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Document 62019CC0213

Conclusions de l'avocat général M. P. Pikamäe, présentées le 9 septembre 2021.
Commission européenne contre Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord.
Manquement d’État – Article 4, paragraphe 3, TUE – Article 310, paragraphe 6, et article 325 TFUE – Ressources propres – Droits de douane – Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) – Protection des intérêts financiers de l’Union européenne – Lutte contre la fraude – Principe d’effectivité – Obligation pour les États membres de mettre à la disposition de la Commission européenne des ressources propres – Responsabilité financière des États membres en cas de pertes de ressources propres – Importations de produits textiles et de chaussures en provenance de Chine – Fraude à grande échelle et systématique – Criminalité organisée – Importateurs défaillants – Valeur en douane – Sous-évaluation – Base d’imposition de la TVA – Absence de contrôles douaniers systématiques fondés sur une analyse de risque et effectués préalablement à la mainlevée des marchandises concernées – Absence de constitution systématique de garanties – Méthode utilisée pour estimer le montant des pertes de ressources propres traditionnelles relatives aux importations présentant un risque important de sous‑évaluation – Méthode statistique fond�e sur des prix moyens établis à l’échelle de l’Union – Admissibilité.
Affaire C-213/19.

Court reports – general ; Court reports – general

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2021:724

 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. PRIIT PIKAMÄE

présentées le 9 septembre 2021 ( 1 )

Affaire C‑213/19

Commission européenne

contre

Royaume‑Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord

« Manquement d’État – Article 4, paragraphe 3, TUE – Article 310, paragraphe 6, et article 325 TFUE – Lutte contre la fraude – Exigence d’effectivité – Obligation de mise à disposition du budget de l’Union des ressources propres – Responsabilité financière des États membres – Union douanière – Règlement (CEE) no 2913/92 – Code des douanes communautaire – Règlement (UE) no 952/2013 – Code des douanes de l’Union – Droits de douane – Importations de produits textiles et de chaussures en provenance de Chine – Fraude vaste et systémique – Criminalité organisée – Importateurs défaillants – Valeur en douane – Sous-évaluation – Contrôles douaniers fondés sur l’analyse de risque – Contrôles préalables à la mainlevée – Constitution de garanties – Absence de contrôles – Articles 16 et 17 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – Ressources propres de l’Union européenne – Décisions 2007/436/CE et 2014/335/UE – Règlements (CE, Euratom) nos 1150/2000 et 609/2014 – Constatation d’une dette douanière – Obligation de mise à la disposition de l’Union européenne – Estimation de la perte des ressources propres traditionnelles – Méthodologie statistique fondée sur le prix moyen corrigé et sur le prix minimal acceptable – Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) – Directive 2006/112/CE – Base d’imposition de la TVA – Ressources propres provenant de la TVA »

Table des matières

 

I. Introduction

 

II. Le cadre juridique

 

A. Le droit en matière de ressources propres traditionnelles

 

1. Les décisions relatives au système des ressources propres

 

2. Les règlements relatifs aux modalités et à la procédure de mise à disposition des ressources propres

 

3. Le règlement (UE, Euratom) no 608/2014

 

4. Le règlement no 1553/89

 

B. Le droit des douanes

 

1. Le code des douanes communautaire

 

2. Le code des douanes de l’Union

 

3. Le règlement d’application

 

4. Le règlement d’exécution

 

C. Le droit en matière de TVA

 

III. Les faits et la procédure précontentieuse

 

A. Les faits à l’origine du litige

 

B. La procédure précontentieuse

 

IV. La procédure devant la Cour

 

V. Conclusions des parties

 

VI. Sur le recours

 

A. Sur la recevabilité

 

1. Sur l’exception d’irrecevabilité tirée d’une prétendue violation des droits de la défense du Royaume‑Uni au cours de la procédure précontentieuse et de celle devant la Cour

 

a) Sur la communication des données relatives aux calculs concernant le prix moyen corrigé, le prix minimal acceptable et les pertes estimées de ressources propres

 

b) Sur les informations relatives aux calculs effectués pour les années 2011 à 2014 sur la base des avis de paiement C18 Snake

 

c) Sur la prise de connaissance des pratiques des autres États membres en ce qui concerne l’utilisation de la méthodologie OLAF

 

d) Sur la demande de preuves quant à la nature des marchandises sous-évaluées et quant à leur État membre de destination

 

2. Sur l’exception d’irrecevabilité tirée de l’irrégularité de la procédure précontentieuse et de la requête en ce qui concerne notamment le régime douanier 42

 

3. Sur l’exception d’irrecevabilité tirée d’une violation par la Commission des principes de confiance légitime, de sécurité juridique, d’estoppel et de coopération loyale

 

4. Sur l’exception d’irrecevabilité tirée de l’impossibilité d’enjoindre la mise à disposition des montants au titre de l’article 258 TFUE

 

B. Sur le manquement aux obligations en matière de protection des intérêts financiers de l’Union et de lutte contre la fraude ainsi qu’aux obligations découlant de la réglementation douanière de l’Union

 

1. Sur les obligations des États membres de lutter contre les activités illégales portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union

 

2. Sur les mesures à prendre en vertu de la réglementation douanière pour protéger les intérêts financiers de l’Union dans la situation de fraude en cause

 

a) Sur les caractéristiques de la fraude perpétuée par les importateurs en cause et la prise de connaissance par les autorités du Royaume-Uni de cette fraude

 

b) Sur l’obligation d’instituer une analyse de risque, d’effectuer des contrôles préalables à la mainlevée, et sur la nécessité de constituer des garanties

 

1) Les observations liminaires

 

2) Sur l’obligation de recourir à l’analyse de risque

 

3) Sur l’obligation d’effectuer des contrôles préalables à la mainlevée

 

4) Sur l’obligation de constituer des garanties

 

3. Résumé des éléments retenus à l’encontre du Royaume‑Uni

 

4. Sur l’obligation pour les États membres de déterminer les montants des droits de douane et de prendre en compte les montants correspondants

 

C. Sur le manquement à la législation de l’Union relative aux ressources propres et à l’estimation de pertes de ressources propres traditionnelles que constituent les droits de douane

 

1. Sur le régime juridique de la prise en compte des montants dus et de la mise à disposition des ressources propres traditionnelles

 

2. Sur la violation de l’obligation du Royaume‑Uni de mettre à la disposition de la Commission les montants correspondant aux droits de douane constatés dans le cadre de l’opération Snake

 

3. Sur l’évaluation des pertes des ressources propres traditionnelles

 

a) Observations liminaires

 

1) Sur la compétence de la Commission pour procéder à l’évaluation des pertes de ressources propres traditionnelles et celle de la Cour pour statuer sur cette question

 

2) Sur la prétendue obligation de démontrer le dommage et le lien de causalité, ainsi que le scénario contrefactuel

 

b) Sur le fond

 

1) Sur l’aperçu de la méthodologie OLAF et son application en tant qu’outil de calcul de pertes de ressources propres traditionnelles

 

2) Sur l’application de l’arrêt Commission/Portugal

 

3) Sur l’admission de principe de l’approche proposée par la Commission pour évaluer les pertes de ressources propres traditionnelles

 

4) Sur l’utilisation de la méthodologie fondée sur des données statistiques en l’espèce

 

i) Sur la détermination du volume des importations sous-évaluées

 

– Sur la période allant de novembre 2011 à novembre 2014

 

– Sur la période allant du 1er janvier 2015 au 11 octobre 2017

 

ii) Sur la valeur de référence pour déterminer les montants des pertes des ressources propres

 

5) Résumé relatif à l’évaluation des ressources propres traditionnelles

 

4. Sur les intérêts de retard

 

D. Sur la violation du principe de coopération loyale consacrée à l’article 4, paragraphe 3, TUE

 

E. Sur le manquement aux obligations en vertu de la réglementation relative à la TVA et aux ressources propres provenant de la TVA

 

1. Sur le régime juridique de la mise à disposition au budget de l’Union des ressources provenant de la TVA

 

2. Sur le grief tenant à la perte de ressources propres provenant de la TVA au titre du régime douanier 40

 

3. Sur le grief tenant à la perte des ressources propres provenant de la TVA au titre du régime douanier 42

 

VII. Sur les dépens

 

VIII. Conclusion

I. Introduction

1.

Dans la présente affaire, la Commission européenne a introduit un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE contre le Royaume‑Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord au motif que, pendant une période allant du mois de novembre 2011 au 11 octobre 2017 inclus (ci‑après la « période d’infraction »), celui‑ci n’a pas, d’une part, pris en compte les montants corrects des droits de douane et mis à disposition le montant correct des ressources propres traditionnelles et celles fondées sur la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) afférentes à certaines importations de produits textiles et de chaussures originaires de Chine et, d’autre part, communiqué toutes les informations requises par la Commission aux fins de la détermination du montant des pertes de ressources propres traditionnelles ( 2 ).

2.

Selon la Commission, cet État a ainsi manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4, paragraphe 3, TUE, qui prévoit le principe de coopération loyale, de l’article 310, paragraphe 6, et de l’article 325 TFUE, ainsi qu’en vertu de toute une série de dispositions de droit dérivé relatives à la législation douanière de l’Union, ainsi qu’aux ressources propres traditionnelles et à la TVA.

3.

Ainsi, la présente affaire invite la Cour à développer sa jurisprudence relative à la portée des obligations en matière de lutte contre la fraude et de protection des intérêts financiers de l’Union qu’imposent les dispositions citées au point précédent, dans un contexte où la Commission allègue que l’État membre en cause n’a pas correctement déterminé la valeur en douane des marchandises importées, ces dernières ayant été sous-évaluées lors de leur importation en raison de l’absence de mesures de contrôle effectives. Cette affaire soulève des questions fondamentales, telles que la possibilité pour la Commission d’apprécier le montant de sa demande relative aux pertes de ressources propres, dans une situation où, en l’absence d’évaluation correcte de la valeur de marchandises par l’État membre en cause, la Commission se fonde sur une méthode statistique, à savoir les prix moyens corrigés afférents aux marchandises importées à l’échelle de l’Union. Enfin, la Cour est amenée à trancher la question de savoir si l’État membre d’importation des marchandises est redevable des pertes de ressources propres provenant de la TVA dans le cadre d’un régime douanier pour lequel les droits de douane sont payés lors de l’importation mais où la TVA doit être payée ultérieurement dans l’État membre de destination.

II. Le cadre juridique

A. Le droit en matière de ressources propres traditionnelles

1.   Les décisions relatives au système des ressources propres

4.

Conformément à l’article 2, paragraphe 1, sous a) et b), de la décision 2014/335/UE, Euratom ( 3 ), applicable à compter du 1er janvier 2014, dont le libellé est en substance identique à celui de l’article 2, paragraphe 1, de la décision 2007/436/CE, Euratom, du Conseil, du 7 juin 2007, relative au système des ressources propres des Communautés européennes ( 4 ), constituent des ressources propres inscrites au budget de l’Union, les recettes provenant, respectivement, « des ressources propres traditionnelles, à savoir [...] des droits du tarif douanier commun et autres droits établis ou à établir par les institutions de l’Union sur les échanges avec les pays tiers », et « de l’application d’un taux uniforme valable pour tous les États membres à l’assiette harmonisée de la TVA, déterminée conformément aux règles de l’Union ».

5.

L’article 8, paragraphe 1, desdites décisions énonce, à son premier alinéa, que les droits du tarif douanier commun, en tant que ressources propres de l’Union, sont perçus par les États membres conformément aux dispositions législatives, réglementaires et administratives nationales, qui sont, le cas échéant, adaptées aux exigences de la réglementation de l’Union. L’article 8, paragraphe 1, troisième alinéa, de la décision 2007/436 et l’article 8, paragraphe 2, de la décision 2014/335 prévoient que les États membres mettent les ressources prévues à l’article 2, paragraphe 1, sous a), à c), de ces mêmes décisions à la disposition de la Commission.

2.   Les règlements relatifs aux modalités et à la procédure de mise à disposition des ressources propres

6.

Le règlement (CE, Euratom) no 1150/2000 du Conseil, du 22 mai 2000, portant application de la décision 94/728 ( 5 ), applicable à la première partie de la période d’infraction, a été remplacé, le 1er janvier 2014, par le règlement (UE, Euratom) no 609/2014 du Conseil, du 26 mai 2014, relatif aux modalités et à la procédure de mise à disposition des ressources propres traditionnelles, de la ressource propre fondée sur la TVA et de la ressource propre fondée sur le RNB [ ( 6 )] et aux mesures visant à faire face aux besoins de trésorerie ( 7 ). L’article 2, paragraphe 1, du règlement no 609/2014, dont le contenu correspond, en substance, à celui de l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000, énonce :

« Aux fins de l’application du présent règlement, un droit de l’Union sur les ressources propres traditionnelles visées à l’article 2, paragraphe 1, point a), de la décision 2014/335 [...] est constaté dès que sont remplies les conditions prévues par la réglementation douanière en ce qui concerne la prise en compte du montant du droit et sa notification au redevable. »

7.

L’article 6, paragraphe 1 et paragraphe 3, premier et deuxième alinéas, du règlement no 609/2014, qui reprend, en substance, l’article 6, paragraphe 1 et paragraphe 3, sous a) et b), du règlement no 1150/2000, est ainsi rédigé :

« 1.   Une comptabilité des ressources propres est tenue auprès du trésor de chaque État membre ou de l’organisme désigné par chaque État membre et ventilée par nature de ressources.

[...]

3.   Les droits constatés conformément à l’article 2 sont, sous réserve du deuxième alinéa du présent paragraphe, repris dans la comptabilité [couramment désignée comme la “comptabilité A”] au plus tard le premier jour ouvrable après le dix-neuvième jour du deuxième mois suivant celui au cours duquel le droit a été constaté.

Les droits constatés et non repris dans la comptabilité visée au premier alinéa parce qu’ils n’ont pas encore été recouvrés et qu’aucune caution n’a été fournie sont inscrits, dans le délai prévu au premier alinéa, dans une comptabilité séparée [couramment désignée comme la “comptabilité B”]. Les États membres peuvent procéder de la même manière lorsque les droits constatés et couverts par des garanties font l’objet de contestations et sont susceptibles de subir des variations à la suite des différends survenus.

[...] »

8.

Conformément à l’article 9, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement no 609/2014, dont le libellé correspond à celui de l’article 9, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement no 1150/2000 :

« Selon les modalités définies à l’article 10, chaque État membre inscrit les ressources propres au crédit du compte ouvert à cet effet au nom de la Commission auprès de son trésor ou de l’organisme qu’il a désigné. »

9.

À compter du 1er octobre 2016, cette disposition a été modifiée par l’article 9, paragraphe 1, du règlement (UE, Euratom) 2016/804 du Conseil ( 8 ), qui est rédigé comme suit :

« Selon les modalités définies aux articles 10, 10 bis et 10 ter, chaque État membre inscrit les ressources propres au crédit du compte ouvert à cet effet au nom de la Commission auprès de son Trésor ou de sa banque centrale nationale. Sans préjudice de l’application d’intérêts négatifs visée au troisième alinéa, ce compte ne peut être débité que sur instruction de la Commission. »

10.

L’article 10, paragraphe 1, du règlement no 609/2014, dont le contenu correspond, en substance, à celui de l’article 10, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000, est libellé comme suit :

« Après déduction des frais de perception, en application de l’article 2, paragraphe 3, et de l’article 10, paragraphe 3, de la décision 2014/335 [...], l’inscription des ressources propres traditionnelles visées à l’article 2, paragraphe 1, point a), de ladite décision intervient au plus tard le premier jour ouvrable après le dix-neuvième jour du deuxième mois suivant celui au cours duquel le droit a été constaté conformément à l’article 2 du présent règlement.

Toutefois, pour les droits repris dans la comptabilité séparée conformément à l’article 6, paragraphe 3, deuxième alinéa, du présent règlement, l’inscription doit intervenir au plus tard le premier jour ouvrable après le dix-neuvième jour du deuxième mois suivant celui du recouvrement des droits. »

11.

Dans sa rédaction initiale, l’article 12, paragraphes 1 et 3, du règlement no 609/2014, dont le contenu était, en substance, identique à celui de l’article 11, paragraphes 1 et 3, du règlement no 1150/2000, se lisait comme suit :

« 1.   Tout retard dans les inscriptions au compte visé à l’article 9, paragraphe 1, donne lieu au paiement, par l’État membre concerné, d’intérêts de retard.

[...]

3.   Pour les États membres ne faisant pas partie de l’Union économique et monétaire, le taux est égal au taux appliqué le premier jour du mois de l’échéance par les banques centrales respectives à leurs opérations principales de refinancement, majoré de deux points de pourcentage, ou pour les États membres pour lesquels le taux de la banque centrale n’est pas disponible, le taux le plus équivalent appliqué le premier jour du mois en question pour le marché monétaire, majoré de deux points de pourcentage.

Ce taux est majoré de 0,25 point de pourcentage par mois de retard. Le taux majoré est appliqué à l’ensemble de la période de retard. »

12.

À compter du 1er octobre 2016, à la suite de l’entrée en vigueur du règlement 2016/804, l’article 12, paragraphe 3, du règlement no 609/2014 a été remplacé par l’article 12, paragraphe 5, qui est rédigé comme suit :

« Pour les États membres ne faisant pas partie de l’Union économique et monétaire, le taux d’intérêt est égal au taux appliqué le premier jour du mois de l’échéance par les banques centrales respectives à leurs opérations principales de refinancement ou à 0 %, le montant le plus élevé étant retenu, majoré de 2,5 points de pourcentage. Pour les États membres pour lesquels le taux de la banque centrale n’est pas disponible, le taux d’intérêt est égal au taux le plus équivalent appliqué le premier jour du mois en question pour le marché monétaire, ou à 0 %, le montant le plus élevé étant retenu, majoré de 2,5 points de pourcentage.

Ce taux est majoré de 0,25 point de pourcentage par mois de retard.

L’accroissement total au titre des premier et deuxième alinéas ne dépasse pas 16 points de pourcentage. Le taux majoré est appliqué à l’ensemble de la période de retard. »

13.

L’article 13, paragraphes 1 et 2, du règlement no 609/2014, qui reprend, en substance, l’article 17, paragraphes 1 et 2, du règlement no 1150/2000, prévoit :

« 1.   Les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour que les montants correspondant aux droits constatés en vertu de l’article 2 soient mis à la disposition de la Commission dans les conditions prévues par le présent règlement.

2.   Les États membres sont dispensés de mettre à la disposition de la Commission les montants correspondant aux droits constatés en vertu de l’article 2 qui s’avèrent irrécouvrables pour l’une des raisons suivantes :

a)

soit pour des raisons de force majeure ;

b)

soit pour d’autres raisons qui ne leur sont pas imputables.

Les montants de droits constatés sont déclarés irrécouvrables par décision de l’autorité administrative compétente constatant l’impossibilité du recouvrement.

Les montants de droits constatés sont réputés irrécouvrables au plus tard après une période de cinq ans à compter de la date à laquelle le montant a été constaté conformément à l’article 2 ou, en cas de recours administratif ou judiciaire, à compter de la date de la notification ou de la publication de la décision définitive.

[...] »

3.   Le règlement (UE, Euratom) no 608/2014

14.

S’agissant de la période postérieure au 1er janvier 2014, l’article 2 du règlement (UE, Euratom) no 608/2014 du Conseil, du 26 mai 2014, portant mesures d’exécution du système des ressources propres de l’Union européenne ( 9 ), intitulé « Mesures de contrôle et de surveillance », dispose :

« 1.   Les ressources propres visées à l’article 2, paragraphe 1, de la décision 2014/335[...] sont contrôlées comme prévu dans le présent règlement, sans préjudice du règlement [no 1553/89 ( 10 )] [...]

2.   Les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour que les ressources propres visées à l’article 2, paragraphe 1, de la décision 2014/335[...] soient mises à la disposition de la Commission.

3.   Lorsque les mesures de contrôle et de surveillance concernent les ressources propres traditionnelles visées à l’article 2, paragraphe 1, point a), de la décision 2014/335[...] :

a)

les États membres procèdent aux vérifications et aux enquêtes relatives à la constatation et à la mise à disposition de ces ressources propres ;

[...]

c)

les États membres associent la Commission, à sa demande, aux contrôles qu’ils effectuent. Lorsque la Commission est associée à un contrôle, elle a accès, pour autant que l’exige l’application du présent règlement, aux pièces justificatives relatives à la constatation et à la mise à disposition des ressources propres et à tout autre document approprié ayant trait à ces mêmes pièces justificatives ;

d)

la Commission peut procéder elle‑même à des vérifications sur place. Les agents mandatés par la Commission pour ces vérifications ont accès aux pièces justificatives comme prévu pour les contrôles visés au point c). Les États membres facilitent ces vérifications.

[...] »

15.

L’article 5 du règlement no 608/2014, intitulé « Notification des fraudes et des irrégularités affectant des droits sur les ressources propres traditionnelles », prévoit à son paragraphe 1 :

« Dans le courant des deux mois qui suivent la fin de chaque trimestre, les États membres communiquent à la Commission une description des cas de fraude et d’irrégularités détectées portant sur un montant de droits supérieur à 10000 [euros] et concernant les ressources propres traditionnelles visées à l’article 2, paragraphe 1, point a), de la décision 2014/335[...]

Au cours de la période visée au premier alinéa, chaque État membre transmet la situation des cas de fraude et d’irrégularités déjà communiqués à la Commission, qui n’ont pas fait précédemment l’objet d’une mention de recouvrement, d’annulation ou de non‑recouvrement. »

4.   Le règlement no 1553/89

16.

L’article 2, paragraphe 1, du règlement no 1553/89 prévoit :

« La base des ressources TVA est déterminée à partir des opérations imposables visées à l’article 2 de la [sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme (JO 1977, L 145, p. 1)] [...] »

17.

Aux termes de l’article 3, paragraphe 1, dudit règlement :

« Pour une année civile déterminée, et sans préjudice des articles 5 et 6, on calcule la base des ressources TVA en divisant le total des recettes nettes de TVA encaissées par l’État membre au cours de cette année par le taux auquel cette taxe est perçue pendant cette même année. »

B. Le droit des douanes

1.   Le code des douanes communautaire

18.

L’article 13 du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire ( 11 ), tel que modifié par le règlement (CE) no 648/2005 du Parlement européen et du Conseil, du 13 avril 2005 ( 12 ) (ci‑après le « code des douanes communautaire ») disposait :

« 1.   Les autorités douanières peuvent effectuer, conformément aux conditions fixées par les dispositions en vigueur, tous les contrôles qu’elles jugent nécessaires pour garantir l’application correcte de la réglementation douanière et des autres dispositions législatives régissant l’entrée, la sortie, le transit, le transfert et la destination particulière des marchandises circulant entre le territoire douanier de la Communauté et les pays tiers ainsi que la présence de marchandises n’ayant pas le statut de marchandises communautaires. Les contrôles douaniers destinés à vérifier l’application correcte de la législation communautaire peuvent être effectués dans un pays tiers s’il existe un accord international qui l’autorise.

