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Document 62019CJ0736

Arrêt de la Cour (sixième chambre) du 15 avril 2021.
ZS « Plaukti ».
Demande de décision préjudicielle, introduite par l'Augstākā tiesa (Senāts).
Renvoi préjudiciel – Agriculture – Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) – Règlement (CE) no 1698/2005 – Règlement (UE) no 65/2011 – Article 16, paragraphe 5, troisième alinéa – Règlement (CE) no 73/2009 – Articles 4 et 6 – Règlement (CE) no 1122/2009 – Soutien au développement rural – Paiements agroenvironnementaux – Aide au maintien de la biodiversité dans les prairies – Non-respect des conditions d’octroi de ces paiements – Fauchage prématuré – Réduction et exclusion desdits paiements – Normes obligatoires – Exigences r�glementaires en matière de gestion – Exigences minimales pour de bonnes conditions agricoles et environnementales – Engagements qui dépassent les normes obligatoires, les exigences minimales et les autres exigences obligatoires appropriées établies par la législation nationale.
Affaire C-736/19.

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2021:282

 ARRÊT DE LA COUR (sixième chambre)

15 avril 2021 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Agriculture – Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) – Règlement (CE) no 1698/2005 – Règlement (UE) no 65/2011 – Article 16, paragraphe 5, troisième alinéa – Règlement (CE) no 73/2009 – Articles 4 et 6 – Règlement (CE) no 1122/2009 – Soutien au développement rural – Paiements agroenvironnementaux – Aide au maintien de la biodiversité dans les prairies – Non-respect des conditions d’octroi de ces paiements – Fauchage prématuré – Réduction et exclusion desdits paiements – Normes obligatoires – Exigences réglementaires en matière de gestion – Exigences minimales pour de bonnes conditions agricoles et environnementales – Engagements qui dépassent les normes obligatoires, les exigences minimales et les autres exigences obligatoires appropriées établies par la législation nationale »

Dans l’affaire C‑736/19,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Augstākā tiesa (Senāts) (Cour suprême, Lettonie), par décision du 30 septembre 2019, parvenue à la Cour le 7 octobre 2019, dans la procédure

ZS « Plaukti »

en présence de :

Lauku atbalsta dienests,

LA COUR (sixième chambre),

composée de M. L. Bay Larsen (rapporteur), président de chambre, Mme C. Toader et M. M. Safjan, juges,

avocat général : Mme J. Kokott,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour le gouvernement letton, initialement par Mmes L. Juškeviča, V. Soņeca et K. Pommere, puis par Mme K. Pommere, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par MM. M. Kaduczak et A. Sauka, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocate générale entendue, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 16, paragraphe 5, troisième alinéa, et l’article 18, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) no 65/2011 de la Commission, du 27 janvier 2011, portant modalités d’application du règlement (CE) no 1698/2005 du Conseil en ce qui concerne l’application de procédures de contrôle et de conditionnalité pour les mesures de soutien au développement rural (JO 2011, L 25, p. 8, et rectificatif JO 2011, L 201, p. 20), de l’article 39, paragraphe 3, du règlement (CE) no 1698/2005 du Conseil, du 20 septembre 2005, concernant le soutien au développement rural par le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) (JO 2005, L 277, p. 1 ), ainsi que des articles 4 et 6 du règlement (CE) no 73/2009 du Conseil, du 19 janvier 2009, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs, modifiant les règlements (CE) no 1290/2005, (CE) no 247/2006 et (CE) no 378/2007, et abrogeant le règlement (CE) no 1782/2003 (JO 2009, L 30, p. 16 ).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant ZS « Plaukti » (ci-après « Plaukti »), une exploitation agricole établie en Lettonie, au Lauku atbalsta dienests (service de soutien au monde rural, Lettonie), au sujet du refus de ce dernier de verser une aide au maintien de la biodiversité dans les prairies (ci‑après l’« aide au maintien de la biodiversité dans les prairies »).

