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Document 62020CC0441

Conclusions de l'avocat général M. G. Pitruzzella, présentées le 14 juillet 2022.
Commission européenne contre Jiangsu Seraphim Solar System et Conseil de l'Union européenne contre Jiangsu Seraphim Solar System Co. Ltd et Commission européenne.
Pourvoi – Dumping – Importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules) originaires ou en provenance de Chine – Règlement d’exécution (UE) 2016/2146 retirant l’acceptation de l’engagement de deux producteurs-exportateurs au titre de la décision d’exécution 2013/707/UE – Recevabilité du recours en première instance – Article 263, quatrième alinéa, TFUE – Critère de l’affectation directe – Article 277 TFUE – Exception d’illégalité – Recevabilité – Intérêt à agir contre les actes ayant servi de base juridique à l’acte attaqué – Règlement (UE) 2016/1036 – Article 8, paragraphe 9 – Règlement (UE) 2016/1037 – Article 13, paragraphe 9 – Conséquences du retrait par la Commission européenne de l’acceptation d’un engagement – Règlement d’exécution (UE) no 1238/2013 – Article 3 – règlement d’exécution (UE) no 1239/2013 – Article 2 – Perte du bénéfice de l’exonération des droits – Règlement d’exécution (UE) 2016/2146 – Article 2 – Invalidation des factures conformes – Exigibilité des droits sur l’ensemble des transactions concernées ��� Absence de rétroactivité.
Affaires jointes C-439/20 P et C-441/20 P.

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2022:585

 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. GIOVANNI PITRUZZELLA

présentées le 14 juillet 2022 ( 1 )

Affaires jointes C‑439/20 P et C‑441/20 P

Commission européenne

contre

Jiangsu Seraphim Solar System Co. Ltd (C‑439/20 P),

et

Conseil de l’Union européenne

contre

Jiangsu Seraphim Solar System Co. Ltd (C‑441/20 P)

« Pourvoi – Dumping – Subventions – Importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et de leurs composants essentiels (cellules) originaires ou en provenance de République populaire de Chine – Règlement (UE) 2016/1036 – Article 8, paragraphes 1, 9 et 10, et article 10, paragraphe 5 – Règlement (UE) 2016/1037 – Article 13, paragraphes 1, 9 et 10, et article 16, paragraphe 5 – Violation d’un engagement – Effet du retrait de l’acceptation d’un engagement – Règlements d’exécution (UE) no 1238/2013 et (UE) no 1239/2013 – Recevabilité d’une exception d’illégalité – Règlement d’exécution (UE) 2016/2146 – Invalidation de factures conformes à l’engagement »

1.

Lorsque la Commission européenne retire l’acceptation d’un engagement, pour violation de cet engagement par le producteur-exportateur qui l’a souscrit, les droits antidumping et compensateurs définitifs déjà institués s’appliquent-ils aux importations correspondant à l’engagement violé réalisées depuis le moment où ces droits ont été institués, ou ne s’appliquent-ils qu’aux importations postérieures au retrait de l’engagement ? Dans ce contexte, la Commission peut-elle annuler les factures relatives aux importations conformes à l’engagement violé et ordonner aux autorités nationales de percevoir des droits définitifs pour ces importations ?

2.

Telles sont, en substance, les questions principales qui se posent dans les présentes affaires jointes, relatives à deux pourvois introduits respectivement par la Commission, dans l’affaire C‑439/20 P, et par le Conseil de l’Union européenne, dans l’affaire C‑441/20 P ( 2 ), (ci-après, conjointement, les « institutions »), par lesquels les institutions demandent l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 8 juillet 2020, Jiangsu Seraphim Solar System/Commission (T‑110/17, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2020:315), qui a fait droit au recours introduit par la société Jiangsu Seraphim Solar System Co. Ltd (ci-après « Jiangsu ») tendant à l’annulation partielle du règlement d’exécution (UE) 2016/2146 ( 3 ) (ci-après le « règlement litigieux »), en ce qu’il la concernait.

I. Le cadre juridique

3.

À la date de l’adoption du règlement litigieux, l’adoption de mesures antidumping par l’Union européenne était régie par le règlement (UE) 2016/1036 du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2016, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de l’Union européenne ( 4 ) (ci-après le « règlement antidumping de base »).

4.

L’article 8 de ce règlement, intitulé « Engagements », disposait ce qui suit aux paragraphes 1, 9 et 10 :

« 1.   À condition qu’un examen préliminaire positif ait établi l’existence d’un dumping et d’un préjudice, la Commission peut, conformément à la procédure consultative visée à l’article 15, paragraphe 2, accepter des offres par lesquelles les exportateurs s’engagent volontairement et de manière satisfaisante à réviser leurs prix ou à ne plus exporter à des prix de dumping, si elle est convaincue que l’effet préjudiciable du dumping est éliminé.

Dans ce cas, et aussi longtemps que ces engagements restent en vigueur, les droits provisoires institués par la Commission conformément à l’article 7, paragraphe 1, ou les droits définitifs institués conformément à l’article 9, paragraphe 4, selon le cas, ne s’appliquent pas aux importations du produit concerné fabriqué par les sociétés visées dans la décision de la Commission portant acceptation des engagements et ses modifications ultérieures.

[...]

9.   En cas de violation ou de retrait d’un engagement par une partie à celui-ci ou de retrait de l’acceptation de l’engagement par la Commission, l’acceptation de l’engagement est retirée par une décision ou un règlement de la Commission, selon le cas, et le droit provisoire institué par la Commission conformément à l’article 7 ou le droit définitif institué conformément à l’article 9, paragraphe 4, s’applique automatiquement, à condition que l’exportateur concerné, sauf dans le cas où il a lui-même retiré son engagement, ait eu la possibilité de présenter ses commentaires. [...]

[...]

10.   Un droit provisoire peut être institué conformément à l’article 7 sur la base des meilleurs renseignements disponibles, lorsqu’il y a des raisons de croire qu’un engagement est violé ou, en cas de violation ou de retrait d’un engagement, lorsque l’enquête ayant abouti à cet engagement n’a pas été menée à terme. »

5.

L’article 10 dudit règlement, intitulé « Rétroactivité », disposait, à son paragraphe 5 :

« En cas de violation ou de retrait d’engagements, des droits définitifs peuvent être perçus sur les marchandises mises en libre pratique quatre-vingt-dix jours au plus avant la date d’application des mesures provisoires, à condition que les importations aient été enregistrées conformément à l’article 14, paragraphe 5, et que l’évaluation rétroactive ne s’applique pas aux importations antérieures à la violation ou au retrait de l’engagement. »

6.

À la date de l’adoption du règlement litigieux, l’adoption de mesures antisubventions par l’Union était régie par le règlement (UE) 2016/1037 du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2016, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet de subventions de la part de pays non membres de l’Union européenne ( 5 ) (ci-après le « règlement antisubventions de base »).

7.

Le règlement antisubventions de base contient des dispositions relatives aux engagements et à la rétroactivité rédigées en des termes, en substance, identiques aux dispositions correspondantes du règlement antidumping de base. Ainsi, notamment, l’article 13, paragraphe 1, premier et deuxième alinéas, l’article 13, paragraphes 9 et 10, et l’article 16, paragraphe 5, du règlement antisubventions de base correspondent, en substance, respectivement à l’article 8, paragraphe 1, premier et deuxième alinéas, à l’article 8, paragraphes 9 et 10, et à l’article 10, paragraphe 5, du règlement antidumping de base (ces deux règlements seront désignés ci-après, ensemble, comme les « règlements de base ») ( 6 ).

II. Les faits et le règlement litigieux

8.

Jiangsu est une société qui fabrique des modules photovoltaïques en silicium cristallin en Chine et les exporte vers l’Union.

9.

Après avoir institué un droit antidumping provisoire sur les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules et wafers) originaires ou en provenance de la Chine (ci-après les « produits en question ») ( 7 ), la Commission a, par la décision 2013/423/UE ( 8 ), accepté un engagement de prix (ci-après l’« engagement ») offert par la chambre de commerce chinoise pour l’importation et l’exportation de machines et de produits électroniques au nom, notamment, de Jiangsu.

10.

Le 2 décembre 2013, le Conseil a adopté le règlement d’exécution (UE) no 1238/2013 ( 9 ), qui a institué un droit antidumping définitif sur les importations des produits en question. Le même jour, le Conseil a également adopté le règlement d’exécution (UE) no 1239/2013 ( 10 ), qui a institué un droit compensateur définitif sur les importations de ces produits.

11.

L’article 3, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution no 1238/2013 et l’article 2, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution no 1239/2013 disposent, dans les mêmes termes, ce qui suit :

« 2.   La dette douanière naît au moment de l’acceptation de la déclaration de mise en libre pratique :

[...]

b)

si la Commission retire son acceptation de l’engagement en vertu [des règlements de base] [ ( 11 )], en adoptant un règlement ou une décision qui se réfère à des transactions spécifiques et déclare non conformes les factures correspondantes. »

12.

Par la décision d’exécution 2013/707/UE ( 12 ), la Commission a confirmé l’acceptation de l’engagement offert par les producteurs-exportateurs chinois.

13.

En vertu de l’article 3, paragraphe 1, du règlement d’exécution no 1238/2013 et de l’article 2, paragraphe 1, du règlement d’exécution no 1239/2013, les importations couvertes par l’engagement et relevant de la décision d’exécution 2013/707 sont exonérées des droits antidumping et compensateurs imposés par ces règlements.

14.

Toutefois, ayant constaté ensuite la violation de l’engagement par Jiangsu, la Commission a adopté le règlement litigieux. À l’article 1er de ce règlement, la Commission a retiré l’acceptation de l’engagement, entre autres, pour Jiangsu. À l’article 2, paragraphe 1, dudit règlement, la Commission a invalidé les factures conformes énumérées à l’annexe I de ce même règlement et, à l’article 2, paragraphe 2, du règlement litigieux, a décidé que « [l]es droits antidumping et les droits compensateurs dus au moment de l’acceptation de la déclaration de mise en libre pratique, en vertu de l’article 3, paragraphe 2, point b), du règlement d’exécution [no 1238/2013] et de l’article 2, paragraphe 2, point b), du règlement d’exécution [no 1239/2013], sont perçus ».

III. La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

15.