2.   Les contrôles douaniers autres que les contrôles inopinés doivent reposer sur une analyse des risques utilisant des procédés informatiques, l’objectif étant de déterminer et de quantifier les risques et d’élaborer les mesures nécessaires à leur évaluation, sur la base de critères définis au niveau national, communautaire et, le cas échéant, au niveau international.

Un cadre commun de gestion des risques, des critères communs ainsi que les domaines de contrôle prioritaires sont déterminés selon la procédure de comité.

Les États membres, en collaboration avec la Commission, mettent en place un système électronique pour la mise en œuvre de la gestion des risques.

3.   Lorsque des contrôles sont exécutés par des autorités autres que les autorités douanières, ces contrôles le sont en étroite coordination avec ces dernières, et dans la mesure du possible au même moment et au même endroit.

[...] »

19.

Le titre II du code des douanes communautaire comportait un chapitre 3 intitulé « Valeur en douane des marchandises », composé des articles 28 à 36.

20.

L’article 29 de ce code prévoyait :

« 1.   La valeur en douane des marchandises importées est leur valeur transactionnelle, c’est‑à‑dire le prix effectivement payé ou à payer pour les marchandises lorsqu’elles sont vendues pour l’exportation à destination du territoire douanier de la Communauté, le cas échéant, après ajustement effectué conformément aux articles 32 et 33 [...] :

[...]

2.   

a)

Pour déterminer si la valeur transactionnelle est acceptable aux fins de l’application du paragraphe 1, le fait que l’acheteur et le vendeur sont liés ne constitue pas en soi un motif suffisant pour considérer la valeur transactionnelle comme inacceptable. Si nécessaire, les circonstances propres à la vente sont examinées, et la valeur transactionnelle admise pour autant que ces liens n’ont pas influencé le prix. [...]

[...]

3.   

a)

Le prix effectivement payé ou à payer est le paiement total effectué ou à effectuer par l’acheteur au vendeur, ou au bénéfice de celui‑ci, pour les marchandises importées et comprend tous les paiements effectués ou à effectuer, comme condition de la vente des marchandises importées, par l’acheteur au vendeur, ou par l’acheteur à une tierce personne pour satisfaire à une obligation du vendeur. [...]

[...] »

21.

Aux termes de l’article 30 dudit code :

« 1.   Lorsque la valeur en douane ne peut être déterminée par application de l’article 29, il y a lieu de passer successivement aux lettres a), b), c) et d) du paragraphe 2 jusqu’à la première de ces lettres qui permettra de la déterminer [...]

2.   Les valeurs en douane déterminées par application du présent article sont les suivantes :

a)

valeur transactionnelle de marchandises identiques, vendues pour l’exportation à destination de la Communauté et exportées au même moment ou à peu près au même moment que les marchandises à évaluer ;

b)

valeur transactionnelle de marchandises similaires, vendues pour l’exportation à destination de la Communauté et exportées au même moment ou à peu près au même moment que les marchandises à évaluer ;

c)

valeur fondée sur le prix unitaire correspondant aux ventes dans la Communauté des marchandises importées ou de marchandises identiques ou similaires importées totalisant la quantité la plus élevée, ainsi faites à des personnes non liées aux vendeurs ;

d)

valeur calculée [...]

[...] »

22.

L’article 31 du code des douanes communautaire se lisait comme suit :

« 1.   Si la valeur en douane des marchandises importées ne peut être déterminée par application des articles 29 et 30, elle est déterminée, sur la base des données disponibles dans la Communauté, par des moyens raisonnables compatibles avec les principes et les dispositions générales :

de l’accord relatif à la mise en œuvre de l’article VII de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994,

de l’article VII de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 et

des dispositions du présent chapitre.

2.   La valeur en douane déterminée par application du paragraphe 1 ne se fonde pas :

a)

sur le prix de vente, dans la Communauté, de marchandises produites dans la Communauté ;

b)

sur un système prévoyant l’acceptation, à des fins douanières, de la plus élevée de deux valeurs possibles ;

c)

sur le prix de marchandises sur le marché intérieur du pays d’exportation ;

d)

sur le coût de production, autre que les valeurs calculées qui ont été déterminées pour des marchandises identiques ou similaires conformément à l’article 30[,] paragraphe 2[,] point d) ;

e)

sur des prix pour l’exportation à destination d’un pays non compris dans le territoire douanier de la Communauté ;

f)

sur des valeurs en douane minimales[ ;] ou

g)

sur des valeurs arbitraires ou fictives. »

23.

L’article 68 de ce code disposait :

« Pour la vérification des déclarations acceptées par elles, les autorités douanières peuvent procéder :

a)

à un contrôle documentaire portant sur la déclaration et les documents qui y sont joints. Les autorités douanières peuvent exiger du déclarant de leur présenter d’autres documents en vue de la vérification de l’exactitude des énonciations de la déclaration ;

b)

à l’examen des marchandises accompagné d’un éventuel prélèvement d’échantillons en vue de leur analyse ou d’un contrôle approfondi. »

24.

L’article 71 dudit code était libellé comme suit :

« 1.   Les résultats de la vérification de la déclaration servent de base pour l’application des dispositions régissant le régime douanier sous lequel les marchandises sont placées.

2.   Lorsqu’il n’est pas procédé à la vérification de la déclaration, l’application des dispositions visées au paragraphe 1 s’effectue d’après les énonciations de la déclaration. »

25.

L’article 217 du code des douanes communautaire prévoyait :

« 1.   Tout montant de droits à l’importation ou de droits à l’exportation qui résulte d’une dette douanière [...] doit être calculé par les autorités douanières dès qu’elles disposent des éléments nécessaires et faire l’objet d’une inscription par lesdites autorités dans les registres comptables ou sur tout autre support qui en tient lieu (prise en compte).

[...]

2.   Les modalités pratiques de prise en compte des montants de droits sont déterminées par les États membres. Ces modalités peuvent être différentes selon que les autorités douanières, compte tenu des conditions dans lesquelles la dette douanière est née, sont assurées ou non du paiement desdits montants. »

26.

Aux termes de l’article 218, paragraphe 1, de ce code :

« Lorsqu’une dette douanière naît de l’acceptation de la déclaration d’une marchandise pour un régime douanier autre que l’admission temporaire en exonération partielle des droits à l’importation ou de tout autre acte ayant les mêmes effets juridiques que cette acceptation, la prise en compte du montant correspondant à cette dette douanière doit avoir lieu dès que ce montant a été calculé et, au plus tard, le deuxième jour suivant celui au cours duquel la mainlevée de la marchandise a été donnée. »

27.

L’article 220, paragraphe 1, dudit code disposait :

« Lorsque le montant des droits résultant d’une dette douanière n’a pas été pris en compte conformément aux articles 218 et 219 ou a été pris en compte à un niveau inférieur au montant légalement dû, la prise en compte du montant des droits à recouvrer ou restant à recouvrer doit avoir lieu dans un délai de deux jours à compter de la date à laquelle les autorités douanières se sont aperçues de cette situation et sont en mesure de calculer le montant légalement dû et de déterminer le débiteur (prise en compte a posteriori). Ce délai peut être augmenté conformément à l’article 219. »

28.

L’article 221 du même code énonçait :

« 1.   Le montant des droits doit être communiqué au débiteur selon des modalités appropriées dès qu’il a été pris en compte.

[...]

3.   La communication au débiteur ne peut plus être effectuée après l’expiration d’un délai de trois ans à compter de la date de la naissance de la dette douanière. Ce délai est suspendu à partir du moment où est introduit un recours au sens de l’article 243 et pendant la durée de la procédure de recours.

4.   Lorsque la dette douanière résulte d’un acte qui était, au moment où il a été commis, passible de poursuites judiciaires répressives, la communication au débiteur peut, dans les conditions prévues par les dispositions en vigueur, être effectuée après l’expiration du délai de trois ans prévu au paragraphe 3. »

2.   Le code des douanes de l’Union

29.

L’article 3 du règlement (UE) no 952/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 9 octobre 2013, établissant le code des douanes de l’Union ( 13 ) (ci‑après le « code des douanes de l’Union ») dispose :

« Les autorités douanières sont essentiellement chargées de la surveillance du commerce international de l’Union, contribuant ainsi à garantir un commerce ouvert et équitable et à mettre en œuvre la dimension extérieure du marché intérieur, de la politique commerciale commune et des autres politiques communes de l’Union ayant une portée commerciale, ainsi qu’à assurer la sécurité de l’ensemble de la chaîne logistique. Les autorités douanières instaurent des mesures visant, en particulier, à :

a)

protéger les intérêts financiers de l’Union et de ses États membres ;

b)

protéger l’Union du commerce déloyal et illégal tout en encourageant les activités économiques légitimes ;

c)

garantir la sécurité et la sûreté de l’Union et de ses résidents ainsi que la protection de l’environnement, le cas échéant en coopération étroite avec d’autres autorités ; et

d)

maintenir un équilibre adéquat entre les contrôles douaniers et la facilitation du commerce légitime. »

30.

Aux termes de l’article 46 du code des douanes de l’Union, intitulé « Gestion des risques et contrôles douaniers » :

« 1.   Les autorités douanières peuvent exercer tout contrôle douanier qu’elles estiment nécessaires.

Les contrôles douaniers peuvent notamment consister à vérifier les marchandises, prélever des échantillons, contrôler l’exactitude et le caractère complet des informations fournies dans une déclaration ou une notification ainsi que l’existence, l’authenticité, l’exactitude et la validité de documents, examiner la comptabilité des opérateurs économiques et d’autres écritures, contrôler les moyens de transport et inspecter les bagages et autres marchandises transportés par ou sur des personnes ainsi que mener des enquêtes officielles et procéder à d’autres actes similaires.

2.   Les contrôles douaniers autres que les contrôles inopinés sont principalement fondés sur l’analyse de risque pratiquée à l’aide de procédés informatiques de traitement des données, et visent à déceler et à évaluer les risques et à élaborer les contre-mesures nécessaires, sur la base des critères établis au niveau national ou au niveau de l’Union et, le cas échéant, au niveau international.

3.   Les contrôles douaniers sont réalisés dans un cadre commun de gestion des risques, fondé sur l’échange d’informations en matière de risque et de résultats d’analyses de risque entre les administrations douanières et l’établissement de critères et de normes communs en matière de risque, ainsi que de mesures de contrôle et de domaines de contrôle prioritaires.

Les contrôles fondés sur ces informations et critères sont effectués sans préjudice d’autres contrôles pratiqués conformément au paragraphe 1 ou à d’autres dispositions en vigueur.

4.   Les autorités douanières appliquent une gestion des risques visant à distinguer les niveaux de risque associés aux marchandises faisant l’objet d’un contrôle douanier ou d’une surveillance douanière, et à établir s’il y a lieu de soumettre ces marchandises à des contrôles douaniers spécifiques et, dans l’affirmative, à en préciser le lieu.

Cette gestion des risques comprend notamment des activités telles que la collecte de données et d’informations, l’analyse et l’évaluation des risques, la détermination et la mise en œuvre des mesures requises, ainsi que le suivi et le réexamen réguliers du processus et des résultats obtenus, sur la base de sources et de stratégies internationales, de l’Union et nationales.

5.   Les autorités douanières échangent des informations en matière de risque et les résultats de l’analyse de risque lorsque :

a)

les autorités douanières estiment que les risques sont significatifs et requièrent un contrôle douanier et que les résultats de ce contrôle indiquent que l’événement à l’origine des risques est survenu ; ou

b)

lorsque les résultats d’un contrôle n’indiquent pas que l’événement à l’origine des risques est survenu, mais que les autorités douanières concernées estiment que la menace présente un risque élevé ailleurs dans l’Union.

6.   Aux fins de l’établissement des critères et normes communs en matière de risque, ainsi que des mesures de contrôle et des domaines de contrôle prioritaires visés au paragraphe 3, il est tenu compte de tous les éléments suivants :

a)

la proportionnalité par rapport au risque ;

b)

l’urgence de l’application nécessaire des contrôles ;

c)

l’incidence probable sur les échanges commerciaux, sur les différents États membres et sur les ressources consacrées aux contrôles.

7.   Les critères et normes communs en matière de risque visés au paragraphe 3 comportent tous les éléments suivants :

a)

une description des risques ;

b)

les facteurs ou indicateurs de risque à utiliser pour sélectionner les marchandises ou les opérateurs économiques à soumettre à des contrôles douaniers ;

c)

la nature des contrôles douaniers à effectuer par les autorités douanières ;

d)

la durée d’application des contrôles douaniers visés au point c).

8.   Les domaines de contrôle prioritaires concernent certains régimes douaniers, types de marchandises, axes de circulation, modes de transport ou opérateurs économiques particuliers, qui font l’objet, pendant une certaine période, d’analyses de risque et de contrôles douaniers d’un niveau plus élevé, sans préjudice des autres contrôles menés habituellement par les autorités douanières. »

31.

L’article 53 du code des douanes de l’Union, intitulé « Conversions monétaires », dispose à son paragraphe 1 :

« Les autorités compétentes publient et/ou communiquent sur l’internet le taux de change applicable lorsqu’une conversion monétaire est nécessaire pour l’une des raisons suivantes :

a)

les éléments servant à déterminer la valeur en douane d’une marchandise sont exprimés dans une monnaie autre que celle de l’État membre où est déterminée la valeur en douane ;

b)

la contre-valeur de l’euro en monnaies nationales est requise pour déterminer le classement tarifaire des marchandises et le montant des droits à l’importation et à l’exportation, y compris les seuils de valeur dans le tarif douanier commun. »

32.

Les articles 70 et 74 de ce code comportent des règles relatives à la valeur en douane des marchandises qui correspondent, en substance, à celles contenues dans les articles 29 à 31 du code des douanes communautaire.

33.

Conformément à l’article 101, paragraphe 1, du code des douanes de l’Union, le montant des droits à l’importation ou à l’exportation exigibles est déterminé par les autorités douanières compétentes pour le lieu où la dette douanière a pris naissance, ou est réputée avoir pris naissance en vertu de l’article 87 de ce code, dès qu’elles disposent des informations nécessaires.

34.

L’article 103 dudit code, intitulé « Prescription de la dette douanière », dispose à ses paragraphes 1 et 2 :

« 1.   Aucune dette douanière n’est notifiée au débiteur après l’expiration d’un délai de trois ans à compter de la date de la naissance de la dette douanière.

2.   Lorsque la dette douanière est née par suite d’un acte qui, à l’époque où il a été accompli, était passible de poursuites judiciaires répressives, le délai de trois ans fixé au paragraphe 1 est porté à un minimum de cinq ans et un maximum de dix ans en conformité avec le droit national. »

35.

L’article 105 du code des douanes de l’Union, intitulé « Délais de prise en compte », énonce à son paragraphe 3 :

« En cas de naissance d’une dette douanière dans des conditions autres que celles visées au paragraphe 1, la prise en compte du montant des droits à l’importation ou à l’exportation exigibles correspondants intervient dans un délai de quatorze jours à compter de la date à laquelle les autorités douanières sont en mesure de déterminer le montant des droits à l’importation ou à l’exportation en cause et d’arrêter une décision. »

36.

Conformément à l’article 188 de ce code, intitulé « Vérification d’une déclaration en douane » :

« Aux fins de la vérification de l’exactitude des énonciations contenues dans une déclaration en douane qui a été acceptée, les autorités douanières peuvent :

a)

procéder à un examen de la déclaration et des documents d’accompagnement ;

b)

exiger du déclarant qu’il leur fournisse d’autres documents ;

c)

examiner les marchandises ;

d)

prélever des échantillons en vue de l’analyse ou d’un examen approfondi des marchandises. »

37.

L’article 191 dudit code, intitulé « Résultats de la vérification », dispose :

« 1.   Les résultats de la vérification de la déclaration en douane servent de base pour l’application des dispositions régissant le régime douanier sous lequel les marchandises sont placées.

2.   Lorsqu’il n’est pas procédé à la vérification de la déclaration en douane, l’application du paragraphe 1 s’effectue d’après les énonciations de ladite déclaration.

3.   Les résultats de la vérification effectuée par les autorités douanières ont la même force probante sur tout le territoire douanier de l’Union. »

3.   Le règlement d’application

38.

Aux termes de l’article 181 bis du règlement (CEE) no 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d’application du règlement no 2913/92 ( 14 ), tel que modifié par le règlement (CE) no 1335/2003 de la Commission, du 25 juillet 2003 ( 15 ) (ci‑après le « règlement d’application ») :

« 1.   Les autorités douanières ne doivent pas nécessairement déterminer la valeur en douane des marchandises importées sur la base de la méthode de la valeur transactionnelle si, conformément à la procédure décrite au paragraphe 2, elles ne sont pas convaincues, sur la base de doutes fondés, que la valeur déclarée représente le montant total payé ou à payer défini à l’article 29 du code.

2.   Lorsque les autorités douanières ont des doutes tels que visés au paragraphe 1, elles peuvent demander des informations complémentaires conformément à l’article 178, paragraphe 4. Si ces doutes persistent, les autorités douanières doivent, avant de prendre une décision définitive, informer la personne concernée, par écrit si la demande leur en est faite, des motifs sur lesquels ces doutes sont fondés et lui donner une occasion raisonnable de répondre. La décision finale ainsi que les motifs y afférents sont communiqués à la personne concernée par écrit. »

39.

L’article 248, paragraphe 1, du règlement d’application dispose :

« L’octroi de la mainlevée donne lieu à la prise en compte des droits à l’importation déterminés d’après les énonciations de la déclaration. Lorsque les autorités douanières estiment que les contrôles qu’elles ont entrepris peuvent conduire à la détermination d’un montant de droits supérieur à celui résultant des énonciations de la déclaration, elles exigent en outre la constitution d’une garantie suffisante pour couvrir la différence entre le montant résultant des énonciations de la déclaration et celui dont les marchandises peuvent en définitive être passibles. Toutefois, le déclarant a la faculté, au lieu de constituer cette garantie, de demander la prise en compte immédiate du montant des droits dont les marchandises peuvent en définitive être passibles. »

4.   Le règlement d’exécution

40.

L’article 48 du règlement d’exécution (UE) 2015/2447 de la Commission, du 24 novembre 2015, établissant les modalités d’application de certaines dispositions du règlement (UE) no 952/2013 du Parlement européen et du Conseil établissant le code des douanes de l’Union ( 16 ) (ci‑après le « règlement d’exécution »), intitulé « Dispositions concernant le taux de change », prévoit à son paragraphe 1 :

« La contre-valeur de l’euro, si elle est requise conformément à l’article 53, paragraphe 1, point b), du code, est fixée une fois par mois.

Le taux de change à utiliser est le taux le plus récent fixé par la Banque centrale européenne avant l’avant-dernier jour du mois ; il s’applique tout le mois suivant.

Toutefois, dans le cas où le taux applicable au début du mois s’écarte de plus de 5 % du taux fixé par la Banque centrale européenne avant le 15 du même mois, c’est ce dernier taux qui s’applique à partir du 15 et jusqu’à la fin du mois en question. »

41.

L’article 140 du règlement d’exécution, intitulé « Non-acceptation de valeurs transactionnelles déclarées », lequel vise à mettre en œuvre l’article 70, paragraphe 1, du code des douanes de l’Union, dispose :

« 1.   Lorsque les autorités douanières ne sont pas convaincues, sur la base de doutes fondés, que la valeur transactionnelle déclarée représente le montant total payé ou à payer défini à l’article 70, paragraphe 1, du code, elles peuvent demander au déclarant de fournir des informations supplémentaires.

2.   Si leurs doutes ne sont pas dissipés, les autorités douanières peuvent décider que la valeur des marchandises ne peut pas être déterminée conformément à l’article 70, paragraphe 1, du code. »

42.

Aux termes de l’article 144 du règlement d’exécution, intitulé « Valeur déterminée sur la base des données disponibles (méthode “fall-back”) », lequel vise à mettre en œuvre l’article 74, paragraphe 3, du code des douanes de l’Union :

« 1.   Lors de la détermination de la valeur en douane en vertu de l’article 74, paragraphe 3, du code, il peut être fait preuve d’une souplesse raisonnable dans l’application des méthodes prévues aux articles 70 et 74, paragraphe 2, du code. La valeur ainsi déterminée se fonde, dans la plus grande mesure possible, sur des valeurs en douane déterminées antérieurement.

2.   Lorsque la valeur en douane ne peut pas être déterminée par application du paragraphe 1, d’autres méthodes appropriées sont utilisées. Dans ce cas, la valeur en douane n’est déterminée sur la base d’aucun des éléments suivants :

a)

le prix de vente, sur le territoire douanier de l’Union, de marchandises produites sur le territoire douanier de l’Union ;

b)

un système dans lequel la plus élevée de deux valeurs possibles est utilisée pour la détermination de la valeur en douane ;

c)

le prix de marchandises sur le marché intérieur du pays d’exportation ;

d)

le coût de production, autre que les valeurs calculées qui ont été déterminées pour des marchandises identiques ou similaires en vertu de l’article 74, paragraphe 2, point d), du code ;

e)

des prix pour l’exportation à destination d’un pays tiers ;

f)

des valeurs en douane minimales ;

g)

des valeurs arbitraires ou fictives. »

43.

L’article 244 du règlement d’exécution, intitulé « Constitution d’une garantie », disposition visant à mettre en œuvre l’article 191 du code des douanes de l’Union, prévoit :

« Lorsque les autorités douanières estiment que la vérification de la déclaration en douane peut donner lieu à un montant exigible de droits à l’importation ou à l’exportation ou d’autres impositions plus élevé que celui découlant des énonciations de la déclaration en douane, la mainlevée des marchandises est subordonnée à la constitution d’une garantie suffisante pour couvrir la différence entre le montant établi sur la base des énonciations de la déclaration en douane et le montant susceptible en définitive de devenir exigible.

Toutefois, le déclarant peut demander la notification immédiate de la dette douanière à laquelle les marchandises peuvent être exposées in fine au lieu de constituer cette garantie. »

C. Le droit en matière de TVA

44.

Aux termes de l’article 2, paragraphe 1, de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ( 17 ), telle que modifiée par la directive 2009/69/CE du Conseil, du 25 juin 2009 ( 18 ) (ci-après la « directive 2006/112 ») :

« Sont soumises à la TVA les opérations suivantes :

[...]

b)

les acquisitions intracommunautaires de biens effectuées à titre onéreux sur le territoire d’un État membre :

i)

par un assujetti agissant en tant que tel, ou par une personne morale non assujettie, lorsque le vendeur est un assujetti agissant en tant que tel [...]

[...]

d)

les importations de biens. »

45.

Conformément à l’article 73 de cette directive, « la base d’imposition comprend tout ce qui constitue la contrepartie obtenue ou à obtenir par le fournisseur ou le prestataire pour ces opérations de la part de l’acquéreur, du preneur ou d’un tiers ».

46.

Selon l’article 83 de ladite directive :

« Pour les acquisitions intracommunautaires de biens, la base d’imposition est constituée par les mêmes éléments que ceux retenus pour déterminer, conformément au chapitre 2, la base d’imposition de la livraison de ces mêmes biens sur le territoire de l’État membre. Notamment, pour les opérations assimilées aux acquisitions intracommunautaires de biens visées aux articles 21 et 22, la base d’imposition est constituée par le prix d’achat des biens ou de biens similaires ou, à défaut de prix d’achat, par le prix de revient, déterminés au moment où s’effectuent ces opérations. »

47.