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

Le règlement no 1698/2005

3

Le considérant 35 du règlement no 1698/2005 énonçait :

« Les paiements agroenvironnementaux devraient continuer a' jouer un rôle de premier plan pour contribuer au développement durable des zones rurales et satisfaire a' la demande croissante de la société en matière de services écologiques. Ils devraient aussi continuer a' encourager les agriculteurs et autres gestionnaires de terres a' exercer une véritable fonction au service de l’ensemble de la société en introduisant ou en maintenant des méthodes de production agricole compatibles avec la protection et l’amélioration de l’environnement, des paysages et de leurs caractéristiques, des ressources naturelles, des sols et de la diversité génétique. [...] »

4

L’article 36 de ce règlement fait partie du titre IV, chapitre I, section 2, axe 2, de celui-ci, laquelle section est intitulée « Amélioration de l’environnement et de l’espace rural ». Cet article disposait :

« L’aide prévue au titre de la présente section concerne :

a)

les mesures axées sur l’utilisation durable des terres agricoles grâce à :

[...]

iv) des paiements agroenvironnementaux,

[...] »

5

L’article 39, paragraphes 1 à 3, dudit règlement disposait :

« 1.   Les États membres accordent l’aide prévue à l’article 36, point a) iv), sur l’ensemble de leur territoire, en fonction de leurs besoins particuliers.

2.   Les paiements agroenvironnementaux sont accordés aux agriculteurs qui prennent volontairement des engagements en faveur de l’agroenvironnement. [...]

3.   Les paiements agroenvironnementaux ne concernent que les engagements qui dépassent les normes obligatoires établies conformément aux articles 4 et 5 du règlement (CE) no 1782/2003[, du Conseil, du 29 septembre 2003, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs et modifiant les règlements (CEE) no 2019/93, (CE) no 1452/2001, (CE) no 1453/2001, (CE) no 1454/2001, (CE) no 1868/94, (CE) no 1251/1999, (CE) no 1254/1999, (CE) no 1673/2000, (CEE) no 2358/71 et (CE) no 2529/2001 (JO 2005, L 277, p. 1)] et aux annexes III et IV dudit règlement, ainsi que les exigences minimales pour les engrais et les produits phytosanitaires et les autres exigences obligatoires appropriées établies par la législation nationale et indiquées dans le programme.

Ces engagements sont pris en général pour une durée de cinq à sept ans. Le cas échéant et lorsque les circonstances le justifient, une période plus longue peut être fixée selon la procédure visée à l’article 90, paragraphe 2, pour certains types d’engagements particuliers. »

Le règlement no 65/2011

6

L’article 6, paragraphe 2, du règlement no 65/2011 disposait :

« Aux fins du présent titre, on entend par :

a)

“mesure ‘surfaces’ ” : une mesure ou sous-mesure pour laquelle l’aide est fondée sur la taille de la surface déclarée ;

[...]

c)

“superficie déterminée” : la superficie des terrains ou parcelles faisant l’objet d’une demande d’aide, déterminée conformément aux dispositions de l’article 11 et de l’article 15, paragraphes 3, 4 et 5, du présent règlement.

[...] »

7

L’article 16 de ce règlement, intitulé « Réductions et exclusions en ce qui concerne la taille des superficies », disposait, à son paragraphe 2, à son paragraphe 3, premier et deuxième alinéa, et à son paragraphe 5, premier, deuxième et troisième alinéas :

« 2.   Aux fins du présent article, les superficies déclarées par un bénéficiaire qui font l’objet du même taux d’aide au titre d’une mesure “surfaces” sont considérées comme constituant un groupe de cultures. [...]

3.   Lorsqu’il est établi que la superficie déterminée d’un groupe de cultures est supérieure à la superficie déclarée dans la demande de paiement, c’est la superficie déclarée qui est prise en compte pour le calcul de l’aide.

Si la superficie déclarée dans la demande de paiement est supérieure à la superficie déterminée pour ce groupe de cultures, l’aide est calculée sur la base de la superficie déterminée pour ce groupe de cultures. [...]

[...]

5.   Dans le cas visé au paragraphe 3, deuxième alinéa, le montant de l’aide est calculé sur la base de la superficie déterminée, réduite du double de la différence constatée, si celle-ci dépasse 3 % ou deux hectares, mais n’excède pas 20 % de la superficie déterminée.

