul, que l’instruction n’était pas suffisamment approfondie. Je ne vois aucune raison qui pourrait justifier de considérer l’audition du prévenu comme une condition sine qua non pour qu’une instruction soit considérée comme suffisamment détaillée et approfondie.

76.

Ainsi, à moins que les autorités hongroises ne disposent d’éléments spécifiques permettant de considérer qu’il était suffisamment probable qu’une telle audition fournisse des éléments d’un poids significatif aux fins de l’appréciation de la responsabilité pénale du prévenu – j’entends par là des éléments qui, s’ils étaient pris en compte, pourraient éventuellement faire pencher la balance en faveur de l’exercice de poursuites à l’encontre de cette personne –, le fait qu’il était impossible de procéder à une telle audition ne saurait être considéré, pris en lui-même, comme une raison permettant de considérer l’instruction comme insuffisante. À cet égard, je tiens à souligner que, dans la mesure où le stade de la procédure pénale concerné est celui de l’instruction, le critère à appliquer lorsqu’il s’agit d’apprécier le scénario hypothétique envisagé à des fins d’analyse ne saurait être un critère de certitude ou de quasi-certitude, mais est nécessairement un critère de mise en balance de probabilités.

77.

En revanche, un procureur n’est certainement pas empêché de tirer des conclusions du fait qu’un prévenu a pu se soustraire volontairement à la possibilité d’être entendu, par exemple, en se rendant indisponible pour les autorités de police.

78.

À la lumière des considérations qui précèdent, je suis d’avis que la notion d’« instruction approfondie », au sens de la jurisprudence de la Cour relative au principe ne bis in idem, doit être comprise comme une instruction dans le cadre de laquelle le procureur a adopté une décision de classement sans suite de la procédure après une évaluation exhaustive d’un ensemble d’éléments de preuve suffisamment complet. Aux fins de vérifier si tel était le cas, les autorités du second État membre devraient, notamment, examiner si, premièrement, la décision de clôturer la procédure a été fondée, dans une mesure significative, sur des considérations d’opportunité, d’économie ou de politique judiciaire, et, deuxièmement, le procureur du premier État membre n’a pas recueilli – parce que cela a été considéré comme impossible, trop difficile ou simplement inutile – des éléments de preuve supplémentaires qui étaient susceptibles d’être d’une pertinence particulière aux fins de l’appréciation de la responsabilité pénale du prévenu.

V. Conclusion

79.

En conclusion, je propose à la Cour de répondre à la question préjudicielle de la Fővárosi Törvényszék (cour de Budapest-Capitale, Hongrie) de la manière suivante :

L’article 50 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et l’article 54 de la convention d’application de l’accord de Schengen, du 14 juin 1985, entre les gouvernements des États de l’Union économique Benelux, de la République fédérale d’Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, signée à Schengen le 19 juin 1990,

doivent être interprétés en ce sens que :

une décision d’un procureur de classer sans suite une procédure à l’encontre d’un prévenu est fondée sur une « instruction approfondie » et, par conséquent, confère au prévenu la protection du principe ne bis in idem lorsque le procureur a adopté cette décision après une évaluation exhaustive d’un ensemble d’éléments de preuve suffisamment complet. Aux fins de vérifier si tel était le cas, les autorités du second État membre devraient, notamment, examiner si, premièrement, la décision de clôturer la procédure a été fondée, dans une mesure significative, sur des considérations d’opportunité, d’économie ou de politique judiciaire, et, deuxièmement, le procureur du premier État membre n’a pas recueilli – parce que cela a été considéré comme impossible, trop difficile ou simplement inutile – des éléments de preuve supplémentaires qui étaient susceptibles d’être d’une pertinence particulière aux fins de l’appréciation de la responsabilité pénale du prévenu.


( 1 ) Langue originale : l’anglais.

( 2 ) JO 2000, L 239, p. 19.

( 3 ) Voir point 34 des présentes conclusions.

( 4 ) C‑486/14, ci-après l’« arrêt Kossowski , EU:C:2016:483.

( 5 ) Voir, en ce sens, arrêt du 14 juillet 2022, Volkswagen (C‑134/20, EU:C:2022:571, point 33).

( 6 ) Voir, de façon similaire, conclusions de l’avocat général Ruiz-Jarabo Colomer dans l’affaire Gözütok et Brügge (C‑187/01, EU:C:2002:516, points 36 et 37).

( 7 ) C‑58/22, ci-après « mes conclusions dans l’affaire Parchetul », EU:C:2023:464.

( 8 ) La présente section A des conclusions reproduit, en grande partie, les points 48, 49 et 59 à 84 de mes conclusions dans l’affaire Parchetul.

( 9 ) Voir, par exemple, arrêt du 23 mars 2023, Dual Prod (C‑412/21, EU:C:2023:234, point 55 et jurisprudence citée).