L’article 85 de la directive 2006/112 se lit comme suit :

« Pour les importations de biens, la base d’imposition est constituée par la valeur définie comme la valeur en douane par les dispositions communautaires en vigueur. »

48.

L’article 86, paragraphe 1, de cette directive se lit comme suit :

« Sont à comprendre dans la base d’imposition, dans la mesure où ils n’y sont pas déjà compris, les éléments suivants :

a)

les impôts, droits, prélèvements et autres taxes qui sont dus en dehors l’État membre d'importation, ainsi que ceux qui sont dus en raison de l’importation, à l’exception de la TVA à percevoir ;

b)

les frais accessoires, tels que les frais de commission, d’emballage, de transport et d'assurance intervenant jusqu’au premier lieu de destination des biens sur le territoire de l’État membre d’importation, ainsi que ceux découlant du transport vers un autre lieu de destination se trouvant dans la Communauté, si ce dernier lieu est connu au moment où intervient le fait générateur de la taxe. »

49.

L’article 87 de la directive 2006/112 dispose :

« Ne sont pas à comprendre dans la base d’imposition les éléments suivants :

a)

les diminutions de prix à titre d’escompte pour paiement anticipé ;

b)

les rabais et ristournes de prix consentis à l’acquéreur et acquis au moment où s’effectue l’importation. »

50.

Conformément à l’article 138 de cette directive :

« 1.   Les États membres exonèrent les livraisons de biens expédiés ou transportés en dehors de leur territoire respectif mais dans la Communauté par le vendeur, par l’acquéreur ou pour leur compte, effectuées pour un autre assujetti, ou pour une personne morale non assujettie, agissant en tant que tel dans un État membre autre que celui du départ de l’expédition ou du transport des biens.

2.   Outre les livraisons visées au paragraphe 1, les États membres exonèrent les opérations suivantes :

[...]

c)

les livraisons de biens consistant en des transferts à destination d’un autre État membre, qui bénéficieraient des exonérations prévues au paragraphe 1 et aux points a) et b) si elles étaient effectuées pour un autre assujetti. »

51.

L’article 143 de cette ladite directive énonce :

« 1.   Les États membres exonèrent les opérations suivantes :

[...]

d)

les importations de biens expédiés ou transportés à partir d’un territoire tiers ou d’un pays tiers dans un État membre autre que celui d’arrivée de l’expédition ou du transport, dans le cas où la livraison de ces biens, effectuée par l’importateur désigné ou reconnu comme redevable de la taxe en vertu de l’article 201, est exonérée conformément à l’article 138 ;

[...]

2.   L’exonération prévue au paragraphe 1, point d), ne s’applique, dans les cas où les importations de biens sont suivies de livraisons de biens exonérées en vertu de l’article 138, paragraphe 1, et paragraphe 2, point c), que si, au moment de l’importation, l’importateur a fourni aux autorités compétentes de l’État membre d’importation au moins les informations suivantes :

a)

le numéro d’identification TVA qui lui a été attribué dans l’État membre d’importation ou le numéro d’identification TVA qui a été attribué à son représentant fiscal dans l’État membre d’importation, lequel est redevable du paiement de la TVA ;

b)

le numéro d’identification TVA attribué dans un autre État membre au client auquel les biens sont livrés conformément à l’article 138, paragraphe 1, ou son propre numéro d’identification TVA attribué dans l’État membre d’arrivée de l’expédition ou du transport des biens lorsque ces derniers font l’objet d’un transfert, conformément à l’article 138, paragraphe 2, point c) ;

c)

la preuve que les biens importés sont destinés à être transportés ou expédiés à partir de l’État membre d’importation vers un autre État membre.

Toutefois, les États membres peuvent prévoir que la preuve visée au point c) ne doit être fournie qu’à la demande des autorités compétentes. »

III. Les faits et la procédure précontentieuse

A. Les faits à l’origine du litige

52.

À partir du 1er janvier 2005, l’Union européenne a supprimé tous les contingents applicables aux importations de produits textiles et d’habillement originaires de pays membres de l’Organisation mondiale du commerce, y compris de Chine.

53.

Le 20 avril 2007, l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) a adressé aux États membres un message d’assistance mutuelle 2007/015 afin d’informer ces derniers du risque de sous-évaluation de produits textiles et de chaussures importés de Chine.

54.

Par ce message, l’OLAF invitait l’ensemble des États membres, d’une part, à analyser les importations de produits textiles et de chaussures en provenance, notamment, de Chine pour repérer d’éventuels indices d’importations sous-évaluées et, d’autre part, à procéder à des contrôles appropriés lors des dédouanements effectués pour de telles importations.

55.

Par la suite, afin d’aider les États membres à déceler les envois sous-évalués de produits textiles et de chaussures, l’OLAF, en coopération avec le Centre commun de recherche de la Commission (ci‑après le « JRC »), a mis au point un outil d’évaluation des risques reposant sur des données à l’échelle de l’Union (ci‑après la « méthodologie OLAF »). Cet outil consiste, tout d’abord, à calculer un prix moyen corrigé pour tout produit textile et chaussure importé de Chine et relevant des chapitres 61 à 64 de la nomenclature combinée du tarif douanier ( 19 ). Les prix moyens corrigés sont calculés sur la base des prix mensuels à l’importation des produits concernés en provenance de Chine extraits de la base de données statistiques Comext, une base de données de référence pour le commerce international gérée par Eurostat, pour une période de 48 mois. Ces prix expriment une valeur par kilogramme pour chacun des 495 codes de produits à huit chiffres de la nomenclature combinée concerné, en précisant le pays d’origine et le pays de destination dans l’Union. Ensuite, une moyenne est calculée pour toute l’Union (les prix moyens corrigés pour l’Union-28) sur la base de la moyenne arithmétique (moyenne non pondérée) des prix moyens corrigés des 28 États membres ( 20 ). Pour le calcul de ces moyennes, les valeurs extrêmes, c’est‑à‑dire les valeurs anormalement élevées ou faibles, sont exclues, raison pour laquelle le prix moyen est dit « corrigé ». Enfin, une valeur correspondant à 50 % du prix moyen corrigé est calculée et constitue le « prix minimal acceptable », également exprimé en prix au kilogramme, qui est utilisé comme seuil permettant aux autorités douanières des États membres de détecter les valeurs particulièrement faibles déclarées à l’importation et donc les importations à haut risque.

56.

Le message d’assistance mutuelle AM/2009/001, envoyé par l’OLAF le 23 janvier 2009, se rapportait à l’opération « Argus », une opération d’une durée de six mois dans le cadre de laquelle l’OLAF avait entrepris de surveiller le trafic de produits textiles et de chaussures provenant de différents pays tiers mais principalement d’Asie, et de transmettre chaque mois aux États membres une liste des importations du mois précédent identifiées comme étant à risque en termes de valeur en douane. Par ce message, l’OLAF demandait aux États membres de lui communiquer, dans un délai de quatre mois, la mise en place de filtres de risque, d’identifier les envois à haut risque et d’opérer des vérifications après dédouanement sur la base de ses communications.

57.

En 2011, au cours de l’action de contrôle prioritaire dite « Discount » (ci‑après l’« ACP Discount »), coordonnée par la direction générale de la fiscalité et de l’union douanière de la Commission et à laquelle tous les États membres, dont le Royaume‑Uni, ont participé, les prix minimaux acceptables ont été appliqués afin de détecter et de contrôler les importations de produits textiles et de chaussures en provenance de Chine présentant une valeur en douane faible au point de rendre celles‑ci suspectes.

58.

En 2014, l’OLAF a coordonné l’opération douanière conjointe dite « Snake » dont la phase opérationnelle a eu lieu du 17 février au 17 mars 2014 et à laquelle ont participé l’ensemble des États membres ainsi que les autorités douanières chinoises. L’implication de ces dernières visait à obtenir des déclarations à l’exportation permettant de vérifier la valeur déclarée à l’importation dans l’Union des produits concernés. Dans le rapport final de l’opération Snake, les États membres étaient invités à poursuivre l’utilisation des profils de risque fondés sur les prix minimaux acceptables tels qu’appliqués au cours de cette opération.

59.

À la suite des contrôles effectués par les autorités du Royaume-Uni dans le cadre de cette opération sur la base desdits profils de risque, celles‑ci ont constaté des droits de douane supplémentaires pour 24 opérateurs au titre de leurs importations au cours d’une période de trois ans comprise entre novembre 2011 et novembre 2014.

60.

Au cours de la mission d’inspection 14‑11‑1, effectuée au Royaume‑Uni du 27 au 31 octobre 2014, la Commission a examiné des formulaires d’information sur le risque, des notifications d’assistance mutuelle et 24 opérations d’importations sélectionnées au hasard, dont 23 étaient inscrites sur la comptabilité B.

61.

Entre novembre 2014 et février 2015, les autorités du Royaume-Uni ont communiqué les avis de paiement desdits montants aux opérateurs en cause par l’émission de 24 ordres de recouvrement a posteriori, appelés « avis de paiement C18 » (ci‑après les « avis de paiement C18 Snake »), qui ont ultérieurement été annulés.

62.

Le 16 janvier 2015, l’OLAF a ouvert une enquête ciblant spécifiquement certains États membres, dont le Royaume‑Uni, et couvrant une période commençant en 2013.

63.

Entre 2013 et 2016, l’opération « Badminton » a été menée par Her Majesty’s Revenue and Customs (administration fiscale et douanière du Royaume‑Uni, ci‑après les « HMRC ») et la police des frontières du Royaume‑Uni. Cette opération, qui portait principalement sur la fraude à la TVA, a été le cadre d’une enquête pénale initiale visant quatre grands opérateurs important des produits concernés originaires de Chine au titre du « régime douanier 42 », c’est‑à‑dire le régime dans le cadre duquel les droits de douane sont payés lors de l’importation mais où la TVA doit être payée ultérieurement dans l’État membre de destination (ci‑après le « régime douanier 42 ») ( 21 ).

64.

Entre février 2015 et juillet 2016, le Royaume‑Uni a participé à dix réunions organisées par l’OLAF, consacrées à la sous-évaluation de produits textiles et de chaussures en provenance de Chine.

65.

Les 19 et 20 février 2015, l’OLAF a organisé une première réunion bilatérale avec les HMRC pour discuter du suivi de l’opération Snake et de l’utilisation des prix moyens corrigés en tant qu’indicateurs de risque de sous-évaluation douanière. Lors de cette réunion, l’OLAF a relevé que le volume des importations susceptibles d’être frauduleusement sous-évaluées n’avait pas diminué et qu’il ressortait des statistiques que le Royaume‑Uni attirait davantage de trafic frauduleux en raison des mesures prises par d’autres États membres. Pour leur part, les HMRC ont indiqué qu’ils envisageaient d’adresser des ordres de recouvrement de la TVA et des droits de douane éludés aux entreprises qui avaient été recensées lors de l’opération Snake et à la suite de leurs propres analyses, et ce pour un montant total de plus de 800 millions de livres sterling (GBP).

66.

Le Royaume‑Uni a répété son intention de procéder audit recouvrement lors de la réunion ad hoc des 25 et 26 février 2015 sur la « fraude à la sous-évaluation », réunion organisée par l’OLAF et à laquelle ont participé les autorités des États membres. Au cours de cette réunion, l’OLAF a « fortement recommandé », notamment, que les États membres utilisent des filtres de risque appropriés pour identifier les envois potentiellement sous-évalués, qu’ils exigent des garanties pour les envois identifiés comme étant suspects et qu’ils mènent des enquêtes afin d’établir la valeur en douane. L’OLAF a également décrit les pertes potentielles de ressources propres traditionnelles à l’échelle de l’Union en raison des importations susceptibles d’être sous-évaluées, notamment en ce qui concerne les importations au Royaume‑Uni ( 22 ).

67.

Le 16 juin 2015, l’OLAF a transmis le message d’assistance mutuelle 2015/013 par lequel il demandait aux États membres de prendre toutes les mesures de précaution nécessaires afin de protéger les intérêts financiers de l’Union face au risque d’importations sous-évaluées de produits textiles et de chaussures en provenance de Chine.

68.

En mai 2015, le Royaume‑Uni a lancé l’opération dite « Breach » pour lutter contre la fraude à la sous-évaluation. L’un des buts de cette opération a été, selon le Royaume‑Uni, de déterminer, à la suite de l’annulation des 24 avis de paiement C18 Snake, la valeur en douane des marchandises sous-évaluées décelées au cours de l’opération Snake et de réclamer les montants de ressources propres traditionnelles éludés. Cette opération impliquerait, notamment, des contrôles préalables et des visites a posteriori en lien avec les expéditions suspectes, des analyses documentaires, des audits et des inspections, l’examen du caractère commercial des ventes concernées et l’examen des liens entre l’importateur, les transitaires et d’autres entreprises, ainsi que des activités de sensibilisation à l’intention des importateurs, destinées à identifier les activités frauduleuses. Une trentaine d’inspections préalables auraient également été réalisées et des échantillons auraient été prélevés. Plusieurs avis de paiement C18 auraient été émis. Lors de l’audience, le Royaume‑Uni a affirmé que les mesures adoptées dans le cadre de cette opération étaient toujours en cours.

69.

Le 28 juillet 2015, l’OLAF a organisé une deuxième réunion bilatérale avec les HMRC. Ces derniers ont notamment indiqué qu’ils continuaient à poursuivre la procédure de recouvrement de plus de 800 millions de GBP, le cas échéant par la voie judiciaire, et qu’ils avaient constitué un groupe d’action pluridisciplinaire dans le cadre de l’opération Breach ayant pour objectif d’examiner la situation des importateurs impliqués dans le trafic frauduleux. Toutefois, selon les HMRC, l’utilisation d’indicateurs de risque reposant sur des prix moyens serait contre-productive et disproportionnée compte tenu du volume des importations à destination du Royaume‑Uni.

70.

Le 3 février 2016, l’OLAF a organisé une troisième réunion bilatérale avec les HMRC, qui ont déclaré que le Royaume‑Uni avait contrôlé les seize entreprises concernées dans le cadre de l’opération Snake. L’OLAF a de nouveau recommandé que les HMRC recourent aux indicateurs de risque à l’échelle de l’Union fondés sur le prix minimal acceptable. Il a souligné le pourcentage élevé d’importations à destination du Royaume‑Uni considérées comme étant sous-évaluées et à l’origine de pertes importantes en matière de droits de douane.

71.

Les 22 et 23 mars 2016, l’OLAF a organisé une quatrième réunion bilatérale avec les HMRC. Il a réaffirmé l’utilité de mettre en œuvre les indicateurs de risque à l’échelle de l’Union en tant que mesure préventive à l’importation et a proposé des moyens pratiques pour leur mise en œuvre progressive par les autorités du Royaume-Uni. L’OLAF a de nouveau fait le point sur la situation de l’époque, montrant de la sorte que les pertes de ressources propres traditionnelles au Royaume‑Uni s’intensifiaient, principalement en raison du recours abusif au régime douanier 42.

72.

En juillet 2016, lors d’une réunion bilatérale, l’OLAF a présenté un rapport montrant que les pertes de ressources propres traditionnelles s’accentuaient au Royaume‑Uni.

73.

Les 18 et 19 septembre 2016, lors d’une réunion multilatérale, les autorités françaises ont présenté les résultats de l’opération dite « Octopus », une opération conduite par ces autorités avec la participation de dix États membres (dont le Royaume‑Uni) et le soutien de l’OLAF. Il ressort du rapport final sur cette opération que des réseaux criminels organisés étaient à l’origine des fraudes à la sous-évaluation. Le destinataire inscrit dans les déclarations douanières d’importation était presque toujours un opérateur défaillant ou une entreprise « phénix ». Elles ont également conclu que la grande majorité des marchandises transportées, contrôlées en France sur la base de critères prédéfinis, présentaient des valeurs sous-estimées, déclarées de manière frauduleuse au Royaume‑Uni dans le cadre du régime douanier 42.

74.

En octobre 2016, les autorités du Royaume-Uni ont conduit une opération expérimentale, baptisée « Samurai », qui ciblait les importations de deux opérateurs, lesquels ont cessé leurs activités immédiatement après que les HMRC ont contesté leurs déclarations en douane.

75.

Le 1er mars 2017, l’OLAF a clôturé son enquête concernant la sous-évaluation des importations au Royaume‑Uni et a rendu son rapport (ci‑après le « rapport OLAF ») aux termes duquel des importateurs au Royaume‑Uni ont éludé des montants élevés de droits de douane en présentant à l’importation de fausses factures, des factures fictives et des déclarations de valeur en douane incorrectes. L’OLAF a révélé une augmentation sérieuse de l’ampleur du mécanisme de fraude à la sous-évaluation transitant par le Royaume‑Uni entre 2013 et 2016. Cette période coïncidait avec la mise en œuvre par d’autres États membres de profils de risque reposant sur l’outil d’évaluation des risques fondé sur les prix moyens corrigés, comme le recommandait l’OLAF.

76.

D’après ce rapport, au cours de ladite période, les importations frauduleuses transitant par le Royaume‑Uni ont augmenté de manière significative, en raison de l’inadéquation des contrôles. En 2016, plus de 50 % des produits textiles et de chaussures en provenance de Chine importées au Royaume‑Uni ont été déclarés en dessous des prix minimaux acceptables, tandis que quelque 80 % des pertes totales des ressources propres traditionnelles étaient imputables à la sous-évaluation de produits textiles et de chaussures importés au Royaume‑Uni.

77.

Le rapport OLAF précisait, en outre, que des groupes criminels organisés opérant dans l’ensemble de l’Union étaient à l’origine de cette fraude. La plupart des importations vers le Royaume‑Uni concernaient des fournitures destinées au marché noir de textiles et de chaussures dans d’autres États membres. La plupart de ces importations ont été effectuées en recourant de manière abusive au régime douanier 42 ( 23 ). Ainsi, l’OLAF a estimé que l’évasion de la TVA due dans les États membres de destination finale des marchandises, notamment l’Allemagne, l’Espagne, la France et l’Italie, était également substantielle. L’OLAF a souligné que le Royaume‑Uni n’avait pas appliqué de profils de risque fondés sur les prix minimaux acceptables, comme il le recommandait, et n’avait pas effectué de contrôles douaniers appropriés à l’importation, si ce n’est au cours d’un mois lors de l’opération Snake ( 24 ).

78.

En conséquence, selon ce rapport, le Royaume‑Uni a mis en libre pratique, sans procéder à des contrôles douaniers, des produits textiles et de chaussures en provenance de Chine sous-évalués, de sorte qu’une partie substantielle des droits de douane n’ont pas été perçus ni mis à la disposition du budget de l’Union. Dès lors, l’OLAF a calculé, dans son rapport, les pertes de ressources propres traditionnelles pour la période entre 2013 et 2016 qui en découleraient ( 25 ). Plus particulièrement, il a déterminé, pour le code nomenclature combinée de chaque produit concerné, la quantité (en kg) des marchandises sous-évaluées (considérées comme étant les marchandises déclarées à une valeur en dessous du prix minimal acceptable concerné), et la différence entre la valeur déclarée et le prix moyen corrigé concerné (prix moyen corrigé pour l’Union-28) du produit en cause, puis a appliqué le taux du droit de douane en vigueur à cette différence. Dans ce contexte, l’OLAF a recommandé aux HMRC de prendre toutes les mesures appropriées afin de recouvrer ledit montant et d’appliquer des indicateurs de risque.

79.

Entre novembre 2016 et octobre 2018, en vertu des dispositions du règlement no 608/2014 relatives au contrôle et à la surveillance des ressources propres traditionnelles, des agents mandatés de la Commission ont effectué cinq inspections portant, notamment, sur la sous-évaluation.

80.

Lors de la mission d’inspection 16‑11‑1, qui a eu lieu entre le 14 et le 18 novembre 2016, la Commission, après avoir constaté que les montants de droits de douane qui avaient été annulés dans la comptabilité B correspondaient aux dettes supplémentaires initialement réclamées par la voie de l’émission des 24 avis de paiement C18 Snake concernant les importations sous-évaluées détectées dans le cadre de l’opération Snake mais retirées par la suite, a invité les autorités du Royaume-Uni à déterminer la valeur en douane de toutes les déclarations d’importation concernées, à recalculer les droits additionnels dus sur ces valeurs, à inscrire les dettes correspondantes dans la comptabilité B et de recouvrer les montants concernés dans les meilleurs délais.

81.

Elle a également demandé auxdites autorités si elles appliquaient l’outil des prix moyens corrigés mis au point par l’OLAF afin de détecter les importations sous-évaluées, si elles effectuaient des contrôles physiques lors du dédouanement et si elles demandaient systématiquement le versement d’une garantie couvrant les droits susceptibles d’être exigibles conformément à l’article 248, paragraphe 1, du règlement d’application.

82.

Au cours de la mission d’inspection 17‑11‑1, effectuée du 8 au 12 mai 2017, la Commission a sélectionné douze déclarations d’importation présentées au cours du premier trimestre 2017 et comportant des valeurs particulièrement faibles, aux fins d’une vérification sur place. L’examen a confirmé que les douze lots couverts par ces déclarations avaient été mis en libre pratique dans l’Union sans contrôle et sans constitution de garantie. Les autorités du Royaume-Uni ont confirmé qu’elles n’avaient pas mis en place les mesures demandées par l’OLAF à la suite de l’opération Snake en 2014, puis à nouveau dans le rapport d’inspection 16‑11‑1. Elles ont expliqué que cela était principalement dû à l’évaluation de leurs conseillers juridiques selon laquelle aucune méthode d’évaluation acceptable n’était disponible. Toutefois, les importations en cause seraient examinées par le groupe d’action établi dans le cadre de l’opération Breach.

83.

Lors de la mission d’inspection 17‑11‑2, ayant eu lieu entre le 13 et le 17 novembre 2017, cinq déclarations d’importation à valeurs particulièrement faibles et concernant des importateurs déjà identifiés dans le cadre de l’opération Snake comme fraudeurs potentiels ont été examinées par les agents de la Commission sur le fondement de l’un des 24 avis de paiement C18 Snake issus de cette opération et portant sur un montant total de 62003024,23 GBP. Toutefois, il s’est avéré impossible de retrouver les dettes correspondantes aux différentes déclarations d’importation, ce qui, selon les HMRC, justifiait l’annulation de ces dettes.

84.

Lors de cette mission, les autorités du Royaume-Uni ont informé les agents de la Commission du lancement par les HMRC, dès le 12 octobre 2017, de l’opération dénommée « Swift Arrow ». Le Royaume‑Uni a expliqué que les profils de risque utilisés dans le cadre de cette opération étaient fondés non pas sur les seuils établis par l’OLAF mais sur des seuils ou profils de risque nationaux fixés par les HMRC sur la base des seules importations dans le Royaume‑Uni. Ces profils n’étaient toutefois appliqués qu’à certains opérateurs préalablement identifiés comme étant actifs dans le commerce frauduleux. Les conteneurs détectés par ces profils de risque font l’objet de contrôles physiques de la part des autorités du Royaume-Uni lors du dédouanement. Si celles‑ci estiment que la valeur déclarée n’est pas justifiée, elles exigent un paiement à titre de garantie avant la mainlevée des marchandises.