Si la différence constatée est supérieure à 20 % de la surface déterminée, aucune aide n’est accordée pour le groupe de cultures considéré.

Si la différence est supérieure à 50 %, le bénéficiaire est exclu une nouvelle fois du bénéfice de l’aide à hauteur d’un montant correspondant à la différence entre la superficie déclarée dans la demande de paiement et la superficie déterminée. »

8

L’article 18, paragraphe 1, sous a), dudit règlement énonçait :

« 1.   L’aide demandée est réduite ou refusée lorsque les obligations et critères suivants ne sont pas remplis :

a)

pour les mesures visées à l’article 36, points a) iv) et a) v) ainsi qu’à l’article 36, point b) v), du règlement [no 1698/2005], les normes obligatoires appropriées ainsi que les exigences minimales appropriées pour les engrais et les produits phytosanitaires, les autres exigences obligatoires appropriées visées à l’article 39, paragraphe 3, à l’article 40, paragraphe 2, et à l’article 47, paragraphe 1, du règlement [no 1698/2005] et les engagements qui vont au-delà de ces normes et exigences ».

9

L’article 22 du même règlement prévoyait :

« Lorsque plusieurs réductions sont à effectuer, leur ordre d’application est le suivant :

tout d’abord, conformément à l’article 16, paragraphes 5 et 6, et à l’article 17, paragraphes 4 et 5, du présent règlement,

ensuite, conformément à l’article 18 du présent règlement,

[...] »

Le règlement no 73/2009

10

L’article 4, paragraphe 1, du règlement no 73/2009 prévoyait :

« Tout agriculteur percevant des paiements directs est tenu de respecter les exigences réglementaires en matière de gestion énumérées à l’annexe II, ainsi que les bonnes conditions agricoles et environnementales visées à l’article 6.

Les obligations visées au premier alinéa ne s’appliquent qu’en ce qui concerne l’activité agricole de l’agriculteur ou la surface agricole de l’exploitation. »

11

L’article 6, paragraphe 1, de ce règlement prévoyait :

« Les États membres veillent à ce que toutes les terres agricoles, en particulier celles qui ne sont plus exploitées à des fins de production, soient maintenues dans de bonnes conditions agricoles et environnementales. Les États membres définissent, au niveau national ou régional, des exigences minimales pour les bonnes conditions agricoles et environnementales sur la base du cadre fixé à l’annexe III, en tenant compte des caractéristiques des zones concernées, y compris des conditions pédologiques et climatiques, des modes d’exploitation existants, de l’utilisation des terres, de la rotation des cultures, des pratiques agricoles et de la structure des exploitations. Les États membres ne peuvent pas définir des exigences minimales qui ne sont pas prévues dans ce cadre. »

12

Les annexes II et III dudit règlement précisaient les exigences réglementaires ainsi que les bonnes conditions agricoles et environnementales visées, respectivement, aux articles 5 et 6 du même règlement.

Le règlement (CE) no 1122/2009

13

L’article 71, paragraphe 1, du règlement (CE) no 1122/2009 de la Commission, du 30 novembre 2009, fixant les modalités d’application du règlement no 73/2009 en ce qui concerne la conditionnalité, la modulation et le système intégré de gestion et de contrôle dans le cadre des régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs prévus par ce règlement ainsi que les modalités d’application du règlement (CE) no 1234/2007 du Conseil en ce qui concerne la conditionnalité dans le cadre du régime d’aide prévu pour le secteur vitivinicole (JO 2009, L 316, p. 65), prévoyait :

« Sans préjudice de l’article 77, si un cas de non-conformité constatée est dû à la négligence de l’agriculteur, une réduction est appliquée. En règle générale, cette réduction correspond à 3 % du montant total visé à l’article 70, paragraphe 8.