Par requête déposée au greffe du Tribunal le 18 février 2017, Jiangsu a introduit un recours en annulation contre l’article 2 du règlement litigieux. Ce recours se fondait sur un moyen unique tiré de la violation de plusieurs dispositions des règlements de base, basé sur une exception d’illégalité soulevée au titre de l’article 277 TFUE à l’encontre de l’article 3, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution no 1238/2013 et de l’article 2, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution no 1239/2013.

16.

Dans l’arrêt attaqué, le Tribunal a d’abord, aux points 28 à 64, rejeté les exceptions soulevées par la Commission, soutenue par le Conseil, concernant la recevabilité du recours ainsi que la recevabilité de l’exception d’illégalité.

17.

Ensuite, aux points 65 à 160 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a accueilli sur le fond le moyen unique et l’exception d’illégalité soulevés par Jiangsu et, partant, a annulé l’article 2 du règlement litigieux en ce qu’il concernait Jiangsu.

IV. Conclusions des parties

18.

Par son pourvoi dans l’affaire C‑439/20 P, la Commission, soutenue par le Conseil, demande à la Cour d’annuler l’arrêt attaqué, de déclarer irrecevable le recours de première instance ou, à titre subsidiaire, de rejeter le recours de première instance et de condamner Jiangsu aux dépens.

19.

Par son pourvoi dans l’affaire C‑441/20 P, le Conseil, soutenu par la Commission, demande à la Cour d’annuler l’arrêt attaqué, de rejeter le recours de première instance et de condamner Jiangsu aux dépens, ou à titre subsidiaire, de renvoyer l’affaire devant le Tribunal et de réserver la décision sur les dépens exposés en première instance et dans le cadre du pourvoi.

20.

Jiangsu demande à la Cour de rejeter les pourvois et de condamner le Conseil et la Commission aux dépens.

V. Analyse des pourvois

21.

À l’appui de son pourvoi dans l’affaire C‑439/20 P, la Commission soulève quatre moyens. Ces moyens se recoupent, en grande partie, avec les deux moyens que le Conseil soulève au soutien de son pourvoi dans l’affaire C‑441/20 P. Il convient donc d’examiner les deux pourvois conjointement.

A.   Sur les premiers moyens du pourvoi, relatifs à la recevabilité

22.

Par leurs premiers moyens, les institutions font valoir que le Tribunal a commis des erreurs de droit dans l’analyse de la recevabilité du recours de Jiangsu (première branche) et dans l’analyse de la recevabilité et du caractère opérant de l’exception d’illégalité soulevée par celle-ci (seconde branche).

1. Sur la première branche des premiers moyens, relative à la qualité pour agir et à l’intérêt à agir de Jiangsu

23.

Dans la première branche de leurs premiers moyens, les institutions contestent l’analyse du Tribunal relative à la qualité et à l’intérêt de Jiangsu pour agir contre la disposition attaquée du règlement litigieux, à savoir son article 2.

a) Sur l’incidence directe

24.

Les institutions reprochent, tout d’abord, au Tribunal d’avoir commis plusieurs erreurs de droit aux points 37, 38, 44 et 45 de l’arrêt attaqué en considérant que Jiangsu était directement concernée, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, par la disposition attaquée du règlement litigieux. Les institutions soulignent que ce n’est pas Jiangsu, en tant que producteur‑exportateur, mais bien la société importatrice liée Seraphim Solar System GmbH, qui a effectué les déclarations en douane concernant les produits pour lesquels les factures ont été invalidées par ce règlement. En conséquence, ce serait cette dernière société, et non Jiangsu, qui serait débitrice des droits antidumping et compensateurs dus en conséquence de l’invalidation des factures émises par Jiangsu. La naissance de cette dette douanière constituerait la modification de la situation juridique résultant de l’article 2 du règlement litigieux. Il s’ensuivrait que la situation juridique de Jiangsu, en tant que producteur-exportateur, n’aurait pas été modifiée par l’article 2 du règlement litigieux et que cette société ne serait donc pas directement concernée au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE.

25.

À cet égard, il est de jurisprudence constante que la condition prévue à l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, selon laquelle une personne physique ou morale doit être directement concernée par la mesure faisant l’objet du recours, requiert que deux conditions soient cumulativement réunies, à savoir que la mesure contestée, d’une part, produise directement des effets sur la situation juridique de cette personne et, d’autre part, ne laisse aucun pouvoir d’appréciation à ses destinataires chargés de sa mise en œuvre, celle-ci ayant un caractère purement automatique et découlant de la seule réglementation de l’Union sans application d’autres règles intermédiaires ( 13 ).

26.

En l’espèce, Jiangsu a attaqué l’article 2 du règlement litigieux dans son intégralité. Ainsi qu’il ressort du point 14 des présentes conclusions, et ainsi que l’a relevé le Tribunal au point 44 de l’arrêt attaqué, par cette disposition, la Commission a, au paragraphe 1, annulé notamment les factures conformes à l’engagement émises par Jiangsu concernant certaines transactions précises et, au paragraphe 2, ordonné la perception des droits définitifs dus pour les transactions faisant l’objet des factures. Au point 44 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a conclu que, de la sorte, les dispositions attaquées par Jiangsu avaient produit directement des effets sur sa situation juridique.

27.

À cet égard, je pense qu’une décision invalidant des factures émises par une personne est susceptible de produire directement des effets sur sa situation juridique. En effet, en supprimant les factures, cette décision affecte la relation contractuelle portant sur les transactions précises qui font l’objet des factures invalidées, en l’espèce la relation entre Jiangsu et l’importateur, et elle est également susceptible d’affecter la relation entre la personne qui émet les factures et les autorités fiscales ( 14 ). En conséquence, les institutions ne sauraient, à mon sens, valablement soutenir que le Tribunal a commis une erreur de droit en concluant que Jiangsu était directement concernée par l’article 2 du règlement litigieux, à tout le moins en ce qui concerne le paragraphe 1 de cette disposition.

28.

En ce qui concerne l’article 2, paragraphe 2, de ce règlement, il est vrai que, ainsi que le font valoir les institutions, à la suite de l’invalidation des factures, la dette douanière est née à l’égard de l’importateur, à savoir la société Seraphim Solar System, personne juridiquement distincte de Jiangsu, quoique liée à celle-ci. Toutefois, dans le contexte de la présente espèce, cette circonstance n’est pas, à mon sens, de nature à rendre le recours de Jiangsu irrecevable pour défaut d’incidence directe.

29.

En effet, tout d’abord, la naissance de la dette douanière est la conséquence immédiate et directe de l’invalidation des factures en question, invalidation qui, ainsi qu’il ressort du règlement litigieux lui‑même ( 15 ), constitue la condition nécessaire à la naissance de cette dette. L’invalidation des factures concernant les transactions couvertes par l’engagement et la naissance de la dette douanière relative à ces opérations sont donc des effets étroitement liés de la même mesure, de sorte qu’il serait artificiel de les séparer. En outre, les dettes douanières concernent précisément les transactions spécifiques qui font l’objet des factures, de sorte qu’elles affectent nécessairement ces opérations, auxquelles Jiangsu est partie et, en conséquence, affectent sa situation juridique.

30.

Il résulte de ce qui précède que, à mon avis, contrairement à ce que soutiennent les institutions, le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en concluant que Jiangsu était directement concernée par l’article 2 du règlement litigieux.

b) Sur l’intérêt à agir

31.

À titre subsidiaire, les institutions soutiennent que des erreurs de droit entacheraient l’analyse du Tribunal quant à l’intérêt à agir de Jiangsu pour attaquer l’article 2 du règlement litigieux.

32.

À cet égard, au point 47 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a observé que la jurisprudence a implicitement, mais nécessairement, admis la recevabilité du recours d’un producteur-exportateur à l’encontre des actes portant retrait de l’acceptation d’un engagement et instituant un droit antidumping définitif sur les produits qu’il fabrique et exporte sur le marché de l’Union ( 16 ). Le Tribunal en a déduit que, dans une configuration similaire, un tel producteur-exportateur doit également être considéré comme recevable à contester l’imposition dudit droit aux produits qu’il a déjà exportés et dont les factures conformes ont été invalidées par la Commission. Au point 48 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré en outre que les dispositions attaquées, dans la mesure où elles contribuent à renchérir les produits à l’importation de Jiangsu, ont sur ses relations commerciales avec l’importateur des produits en cause des répercussions négatives, que le recours, en cas de succès, est de nature à lever.

33.

Les institutions soutiennent que cette analyse est entachée d’erreurs de droit. Les considérations figurant au point 47 de l’arrêt attaqué seraient dépourvues de pertinence dans la mesure où elles concerneraient la qualité pour agir et reposeraient sur une interprétation erronée de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE. En outre, l’analogie jurisprudentielle établie à ce point serait erronée, car elle ne concernerait pas une situation semblable à celle de l’espèce. Au point 48 de l’arrêt attaqué, le Tribunal interpréterait, contrairement à la jurisprudence, la notion d’« intérêt à agir » comme s’il suffisait de démontrer un simple avantage économique résultant du succès du recours, alors qu’une modification de la situation juridique du requérant est nécessaire. Jiangsu conteste les arguments des institutions.

34.

À cet égard, selon une jurisprudence constante de la Cour, un recours en annulation intenté par une personne physique ou morale n’est recevable que dans la mesure où cette dernière a un intérêt à voir annuler l’acte attaqué. Un tel intérêt suppose que l’annulation de cet acte soit susceptible, par elle-même, d’avoir des conséquences juridiques et que le recours puisse ainsi, par son résultat, procurer un bénéfice à la partie qui l’a intenté. L’intérêt à agir d’un requérant doit être né et actuel, et ne peut concerner une situation future et hypothétique ( 17 ).

35.

En l’espèce, le raisonnement développé par le Tribunal dans l’arrêt attaqué n’est pas exempt de toute critique. En effet, d’une part, la portée de l’analogie établie par le Tribunal au point 47 de cet arrêt paraît douteuse. Elle ne concerne pas spécifiquement la condition de l’intérêt à agir, et sa pertinence n’est aucunement motivée. En outre, les considérations, exposées au point 48 de l’arrêt attaqué, concernant les répercussions négatives sur les relations commerciales entre Jiangsu et son importateur ne paraissent pas suffisantes à elles seules pour démontrer que l’annulation de l’acte produirait sur la situation juridique de Jiangsu des effets positifs justifiant un intérêt à agir tel que défini dans la jurisprudence rappelée au point 34 des présentes conclusions.

