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Document 62019CC0948

Conclusions de l'avocat général M. E. Tanchev, présentées le 15 juillet 2021.
UAB « Manpower Lit » contre E.S. e.a.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le Lietuvos Aukščiausiasis Teismas.
Renvoi préjudiciel – Politique sociale – Travail intérimaire – Directive 2008/104/CE – Article 1er – Champ d’application – Notions d’“entreprise publique” et d’“exercice d’une activité économique” – Agences de l’Union européenne – Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes (EIGE) en tant qu’“entreprise utilisatrice”, au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de cette directive – Article 5, paragraphe 1 – Principe d’égalité de traitement – Conditions essentielles de travail et d’emploi – Notion de “même poste” – Règlement (CE) no 1922/2006 – Article 335 TFUE – Principe de l’autonomie administrative des institutions de l’Union – Article 336 TFUE – Statut des fonctionnaires de l’Union européenne et régime applicable aux autres agents de l’Union.
Affaire C-948/19.

;

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2021:624

 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. EVGENI TANCHEV

présentées le 15 juillet 2021 ( 1 )

Affaire C‑948/19

UAB « Manpower Lit »

contre

E. S.,

M. L.,

M. P.,

V. V.,

R. V.,

partie intervenante :

Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes (EIGE)

[demande de décision préjudicielle formée par le Lietuvos Aukščiausiasis Teismas (Cour suprême de Lituanie)]

« Renvoi préjudiciel – Politique sociale – Travail intérimaire – Champ d’application de la directive 2008/104/CE – Agences de l’Union européenne – Entreprises utilisatrices au sens de l’article 1er, paragraphe 1, et de l’article 3, paragraphe 1, sous d), de la directive 2008/104/CE – Règlement (CE) no 1922/2006 – L’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes en tant qu’entreprise utilisatrice »

1.

La présente demande de décision préjudicielle introduite par le Lietuvos Aukščiausiasis Teismas (Cour suprême de Lituanie, ci-après la « juridiction de renvoi ») est l’occasion pour la Cour de se prononcer, pour la cinquième fois, sur l’interprétation de la directive 2008/104/CE du Parlement européen et du Conseil, du 19 novembre 2008, relative au travail intérimaire ( 2 ). Sa nouveauté réside dans le fait que l’entreprise utilisatrice auprès de qui les travailleurs intérimaires requérants E. S., M. L., M. P., V. V., et R. V. étaient mis à disposition (ci-après les « requérants ») ( 3 ) par leur employeur, UAB « Manpower Lit » (ci-après l’« employeur défendeur ») ( 4 ), était une agence de l’Union européenne, à savoir l’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes (ci-après l’« EIGE ») ( 5 ).

2.

Les requérants soutiennent qu’ils ont fait l’objet, en violation tant du droit national que de la directive 2008/104, d’une discrimination par l’employeur défendeur au motif que, dans les circonstances de fait de l’affaire au principal, l’EIGE leur a versé des salaires inférieurs à ceux qu’ils auraient reçus s’ils avaient été recrutés directement par l’EIGE au titre du règlement no 31 (CEE) 11 (CEEA) fixant le statut des fonctionnaires et le régime applicable aux autres agents de la Communauté économique européenne et de la Communauté européenne de l’énergie atomique ( 6 ).

3.

Les six questions préjudicielles visent donc à savoir si, et dans quelle mesure, le fait que l’entreprise utilisatrice auprès de laquelle l’employeur défendeur a mis à disposition les requérants était une agence de l’Union européenne a une incidence sur la solution du litige au principal.

4.

Je suis arrivé à la conclusion que la qualité d’« agence de l’Union européenne » de l’EIGE n’a aucune incidence sur la solution du litige au principal, étant donné que le dossier montre qu’il n’y a aucun impact manifeste sur l’autonomie administrative de l’EIGE ( 7 ) en cas d’injonction par les juridictions nationales à l’employeur défendeur de verser des arriérés de rémunération aux requérants, et une telle injonction ne porterait pas non plus atteinte au statut des fonctionnaires ( 8 ). Il en est ainsi principalement parce que l’affaire au principal concerne un litige opposant deux parties privées, qui implique une appréciation du respect du principe d’égalité de traitement, dont l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/104 est une manifestation spécifique ( 9 ), et à l’égard duquel l’EIGE a la qualité uniquement de « tiers intervenant ».

5.

Par ailleurs, l’EIGE relève du champ d’application personnel de la directive 2008/104 en ce qui concerne la notion d’« entreprises utilisatrices exerçant une activité économique, qu’elles poursuivent ou non un but lucratif », au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de cette directive, étant donné que ladite directive ne saurait être lue comme excluant de son champ d’application les institutions, organes et organismes de l’Union.

I. Le cadre juridique

A.   Le droit de l’Union

6.

L’article 1er de la directive 2008/104, intitulé « Champ d’application », dispose :

« 1.   La présente directive s’applique aux travailleurs ayant un contrat de travail ou une relation de travail avec une entreprise de travail intérimaire et qui sont mis à la disposition d’entreprises utilisatrices afin de travailler de manière temporaire sous leur contrôle et leur direction.

2.   La présente directive est applicable aux entreprises publiques et privées qui sont des entreprises de travail intérimaire ou des entreprises utilisatrices exerçant une activité économique, qu’elles poursuivent ou non un but lucratif.

3.   Les États membres, après consultation des partenaires sociaux, peuvent prévoir que la présente directive ne s’applique pas aux contrats ou relations de travail conclus dans le cadre d’un programme de formation, d’insertion et de reconversion professionnelles public spécifique ou soutenu par les pouvoirs publics. »

7.

L’article 2 de cette directive, intitulé « Objet », prévoit :

« La présente directive a pour objet d’assurer la protection des travailleurs intérimaires et d’améliorer la qualité du travail intérimaire en assurant le respect du principe de l’égalité de traitement, tel qu’il est énoncé à l’article 5, à l’égard des travailleurs intérimaires et en reconnaissant les entreprises de travail intérimaire comme des employeurs, tout en tenant compte de la nécessité d’établir un cadre approprié d’utilisation du travail intérimaire en vue de contribuer efficacement à la création d’emplois et au développement de formes souples de travail. »

8.

L’article 3 de ladite directive, intitulé « Définitions », prévoit ce qui suit à son paragraphe 1, sous d) et f), et à son paragraphe 2 :

« 1.   Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

d)

“entreprise utilisatrice” : toute personne physique ou morale pour laquelle et sous le contrôle et la direction de laquelle un travailleur intérimaire travaille de manière temporaire ;

[...]

f)

“conditions essentielles de travail et d’emploi” : les conditions de travail et d’emploi établies par la législation, la réglementation, les dispositions administratives, les conventions collectives et/ou toute autre disposition générale et contraignante, en vigueur dans l’entreprise utilisatrice, relatives :

i)

à la durée du travail, aux heures supplémentaires, aux temps de pause, aux périodes de repos, au travail de nuit, aux congés, aux jours fériés ;

ii)

à la rémunération.

2.   La présente directive ne porte pas atteinte au droit national en ce qui concerne la définition de la rémunération, du contrat ou de la relation de travail, ou du travailleur.

[...] »

9.

L’article 5 de la même directive, intitulé « Principe d’égalité de traitement », figure au chapitre II consacré aux conditions de travail et d’emploi. À son paragraphe 1, cet article énonce :

« Pendant la durée de leur mission auprès d’une entreprise utilisatrice, les conditions essentielles de travail et d’emploi des travailleurs intérimaires sont au moins celles qui leur seraient applicables s’ils étaient recrutés directement par ladite entreprise pour y occuper le même poste.

[...] »

10.

L’article 2 du règlement no 1922/2006, intitulé « Objectifs », dispose :

« D’une manière générale, l’Institut a pour objectifs de contribuer à la promotion de l’égalité entre les hommes et les femmes et à la renforcer, y compris l’intégration des questions d’égalité entre les hommes et les femmes dans toutes les politiques communautaires et dans les politiques nationales qui en résultent, et à la lutte contre la discrimination fondée sur le sexe, et de sensibiliser les citoyens de l’Union européenne à l’égalité entre les hommes et les femmes, en fournissant une assistance technique aux institutions communautaires, en particulier à la Commission, et aux autorités des États membres, comme le prévoit l’article 3. »

11.

L’article 3 du règlement no 1922/2006, intitulé « Missions », est libellé comme suit :

« 1.   Pour réaliser les objectifs visés à l’article 2, l’Institut :

a)

collecte, analyse et diffuse des informations objectives, comparables et fiables sur l’égalité entre les hommes et les femmes, y compris les résultats de recherches et des meilleures pratiques que lui communiquent les États membres, les institutions communautaires, les centres de recherche, les organismes nationaux chargés de l’égalité, les organisations non gouvernementales, les partenaires sociaux ainsi que les pays tiers et les organisations internationales concernés et suggère de nouveaux domaines de recherche ;

b)

met au point des méthodes visant à augmenter l’objectivité, la comparabilité et la fiabilité des données au niveau européen en élaborant des critères permettant d’améliorer la cohérence de l’information et tient compte des questions liées à l’égalité entre les hommes et les femmes lorsqu’il collecte des données ;

c)

met au point, analyse, évalue et diffuse des outils méthodologiques destinés à favoriser l’intégration de l’égalité entre les hommes et les femmes dans toutes les politiques communautaires et dans les politiques nationales qui en résultent et à favoriser l’intégration de la dimension de l’égalité entre les hommes et les femmes dans l’ensemble des institutions et organes de la Communauté ;

d)

réalise des enquêtes sur la situation de l’égalité entre les hommes et les femmes en Europe ;

e)

crée et coordonne un réseau européen sur l’égalité des hommes et des femmes faisant intervenir les centres, les organismes, les organisations et les experts qui se consacrent à l’égalité entre les hommes et les femmes et à l’intégration de cette dimension, afin de soutenir et d’encourager la recherche, d’optimiser l’utilisation des ressources disponibles et de favoriser l’échange et la diffusion d’informations ;

f)

organise des réunions ad hoc d’experts à l’appui de ses travaux de recherche, encourage l’échange d’informations entre chercheurs et favorise l’intégration de la dimension d’égalité entre les hommes et les femmes dans leurs travaux ;

g)

organise, avec les parties prenantes concernées, des conférences, des campagnes et des réunions au niveau européen, afin de sensibiliser les citoyens de l’Union européenne à l’égalité entre les hommes et les femmes, et présente les conclusions à la Commission ;

h)

diffuse des informations sur l’image positive de rôles non-stéréotypés de femmes et d’hommes dans tous les secteurs de la société et présente des conclusions et des initiatives pour mettre leurs succès en évidence et en tirer parti ;

i)

met en place un dialogue et une coopération avec des organisations non gouvernementales, des organisations militant en faveur de l’égalité, des universités et des experts, des centres de recherche, les partenaires sociaux et des organismes du même type qui agissent dans le domaine de l’égalité aux niveaux national et européen ;

j)

met en place des sources de documentation accessibles au public ;

k)

met à la disposition des organisations publiques et privées des informations sur l’intégration de la dimension d’égalité entre les hommes et les femmes ; et

l)

fournit aux institutions communautaires des informations sur l’égalité entre les hommes et les femmes et sur l’intégration de la dimension d’égalité entre les hommes et les femmes dans les pays adhérents et dans les pays candidats.

2.   L’Institut publie un rapport annuel sur ses propres activités. »

B.   Le droit lituanien

12.

Le Lietuvos Respublikos įdarbinimo per laikinojo įdarbinimo įmones įstatymas (loi sur l’emploi par les entreprises de travail intérimaire), dans sa rédaction en vigueur entre le 1er mai 2013 et le 1er juillet 2017, date d’entrée en vigueur du nouveau Lietuvos Respublikos darbo kodeksas (code du travail de la République de Lituanie, ci-après le « code du travail »), contenait la disposition suivante :

« Article 2. Principales notions utilisées dans la présente loi

[...]