Toutefois, l’organisme payeur peut, sur la base des résultats de l’évaluation fournis par l’autorité de contrôle compétente dans la partie “évaluation” du rapport de contrôle conformément à l’article 54, paragraphe 1, point c), décider de diminuer ce pourcentage à 1 % du montant total ou de l’augmenter à 5 % du montant total ou, dans les cas visés à l’article 54, paragraphe 1, point c), second alinéa, de n’imposer aucune réduction. »

Le droit letton

Le décret no 295

14

Le Ministru kabineta Noteikumi Nr. 295 par valsts un Eiropas Savienības lauku attīstības atbalsta piešķiršanu, administrēšanu un uzraudzību vides un lauku ainavas uzlabošanai (décret no 295 du conseil des ministres relatif à l’octroi, à la gestion et au contrôle de l’aide de l’État et de l’Union européenne au développement rural aux fins de l’amélioration de l’environnement et du paysage rural), du 23 mars 2010 (Latvijas Vēstnesis, 2010, no 50), dans sa version applicable au litige au principal (ci-après le « décret no 295 »), qui était en vigueur jusqu’au 28 mars 2015, disposait, à son article 1er :

« Le présent décret établit les modalités de l’octroi, de la gestion et du contrôle des aides de l’État et de l’Union européenne pour le développement rural, notamment à l’appui des mesures d’amélioration de l’environnement et de l’espace naturel qui sont mises en œuvre conformément au règlement no 1698/2005. »

15

L’article 38 du décret no 295 prévoyait :

« Un candidat peut obtenir une aide pour des terres agricoles dédiées à l’une des cultures éligibles figurant dans la liste de l’annexe 2 du présent décret, qui sont définies comme des prairies à haute valeur naturelle, dans la mesure où il remplit les conditions suivantes :

[...]

38.3. les prairies à haute valeur naturelle sont pâturées et fauchées chaque année et un certain nombre d’animaux d’élevage est maintenu, ce nombre représentant, après conversion en unités de gros bétail, une densité de cheptel de 0,4 à 0,9 unité par hectare, ou ces prairies sont fauchées au moins une fois pendant la période allant du 1er août au 15 septembre. L’herbe fauchée est récoltée et retirée du champ ou broyée. »

16

L’annexe 9, section 4.3 (Maintien de la biodiversité dans les prairies), point 3, de ce décret disposait :

« Si le candidat à l’aide n’a pas fauché la superficie faisant l’objet de la demande entre le 1er août et le 15 septembre, après la première violation, le montant de l’aide pour cette superficie n’est pas versé pour l’année en cours. En cas de répétition de la violation, l’ensemble des engagements sont interrompus et le candidat à l’aide rembourse au service de soutien au monde rural la somme totale des aides perçues précédemment pour la superficie concernée. »

Le décret no 139

17

Le Ministru kabineta Noteikumi Nr. 139 Kārtība, kādā tiek piešķirts valsts un Eiropas Savienības atbalsts lauksaimniecībai tiešā atbalsta shēmu ietvaros (décret no 139 du conseil des ministres relatif à la procédure d’octroi des aides de l’État et de l’Union européenne à l’agriculture dans le cadre des régimes de soutien direct), du 12 mars 2013 (Latvijas Vēstnesis, 2013, no 65), dans sa version applicable au litige au principal (ci-après le « décret no 139 »), prévoyait, à son article 1er :

« Le présent décret établit les modalités de l’octroi des aides de l’État et de l’Union européenne destinées à l’agriculture dans le cadre des régimes de soutien direct, conformément au règlement no 73/2009. »

18

L’article 18 du décret no 139 disposait :

« Si un agriculteur demande, pour une superficie déterminée, à la fois le paiement de l’aide visée au point 2.1 du présent règlement (paiement unique à la surface) et celui d’une aide au titre de la mesure “Paiements agroenvironnementaux” conformément à la réglementation en matière d’octroi, de gestion et de contrôle des aides de l’État et de l’Union européenne pour le développement rural et l’amélioration de l’environnement et de l’espace naturel :

[...]