36.

Néanmoins, ces erreurs ne doivent pas, à mon avis, entraîner l’annulation de l’arrêt attaqué dans la mesure où la conclusion selon laquelle Jiangsu avait un intérêt à agir pour obtenir l’annulation de l’article 2 du règlement litigieux est correcte ( 18 ).

37.

Ainsi que je l’ai relevé au point 26 des présentes conclusions, en l’espèce, à l’article 2 du règlement litigieux, la Commission a, d’une part, annulé les factures conformes émises, entre autres, par Jiangsu et, d’autre part, ordonné la perception des droits définitifs dus au titre des transactions faisant l’objet des factures.

38.

Dans ces circonstances, l’annulation de ladite disposition du règlement litigieux entraînerait l’élimination de l’invalidation des factures émises par Jiangsu, ce qui produirait donc des conséquences juridiques au sens de la jurisprudence citée au point 34 des présentes conclusions. L’élimination des conséquences juridiques découlant pour Jiangsu de l’invalidation des factures, spécifiquement dans les relations contractuelles concernant les transactions qui font l’objet des factures invalidées, constitue un avantage que Jiangsu retirerait du succès de son recours. En outre, cette annulation invaliderait l’ordre de perception des droits définitifs dus pour les transactions faisant l’objet des factures, transactions dans lesquelles, ainsi que je l’ai déjà relevé au point 29 des présentes conclusions, Jiangsu était la partie venderesse. Il ressort selon moi de ces considérations que Jiangsu avait un intérêt à agir en annulation de la disposition attaquée du règlement litigieux. Il s’ensuit que ce grief des institutions doit également être rejeté.

2. Sur la seconde branche des premiers moyens, relative à la recevabilité et au caractère opérant de l’exception d’illégalité soulevée par Jiangsu

39.

La seconde branche des premiers moyens soulevés par les institutions est dirigée contre l’analyse effectuée par le Tribunal aux points 57 à 64 de l’arrêt attaqué, dans laquelle il a jugé recevable l’exception d’illégalité soulevée par Jiangsu, au titre de l’article 277 TFUE, contre l’article 3, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution no 1238/2013 et contre l’article 2, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution no 1239/2013 (ci-après, conjointement, les « dispositions visées par l’exception d’illégalité »).

40.

À la suite de cette analyse, le Tribunal a conclu que, en l’absence d’intérêt à agir contre ces dispositions, on ne pouvait affirmer que Jiangsu eût qualité pour les contester, au titre de l’article 263 TFUE, directement à la suite de leur adoption et que, partant, cette société pouvait les contester dans le cadre d’une exception d’illégalité au titre de l’article 277 TFUE ( 19 ).

41.

Les institutions estiment que l’analyse du Tribunal est entachée de plusieurs erreurs de droit et est, en particulier, contraire à la jurisprudence résultant des arrêts SolarWorld et Canadian Solar ( 20 ). La Commission conteste également le caractère opérant de l’exception d’illégalité.

42.

À cet égard, il y a lieu de rappeler avant tout que l’article 277 TFUE est l’expression d’un principe général assurant à toute partie le droit de contester, en vue d’obtenir l’annulation d’une décision qui la concerne directement et individuellement, la validité des actes institutionnels antérieurs constituant la base juridique de la décision attaquée, si cette partie ne disposait pas du droit d’introduire, en vertu de l’article 263 TFUE, un recours direct contre ces actes, dont elle subit ainsi les conséquences sans avoir été en mesure d’en demander l’annulation ( 21 ). La voie de droit de l’exception d’illégalité n’est ouverte qu’en l’absence d’une autre voie de recours disponible ( 22 ). En outre, il ressort du libellé même de l’article 277 TFUE que, si cette exception est accueillie, il en résulte seulement une constatation incidente de l’illégalité de l’acte et, par voie de conséquence, la non-application entre les parties des dispositions déclarées illégales, et non leur annulation ( 23 ).

43.

À titre liminaire, j’estime également opportun de rappeler que, dans l’arrêt SolarWorld, la Cour a jugé que l’article 2 du règlement d’exécution no 1239/2013 est une disposition qui n’est pas dissociable du reste de ce règlement et que son annulation affecterait nécessairement la substance dudit règlement ( 24 ). À la lumière de ce constat, la Cour a confirmé l’ordonnance par laquelle le Tribunal avait déclaré irrecevable un recours tendant à l’annulation de cette disposition et non pas de l’intégralité du règlement d’exécution no 1239/2013. La Cour s’est fondée sur la jurisprudence constante selon laquelle l’annulation partielle d’un acte de l’Union n’est possible que dans la mesure où les éléments dont l’annulation est demandée sont détachables du reste de l’acte ( 25 ). Dans l’arrêt Canadian Solar, la Cour a, en substance, étendu ces considérations à l’article 3 du règlement d’exécution no 1238/2013 ( 26 ).

44.

Dans ces conditions, il faut, en premier lieu, vérifier si, comme le font valoir les institutions, des erreurs de droit entachent la conclusion du Tribunal selon laquelle Jiangsu n’avait pas d’intérêt à agir contre les dispositions visées par l’exception d’illégalité.

45.

À cet égard, je relève que, aux points 61 et 62 de l’arrêt attaqué, le Tribunal, d’une part, a constaté que, à la date de l’adoption de ces dispositions, la question de savoir si celles-ci seraient appliquées à Jiangsu demeurait purement hypothétique. D’autre part, il a relevé que l’intérêt à agir de celle-ci contre ces dispositions ne pouvait se fonder sur la simple éventualité que la Commission lui adresse un retrait d’acceptation des engagements suivi d’une invalidation des factures conformes.

46.

Ces considérations du Tribunal sont, à mon avis, exemptes d’erreur. En effet, au moment de l’adoption des règlements d’exécution no 1238/2013 et no 1239/2013, l’application des dispositions visées par l’exception d’illégalité – lesquelles, ainsi que je l’ai rappelé au point 11 des présentes conclusions, prévoyaient la naissance d’une dette douanière si la Commission retirait l’acceptation de l’engagement par un règlement ou une décision se rapportant à des transactions particulières et déclarait invalides les factures conformes pertinentes – était purement hypothétique et dépendait d’une circonstance – la constatation de la violation de l’engagement – qui ne s’était pas encore produite et qui aurait pu ne pas se produire.

47.

Les considérations du Tribunal sont, dès lors, conformes à la jurisprudence constante de la Cour selon laquelle l’intérêt à agir d’un requérant doit être né et actuel, ne peut concerner une situation future et hypothétique et doit, au vu de l’objet du recours, exister au stade de l’introduction de celui-ci sous peine d’irrecevabilité ( 27 ). Au demeurant, il convient également de relever que, dans leurs pourvois, les institutions ne contestent pas réellement ces considérations du Tribunal figurant aux points 61 et 62 de l’arrêt attaqué.

48.

Il s’ensuit que, selon moi, le Tribunal n’a pas commis d’erreur en considérant que, en l’absence de constatation de la violation de l’engagement, Jiangsu n’avait pas d’intérêt à agir contre les dispositions visées par l’exception d’illégalité, lors de l’adoption de ces deux règlements et pendant la période ultérieure où cette société aurait pu les attaquer.

49.

Les institutions font valoir, en deuxième lieu, que le Tribunal aurait commis une erreur de droit en ne déclarant pas l’exception d’illégalité irrecevable au motif que, les dispositions visées par cette exception étant indissociables du reste des règlements d’exécution no 1238/2013 et no 1239/2013, au regard des arrêts SolarWorld et Canadian Solar, Jiangsu aurait pu attaquer l’intégralité de ces règlements et invoquer, dans ce cadre, l’illégalité de toute disposition de ceux-ci. Faute d’avoir attaqué ces règlements dans le délai de recours, Jiangsu serait désormais forclose de la possibilité de soulever une exception d’illégalité.

50.

À cet égard, je relève toutefois que, indépendamment de la question de savoir si les dispositions en cause sont détachables du reste des règlements, il ressort des considérations exposées aux points 45 à 47 des présentes conclusions que, même si Jiangsu avait attaqué dans le délai de recours les règlements d’exécution no 1238/2013 et no 1239/2013 dans leur intégralité, elle n’aurait, en tout état de cause, pas eu d’intérêt à agir pour contester les dispositions visées par l’exception d’illégalité.

51.

En effet, il ressort de la jurisprudence que les principes mentionnés au point 47 des présentes conclusions en ce qui concerne le nécessaire caractère né, actuel et non hypothétique de l’intérêt à agir s’appliquent également aux différents moyens du recours ( 28 ). À la lumière des considérations du Tribunal rappelées au point 45 des présentes conclusions, faute d’intérêt à agir, Jiangsu n’aurait pas pu contester les dispositions en cause même si elle avait attaqué les règlements d’exécution no 1238/2013 et no 1239/2013 dans leur intégralité. Les institutions ne peuvent donc faire valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit à cet égard.

52.

Cela étant, il faut toutefois, en troisième lieu, examiner l’argument soulevé par la Commission selon lequel le Tribunal aurait commis une erreur de droit en considérant que l’exception d’illégalité était recevable, dans la mesure où, les dispositions visées par l’exception d’illégalité n’étant pas détachables du reste des règlements d’exécution no 1238/2013 et no 1239/2013, ce qui a été reconnu dans les arrêts SolarWorld et Canadian Solar, Jiangsu n’aurait pas pu soulever cette exception concernant seulement les dispositions visées par cette exception, mais aurait dû la soulever à l’égard de l’intégralité de ces règlements.

53.

La Commission fonde cet argument sur le postulat que l’on pourrait transposer dans le cadre de l’exception d’illégalité prévue à l’article 277 TFUE le principe, rappelé au point 43 des présentes conclusions, dégagé par la jurisprudence en matière de recours en annulation introduit au titre de l’article 263 TFUE, selon lequel l’annulation partielle d’un acte de l’Union n’est possible que dans la mesure où les éléments dont l’annulation est demandée sont détachables du reste de l’acte ( 29 ). En conséquence, une exception d’illégalité soulevée exclusivement à l’égard de dispositions non détachables du reste de l’acte ne serait pas recevable.

54.