3. On entend par “utilisateur” [...] toute personne physique ou morale ou toute autre structure organisationnelle pour laquelle et sous le contrôle et la direction de laquelle des travailleurs intérimaires travaillent de manière temporaire. »

13.

L’article 75, paragraphe 2, du code du travail, entré en vigueur le 1er juillet 2017, dispose :

« L’entreprise de travail intérimaire doit assurer que la rémunération du travailleur intérimaire pour le travail accompli pour l’utilisateur ne soit pas inférieure à la rémunération qui lui serait versée si l’utilisateur avait recruté le travailleur intérimaire par un contrat de travail pour occuper le même poste, sauf dans les cas où les travailleurs intérimaires sont titulaires d’un contrat de travail intérimaire à durée indéterminée et reçoivent entre les missions une rémunération de l’entreprise de travail intérimaire qui est de même montant que leur rémunération pendant les missions. L’utilisateur répond à titre subsidiaire de l’exécution de l’obligation de verser au travailleur intérimaire une rémunération pour le travail accompli pour l’utilisateur qui ne soit pas inférieure à la rémunération qui lui serait versée si l’utilisateur avait recruté le travailleur intérimaire par un contrat de travail pour occuper le même poste. » ( 10 )

14.

Le 6 juin 2017, compte tenu de certains changements apportés au code du travail par le législateur de la République de Lituanie, il a été ajouté ce qui suit à l’article 75, paragraphe 2 :

« 2.   […] Dans le cadre de cette obligation, l’utilisateur doit, sur demande de l’entreprise de travail intérimaire, fournir à cette dernière des informations sur la rémunération versée à ses propres employés de la catégorie concernée. »

II. Les faits à l’origine du litige, la procédure au principal et les questions préjudicielles

15.

Au cours de l’année 2012, l’employeur défendeur a remporté un marché public portant sur des services de mise à disposition de personnel intérimaire auprès de l’EIGE ( 11 ), tiers dans la procédure au principal. L’employeur défendeur a conclu un contrat avec l’EIGE, qui précisait les conditions dans lesquelles l’EIGE avait besoin d’un personnel intérimaire, y compris les types et les catégories de profils du personnel requis et les conditions de travail. Le contrat visait à assister le personnel statutaire de l’EIGE, à assumer, à titre temporaire, des tâches complémentaires à celles effectuées d’ordinaire et résultant de projets spécifiques, à faire face aux périodes de pointe pour une période déterminée et à remédier au manque de personnel au sein de l’EIGE en cas d’absences dues à certains motifs déterminés. Le personnel intérimaire serait considéré comme étant du personnel non statutaire de l’EIGE, c’est-à-dire comme ne relevant pas du statut des fonctionnaires ou comme n’étant pas recruté au titre de celui-ci ( 12 ).

16.

L’employeur défendeur a annoncé qu’il y aurait des concours pour des emplois correspondant aux besoins en personnel de l’EIGE et a publié sur son site Internet un avis de recrutement et des annonces d’emploi. Dans ces avis et annonces, la nature du travail et les conditions requises pour occuper les emplois vacants étaient indiquées de manière succincte ( 13 ).

17.

Les requérants ont conclu des contrats de travail intérimaire avec l’employeur défendeur, lequel a accepté de leur verser un salaire horaire, qui a fluctué au cours de la relation de travail. Les salaires horaires à verser étaient les suivants : à l’assistante au service de documentation : 5,20 euros ; à l’assistante au service de la communication : 5,20 euros ; à l’assistante administrative : 4,34 euros ; à l’informaticien : 5,20 euros, et à l’assistante au service du personnel : 4,34 euros ( 14 ).

18.

Des avenants précisant que l’EIGE était l’entreprise utilisatrice étaient joints aux contrats de travail intérimaire. Les avenants indiquaient également quel membre du personnel de l’EIGE était responsable pour donner les instructions concernant l’accomplissement du travail convenu ( 15 ).

19.

Les contrats de travail étaient valides jusqu’à la date de fin prévue par la commande de l’entreprise utilisatrice, l’EIGE. À la date du 1er janvier 2019, les contrats de travail de tous les requérants avaient été résiliés. En conséquence, les requérants ont saisi la Darbo ginčų komisija (commission des litiges de droit du travail, Lituanie) en vue de récupérer les arriérés de rémunération qui leur étaient dus.

20.

Par décision du 20 juin 2018, la commission des litiges de droit du travail, en se fondant elle-même sur la directive 2008/104 et sur l’article 75, paragraphe 2, du code du travail, a constaté que le défendeur avait discriminé les requérants en leur versant une rémunération inférieure à celle qui leur aurait été due s’ils avaient été recrutés directement par l’EIGE. La commission des litiges de droit du travail a constaté que les travailleurs qui avaient été recrutés au titre des contrats de travail intérimaire accomplissaient les fonctions de membres du personnel permanent de l’EIGE. La commission des litiges de droit du travail a jugé que les requérants auraient dû recevoir une rémunération correspondant à celle appliquée aux agents contractuels de l’EIGE au titre du RAA qui relèvent du groupe de fonctions II, grade 4 (tâches de bureau et de secrétariat, direction de bureau et autres tâches équivalentes, exécutées sous la supervision de fonctionnaires ou d’agents temporaires) ( 16 ). Elle a ordonné la récupération auprès du défendeur d’arriérés de rémunération pour une période de six mois au cours de l’année 2018 ( 17 ).

21.

L’employeur défendeur a saisi le Vilniaus miesto apylinkės teismas (tribunal de district de la ville de Vilnius, Lituanie) d’une requête contre la décision de la commission des litiges de droit du travail, mais a succombé. Par jugement du 20 février 2019, ce tribunal a rejeté la demande de l’employeur défendeur. Ce dernier a ensuite saisi le Vilniaus apygardos teismas (tribunal régional de Vilnius, Lituanie), d’un appel. Par arrêt du 20 juin 2019, l’appel a été rejeté.

22.

L’employeur défendeur a introduit un pourvoi en cassation devant la juridiction de renvoi. Par décision du 30 décembre 2019, celle-ci a décidé que le litige au principal soulevait des questions d’interprétation et d’application du droit de l’Union. Dans ces circonstances, le Lietuvos Aukščiausiasis Teismas (Cour suprême de Lituanie) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

Quel sens convient-il de donner à l’expression “entreprise publique” utilisée à l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104 ? Les agences de l’Union européenne, telles que l’EIGE, sont-elles considérées comme des “entreprises publiques” au sens de ladite directive ?

2)

Qui (l’utilisateur, l’entreprise de travail intérimaire, au moins l’un d’entre eux, voire les deux) doit répondre au critère de l’“exercice d’une activité économique” en vertu de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104 ; compte tenu de ses domaines d’action et fonctions, définis aux articles 3 et 4 du [règlement no 1922/2006], convient-il de considérer que l’EIGE exerce une activité économique au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104 ?

3)

Est-il possible d’interpréter l’article 1er, paragraphes 2 et 3, de la directive 2008/104 en ce sens que celle-ci peut ne pas être appliquée à des entreprises, publiques ou privées, de travail intérimaire ou utilisatrices qui ne sont pas parties à des relations visées audit article 1er, paragraphe 3, et n’exercent pas d’activité économique au sens dudit article 1er, paragraphe 2 ?

4)

Les dispositions de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/104, relatives aux conditions essentielles de travail et d’emploi des travailleurs intérimaires et notamment à la rémunération, s’appliquent-elles pleinement aux agences de l’Union, qui sont soumises aux dispositions spéciales du droit du travail de l’Union et aux articles 335 et 336 TFUE ?

5)

Le droit national (l’article 75 du code du travail) qui transpose les dispositions de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/104 en les rendant applicables à tous les utilisateurs recourant à des services de mise à disposition de travailleurs intérimaires (y compris les institutions de l’Union) enfreint-il le principe de l’autonomie administrative des institutions de l’Union consacré aux articles 335 et 336 TFUE ainsi que les règles de calcul et de paiement des rémunérations prévues par le [statut des fonctionnaires] ?

6)

Compte tenu du fait que tous les emplois (fonctions) pour lesquels l’EIGE recrute des travailleurs directement comprennent des tâches qui ne peuvent être accomplies que par des personnes soumises au [statut des fonctionnaires], les emplois occupés (fonctions exercées) par des travailleurs intérimaires peuvent-ils être considérés comme constituant le “même poste” au sens de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/104 ? »

23.

Des observations écrites ont été déposées devant la Cour par les requérants, la République de Lituanie et la Commission. Il n’y a pas eu d’audience, mais des questions pour réponse écrite ont été posées par la Cour. L’EIGE et la Commission y ont répondu.

III. Synthèse des observations écrites

24.

Les requérants soulignent que l’EIGE n’est ni partie ni défendeur dans la procédure au principal et que l’EIGE n’est pas, en tant que tel, responsable au titre de l’article 75, paragraphe 2, du code du travail du paiement des salaires des requérants. Les deux parties sont des entités lituaniennes et la protection prévue par la directive 2008/104 ne saurait être diluée par le statut international de l’EIGE. Une telle analyse entraînerait des tensions sociales.

25.

En vertu d’une jurisprudence constante et du libellé de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104, il n’est pas automatiquement exclu que des entités à but non lucratif exercent une « activité économique » ( 18 ). On entend plutôt par « activité économique » toute activité liée à une opération économique, indépendamment du point de savoir dans l’intérêt de qui elle est réalisée. Les diverses activités de l’EIGE (par exemple, l’éducation, l’information, la collecte de statistiques) ont un caractère économique, car leur exercice nécessite d’organiser des opérations économiques, telles que le fait de procéder à des paiements. Seules les activités bénévoles ne sont pas des « activités économiques ».

26.

Une interprétation de la directive 2008/104 permettant aux agences de l’Union européenne, telles que l’EIGE, de discriminer des travailleurs intérimaires au motif que le personnel de l’EIGE recruté au titre du statut des fonctionnaires bénéficie d’un statut spécial qui n’est pas comparable à celui des travailleurs intérimaires serait incompatible avec les objectifs poursuivis par la directive 2008/104.

27.

L’absence en droit lituanien de la notion d’« activité économique » dans la transposition de la directive 2008/104 par l’article 75 du code du travail est conforme au droit de l’Union ( 19 ). Dix-neuf États membres ont transposé la directive 2008/104 de la même manière que la Lituanie.

28.

Les requérants font valoir qu’il est manifeste que l’EIGE aurait pu recruter du personnel directement, en vertu du statut des fonctionnaires, pour effectuer les mêmes tâches administratives que celles pour lesquelles ils ont été recrutés ( 20 ). Le pouvoir de recruter du personnel directement s’étend des tâches manuelles, telles que celles effectuées par les porteurs et le personnel de nettoyage, jusqu’aux tâches dirigeantes du plus haut niveau. Les fonctions exercées par les travailleurs intérimaires devraient être comparées à celles exercées par le personnel permanent de l’EIGE.

29.

Devant les juridictions nationales, les requérants ont produit toute une série de preuves (courriers électroniques, attestations, etc.) établissant que, dans les faits, ils ont exercé non pas uniquement des fonctions d’appui, mais aussi des fonctions qui devaient être exercées uniquement par le personnel recruté directement par l’EIGE (par exemple, diverses tâches de planification et gestion budgétaire). Il s’agit d’une question de fait qui ne saurait être ignorée, même si, juridiquement, les fonctions du personnel permanent de l’EIGE et celles exercées par les requérants ne sont pas comparables.

30.

Enfin, les requérants soulignent qu’ils ont été employés en tant que travailleurs intérimaires pour des périodes allant de 22 à 36 mois. Les contrats ont été résiliés par l’EIGE après que les requérants ont demandé le paiement d’arriérés de rémunération. La rémunération perçue par les requérants a fluctué entre 700 et 800 euros, soit plus ou moins un tiers de la rémunération du personnel de l’EIGE recruté directement et accomplissant des fonctions similaires.