85.

Au cours de la mission d’inspection 18‑11‑1, effectuée entre le 16 et le 20 avril 2018, 25 déclarations d’importation relatives à la période comprise entre le 12 octobre 2017, début de l’opération dite « Swift Arrow », et le 31 décembre 2017 ont été inspectées par les agents de la Commission. Il a été constaté que seules sept des 25 écritures présentant une valeur extrêmement faible ont été détectées par le profil de risque mis au point par les HMRC et que les 18 autres conteneurs ont été mis en libre circulation sans que soit contestée la valeur en douane. Les autorités du Royaume-Uni ont indiqué que, depuis le lancement de l’opération Swift Arrow, le profil de risque avait été ajusté afin d’inclure davantage d’opérateurs, de codes de nomenclature combinée (NC) et de points d’entrée, de sorte que, si les importations en cause avaient eu lieu en avril 2018, le profil aurait détecté onze écritures supplémentaires.

86.

En outre, selon ces autorités, plusieurs des opérateurs sélectionnés ont interrompu leurs importations dès lors qu’ils ont été inclus dans les profils de risque, ont fait l’objet de contrôles préalablement à la mainlevée et ont été priés de verser des garanties avant que la mainlevée des marchandises ne soit octroyée.

87.

Ces autorités ont toutefois refusé de divulguer les détails de la méthode de calcul utilisée par les HMRC pour déterminer les garanties exigées dans le cadre de l’opération Swift Arrow et pour établir les ordres de recouvrement a posteriori, à savoir les avis de paiement C18 Snake.

88.

Au mois de mai 2018, dans le cadre de l’opération Breach, le Royaume‑Uni a émis des avis de paiement C18 (ci‑après les « avis de paiement C18 Breach ») pour un montant total de 25 millions de GBP pour une période qui remontait à 2015.

89.

Lors de la mission d’inspection 18‑11‑2, laquelle a eu lieu entre le 8 et le 12 octobre 2018, les autorités du Royaume-Uni ont maintenu ce refus. En revanche, elles ont confirmé qu’elles avaient constaté, en avril 2018, des droits additionnels pour sept opérateurs, dont plusieurs déjà ciblés durant l’opération Snake, pour un montant total de 19434197,73 GBP.

B. La procédure précontentieuse

90.

Par lettres du 24 mars 2017 et du 28 juillet 2017, la Commission s’est enquise auprès du Royaume‑Uni de la suite réservée au rapport OLAF. Elle a indiqué qu’elle n’avait pas reçu d’informations complémentaires concrètes de la part du Royaume‑Uni et que rien ne donnait à penser que cet État avait pris les mesures appropriées pour prévenir la fraude à la sous-évaluation constatée dans ce rapport. En l’absence d’informations contraires, la Commission a indiqué qu’elle se voyait dans l’obligation de demander au Royaume‑Uni de mettre à disposition un montant de ressources propres traditionnelles correspondant aux pertes déterminées par l’OLAF (déduction faite des frais de perception).

91.

Dans l’une des trois lettres du 28 juillet 2017, elle a également demandé à être informée de la suite réservée par les autorités du Royaume-Uni au rapport de la mission d’inspection 16‑11‑1, en réitérant à cet égard sa demande de pouvoir disposer de l’évaluation juridique qui a conduit à l’annulation des 24 avis de paiement C18 Snake ainsi que de la liste des écritures ayant trait à chacun des 24 dossiers, y compris les calculs effectués pour constater les dettes douanières.

92.

Par lettres du 8 août 2017 et du 12 octobre 2017, le Royaume‑Uni a répondu à ces demandes. S’agissant, tout d’abord, du rapport OLAF, le Royaume‑Uni a relevé que des mesures auraient été prises pour combattre le problème de la sous-évaluation tel le lancement de l’opération Breach. Le droit de l’Union n’imposerait d’ailleurs pas de modèle particulier de contrôle, de sorte qu’il appartiendrait à chaque État membre de décider de la meilleure manière de faire appliquer la loi. Des mesures de contrôle préalables à la mainlevée, y compris la prise de garanties, ne seraient en outre pas par nature plus efficaces que des mesures a posteriori telles que celles développées par le Royaume‑Uni. La méthodologie OLAF, en ce qu’elle est fondée sur l’application de données établies à l’échelle de l’Union, ne serait ni solide ni appropriée pour le Royaume‑Uni. Ce modèle serait critiquable, raison pour laquelle le Royaume‑Uni aurait développé sa propre approche qui ne connaîtrait pas les failles de la méthodologie OLAF. Ensuite, quant au suivi du rapport de la mission d’inspection 16‑11‑1, le Royaume‑Uni a indiqué que la raison de l’annulation des 24 avis de paiement C18 Snake et du retrait des montants de la comptabilité B y correspondant était son incapacité de prouver le montant des valeurs réelles des marchandises importées, mais qu’un groupe d’experts remédierait à ce problème dans le cadre de l’opération Breach. Enfin, le Royaume‑Uni a répété ne pas pouvoir donner suite à la demande de mise à disposition de l’évaluation juridique des HMRC ayant conduit à l’annulation des avis de paiement C18 Snake, en invoquant à cet égard des motifs de confidentialité et de protection du secret professionnel entre un avocat et son client.

93.

Le 9 mars 2018, la Commission a adressé au Royaume‑Uni une lettre de mise en demeure.

94.

Le Royaume‑Uni a répondu à cette lettre le 22 juin 2018. En annexe de cette dernière lettre, cet État demandait qu’une version complète du rapport OLAF lui soit transmise, dès lors qu’il ne disposait que d’une version incomplète de ce rapport, et que la Commission lui fournisse des réponses à des questions détaillées sur la méthode utilisée pour calculer les montants de ressources propres traditionnelles réclamés.

95.

Le 24 septembre 2018, la Commission a adressé un avis motivé au Royaume‑Uni dans lequel elle a notamment répondu aux demandes formulées par cet État en annexe de sa lettre du 22 juin 2018 et a fixé le délai de réponse à deux mois.

96.

Le 19 décembre 2018, la Commission, n’ayant pas reçu du Royaume‑Uni de réponse à l’avis motivé dans le délai imparti, a décidé d’introduire le présent recours en manquement devant la Cour, après avoir informé le Royaume‑Uni, le 18 décembre 2018, qu’elle prendrait cette décision le lendemain.

97.

Le 9 janvier 2019, une réunion technique a eu lieu entre les autorités du Royaume-Uni et la Commission, lors de laquelle une société de conseil a présenté ses conclusions, qui figuraient dans un rapport commandité par le Royaume‑Uni.

98.

Le 11 février 2019, le Royaume‑Uni a transmis à la Commission sa réponse à l’avis motivé, consistant en une note de couverture et une annexe contenant un rapport d’une société de conseil.

IV. La procédure devant la Cour

99.

Le 7 mars 2019, considérant que les arguments présentés par le Royaume‑Uni ne permettaient pas de réfuter les griefs formulés dans l’avis motivé, la Commission a introduit le présent recours.

100.

Le Royaume de Belgique, la République d’Estonie, la République hellénique, la République de Lettonie, la République portugaise et la République slovaque (ci‑après, pris ensemble, les « parties intervenantes »), ont présenté des mémoires en intervention au soutien du Royaume‑Uni dans la présente affaire.

101.

Par lettre du 6 juin 2020, le Royaume‑Uni a présenté une demande de mesures d’instruction ou d’organisation de la procédure visant à ce que la Cour enjoigne à la Commission de répondre à une série de questions, dont certaines avaient déjà été posées dans les demandes d’information que le Royaume‑Uni a adressées à la Commission les 22 juin 2018 et 22 mars 2019. Par une lettre du 11 avril 2019, le Royaume‑Uni a demandé à la Cour que celle‑ci impose à la Commission de répondre aux questions posées dans la demande du 22 mars 2019 (ci-après la « demande d’informations redéfinie ») ( 26 ).

102.

Par lettre du 14 octobre 2020, la Cour a adressé à la Commission et au Royaume‑Uni des questions avec demande de réponse écrite. Par actes écrits du 16 novembre 2020, ces parties y ont répondu.

103.

Une audience s’est tenue le 8 décembre 2020 au cours de laquelle des observations orales ont été présentées, d’une part, par le Royaume‑Uni, au soutien duquel sont intervenues la République d’Estonie, la République de Lettonie et la République portugaise, ainsi que, d’autre part, la Commission. Ces parties ont été priées de concentrer leurs plaidoiries sur le contenu des réponses mentionnées au point précédent des présentes conclusions.

V. Conclusions des parties

104.

Dans sa requête, la Commission demande à la Cour de constater que,

en n’ayant pas pris en compte les montants corrects des droits de douane et en n’ayant pas mis à disposition le montant correct des ressources propres traditionnelles et des ressources propres [fondées sur la TVA] relatives à certaines importations de produits textiles et de chaussures en provenance de Chine, le Royaume‑Uni a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 2 et 8 de la décision 2014/335, des articles 2 et 8 de la décision 2007/436, des articles 2, 6, 9, 10, 12 et 13 du règlement no 609/2014, des articles 2, 6, 9, 10, 11 et 17 du règlement no 1150/2000, de l’article 2 du règlement no 1553/89, ainsi que de l’article 105, paragraphe 3, du code des douanes de l’Union, et de l’article 220, paragraphe 1, du code des douanes communautaire ;

comme conséquence du non‑respect des obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4, paragraphe 3, TUE, de l’article 325 et de l’article 310, paragraphe 6, TFUE, des articles 3 et 46 du code des douanes de l’Union, de l’article 13 du code des douanes communautaire, de l’article 248, paragraphe 1, du règlement d’application, de l’article 244 du règlement d’exécution ainsi que de l’article 2, paragraphe 1, sous b) et d), des articles 83, 85, 86 et 87, et de l’article 143, paragraphe 1, sous d), et paragraphe 2, de la directive 2006/112 ;

[Les pertes de ressources propres traditionnelles correspondantes, [qui doivent être mises] à la disposition du budget de l’Union (diminuées des frais de perception) s’élèvent à :

496025324,30 euros en 2017 (jusqu’au 11 octobre 2017 inclus) ;

646809443,80 euros en 2016 ;

535290329,16 euros en 2015 ;

480098912,45 euros en 2014 ;

325230822,55 euros en 2013 ;

173404943,81 euros en 2012 ;

22777312,79 euros en 2011.] ( 27 )

en ne communiquant pas toutes les informations nécessaires à la Commission pour déterminer le montant des pertes de ressources propres traditionnelles et en ne fournissant pas, comme demandé, le contenu de l’évaluation juridique du service juridique des HMRC ou les motifs de la décision ayant conduit à l’annulation des dettes douanières constatées, le Royaume‑Uni a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4, paragraphe 3, TUE et de l’article 2, paragraphe 2 et paragraphe 3, sous d), du règlement no 608/2014 ; et

condamner le Royaume‑Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord aux dépens.

105.

Le Royaume‑Uni conclut à ce qu’il plaise à la Cour :

déclarer le recours totalement ou partiellement irrecevable ;

à titre subsidiaire, constater que

le Royaume‑Uni n’a pas manqué à son obligation de combattre la fraude, que ce soit au titre des ressources propres traditionnelles ou de la coopération loyale ;

les mesures prises par le Royaume‑Uni n’ont pas eu de conséquences pour le budget de l’Union, raison pour laquelle il ne saurait être tenu de dédommager l’Union du moindre montant ;

à titre subsidiaire, si la Cour constate qu’un manquement particulier a entraîné une perte pour l’Union, permettre au Royaume‑Uni d’évaluer et de déclarer les ressources propres traditionnelles supplémentaires découlant du constat de responsabilité, sans déterminer elle‑même le montant des pertes de ces ressources ;

à titre infiniment subsidiaire, dans l’hypothèse où la Cour déciderait de trancher la demande relative aux pertes de ressources propres traditionnelles, examiner l’évaluation de celles‑ci effectuée par le Royaume‑Uni ;

à titre infiniment subsidiaire, dans l’hypothèse où la Cour n’approuverait pas les choix méthodologiques du Royaume‑Uni, « reconnaître que la Commission doit, dans son évaluation des pertes de ressources propres traditionnelles, satisfaire à la norme de preuve applicable dans les actions en dommages‑intérêts contre un État membre, ce qu’elle n’a pas fait » ;

rejeter la réclamation liée aux ressources propres provenant de la TVA, pour défaut de base juridique et de quantification, et

condamner la Commission aux dépens.

106.

Tous les États membres intervenants concluent, en substance, au rejet du recours. La République slovaque et la République portugaise concluent, en outre, à la condamnation de la Commission à l’ensemble des dépens.

VI. Sur le recours

107.

Avant d’examiner les moyens invoqués par la Commission à l’appui de son recours, il convient de se pencher sur les exceptions d’irrecevabilité soulevées par le Royaume‑Uni dans son mémoire en défense (section A). Sur le fond, ce recours s’articule, en substance, autour de quatre moyens. En premier lieu, la Commission fait valoir que, pendant la période d’infraction, le Royaume‑Uni n’a pas pris de mesures visant à protéger les intérêts financiers de l’Union, ce défaut constituant un manquement tant aux obligations générales en matière de protection des intérêts financiers de l’Union et de lutte contre la fraude qu’à l’obligation pour les autorités douanières de prendre des mesures visant à protéger les intérêts financiers de l’Union, d’effectuer des contrôles sur la base d’une analyse de risque et d’exiger le paiement de garanties (section B). En deuxième lieu, la Commission soutient que le Royaume‑Uni a enfreint des dispositions de la réglementation en matière de ressources propres, dès lors que les droits de douane des marchandises importées n’ont pas été calculés correctement et que les montants des ressources propres afférents à ces droits n’ont pas été constatés ni mis à la disposition du budget de l’Union au moment où ceux‑ci auraient dû l’être (section C). En troisième lieu, il y a lieu d’examiner l’argument tiré d’une violation de l’obligation de coopération loyale telle que consacrée à l’article 4, paragraphe 3, TUE (section D). En quatrième lieu, la Commission fait valoir, en substance, que, dès lors qu’il n’a pas correctement déterminé la valeur en douane des marchandises sous-évaluées lors de leur importation en raison de l’absence de mesures de contrôle effectives, le Royaume‑Uni a enfreint la législation en matière de TVA et n’a pas mis à disposition du budget de l’Union l’intégralité des ressources propres provenant de la TVA (section E).

A. Sur la recevabilité

108.

Dans son mémoire en défense, le Royaume‑Uni soulève cinq catégories d’exceptions d’irrecevabilité tirées, premièrement, de la violation des droits de la défense dans le cadre de la procédure précontentieuse et de celle devant la Cour, deuxièmement, de l’irrégularité de la procédure précontentieuse et de la requête en ce qui concerne la prise en compte de la TVA en vertu du régime douanier 42 ( 28 ), troisièmement, d’une violation par la Commission des principes de confiance légitime, de sécurité juridique, d’estoppel et de coopération loyale, quatrièmement, de l’impossibilité d’enjoindre la mise à la disposition des montants au titre de l’article 258 TFUE, et, cinquièmement, du caractère prématuré du recours en ce qui concerne la période allant du 1er mai 2015 au 11 octobre 2017.

109.

La cinquième exception d’irrecevabilité est, de manière intrinsèque, liée à l’examen des arguments de fond du deuxième moyen portant sur l’absence de constatation et de mise à disposition au budget de l’Union dans le délai imparti des montants de ressources propres correspondant aux droits de douane. Ainsi, l’argumentation du Royaume‑Uni relative au caractère prématuré du recours précoce en ce qui concerne la période allant du 1er mai 2015 au 11 octobre 2017 présentée dans le cadre de cette exception d’irrecevabilité vise, en réalité, à remettre en cause le manquement reproché dans le cadre du deuxième moyen et à réduire l’ampleur des pertes des ressources propres traditionnelles dont la Commission demande la constatation. Je propose donc que la cinquième catégorie d’exception d’irrecevabilité soit analysée dans le cadre de l’examen au fond de ce moyen.

110.

Ainsi, il convient d’examiner, au préalable, les quatre premières catégories d’exceptions d’irrecevabilité pour déterminer si le présent recours en manquement introduit par la Commission est recevable.

1.   Sur l’exception d’irrecevabilité tirée d’une prétendue violation des droits de la défense du Royaume‑Uni au cours de la procédure précontentieuse et de celle devant la Cour

111.

Le Royaume‑Uni soutient, en substance, que le présent recours est irrecevable, au motif que ses droits de la défense n’ont été respectés ni dans le cadre de la procédure précontentieuse ni dans celui de la procédure devant la Cour.

112.

À titre liminaire, d’une part, il convient de rappeler que, s’agissant de la procédure précontentieuse, il résulte d’une jurisprudence constante de la Cour que celle‑ci a pour but de donner à l’État membre concerné l’occasion à la fois de se conformer à ses obligations découlant du droit de l’Union et de faire utilement valoir ses moyens de défense à l’encontre des griefs formulés par la Commission ( 29 ). La régularité de cette procédure constitue une garantie essentielle voulue par le traité FUE non seulement pour la protection des droits de l’État membre en cause, mais également pour assurer que la procédure contentieuse éventuelle aura pour objet un litige clairement défini ( 30 ).

113.

Par ailleurs, si l’avis motivé doit contenir un exposé cohérent et détaillé des raisons ayant amené la Commission à la conviction que l’État membre intéressé a manqué à l’une des obligations qui lui incombent en vertu du traité, la lettre de mise en demeure ne saurait être soumise à des exigences de précision aussi strictes que celles auxquelles doit satisfaire l’avis motivé, celle‑ci ne pouvant nécessairement consister qu’en un premier résumé succinct des griefs. Rien n’empêche donc la Commission de détailler, dans l’avis motivé, les griefs qu’elle a déjà fait valoir de façon plus globale dans la lettre de mise en demeure ( 31 ).

114.

D’autre part, concernant la procédure contentieuse, il est de jurisprudence constante que, dans le cadre d’un recours formé en application de l’article 258 TFUE, celui‑ci doit présenter les griefs de façon cohérente et précise, afin de permettre à l’État membre et à la Cour d’appréhender exactement la portée de la violation du droit de l’Union reprochée, condition nécessaire pour que ledit État puisse faire valoir utilement ses moyens de défense et pour que la Cour puisse vérifier l’existence du manquement allégué ( 32 ). En particulier, la requête de la Commission doit contenir un exposé cohérent et détaillé des raisons l’ayant amenée à la conviction que l’État membre intéressé a manqué à l’une des obligations qui lui incombent en vertu des traités ( 33 ).

115.

C’est à la lumière de cette jurisprudence qu’il convient de déterminer si la Commission a assuré le respect des droits de la défense à l’égard du Royaume‑Uni lors de la procédure précontentieuse et dans le cadre de la présente procédure.

116.

En premier lieu, le Royaume‑Uni soutient que ses droits de la défense ont été violés, dès lors que la Commission n’a pas donné de suite suffisante ni à sa première demande d’informations ( 34 ), ni à la demande d’informations redéfinie, s’agissant surtout d’informations qui seraient nécessaires afin que cet État pût reconstituer le montant des ressources propres traditionnelles réclamées par la Commission dans sa requête.

117.

Dans son mémoire en duplique, le Royaume‑Uni soutient que les informations techniques détaillées fournies par la Commission dans son mémoire en réplique ne lui permettent toujours pas de reconstituer ce montant. Des incertitudes importantes subsisteraient, notamment quant à la méthode utilisée par la Commission pour corriger les données ou en ce qui concerne la question de savoir si les données non agrégées dont dispose le Royaume‑Uni correspondent aux données agrégées quotidiennes utilisées par la Commission dans ses calculs des pertes de ressources propres traditionnelles, à savoir les données Surveillance 2.

118.

Le Royaume‑Uni estime que la Commission a violé ses droits de la défense et le principe de coopération loyale en lui communiquant tardivement, à savoir au stade de la réplique, une partie des informations requises. Il conteste également le refus de la Commission de lui fournir des informations sur les mesures prises par les autres États membres afin de combattre la fraude à la sous-évaluation en cause. Or, ces informations lui auraient été nécessaires pour se défendre contre les allégations avancées par la Commission selon lesquelles des mesures appropriées auraient été prises dans d’autres États membres, lesquelles auraient produit des résultats dans la lutte contre les importations sous-évaluées. Elles seraient également pertinentes pour déterminer si les mesures prises par le Royaume‑Uni relèvent de sa marge d’appréciation et constituent une approche raisonnable pour combattre la fraude concernée et formuler des arguments sur le lien de causalité entre le comportement erroné des autorités du Royaume-Uni et le défaut de prise en compte des ressources propres traditionnelles.

119.

En second lieu, le Royaume‑Uni reproche à la Commission d’avoir compromis sa capacité à accéder à toutes les données nécessaires à sa défense, dès lors qu’elle n’a pas fourni à cet État les informations requises en ce qui concerne ses calculs relatifs aux ressources propres traditionnelles pour la période allant de 2011 à 2014.

120.

À mon sens, ces arguments doivent être rejetés.

121.

À cet égard, s’agissant de l’exception d’irrecevabilité tirée de l’absence de réponse à la demande d’informations, qui était jointe à la réponse à la lettre de mise en demeure du 22 juin 2018, il y a lieu de constater que, dans son avis motivé du 23 septembre 2018 ( 35 ), la Commission a expressément répondu à cette demande.

122.

Plus particulièrement, dans sa réponse à la lettre de mise en demeure, cet État membre avait reproché à la Commission le fait que l’annexe 2 du rapport OLAF du 1er mars 2017 n’était pas complète et que plusieurs pages étaient manquantes. À cet égard, dans cet avis motivé, la Commission a expliqué que cette annexe avait été remplacée par l’annexe 7 du rapport OLAF du 1er mars 2017, qui contenait toutes les informations quant à la méthodologie employée par l’OLAF. Elle a ajouté que l’annexe 2 avait pour base les documents distribués à cet État lors de la réunion du 28 juillet 2015 entre l’OLAF et le Royaume‑Uni. Ainsi, la méthodologie OLAF a été exposée par la Commission dans son avis motivé sous la forme de deux documents joints en annexe 7 du rapport OLAF ( 36 ), ces documents ayant d’ailleurs été joints à la requête devant la Cour.

123.

Il s’ensuit que l’avis motivé contient des explications complètes quant à ce remplacement, qui n’est pas, à mon sens, de nature à rendre incompréhensibles les allégations formulées à l’encontre du Royaume‑Uni dans l’avis motivé. Partant, il ne saurait être considéré qu’il ait été porté atteinte à l’exercice par cet État de ses droits de la défense.

124.

En outre, le Royaume‑Uni soutient que ses droits de la défense ont été violés dès lors que la Commission n’a pas répondu à sa demande d’informations redéfinie, adressée à la Commission après l’introduction du présent recours, à savoir le 7 mars 2019. Cette allégation s’articule, en substance, en quatre griefs.

a)   Sur la communication des données relatives aux calculs concernant le prix moyen corrigé, le prix minimal acceptable et les pertes estimées de ressources propres

125.