Indépendamment de la question de savoir si les dispositions visées sont détachables du reste des règlements, qui est litigieuse entre les parties ( 30 ), je ne suis, en tout état de cause, pas convaincu que ce postulat soit correct.

55.

En effet, la raison principale qui sous-tend la jurisprudence selon laquelle l’annulation partielle d’un acte de l’Union n’est possible que pour autant que les éléments dont l’annulation est demandée soient détachables est la nécessité d’éviter que, à la suite de l’annulation partielle de l’acte, demandée par le requérant, la substance de cet acte soit modifiée ( 31 ). En effet, cela impliquerait une révision de l’acte, ce qui outrepasserait les pouvoirs du juge de l’Union dans le cadre du recours en annulation et constituerait une décision ultra petita ( 32 ).

56.

Toutefois, ce raisonnement n’est pas applicable à l’exception d’illégalité. En effet, comme je l’ai observé au point 42 des présentes conclusions, dans le cadre de cette voie de droit, seule l’inapplicabilité de l’acte incidemment contesté peut être invoquée, mais non l’annulation de celui‑ci ( 33 ). La seule constatation incidente de l’illégalité de l’acte et, par voie de conséquence, la non-application entre les parties à l’instance des dispositions déclarées illégales ont un caractère simplement déclaratif, et non constitutif. Cette constatation incidente ne pourra donc pas entraîner une modification de la substance de l’acte comparable à celle qui se produirait en cas d’annulation de ces dispositions.

57.

Ainsi, par exemple, dans la présente affaire, même en admettant que les dispositions visées par l’exception d’illégalité ne soient pas détachables du reste de l’acte, la constatation incidente de leur illégalité effectuée par le Tribunal au point 158 de l’arrêt attaqué et la déclaration d’inapplicabilité qui en découle à l’égard de Jiangsu n’ont pas entraîné de modification substantielle des règlements d’exécution no 1238/2013 et no 1239/2013. Il s’ensuit que le raisonnement et la conclusion développés par la Cour dans les arrêts SolarWorld et Canadian Solar, selon lesquels l’annulation de ces dispositions affecterait nécessairement la substance de ces règlements, ne s’appliquent pas en l’espèce.

58.

Il découle de tout cela que le Tribunal n’a, à mon avis, commis aucune erreur de droit en jugeant recevable l’exception d’illégalité soulevée par Jiangsu, bien qu’elle n’eût pas été soulevée à l’encontre de l’intégralité des règlements d’exécution no 1238/2013 et no 1239/2013.

59.

En quatrième lieu, la Commission fait encore valoir que le Tribunal aurait commis une erreur de droit au point 63 de l’arrêt attaqué en considérant que les dispositions visées par l’exception d’illégalité sont des dispositions à caractère général. Selon la Commission, ces dispositions ne s’appliqueraient cependant qu’aux entreprises ayant offert des engagements et constitueraient donc des décisions individuelles à leur égard.

60.

À cet égard, il ressort du libellé de l’article 277 TFUE que la voie de droit de l’exception d’illégalité s’applique dans des litiges mettant en cause « un acte de portée générale ». Il en résulte donc une délimitation en négatif des actes contre lesquels cette voie de droit est admise, avec l’exclusion des actes de portée individuelle, contre lesquels le requérant aurait pu introduire un recours en annulation au titre de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE. Cette condition a pour finalité d’éviter que l’exception d’illégalité puisse être utilisée pour contourner les conditions de recevabilité d’un recours en annulation et, partant, que soit remise en cause la légalité d’un acte en dehors des conditions prévues à l’article 263 TFUE.

61.

À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, un acte est de portée générale s’il s’applique à des situations déterminées objectivement et s’il produit ses effets juridiques à l’égard de catégories de personnes envisagées de manière générale et abstraite ( 34 ).

62.

Tel n’est pas le cas, à mon avis, des dispositions visées par l’exception d’illégalité. En effet, ainsi qu’il ressort explicitement de l’article 3, paragraphe 1, du règlement d’exécution no 1238/2013 et de l’article 2, paragraphe 1, du règlement d’exécution no 1239/2013, ces dispositions s’appliquent non pas à l’égard de catégories de personnes envisagées de manière générale et abstraite, mais uniquement à l’égard des « sociétés dont la Commission a accepté des engagements et dont les noms figurent à l’annexe de la décision d’exécution [2013/707] ».

63.

Je suis donc d’accord avec la Commission lorsqu’elle fait valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit en qualifiant les dispositions en question d’« actes de portée générale » au point 63 de l’arrêt attaqué.

64.

Néanmoins, je considère que, dans un cas spécifique comme le cas d’espèce, un opérateur tel que Jiangsu qui, ainsi qu’il ressort des points 45 à 47 et 50 des présentes conclusions, n’a pas la possibilité de contester de telles dispositions dans le cadre d’un recours introduit au titre de l’article 263 TFUE, doit se voir garantir la possibilité de contester leur légalité de manière incidente.

65.

En effet, le principe général, rappelé dans la jurisprudence mentionnée au point 42 des présentes conclusions, dont l’article 277 TFUE est l’expression, est destiné à assurer à toute partie le droit de contester, en vue d’obtenir l’annulation d’un acte qui la concerne directement et individuellement, la validité des actes institutionnels antérieurs constituant la base juridique de l’acte attaqué, si cette partie ne disposait pas du droit d’introduire, en vertu de l’article 263 TFUE, un recours direct contre ces actes, dont elle subit ainsi les conséquences sans avoir été en mesure d’en demander l’annulation. Ce principe général doit, à mon avis, trouver à s’appliquer dans un cas tel que celui de la présente affaire, tel qu’il est décrit au point précédent des présentes conclusions. Il s’ensuit que, nonobstant l’erreur de droit mentionnée au point 63 des présentes conclusions, la conclusion du Tribunal quant à la possibilité pour Jiangsu de contester de manière incidente la légalité des dispositions visées par l’exception d’illégalité est à mon avis correcte.

66.

Enfin, en cinquième lieu, la Commission fait également valoir, toujours à titre subsidiaire, que le moyen unique soulevé en première instance par Jiangsu serait inopérant en ce qu’il serait dirigé contre des dispositions qui ne constituent pas la base juridique du règlement litigieux. Ce règlement se baserait, en effet, sur l’article 8 du règlement antidumping de base et sur l’article 13 du règlement antisubventions de base. En outre, les institutions soutiennent que le Tribunal a mal interprété le moyen unique soulevé par Jiangsu, en ce sens que, par ce moyen, la requérante ferait valoir que le règlement litigieux viole directement les dispositions pertinentes des règlements de base, alors que la requête ne contiendrait pas ce moyen. Le Tribunal aurait donc statué ultra petita.

67.

Ces arguments doivent être rejetés. Ainsi qu’il ressort de l’analyse du libellé de la requête de première instance, le moyen unique soulevé par Jiangsu devant le Tribunal est explicitement fondé sur la violation de l’article 8, paragraphes 1, 9 et 10, et de l’article 10, paragraphe 5, du règlement antidumping de base et de l’article 13, paragraphes 1, 9 et 10, et de l’article 16, paragraphe 5, du règlement antisubventions de base, en combinaison avec une exception d’illégalité soulevée à l’encontre de l’article 3, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution no 1238/2013 et de l’article 2, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution no 1239/2013. Il s’ensuit que le Tribunal n’a pas mal interprété la requête de Jiangsu et n’a pas statué ultra petita. Quant au caractère inopérant de l’exception d’illégalité, je relève qu’il y a effectivement un certain chevauchement entre le moyen unique tiré de la violation de ces dispositions des règlements de base et cette exception. En effet, accueillir le moyen unique impliquerait déjà, en soi, d’annuler le règlement litigieux. Toutefois, d’une part, lesdites dispositions pertinentes des règlements de base et les dispositions visées par l’exception d’illégalité sont étroitement liées, en ce sens que – dans la thèse des institutions, dont le bien-fondé est contesté par Jiangsu – les secondes constituent la mise en œuvre des premières, mise en œuvre qui trouve son expression dans le règlement litigieux. Dans ce contexte, il est donc clair que Jiangsu a soulevé une exception d’illégalité contre ces dispositions. D’autre part, il ne fait pas non plus de doute que la simple constatation incidente de l’illégalité des dispositions des règlements d’exécution no 1238/2013 et no 1239/2013 visées par l’exception d’illégalité pour violation des mêmes dispositions des règlements de base entraînerait l’annulation du règlement litigieux à l’égard de Jiangsu. Il s’ensuit que, à mon avis, cette exception n’est pas inopérante.

68.

Il résulte de tout ce qui précède que les premiers moyens soulevés par les institutions doivent être rejetés.

B.   Sur les moyens du pourvoi relatifs au fond

69.

Par les deuxième, troisième et quatrième moyens soulevés par la Commission et par le second moyen soulevé par le Conseil, les institutions contestent sur le fond le raisonnement qui a conduit le Tribunal à annuler l’article 2 du règlement litigieux à l’égard de Jiangsu. Ces moyens peuvent être subdivisés en deux branches.

1. Sur les moyens tirés de la violation des règlements de base

70.

Les deuxième et troisième moyens du pourvoi de la Commission et la première branche du second moyen du pourvoi du Conseil sont dirigés contre la partie de l’arrêt attaqué (points 115 à 152) dans laquelle le Tribunal a conclu que les règlements de base ne constituaient pas une base juridique suffisante pour adopter l’article 2 du règlement litigieux.

a) L’arrêt attaqué

71.

Dans l’arrêt attaqué, le Tribunal a relevé, aux points 115 à 118, que ni les dispositions de l’article 8, paragraphe 10, du règlement antidumping de base et de l’article 13, paragraphe 10, du règlement antisubventions de base ni celles de l’article 10, paragraphe 5, du règlement antidumping de base et de l’article 16, paragraphe 5, du règlement antisubventions de base n’étaient applicables à la situation du cas d’espèce.

72.

Le Tribunal a considéré que ces dispositions étaient les seules, dans les règlements de base, à régler la question de l’imposition dans le temps des droits antidumping et antisubventions qui auraient été dus en l’absence d’un engagement entre temps violé ou retiré et que la situation du cas d’espèce ne correspondait à aucune des hypothèses expressément prévues par les règlements de base à cet égard. Dans ces conditions, il y avait lieu d’apprécier s’il n’existait aucune autre base juridique pour adopter l’article 2 du règlement litigieux ( 35 ).