31.

La République de Lituanie observe, dans le cadre de la première question préjudicielle, que le principe de non-discrimination des travailleurs intérimaires est un principe de droit social de l’Union qui ne saurait être interprété de manière restrictive ( 21 ). Le champ d’application large de la directive 2008/104 se reflète dans l’interprétation large qui a été donnée à la notion de « travailleur » au sens de l’article 1er, paragraphe 1, de cette directive ( 22 ). Conformément à la jurisprudence de la Cour concernant l’interprétation des dispositions du droit de l’Union protégeant les travailleurs, les dérogations doivent recevoir une interprétation qui limite leur portée à ce qui est strictement nécessaire pour sauvegarder les intérêts que ces dérogations permettent de protéger ( 23 ).

32.

À la lumière de ce qui précède, toute exclusion ratione personae du champ d’application de la directive 2008/104 doit être claire et précise ( 24 ). Par conséquent, restreindre le recours aux travailleurs intérimaires en ce qui concerne les entités de droit public telles que l’EIGE ne répondrait à aucune des raisons visées à l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2008/104 concernant les interdictions ou restrictions autorisées pour recourir au travail intérimaire ( 25 ). Une protection moindre des travailleurs intérimaires pour la seule raison que l’utilisateur a été créé sur une autre base juridique que celle prévue par le droit public national constituerait une autre discrimination injustifiée. Il est d’ores et déjà une pratique établie que, lorsqu’elles recourent à des services de travail intérimaire, les institutions ou agences de l’Union se conforment au droit de l’État membre dans lequel se trouve leur siège ( 26 ).

33.

La République de Lituanie fait valoir que la directive 2008/104 met en œuvre les droits fondamentaux consacrés à l’article 31 de la Charte. Partant, les dispositions de la Charte et de la directive 2008/104 s’appliquent à l’EIGE en tant qu’« entreprise utilisatrice » en raison de l’article 51, paragraphe 1, de la Charte. Les institutions doivent, conformément au devoir de loyauté qui pèse sur elles, tenir compte, dans leur comportement d’employeur, des actes juridiques adoptés au niveau de l’Union ( 27 ).

34.

S’agissant des deuxième et troisième questions préjudicielles, la République de Lituanie partage l’analyse de la Commission ( 28 ). Les États membres, tels que la Lituanie, sont autorisés à opter pour un champ d’application plus large de la directive 2008/104, qui opère une harmonisation a minima, et d’étendre son application aux utilisateurs n’exerçant pas une activité économique ( 29 ) de sorte qu’il n’est pas nécessaire de déterminer si l’EIGE exerce une activité économique au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104.

35.

S’agissant des quatrième et cinquième questions préjudicielles, la République de Lituanie indique que, en l’absence de règles spécifiques prévues dans le statut des fonctionnaires, la mise à disposition de travailleurs intérimaires auprès d’une institution/agence de l’Union en tant qu’« entreprise utilisatrice » est régie par l’article 5 de la directive 2008/104 et par la législation de l’État membre qui transpose cette directive (en raison, notamment, de l’article 335 TFUE). Telle est également la position de la Cour des comptes, qui a mis en doute la légalité des activités de sept agences de l’Union, dont l’EIGE, s’agissant du respect de la directive 2008/104 ( 30 ).

36.

La transposition par la Lituanie de la directive 2008/104 ne viole ni le principe d’autonomie des institutions de l’Union ni les règles de calcul et de paiement des rémunérations prévues par le statut des fonctionnaires. Toute différence de traitement des institutions, organes et organismes de l’Union doit être prévue par des règles du droit de l’Union directement applicables.

37.

S’agissant de la sixième question préjudicielle, la République de Lituanie souligne que l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/104 constitue une expression concrète du principe d’égalité de traitement ( 31 ). L’expression « pour y occuper le même poste », figurant à l’article 5, paragraphe 1, de cette directive, permet de procéder à une comparaison hypothétique des travailleurs. Elle ne saurait être interprétée étroitement, comme signifiant, par exemple, que les postes en cause doivent être identiques, car sinon il serait trop facile de se soustraire à l’obligation qui y est prévue. Il est indiqué dans l’ordonnance de renvoi que l’EIGE a eu besoin de recourir à du personnel intérimaire pour soutenir le personnel statutaire de l’EIGE afin d’assumer, notamment, des tâches complémentaires et de remédier au manque de personnel. La juridiction saisie en première instance avait constaté que, compte tenu des contrats de travail des requérants et des tâches effectivement accomplies, tous les travailleurs intérimaires accomplissaient, en partie ou uniquement, des fonctions du personnel permanent de l’EIGE. Le fait que des travailleurs intérimaires pouvaient suppléer les fonctionnaires ou agents pendant leur absence pour maladie ou congé parental est propre à réfuter l’argument selon lequel il est interdit de confier des fonctions statutaires à des personnes qui ne relèvent pas du statut des fonctionnaires.

38.

La Commission soutient, en ce qui concerne les première et deuxième questions préjudicielles, que tant l’entreprise de travail intérimaire que les entreprises utilisatrices doivent exercer une activité économique au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104. Cette interprétation est également confortée par la genèse de cette directive ( 32 ).

39.

Toutefois, la Commission reconnaît que, sur le fondement du libellé de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104, l’EIGE ne peut pas être exclu du champ d’application de cette directive au motif qu’il est une entreprise publique. Or, la Commission fait valoir que, conformément à la jurisprudence de la Cour, l’EIGE n’exerce pas une activité économique ( 33 ), principalement parce que l’EIGE n’offre pas de biens ou de services sur un marché donné et n’offre pas de services qui se trouvent en concurrence avec ceux proposés par d’autres opérateurs.

40.

Cela dit, s’agissant de la troisième question préjudicielle, la Commission propose de la reformuler comme suit : « L’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104 doit-il être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce que les dispositions du droit national par lesquelles la directive 2008/104 a été transposée soient appliquées aux entreprises de travail intérimaire ou aux entreprises utilisatrices du travail intérimaire qui n’exercent pas d’activités économiques ? » La Commission propose de répondre à cette question par la négative ( 34 ).

41.

S’agissant des quatrième et cinquième questions préjudicielles, la Commission estime que le principe d’égalité de traitement prévu à l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/104 exige que le même traitement soit applicable aux requérants et aux travailleurs recrutés directement par l’EIGE en vertu des dispositions du droit lituanien, par opposition au recrutement effectué par l’intermédiaire d’entreprises de travail intérimaire, mais pas au personnel recruté selon le statut des fonctionnaires ( 35 ). L’EIGE a choisi de recruter des travailleurs intérimaires en vertu du droit national, et ce choix est légitime selon le droit de l’Union, conformément aux articles 272 et 335 TFUE. La capacité qui y est reconnue pour nouer des relations contractuelles s’étend à la conclusion de contrats de travail ou de prestation de services ( 36 ). Un tel recrutement ne peut être considéré comme étant illégitime que dans le cas où il est fait pour éviter l’application du statut des fonctionnaires ( 37 ), mais les institutions de l’Union disposent d’une large discrétion dans le choix des moyens les mieux adaptés au recrutement du personnel. Ce recrutement est possible dans des conditions plus flexibles que celles applicables aux travailleurs de la catégorie d’agents contractuels ( 38 ).

42.

La Commission ajoute que les directives sont adressées aux États membres et ne sauraient être considérées comme imposant en tant que telles des obligations aux institutions de l’Union dans leurs rapports avec leur personnel ( 39 ). En vertu de l’article 336 TFUE, il appartient aux institutions de l’Union de déterminer le droit applicable à de telles relations, de telle sorte que ce n’est que dans certaines circonstances exceptionnelles que les directives sont indirectement applicables ( 40 ), même si elles peuvent constituer une source d’inspiration pour la détermination des obligations des institutions de l’Union dans le domaine de la fonction publique de l’Union européenne ( 41 ), et les institutions doivent tenir compte, dans leur comportement d’employeur, des dispositions législatives adoptées à l’échelle de l’Union ( 42 ). Cette jurisprudence vaut uniquement pour les fonctionnaires et autres agents qui relèvent du statut des fonctionnaires, et ne vaut donc pas pour les requérants.

43.

C’est pourquoi la situation des requérants doit ainsi être comparée, en vertu de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/104, avec celle du personnel recruté directement par l’EIGE selon les dispositions du droit lituanien sans l’intermédiaire d’une entreprise de travail intérimaire, et non pas avec celle du personnel statutaire de l’Union. Cette approche respecte le principe d’autonomie des institutions de l’Union. Une personne qui n’est pas recrutée par une institution de l’Union, mais par une personne morale qui relève du droit national d’un État membre, telle qu’une entreprise de travail intérimaire, ne peut pas être considérée comme ayant été recrutée par un organisme équivalent à une autorité administrative et ne peut pas obtenir le statut de fonctionnaire de l’Union ( 43 ). L’interprétation de la directive 2008/104 selon laquelle les travailleurs intérimaires seraient effectivement considérés comme étant équivalents aux agents contractuels risquerait d’enfreindre l’autonomie de l’Union ( 44 ) et de créer des difficultés pratiques insurmontables ( 45 ). La Commission se demande si le protocole (no 7) sur les privilèges et immunités de l’Union européenne devrait être appliqué ( 46 ).

44.

S’agissant de la sixième question préjudicielle, la Commission soutient que la juridiction nationale doit vérifier si les requérants ont rempli des tâches administratives ou bien des tâches liées à l’« activité principale » et des tâches qui incombent à l’EIGE selon son règlement fondateur afin de vérifier si l’objectif était d’éviter l’application du statut des fonctionnaires ( 47 ). Toutefois, elle considère que l’EIGE n’a pas dépassé les limites de sa discrétion en recrutant des travailleurs intérimaires sur le fondement du droit lituanien. Une assistance administrative ne devrait pas être considérée comme étant une tâche qui devrait être remplie par l’EIGE lui-même en tant qu’« activité principale ». La juridiction de renvoi n’est pas compétente pour requalifier les contrats en cause en contrats régis par le RAA, car, d’une part, les requérants n’ont pas conclu leurs contrats avec l’EIGE, mais avec l’employeur défendeur (une entreprise de travail intérimaire), et, d’autre part, dans l’affaire au principal, l’EIGE est un tiers.

IV. Analyse

A.   Reformulation des questions préjudicielles

45.

Conformément à une jurisprudence constante, dans le cadre de la procédure de coopération entre les juridictions nationales et la Cour, instituée à l’article 267 TFUE, il appartient à celle-ci de donner au juge national une réponse utile qui lui permette de trancher le litige dont il est saisi. Dans cette optique, il incombe, le cas échéant, à la Cour de reformuler les questions qui lui sont soumises ( 48 ).

46.

En l’espèce, il ressort clairement de la demande de décision préjudicielle que la Cour est appelée à se prononcer sur la question de savoir si une agence de l’Union, telle que l’EIGE, relève de la notion d’« entreprise utilisatrice » au sens de la directive 2008/104 et, dans l’affirmative, si la transposition par la République de Lituanie de la notion d’« entreprise utilisatrice » de manière à inclure les entreprises qui n’exercent pas une activité économique signifie que la mise à la disposition de telles entreprises de travailleurs intérimaires est régie par la directive 2008/104 et, dans la négative, si l’EIGE exerce « une activité économique, qu’[il] poursuive[...] ou non un but lucratif » au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104 et, dans l’affirmative, si l’application de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/104, relatif à l’égalité de traitement, à l’EIGE en sa qualité d’« entreprise utilisatrice », dans le cadre d’un litige opposant deux parties privées dans lequel l’EIGE est une tierce partie intervenante, porterait atteinte à l’autonomie administrative de l’EIGE ( 49 ) et au statut des fonctionnaires.

47.