18.2. nonobstant les conditions énoncées au point 15.4 du présent décret, si l’agriculteur demande une aide au titre de la sous-mesure “Maintien de la biodiversité dans les prairies” ou de la sous-mesure “Mise en place de bandes tampon” :

18.2.1. au moins une fois par an, les prairies et pâturages permanents ainsi que les terres arables doivent être fauchés et l’herbe doit être récoltée ou broyée (pendant la période allant du 1er août au 15 septembre de l’année en cours) ou ces prairies et pâturages doivent être pâturés et fauchés. »

19

L’article 19 de ce décret énonçait :

« Si un agriculteur ne respecte pas l’une des bonnes conditions agricoles et environnementales visées aux articles 15 et 18 du présent décret, le montant de l’aide mentionnée à l’article 2 du présent décret (à l’exception du point 2.6 de ce dernier) est réduit conformément aux articles 70, 71 et 72 du règlement no 1122/2009. »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

20

Le 13 mai 2014, Plaukti a déposé, auprès du service de soutien au monde rural, pour l’année 2014, une demande de paiement unique à la surface ainsi qu’une demande de paiement agroenvironnemental au titre de l’aide au maintien de la biodiversité dans les prairies concernant deux champs d’une superficie totale de 18,26 ha.

21

À la suite d’un contrôle sur place partiel, effectué par le service de soutien au monde rural le 31 juillet 2014, ce dernier a constaté que les champs concernés avaient été fauchés avant le 1er août 2014, en violation des conditions applicables à l’octroi de l’aide au maintien de la biodiversité dans les prairies.

22

En conséquence, par décision du 27 juin 2015, le service de soutien au monde rural a refusé à Plaukti, pour toute l’année 2014, s’agissant des 18,26 ha concernés, le bénéfice de cette aide. Ce service a exclu Plaukti du bénéfice de ladite aide, à hauteur d’un montant de 2245,98 euros, et a ordonné que ce montant soit imputé sur tout paiement qui serait perçu au cours des trois années civiles à venir. Par ailleurs, une réduction de 1 % de la même aide a été appliquée pour violation des bonnes conditions agricoles et environnementales.

23

Plaukti a contesté cette décision devant l’administratīvā rajona tiesa (tribunal administratif de district, Lettonie), puis devant l’Administratīvā apgabaltiesa (Cour administrative régionale, Lettonie).

24

À la suite du rejet de son recours en première instance comme de son appel, Plaukti s’est pourvue en cassation devant l’Augstākā tiesa (Senāts) (Cour suprême, Lettonie).

25

La juridiction de renvoi considère que, dès lors qu’il est constant que les champs concernés ont été fauchés avant le 1er août, il y a lieu d’appliquer, conformément à l’article 18, paragraphe 1, sous a), du règlement no 65/2011, la disposition nationale selon laquelle, pour l’année en cours, aucune aide au maintien de la biodiversité dans les prairies n’est versée au titre des superficies correspondantes.

26

Cette juridiction s’interroge toutefois sur la proportionnalité des autres sanctions infligées par le service de soutien au monde rural, notamment, d’une part, de l’exclusion de la requérante au principal du bénéfice de l’aide au maintien de la biodiversité dans les prairies, à hauteur d’un montant correspondant à la différence entre la superficie déclarée dans la demande de paiement et la superficie déterminée, c’est-à-dire une obligation de réparation pour trois années civiles, conformément à l’article 16, paragraphe 5, troisième alinéa, du règlement no 65/2011 et, d’autre part, la réduction de 1 % de tous les versements d’aide à cette requérante, conformément à l’article 71, paragraphe 1, du règlement no 1122/2009 pour non-respect des bonnes conditions agricoles et environnementales, dans la mesure où aucune modification du groupe de cultures n’a été constatée. En particulier, ladite juridiction se demande si l’article 16, paragraphe 5, troisième alinéa, du règlement no 65/2011 est applicable dans la mesure où, en l’occurrence, si Plaukti ne remplissait pas les conditions d’octroi de l’aide au maintien de la biodiversité dans les prairies, aucune modification du groupe de cultures n’a été constatée.

27

De même, la juridiction de renvoi se demande si, dans le cas où il est constaté que la superficie du groupe de cultures déclarée dans la demande de paiement ne correspond pas à la superficie déterminée, à savoir la superficie cultivée, constatée lors du contrôle sur place effectué, il y a lieu d’appliquer simultanément la sanction prévue à l’article 18, paragraphe 1, sous a), du règlement no 65/2011 et celle prévue à l’article 16, paragraphe 5, troisième alinéa, de ce règlement. À cet égard, cette juridiction considère que l’application de deux sanctions pour une seule violation pourrait être contraire au principe de proportionnalité.