73.

Le Tribunal a considéré ensuite qu’il ressort de l’économie et des finalités des règlements de base, d’une part, que l’intention du législateur était de légiférer quant aux procédures pouvant être utilisées aux fins de tirer les conséquences d’un retrait d’acceptation d’un engagement par la Commission et, d’autre part, que cette intention du législateur s’était réalisée par lesdites (deux paires de) dispositions mentionnées au point 71 des présentes conclusions. Le Tribunal a donc exclu que d’autres dispositions des règlements de base puissent constituer le fondement du pouvoir des institutions de l’Union chargées de l’exécution des règlements de base d’exiger, dans le cadre de cette compétence d’exécution, le paiement par les entreprises concernées de l’ensemble des droits dus au titre des transactions couvertes par des factures conformes entre temps invalidées ( 36 ).

74.

En particulier, au point 138 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a exclu qu’un tel pouvoir puisse être déduit des termes de l’article 8, paragraphe 9, du règlement antidumping de base et de l’article 13, paragraphe 9, du règlement antisubventions de base, selon lesquels les droits s’appliquent automatiquement à la suite du retrait de l’acceptation d’engagements. Selon le Tribunal, une telle application automatique serait prévue exclusivement dans les limites fixées expressément par les dispositions des règlements de base mentionnées au point 71 des présentes conclusions. Aux points 139 à 151 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a ensuite rejeté les autres arguments soulevés par les institutions.

b) Arguments des parties

75.

Les institutions contestent l’interprétation des dispositions pertinentes des règlements de base faite par le Tribunal et la conclusion selon laquelle ces règlements ne contiendraient pas de base juridique pour la perception des droits sur les importations effectuées en violation de l’engagement avant le retrait formel de celui-ci. Plus précisément, le Tribunal aurait complètement ignoré les modifications du système d’engagements résultant des modifications introduites par le règlement (CE) no 461/2004 ( 37 ).

76.

En premier lieu ( 38 ), les institutions reprochent au Tribunal d’avoir commis des erreurs de droit en ce qu’il a qualifié, en l’espèce, la perception des droits sur ces importations de « rétroactive ». D’une part, le Tribunal ne donnerait aucune motivation quant à cette rétroactivité supposée. D’autre part, une telle supposition méconnaîtrait la notion de « rétroactivité » telle qu’elle est interprétée dans la jurisprudence ( 39 ) et constituerait une violation de l’article 10, paragraphe 1, du règlement antidumping de base et de l’article 16, paragraphe 1, du règlement antisubventions de base.

77.

En second lieu, la Commission, soutenue par le Conseil ( 40 ), fait valoir que l’arrêt attaqué est entaché d’erreurs de droit en ce qui concerne l’interprétation de l’article 8, paragraphes 1, 9 et 10, et de l’article 10, paragraphe 5, du règlement antidumping de base ainsi que de l’article 13, paragraphes 1, 9 et 10, et de l’article 16, paragraphe 5, du règlement antisubventions de base. Ces dispositions des règlements de base, telles qu’elles résultent des modifications apportées à la législation antidumping par le règlement no 461/2004, apporteraient une base juridique suffisante pour la perception de droits sur les importations pour lesquelles la violation de l’engagement a été constatée.

78.

Jiangsu conteste ces moyens. En premier lieu, le règlement litigieux imposerait des droits rétroactivement en allant au-delà de ce que permettent les règlements de base. Le Tribunal aurait donc conclu à bon droit que ces règlements ne constituent pas une base juridique suffisante pour l’adoption des dispositions du règlement litigieux.

79.

En second lieu, en cas de violation des termes d’un engagement, il résulterait de l’article 8, paragraphe 9, du règlement antidumping de base et de l’article 13, paragraphe 9, du règlement antisubventions de base que les droits qui ne s’appliquaient pas, en conséquence de l’acceptation de l’engagement, s’appliquent automatiquement aux importations effectuées à partir de la date à laquelle l’engagement a été retiré, et non à des importations antérieures. Selon Jiangsu, comme l’a considéré le Tribunal, dans le système créé par les règlements de base, les droits dus en raison de la violation des engagements ne peuvent pas être imposés rétroactivement en dehors des limites procédurales fixées par les dispositions mentionnées au point 71 des présentes conclusions. Le droit de l’Union n’autoriserait en aucune manière la Commission à invalider les factures et à ordonner aux autorités douanières de percevoir les droits rétroactivement sur les précédentes importations mises en libre pratique en l’absence d’enregistrement et d’imposition de droits provisoires. Selon Jiangsu, les modifications apportées en 2004 avaient exclusivement pour objet, d’une part, de permettre le retrait d’un engagement et l’application du droit par un seul acte juridique, en mettant fin à la lourde double procédure en vigueur antérieurement, qui prévoyait l’intervention tant du Conseil que de la Commission, et, d’autre part, de fixer des délais contraignants pour la conclusion des enquêtes sur des violations présumées des engagements.

c) Analyse juridique

80.

À titre liminaire, il convient de rappeler que, dans le système des engagements créé à l’article 8 du règlement antidumping de base et à l’article 13 du règlement antisubventions de base, il ressort de l’article 8, paragraphe 1, du règlement antidumping de base et de l’article 13, paragraphe 1, du règlement antisubventions de base que, lorsque l’existence, respectivement, d’un dumping ou d’une subvention et d’un préjudice a été constatée à titre provisoire, la Commission peut accepter l’offre d’engagement d’un exportateur, pour autant qu’elle estime que le préjudice est ainsi éliminé ( 41 ).

81.

Les effets de l’acceptation de l’engagement sont régis explicitement au deuxième alinéa des mêmes dispositions. Ces alinéas prévoient que, dans ce cas, et aussi longtemps que les engagements restent en vigueur, les droits provisoires institués par la Commission ou, le cas échéant, les droits définitifs, ne s’appliquent pas aux importations du produit concerné fabriqué par les sociétés visées dans la décision de la Commission portant acceptation des engagements ( 42 ).

82.

L’article 8, paragraphe 9, du règlement antidumping de base et l’article 13, paragraphe 9, du règlement antisubventions de base régissent les situations de violation ou de retrait d’un engagement par une partie à celui-ci ou de retrait de l’acceptation de l’engagement par la Commission. Ces dispositions prévoient que, dans ces cas, l’acceptation de l’engagement est retirée par la Commission et les droits (antidumping ou compensateurs) provisoires, ou, comme en l’espèce, les droits définitifs institués par la Commission s’appliquent (automatiquement) ( 43 ).

83.

Sous leur forme actuelle, ces dispositions des règlements de base résultent d’une réforme opérée au moyen du règlement no 461/2004 susmentionné.

84.

Dans les présentes affaires, la question centrale concerne la portée exacte des effets du retrait de l’acceptation de l’engagement par la Commission, notamment en cas de violation de celui-ci par l’entreprise qui l’a souscrit. Cette question impose de clarifier la portée des dispositions, figurant à l’article 8, paragraphe 9, du règlement antidumping de base et à l’article 13, paragraphe 9, du règlement antisubventions de base, selon lesquelles, dans un tel cas, le droit (antidumping et compensateur) définitif institué par la Commission « s’applique » automatiquement. Éclaircir la portée de ces dispositions permettra de déterminer si, à la suite de ce retrait, les droits définitifs déjà institués s’appliquent ab initio aux importations en provenance de l’exportateur relevant de l’engagement violé effectuées depuis le moment de l’institution du droit définitif (thèse des institutions) ou seulement aux importations effectuées après le retrait formel de l’engagement (thèse de Jiangsu, accueillie par le Tribunal).

85.

La question a une incidence fondamentale sur la disposition attaquée du règlement litigieux, à savoir l’article 2 de ce règlement, en ce que, dans le cas où, comme le soutient Jiangsu, les droits antidumping et compensateurs définitifs ne s’appliquent que pour l’avenir, c’est-à-dire seulement sur les importations effectuées à partir du moment où la Commission a retiré l’acceptation de l’engagement, la Commission n’aurait pas pu invalider les factures conformes concernant les importations antérieures au retrait et n’aurait pas pu, en l’absence de base légale à cet égard, ordonner la perception des droits antidumping et compensateurs tels qu’institués dans les règlements d’exécution no 1238/2013 et no 1239/2013.

86.

Dans ce contexte, il faut donc interpréter précisément les dispositions figurant à l’article 8, paragraphe 9, du règlement antidumping de base et à l’article 13, paragraphe 9, du règlement antisubventions de base. À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, il y a lieu, pour l’interprétation d’une disposition du droit de l’Union, de tenir compte non seulement des termes de celle-ci, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie ( 44 ). La genèse d’une disposition du droit de l’Union peut également révéler des éléments pertinents pour son interprétation ( 45 ).

87.

D’un point de vue littéral, la lecture des dispositions en cause ne permet pas de trancher de manière décisive la question centrale mentionnée au point 84 des présentes conclusions, c’est-à-dire celle de savoir si, à la suite du retrait de l’acceptation de l’engagement, les droits définitifs s’appliquent ab initio ou s’appliquent seulement aux importations postérieures au retrait. En effet, ces dispositions se bornent à énoncer que les droits s’appliquent (automatiquement), sans autre précision.

88.

D’un point de vue littéral, toutefois, une lecture conjointe des dispositions de l’article 8, paragraphe 1, deuxième alinéa (qui prévoit que, aussi longtemps que l’engagement reste en vigueur, les droits définitifs « ne s’appliquent pas » aux importations concernées), de l’article 8, paragraphe 9 (qui prévoit que, en cas de retrait de l’acceptation de l’engagement, le droit « s’applique automatiquement »), ainsi que de l’article 9, paragraphe 4 (qui prévoit que le droit définitif est « institué » par la Commission), du règlement antidumping de base apparaît parfaitement compatible avec une interprétation selon laquelle l’application du droit définitif institué initialement serait suspendue en raison de l’acceptation de l’engagement (« ne s’applique pas »). En cas de retrait de l’acceptation pour violation de cet engagement, cette suspension ne serait plus justifiée pour les importations liées à la violation, auxquelles, partant, s’applique automatiquement le droit déjà institué, dont l’application était suspendue. Le même raisonnement vaut pour les dispositions correspondantes du règlement antisubventions de base.

89.