Je propose donc de reformuler les six questions préjudicielles en quatre questions comme suit :

1)

Les agences de l’Union européenne, telles que l’EIGE, sont-elles des « entreprises utilisatrices » au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104, telles qu’elles sont définies à l’article 3, paragraphe 1, sous d), de cette directive ?

2)

La directive 2008/104 doit-elle être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à ce qu’elle s’applique à la mise à la disposition d’entreprises utilisatrices de travailleurs intérimaires qui n’exercent pas une activité économique ?

3)

Les domaines d’action et fonctions, définis aux articles 3 et 4 du règlement no 1922/2006, doivent-ils être considérés comme étant des activités économiques au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104 ?

4)

Lorsque les juridictions de l’État membre ont considéré que tous les emplois et fonctions exercés par des travailleurs intérimaires comprennent des tâches accomplies uniquement par des personnes recrutées en vertu du statut des fonctionnaires, les emplois occupés et les fonctions exercées par les travailleurs intérimaires peuvent-ils être considérés comme constituant le « même poste » au sens de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/104, ou une telle interprétation de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/104 est-elle incompatible avec l’autonomie administrative de l’EIGE et/ou le statut des fonctionnaires ? ( 50 )

B.   Réponses aux questions telles que reformulées

1. Réponse à la première question

48.

La réponse à la première question est affirmative. Les agences de l’Union européenne, telles que l’EIGE, sont des « entreprises utilisatrices » au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104, telles qu’elles sont définies à l’article 3, paragraphe 1, sous d), de cette directive.

49.

Le Tribunal a déjà jugé qu’une institution de l’Union, en l’occurrence la Banque centrale européenne, est une « entreprise utilisatrice » au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104, sans toutefois détailler son raisonnement à cet égard ( 51 ). Il s’agissait peut-être d’une conséquence logique du fait que, bien avant la promulgation de la directive 2008/104, les institutions de l’Union avaient recouru à des entreprises de travail intérimaire pour répondre à des besoins en personnel intérimaire au moyen de contrats de travail régis par le droit national du lieu où était située l’institution de l’Union en cause ( 52 ).

50.

En outre, le Tribunal de la fonction publique a jugé, en 2006, que le fait qu’un contrat de travail à durée déterminée avait été conclu avec un organisme de droit international public n’était pas, en tant que tel, suffisant pour exclure la pertinence, pour le litige, de la jurisprudence de la Cour interprétant la directive 1999/70 et l’accord-cadre qui l’accompagne ( 53 ). Au vu de ces éléments, je partage les arguments de la République de Lituanie (voir point 32 des présentes conclusions) selon lesquels des mots clairs sont requis afin de soustraire les institutions de l’Union au sens de l’article 13 TUE ou les agences de l’Union ( 54 ) du champ d’application de la directive 2008/104.

51.

Une telle formulation claire ne figure pas dans la directive 2008/104. Au contraire, l’article 3, paragraphe 1, sous d), de la directive 2008/104 définit de manière large la notion d’« entreprise utilisatrice » comme étant « toute personne physique ou morale pour laquelle et sous le contrôle et la direction de laquelle un travailleur intérimaire travaille de manière temporaire » (mise en italique par mes soins), tandis que l’article 5 du règlement no 1922/2006 énonce que l’« Institut a la personnalité juridique. Dans chacun des États membres, il possède la capacité juridique la plus large reconnue aux personnes morales par les législations nationales. Il peut notamment acquérir ou aliéner des biens immobiliers ou mobiliers et ester en justice ». Par conséquent, une analyse contextuelle, dans le cadre de laquelle l’article 3, paragraphe 1, sous d), et l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104 sont interprétés à la lumière du règlement no 1922/2006, indique également qu’il convient d’inclure une agence telle que l’EIGE à l’intérieur des paramètres de la notion d’« entreprise utilisatrice » aux fins de la directive 2008/104 ( 55 ).

52.

En effet, les seules limitations textuelles apportées à la notion d’« entreprise utilisatrice » figurent à l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104 où sont ajoutés les termes « exerçant une activité économique, qu’elles poursuivent ou non un but lucratif » (voir également points 64 à 71 des présentes conclusions). Aucune des dérogations à la directive 2008/104 ne se rapporte de manière particulière ou spécifique aux agences de l’Union européenne, ces dérogations étant prévues à l’article 1er, paragraphe 3, de cette directive relatif aux « contrats ou relations de travail conclus dans le cadre d’un programme de formation, d’insertion et de reconversion professionnelles public spécifique ou soutenu par les pouvoirs publics », et à l’article 4, paragraphe 1, de ladite directive en ce qui concerne les « raisons d’intérêt général tenant, notamment, à la protection des travailleurs intérimaires, aux exigences de santé et de sécurité au travail ou à la nécessité d’assurer le bon fonctionnement du marché du travail, et d’empêcher les abus ». Aucune référence aux agences de l’Union ne figure à l’article 5, paragraphes 2 à 4, de la même directive, lequel concerne les limitations au principe d’égalité de traitement.

53.

La finalité et les objectifs de la directive 2008/104 ne permettent pas non plus d’exclure les agences de l’Union de la notion d’« entreprises utilisatrices ». Le double objectif de cette directive est de développer des formes souples de travail, tout en visant à atteindre un plus grand degré d’harmonisation du droit social y afférant. Ce droit social est fondé sur la recherche d’un équilibre entre la flexibilité et la sécurité sur le marché du travail, et a été désigné par le terme « flexicurité » ( 56 ). Le texte de l’article 2 de la directive 2008/104 répond essentiellement à quatre buts : la protection des travailleurs intérimaires, la garantie du principe d’égalité de traitement, la création d’emplois et le développement de formes souples de travail. Ainsi, cette directive vise à stimuler l’accès des travailleurs intérimaires à un emploi permanent dans l’entreprise utilisatrice ( 57 ). La création d’emplois ainsi que la participation et l’insertion sur le marché du travail constituent des buts essentiels ( 58 ). Le dossier ne fait apparaître aucune incompatibilité entre ces buts et les emplois offerts par les agences de l’Union. L’EIGE est un acteur actif sur le marché du travail lituanien et la genèse de l’article 1er, paragraphe 2, de ladite directive ne suggérerait pas non plus d’exclure des agences telles que l’EIGE de son champ d’application ( 59 ).

54.

La notion d’« entreprises utilisatrices » doit faire l’objet d’une interprétation large ( 60 ), afin de ne pas compromettre la réalisation de l’objectif de la directive 2008/104 et, partant, de ne pas porter atteinte à son effet utile, en restreignant, de manière inutile et injustifiée, son champ d’application. Il en est ainsi, car la Cour est parvenue à la même conclusion en ce qui concerne la signification de l’expression « travailleur intérimaire » au sens de l’article 3, paragraphe 1, sous c), et de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104 ( 61 ). Le même impératif doit nécessairement s’appliquer aux dispositions de la directive 2008/104 qui nécessitent une interprétation dans la procédure au principal.

2. Réponse à la deuxième question

55.

Il convient de répondre par l’affirmative à la deuxième question. La directive 2008/104 doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à ce qu’elle s’applique à la mise à la disposition d’entreprises utilisatrices n’exerçant pas une activité économique de travailleurs intérimaires.

56.

Il convient d’admettre que la Cour a reconnu comme étant recevables des demandes de décision préjudicielle portant sur des dispositions du droit de l’Union dans des situations dans lesquelles les faits au principal se situaient en dehors du champ d’application de ce droit, mais où ces dispositions avaient été rendues applicables par le droit national en raison d’un renvoi opéré par ce dernier au contenu de celles-ci ( 62 ). Il s’agissait notamment de cas dans lesquels une situation interne se conformait, en raison de la législation adoptée par l’État membre, aux solutions retenues par le droit de l’Union, et cela comprenait des situations purement internes ( 63 ). Comme l’avocat général Bobek l’a récemment observé, la Cour a jugé que, lorsqu’une législation nationale se conforme, pour les solutions qu’elle apporte à des situations ne relevant pas du champ d’application de l’acte de l’Union concerné, à celles retenues par cet acte, il existe un intérêt certain de l’Union à ce que, pour éviter des divergences d’interprétation futures, les dispositions reprises dudit acte reçoivent une interprétation uniforme ( 64 ).

57.

Toutefois, contrairement à la position défendue par la République de Lituanie et la Commission (voir, respectivement, points 34 et 40 des présentes conclusions), il existe au moins quatre obstacles à l’application, dans le litige au principal, de la jurisprudence dite « Dzodzi » ( 65 ), dans laquelle ce principe a été établi.

58.

Premièrement, un thème prédominant dans la jurisprudence est l’identification d’une disposition du droit national appliquant « de manière directe et inconditionnelle » l’acte de l’Union à un contexte qui n’a pas été envisagé par cet acte ( 66 ). Or, une telle disposition clairement libellée ne figure pas dans le dossier et l’omission pure et simple, à l’article 75, paragraphe 2, du code du travail, des termes « exerçant une activité économique » ne satisfait pas à cette condition ( 67 ).

59.

Deuxièmement, la Cour a jugé que la règle « Dzodzi » ne saurait s’appliquer à des situations pour lesquelles la directive concernée prévoit un cas d’exclusion de son champ d’application ( 68 ). La précision « entreprises utilisatrices exerçant une activité économique, qu’elles poursuivent ou non un but lucratif » figurant à l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104 serait vidée de sa substance si les lois instituées au titre de la directive 2008/104 étaient étendues à la mise à la disposition d’entreprises utilisatrices n’exerçant pas une activité économique de travailleurs intérimaires.

60.

Troisièmement, si l’on examine la jurisprudence de manière plus large et en reprenant l’approche de l’avocat général Bobek, ce qui importe est de savoir si la disposition du droit de l’Union dont l’interprétation a été demandée avait été utilisée par le législateur national dans un cadre bien trop éloigné de son cadre d’origine ( 69 ). Le cadre d’origine est restreint aux entreprises utilisatrices exerçant une activité économique, certes limité par la précision figurant à l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104, à savoir « qu’elles poursuivent ou non un but lucratif » ( 70 ). Si l’on applique la directive 2008/104 au-delà de ces paramètres, elle sera étendue à un cadre éloigné et indéterminé, en contradiction directe avec le libellé de l’article 1er, paragraphe 2, de cette directive.

61.

Quatrièmement, il convient de relever que la directive 2008/104 établit un cadre protecteur ( 71 ) visant à améliorer le socle de protection des travailleurs intérimaires ( 72 ) s’agissant de leurs conditions essentielles de travail et d’emploi ( 73 ). La Cour, réunie en grande chambre, a jugé que, en ce qui concerne les directives opérant une harmonisation a minima, dans la mesure où un État membre choisit, lorsqu’il exerce son pouvoir d’appréciation, d’aller au-delà de leurs exigences minimales ( 74 ), il ne procède pas à une mise en œuvre du droit de l’Union au sens de l’article 51, premier alinéa, de la Charte ( 75 ). Par conséquent, pour la même raison, la directive 2008/104 ne saurait être pertinente aux fins de l’interprétation du droit lituanien en ce qui concerne les entreprises n’exerçant pas une activité économique au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de cette directive, et à la disposition desquelles ont été mis les travailleurs intérimaires ( 76 ). Les considérations qui précèdent s’appliquent à l’ensemble des 19 États membres ayant transposé la directive 2008/104 de la même manière que la Lituanie (voir point 27 des présentes conclusions).

3. Réponse à la troisième question

62.

Il convient de répondre à cette question par l’affirmative. Les domaines d’action et fonctions de l’EIGE, définis aux articles 3 et 4 du règlement no 1922/2006, doivent être considérés comme constituant des activités économiques au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104.

63.

Il en va ainsi pour les raisons suivantes.

64.