28

La juridiction de renvoi éprouve également des doutes quant à la question de savoir si l’exigence énoncée au point 18.2.1 du décret no 139 est conforme aux exigences posées dans les dispositions combinées des articles 4 et 6 du règlement no 73/2009 en matière de bonnes conditions agricoles et environnementales et à l’article 39, paragraphe 3, du règlement no 1698/2005 ayant trait aux engagements agroenvironnementaux.

29

Dans ces conditions, l’Augstākā tiesa (Senāts) (Cour suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

L’article 16, paragraphe 5, troisième alinéa, du [règlement no 65/2011] est-il applicable dès lors que la partie requérante n’a pas rempli les conditions de fauchage de la superficie pour laquelle l’aide au maintien de la biodiversité dans les prairies a été demandée (cette exigence allant au-delà des normes obligatoires prévues à l’article 39, paragraphe 3, du règlement no 1698/2005), sachant qu’aucune modification du groupe de cultures n’a été constatée ?

2)

Une violation peut-elle donner lieu à la fois à la sanction prévue à l’article 16, paragraphe 5, troisième alinéa, du règlement no 65/2011 et à celle prévue à l’article 18, paragraphe 1, sous a), de ce règlement ?

3)

Les dispositions combinées des articles 4 et 6 du [règlement no 73/2009] et de l’article 39, paragraphe 3, du [règlement no 1698/2005] autorisent-elles une réglementation nationale selon laquelle une seule et même exigence peut constituer à la fois une exigence (norme) minimale et une exigence dépassant les exigences minimales (condition de versement d’une aide agroenvironnementale) ? »

Sur les questions préjudicielles

Sur la première question

30

Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 16, paragraphe 5, troisième alinéa, du règlement no 65/2011 doit être interprété en ce sens qu’il est applicable dans le cas où le demandeur d’une aide n’a pas respecté les engagements agroenvironnementaux relatifs aux conditions de fauchage, sans qu’aucune modification du groupe de cultures concerné ait été constatée.

31

À cet égard, il convient de relever que, conformément à l’article 36, sous a), iv), du règlement no 1698/2005, l’aide prévue au titre du titre IV, chapitre I, section 2, axe 2, de ce règlement, intitulée « Amélioration de l’environnement et de l’espace rural », concerne les mesures axées sur l’utilisation durable des terres agricoles grâce à des « paiements agroenvironnementaux ».

32

En outre, il ressort de l’article 39, paragraphes 1 et 2, dudit règlement que les États membres accordent l’aide prévue à l’article 36, sous a), iv), de celui-ci sur l’ensemble de leur territoire, en fonction de leurs besoins particuliers. Les paiements agroenvironnementaux sont accordés aux agriculteurs qui prennent volontairement des engagements en faveur de l’agroenvironnement.

33

L’article 18, paragraphe 1, sous a), du règlement no 65/2011 dispose que l’aide demandée est réduite ou refusée lorsque notamment pour les mesures visées à l’article 36, sous a), iv) du règlement no 1698/2005, les obligations et critères tels que les normes obligatoires appropriées, les autres exigences obligatoires appropriées visées à l’article 39, paragraphe 3, de ce dernier règlement et les engagements qui vont au-delà de ces normes et exigences ne sont pas remplis.

34

Il en découle que le non-respect des engagements pris en faveur de l’agroenvironnement entraîne la réduction ou le refus des paiements agroenvironnementaux.