Il convient en outre de s’arrêter brièvement sur la genèse de ces dispositions, dont les parties ont amplement débattu. Ainsi qu’il a déjà été dit, les versions des dispositions figurant à l’article 8, paragraphes 1 et 9, du règlement antidumping de base et à l’article 13, paragraphes 1 et 9, du règlement antisubventions de base qui sont pertinentes dans les présentes affaires résultent de la réforme opérée au moyen du règlement no 461/2004.

90.

Dans ce contexte, il faut avoir égard au considérant 18 du règlement no 461/2004, qui contient des éléments d’interprétation pertinents pour les dispositions qui ont été introduites par ce règlement et ont ensuite été confirmées dans des versions ultérieures des règlements de base ( 46 ).

91.

Il ressort de ce considérant que la réforme avait pour objectif de simplifier une procédure tortueuse qui, en cas de retrait de l’acceptation d’un engagement, prévoyait l’adoption de deux actes juridiques, l’un par la Commission (le retrait) et l’autre par le Conseil (l’institution des droits).

92.

Toutefois, il ressort d’une lecture attentive de ce considérant que, en effet, la réforme a entraîné un changement substantiel. Alors que, dans le système antérieur, à la suite du retrait de l’acceptation de l’engagement, le droit était « réinstitué » par le Conseil, dans le système issu de la réforme, le droit existe déjà et c’est simplement son application qui est autorisée par le nouvel acte juridique unique de la Commission. Il s’ensuit que si, dans le système antérieur, il était clair que le droit – qui devait être institué et n’existait donc pas au moment du retrait de l’acceptation de l’engagement – ne pouvait objectivement pas être appliqué aux importations réalisées avant ce retrait (puisqu’il n’avait même pas été institué), dans le système issu de la réforme, tel n’est plus le cas. Dans le système issu de la réforme, le droit existe déjà et c’est simplement son application qui, à la suite du retrait de l’acceptation de l’engagement, est autorisée par cet acte unique.

93.

Il s’ensuit que la genèse des dispositions en question non seulement semble compatible avec l’interprétation de ces dispositions mentionnée au point 88 des présentes conclusions, mais semble plutôt militer en faveur d’une telle interprétation.

94.

En ce qui concerne, par ailleurs, l’analyse du contexte dans lequel s’inscrivent les dispositions en question, celui-ci a joué un rôle fondamental dans l’analyse effectuée par le Tribunal. Dans l’arrêt attaqué, le Tribunal a, en effet, fondé sa conclusion selon laquelle les règlements de base ne contenaient pas de base juridique pour l’adoption de l’article 2 du règlement litigieux essentiellement sur la constatation que la question soulevée en l’espèce – à savoir, selon le Tribunal, « l’imposition des droits antidumping et antisubventions qui auraient été dus en l’absence d’un engagement entre-temps violé ou retiré » – serait régie exclusivement par les dispositions des règlements de base mentionnées au point 71 des présentes conclusions, à savoir l’article 8, paragraphe 10, et l’article 10, paragraphe 5, du règlement antidumping de base ainsi que l’article 13, paragraphe 10, et l’article 16, paragraphe 5, du règlement antisubventions de base ( 47 ). C’est sur ce fondement que le Tribunal a ensuite rejeté, au point 138 de l’arrêt attaqué, l’interprétation des dispositions en cause mentionnée au point 88 des présentes conclusions.

95.

Le raisonnement développé à cet égard par le Tribunal n’emporte cependant pas ma conviction.

96.

À cet égard, j’observe, tout d’abord, que la conclusion à laquelle est parvenu le Tribunal ne trouve, à mon avis, aucun fondement dans les considérants des règlements de base mentionnés aux points 133 à 136 de l’arrêt attaqué. D’abord, ainsi que le fait valoir à juste titre la Commission, ces considérants ne peuvent se référer aux modifications introduites par la réforme opérée par le règlement no 461/2004, dans la mesure où ils étaient déjà présents dans les règlements de base avant cette réforme. En revanche, des parties de ces considérants concernent les dispositions mentionnées au point 94 des présentes conclusions et fournissent des clés d’interprétation à cet égard.

97.

Pour ce qui concerne l’article 8, paragraphe 10, du règlement antidumping de base et la disposition correspondante, l’article 13, paragraphe 10, du règlement antisubventions de base, ainsi qu’il ressort respectivement des considérants 14 et 12 de ces règlements de base, ceux-ci s’appliquent explicitement dans deux cas : « en cas de suspicion de violation » ou « lorsqu’un complément d’enquête est nécessaire pour compléter les conclusions ». Dans ces cas, ces dispositions permettent d’imposer des droits provisoires. Contrairement à ce qu’a jugé le Tribunal, elles ne régissent pas l’application rétroactive des droits antidumping et antisubventions qui auraient été dus en l’absence d’un engagement entre-temps violé et retiré ( 48 ). Il s’agit simplement de dispositions qui, dans ces deux situations, permettent d’imposer des mesures provisoires à titre, pourrait-on dire, « conservatoire ». Le fait que ces dispositions ne régissent pas l’application rétroactive des droits est confirmé par la circonstance qu’elles ne figurent pas dans les articles des règlements consacrés à la rétroactivité, à savoir l’article 10 du règlement antidumping de base et l’article 16 du règlement antisubventions de base. Il s’ensuit que, contrairement à ce qu’a considéré le Tribunal, ces dispositions ne peuvent pas réaliser « l’intention du législateur de légiférer quant aux procédures pouvant être utilisées aux fins de tirer les conséquences d’un retrait d’acceptation d’un engagement » ( 49 ).

98.

Au contraire, les dispositions de l’article 10, paragraphe 5, du règlement antidumping de base et de l’article 16, paragraphe 5, du règlement antisubventions de base régissent explicitement l’application rétroactive des droits en cas de violation ou de retrait de l’engagement. Ces dispositions permettent, à titre exceptionnel et en raison de la violation ou du retrait de l’engagement, d’appliquer de manière rétroactive les droits définitifs à des importations effectuées avant l’imposition des droits provisoires, avec une limite de 90 jours et à condition que ces importations aient été enregistrées. Ces dispositions permettent donc exceptionnellement, en raison de la violation ou du retrait de l’engagement, d’appliquer les droits définitifs non seulement avant le moment de leur imposition, mais bien avant cela, jusqu’à 90 jours avant l’application des droits provisoires. Il s’ensuit que ces dispositions non seulement ne s’opposent pas à l’interprétation de l’article 8, paragraphes 1 et 9, du règlement antidumping de base et de l’article 13, paragraphes 1 et 9, du règlement antisubventions de base mentionnée au point 88 des présentes conclusions, mais semblent plutôt militer en faveur de cette interprétation. En effet, en cas de violation ou de retrait de l’engagement, elles permettent l’application rétroactive des droits définitifs à un moment bien antérieur à celui de leur imposition. Du point de vue de l’économie des dispositions concernées, il s’ensuit que, a fortiori, ces paragraphes 1 et 9 devraient être interprétés en ce sens que, en cas de violation de l’engagement, les droits définitifs doivent être considérés comme applicables dès le moment de leur imposition.

99.

Il résulte des considérations qui précèdent que l’interprétation de l’article 8, paragraphe 10, et de l’article 10, paragraphe 5, du règlement antidumping de base ainsi que de l’article 13, paragraphe 10, et de l’article 16, paragraphe 5, du règlement antisubventions de base contenue aux points 130, 137, 138, 141 et 144 de l’arrêt attaqué est entachée d’erreurs de droit.

100.

Cela étant, l’argument qui me fait pencher de manière décisive pour l’interprétation de l’article 8, paragraphes 1 et 9, du règlement antidumping de base ainsi que de l’article 13, paragraphes 1 et 9, du règlement antisubventions de base dans le sens mentionné au point 88 des présentes conclusions est l’argument téléologique.

101.

Je considère que l’interprétation de ces dispositions avancée par Jiangsu et retenue par le Tribunal a pour conséquence la perte de l’effet utile du système des engagements prévu par les règlements de base, en réduisant de manière substantielle les conséquences économiques pesant sur les entreprises qui ont souscrit l’engagement, en cas de violation de celui-ci. Dans ce cas, ces entreprises subiraient des conséquences exclusivement pour l’avenir et non pour le passé. Une telle interprétation réduit substantiellement l’effet dissuasif que les conséquences défavorables de la violation de l’engagement devraient exercer sur les entreprises qui offrent celui-ci et réduit donc fortement l’incitation à respecter ces engagements. Quel intérêt peut avoir une entreprise à respecter un engagement si elle sait que, si elle l’enfreint, en toute hypothèse, elle ne subira aucune conséquence pour le passé ?

102.

Je suis donc en désaccord avec ce qu’affirme le Tribunal au point 151 de l’arrêt attaqué, en faisant sien un argument de Jiangsu ( 50 ) selon lequel le retrait de l’acceptation de l’engagement serait, en soi, une sanction suffisamment importante de la violation de celui-ci. Au contraire, je suis d’accord avec la Commission quand elle soutient que, en l’espèce, le producteur-exportateur et l’importateur ont été pleinement conscients de la violation et qu’il n’y a donc pas de raison de les protéger contre l’imposition de droits.

103.

Au demeurant, la jurisprudence a déjà clairement souligné, d’une part, que l’objectif fondamental poursuivi par les dispositions des règlements de base en matière d’engagements est de garantir l’élimination des effets préjudiciables du dumping subis par l’industrie de l’Union et, d’autre part, que cet objectif repose principalement sur l’obligation de coopération de l’exportateur ainsi que sur le contrôle de l’exécution correcte de l’engagement souscrit par ce dernier, dans le cadre de la relation de confiance sur laquelle repose l’acceptation d’un tel engagement par la Commission ( 51 ).

104.

Une interprétation des dispositions des règlements de base qui, en réduisant sensiblement les conséquences qui s’attachent à la violation d’un engagement souscrit, réduit substantiellement l’incitation à respecter cet engagement et à collaborer dans le cadre d’un rapport de confiance avec la Commission est donc, selon moi, incompatible avec ladite jurisprudence.

105.