Premièrement, dans le cadre d’un autre acte en matière de politique sociale de l’Union, à savoir la directive 2001/23/CE du Conseil, du 12 mars 2001, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d’entreprises, d’établissements ou de parties d’entreprises ou d’établissements ( 77 ), la Cour a interprété strictement les circonstances dans lesquelles les entreprises publiques sont exclues du champ d’application de cette directive du fait qu’elles n’exercent pas une « activité économique » et elle a jugé que de telles circonstances sont limitées à « la réorganisation de structures de l’administration publique, ou [au] transfert d’attributions administratives entre les administrations publiques » ( 78 ). Le fait que l’EIGE est une autorité publique ne fait pas en lui-même obstacle à ce qu’il relève des paramètres de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104 en tant qu’« entreprise utilisatrice » ( 79 ). Ainsi qu’il ressort de la discussion, aux points 67 et 68 des présentes conclusions, relative aux missions et domaines d’action de l’EIGE (voir, respectivement, articles 3 et 4 du règlement no 1922/2006), ainsi qu’à ses objectifs (article 2 de ce règlement), l’EIGE ne saurait être considéré comme exerçant une activité participant de l’exercice des prérogatives de puissance publique ( 80 ).

65.

Secondement, la genèse de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104 plaide en faveur d’une interprétation large de cette directive afin d’éviter une concurrence déloyale ( 81 ), de même que la jurisprudence constante de la Cour. La notion d’« activité économique » est généralement interprétée de manière large ( 82 ), quel que soit le secteur de compétence de l’Union dans lequel se pose la question ( 83 ). C’est en gardant cela à l’esprit qu’il convient d’appliquer au litige au principal la signification donnée par la Cour à l’expression « activité économique » au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104, dans l’arrêt du 17 novembre 2016, Betriebsrat der Ruhrlandklinik ( 84 ). En conséquence, la question qui se pose est celle de savoir si l’EIGE exerce une quelconque activité consistant à offrir des biens ou des services sur un marché donné ( 85 ).

66.

Dans ce contexte, il y a lieu de relever que, en vertu de l’article 14, paragraphe 3, sous b), du règlement no 1922/2006, les recettes de l’Institut comprennent « les paiements effectués en rémunération des services rendus », de sorte que le législateur de l’Union a envisagé que l’EIGE agirait en tant qu’acteur du marché, même si, et comme l’a indiqué l’EIGE dans sa réponse aux questions écrites posées par la Cour, il a été financé exclusivement par la Commission.

67.

En outre, les objectifs poursuivis par le règlement no 1922/2006, énoncés à l’article 2 de ce règlement, permettent d’identifier un éventail de marchés ouverts à la fourniture de biens ou de services. Influencer les politiques nationales et de l’Union est un domaine classique de l’activité des lobbyistes commerciaux. L’EIGE ne détient pas un monopole au niveau européen en matière de fourniture d’une assistance technique aux institutions de l’Union et aux autorités des États membres en vue de sensibiliser les citoyens à l’égalité entre les hommes et les femmes. De même, contribuer à intégrer les questions d’égalité entre les hommes et les femmes dans les politiques de l’Union et dans les politiques nationales qui en résultent n’est pas non plus mentionné dans le règlement no 1922/2006 comme relevant de la compétence exclusive de l’EIGE, et cette action est effectuée par un large éventail d’acteurs.

68.

De nombreux exemples d’activités qui consistent à offrir des produits ou des services et dans lesquelles sont impliquées des entreprises commerciales figurent parmi les missions de l’EIGE énumérées à l’article 3 du règlement no 1922/2006. Parmi les exemples notables figurent : la diffusion de données et d’informations sur l’égalité entre les hommes et les femmes à, notamment, des centres de recherche, des organismes nationaux chargés de l’égalité, des organisations non gouvernementales et des partenaires sociaux [article 3, paragraphe 1, sous a), de ce règlement] ; la diffusion d’outils méthodologiques à des autorités gouvernementales de l’Union et des États membres [article 3, paragraphe 1, sous c), dudit règlement] ; la réalisation d’enquêtes sur la situation de l’égalité entre les hommes et les femmes en Europe [article 3, paragraphe 1, sous d), du même règlement] ; l’organisation de conférences [article 3, paragraphe 1, sous g), du règlement no 1922/2006], et la mise en place d’un dialogue à travers une variété d’organismes [article 3, paragraphe 1, sous i) de ce règlement]. Les activités d’autres entités, à savoir les « institutions et organisations nationales ou internationales compétentes », sont reconnues à l’article 4, paragraphe 3, dudit règlement.

69.

Je reconnais que l’EIGE a indiqué, dans sa réponse aux questions posées par la Cour, que sa mission principale est la collecte de données, et l’analyse et la diffusion de données, et qu’il est la seule source de données comparables sur les questions d’égalité entre les hommes et les femmes, au niveau de l’UE et au niveau national. Toutefois, il ressort de la législation résumée précédemment dans les présentes conclusions qu’il ne s’agit pas de sa seule activité.

70.

Enfin, même si le dossier indique que toutes les activités de l’EIGE sont actuellement financées par des ressources de l’Union, plutôt que par des paiements effectués en rémunération des services rendus au titre de l’article 14, paragraphe 3, sous b), du règlement no 1922/2006, cela ne s’oppose pas à ce qu’il soit considéré comme exerçant une « activité économique ». Il en est ainsi parce que, en application de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104, la question de savoir si l’entreprise poursuit un but lucratif est dénuée de pertinence ( 86 ). Dans la jurisprudence rendue au titre de la directive 2001/23, la Cour a jugé que des services qui, sans relever de l’exercice de prérogatives de puissance publique, sont assurés dans l’intérêt public et sans but lucratif et qui se trouvent en concurrence avec ceux proposés par des opérateurs poursuivant un but lucratif sont qualifiés d’« activités économiques » ( 87 ). Ainsi, contrairement à ce que font valoir l’EIGE et la Commission dans leurs réponses aux questions écrites, la question de savoir si l’EIGE poursuit ou non des objectifs concurrentiels dans l’exercice de ses activités est dénuée de pertinence. Ce qui importe est l’existence de services en concurrence avec d’autres entreprises sur les marchés en cause qui poursuivent ce type d’objectifs. Le fait d’inscrire les missions de l’EIGE dans le cadre des compétences de l’Union (article 4, paragraphe 1, du règlement no 1922/2006) n’affaiblit pas non plus l’exercice par l’EIGE d’une « activité économique » compte tenu de l’étendue de la compétence de l’Union en matière d’égalité entre les hommes et les femmes, dont la promotion répond à l’intérêt général.

71.

Enfin, il convient de relever qu’une interprétation large du champ d’application de la directive 2008/104 est justifiée afin de ne pas compromettre la réalisation de l’objectif de cette directive et de ne pas porter atteinte à l’effet utile de celle-ci (voir point 54 des présentes conclusions).

4. Réponse à la quatrième question

72.

Il convient de répondre par l’affirmative à la quatrième question. Lorsque les juridictions de l’État membre en cause ont estimé que tous les emplois et fonctions exercés par des travailleurs intérimaires comprennent des tâches accomplies uniquement par des personnes recrutées en vertu du statut des fonctionnaires, les emplois occupés et les fonctions exercées par les travailleurs intérimaires doivent être considérés comme constituant le « même poste », au sens de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/104. Cette appréciation est conforme à l’autonomie administrative de l’EIGE ( 88 ) et au statut des fonctionnaires.

73.

Il en va ainsi pour les raisons suivantes.

74.

En premier lieu, la partie responsable de la violation de l’obligation d’égalité de traitement prévue à l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/104 est l’employeur défendeur. Ainsi que le soulignent les requérants (point 24 des présentes conclusions), l’interprétation de l’article 5, paragraphe 1, de cette directive est sollicitée par la juridiction de renvoi pour déterminer les responsabilités au titre du droit lituanien de l’employeur défendeur à l’égard des requérants, et non pas de l’EIGE. Ainsi, dans une certaine mesure, la discussion figurant dans les observations écrites sur la question de savoir dans quelle proportion les obligations prévues dans les directives de l’Union sont applicables aux institutions de l’Union lorsqu’elles agissent en qualité d’employeur est superflue ( 89 ), dès lors que ces arrêts concernent des recours introduits devant le Tribunal dans lesquels l’institution était partie défenderesse dans des recours intentés par ses agents ( 90 ). Lesdits arrêts concernent l’incidence des directives sur les institutions de l’Union en ce qui concerne « leur personnel » ( 91 ).

75.

En deuxième lieu, aucune question ne se pose en matière de préjudice, que ce soit à l’autonomie de l’EIGE ou au statut des fonctionnaires, parce que les requérants sollicitent uniquement, auprès du défendeur et non pas de l’EIGE, le paiement d’arriérés de rémunération qu’ils prétendent leur être dus, plutôt que la requalification de leurs contrats de travail intérimaire en contrats permanents. Ne se pose donc pas la question de savoir si les juridictions lituaniennes ont conféré aux requérants le statut de fonctionnaire ou d’autre agent de l’Union en violation du statut des fonctionnaires et de l’autonomie des institutions de l’Union ( 92 ). Contrairement aux arguments avancés par la Commission, l’affaire au principal peut donc être distinguée de l’arrêt rendu dans l’affaire Tordeur ( 93 ), invoqué par la Commission dans sa réponse aux questions écrites posées par la Cour, car le travailleur intérimaire en cause dans cette affaire avait tenté de s’appuyer, dans le cadre d’un renvoi préjudiciel, sur une disposition de droit belge qui aurait exigé que la Commission convertisse un contrat de travail à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée. La Cour a jugé ce qui suit :

« Il est vrai que la protection sociale du travailleur intérimaire ne peut être méconnue pour la seule raison que ce travailleur est mis à la disposition d’une institution communautaire. Toutefois, une telle protection ne saurait être assurée par des mesures qui constitueraient une intrusion dans la sphère d’autonomie des institutions des Communautés. [...] [I]l est à exclure que la conclusion d’un contrat [...] à durée indéterminée [...] puisse découler non pas d’une décision de l’autorité désignée comme compétente à cet égard, mais du fait, même sanctionné par une décision du juge national, que certaines dispositions de la législation de l’État membre du siège, en matière de travail intérimaire, n’ont pas été respectées. » ( 94 )

76.

Il ne ressort pas du dossier qu’une autre personne que l’employeur défendeur serait responsable aussi bien du paiement réclamé par les requérants que de l’obligation, visée à l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/104, selon laquelle « [p]endant la durée de leur mission auprès d’une entreprise utilisatrice, les conditions essentielles de travail et d’emploi des travailleurs intérimaires sont au moins celles qui leur seraient applicables s’ils étaient recrutés directement par ladite entreprise pour y occuper le même poste » ( 95 ).

77.

Il convient d’admettre que la notion de « rémunération » au titre de la directive 2008/104 n’est pas définie dans cette disposition ( 96 ) et qu’il existe d’autres dispositions de cette directive qui pourraient vraisemblablement porter atteinte à l’autonomie de l’EIGE, telles que l’article 10 de ladite directive qui permet aux États membres d’infliger des sanctions aux entreprises utilisatrices. Toutefois, cette possibilité dépendrait de la nature de la sanction et des circonstances de l’espèce. Le litige au principal se limite, en revanche, aux conditions de travail et d’emploi relatives à la rémunération au titre de l’article 3, paragraphe 1, sous f), ii), de la directive 2008/104 et à la manière de calculer « au moins [les conditions de rémunération] qui [...] seraient applicables [si les requérants avaient été] recrutés directement », comme prévu à l’article 5, paragraphe 1, de cette directive. Le recours par les juridictions lituaniennes à l’article 80 du RAA est logique, eu égard aux constatations factuelles effectuées, et je ne suis pas d’accord avec les arguments de la Commission en ce sens que ce recours crée des difficultés insurmontables (voir note en bas de page 45 des présentes conclusions).

78.