35

En revanche, l’article 16 du règlement no 65/2011 concerne les réductions et exclusions relatives à la taille des superficies agricoles. Il convient de rappeler à cet égard que, conformément à l’article 16, paragraphe 2 de ce règlement, sont considérées comme constituant un groupe de cultures les superficies déclarées par un bénéficiaire qui font l’objet du même taux d’aide au titre d’une mesure « surfaces ». En vertu de l’article 16, paragraphe 3, deuxième alinéa, dudit règlement, si la superficie déclarée dans la demande de paiement est supérieure à la superficie déterminée pour le groupe de cultures concerné, l’aide est calculée sur la base de la superficie déterminée pour ce groupe de cultures. En vertu de l’article 16, paragraphe 5, troisième alinéa, du même règlement, si la différence entre la superficie déclarée dans la demande de paiement et la superficie déterminée lors du contrôle sur place effectué est supérieure à 50 %, le bénéficiaire est exclu une nouvelle fois du bénéfice de l’aide à hauteur d’un montant correspondant à cette différence.

36

En l’occurrence, il ressort de la décision de renvoi que, en raison d’un fauchage prématuré, l’un des critères d’octroi de l’aide au maintien de la biodiversité dans les prairies n’avait pas été respecté. Le service de soutien au monde rural a dès lors considéré que les conditions d’octroi de cette aide n’avaient pas été respectées dans l’ensemble de la superficie déclarée et qu’il convenait de conclure que la différence entre la superficie déclarée dans la demande de paiement et la superficie déterminée lors du contrôle sur place effectué était de 100 %. Ainsi, ce service a estimé que la surface déclarée excédait la surface déterminée à hauteur de 100 %, ce qui justifiait, selon ledit service, l’exclusion de Plaukti du bénéfice de l’aide concernée.

37

Or, ainsi que l’indique la juridiction de renvoi, la seule violation constatée par le service de soutien au monde rural au titre de la période de référence est un fauchage prématuré, sans qu’aucune modification du groupe de cultures ait été constatée. Dans ces circonstances, il convient de considérer que le fait pour Plaukti d’avoir fauché la superficie concernée avant la date prévue à cet effet ne signifie pas pour autant que le groupe de cultures déclaré ait été modifié de manière à justifier l’exclusion de l’intéressée du bénéfice de l’aide, en application de l’article 16, paragraphe 5, troisième alinéa, du règlement no 65/2011.

38

Cette interprétation de l’article 16, paragraphe 5, troisième alinéa, du règlement no 65/2011 est conforme à l’objectif des paiements agroenvironnementaux, lesquels, ainsi qu’il résulte du considérant 35 du règlement no 1698/2005, devraient continuer a' jouer un rôle de premier plan pour contribuer au développement durable des zones rurales et satisfaire a' la demande croissante de la société en matière de services écologiques.

39

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la première question posée que l’article 16, paragraphe 5, troisième alinéa, du règlement no 65/2011 doit être interprété en ce sens qu’il n’est pas applicable dans le cas où le demandeur d’une aide n’a pas respecté les engagements agroenvironnementaux relatifs aux conditions de fauchage, sans qu’aucune modification de groupe de cultures concerné ait été constatée.

Sur la deuxième question

40

Compte tenu de la réponse apportée à la première question posée, il n’y a pas lieu de répondre à la deuxième question posée.

Sur la troisième question

41

Par sa troisième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les articles 4 et 6 du règlement no 73/2009, lus en combinaison avec l’article 39, paragraphe 3, du règlement no 1698/2005, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale selon laquelle une seule et même exigence peut constituer à la fois une exigence minimale en matière de bonnes conditions agricoles et environnementales et une exigence allant au-delà de ces exigences minimales, à savoir une condition d’octroi relative aux paiements agroenvironnementaux.

42

Il convient de rappeler, tout d’abord, que, en vertu de l’article 4 du règlement no 73/2009, les agriculteurs percevant des paiements directs sont tenus de respecter certaines exigences réglementaires en matière de gestion ainsi que les bonnes conditions agricoles et environnementales visées a' l’article 6 de ce règlement.

43

Ce dernier article impose aux États membres de veiller à ce que toutes les terres agricoles soient maintenues dans de bonnes conditions agricoles et environnementales. À cet égard, les États membres doivent définir des exigences minimales pour les bonnes conditions agricoles et environnementales sur la base du cadre fixé à l’annexe III dudit règlement et ne peuvent définir d’exigences minimales qui ne sont pas prévues dans ce cadre.