Il résulte de tout ce qui précède que, selon moi, les dispositions de l’article 8, paragraphe 1, deuxième alinéa, et de l’article 8, paragraphe 9, du règlement antidumping de base ainsi que de l’article 13, paragraphe 1, deuxième alinéa, et de l’article 13, paragraphe 9, du règlement antisubventions de base doivent être interprétées en ce sens que les droits antidumping ou compensateurs définitifs institués, respectivement, en vertu de l’article 9, paragraphe 4, du règlement antidumping de base ou de l’article 15, paragraphe 1, du règlement antisubventions de base sont suspendus en ce qui concerne les importations conformes en raison de l’acceptation de l’engagement par la Commission. En cas de retrait de l’acceptation par la Commission pour violation de l’engagement, cette suspension n’est plus justifiée pour les importations en relation avec la violation, auxquelles s’applique donc automatiquement le droit déjà institué, dont l’application était suspendue. Il s’ensuit que le retrait de l’acceptation de l’engagement, à la suite de sa violation, a pour effet de rendre les droits définitifs initialement institués automatiquement applicables aux importations correspondant à l’engagement violé, de sorte que les droits antidumping et compensateurs définitifs concernant ces importations deviennent automatiquement dus ab initio.

106.

Cette interprétation n’est, à mon avis, pas remise en cause par l’argument soulevé par Jiangsu selon lequel, si elle devait être retenue, la perception ab initio des droits définitifs après le retrait de l’engagement serait possible non seulement en cas de violation de l’engagement par l’entreprise, mais également si la Commission décidait, dans le cadre du large pouvoir d’appréciation qui lui est reconnu par la jurisprudence, de retirer l’engagement pour d’autres motifs, par exemple dans le cas où il ne serait plus praticable, voire dans le cas où c’est le producteur-exportateur qui souhaite retirer l’engagement.

107.

Je relève à cet égard que, si, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence ( 52 ), la Commission dispose d’un pouvoir d’appréciation pour déterminer s’il y a lieu ou non de retirer l’acceptation de l’engagement, il ressort de la même jurisprudence que ce pouvoir d’appréciation doit être exercé conformément au principe de proportionnalité. Cela implique que les conséquences (défavorables) de l’exercice de ce pouvoir doivent être proportionnées à l’intérêt dans lequel ce pouvoir est exercé. Dans le cas d’espèce, ainsi qu’il ressort des considérations exposées aux points 101 à 104 des présentes conclusions, la perception ab initio des droits définitifs sur les importations correspondant à l’engagement violé serait proportionnée, en raison de la violation de cet engagement par l’entreprise qui l’avait offert.

108.

En conclusion, il résulte de tout ce qui précède, en premier lieu, que, à la lumière de l’interprétation proposée au point 105 des présentes conclusions, dans le cas d’espèce, à la suite du retrait de l’acceptation de l’engagement offert par Jiangsu en raison de la violation de cet engagement, il n’y a eu aucune application rétroactive des droits antidumping et compensateurs définitifs. Il s’ensuit que les points 129 à 132, 138 et 141 de l’arrêt attaqué sont entachés d’erreurs de droit et qu’il y a lieu d’accueillir le deuxième moyen du pourvoi de la Commission et la première branche du second moyen du pourvoi du Conseil.

109.

En second lieu, l’arrêt attaqué est entaché d’erreurs de droit en ce qui concerne l’interprétation de l’article 8, paragraphes 1, 9 et 10, et de l’article 10, paragraphe 5, du règlement antidumping de base ainsi que de l’article 13, paragraphes 1, 9 et 10, et de l’article 16, paragraphe 5, du règlement antisubventions de base et, partant, il y a lieu d’accueillir également le troisième moyen soulevé par la Commission.

2. Sur les moyens relatifs à l’exception d’illégalité

110.

Par le quatrième moyen du pourvoi de la Commission et la seconde branche du second moyen du pourvoi du Conseil, les institutions contestent les points 153 à 158 de l’arrêt attaqué, dans lesquels le Tribunal a accueilli l’exception d’illégalité soulevée par Jiangsu contre l’article 3, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution no 1238/2013 et l’article 2, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution no 1239/2013, en déclarant ces dispositions inapplicables en l’espèce. Plus précisément, au point 157 de cet arrêt, le Tribunal a fondé cette décision à cet égard sur deux arguments en se référant aux motifs exposés aux points 128 à 140 dudit arrêt.

111.

Par un premier argument, le Tribunal a considéré que les dispositions visées par l’exception d’illégalité ne relèvent pas des cas prévus par les dispositions indiquées au point 94 des présentes conclusions, qui régiraient à titre exclusif l’imposition des droits antidumping et antisubventions qui auraient été dus en l’absence de l’engagement entre temps violé ou retiré. À cet égard, toutefois, il ressort des points 95 à 99 des présentes conclusions que cette analyse du Tribunal est, à mon avis, entachée d’erreurs de droit. Il s’ensuit qu’elle ne saurait fonder l’exception d’illégalité. Pour les mêmes raisons, le second argument développé au même point de l’arrêt attaqué, fondé sur l’économie générale des règlements de base, doit également être rejeté. Cet argument repose lui aussi sur l’analyse effectuée précédemment par le Tribunal, entachée d’erreurs de droit.

112.

J’estime au contraire que, comme le fait valoir la Commission, l’autorisation d’adopter les dispositions visées par l’exception d’illégalité s’inscrit dans le cadre du pouvoir de fixer, dans le règlement instituant les droits antidumping ou compensateurs, les « autres éléments » relatifs à la perception de ces droits, comme le prévoient l’article 14, paragraphe 1, du règlement antidumping de base ainsi que l’article 24, paragraphe 1, du règlement antisubventions de base, tels qu’interprétés par la jurisprudence ( 53 ).

113.

Il résulte de tout ce qui précède que le quatrième moyen du pourvoi de la Commission et la seconde branche du second moyen du pourvoi du Conseil doivent être accueillis et que, partant, l’arrêt attaqué doit être annulé dans son intégralité.

VI. Sur le recours en première instance

114.

En vertu de l’article 61, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, en cas d’annulation de la décision du Tribunal, la Cour peut statuer elle-même définitivement sur le litige, lorsque celui-ci est en état d’être jugé.

115.

J’estime que tel est le cas dans la présente affaire. En effet, il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent et notamment de l’interprétation de l’article 8, paragraphes 1 et 9, du règlement antidumping de base et de l’article 13, paragraphes 1 et 9, du règlement antisubventions de base que j’ai proposée au point 105 des présentes conclusions que, contrairement à ce qu’a jugé le Tribunal, le moyen unique soulevé par Jiangsu en première instance, tiré de la violation de l’article 8, paragraphes 1, 9 et 10, et de l’article 10, paragraphe 5, du règlement antidumping de base ainsi que de l’article 13, paragraphes 1, 9 et 10, et de l’article 16, paragraphe 5, du règlement antisubventions de base, fondé sur l’exception d’illégalité soulevée à l’encontre de l’article 3, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution no 1238/2013 et de l’article 2, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution no 1239/2013, doit être rejeté.

VII. Sur les dépens

116.

En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi est fondé et que la Cour juge elle-même définitivement le litige, elle statue sur les dépens. En vertu de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Dans ces conditions, le Conseil et la Commission ayant conclu à sa condamnation aux dépens, je suggère à la Cour de condamner Jiangsu, partie qui succombe, aux dépens exposés par le Conseil et la Commission en première instance ainsi que dans la présente procédure de pourvoi.

VIII. Conclusion

117.

À la lumière des considérations qui précèdent, je suggère à la Cour de statuer comme suit :

l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 8 juillet 2020, Jiangsu Seraphim Solar System/Commission (T‑110/17, EU:T:2020:315), est annulé ;

le recours introduit par Jiangsu Seraphim Solar System Co. Ltd devant le Tribunal dans l’affaire T‑110/17 est rejeté ;

Jiangsu Seraphim Solar System est condamnée aux dépens exposés par le Conseil de l’Union européenne et par la Commission européenne en première instance ainsi que dans la procédure de pourvoi.


( 1 ) Langue originale : l’italien.

( 2 ) Ces deux affaires ont été jointes par décision du président de la Cour de justice du 7 janvier 2021.

( 3 ) Règlement d’exécution de la Commission du 7 décembre 2016 retirant l’acceptation de l’engagement de deux producteurs-exportateurs au titre de la décision d’exécution 2013/707/UE confirmant l’acceptation d’un engagement offert dans le cadre des procédures antidumping et antisubventions concernant les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules) originaires ou en provenance de la République populaire de Chine pour la période d’application des mesures définitives (JO 2016, L 333, p. 4).

( 4 ) JO 2016, L 176, p. 21.

( 5 ) JO 2016, L 176, p. 55.

( 6 ) En outre, les dispositions pertinentes des règlements de base sont, en substance, identiques à celles figurant, respectivement, dans le règlement (CE) no 1225/2009 du Conseil, du 30 novembre 2009, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de la Communauté européenne (JO 2009, L 343, p. 51, et rectificatif dans le JO 2016, L 44, p. 20), applicable à la date de l’institution des droits antidumping en question, et dans le règlement no 597/2009 du Conseil, du 11 juin 2009, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet de subventions de la part de pays non membres de la Communauté européenne (JO 2009, L 188, p. 93), applicable à la date de l’institution des droits antisubventions en question. En conséquence, aux fins de l’examen du présent pourvoi, comme dans l’arrêt attaqué, il sera fait référence aux règlements de base, sauf si les règlements no 1225/2009 et no 597/2009 en divergent ou si le contexte l’exige.

( 7 ) Voir références au point 2 de l’arrêt attaqué.

( 8 ) Décision de la Commission du 2 août 2013 portant acceptation d’un engagement offert dans le cadre de la procédure antidumping concernant les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules et wafers) originaires ou en provenance de la République populaire de Chine (JO 2013, L 209, p. 26).

( 9 ) Règlement d’exécution du Conseil du 2 décembre 2013 instituant un droit antidumping définitif et collectant définitivement le droit antidumping provisoire institué sur les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules) originaires ou en provenance de la République populaire de Chine (JO 2013, L 325, p. 1).

( 10 ) Règlement d’exécution du Conseil du 2 décembre 2013 instituant un droit compensateur définitif sur les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules) originaires ou en provenance de la République populaire de Chine (JO 2013, L 325, p. 66).

( 11 ) Voir note 6 des présentes conclusions.

( 12 ) Décision d’exécution de la Commission du 4 décembre 2013 confirmant l’acceptation d’un engagement offert dans le cadre des procédures antidumping et antisubventions concernant les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules) originaires ou en provenance de la République populaire de Chine pour la période d’application des mesures définitives (JO 2013, L 325, p. 214).