L’EIGE et la Commission font valoir que l’expression « recrutés directement par ladite entreprise pour y occuper le même poste », figurant à l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/104, nécessite qu’une comparaison soit faite avec les travailleurs intérimaires recrutés directement par l’EIGE pour effectuer un travail intérimaire en application du droit lituanien, plutôt qu’avec ceux recrutés par l’intermédiaire d’une entreprise de travail temporaire, tandis que tant les requérants que la République de Lituanie font valoir que cet exercice comparatif devrait plutôt impliquer un examen du recrutement au titre du statut des fonctionnaires.

79.

Ni l’une ni l’autre de ces comparaisons ne correspond entièrement à l’exercice requis. Il convient de rappeler que « [l]e principe de l’égalité de traitement, tel que prévu à l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/104, [exige que] pendant la durée de leur mission auprès d’une entreprise utilisatrice, les conditions essentielles de travail et d’emploi des travailleurs intérimaires doivent, au minimum, correspondre à celles qui leur seraient applicables s’ils étaient recrutés directement par ladite entreprise pour y occuper le même poste » ( 97 ).

80.

Comme expliqué dans les observations écrites des requérants (voir point 29 des présentes conclusions), et dans celles de la République de Lituanie (point 37 des présentes conclusions), l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/104 nécessite d’enquêter sur les faits ( 98 ). Les requérants ont-ils, dans les faits, accompli des fonctions, dans le cadre des postes qu’ils ont occupés, qui sont celles exercées par un employé qui, au titre du statut des fonctionnaires, reçoit une rémunération plus élevée que celle perçue au titre du contrat de travail intérimaire ? Dans le cadre de cet exercice, les contrats de travail et le statut des fonctionnaires sont plus utiles en tant qu’éléments de preuve qu’en tant que normes juridiques. Il ressort de l’ordonnance de renvoi que cette vérification factuelle a effectivement été effectuée par la commission des litiges de droit du travail (voir point 20 des présentes conclusions). Une fois qu’a été vérifié, sur le fondement des éléments de preuve, quelles étaient précisément les fonctions et les activités exercées par le travailleur intérimaire, puis analysé ce qui avait été convenu, la commission des litiges de droit du travail a accordé la rémunération prévue pour le groupe de fonctions II, grade 4, au titre de l’article 80 du RAA, et due par l’employeur défendeur.

81.

En troisième lieu, comme déjà indiqué, une restriction au principe d’égalité de traitement, l’une des pierres angulaires de la directive 2008/104, n’est admise que dans « certains cas bien délimités » ( 99 ). Ces cas sont énoncés à l’article 5, paragraphes 2 à 4, de la directive 2008/104. Ils ne se présentent pas dans l’affaire au principal.

82.

Enfin, la question pourrait se poser de savoir ce qu’il convient de faire si l’EIGE a excédé son pouvoir d’appréciation, prévu à l’article 4, paragraphe 5, du règlement no 1922/2006, d’« établir des liens contractuels, notamment de sous-traitance, avec d’autres organismes, aux fins de la réalisation de tâches qu’il pourrait être amené à leur confier » ( 100 ) ou s’il a agi d’une manière contraire au statut des fonctionnaires qui le lie en application de l’article 13, paragraphe 1, du règlement no 1922/2006 ( 101 ).

83.

Il est établi dans la jurisprudence que le « travail intérimaire est caractérisé par une relation triangulaire entre le travailleur, une société externe et l’institution ou l’organisme de l’Union qui implique la conclusion de deux contrats : un premier contrat entre la société de travail intérimaire et l’institution ou l’organisme de l’Union et un second contrat entre le travailleur intérimaire et la société de travail intérimaire [...] Ainsi, cette relation est caractérisée par la présence d’une société privée intermédiaire qui réalise un bénéfice en mettant un travailleur à la disposition de l’institution de l’Union ou en l’affectant à la réalisation de tâches déterminées au sein ou pour le compte de celle-ci. C’est l’intervention de ces sociétés externes en tant qu’intermédiaires qui ne permet pas de conclure à l’existence d’un lien juridique direct entre l’intéressé et l’institution ou l’organisme de l’Union » ( 102 ).

84.

Une relation triangulaire nécessite donc une solution triangulaire. Il incombe à l’employeur défendeur de saisir le Tribunal de l’Union européenne, plutôt qu’aux requérants de demander à l’EIGE le remboursement des arriérés ordonné par un juge lituanien, si, au regard du droit de l’Union, ils souhaitent faire valoir que l’EIGE a outrepassé ses compétences en ce qui concerne la nature du travail qu’il leur a effectivement confié. Comme le fait valoir la République de Lituanie (point 35 des présentes conclusions), cette solution est conforme à l’absence de dispositions dans le statut des fonctionnaires concernant les travailleurs intérimaires.

85.

J’arrive à cette conclusion à la lumière du droit des requérants à un accès à un tribunal et à un recours effectif au titre de l’article 47, premier alinéa, de la Charte ( 103 ), compte tenu des difficultés qu’ils rencontreraient en ce qui concerne l’obtention de la qualité pour agir devant le Tribunal, en raison de l’absence de contrat avec l’EIGE ( 104 ).

V. Conclusion

86.

Je propose donc de répondre comme suit au Lietuvos Aukščiausiasis Teismas (Cour suprême de Lituanie) :

1)

Les agences de l’Union européenne, telles que l’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes (EIGE), sont des « entreprises utilisatrices » au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104/CE du Parlement européen et du Conseil, du 19 novembre 2008, relative au travail intérimaire, telles qu’elles sont définies à l’article 3, paragraphe 1, sous d), de la directive 2008/104.

2)

La directive 2008/104 doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à ce qu’elle s’applique à la mise à la disposition d’entreprises utilisatrices n’exerçant pas une activité économique de travailleurs intérimaires.

3)

Les domaines d’action et fonctions de l’EIGE, définis aux articles 3 et 4 du règlement (CE) no 1922/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 20 décembre 2006, portant création d’un Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes, sont à considérer comme étant des activités économiques au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104.

4)

Lorsque les juridictions de l’État membre concerné ont estimé que tous les emplois et fonctions exercés par les travailleurs intérimaires comprennent des tâches accomplies uniquement par des personnes recrutées en vertu du statut des fonctionnaires, les emplois occupés et les fonctions exercées par les travailleurs intérimaires doivent être considérés comme constituant le « même poste » au sens de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/104. Cette conclusion est conforme à l’autonomie administrative de l’EIGE et au statut des fonctionnaires.


( 1 ) Langue originale : l’anglais.

( 2 ) JO 2008, L 327, p. 9. Voir, auparavant, arrêts du 11 avril 2013, Della Rocca (C‑290/12, EU:C:2013:235) ; du 17 mars 2015, AKT (C‑533/13, EU:C:2015:173) ; du 17 novembre 2016, Betriebsrat der Ruhrlandklinik (C‑216/15, EU:C:2016:883) ; du 14 octobre 2020, KG (Missions successives dans le cadre du travail intérimaire) (C‑681/18, EU:C:2020:823), et du 3 juin 2021, TEAM POWER EUROPE (C‑784/19, EU:C:2021:427). Voir, également, arrêt du Tribunal du 13 décembre 2016, IPSO/BCE (T‑713/14, EU:T:2016:727).

( 3 ) E. S., M. L., M. P., V. V., et R. V. sont dénommés « parties défenderesses au pourvoi » dans le dossier. Puisqu’ils étaient les requérants dans la procédure de première instance devant les juridictions lituaniennes, ils seront visés comme tels dans les présentes conclusions.

( 4 ) UAB « Manpower Lit » est désigné dans le dossier comme étant la « partie demanderesse ». UAB « Manpower Lit » ayant été la partie défenderesse dans la procédure de première instance devant les juridictions lituaniennes, il sera désigné par l’« employeur défendeur » dans les présentes conclusions.

( 5 ) Voir règlement (CE) no 1922/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 20 décembre 2006, portant création d’un Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes (JO 2006, L 403, p. 9). Voir, en particulier, article 1er de ce règlement. Il convient de relever que l’EIGE n’est pas une institution de l’Union au sens de l’article 13 TUE. L’expression « institutions, organes et organismes » est couramment utilisée dans les traités pour désigner toute autorité établie par les traités ou par le droit dérivé. Voir les explications relatives à la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») (JO 2007, C 303, p. 17) s’agissant de l’article 51, paragraphe 1, de la Charte. Voir, également, article 1er, paragraphe 2, sous a), du règlement de procédure de la Cour de justice du 25 septembre 2012 (JO 2012, L 265, p. 1) tel que modifié le 18 juin 2013 (JO 2013, L 173, p. 65), le 19 juillet 2016 (JO 2016, L 217, p. 69), le 9 avril 2019 (JO 2019, L 111, p. 73) et le 26 novembre 2019 (JO 2019, L 316, p. 103). En ce qui concerne les agences, voir, de manière générale, par exemple, Kohtamäki, N., Theorising the legitimacy of EU regulatory agencies, Peter Lang, 2019 ; Busuioc, M., European Agencies : Law and Practices of Accountability, OUP, 2013.

( 6 ) JO 1962, L 45, p. 1385, tel que modifié par le règlement (CE, Euratom) no 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004 (JO 2004, L 124, p. 1) (ci-après le « statut des fonctionnaires »). La partie du règlement no 31 qui traite, notamment, du régime applicable aux autres agents de la Communauté européenne et de l’énergie atomique sera ci-après désignée par « RAA ».

( 7 ) Voir, notamment, article 335 TFUE.

( 8 ) Voir, notamment, article 6 du règlement no 1922/2006 et articles 335 et 336 TFUE.

( 9 ) Voir, par analogie, arrêt du 5 juin 2018, Grupo Norte Facility (C‑574/16, EU:C:2018:390, point 46), qui portait sur la clause 4, point 1, de l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée, conclu le 18 mars 1999, qui figure à l’annexe de la directive 1999/70/CE du Conseil, du 28 juin 1999, concernant l’accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée (JO 1999, L 175, p. 43). Le considérant 5 de la directive 2008/104 précise le lien entre ces deux directives.

( 10 ) L’article 3, paragraphe 3, de la loi sur l’emploi par les entreprises de travail intérimaire prévoit les mêmes dispositions.

( 11 ) L’EIGE a indiqué, dans sa réponse aux questions écrites posées par la Cour, que cette procédure de marché public était conforme au règlement (UE, Euratom) no 966/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2012, relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union et abrogeant le règlement (CE, Euratom) no 1605/2002 du Conseil (JO 2012, L 298, p. 1). Ce règlement a été abrogé.

( 12 ) Voir les observations écrites de la Commission.

( 13 ) Voir les observations écrites de la Commission.

( 14 ) Voir les observations écrites de la Commission.

( 15 ) Voir les observations écrites de la Commission.

( 16 ) Article 80 du RAA.

( 17 ) Voir les observations de la Commission.

( 18 ) Les requérants renvoient à l’arrêt du 17 novembre 2016, Betriebsrat der Ruhrlandklinik (C‑216/15, EU:C:2016:883).

( 19 ) Ici, les requérants font référence à l’objectif de la directive 2008/104, tel que décrit à son article 2, et à la recommandation de la Commission du 12 juillet 2004 relative à la transposition en droit national des directives ayant un impact sur le marché intérieur (JO 2005, L 98, p. 47).

( 20 ) Ici, les requérants font référence à l’article 80 du RAA et aux quatre groupes de fonctions relatifs aux tâches qui y sont mentionnés.

( 21 ) La République de Lituanie fait référence à l’arrêt du 5 juin 2018, Grupo Norte Facility (C‑574/16, EU:C:2018:390, points 36 à 38 et jurisprudence citée). Il est également fait référence, au regard de l’objectif de la directive 2008/104, aux considérants 10 et 12 ainsi qu’aux articles 2 et 5 de celle-ci.

( 22 ) La République de Lituanie fait référence à l’arrêt du 17 novembre 2016, Betriebsrat der Ruhrlandklinik (C‑216/15, EU:C:2016:883, point 36).