( 10 ) Voir, à cet effet, arrêt du 16 décembre 2021, AB e.a. (Révocation d’une amnistie) (C‑203/20, ci‑après l’« arrêt AB e.a. , EU:C:2021:1016, points 56 et 57 ainsi que jurisprudence citée). Il convient également de noter que l’article 4 du protocole no 7 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signé à Strasbourg le 22 novembre 1984, mentionne le fait que la personne a été « acquitté[e] ou condamné[e] par un jugement définitif ».

( 11 ) Voir, à cet effet, arrêt du 5 juin 2014, M (C‑398/12, EU:C:2014:1057, points 28 et 29 ainsi que jurisprudence citée).

( 12 ) Conclusions de l’avocat général Ruiz-Jarabo Colomer dans l’affaire Van Straaten (C‑150/05, EU:C:2006:381, point 65).

( 13 ) Voir, entre autres, arrêts du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission (C‑238/99 P, C‑244/99 P, C‑245/99 P, C‑247/99 P, C‑250/99 P à C‑252/99 P et C‑254/99 P, EU:C:2002:582, points 54 à 69) ; du 10 mars 2005, Miraglia (C‑469/03, EU:C:2005:156, points 31 à 34) ; du 22 décembre 2008, Turanský (C‑491/07, EU:C:2008:768, points 40 à 45), et AB e.a. (point 61). Voir également décision de la Cour EDH du 15 mars 2005, Horciag c. Roumanie (CE:ECHR:2005:0315DEC007098201).

( 14 ) Concernant la prescription des poursuites, je dois admettre que l’arrêt du 28 septembre 2006, Gasparini e.a. (C‑467/04, ci-après l’« arrêt Gasparini , EU:C:2006:610, points 22 à 33), semble aboutir à une conclusion différente. Cependant, j’estime que, sur ce point, l’arrêt Gasparini e.a. ne peut être concilié avec la jurisprudence ultérieure de la Cour sur les acquittements pour des motifs procéduraux. En effet, les procédures clôturées parce qu’elles étaient prescrites n’impliquent généralement aucune évaluation de la responsabilité pénale de la personne. En outre, et en tout état de cause, ce passage de l’arrêt Gasparini e.a. a, à mon sens, été implicitement contredit par l’arrêt du 8 septembre 2015, Taricco e.a. (C‑105/14, EU:C:2015:555), dans lequel la Cour a considéré des règles nationales en matière de prescriptions comme des règles de nature procédurale. J’ajouterais qu’une telle approche est conforme à la jurisprudence de la Cour EDH ; voir, par exemple, décision du 5 décembre 2019, Smoković c. Croatie (CE:ECHR:2019:1112DEC005784912, § 43 à 45).

( 15 ) Voir arrêts Kossowski, points 48, 53 et 54.

( 16 ) Cour EDH, 8 juillet 2019, Mihalache c. Roumanie (CE:ECHR:2019:0708JUD005401210, § 97 et 98, ci-après l’« arrêt Mihalache »).

( 17 ) Voir, entre autres, arrêts du 11 février 2003, Gözütok et Brügge (C‑187/01 et C‑385/01, EU:C:2003:87, points 27, 28 et 31), ainsi que du 12 mai 2021, Bundesrepublik Deutschland (Notice rouge d’Interpol) (C‑505/19, EU:C:2021:376, point 73 et jurisprudence citée). De manière similaire, voir arrêt Mihalache (§ 94 et 95).

( 18 ) Voir, par exemple, opinion concordante du juge Pinto de Albuquerque jointe à l’arrêt Mihalache (§ 10 et suiv.).

( 19 ) Voir, en particulier, article 57 de la CAAS qui dispose, entre autres, que « [l]orsqu’une personne est accusée d’une infraction par une Partie Contractante et que les autorités compétentes de cette Partie Contractante ont des raisons de croire que l’accusation concerne les mêmes faits que ceux pour lesquels elle a déjà été définitivement jugée par une autre Partie Contractante, ces autorités demanderont, si elles l’estiment nécessaire, les renseignements pertinents aux autorités compétentes de la Partie Contractante sur le territoire de laquelle une décision a déjà été rendue ». Voir également décision-cadre 2009/948/JAI du Conseil, du 30 novembre 2009, relative à la prévention et au règlement des conflits en matière d’exercice de la compétence dans le cadre des procédures pénales (JO 2009, L 328, p. 42).

( 20 ) Ce principe est consacré, entre autres, à l’article 48, paragraphe 1, de la Charte.

( 21 ) Voir, en ce sens, arrêt Kossowski, point 52.

( 22 ) Voir, plus en détail, mes conclusions dans l’affaire GR e.a. (C‑726/21, EU:C:2023:240, points 35 à 53).

( 23 ) Voir arrêt Kossowski, point 53.

( 24 ) Voir arrêt Mihalache, § 98.

( 25 ) Voir arrêt Mihalache, § 97.