Par ce premier grief, le Royaume‑Uni reproche à la Commission de ne pas lui avoir fourni les données utilisées pour les calculs concernant le prix moyen corrigé, le prix minimal acceptable et les pertes estimées de ressources propres, ni les moyens de comprendre comment elle a utilisé ces données.

126.

À cet égard, il y a lieu de constater que, dans son mémoire en réplique, la Commission fournit une réponse aux questions figurant dans la demande d’informations redéfinie portant sur le calcul du prix moyen corrigé et les prix minimaux acceptables ainsi que des estimations de pertes de ressources propres traditionnelles. Elle y explique, notamment, que le Royaume‑Uni a toujours eu un accès intégral aux données utilisées, notamment le téléchargement « DL 53 », pour constituer le prix moyen corrigé pour l’Union-28 et les estimations de pertes de ressources propres traditionnelles au moyen du site web Theseus du JRC ( 37 ), cet État membre disposant d’un accès intégral à ce site depuis l’année 2010, dès lors qu’il a fait des simulations sur la base de celles‑ci ( 38 ). Plus particulièrement, les rapports figurant à l’annexe 7 du rapport OLAF ( 39 ), premièrement, expliquaient la méthodologie du calcul du prix moyen corrigé et du prix minimal acceptable, et, notamment, du « nettoyage » des données, ainsi que l’estimation des pertes (à savoir la différence de prix entre le prix déclaré et le prix moyen corrigé), deuxièmement, fournissaient la liste de prix moyens corrigés utilisés pour chaque catégorie de produits, troisièmement, donnaient un aperçu de la marche à suivre pour accéder au prix moyen corrigé pour l’Union-28 sur le site web Theseus, et, quatrièmement, exposaient les raisons sous-tendant le choix de fixer le prix minimal acceptable au niveau de 50 % par rapport au prix moyen corrigé. L’annexe 7 du rapport OLAF était, en outre, jointe à l’annexe 35 de la requête ( 40 ), et la Commission y a fait référence dans l’avis motivé. En conséquence, il apparaît que ces données et ces documents étaient connus du Royaume‑Uni et pouvaient lui permettre, au besoin, de reproduire les calculs effectués par la Commission. Par ailleurs, s’agissant des volumes de marchandises en vue d’estimer les pertes de ressources propres traditionnelles, le Royaume‑Uni a demandé une copie de l’ensemble de la base de données Surveillance 2 utilisée pour pouvoir calculer lui‑même ces pertes. À cet égard, ainsi que cela a été expliqué par la Commission, il s’agit d’une base de données que cette institution a élaborée, qui regroupe les données concernant, notamment, le volume fourni par les États membres eux‑mêmes. Ainsi, dans son mémoire en réplique, la Commission a expliqué que ces données étaient exclusivement fondées sur les données à l’importation transmises par le Royaume‑Uni aux services de la Commission et simplement enregistrées dans cette base de données ( 41 ).

127.

Dans son mémoire en duplique, le Royaume‑Uni admet que les informations fournies par la Commission dans le mémoire en réplique ont permis de satisfaire les deux demandes d’information. Toutefois, il critique la communication tardive de celles‑ci. À cet égard, compte tenu des explications exposées au point précédent, il convient de constater que la manière dont la Commission a procédé aux calculs du prix moyen corrigé et du prix minimal acceptable ainsi que celle utilisée pour estimer les pertes de ressources propres traditionnelles ont été transmises au Royaume‑Uni (et, donc, connues de lui), ainsi qu’il résulte des explications figurant à l’annexe 7 du rapport OLAF. Dès lors, il ne peut être considéré que les informations relatives à la réplique constituent de nouvelles informations.

128.

Par conséquent, dès lors que les données employées par la Commission étaient des documents accessibles au Royaume‑Uni, celle‑ci ayant expliqué, avant et pendant la présente affaire, la manière dont cet État membre pouvait avoir accès à ces données et reconstituer les calculs qu’elle a effectués, il convient de considérer que toutes les informations sollicitées par le Royaume‑Uni dans sa demande d’informations redéfinie au sujet des prix moyens corrigés pour l’Union‑28, des prix minimaux acceptables et des pertes de ressources propres lui étaient déjà accessibles.

b)   Sur les informations relatives aux calculs effectués pour les années 2011 à 2014 sur la base des avis de paiement C18 Snake

129.

Par ce deuxième grief, le Royaume‑Uni reproche, dans son mémoire en défense, à la Commission de ne pas avoir pu accéder à toutes les données nécessaires à sa défense en ce que les déclarations douanières antérieures à 2014 ont été détruites, celles‑ci n’étant conservées que pendant quatre ans. En outre, par sa demande d’informations redéfinie, le Royaume‑Uni a sollicité des informations relatives aux calculs effectuées pour les années 2011 à 2014 par la Commission.

130.

Or, il convient de relever que, en annexe à son mémoire en duplique ( 42 ), le Royaume‑Uni a fourni à la Cour un tableau des 23 avis de paiement C18 Snake qu’il a émis, des copies de ces avis et des tableurs contenant les calculs qu’il a utilisés. Dès lors, l’exception d’irrecevabilité soulevée concernant les informations relatives aux calculs effectués pour les années 2011 à 2014 sur la base des avis de paiement C18 Snake ne saurait prospérer. En outre, pour autant que le Royaume‑Uni vise à contester le bien‑fondé des calculs effectués par la Commission sur la base de ces avis de paiement, il cherche, en réalité, à remettre en cause l’appréciation de la Commission quant aux pertes de ressources propres traditionnelles relatives à cette période. Toutefois, une telle contestation sera examinée dans le cadre du deuxième moyen du présent recours relatif au manquement aux dispositions relatives aux ressources propres traditionnelles et à l’estimation de celles‑ci.

c)   Sur la prise de connaissance des pratiques des autres États membres en ce qui concerne l’utilisation de la méthodologie OLAF

131.

Par ce troisième grief, le Royaume‑Uni souhaite connaître les pratiques des autres États membres en ce qui concerne l’utilisation de la méthodologie OLAF en tant qu’outil d’analyse de risque, en vue de la réalisation (ou non) de contrôles préalables au dédouanement.

132.

À cet égard, bien qu’une analyse comparative du comportement des autres États membres puisse s’avérer intéressante pour établir le caractère prétendument raisonnable des choix que le Royaume‑Uni a opérés, une analyse des pratiques des autres États membres en la matière ne saurait avoir une incidence sur l’exercice par le Royaume‑Uni de ses droits de la défense ni sur l’issue du présent recours en manquement. En effet, il est de jurisprudence constante qu’un État membre ne saurait justifier l’inexécution des obligations qui lui incombent en vertu du traité FUE par la circonstance que d’autres États membres auraient manqué et manqueraient également à leurs obligations ( 43 ). La recevabilité du présent recours dirigé contre le Royaume‑Uni ne saurait être remise en cause même si les pratiques des autres États membres en ce qui concerne l’utilisation de la méthodologie OLAF, en tant qu’outil d’analyse de risque, en vue de la réalisation [ou non] de contrôles préalables au dédouanement, s’avèrent différentes.

d)   Sur la demande de preuves quant à la nature des marchandises sous-évaluées et quant à leur État membre de destination

133.

Par ce quatrième grief, le Royaume‑Uni demande des preuves sur la nature des marchandises sous-évaluées et sur leur État membre de destination.

134.

À cet égard, il semble que, par ce grief, le Royaume‑Uni vise à contester, en réalité, le bien‑fondé des deuxième et troisième moyens relatifs, respectivement, à l’estimation des ressources propres et à la violation des dispositions en matière de ressources propres provenant de la TVA. En effet, ce grief consiste, en réalité, à remettre en cause l’appréciation de la Commission quant à la nature des marchandises prises en compte pour ces estimations et la destination éventuelle de celles‑ci. En outre, il convient à mon sens d’approuver l’argumentation de la Commission qui, pour rejeter le grief titré d’une absence de données en ce qui concerne la nature et le volume des marchandises prises en compte aux fins de la présente procédure, fait valoir que le Royaume‑Uni a introduit lui‑même les informations dans la base de données Surveillance 2, sur lesquelles s’est fondée la Commission dans son avis motivé et dans sa requête ( 44 ). Dès lors, aucune violation des droits de la défense relative à l’absence d’information quant à la nature des marchandises et sur leur État membre de destination ne saurait être constatée.

135.

Eu égard à ce qui précède, la première exception d’irrecevabilité soulevée par le Royaume‑Uni, tirée d’une violation des droits de la défense au cours de la procédure précontentieuse ainsi que de la procédure devant la Cour, doit être écartée.

2.   Sur l’exception d’irrecevabilité tirée de l’irrégularité de la procédure précontentieuse et de la requête en ce qui concerne notamment le régime douanier 42

136.

Le Royaume‑Uni soutient qu’en s’abstenant de lui communiquer, au cours de la phase précontentieuse puis dans la requête, des informations détaillées sur la base factuelle des manquements allégués, notamment au titre du régime douanier 42, la Commission ne l’a pas mis en mesure d’appréhender ces griefs et l’a ainsi empêché soit de se conformer à ses obligations, soit d’élaborer sa défense. Il souligne qu’aucune information n’est fournie sur le montant des pertes de ressources propres provenant de la TVA, sur l’identité des opérateurs concernés et des États membres de destination ainsi que sur les mesures prises par ces derniers pour récupérer la TVA due par ces opérateurs. Il en déduit que la réclamation formée de ce chef est irrecevable.

137.

Néanmoins, j’observe, tout d’abord, que cette exception d’irrecevabilité porte sur la consistance et la suffisance des éléments de fait et de preuve fournis par la Commission à l’appui de sa demande. Or, il me semble que de tels éléments relèvent davantage de l’examen du bien‑fondé du manquement invoqué que de la régularité de la procédure précontentieuse et de la requête subséquente ( 45 ). Aussi, l’argumentation tirée de l’insuffisance des informations communiquées par la Commission me paraît devoir être examinée lors de l’analyse par la Cour des éléments de preuve présentées par la Commission.

138.

Ensuite, à supposer que la Cour retienne la qualification d’exception d’irrecevabilité, il ressort du dossier soumis à la Cour que les éléments communiqués lors des échanges précontentieux et repris dans la requête étaient suffisants pour que le Royaume‑Uni ait été mis en mesure de se défendre. En effet, il résulte du rapport OLAF, sur lequel s’est appuyé la Commission, que la destination finale de la plupart des importations sous-évaluées, dans la mesure où elles étaient soumis au régime douanier 42 et que leur destination pouvait être déterminée, n’était pas le Royaume‑Uni mais d’autres États membres, ce dont il est résulté des pertes substantielles relatives à la TVA dans les État membres de destination des biens ( 46 ). L’OLAF a également relevé que, dans le schéma de fraude en cause, une grande partie des biens étaient détournés vers le marché noir, de sorte que la TVA n’était pas du tout acquittée. Ces allégations ont par la suite été exposées dans l’avis motivé et reprises dans la requête. Au regard de ces éléments, j’estime, comme le fait valoir la Commission dans son mémoire en réplique, que les éléments communiqués lors de la phase précontentieuse puis développés dans la requête n’empêchaient pas le Royaume‑Uni de se défendre contre les allégations relatives à ces pertes.

139.

Par conséquent, je propose de rejeter la deuxième exception d’irrecevabilité soulevée par le Royaume‑Uni.

3.   Sur l’exception d’irrecevabilité tirée d’une violation par la Commission des principes de confiance légitime, de sécurité juridique, d’estoppel et de coopération loyale

140.

Le Royaume‑Uni estime que le présent recours, pour autant qu’il couvre la période allant jusqu’à la fin du mois de février 2015, devrait être rejeté au motif qu’il enfreint les principes de confiance légitime, de sécurité juridique, d’estoppel et de coopération loyale. Il fait valoir que les nombreuses déclarations faites par l’OLAF en 2014 et 2015 et dans son rapport de mars 2017 ont fait naître une confiance légitime dans son chef ( 47 ). Il ressortirait notamment du rapport OLAF que, à aucun moment avant la fin de la phase opérationnelle de l’opération Snake en mars 2014 ( 48 ), cet office n’a relevé de manquement du Royaume‑Uni à ses obligations au titre du droit de l’Union. Plus particulièrement, le Royaume‑Uni se réfère à trois assurances spécifiques prétendument données par la Commission et par l’OLAF au cours de la période d’infraction, dont il découlerait qu’ils estimaient, d’une part, que cet État ne violait pas les obligations lui incombant en vertu du droit de l’Union en matière de la protection des intérêts financiers de l’Union et de la lutte contre la fraude, et, d’autre part, que ledit État ne serait pas soumis à une procédure en manquement. Partant, la Commission ne devrait pas être autorisée à revenir sur sa position fondée sur ces trois assurances.

141.

Tout d’abord, il résulterait d’un compte rendu des représentants de cet État que, lors d’une réunion tenue avec l’OLAF le 13 juin 2014, ce dernier était « satisfait des progrès réalisés par le Royaume‑Uni, ainsi que des mesures qui avaient déjà été prises à cette date et de celles qui étaient envisagées ». Il s’agirait là d’une assurance non équivoque que l’OLAF ne considérait pas que le Royaume‑Uni était en infraction avec ses obligations de protection des intérêts financiers de l’Union et de lutte contre la fraude ( 49 ).

142.

Ensuite, une deuxième déclaration faite en octobre 2014 par un agent de la Commission, informant le Royaume‑Uni que sa participation à l’ACP Discount était « satisfaisante » et que les actions nécessaires pour la mise en place de cette opération « [avaient] été mises en œuvre en temps utile et de manière effective », constituerait une assurance claire et sans équivoque que le Royaume‑Uni n’a pas manqué à ses obligations en vertu du droit de l’Union en ce qui concerne sa participation à ladite opération ( 50 ). Quant au contre-argument de la Commission selon lequel cette assurance ne portait que sur un seul cas issu de l’ACP Discount, le Royaume‑Uni soutient que la Commission ne peut remettre en question ladite assurance au motif qu’elle estimerait à présent que le contrôle d’un seul cas serait insuffisant pour fonder cette assurance, revenant sur son choix initial de ne se baser que sur un seul cas pour rassurer le Royaume‑Uni.

143.

Enfin, le Royaume‑Uni se réfère à la première réunion bilatérale de l’OLAF avec les HMRC, tenue les 19 et 20 février 2015, au cours de laquelle un fonctionnaire de l’OLAF a déclaré, selon le compte rendu de cette réunion rédigé par les fonctionnaires britanniques, que, « jusque-là », cet État membre avait « fait ce qu’il fallait faire ». Selon le Royaume‑Uni, cette dernière assurance concernait toutes les mesures prises jusque-là par lui et non pas seulement la question de l’émission des avis de paiement C18 Snake.

144.

Le fait pour la Commission de revenir à présent sur ces trois assurances serait contraire non seulement au principe de la confiance légitime mais également au principe de la sécurité juridique, lequel peut être invoqué par les États membres ( 51 ), au principe venire contra factum proprium nemini licet ainsi qu’au principe de la coopération loyale énoncé à l’article 4, paragraphe 3, TUE ( 52 ). En effet, les dispositions du droit douanier permettraient une certaine flexibilité quant aux mesures devant être prises pour combattre une fraude telle que celle de l’espèce et n’exigeraient pas expressément un système de contrôles fondé sur des filtres de dépistage et des contrôles préalables, de sorte qu’il était possible que la Commission et l’OLAF rassurent le Royaume‑Uni sur le fait que, jusqu’en février 2015, son système de contrôle douanier était conforme au droit de l’Union.

145.

À cet égard, afin d’examiner les arguments du Royaume‑Uni il doit être rappelé, d’emblée, que le droit de se prévaloir du principe de protection de la confiance légitime s’étend à tout justiciable dans le chef duquel une institution de l’Union a fait naître des espérances fondées du fait d’assurances précises qu’elle lui aurait fournies ( 53 ). Si ce droit est un principe général du droit de l’Union qui confère des droits aux particuliers ( 54 ), la Cour a également étendu son application dans les relations entre la Commission et les États membres ( 55 ).

146.

Toutefois, le droit de se prévaloir du principe de protection de la confiance légitime suppose que des assurances précises, inconditionnelles et concordantes, émanant de sources autorisées et fiables, ont été fournies à l’intéressé par les autorités compétentes de l’Union. En effet, ce droit appartient au justiciable dans le chef duquel une institution, un organe ou un organisme de l’Union, en lui fournissant des assurances précises, a fait naître à son égard des espérances fondées ( 56 ), ce d’autant plus que, dans le cadre de l’examen de l’exception d’irrecevabilité, tirée d’une violation de sa confiance légitime, soulevée par un État membre, en vertu de l’adage reus in exceptione fit actor, celui‑ci doit apporter la preuve d’une telle violation ( 57 ).

147.

En l’espèce, il ressort, à mon avis, du dossier que le Royaume‑Uni n’a pas reçu de la part de la Commission ou de l’OLAF des assurances desquelles il pouvait tirer une confiance légitime.

148.

Plus particulièrement, en ce qui concerne les trois affirmations auxquelles se réfère le Royaume‑Uni, aucune d’entre elles ne constitue, me semble-t-il, une affirmation précise et inconditionnelle du fait que les actions et l’inaction du Royaume‑Uni étaient conformes au droit de l’Union ou que cet État n’a pas violé le droit de l’Union. En effet, d’une part, la prétendue déclaration de l’agent de l’OLAF, lors d’une réunion tenue le 13 juin 2014 ( 58 ), est trop générale pour pouvoir fonder une confiance légitime quant à l’absence d’un éventuel recours en manquement. En outre, il convient d’analyser cette déclaration dans son contexte, dont il découle qu’elle était faite dans le cadre d’une réunion entre l’OLAF et le Royaume‑Uni concernant l’opération Snake et, notamment, d’une discussion portant sur l’éventuelle émission par cet État des avis de paiement C18 Snake. Toutefois, il est constant que le Royaume‑Uni les a retirés après la réunion, de sorte que cette déclaration, qui prend acte du progrès qu’aurait fait cet État, a perdu une majeure part de sa valeur. Il en est de même des observations faites par l’OLAF à la réunion des 19 et 20 février 2015, qui partaient de la prémisse que le Royaume‑Uni avait émis ces avis de paiement ( 59 ). D’autre part, quant à l’observation, faite en octobre 2014, selon laquelle l’OLAF considérait que la participation du Royaume‑Uni à l’ACP Discount était satisfaisante et que les actions nécessaires pour la mise en place de cette opération « ont été mises en œuvre de manière opportune et efficace » ( 60 ), il convient de constater que celle‑ci ne constitue pas une appréciation quant au respect du droit de l’Union par cet État en matière de protection des intérêts financiers de l’Union, dès lors qu’elle ne portait que sur un seul cas issu de l’ACP Discount et qu’elle ne reflète pas nécessairement le contenu de tous les échanges que ledit État avait avec la Commission et l’OLAF à cette époque.

149.

Il s’ensuit que les trois déclarations ou affirmations sur lesquelles s’appuie le Royaume‑Uni ne peuvent être qualifiées d’assurances « précises, inconditionnelles et concordantes », d’autant plus qu’elles sont intervenues dans un contexte caractérisé par un dialogue intense et continu sur une période relativement longue entre des services de l’OLAF et de la Commission, d’une part, et du Royaume‑Uni, d’autre part. Ainsi, comme le soutient la Commission, celles‑ci interviennent dans le cadre de l’action entreprise par l’OLAF ( 61 ) visant à convaincre les États membres de prendre des mesures de contrôle douanier préalables au dédouanement et fondées sur une analyse de risque, tel que le seuil basé sur les prix minimaux acceptables. Il résulte clairement de ce contexte que de telles assurances n’ont été données ni par l’OLAF ni par la Commission.

150.

En tout état de cause, de telles déclarations ou affirmations ne sauraient, en outre, faire obstacle à la constatation objective du non‑respect des obligations qui incombent aux États membres en vertu de la procédure prévue à l’article 258 TFUE. En effet, selon une jurisprudence constante de la Cour, cette procédure repose sur la constatation objective du non‑respect par un État membre des obligations que lui impose le droit de l’Union, et les principes du respect de la confiance légitime et de coopération loyale ne sauraient être invoqués par un État membre pour faire obstacle à une telle constatation objective, dès lors que l’admission de cette justification irait à l’encontre de l’objectif poursuivi par ladite procédure ( 62 ). S’agissant, plus particulièrement, du retour des services de la Commission et de son incidence éventuelle sur le bien‑fondé du manquement reproché au Royaume‑Uni, il est de jurisprudence constante que la Commission n’est pas habilitée à donner des garanties concernant la compatibilité avec le droit de l’Union d’un comportement déterminé et qu’en aucun cas elle ne dispose du pouvoir d’autoriser des comportements contraires à ce droit ( 63 ). Il en découle, à mon sens, que les États membres ne sauraient, dans un système dans lequel ils sont responsables de la mise en œuvre adéquate de la législation douanière de l’Union sur leur territoire national, rejeter la responsabilité d’une violation du droit de l’Union qu’ils pourraient avoir commise, en faisant valoir que la Commission ne la leur a pas reprochée à un moment donné.

151.

Enfin, il suffit de constater que les allégations fondées sur la sécurité juridique, sur le principe d’estoppel et sur l’absence de coopération loyale de la Commission avec le Royaume‑Uni sont dépourvues, ainsi qu’il résulte du mémoire en défense de cet État, de contenu autonome. En effet, dans son mémoire, le Royaume‑Uni n’expose pas, en substance, les raisons pour lesquelles ces principes seraient violés ( 64 ), de sorte que ces allégations dépendent des arguments tirés de la violation de la confiance légitime analysés ci‑dessus et doivent être écartées pour les mêmes motifs que ceux exposés dans le cadre de cette analyse.

152.

Dès lors, cette exception d’irrecevabilité doit être, à mon sens, rejetée.

4.   Sur l’exception d’irrecevabilité tirée de l’impossibilité d’enjoindre la mise à disposition des montants au titre de l’article 258 TFUE

153.

Le Royaume‑Uni excipe de l’irrecevabilité du recours pour autant qu’il vise essentiellement à obtenir que cet État verse des montants spécifiques et exceptionnellement élevés au budget de l’Union.

154.

Plus particulièrement, en s’appuyant sur la jurisprudence de la Cour ( 65 ), le Royaume‑Uni soulève l’irrecevabilité de la partie des conclusions de la requête relative à la mise à disposition du budget de l’Union d’un montant déterminé de ressources propres traditionnelles d’environ 2,7 milliards d’euros, au motif que, dans le cadre d’un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, la Cour ne peut enjoindre à un État membre d’inscrire au budget de l’Union des montants déterminés de ressources propres qui seraient non acquittées du fait de manquements reprochés à cet État membre. Partant, le troisième alinéa du premier chef de conclusions de la requête formulé au point 370 de celle‑ci serait irrecevable, d’autant plus que, selon une jurisprudence constante, dans le cadre de ce recours, la Cour peut uniquement constater le manquement par un État membre à ses obligations en vertu du droit de l’Union et ne peut pas ordonner que cet État membre prenne des mesures déterminées.