( 23 ) La République de Lituanie fait référence à l’arrêt du 14 octobre 2010, Union syndicale Solidaires Isère (C‑428/09, EU:C:2010:612, point 40).

( 24 ) Dans ce contexte, la République de Lituanie fait référence aux exclusions prévues à l’article 1er, paragraphe 3, et à l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2008/104.

( 25 ) Voir, de manière générale, arrêt du 17 mars 2015, AKT (C‑533/13, EU:C:2015:173). Voir également arrêt du 14 octobre 2020, KG (Missions successives dans le cadre du travail intérimaire) (C‑681/18, EU:C:2020:823, point 43).

( 26 ) La République de Lituanie fait référence à l’arrêt du 13 décembre 2016, IPSO/BCE (T‑713/14, EU:T:2016:727, points 28 et 95).

( 27 ) La République de Lituanie fait référence aux arrêts du 13 décembre 2016, IPSO/BCE (T‑713/14, EU:T:2016:727, points 96, 105 et 106), ainsi que du 19 septembre 2013, Réexamen Commission/Strack (C‑579/12 RX‑II, EU:C:2013:570, point 39).

( 28 ) La République de Lituanie fait référence au rapport de la Commission COM(2014) 176 final.

( 29 ) La Commission fait référence à l’article 9 de la directive 2008/104 et à l’arrêt du 17 novembre 2016, Betriebsrat der Ruhrlandklinik (C‑216/15, EU:C:2016:883, points 44 à 47).

( 30 ) Rapport annuel sur les agences de l’UE relatif à l’exercice 2018 (JO 2019, C 417, p. 1) (https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=uriserv:OJ.C_.2019.417.01.0001.01.FRA&toc=OJ:C:2019:417:TOC), points 1.33 et 2.30.

( 31 ) La République de Lituanie fait référence ici à l’arrêt du 5 juin 2018, Grupo Norte Facility (C‑574/16, EU:C:2018:390, point 46).

( 32 ) Dans ce contexte, la Commission fait référence à l’article 1er, paragraphe 2, de sa proposition initiale de la directive (COM/2002/0149 final), à une résolution législative du Parlement européen du 20 mars 2002 et à la proposition modifiée de la Commission du 28 novembre 2002.

( 33 ) La Commission invoque les arrêts du 24 mai 2011, Commission/Belgique (C‑47/08, EU:C:2011:334, point 96) ; du 6 septembre 2011, Scattolon (C‑108/10, EU:C:2011:542, point 44), et du 17 novembre 2016, Betriebsrat der Ruhrlandklinik (C‑216/15, EU:C:2016:883, points 44 et 47). Elle s’appuie également sur le considérant 10 et les articles 2, 3 et 4, paragraphe 1, du règlement no 1922/2006.

( 34 ) Dans ce contexte, la Commission fait référence au considérant 23, à l’article 9, paragraphe 1, et à l’article 11 de la directive 2008/104, ainsi qu’à la base juridique de cette directive, à savoir l’article 153, paragraphe 2, TFUE (anciennement article 137, paragraphe 2, TCE), à l’article 153, paragraphe 4, TFUE, ainsi qu’aux arrêts du 18 octobre 1990, Dzodzi (C‑297/88 et C‑197/89, EU:C:1990:360, points 39 à 42) ; du 17 juillet 1997, Leur-Bloem (C‑28/95, EU:C:1997:369, point 33), et du 19 novembre 2019, TSN et AKT (C‑609/17 et C‑610/17, EU:C:2019:981, point 48). La Commission a précisé, dans sa réponse aux questions écrites posées par la Cour, que ces dispositions nationales ne doivent pas contrevenir à l’article 336 TFUE qui confère au législateur de l’Union une autonomie dans le domaine de la fonction publique.

( 35 ) La Commission relève que le statut des fonctionnaires réglemente les relations juridiques entre les institutions et les fonctionnaires, en établissant des droits et des obligations réciproques. Elle fait référence aux arrêts du 22 février 2006, Adam/Commission (T‑342/04, EU:T:2006:61, point 34), et du 12 juillet 2011, Commission/Q (T‑80/09 P, EU:T:2011:347, point 41).

( 36 ) La Commission fait référence aux arrêts du 6 décembre 1989, Mulfinger e.a./Commission (C‑249/87, EU:C:1989:614, point 10), et du 19 juillet 1999, Mammarella/Commission (T‑74/98, EU:T:1999:159, points 39 et 40).

( 37 ) Arrêt du 6 décembre 1989, Mulfinger e.a./Commission (C‑249/87, EU:C:1989:614, points 11 et 14).

( 38 ) La Commission fait référence, notamment, à l’arrêt du 24 novembre 2015, Commission/D’Agostino (T‑670/13 P, EU:T:2015:877, point 32).

( 39 ) Ici, la Commission fait référence à l’arrêt du 4 décembre 2018, Carreras Sequeros e.a./Commission (T‑518/16, EU:T:2018:873, point 60) (sur pourvoi C‑119/19 P).

( 40 ) Ici, la Commission fait référence, à titre d’exemple, à l’arrêt du 19 septembre 2013, Réexamen Commission/Strack (C‑579/12 RX‑II, EU:C:2013:570, point 46).

( 41 ) La Commission fait référence à l’arrêt du 7 février 2019, RK/Conseil (T‑11/17, EU:T:2019:65, points 68 et 70).

( 42 ) Arrêt du 4 décembre 2018, Carreras Sequeros e.a./Commission (T‑518/16, EU:T:2018:873, point 61).

( 43 ) La Commission fait référence à l’ordonnance du 6 juillet 2001, Dubigh et Zaur‑Gora/Commission (T‑375/00, EU:T:2001:181, point 21).

( 44 ) La Commission fait référence à l’arrêt du 3 octobre 1985, Tordeur (232/84, EU:C:1985:392, point 27).

( 45 ) À savoir, quels éléments de la rémunération des agents contractuels devraient être pris en considération ? Quel régime fiscal devrait être appliqué, étant donné que les conditions applicables dans le cadre du régime national et du régime statutaire sont complètement différentes ?

( 46 ) JO 2016, C 202, p. 266.

( 47 ) La Commission fait référence à l’arrêt du 6 décembre 1989, Mulfinger e.a./Commission (C‑249/87, EU:C:1989:614).

( 48 ) Par exemple, arrêt du 17 décembre 2020, Generalstaatsanwaltschaft Hamburg (C‑416/20 PPU, EU:C:2020:1042, point 27 et jurisprudence citée).

( 49 ) Voir article 6 du règlement no 1922/2006 et articles 335 et 336 TFUE.

( 50 ) Voir article 6 du règlement no 1922/2006 et articles 335 et 336 TFUE.

( 51 ) Arrêt du 13 décembre 2016, IPSO/BCE (T‑713/14, EU:T:2016:727, point 102).

( 52 ) Voir, par exemple, arrêt du 3 octobre 1985, Tordeur (232/84, EU:C:1985:392), et ordonnance du 6 juillet 2001, Dubigh et Zaur-Gora/Commission (T‑375/00, EU:T:2001:181). Cet arrêt concernait une mise à la disposition de la Commission d’un travailleur intérimaire par une société d’intérim dénommée Manpower. Voir ultérieurement, par exemple, ordonnance du 15 septembre 2010, Briot (C‑386/09, EU:C:2010:526).

( 53 ) Arrêt du 26 octobre 2006, Landgren/ETF (F‑1/05, EU:F:2006:112). En ce qui concerne le lien entre la directive 2008/104 et la directive 1999/70, voir note en bas de page 9 des présentes conclusions.

( 54 ) Note en bas de page 5 des présentes conclusions.

( 55 ) Sur les différentes manières dont le « contexte » a une incidence sur l’interprétation des mesures adoptées par l’Union, voir mes conclusions dans l’affaire Pinckernelle (C‑535/15, EU:C:2016:996, point 40).

( 56 ) Voir analyse de l’avocate générale Sharpston dans ses conclusions dans l’affaire KG (Missions successives dans le cadre du travail intérimaire) (C‑681/18, EU:C:2020:300, point 36 et sources mentionnées).

( 57 ) Arrêt du 14 octobre 2020, KG (Missions successives dans le cadre du travail intérimaire) (C‑681/18, EU:C:2020:823, point 51). La Cour fait référence au considérant 15 et à l’article 6, paragraphes 1 et 2, de la directive 2008/104.

( 58 ) Arrêt du 14 octobre 2020, KG (Missions successives dans le cadre du travail intérimaire) (C‑681/18, EU:C:2020:823, point 50). La Cour fait référence au considérant 11 de la directive 2008/104.

( 59 ) En ce qui concerne les travaux préparatoires ayant précédé l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/104, voir le rapport du groupe d’experts sur la transposition de la directive 2008/104/CE relative au travail intérimaire, août 2011, p. 7 à 11 (ci-après le « rapport du groupe d’experts de 2011 »).

( 60 ) Il convient de relever que l’arrêt du 17 novembre 2016, Betriebsrat der Ruhrlandklinik (C‑216/15, EU:C:2016:883), portait sur la question de savoir si une entreprise de travail intérimaire, et non pas l’entreprise utilisatrice, exerçait une « activité économique ».

( 61 ) Arrêt du 17 novembre 2016, Betriebsrat der Ruhrlandklinik (C‑216/15, EU:C:2016:883, point 36).

( 62 ) Arrêt du 24 octobre 2019, Belgische Staat (C‑469/18 et C‑470/18, EU:C:2019:895, point 21 et jurisprudence citée).

( 63 ) Voir, par exemple, arrêt du 30 janvier 2020, I.G.I. (C‑394/18, EU:C:2020:56, point 45 et jurisprudence citée).

( 64 ) Conclusions de l’avocat général Bobek dans l’affaire J & S Service (C‑620/19, EU:C:2020:649, point 2). Voir également, par exemple, arrêt du 7 novembre 2018, K et B (C‑380/17, EU:C:2018:877, point 35).

( 65 ) Arrêt du 18 octobre 1990, Dzodzi (C‑297/88 et C‑197/89, EU:C:1990:360).

( 66 ) Arrêt du 7 novembre 2018, K et B (C‑380/17, EU:C:2018:877, point 36 et jurisprudence citée). Voir également, par exemple, arrêts du 28 mars 1995, Kleinwort Benson (C‑346/93, EU:C:1995:85, point 20) ; du 4 juin 2020, C.F. (Contrôle fiscal) (C‑430/19, EU:C:2020:429, point 26), et du 10 septembre 2020, Tax-Fin-Lex (C‑367/19, EU:C:2020:685, point 21).

( 67 ) Voir notamment, à cet égard, arrêt du 10 décembre 2020, J & S Service (C‑620/19, EU:C:2020:1011).

( 68 ) Arrêt du 18 octobre 2012, Nolan (C‑583/10, EU:C:2012:638, points 33, 34, 43 et 54).

( 69 ) Conclusions de l’avocat général Bobek dans l’affaire J & S Service (C‑620/19, EU:C:2020:649, point 50).

( 70 ) Voir, par analogie, arrêt du 10 décembre 2020, J & S Service (C‑620/19, EU:C:2020:1011, points 46 et 47).

( 71 ) Considérant 12 de la directive 2008/104.

( 72 ) Considérant 18 de la directive 2008/104. Voir également arrêt du 14 octobre 2020, KG (Missions successives dans le cadre du travail intérimaire) (C‑681/18, EU:C:2020:823).

( 73 ) Considérant 14 de la directive 2008/104.

( 74 ) Article 9, paragraphe 1, de la directive 2008/104.