( 13 ) Voir, entre autres, arrêt du 28 février 2019, Conseil/Growth Energy et Renewable Fuels Association (C‑465/16 P, EU:C:2019:155, point 69 et jurisprudence citée).

( 14 ) Voir, pour des exemples d’affaires soumises au juge de l’Union concernant des questions liées à l’invalidation de factures, entre autres, arrêts du 2 octobre 2014, Spraylat/ECHA (T‑177/12, EU:T:2014:849, point 21), et du 21 octobre 2021, Wilo Salmson France (C‑80/20, EU:C:2021:870).

( 15 ) Voir considérant 32 et, a contrario, dernière phrase du considérant 33 du règlement litigieux.

( 16 ) Le Tribunal se réfère à l’arrêt du 9 septembre 2010, Usha Martin/Conseil et Commission (T‑119/06, EU:T:2010:369), confirmé sur pourvoi par l’arrêt du 22 novembre 2012, Usha Martin/Conseil et Commission (C‑552/10 P, EU:C:2012:736).

( 17 ) Voir, entre autres, arrêts du 17 septembre 2015, Mory e.a./Commission (C‑33/14 P, EU:C:2015:609, points 55 et 56 ainsi que jurisprudence citée), et du 27 mars 2019, Canadian Solar Emea e.a./Conseil (C‑236/17 P, ci-après l’« arrêt Canadian Solar , EU:C:2019:258, points 91 et 92 ainsi que jurisprudence citée).

( 18 ) En effet, selon une jurisprudence constante, si les motifs d’une décision du Tribunal révèlent une violation du droit de l’Union, mais que le dispositif de celle‑ci apparaît fondé pour d’autres motifs de droit, une telle violation n’est pas de nature à entraîner l’annulation de cette décision et il y a lieu de procéder à une substitution de motifs. Voir, entre autres, arrêt du 11 mai 2017, Dyson/Commission (C‑44/16 P, EU:C:2017:357, point 55 et jurisprudence citée).

( 19 ) Voir point 64 de l’arrêt attaqué.

( 20 ) Arrêts du 9 novembre 2017, SolarWorld/Conseil (C‑205/16 P, ci-après l’« arrêt SolarWorld , EU:C:2017:840), et Canadian Solar, points 91 et 92 ainsi que jurisprudence citée.

( 21 ) Voir arrêts du 6 mars 1979, Simmenthal/Commission (92/78, EU:C:1979:53, point 39), et, en dernier lieu, du 17 décembre 2020, BP/FRA (C‑601/19 P, non publié, EU:C:2020:1048, point 26 et jurisprudence citée).

( 22 ) Voir, entre autres, arrêt du 15 février 2001, Nachi Europe (C‑239/99, EU:C:2001:101, point 37), ainsi que le reste de la jurisprudence citée au point 56 de l’arrêt attaqué.

( 23 ) Voir, s’agissant de la nécessaire différence entre les effets d’une constatation incidente d’illégalité et ceux d’un arrêt d’annulation, les réflexions pertinentes figurant p. 195 dans les conclusions de l’avocat général Trabucchi dans les affaires jointes Kortner e.a./Conseil e.a. (15/73 à 33/73, 52/73, 53/73, 57/73 à 109/73, 116/73, 117/73, 123/73, 132/73 et 135/73 à 137/73, non publiées, EU:C:1973:164).

( 24 ) Voir arrêt SolarWorld, points 44, 55 et 57. La Cour a jugé notamment, au point 46 de cet arrêt, que le législateur de l’Union, lors de l’adoption du règlement d’exécution no 1239/2013, avait mis en place des mesures de défense commerciale constituant un ensemble ou un « paquet ». En effet, ledit règlement impose deux mesures distinctes et complémentaires, qui visent à atteindre un résultat commun, à savoir l’élimination de l’effet préjudiciable sur l’industrie de l’Union de la subvention chinoise relative aux produits en question tout en préservant l’intérêt de cette industrie.

( 25 ) Voir arrêt SolarWorld, point 38 et jurisprudence citée.

( 26 ) Voir arrêt Canadian Solar, point 64.

( 27 ) Voir, entre autres, arrêts du 17 septembre 2015, Mory e.a./Commission (C‑33/14 P, EU:C:2015:609, point 56), et Canadian Solar, points 91 et 92 ainsi que jurisprudence citée.

( 28 ) Dans l’arrêt Canadian Solar précisément, la Cour a jugé qu’un moyen d’annulation est irrecevable au motif que l’intérêt à agir fait défaut lorsque, à supposer qu’il soit fondé, l’annulation de l’acte attaqué sur la base de ce moyen ne serait pas de nature à donner satisfaction au requérant. Voir arrêt Canadian Solar, point 93 et jurisprudence citée.

( 29 ) Voir arrêt SolarWorld, point 38 et jurisprudence citée.

( 30 ) Jiangsu souligne que les arrêts SolarWorld et Canadian Solar portaient d’une manière générale sur l’article 3 du règlement d’exécution no 1238/2013 ainsi que sur l’article 2 du règlement d’exécution no 1239/2013, et non pas spécifiquement sur les dispositions figurant aux paragraphes 2 de ces articles, lesquels paragraphes seraient toutefois détachables du reste de l’article. Les institutions contestent cette lecture des dispositions en question.

( 31 ) Voir, à cet égard, entre autres, arrêts SolarWorld, point 38 et jurisprudence citée, ainsi que du 16 février 2022, Hongrie/Parlement et Conseil (C‑156/21, EU:C:2022:97, point 293 et jurisprudence citée).

( 32 ) Voir, en ce sens, arrêt du 28 juin 1972, Jamet/Commission (37/71, EU:C:1972:57, points 11 et 12), ainsi que conclusions de l’avocat général Bot dans l’affaire Espagne/Conseil (C‑442/04, EU:C:2008:58, point 83).

( 33 ) Voir, à cet égard, outre la note 23 des présentes conclusions, conclusions de l’avocat général Bot dans l’affaire Espagne/Conseil (C‑442/04, EU:C:2008:58, point 83).

( 34 ) Voir arrêt du 6 novembre 2018, Scuola Elementare Maria Montessori/Commission, Commission/Scuola Elementare Maria Montessori et Commission/Ferracci (C‑622/16 P à C‑624/16 P, EU:C:2018:873, point 29 et jurisprudence citée).

( 35 ) Voir points 119 et 130 de l’arrêt attaqué.

( 36 ) Voir points 132 à 137 de l’arrêt attaqué.

( 37 ) Règlement du Conseil du 8 mars 2004 modifiant le règlement (CE) no 384/96 relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de la Communauté européenne et le règlement (CE) no 2026/97 relatif à la défense contre les importations qui font l’objet de subventions de la part de pays non membres de la Communauté européenne (JO 2004, L 77, p. 12).

( 38 ) Voir deuxième moyen du pourvoi de la Commission et première partie du second moyen du pourvoi du Conseil, dirigés contre les points 119, 129 à 132, 138, 140 à 147 et 151 de l’arrêt attaqué.

( 39 ) Les institutions se réfèrent aux arrêts du 15 mars 2018, Deichmann (C‑256/16, EU:C:2018:187, point 78), et du 19 juin 2019, C & J Clark International (C‑612/16, non publié, EU:C:2019:508, points 52 à 58).

( 40 ) Voir troisième moyen du pourvoi dans l’affaire C‑439/20, dirigé contre les points 119, 130 à 138, 140 à 147 et 151 de l’arrêt attaqué.

( 41 ) L’engagement est donc en principe accepté avant que soit imposé le droit antidumping ou compensateur définitif.

( 42 ) Mise en italique par mes soins.

( 43 ) En réalité, seul l’article 8, paragraphe 9, du règlement antidumping de base emploie l’adverbe « automatiquement ».

( 44 ) Voir, entre autres, arrêt du 2 décembre 2021, Commission et GMB Glasmanufaktur Brandenburg/Xinyi PV Products (Anhui) Holdings (C‑884/19 P et C‑888/19 P, EU:C:2021:973, point 70 et jurisprudence citée).

( 45 ) Voir, en dernier lieu, arrêt du 2 juin 2022, SR (Frais de traduction dans une procédure civile) (C‑196/21, EU:C:2022:427, point 33 et jurisprudence citée).

( 46 ) Ce considérant énonce : « L’article 8, paragraphe 9, du règlement de base antidumping [précédemment en vigueur] dispose, entre autres, qu’en cas de retrait d’engagements par une partie, un droit définitif doit être institué conformément à l’article 9 sur la base des faits établis dans le contexte de l’enquête ayant abouti aux engagements. Cette disposition entraîne une double procédure qui prend du temps et associe une décision de la Commission retirant l’acceptation de l’engagement à un règlement du Conseil réinstituant le droit. Cette disposition ne laissant aucun pouvoir d’appréciation au Conseil en ce qui concerne l’institution du droit ou son niveau, en cas de violation ou de retrait d’un engagement, il est jugé approprié de modifier les dispositions de l’article 8, paragraphes 1, 5 et 9, afin de clarifier les compétences de la Commission et de permettre le retrait d’un engagement et l’application du droit au moyen d’un seul et unique acte juridique ». J’estime en conséquence que c’est à tort que le Tribunal, au point 144 de l’arrêt attaqué, a rejeté comme non pertinentes les références à ce considérant.

( 47 ) Voir arrêt attaqué, points 130, 137 et 141.

( 48 ) Voir arrêt attaqué, point 130.

( 49 ) Voir arrêt attaqué, point 137.

( 50 ) Voir point 151 de l’arrêt attaqué, qui se réfère au point 125 de cet arrêt.

( 51 ) Voir, concernant l’article 8 du règlement antidumping de base, arrêt du 22 novembre 2012, Usha Martin/Conseil et Commission (C‑552/10 P, EU:C:2012:736, point 36, en relation avec le point 24).

( 52 ) Voir arrêt du 22 novembre 2012, Usha Martin/Conseil et Commission (C‑552/10 P, EU:C:2012:736, point 32).

( 53 ) Voir, concernant l’article 14, paragraphe 1, du règlement antidumping de base, arrêt du 15 mars 2018, Deichmann (C‑256/16, EU:C:2018:187, points 57 à 60).

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