155.

Le Royaume‑Uni réfute également l’argument de la Commission selon lequel celle‑ci aurait soigneusement « structuré » les conclusions de sa requête dans la présente affaire de manière à éviter l’erreur commise dans les deux affaires Commission/Allemagne susmentionnées. Il s’agirait d’un artifice destiné à contourner l’incompétence de la Cour dès lors que la Commission viserait à obtenir le même résultat que celui recherché dans ces deux affaires en utilisant une formulation différente.

156.

En outre, la démarche de la Commission priverait le Royaume‑Uni de la possibilité qui lui est offerte par l’article 260 TFUE de remédier à toute violation constatée en vertu de l’article 258 TFUE, et ne respecterait donc pas les compétences respectives de la Commission, de la Cour et des États membres en vertu des traités de l’Union.

157.

La présente affaire se distinguerait de celle en cause dans l’arrêt du 15 novembre 2005, Commission/Danemark ( 66 ). La Cour y aurait certes fait droit à un recours visant à faire constater que l’État membre concerné avait manqué à son obligation de mettre à disposition de l’Union des ressources propres d’un montant déterminé, mais, ainsi qu’il ressort du point 56 de cet arrêt, ni l’existence d’une dette douanière ni le montant des pertes de ressources propres n’étaient contestés dans cette affaire.

158.

J’estime que cette argumentation ne saurait prospérer. À cet égard, il découle du troisième alinéa du premier chef des conclusions que, en énumérant les montants des pertes de ressources propres traditionnelles pour la période allant de 2011 à 2017, la requête de la Commission vise à décrire l’étendue du manquement, en quantifiant ces pertes. Bien que ce troisième alinéa comporte l’expression « les pertes de ressources propres traditionnelles à mettre à la disposition du budget de l’Union » ( 67 ) critiquée par le Royaume‑Uni, il me semble que cette partie de la phrase ne doit pas être comprise en tant que demande d’enjoindre à cet État de verser les montants en cause dans le cadre du présent recours, mais l’objet de celle‑ci est la description quantitative du manquement, visant ainsi à démontrer les montants spécifiques que ledit État n’a pas mis à la disposition du budget de l’Union.

159.

En ce qui concerne l’argumentation tirée des deux affaires ayant donné lieu aux arrêts Commission/Allemagne ( 68 ), il suffit, à mon sens, de constater que le libellé des conclusions de la Commission présentées dans ces affaires et ayant fait l’objet d’une appréciation critique par la Cour dans ces arrêts est différent du libellé des conclusions en cause dans la présente procédure. En effet, dans ces affaires, la Commission demandait à la Cour qu’elle enjoigne à l’État membre défendeur de procéder aux versement des montants s’il était établi que cet État membre avait manqué à ses obligations en vertu du droit de l’Union ( 69 ). Dans le cadre de ces deux arrêts, la Cour a relevé que ce que la Commission demandait était non pas de déclarer que l’État membre concerné avait manqué à ses obligations, mais d’ordonner à cet État membre de prendre certaines mesures déterminées ( 70 ). Il en découle, à mon sens, que, dans le cadre d’un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, la compétence de la Cour est limitée à la constatation du manquement au droit de l’Union reproché à un État membre, sans qu’elle puisse enjoindre à l’État membre concerné d’entreprendre des démarches afin d’éliminer ce manquement. Une telle conclusion résulte, en outre, de la formule selon laquelle la « constatation d’un tel manquement oblige [...] l’État membre en cause à prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt de la Cour » ( 71 ), figurant désormais à l’article 260 TFUE. La procédure devant la Cour, en vertu de l’article 258 TFUE, est donc une procédure en manquement et non une procédure d’injonction.

160.

Dès lors que la procédure prévue à l’article 258 TFUE repose sur la constatation objective du non‑respect par un État membre des obligations que lui impose le droit de l’Union, les arrêts rendus par la Cour en vertu de cette disposition sont, par essence même, de nature déclaratoire ( 72 ), de sorte que la Cour peut déclarer, dans les recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, portant sur des montants de ressources propres traditionnelles, qu’un État membre n’a pas mis ces montants à la disposition du budget de l’Union ( 73 ). Cette conclusion résulte également, contrairement aux allégations du Royaume‑Uni, de l’arrêt Commission/Danemark ( 74 ), dans lequel la Cour a jugé recevable une demande visant à ce que la Cour déclare que, en n’ayant pas mis à la disposition de la Commission un certain montant de ressources propres et les intérêts de retard correspondants, les autorités danoises avaient manqué à leurs obligations. En outre, dans un arrêt récent ( 75 ), la Cour a déclaré que, « en refusant de mettre à disposition des ressources propres traditionnelles d’un montant de 2120309,50 euros, [...] la République italienne [avait] manqué aux obligations lui incombant » en vertu du droit de l’Union. Il s’ensuit, selon moi, que la Cour peut considérer comme recevable une demande figurant dans les conclusions de la requête de la Commission visant à présenter un montant déterminé de pertes des ressources propres qu’elle estime dû.

161.

Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument du Royaume‑Uni selon lequel la jurisprudence précitée doit être lue à la lumière de la question de savoir si l’État membre concerné par le recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE conteste ou non l’étendue des pertes des ressources propres traditionnelles liées au manquement. À mon avis, une telle contestation est dénuée de pertinence en raison de la nature même de la procédure en manquement, qui comporte le droit, pour cet État membre, de remettre en cause devant la Cour tant les éléments factuels présentés à l’appui du recours de la Commission que le fondement juridique de celui‑ci, ce qui inclut, en toute logique, l’étendue des pertes des ressources propres traditionnelles. Cela découle de la faculté, pour la Commission, de soumettre à l’appréciation de la Cour, dans le cadre d’un recours en manquement, un différend l’opposant à un État membre quant à l’obligation de celui‑ci de mettre un certain montant de ressources propres de l’Union à la disposition de cette institution, inhérente au système de ces ressources propres, tel qu’il est actuellement conçu dans le droit de l’Union ( 76 ). En outre, la Cour a, dans sa jurisprudence la plus récente en la matière, fait droit à une demande de la Commission tendant à ce que soit constatée une violation du droit de l’Union au motif qu’un montant déterminé de ressources propres n’avait pas été mis à disposition alors même que l’État membre concerné contestait l’existence d’un droit de l’Union sur ce montant ( 77 ).

162.

Par ailleurs, il convient d’écarter l’objection émise par le Royaume‑Uni selon laquelle le présent recours serait irrecevable, parce qu’il constituerait une forme « déguisée » de recours en réparation et parce qu’il viserait à la condamnation de l’État membre au motif que celui-ci n’a pas mis des montants spécifiques à la disposition du budget de l’Union. Dans le cadre d’un recours en manquement relatif aux ressources propres, il est évident que des obligations pécuniaires sont en jeu, et aucune règle de droit de l’Union n’interdit à la Commission de les invoquer dans le cadre de la violation alléguée. Dans ce domaine spécifique, c’est précisément parce que des États membres contestent leur obligation de mettre les sommes demandées par la Commission à la disposition du budget de l’Union que la Cour est saisie de recours en manquement.

163.

Enfin, il y a lieu de relever que, dans son mémoire en réplique, la Commission souligne qu’il y a lieu de comprendre le troisième alinéa du premier chef des conclusions comme une demande portant sur certains montants spécifiques que le Royaume‑Uni n’a pas mis à la disposition du budget de l’Union. Ainsi, force est de constater que la Commission elle‑même admet que « le présent recours n’est pas un recours en réparation », mais qu’il vise à faire constater que le Royaume‑Uni a manqué à ses obligations au titre du droit de l’Union, notamment en ne mettant pas certains montants spécifiques à la disposition du budget de l’Union, une telle formulation étant, ainsi que cela a été exposé précédemment, conforme à la jurisprudence relative au recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE.

164.

Au regard de la jurisprudence susmentionnée et des précisions apportées par la Commission, j’estime qu’il y a lieu de comprendre le troisième alinéa du premier chef des conclusions comme visant à ce que la Cour déclare que le Royaume‑Uni n’a pas mis certains montants spécifiques à la disposition du budget de l’Union, en violation du droit de l’Union et, qu’au regard de cette jurisprudence, une telle demande est recevable.

165.

À titre subsidiaire, le Royaume‑Uni soutient que, si la Cour décide de fixer un montant à mettre à la disposition de l’Union, elle devrait accorder la priorité à l’estimation du Royaume‑Uni car il appartient à l’État membre d’évaluer le montant dû. Selon le Royaume‑Uni, l’approche correcte de principe pour déterminer le montant des pertes de ressources propres s’articule en trois étapes que la requête introduite par la Commission amalgamerait (à savoir le manquement aux obligations par cet État, le lien de causalité et la preuve du montant au titre de ce manquement).

166.

À cet égard, les arguments avancés par le Royaume‑Uni reposent sur la prémisse selon laquelle la Commission est tenue de démontrer que les éventuelles mesures prises par l’État membre étaient manifestement inappropriées. Or, l’examen de ces arguments relève du bien‑fondé des premier et deuxième moyens.

167.

À la lumière de ce qui précède, je propose à la Cour de rejeter les première à quatrième exceptions d’irrecevabilité soulevées par le Royaume‑Uni.

B. Sur le manquement aux obligations en matière de protection des intérêts financiers de l’Union et de lutte contre la fraude ainsi qu’aux obligations découlant de la réglementation douanière de l’Union

168.

Par son premier moyen, la Commission fait valoir, en substance, que, pendant la période d’infraction, malgré les avertissements et les demandes répétés de la Commission et de l’OLAF concernant le risque de fraude, le Royaume‑Uni n’a pas pris de mesures visant à protéger les intérêts financiers de l’Union. Cette omission constituerait, d’une part, un manquement tant aux obligations générales en matière de protection des intérêts financiers de l’Union qu’à celles de lutte contre la fraude prévues à l’article 310, paragraphe 6, TFUE et à l’article 325 TFUE. D’autre part, elle violerait l’obligation, pour les autorités douanières, tout d’abord, de prendre des mesures visant à protéger les intérêts financiers de l’Union en vertu de l’article 3 du code des douanes de l’Union, en combinaison avec l’article 4, paragraphe 3, TUE, ensuite, d’effectuer des contrôles sur la base d’une analyse de risque, en application de l’article 13 du code des douanes communautaire et de l’article 46 du code des douanes de l’Union, et, enfin, d’exiger le paiement de garanties au titre de l’article 248, paragraphe 1, du règlement d’application et de l’article 244 du règlement d’exécution.

169.

Avant d’examiner les griefs spécifiques avancés par la Commission, je me pencherai d’abord sur les obligations incombant aux États membres en vertu de l’article 310, paragraphe 6, TFUE et de l’article 325 TFUE, invoqués par la Commission au soutien de son recours et, notamment, de leurs objectifs et de la jurisprudence en la matière. Ensuite, il y aura lieu d’apprécier le bien‑fondé des allégations spécifiques mises en avant en vertu de ces dispositions et des dispositions du droit dérivé mentionnées au point précédent.

1.   Sur les obligations des États membres de lutter contre les activités illégales portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union

170.

Dans la mesure où l’article 310, paragraphe 6, TFUE, qui prévoit que « [l]’Union et les États membres, conformément à l’article 325, combattent la fraude et toute autre activité illégale portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union », ne constitue qu’une simple disposition de renvoi à l’article 325 TFUE, il convient de considérer que le moyen avancé par la Commission, pour autant qu’il est tiré de la violation des dispositions du droit primaire, vise, en réalité, à reprocher au Royaume‑Uni d’avoir manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 325 TFUE. Cet article est une disposition centrale en matière de lutte contre la fraude au niveau du droit primaire ( 78 ), en ce qu’elle définit les obligations de l’Union et des États membres, ainsi que leur portée dans ce domaine qui sont elles‑mêmes concrétisées, au niveau du droit dérivé, par le code des douanes de l’Union, le code des douanes communautaire, le règlement d’application et le règlement d’exécution.

171.

La protection des intérêts financiers est une priorité qui retient l’attention des États membres et celle de l’Union depuis de nombreuses années ( 79 ) puisque les ressources propres traditionnelles (constituées des droits de douane et des cotisations « sucre ») sont perçues par les États membres pour le compte de l’Union ( 80 ). En 2017, les États membres retenaient, à titre de frais de perception, 20 % des ressources propres traditionnelles ( 81 ). La fraude douanière est un phénomène croissant, qui préjudicie à cette perception et donc aux intérêts financiers de l’Union. Les pertes liées à cette fraude étaient estimées, en 2013, à 185 millions d’euros par année ( 82 ). Les conséquences néfastes de la fraude douanière dépassent le domaine des intérêts financiers relatifs au budget de l’Union, pour s’étendre aux domaines politiques, économiques et financiers, et ont des répercussions directes sur le fonctionnement du marché intérieur ( 83 ).

172.

Dans ce contexte, l’article 325, paragraphes 1 et 2, TFUE ne se limite pas à énoncer une obligation abstraite pour les États membres de lutter contre la fraude et toute autre activité illégale portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union ( 84 ), mais prescrit des exigences minimales en ce qui concerne les mesures que ces États sont tenus de mettre en œuvre afin de lutter contre la fraude et de prévenir de telles activités. En particulier, cette disposition exige que les mesures adoptées par les États membres pour lutter contre les activités illicites portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union, d’une part, au titre du paragraphe 1 de cet article, soient dissuasives et effectives, et, d’autre part, en vertu du paragraphe 2 dudit article, ne soient pas différentes de celles qu’ils prennent pour combattre la fraude portant atteinte à leurs propres intérêts financiers.

173.

Ces exigences ont également été rappelées par la jurisprudence, dont il découle, notamment, que l’article 325, paragraphes 1 et 2, TFUE impose aux États membres une obligation de résultat précise, qui n’est assortie d’aucune condition supplémentaire ( 85 ). Dans la mesure où la lutte contre les activités illicites portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union par des mesures dissuasives et effectives implique la perception des droits de douane et la mise à disposition des montants correspondants au budget de l’Union au titre des ressources propres traditionnelles de l’Union, toute lacune dans la perception de ces droits se traduit potentiellement par une diminution de ces ressources. Dès lors, les États membres sont tenus de prendre les mesures nécessaires pour que les droits de douane puissent être effectivement et intégralement perçus, ce qui suppose que le contrôle douanier s’exerce correctement ( 86 ). En outre, il convient de rappeler que, conformément à l’article 4, paragraphe 3, deuxième alinéa, TUE, les États membres de l’Union sont tenus de prendre toutes les mesures générales ou particulières propres à assurer l’exécution des obligations découlant des traités ou résultant des actes des institutions de l’Union ( 87 ). À cet égard, il ressort de la jurisprudence de la Cour, en matière de réglementations agricoles, que l’exigence imposée aux États membres de prendre toute mesure nécessaire pour assurer une protection efficace des intérêts financiers de l’Union constitue une expression spécifique de l’obligation générale de coopération loyale qui pèse sur les États membres au titre de ce qui est désormais l’article 4, paragraphe 3, TFUE ( 88 ). De manière analogue, dans le domaine de la lutte contre la fraude douanière, l’article 325 TFUE constitue, me semble-t-il, l’expression spécifique du principe de coopération loyale consacré à l’article 4, paragraphe 3, TUE ( 89 ), l’article 325 TFUE étant lui‑même concrétisé dans le domaine du droit douanier de l’Union par les dispositions du code des douanes. Il s’ensuit que le principe de coopération loyale consacré à l’article 4, paragraphe 3, TUE ne saurait, dans le domaine de la lutte contre la fraude douanière, être invoqué à titre autonome ( 90 ).

174.

Deux séries d’enseignements peuvent être tirées de la jurisprudence susmentionnée. D’une part, outre l’obligation, pour les États membres, de prévoir, en vertu de l’article 325, paragraphe 1, TFUE, des sanctions adéquates pour lutter contre la fraude et les autres activités portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union, les exigences découlant de la jurisprudence susmentionnée s’appliquent également aux activités administratives des États membres, dès lors que les engagements que ceux-ci ont pris en vertu des traités les lient intégralement ( 91 ).

175.

D’autre part, il ressort de cette jurisprudence que l’article 325, paragraphes 1 et 2, TFUE impose aux États membres des obligations contraignantes de résultat en ce qui concerne, notamment, les objectifs prévus à cette disposition et, plus particulièrement, l’obligation qui leur est faite de lutter contre la fraude et les activités portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union, de sorte à minimiser les pertes éventuelles pour les finances publiques de l’Union dans leur ensemble. Cela implique que, dès lors que cette disposition vise à mener cette lutte par des mesures performantes, l’efficacité d’une mesure concrète ou d’un ensemble de mesures ne peut être déterminée que dans le contexte d’une situation bien circonscrite, et non de manière abstraite. En effet, la criminalité, y compris sa composante particulièrement dangereuse, à savoir la criminalité organisée dans le domaine de la fraude et des autres activités portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union, est, par définition, un phénomène de nature évolutive qui s’adapte au fur et à mesure au contexte qui l’entoure. Dès lors, les mesures adoptées par les États membres destinées à combattre ce phénomène doivent être capables de le contrer de manière constante. Si des mesures prises encore récemment par les États membres contre des activités portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union pouvaient être considérées comme étant efficaces, il se peut qu’elles ne le soient plus dans le contexte actuel. Par conséquent, l’article 325, paragraphes 1 et 2, TFUE, en tant que disposition contenant une obligation de résultat, impose aux États membres, non seulement l’adoption de mesures uniques de nature à prévenir les activités portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union, mais également une évaluation et une adaptation permanentes dans le temps, afin d’assurer l’efficacité de ces mesures.

176.

Pour ces raisons, l’argument en défense du Royaume‑Uni, selon lequel les États membres disposeraient d’une grande marge d’appréciation quant aux moyens mis en œuvre pour prévenir des activités illégales contraires aux intérêts financiers de l’Union dans le domaine des douanes et des ressources propres, ne saurait aucunement prospérer. En effet, le Royaume‑Uni semble suggérer que, dans la mesure où la mise en œuvre des régimes douaniers et la perception des droits de douane sont à la charge des États membres par l’intermédiaire de leurs autorités nationales, ces derniers disposent également d’une large marge quant à la mise en œuvre des mesures préventives dans le cadre de la lutte contre la fraude douanière.

177.

Une telle approche me paraît critiquable pour deux raisons. En premier lieu, il existe en droit de l’Union un lien direct entre, d’une part, la perception de droits de douane directement mise en œuvre par l’intermédiaire des États membres et, d’autre part, les ressources propres de l’Union, lien que ne semble pas nier le Royaume‑Uni ( 92 ). En second lieu, si les États membres disposent bien d’une certaine latitude relative au choix des mesures de prévention contre la fraude et les atteintes aux intérêts financiers de l’Union, il n’en demeure pas moins que, en vertu de la jurisprudence de la Cour ( 93 ), cette marge d’appréciation n’est pas illimitée et se trouve subordonnée au principe d’effectivité, lequel impose que les mesures prises soient efficaces et dissuasives et, plus spécifiquement, que celles‑ci assurent un prélèvement efficace des ressources propres de l’Union que constituent, notamment, les droits du tarif douanier commun, sous réserve toutefois du respect nécessaire des droits fondamentaux garantis par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci‑après la « Charte ») et des principes généraux du droit de l’Union ( 94 ). Ainsi, la Cour a déjà jugé que, lorsqu’un État membre accepte des mesures en renonçant de manière générale et indifférenciée à la perception de la TVA, alors qu’il est dans l’obligation de garantir la perception de l’intégralité de cette taxe due sur son territoire ainsi que le prélèvement efficace des ressources propres de l’Union, il a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du droit de l’Union ( 95 ).

178.

Le Royaume‑Uni soutient également le fait que la mise en œuvre du droit de l’Union par un État membre n’enfreint le principe d’effectivité que s’il existe un « risque évident et majeur d’impunité » ou que si elle aboutit à une absence de sanction ( 96 ). Or, je suis d’avis qu’une telle interprétation est infirmée par la jurisprudence dont il découle que l’efficacité de la protection des intérêts financiers de l’Union prévaut sur le pouvoir discrétionnaire des États membres ( 97 ).

179.

Doivent être également rejetés les arguments que le Royaume‑Uni tire, d’une part, de ce que l’obligation de garantir un prélèvement efficace des ressources propres exige de déployer simplement des efforts raisonnables pour contrôler ainsi que recouvrer les droits et taxes concourant aux ressources, et, d’autre part, de ce que les États membres seraient tenus de faire preuve de « diligence » dans le prélèvement des ressources propres ( 98 ). En effet, il résulte des présentes conclusions ( 99 ) que l’effectivité d’une mesure adoptée pour défendre les intérêts financiers de l’Union ne saurait être appréciée que dans le contexte de circonstances spécifiques, dans le cadre desquelles il convient de déterminer si les efforts pour atteindre cet objectif ont été raisonnables et diligents. Il va de soi qu’une fraude douanière vaste et organisée nécessite que l’État membre investisse plus de ressources que dans des circonstances habituelles pour répondre à ses obligations en vertu des traités fondateurs ( 100 ).

180.

Ne saurait non plus être retenue l’argument avancé par le Royaume‑Uni selon lequel la Commission doit prouver, outre l’inefficacité des mesures nationales destinées à lutter contre la fraude, que l’État membre est coupable de comportement négligent ou arbitraire. À cet égard, le Royaume‑Uni effectue une lecture erronée de la jurisprudence qu’il invoque ( 101 ), de laquelle il ne résulte nullement que la Commission devait démontrer une négligence ou un comportement arbitraire de la part d’un État membre pour démontrer l’existence d’un manquement. Au contraire, j’estime qu’il convient de lire cette jurisprudence en ce sens qu’un État membre ne saurait, de manière arbitraire, se dispenser unilatéralement de constater un droit sur le montant de la dette douanière et de l’inscrire au compte de la Commission au titre de ressources propres ( 102 ).

181.

Certes, il convient d’admettre, à l’instar du Royaume‑Uni, que lesdites dispositions des traités n’imposent pas expressément de résultat absolu ni n’exigent que les mesures de contrôle douanier éliminent en toutes hypothèses la fraude à l’égard des ressources propres de l’Union. Toutefois, il découle de l’article 325 TFUE, à l’instar de la jurisprudence susmentionnée, que les mesures adoptées sur le fondement des dispositions du code des douanes communautaire ou du code des douanes de l’Union doivent être efficaces. Le principe d’effectivité prévu au niveau du droit primaire ne saurait être interprété dans le contexte du code douanier comme exigeant la suppression totale de toute fraude douanière, une telle exigence n’étant pas réaliste, étant donné que le comportement fautif, y compris en matière douanière, fera toujours partie de la vie en société. Néanmoins, ce principe établit l’obligation de contrôler les atteintes aux intérêts financiers de l’Union et de répondre de manière adéquate aux risques de fraude prévisibles et actuels avérés.

182.