( 75 ) Arrêt du 19 novembre 2019, TSN et AKT (C‑609/17 et C‑610/17, EU:C:2019:981, point 52). Au point 50, la Cour a jugé que « les situations en cause au principal diffèrent de la situation dans laquelle un acte de l’Union investit les États membres d’une liberté de choix entre plusieurs modalités d’application ou d’un pouvoir discrétionnaire ou d’appréciation qui fait partie intégrante du régime établi par cet acte, ou encore de la situation dans laquelle un tel acte autorise l’adoption, par les États membres, de mesures spécifiques destinées à contribuer à la réalisation de son objet ». Voir, également, conclusions de l’avocat général Hogan dans l’affaire Land Oberösterreich (Aide au logement) (C‑94/20, EU:C:2021:155, point 64), et de l’avocat général Bobek dans les affaires Asociaţia « Forumul Judecătorilor din România » e.a. (C‑83/19, C‑127/19, C‑195/19, C‑291/19 et C‑355/19, EU:C:2020:746, points 190 à 194). Je reconnais que la directive 2008/104, contrairement à la directive en cause dans l’arrêt TSN et AKT, ne contient aucune disposition spécifique autorisant les États membres à introduire des mesures plus favorables à la protection des travailleurs intérimaires. La directive 2008/104 constitue, toutefois, une directive opérant une harmonisation a minima et la transposition de celle-ci par la Lituanie est allée au-delà des exigences qui y sont prévues.

( 76 ) Il convient toutefois de relever que, même si une mise à la disposition de telles entreprises n’est pas soumise à l’obligation inhérente à l’article 31 de la Charte relatif au droit à des conditions de travail justes et équitables, elle demeure soumise à ces deux droits fondamentaux tels que garantis par le droit lituanien et la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950. Voir, notamment, conclusions de l’avocat général Saugmandsgaard Øe dans l’affaire Commission/Hongrie (Usufruits sur terres agricoles) (C‑235/17, EU:C:2018:971). Une telle obligation s’applique à l’ensemble des 19 États membres ayant transposé la directive 2008/104 de la même manière que la Lituanie.

( 77 ) JO 2001, L 82, p. 16.

( 78 ) Conclusions de l’avocat général Szpunar dans l’affaire ISS Facility Services (C‑344/18, EU:C:2019:1009, point 41), faisant référence aux arrêts du 15 octobre 1996, Henke (C‑298/94, EU:C:1996:382, point 14) ; du 26 septembre 2000, Mayeur (C‑175/99, EU:C:2000:505, point 33), et du 11 novembre 2004, Delahaye (C‑425/02, EU:C:2004:706, point 30).

( 79 ) Ibid.

( 80 ) Voir, par exemple, arrêt du 20 juillet 2017, Piscarreta Ricardo (C‑416/16, EU:C:2017:574, points 34 et 35).

( 81 ) Voir la position adoptée par les partenaires sociaux dans le rapport du groupe d’experts de 2011 (note en bas de page 59 des présentes conclusions), p. 11.

( 82 ) Par exemple, comme je l’ai fait remarquer dans mes conclusions dans l’affaire TopFit et Biffi (C‑22/18, EU:C:2019:181, point 53), la Cour a précisé dans l’arrêt du 11 avril 2000, Deliège (C‑51/96 et C‑191/97, EU:C:2000:199, point 51), qui portait sur une restriction à la libre circulation, que l’octroi de bourses publiques délivrées en fonction des résultats sportifs ainsi qu’une sponsorisation privée constituent des faits pertinents pour déterminer si un athlète amateur exerce une activité économique. La Cour, dans son arrêt du 13 juin 2019, TopFit et Biffi (C‑22/18, EU:C:2019:497), a confirmé le droit de M. Biffi à la libre circulation en sa qualité de citoyen de l’Union en vertu de l’article 21 TFUE, même si l’affaire concernait des athlètes amateurs ; pour ce qui concerne la notion d’« activité économique » dans le domaine du droit de la concurrence, voir arrêt du 1er juillet 2008, MOTOE (C‑49/07, EU:C:2008:376).

( 83 ) Je partage l’approche adoptée par l’avocat général Saugmandsgaard Øe dans ses conclusions dans l’affaire Betriebsrat der Ruhrlandklinik (C‑216/15, EU:C:2016:518, point 47) selon laquelle, puisque la définition de la notion d’« exercice d’une “activité économique” » ne ressort pas clairement de la teneur de la directive 2008/104 ni des travaux préparatoires, la Cour a pu s’appuyer sur la signification de la notion d’« activité économique » dans d’autres domaines du droit de l’Union.

( 84 ) C‑216/15, EU:C:2016:883.

( 85 ) Arrêt du 17 novembre 2016, Betriebsrat der Ruhrlandklinik (C‑216/15, EU:C:2016:883, point 44 et jurisprudence citée).

( 86 ) Contrairement aux arguments avancés par l’EIGE, il est dès lors dénué de pertinence que l’EIGE n’est pas un « assujetti » au sens de l’article 9 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO 2006, L 347, p. 1). Voir document de la Commission ARES(2018)4985586 du 28/09/2018.

( 87 ) Arrêt du 20 juillet 2017, Piscarreta Ricardo (C‑416/16, EU:C:2017:574, point 34 et jurisprudence citée). Il convient de relever que la directive 1999/70 concernant l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée, à laquelle est liée la directive 2008/104 (voir note en bas de page 9 des présentes conclusions), s’applique aux contrats à durée déterminée conclus avec les administrations et les autres entités du secteur public. Voir arrêt du 25 octobre 2018, Sciotto (C‑331/17, EU:C:2018:859, point 43). Cela suggère que seules les entités publiques qui exercent des fonctions essentielles de la puissance publique devraient être exclues de la notion d’« exercice d’une “activité économique” » au titre de la directive 2008/104.

( 88 ) Voir article 6 du règlement no 1922/2006 et articles 335 et 336 TFUE.

( 89 ) République de Lituanie, point 33 des présentes conclusions, et Commission, point 42 des présentes conclusions.

( 90 ) Voir, par exemple, arrêts du 19 septembre 2013, Réexamen Commission/Strack (C‑579/12 RX‑II, EU:C:2013:570) ; du 13 décembre 2016, IPSO/BCE (T‑713/14, EU:T:2016:727, points 105 et 106), ainsi que du 7 février 2019, RK/Conseil (T‑11/17, EU:T:2019:65). Pour une discussion sur les principes justifiant que les directives lient les institutions de l’Union, voir Cortese, B., « Reasonableness of legislative choices and protection against (discriminatory) dismissal of temporary staff : does the approach of the Court of Justice of the European Union to judicial review and judicial control meet high rule of law standards ? », Era Forum 12, 641, 2012, p. 650 et 651.

( 91 ) Arrêt du 4 décembre 2018, Carreras Sequeros e.a./Commission (T‑518/16, EU:T:2018:873, point 60 et jurisprudence citée). Voir également arrêt du 24 septembre 2019, VF/BCE (T‑39/18, non publié, EU:T:2019:683).

( 92 ) Arrêt du 11 mars 1975, Porrini e.a. (65/74, EU:C:1975:38, points 14 et 15). Voir également arrêts du 9 novembre 2000, Vitari (C‑126/99, EU:C:2000:609, point 31), et du 8 septembre 2005, AB (C‑288/04, EU:C:2005:526, point 31). Il est soutenu dans l’ordonnance de renvoi que le règlement (UE, Euratom) 2018/1046 du Parlement européen et du Conseil, du 18 juillet 2018, relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union, modifiant les règlements (UE) no 1296/2013, (UE) no 1301/2013, (UE) no 1303/2013, (UE) no 1304/2013, (UE) no 1309/2013, (UE) no 1316/2013, (UE) no 223/2014, (UE) no 283/2014 et la décision no 541/2014/UE, et abrogeant le règlement no 966/2012 (JO 2018, L 193, p. 1) interdit de transférer l’exercice de fonctions à des personnes qui ne sont pas soumises au statut des fonctionnaires. Toutefois, cette question ne se pose pas dans l’affaire au principal, qui concerne uniquement la rémunération.

( 93 ) Arrêt du 3 octobre 1985, Tordeur (232/84, EU:C:1985:392).

( 94 ) Arrêt du 3 octobre 1985, Tordeur (232/84, EU:C:1985:392, points 27 et 28). Au point 26, la Cour a relevé que « selon l’article 6 du régime applicable aux autres agents des Communautés, chaque institution détermine les autorités habilitées à conclure les contrats d’engagement d’un agent, qu’il s’agisse d’un agent temporaire, ou auxiliaire, ou local, ou encore d’un conseiller spécial ». Voir également, par exemple, arrêt du 8 septembre 2005, AB (C‑288/04, EU:C:2005:526). Il convient de relever que l’affaire au principal ne saurait être comparée avec la situation examinée par l’avocat général Geelhoed dans l’affaire Betriebsrat der Vertretung der Europäischen Kommission in Österreich (C‑165/01, EU:C:2003:224, point 100). Pour un exemple d’arrêt rendu par la Cour dans lequel une ordonnance rendue par une juridiction nationale concernant des agents locaux employés par une agence de l’Union en vertu du RAA n’a pas conduit à une intrusion dans la sphère d’autonomie des institutions de l’Union, voir arrêt du 9 novembre 2000, Vitari (C‑126/99, EU:C:2000:609).

( 95 ) Voir également considérant 14 de la directive 2008/104.

( 96 ) Pour des propositions quant à la manière dont des éléments du droit de l’Union peuvent faciliter cet exercice, voir le rapport du groupe d’experts de 2011 (note en bas de page 59 des présentes conclusions), p. 19 à 21.

( 97 ) Arrêt du 14 octobre 2020, KG (Missions successives dans le cadre du travail intérimaire) (C‑681/18, EU:C:2020:823, point 52).

( 98 ) En effet, lorsque les juridictions nationales examinent si le principe d’égalité de traitement a été violé, il leur appartient d’apprécier l’ensemble des faits pertinents, y compris les questions de savoir si les groupes pertinents sont comparables, si une différence de traitement a eu lieu ou non et si elle est objectivement justifiée. Voir, par exemple, mes conclusions dans l’affaire GILDA-UNAMS e.a. (C‑282/19, EU:C:2021:217).

( 99 ) Considérant 17 de la directive 2008/104.

( 100 ) En ce qui concerne le droit de la Commission d’établir des relations conventionnelles, de manière générale, voir arrêt du 6 décembre 1989, Mulfinger e.a./Commission (C‑249/87, EU:C:1989:614, point 10). Voir également articles 272 et 335 TFUE.

( 101 ) En vertu d’une jurisprudence constante, une telle situation peut se produire, par exemple, par rapport à l’une des fonctions attribuées par les traités aux institutions, lesquelles nécessitent donc un emploi couvert par le statut, plutôt que par un contrat soumis au droit des États membres. Voir arrêt du 6 décembre 1989, Mulfinger e.a./Commission (C‑249/87, EU:C:1989:614).

( 102 ) Arrêt du 13 juillet 2018, Quadri di Cardano/Commission (T‑273/17, EU:T:2018:480, point 68 et jurisprudence citée). Voir également arrêt du 11 avril 2013, Della Rocca (C‑290/12, EU:C:2013:235, point 40).

( 103 ) Voir, notamment, dans le contexte des questions qui se posent dans la présente affaire, arrêt du 25 juin 2020, CSUE/KF (C‑14/19 P, EU:C:2020:492).

( 104 ) Voir, par exemple, ordonnance du 6 juillet 2001, Dubigh et Zaur-Gora/Commission (T‑375/00, EU:T:2001:181), et arrêt du 13 décembre 2016, IPSO/BCE (T‑713/14, EU:T:2016:727). Le considérant 21 de la directive 2008/104 est également pertinent ici, en ce qu’il prévoit effectivement l’obligation pour les États membres de fournir « des sanctions effectives, proportionnées et dissuasives en cas de violation des obligations » découlant de cette directive, tout comme le prévoit également l’article 10 de ladite directive. En outre, la responsabilité non contractuelle semblerait exclue au regard de la jurisprudence. Voir, par exemple, arrêt du 3 octobre 1985, Tordeur (232/84, EU:C:1985:392, points 15 à 21).

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