( 26 ) Par exemple, l’article 57 de la CAAS et la décision-cadre 2009/948 (voir note en bas de page 18 des présentes conclusions).

( 27 ) Voir, par analogie, arrêt du 16 novembre 2010, Mantello (C‑261/09, EU:C:2010:683, point 48).

( 28 ) Voir conclusions de l’avocat général Bobek dans l’affaire bpost (C‑117/20, EU:C:2021:680, point 119).

( 29 ) Voir, dans le même sens, conclusions de l’avocat général Bot dans l’affaire Kossowski (C‑486/14, EU:C:2015:812, points 75 et 76).

( 30 ) Voir, en ce sens, arrêt du 5 juin 2014, M (C‑398/12, EU:C:2014:1057, point 30).

( 31 ) Voir, entre autres, arrêt du 28 octobre 2022, Generalstaatsanwaltschaft München (Extradition et ne bis in idem) (C‑435/22 PPU, EU:C:2022:852, points 92 et 93 ainsi que jurisprudence citée). Voir également conclusions de l’avocat général Ruiz-Jarabo Colomer dans l’affaire Van Straaten (C‑150/05, EU:C:2006:381, points 52 et 63).

( 32 ) Voir, en particulier, arrêt du 11 février 2003, Gözütok et Brügge (C‑187/01 et C‑385/01, EU:C:2003:87). Voir également conclusions de l’avocat général Ruiz‑Jarabo Colomer dans l’affaire Gözütok et Brügge (EU:C:2002:516, points 83, 88, 89, 97 et 106), ainsi qu’opinion concordante du juge Bošnjak, à laquelle se rallie le juge Serghides, jointe à l’arrêt Mihalache.

( 33 ) La présente section B des conclusions reproduit, en grande partie, les points 108 à 118 de mes conclusions dans l’affaire Parchetul.

( 34 ) Coffey, G., « A History of the Common Law Double Jeopardy Principle : from Classical Antiquity to Modern Era », Athens Journal of Law, vol. 8, no 3, juillet 2022, p. 253 à 278.

( 35 ) Voir arrêt du 5 mai 1966, Gutmann/Commission (18/65 et 35/65, EU:C:1966:24), et, avec d’autres références à la jurisprudence ancienne, prise de position de l’avocat général Jääskinen dans l’affaire Spasic (C‑129/14 PPU, EU:C:2014:739, point 43).

( 36 ) Voir Coffey, G., cité dans la note en bas de page 34 des présentes conclusions. Dans le même sens, conclusions de l’avocat général Ruiz-Jarabo Colomer dans l’affaire Gözütok et Brügge (C‑187/01, EU:C:2002:516, point 49).

( 37 ) Ainsi que l’a indiqué la Supreme Court of the United States (Cour suprême des États-Unis) dans l’arrêt Green v. United States (1957) 355 US 184 (point 187). Voir également conclusions de l’avocat général Bot dans l’affaire Kossowski (C‑486/14, EU:C:2015:812, point 36).

( 38 ) À cet égard, voir conclusions de l’avocate générale Sharpston dans l’affaire M (C‑398/12, EU:C:2014:65, point 48).

( 39 ) En ce qui concerne la notion d’« autorité de la chose jugée », voir, parmi de nombreux autres, arrêt du 30 septembre 2003, Köbler (C‑224/01, EU:C:2003:513, point 38). Sur la relation entre les deux notions, voir arrêt du 22 mars 2022, Nordzucker e.a. (C‑151/20, EU:C:2022:203, point 62 et jurisprudence citée).

( 40 ) Voir arrêt du 12 mai 2021, Bundesrepublik Deutschland (Notice rouge d’Interpol) (C‑505/19, EU:C:2021:376, point 79 et jurisprudence citée).

( 41 ) Voir, à cet effet, arrêt du 29 avril 2021, X (Mandat d’arrêt européen – Ne bis in idem) (C‑665/20 PPU, EU:C:2021:339, point 97), et arrêt AB e.a. (point 58).

( 42 ) Voir conclusions de l’avocat général Bot dans l’affaire Kossowski (C‑486/14, EU:C:2015:812, point 80), et de l’avocat général Bobek dans l’affaire BV (C‑129/19, EU:C:2020:375, point 113).

( 43 ) Voir, à cet égard, arrêt du 10 mars 2005, Miraglia (C‑469/03, EU:C:2005:156, point 34).

( 44 ) Voir arrêt du 12 mai 2021, Bundesrepublik Deutschland (Notice rouge d’Interpol) (C‑505/19, EU:C:2021:376, point 81 et jurisprudence citée).

( 45 ) Dans le même sens, conclusions de l’avocat général Bobek dans les affaires Bundesrepublik Deutschland (Notice rouge d’Interpol) (C‑505/19, EU:C:2020:939, point 93), et bpost (C‑117/20, EU:C:2021:680, point 121).

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