Dans la mesure où, ainsi que cela a été relevé précédemment, il découle des obligations auxquelles se sont engagés les États membres, en vertu des traités fondateurs, que les mesures que ceux-ci adoptent doivent être efficaces au regard des objectifs qu’elles visent à atteindre, et que, bien que les États membres disposent d’une certaine marge d’appréciation relative aux mesures qu’ils adoptent, cette marge est limitée par le principe d’effectivité précité, ceci implique que l’efficacité de ces mesures ne peut être appréciée de manière abstraite, mais l’être dans le contexte d’une situation particulière. Il convient, par la suite, d’examiner le bien‑fondé des griefs retenus à l’encontre du Royaume‑Uni pendant la période d’infraction.

2.   Sur les mesures à prendre en vertu de la réglementation douanière pour protéger les intérêts financiers de l’Union dans la situation de fraude en cause

183.

Par son recours, la Commission reproche, en substance, au Royaume‑Uni de n’avoir pas éliminé des risques à la fraude douanière et adopté des mesures effectives pour lutter contre ces risques. En vue de statuer sur le bien‑fondé du présent recours, il y a lieu de rappeler, à titre liminaire, que, conformément à une jurisprudence constante de la Cour, dans le cadre d’une procédure en manquement, il incombe à la Commission d’établir l’existence du manquement allégué et d’apporter à la Cour les éléments nécessaires à la vérification par celle‑ci de l’existence de ce manquement, sans que la Commission puisse se fonder sur une présomption quelconque ( 103 ). En l’occurrence, se pose la question de savoir si la Commission a démontré à suffisance que les mesures adoptées par le Royaume‑Uni pour combattre la fraude à la sous-évaluation de produit à l’importation au cours de la période d’infraction étaient dépourvues d’effectivité en vue de prélèvements de l’intégralité des ressources propres de l’Union au titre des droits douaniers, en dépit du fait que les autorités du Royaume-Uni avaient connaissance des traits constitutifs et de l’ampleur de la fraude perpétuée à ses frontières ( 104 ).

a)   Sur les caractéristiques de la fraude perpétuée par les importateurs en cause et la prise de connaissance par les autorités du Royaume-Uni de cette fraude

184.

La Commission et le Royaume‑Uni semblent s’accorder sur le fait que cet État a fait l’objet d’une fraude vaste et organisée avant et pendant la période d’infraction. Il est également constant que la fraude en cause consistait en ce que des valeurs d’importations étaient déclarées à des niveaux extrêmement bas par les importateurs, des groupes criminels chinois, qui opéraient en réseau utilisant des sociétés dites « phénix », à savoir des entreprises constituées à la seule fin de perpétrer la fraude, dotées de ressources extrêmement réduites, et qui étaient mises en liquidation ou qui disparaissaient dès que l’exactitude des valeurs déclarées était mise en doute par les autorités douanières, rendant tout recouvrement de droits de douane a posteriori peu probable, voire pratiquement impossible ( 105 ). Il s’agissait d’une fraude à la fois mobile et très réactive, en ce sens que les importations frauduleuses étaient rapidement déplacées d’un État membre à un autre, et, au sein d’un État membre, d’un port à un autre, à la moindre annonce de contrôle de la part des autorités nationales. Ainsi, les activités frauduleuses impliquaient de très grands volumes de produits pouvant être déplacés vers les États membres ayant un dispositif de contrôle relativement faible.

185.

À cet égard, il est révélateur que, bien qu’il y réfute avoir manqué à ses obligations en vertu du droit de l’Union, le Royaume‑Uni reconnaisse, dans le rapport annexé à sa réponse du 11 février 2019 à l’avis motivé, qu’« il existait sans aucun doute [au Royaume‑Uni] une fraude fondée sur la sous-évaluation d’importations de produits textiles et de chaussures en provenance de Chine au cours de la période couverte par la requête de la Commission » ( 106 ). Ce rapport reconnaissait également que « [l]a fraude ne suscitait aucun doute et que des contre-mesures devaient être prises pour mettre fin à la fraude et favoriser le commerce loyal en faveur d’opérateurs légitimes » ( 107 ). Dans son mémoire en défense, le Royaume‑Uni estime qu’il est victime de la fraude et qu’il n’aurait aucun intérêt à permettre que cette activité criminelle se poursuive ou s’étende.

186.

Dès lors, il résulte du dossier que, pendant les procédures précontentieuse et contentieuse, le Royaume‑Uni a, tout de même, admis l’existence de la fraude, en faisant valoir à de nombreuses reprises dans son mémoire en défense n’avoir pris connaissance de cette fraude que progressivement ( 108 ). Ainsi, selon le Royaume‑Uni, lors de l’ACP Discount en novembre et en décembre 2011, la Commission et les États membres n’avaient manifestement pas une idée claire de la prévalence de la fraude à la sous-évaluation des importations, étant donné que l’objectif de cette opération était de « vérifier le risque de sous-évaluation » des produits concernés. Le Royaume‑Uni soutient que ce ne serait au plus tôt qu’à la fin de l’année 2014 et au courant de l’opération Snake que l’OLAF et certains États membres concernés ont commencé à bien appréhender les agissements frauduleux auxquels ils étaient confrontés. À cet égard, le rapport OLAF mentionnerait uniquement que le Royaume‑Uni connaissait suffisamment bien la fraude depuis 2014. Après cette opération, la connaissance de la fraude par les États membres, en particulier de son ampleur réelle et de sa dimension européenne, se serait encore développée, notamment, au début de l’année 2015 ( 109 ) et au cours de l’année 2017 ( 110 ).

187.

La République portugaise soutient cet argument de défense du Royaume‑Uni en estimant, en substance, que les autorités du Royaume-Uni n’étaient pas conscientes d’une pratique généralisée de fausses déclarations en douane lors de la réception d’un message formel d’assistance mutuelle de l’OLAF en 2015 ( 111 ). En outre, le fait qu’un État membre eût conscience, dès le mois de mars 2012, de l’existence de fraudes à la sous-évaluation impliquant des opérateurs défaillants, ne lui donnait pas d’indications concrètes quant à l’existence de déclarations en douane inexactes nécessitant une vérification systématique de sa part.

188.

Or, en l’occurrence, il ressort du dossier que le Royaume‑Uni a été complètement informé de la fraude à la sous-évaluation et des caractéristiques susmentionnées, ainsi que de la nécessité d’adopter des mesures efficaces pour lutter contre cette fraude pendant la période d’infraction. En effet, dès le mois d’avril 2007, dans un message d’assistance mutuelle, l’OLAF indiquait le risque que présentaient les produits textiles et les chaussures en provenance de Chine et en décrivait les modalités ( 112 ). Par ce message, l’OLAF invitait l’ensemble des États membres, d’une part, à analyser les importations de produits textiles et de chaussures en provenance, notamment, de Chine pour repérer d’éventuels indices d’importations sous-évaluées et, d’autre part, à procéder à des contrôles appropriés lors des dédouanements effectués pour de telles importations ( 113 ). Compte tenu des caractéristiques susmentionnées de la fraude à l’importation, l’OLAF précisait déjà que tous les États membres étaient susceptibles d’être concernés, en soulignant qu’il y avait un risque de détournement de la fraude vers d’autres ports de l’Union ( 114 ). Il s’ensuit que, en 2007, l’OLAF avait déjà établi les éléments essentiels du commerce frauduleux et les avait aussitôt portés à l’attention des États membres.

189.

En outre, dans son mémoire en défense, le Royaume‑Uni soutient que, en 2009, la Commission a invoqué des irrégularités constatées en Belgique et aux Pays‑Bas, mais pas au Royaume‑Uni. À cet égard, il y a lieu de constater que ledit message d’assistance mutuelle envoyé par la Commission aux États membres indiquait expressément que « [t]ous les États membres [étaient] concernés », et les invitait à « prendre des mesures appropriées pour lutter contre le phénomène endémique de la sous-évaluation » ( 115 ). Il convient de rappeler que, certes, de tels messages d’assistance mutuelle visaient à communiquer des informations ( 116 ) et ne pouvaient pas prévoir l’obligation d’effectuer des contrôles douaniers, ces derniers étant à la charge des autorités nationales ( 117 ). Toutefois, ces messages constituent des éléments susceptibles d’appeler le Royaume‑Uni à mettre en œuvre des mesures particulières pour lutter contre la fraude et pour protéger les intérêts financiers de l’Union ( 118 ).

190.

Par conséquent, contrairement à ce que soutient le Royaume‑Uni, il ne ressort pas du dossier que c’est au moment de l’achèvement de l’opération Snake que l’OLAF et les États membres ont véritablement commencé à comprendre le mécanisme frauduleux en cause. En effet, d’une part, une opération douanière conjointe, telle que l’opération Snake, est une réponse à un problème qui a été précédemment clairement identifié au niveau de l’Union ( 119 ). Aux termes du rapport final relatif à cette opération, sa préparation était fondée sur l’« évaluation approfondie des menaces posées par la fraude douanière à la sous-évaluation affectant l’[Union] [, qui] a confirmé que le secteur du textile était considérablement touché par [...] la sous-évaluation [et] les chapitres les plus concernés [étaient] les chapitres 61 à 64 de la NC », réalisée auparavant par l’OLAF. D’autre part, il découle d’un rapport de la Cour des comptes que la Commission avait fourni « des lignes directrices claires aux États membres sur la façon de lutter contre la sous-évaluation lors de la mise en œuvre de [l’ACP Discount] relative à la sous-évaluation de produits textiles et de chaussures importés de Chine » ( 120 ). Il s’ensuit que, lorsqu’ils ont mené l’ACP Discount, en 2011, les États membres étaient déjà pleinement conscients de la fraude et des moyens de lutter contre celle‑ci ( 121 ).

191.

Enfin, la République portugaise invoque le rapport spécial de la Cour des comptes de 2015 ( 122 ) pour démontrer que l’opération douanière conjointe a été la première à révéler l’existence de la fraude. Or, il suffit de constater que, selon ce rapport, une opération douanière conjointe de l’OLAF avait permis de constater que « 40 % des [textiles et chaussures originaires de la Chine] [mis] en libre pratique sous le régime douanier 42 étaient sous-évalués » et avait eu pour but d’exposer le problème préexistant et les mesures à adopter. Une telle affirmation constitue non pas une constatation que la lutte contre la fraude de sous-évaluation douanière constituait un problème nouveau, mais une confirmation qu’il s’agissait d’une cause importante de sous-évaluation.

192.

Il résulte de ce qui précède que, pendant toute la période d’infraction et, notamment, dès le début de cette période, le Royaume‑Uni avait pleinement connaissance des caractéristiques essentielles tant de la fraude que des mesures susceptibles d’être prises pour la combattre. Cette connaissance pouvait susciter des doutes auprès des autorités douanières nationales. Compte tenu de ces éléments, se pose la question de savoir quelles étaient les contre-mesures que ces autorités étaient tenues de prendre en vertu du droit de l’Union.

b)   Sur l’obligation d’instituer une analyse de risque, d’effectuer des contrôles préalables à la mainlevée, et sur la nécessité de constituer des garanties

193.

La Commission fait grief au Royaume‑Uni de n’avoir pas pris un certain nombre de mesures de contrôle le plus tôt possible, alors que le risque de fraude était constaté et qu’il était établi qu’elle était largement répandue. La Commission soutient avoir itérativement demandé aux États membres d’appliquer des seuils de valeur en tant qu’indicateurs du risque de sous-évaluation, de contrôler physiquement les envois déclarés à des valeurs inférieures aux seuils du prix minimal acceptable, de contester la valeur en douane déclarée, le cas échéant, et d’exiger des garanties pour couvrir les droits additionnels éventuellement exigibles avant la mise en libre pratique des marchandises. Plus particulièrement, dans des circonstances telles que celles de l’espèce, des contrôles préalables à la mainlevée auraient été indispensables dès lors que les entreprises impliquées dans la fraude étaient des sociétés qui disparaissent dès que les déclarations étaient contestées, ce qui rendrait impossible le recouvrement des droits après la mise en libre pratique des marchandises importées. En outre, le contrôle physique des marchandises se trouvant encore sous surveillance douanière aurait permis d’évaluer la qualité des marchandises en vue de déterminer leur valeur en douane. Or, sauf dans le cadre de l’opération Snake, le Royaume‑Uni n’aurait pas pris de telles mesures.

194.

En invitant les États membres à appliquer les outils préventifs pour détecter les importations frauduleuses possibles, la Commission a proposé aux États membres, parmi les outils potentiels, la méthodologie OLAF, qui consiste, en substance, à calculer des seuils de risque de sous-évaluation, à savoir le prix minimal acceptable, pour chaque code de produit de la nomenclature combinée concerné (au niveau huit chiffres) à partir du prix moyen corrigé, c’est‑à‑dire une moyenne arithmétique (non pondérée) des valeurs moyennes déclarées à l’importation dans les 28 États membres pour chacun desdits codes sur une période de quatre ans ( 123 ). Le prix est corrigé en ce sens que des valeurs extrêmement basses ou hautes qui semblent erronées sont éliminées. Le prix minimal acceptable est alors calculé comme étant égal à 50 % du prix moyen corrigé pour les différents codes de produits. La Commission fonde cette méthodologie sur l’arrêt EURO 2004. Hungary ( 124 ), duquel il découlerait que, lorsque le « prix déclaré était inférieur de plus de 50 % au prix moyen statistique » et donc en dessous des prix minimaux acceptables, des doutes sérieux sont permis quant à la validité des déclarations en cause, de sorte que ces marchandises ne sauraient être mises en libre circulation sans contrôle préalable. La Commission invoque également l’arrêt Commission/Portugal ( 125 ), dans lequel la Cour a déclaré qu’il convient de procéder à la vérification d’une déclaration en douane, notamment lorsque les autorités douanières disposent d’indications concrètes quant à l’inexactitude de cette déclaration.

195.

La Commission fait également grief au Royaume‑Uni de ne pas exiger la constitution de garanties pour toutes les déclarations en douane dont la valeur déclarée peut être considérée comme étant anormalement basse et qui, par conséquent, doivent être vérifiées. En vertu de l’article 244 du règlement d’exécution et de l’article 248 du règlement d’application, lorsqu’une déclaration en douane est déposée, les droits applicables devraient être soit acquittés, soit couverts par une garantie avant la mainlevée des marchandises. Le Royaume‑Uni aurait omis de demander le versement de garanties fondées sur le montant total des droits à l’importation susceptibles d’être exigibles en violation de ces dispositions.

196.

Le Royaume‑Uni répond, en substance, qu’il incombe à la Commission de démontrer que ses choix quant aux mesures antifraude étaient manifestement inappropriés ou dépourvus de tout caractère raisonnable. Il estime qu’il n’était pas tenu de procéder à des vérifications ou d’obtenir des garanties au regard de toutes les déclarations qui étaient inférieures à 50 % du prix moyen établi par l’OLAF ( 126 ). Dans l’arrêt EURO 2004. Hungary ( 127 ), la Cour aurait expliqué que les autorités douanières nationales étaient autorisées, sans y être tenues, à se fonder sur la différence de prix pour rejeter la valeur déclarée. S’agissant de l’arrêt Commission/Portugal ( 128 ), le Royaume‑Uni fait valoir que la Commission estompe la distinction entre, d’une part, les motifs pour lesquels une vérification peut se justifier en application du règlement d’exécution et du règlement d’application, et, d’autre part, le moment où la vérification devient nécessaire au sens dudit arrêt susmentionné.

197.

Le Royaume‑Uni estime qu’il était lui‑même victime de la fraude, de sorte qu’il n’avait aucun intérêt à permettre que cette criminalité se poursuive. Selon lui, comme cette fraude était très difficile à contrôler, il lui fallait du temps pour prendre la pleine mesure de celle‑ci et pour définir les meilleurs moyens de la combattre. Il considère qu’il s’est acquitté de son obligation de combattre la fraude en question en participant activement aux opérations de lutte antifraude organisées par l’OLAF, à savoir l’ACP Discount en 2011 et l’opération Snake en 2014. En outre, depuis 2015, le Royaume‑Uni aurait entrepris de s’attaquer à la fraude à la sous-évaluation à travers l’opération Breach dans le cadre de laquelle ses autorités auraient émis de nombreux avis de paiement C18, représentant une valeur de près de 35 millions de GBP en droits de douane. De plus, en 2016, l’opération Samurai aurait été lancée, ce qui impliquerait surtout des contrôles préalables et des activités d’apprentissage sur le régime douanier 42. S’appuyant sur les renseignements de ces dernières opérations, le Royaume‑Uni aurait lancé l’opération Swift Arrow dès le mois d’octobre 2017.

198.

Concernant la constitution des garanties, le Royaume‑Uni considère que, d’une part, le fait d’adopter une conception aussi générale que celle que propose la Commission quant aux garanties à exiger porte une atteinte inacceptable aux droits patrimoniaux des importateurs, tant en vertu des articles 16 et 17 de la Charte que de l’article 1er du protocole additionnel no 1 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signé à Paris le 20 mars 1952 (ci‑après le « premier protocole additionnel »), et que, d’autre part, pour qu’une demande de garanties soit valide, elle doit être fondée sur une base appropriée en vue de déterminer la valeur réelle des marchandises. Le recours au prix moyen par code de produit dans la méthodologie OLAF exposerait fortement les États membres à des réclamations des opérateurs.

1) Les observations liminaires

199.

Il ressort de l’examen des écrits des parties que la Commission ne nie pas que le Royaume‑Uni a mis en œuvre, pendant la période d’infraction, certaines mesures visant à lutter contre la sous-évaluation frauduleuse, mais elle soutient que certaines mesures employées étaient inefficaces pour protéger les intérêts financiers de l’Union, alors que d’autres n’ont nullement été appliquées. Dès lors, afin d’examiner les arguments soulevés dans le cadre du premier moyen du recours, il convient de déterminer les objectifs et la portée des obligations incombant aux États membres en vertu du droit douanier de l’Union, ce qui permettra d’apprécier le caractère efficace (ou non) des mesures mises en œuvre par le Royaume‑Uni ( 129 ).

200.

À cet égard, il y a lieu de rappeler que, dans la mesure où, pour protéger les intérêts financiers de l’Union de manière efficace, des mesures très diverses sont susceptibles d’être considérées, la comparaison entre elles en termes d’efficacité peut s’avérer peu facile à réaliser dans un cas comme celui en l’espèce, dès lors que le droit de l’Union accorde aux États membres une certaine latitude quant aux choix des mesures ( 130 ). Toutefois, doivent être considérées comme étant inefficaces, à mon sens, les mesures adoptées qui, compte tenu des particularités d’une situation donnée, ne permettent manifestement pas d’atteindre les objectifs poursuivis par le droit primaire et le droit dérivé de l’Union. À cet effet, il y a lieu d’approuver l’un des arguments de défense avancé par le Royaume‑Uni dans le cadre de la présente procédure, selon lequel il incombe à la Commission de démontrer, notamment, que les mesures que cet État prétend avoir mises en œuvre pendant la période d’infraction en vue de prévenir la fraude en cause étaient manifestement dépourvues d’effectivité en vue de prélèvements efficaces de l’intégralité des ressources propres de l’Union au titre des droits douaniers ( 131 ). Eu égard à la durée de l’infraction reprochée au Royaume‑Uni, j’estime qu’il convient de tenir compte du fait que le degré d’efficacité d’une mesure mise en œuvre par un État membre ne peut apparaître que dans le cadre de son analyse détaillée. Afin d’éviter ainsi de défavoriser rétroactivement un État membre à la lumière des connaissances acquises postérieurement, l’inefficacité des mesures effectivement appliquées ne peut être reprochée qu’ex ante, c’est‑à‑dire à la lumière des connaissances dont disposaient les autorités nationales compétentes au moment de leur mise en œuvre. Il en va, toutefois, différemment dans les cas où le droit de l’Union impose impérativement aux États membres l’obligation d’adopter certaines mesures déterminées. Dans un tel cas, l’efficacité de la mesure concernée devrait être déjà mise en balance par le législateur de l’Union lui‑même, de sorte que sa seule absence de mise en œuvre constitue une violation du droit de l’Union.

2) Sur l’obligation de recourir à l’analyse de risque

201.

L’article 13, paragraphe 2, du code des douanes communautaire et l’article 46, paragraphes 2 et 4, du code des douanes de l’Union, applicables respectivement avant et après le 1er juin 2016, obligent tous deux les autorités nationales à effectuer des contrôles douaniers reposant sur une « analyse de risque » et à appliquer une « gestion de risques ». Le règlement (CE) no 648/2005 ( 132 ) et ses dispositions d’application ( 133 ) ont mis en place un système de gestion des risques communs dans l’Union, selon lequel les contrôles douaniers reposent, notamment, sur une analyse de risque utilisant des procédés informatiques ( 134 ). Actuellement, les règles de gestion des risques sont prévues à l’article 46 du code des douanes de l’Union, dont le paragraphe 2 reprend, en substance, l’article 13, paragraphe 2, du code des douanes communautaire. Ce dernier, notamment, applicable au début de la période d’infraction (soit de novembre 2011 à juin 2016), prévoyait que les contrôles douaniers autres que les contrôles inopinés « doivent reposer sur une analyse des risques utilisant des procédés informatiques, l’objectif étant de déterminer et de quantifier les risques et d’élaborer les mesures nécessaires à leur évaluation » ( 135 ). Dès lors, ces dispositions imposent, en substance, aux États membres d’introduire un système de gestion des risques pour effectuer des contrôles douaniers ordinaires ( 136 ).

202.

La gestion de risques est devenue mondialement un outil important en matière de contrôle douanier ( 137 ) et a fait l’objet de plusieurs études ( 138 ). En l’absence de dispositions communautaires en la matière, la Commission a ajouté une définition de la notion de « gestion de risque » dans sa proposition de règlement (CE) 648/2005 ( 139 ), qui comprend la « détermination et la mise en œuvre systématiques de toutes les mesures nécessaires pour limiter l’exposition aux risques », ce terme recouvrant « des activités comme la collecte de données et d’informations, l’analyse et l’évaluation des risques, la prescription et l’engagement de mesures ainsi que le contrôle et l’évaluation réguliers du processus et de ses résultats, sur la base de sources et de stratégies internationales, communautaires et nationales » ( 140 ). La notion d’« analyse de risques » a été insérée, dans le code des douanes communautaire par le règlement no 648/2005, qui est venu modifier son article 13. La Commission a expliqué cet ajout comme un besoin d’« introduire l’obligation pour les États membres d’utiliser les techniques d’analyse des risques », tout en précisant que, en « l’absence de critères communautaires ou internationaux, les critères nationaux [étaient] appliqués (comme c’était le cas au moment de l’adoption de cette proposition) » ( 141 ). Par cette nouvelle disposition, la Commission visait, notamment, à élaborer un « cadre commun de gestion des risques », tout en permettant que des systèmes nationaux d’analyse des risques et des critères nationaux puissent continuer à être utilisés ( 142 ).

203.