44

En vertu de l’article 39, paragraphe 3, du règlement no 1698/2005, les paiements agroenvironnementaux ne concernent que les engagements qui notamment dépassent les normes obligatoires établies conformément aux articles 4 et 5 du règlement no 1782/2003 et aux annexes III et IV de ce dernier, reprises aux articles 4 et 6 du règlement no 73/2009 et aux annexes II et III de ce dernier. L’article 39, paragraphe 3, du règlement no 1698/2005 vise ainsi à garantir que les paiements concernés ne sont accordés que pour des activités et des pratiques qui répondent à des objectifs environnementaux plus élevés que les normes obligatoires telles que les exigences minimales en matière de bonnes conditions agricoles et environnementales.

45

Il convient de rappeler, ensuite, que, ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi, le point 38.3 du décret no 295 met en œuvre, notamment, les exigences ayant trait aux paiements agroenvironnementaux. Ce point prévoit en particulier qu’un candidat peut obtenir une aide pour des prairies à haute valeur naturelle, dans la mesure où ces prairies ont été fauchées au moins une fois pendant la période allant du 1er août au 15 septembre.

46

Selon les indications fournies par la juridiction de renvoi, les règles de fauchage prévues dans le droit letton constituent à la fois des exigences minimales et des exigences dépassant les exigences minimales, conformément aux articles 4 et 6 du règlement no 73/2009.

47

Or, d’une part, les engagements pris en faveur de l’agroenvironnement en application de l’article 39 du règlement no 1698/2005 doivent dépasser les exigences minimales en matière de bonnes conditions agricoles et environnementales décrites aux articles 4 et 6 du règlement no 73/2009. D’autre part, ainsi qu’il est rappelé au point 43 du présent arrêt, les États membres ne peuvent définir des exigences minimales qui ne sont pas prévues dans le cadre de l’annexe III de ce dernier règlement.

48

Ainsi, aux fins de l’appréciation du respect des exigences minimales en matière de bonnes conditions agricoles et environnementales issues des articles 4 et 6 du règlement no 73/2009, il convient de s’assurer que celles-ci ont été valablement définies sur la base du cadre fixé à l’annexe III de ce règlement. Si tel est le cas, le non-respect d’une telle exigence peut donner lieu à des réductions en vertu de l’article 71, paragraphe 1, du règlement no 1122/2009.

49

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la troisième question posée que les articles 4 et 6 du règlement no 73/2009, lus en combinaison avec l’article 39, paragraphe 3, du règlement no 1698/2005, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale selon laquelle une seule et même exigence peut constituer à la fois une exigence minimale en matière de bonnes conditions agricoles et environnementales et une exigence allant au-delà de ces exigences minimales, à savoir une condition d’octroi relative aux paiements agroenvironnementaux.

Sur les dépens

50

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) dit pour droit :

 

1)

L’article 16, paragraphe 5, troisième alinéa, du règlement (UE) no 65/2011 de la Commission, du 27 janvier 2011, portant modalités d’application du règlement (CE) no 1698/2005 du Conseil en ce qui concerne l’application de procédures de contrôle et de conditionnalité pour les mesures de soutien au développement rural, doit être interprété en ce sens qu’il n’est pas applicable dans le cas où le demandeur d’une aide n’a pas respecté les engagements agroenvironnementaux relatifs aux conditions de fauchage, sans qu’aucune modification de groupe de cultures concerné ait été constatée.

 

2)

Les articles 4 et 6 du règlement (CE) no 73/2009 du Conseil, du 19 janvier 2009, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs, modifiant les règlements (CE) no 1290/2005, (CE) no 247/2006 et (CE) no 378/2007, et abrogeant le règlement (CE) no 1782/2003, lus en combinaison avec l’article 39, paragraphe 3, du règlement (CE) no 1698/2005 du Conseil, du 20 septembre 2005, concernant le soutien au développement rural par le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader), doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale selon laquelle une seule et même exigence peut constituer à la fois une exigence minimale en matière de bonnes conditions agricoles et environnementales et une exigence allant au-delà de ces exigences minimales, à savoir une condition d’octroi relative aux paiements agroenvironnementaux.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : le letton.

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