Ainsi, l’analyse contextuelle du droit douanier de l’Union corrobore la conclusion découlant d’une interprétation littérale de l’article 13, paragraphe 2, du code des douanes communautaire, et de l’article 46, paragraphes 2 et 4, du code des douanes de l’Union, selon laquelle la mise en œuvre d’une analyse et de l’évaluation des risques fondées sur une analyse systématique de données par les États membres, conformément aux droits douaniers communautaire et de l’Union, est une obligation et non une faculté. Les mesures de contrôle douanier mises en œuvre doivent, quant à elles, reposer sur une analyse de risques, ce qui implique qu’elles doivent être sélectionnées en fonction des risques identifiés lors de leur évaluation et être de nature à les neutraliser. Ainsi, tel que cela a déjà été expliqué ( 143 ), l’article 13, paragraphe 2, du code des douanes communautaire et l’article 46, paragraphe 2, du code des douanes de l’Union, interprétés à la lumière de l’article 325 TFUE, doivent être compris comme impliquant, notamment, l’obligation pour les États membres d’adapter, de manière permanente, les outils de l’analyse de risque, afin que ces derniers couvrent à tout moment les risques détectés par les contrôles douaniers et tiennent compte, en permanence, de leurs évolutions. Cela signifie que l’analyse des risques effectuée par les États membres devrait, entre autres, déterminer quelles marchandises devraient faire l’objet de contrôles et par quels moyens.

204.

Il résulte de ce qui précède que, dans le contexte de la présente affaire, à partir du moment où un risque important de fraude douanière sur l’ensemble du territoire douanier de l’Union concernant des produits importés de Chine était connu au niveau de l’Union, les États membres étaient tenus, notamment, en vertu de l’article 13, paragraphe 2, du code des douanes communautaires (et ultérieurement, de l’article 46, paragraphe 2, du code des douanes de l’Union), d’adapter leurs propres méthodes nationales de gestion des risques en matière douanière. En effet, ainsi que cela a déjà été relevé ( 144 ), les autorités douanières du Royaume‑Uni avaient pleinement connaissance du risque en cause, ce qui implique qu’elles auraient également dû adapter, dans un délai raisonnable, leurs méthodes d’analyse du risque en tenant compte des informations disponibles et en effectuant les contrôles douaniers nécessaires ( 145 ). Étant donné qu’il ressort du dossier que le Royaume‑Uni avait connaissance des faits relatifs au schéma de fraude douanière, en 2007, et que, par la suite, il a été régulièrement tenu au courant de l’évolution de celui‑ci principalement par l’intermédiaire de la Commission, il me paraît difficile d’admettre l’argument de la partie défenderesse selon lequel l’absence d’adoption et de mise en œuvre d’un outil d’analyse de risques pour le début de la période d’infraction en novembre 2011, soit quatre ans après la réception des informations pertinentes par les autorités dudit État, est en conformité avec l’article 13, paragraphe 2, du code des douanes communautaire.

205.

Il ressort de ses écrits que le Royaume‑Uni ne conteste pas, en substance, le fait de n’avoir pas recouru, pendant la période d’infraction, à une méthode d’analyse de risques pour détecter les fraudes douanières liées à la sous-évaluation. Toutefois, en réponse aux allégations de la Commission, le Royaume‑Uni explique que l’élaboration d’une méthode adéquate d’analyse de risques a pris un certain temps en raison, notamment, du caractère complexe de la fraude en cause ( 146 ), alors que la méthodologie OLAF était inappropriée au regard de la situation spécifique du Royaume‑Uni. Certes, il est vrai que, ainsi que le fait valoir l’État défendeur, les articles 3 et 46 du code des douanes de l’Union (ce dernier correspondant à l’article 13 du code des douanes communautaire) n’exigent pas des États membres qu’ils mettent en place un certain type de méthodes d’évaluation des risques et ne s’opposent donc nullement à ce qu’un État membre, en vue de détecter les fraudes douanières liées à la sous-évaluation, ne s’appuie pas sur les prix moyens statistiques, mais ait recours à une méthode se focalisant, de manière ciblée et spécifique, sur les opérateurs spécialisés sur ce type de fraude, comme l’ont finalement fait les autorités douanières du Royaume-Uni dans le cadre de l’opération Swift Arrow. En réalité, ce faisant, le Royaume‑Uni reconnaît, de manière implicite, qu’il ne disposait pas, pendant la période d’infraction, de méthode appropriée pour mener les analyses des risques. Or, il me semble qu’une telle justification est dépourvue de pertinence au regard de l’obligation prévue à l’article 13, paragraphe 2, du code des douanes communautaire et à l’article 46, paragraphe 2, du code des douanes de l’Union.

206.

Cette conclusion est corroborée par l’analyse des éléments de preuve figurant dans le dossier relatif aux opérations de contrôle douanier menées par le Royaume‑Uni au cours de la période d’infraction, desquelles il ressort, notamment, que les autorités de cet État membre avaient recours aux outils d’analyse de risque uniquement dans le cadre de l’opération Snake, dont la phase opérationnelle a eu lieu entre le 17 février et le 17 mars 2014, dans le cadre de laquelle la Commission a recommandé aux États membres d’appliquer, entre autres mesures, des seuils de valeur en tant qu’indicateurs de risques ( 147 ). Il est constant que le Royaume‑Uni a participé à cette opération, en utilisant les profils de risque recommandés par l’OLAF, à savoir la méthodologie OLAF en tant que seuil de risque, et a procédé à des contrôles appropriés au cours de cette opération. Toutefois, ainsi que l’a fait valoir la Commission, sans être contredite sur ce point par le Royaume‑Uni, ces mesures n’ont duré qu’un mois, à savoir pendant la phase opérationnelle dudit processus. Autrement dit, outre cette phase opérationnelle, les autorités du Royaume-Uni ne procédaient pas à un contrôle fondé sur l’analyse de risque, et contrôlaient, à cette époque, les importateurs après le dédouanement pour leur adresser des demandes postérieurement ( 148 ).

207.

Par ailleurs, dans le cadre de sa défense, en réponse, notamment, aux allégations de la Commission relatives à l’absence de mise en œuvre d’une analyse des risques, le Royaume‑Uni fait valoir que cette absence avait pour cause, notamment, le fait que la méthodologie OLAF ne tient pas compte des particularités du marché britannique et entraîne la détection d’un grand nombre d’importations légitimes en tant que marchandises sous-évaluées ( 149 ). À cet égard, il y a lieu de relever que cette critique se fonde sur la prémisse erronée selon laquelle la violation, en vertu du droit de l’Union, a pour origine le fait que le Royaume‑Uni n’a pas adopté de forme particulière de contrôle douanier recommandée par la Commission ou par l’OLAF ( 150 ). Or, il ressort de la description de la violation qui fait l’objet du premier moyen de la requête, ainsi que d’autres écrits de la Commission, que cette dernière reproche au Royaume‑Uni de ne pas avoir eu recours à une quelconque méthode d’analyse des risques. En effet, ainsi qu’il résulte de l’analyse qui précède, l’article 3 et l’article 46, paragraphe 2, du code des douanes de l’Union, ainsi que l’article 13, paragraphe 2, du code des douanes communautaire imposent aux États membres l’adoption, dans le cadre de contrôles douaniers, d’analyse de risques, de sorte que, même si, pour des raisons connues de lui seul, le Royaume‑Uni n’a pas estimé approprié d’appliquer la méthode de la Commission, cela ne l’a pas empêché d’élaborer lui‑même et de mettre en œuvre des contrôles douaniers ( 151 ). Par conséquent, j’estime que les critiques émises par le Royaume‑Uni relatives à la méthodologie OLAF en tant qu’outil de risque sont dénuées de pertinence.

208.

Cela étant, pour des raisons d’exhaustivité des présentes conclusions, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 28, paragraphe 1, TFUE, l’Union « comprend une union douanière qui s’étend à l’ensemble des échanges de marchandises et qui comporte l’interdiction, entre les États membres, des droits de douane à l’importation et à l’exportation et de toutes taxes d’effet équivalent, ainsi que l’adoption d’un tarif douanier commun dans leurs relations avec les pays tiers », et que l’article 3, paragraphe 1, sous a), TFUE, consacre une compétence exclusive dans le domaine de l’union douanière ( 152 ). À cet égard, conformément à l’article 2, paragraphe 1, TFUE, en exerçant cette compétence, les normes douanières de l’Union sont codifiées dans le code des douanes de l’Union (et dans le règlement d’application et dans le règlement d’exécution) et directement applicables dans les États membres ( 153 ). Ces derniers sont, en application de l’article 291 TFUE, compétents pour l’exécution de cette réglementation ( 154 ). Si la perception des droits de douane demeure à la charge des États membres ( 155 ), l’exercice de cette tâche requiert une coopération étroite entre ces derniers et les institutions de l’Union ( 156 ). Ainsi, d’une part, dans le domaine de la lutte contre la fraude, sur la base de l’article 325 TFUE ( 157 ), la Commission et, notamment l’OLAF, se sont vu conférer un certain nombre de pouvoirs de contrôle et d’enquête ( 158 ). D’autre part, pour ce qui est, notamment, de la gestion des risques, l’Union a adopté une stratégie pour assurer le respect des normes minimales en matière de gestion des risques et de contrôle dans le domaine douanier ( 159 ), en prévoyant que les administrations douanières nationales prennent des mesures en vue de réformer les procédures, les techniques et les ressources en matière de contrôles effectués sur les marchandises ( 160 ). Compte tenu des dispositions susmentionnées, et à la lumière de la mission d’intérêt général qui est conférée à la Commission en vertu de l’article 17, paragraphe 1, TUE ( 161 ), j’estime que la Commission était habilitée à élaborer des critères non contraignants, tels que la méthodologie OLAF, en vue de permettre aux États membres d’effectuer une analyse de risque dans le cadre de leurs contrôles douaniers, d’autant plus que, en l’espèce, les fraudes douanières en cause concernaient l’Union dans son ensemble et que le catalogue d’instruments de coopération entre les États membres et la Commission n’est pas limité ( 162 ). Cela étant, il y a lieu de souligner que, si la Commission a précisé, dans ses communications, les objectifs de la gestion des risques ( 163 ), à défaut des règles harmonisées relatives aux méthodes de l’analyse de risque ( 164 ), les États membres étaient et sont libres de choisir les outils spécifiques de gestion des risques pendant la période d’infraction ( 165 ), ainsi que l’a d’ailleurs admis la Commission dans ses écrits et lors de l’audience.

209.

S’agissant des critères matériels de la méthodologie OLAF, en tant qu’outil d’analyse de risques, en l’espèce, il y a lieu de relever que, ainsi que cela ressort des réponses de la Commission aux questions écrites posées par la Cour, en tant qu’un instrument de détection de fraudes douanières, cette méthodologie a fait l’objet d’un débat approfondi entre les États membres. Partant, son introduction, en tant qu’outil d’analyse de risques, aurait eu lieu sur la base d’une décision consensuelle entre ceux‑ci ( 166 ). Les explications avancées par la Commission, selon lesquelles les seuils de risque de sous-évaluation (prix minimal acceptable) pour chaque code de produit de la nomenclature combinée concerné (au niveau huit chiffres) étaient calculés à partir du prix moyen corrigé, à savoir la moyenne arithmétique (non pondérée) des valeurs moyennes déclarées à l’importation dans les 28 États membres pour chacun desdits codes sur une période de quatre ans, témoignent que cette méthodologie ne revêt pas un caractère arbitraire. Cela d’autant plus qu’il découle de la jurisprudence que l’utilisation des données statistiques, afin de contester l’exactitude de la valeur en douane déclarée, à savoir l’existence d’une valeur en douane déclarée inférieure à 50 % du prix moyen corrigé, atteste la présence d’une fraude à la sous-évaluation qui peut susciter des doutes ( 167 ). Il me paraît donc que la méthodologie OLAF, en tant qu’outil d’analyse de risques, est fondée sur des critères objectifs et neutres.

210.

J’estime, enfin, qu’il convient d’écarter l’argument du Royaume‑Uni selon lequel la méthodologie OLAF entraîne la détection d’un grand nombre d’importations légitimes, ce qui pourrait constituer, pour les opérateurs concernés, une violation des articles 16 et 17 de la Charte, relatifs, respectivement, à la liberté d’entreprise et au droit de propriété. À cet égard, dès lors que l’analyse de risque prévue à l’article 13, paragraphe 2, du code des douanes communautaire et à l’article 46, paragraphe 2, du code des douanes de l’Union constitue une gestion de risques abstraite, en examinant les risques douaniers et en planifiant les contre-mesures nécessaires, c’est‑à‑dire un plan d’action pour la mise en œuvre des mesures de contrôle douanier, je ne vois pas pourquoi une telle gestion pourrait porter atteinte aux droits fondamentaux visés à ces dispositions de la Charte.

3) Sur l’obligation d’effectuer des contrôles préalables à la mainlevée

211.

L’article 13, paragraphe 1, du code des douanes communautaire, applicable au début de la période d’infraction, prévoyait que les « autorités douanières peuvent effectuer, conformément aux conditions fixées par les dispositions en vigueur, tous les contrôles qu’elles jugent nécessaires » ( 168 ). Son successeur, l’article 46, paragraphe 1, du code des douanes de l’Union, comporte, à son premier alinéa, une disposition similaire et le second alinéa vient ajouter une liste, non exhaustive, de différents contrôles douaniers auxquels les États membres peuvent recourir. Il résulte, me semble-t-il, du libellé de ces dispositions et, plus précisément, de l’emploi du verbe « peuvent », qu’elles ne visent pas à instituer un ordre prioritaire entre les différents types de contrôle douanier ( 169 ). Il s’ensuit, à mon sens, que lesdites dispositions confèrent aux autorités douanières nationales, lorsqu’elles effectuent des contrôles douaniers, une certaine marge d’appréciation dans le choix et l’application des modalités du contrôle douanier ( 170 ). Cette lecture est d’ailleurs corroborée par les dispositions relatives à la mainlevée des marchandises ( 171 ).

212.

Toutefois, ainsi que cela a déjà été exposé précédemment ( 172 ), en ce qui concerne l’interprétation de la portée des obligations prévues à l’article 325 TFUE, la marge d’appréciation dont disposent les autorités douanières des États membres quant au choix des mesures de contrôle douanier est limitée par l’exigence d’assurer une protection efficace des intérêts financiers de l’Union. De plus, ainsi que cela a déjà été relevé, il incombe aux autorités douanières nationales, en application de l’article 3, paragraphe 1, sous a), du code des douanes de l’Union d’instaurer des mesures visant à « protéger les intérêts financiers de l’Union et de ses États membres ». L’importance de cet objectif dans le code des douanes de l’Union est soulignée par la place que cette disposition occupe tout au début de ce code, les États membres devant ainsi assurer l’exécution de cette mission ( 173 ). En résumé, bien que l’article 13, paragraphes 1 et 2, du code des douanes communautaire et l’article 46, paragraphes 1 et 2, du code des douanes de l’Union confèrent la mise en œuvre et le choix des méthodes de contrôles douaniers aux autorités des États membres qui jouissent d’une certaine marge à cet égard, les mesures choisies ne doivent pas être dépourvues d’effectivité.

213.

Je considère donc comme étant conformes à l’objectif de protection des intérêts financiers de l’Union les méthodes de contrôles douaniers, telles que celles en cause, qui, pour préserver les intérêts financiers de l’Union, permettent de gérer efficacement les risques qui sont graves et identifiés à un moment donné et dans un espace donné, sur la base de l’analyse des risques décrite aux points précédents des présentes conclusions. En effet, ainsi que cela a été relevé à plusieurs reprises au cours de la période d’infraction, le risque principal identifié contre les intérêts financiers de l’Union au cours de la période d’infraction consistait, notamment, en des importations massives de produits textiles et de chaussures en provenance de Chine, lesquelles importations étaient sous-évaluées et se caractérisaient, d’une part, par une déclaration systématique et délibérée des marchandises en dessous de leur valeur réelle, et, d’autre part, par l’absence de fiabilité des sociétés opératrices impliquées, qui étaient, en règle générale, constituées dans le seul but de perpétuer cette fraude et qui ont été liquidées sitôt que la déclaration en douane qu’elles avaient présentée était contestée par les autorités douanières nationales. Dès lors, ce schéma de fraude douanière se traduit par une réduction significative des droits de douane susceptibles d’être perçus sur les marchandises mises en libre circulation. C’est en tenant compte de cette situation factuelle qu’il convient d’apprécier l’efficacité des mesures de contrôle douanier adoptées par le Royaume‑Uni pendant la période d’infraction, en les comparant à celles que la Commission reproche à cet État membre de ne pas avoir mises en œuvre.

214.

À cet égard, il semble être constant que, jusqu’au début de l’opération Swift Arrow en octobre 2017, le Royaume‑Uni n’a, en règle générale, pas adopté de mesures de contrôles douaniers préalables à la mainlevée, telles que des vérifications préalables au dédouanement ou des prélèvements d’échantillons, à l’exception de celles mises en œuvre lors des opérations Snake, au début de l’année 2014, et Samurai en septembre 2016. Sans remettre en cause ce fait, en estimant que la méthode d’évaluation des risques proposée par l’OLAF n’était pas adaptée pour détecter les importations concernées par la fraude à la sous-évaluation, le Royaume‑Uni affirme qu’il a opté pour une stratégie constituant à effectuer des contrôles douaniers a posteriori, dont l’opération Breach, qui a débuté en 2015, serait l’exemple principal ( 174 ). Parmi les contrôles douaniers a posteriori, le Royaume‑Uni énumère les visites en lien avec les expéditions suspectes, des analyses documentaires, des audits et des inspections, l’examen du caractère commercial des ventes concernées et l’examen des liens entre l’importateur, les transitaires et d’autres entreprises, ainsi que des activités de sensibilisation à l’intention des importateurs, destinées à identifier les activités frauduleuses.

215.

S’agissant de l’argument de défense que le Royaume‑Uni tire de l’impossibilité d’appliquer des contrôles préalables à la mainlevée en raison de l’inadéquation de la méthodologie OLAF, il convient de relever que, ainsi que cela a déjà été exposé dans les présentes conclusions ( 175 ), bien que les États membres ne soient pas tenus de suivre la méthode d’analyse de risques proposée par la Commission, ils n’en sont pas moins soumis à l’obligation édictée à l’article 13, paragraphe 2, du code des douanes communautaire et à l’article 46, paragraphe 2, du code des douanes de l’Union d’adopter des contrôles reposant sur une analyse des risques. Partant, en justifiant l’inexistence des contrôles préalables à la mainlevée par l’absence de méthode adéquate d’analyse des risques, le Royaume‑Uni reconnaît, en substance, son manquement à l’obligation de prévoir ces contrôles. En outre, je considère qu’il convient d’approuver l’argument de la Commission selon lequel les mesures a posteriori énumérées par le Royaume‑Uni ne sauraient, en tout état de cause, être considérées comme étant efficaces. J’estime qu’il est difficile de comprendre comment la stratégie a posteriori choisie par cet État pourrait être considérée comme étant efficace, compte tenu de l’objectif de protection des intérêts financiers de l’Union, dans une situation où la fraude douanière consistait en la sous-évaluation de produits textiles et de chaussures importés, c’est‑à‑dire déclarés, de manière consciente, en dessous de leur valeur réelle. Il semble inconcevable que les mesures décrites par le Royaume‑Uni permettent d’assurer le recouvrement des droits de douane effectivement dus, si le Royaume‑Uni a préalablement omis d’effectuer la détermination effective des marchandises importées, ce qui suppose nécessairement des vérifications physiques préalables au dédouanement et des prélèvements d’échantillons avant la mise en libre pratique des marchandises en cause ( 176 ). L’exercice des contrôles douaniers préalables à la mainlevée apparaît indispensable lorsque les autorités douanières éprouvent des doutes quant à l’exactitude de la déclaration en douane, mais s’avère d’autant plus nécessaire dans les cas où les opérateurs ont pour seul objectif de commettre une fraude. À cet égard, ainsi que cela a déjà été démontré, les autorités douanières du Royaume-Uni avaient pleinement connaissance de la fraude relative à la sous-évaluation douanière, et, en participant à l’opération Snake, elles ont d’ailleurs confirmé, de manière empirique, la nécessité d’adopter des mesures efficaces de lutte (y compris des mesures préalables) contre celle‑ci. Il résulte de ce qui précède que les autorités du Royaume-Uni avaient, dès le début de la période d’infraction, connaissance de la nature de la fraude douanière en cause, au vu de laquelle elles auraient dû éprouver de sérieux doutes quant à l’efficacité des mesures a posteriori susmentionnées.

216.

Le Royaume‑Uni soutient également que, selon l’arrêt Commission/Portugal ( 177 ), la Cour a indiqué que les autorités douanières ne sont tenues d’effectuer des contrôles supplémentaires que si elles disposent « d’indications concrètes » quant à l’inexactitude d’une déclaration en douane. Cet argument de défense repose, à mon sens, sur une lecture erronée de cet arrêt. En relevant que, « afin d’assurer l’application correcte de la réglementation douanière, il convient de procéder à la vérification d’une déclaration en douane au-delà du seuil [concerné], notamment, lorsque les autorités douanières disposent d’indications concrètes quant à l’inexactitude d’une telle déclaration », la Cour n’a, selon moi, posé aucune limite quant à la source de l’information dont découle l’inexactitude d’une déclaration en douane. Compte tenu, notamment, des missions incombant aux autorités douanières nationales, en vertu de l’article 3, paragraphe 1, du code des douanes de l’Union, celles‑ci ont l’obligation de réagir à la fraude douanière, même si l’information relative à l’inexactitude concernant les déclarations en douane leur parvient par l’intermédiaire de la Commission ou d’autres États membres. Cette interprétation est corroborée par le régime d’échange d’informations entre les États membres prévu à l’article 46, paragraphe 3, de ce code, en tant qu’expression de l’union douanière de l’Union ( 178 ). Eu égard à la connaissance par les autorités douanières du Royaume-Uni d’un risque élevé de fraude douanière, exposée dans les présentes conclusions, je m’accorde à dire avec la Commission que le Royaume‑Uni ne saurait affirmer que, s’agissant des valeurs déclarées en l’espèce, ses autorités douanières ne possédaient pas d’indications concrètes quant à l’inexactitude d’une déclaration telle que celle en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Commission/Portugal ( 179 ).

4) Sur l’obligation de constituer des garanties

217.

En vertu de l’article 248, paragraphe 1, du règlement d’application et de l’article 244, paragraphe 1, du règlement d’exécution ( 180 ), lorsqu’une déclaration en douane est déposée, les droits applicables doivent être soit acquittés, soit couverts par une garantie avant la mainlevée des marchandises. Ainsi, si les autorités douanières estiment que la vérification de la déclaration en douane peut donner lieu à un montant exigible de droits à l’importation (ou éventuellement à d’autres impositions) plus élevé que celui découlant des énonciations de la déclaration en douane, leur mainlevée sera autorisée après la constitution d’une garantie suffisante pour couvrir la différence de ces montants.

218.

À cet égard, s’agissant de la question de savoir si l’article 248, paragraphe 1, du règlement d’application ( 181 )exige la constitution d’une garantie, il y a lieu de relever que les termes des versions linguistiques que j’ai examinées semblent indiquer que la mainlevée est obligatoirement soumise à la constitution d’une garantie ( 182 ). Or, les différentes versions linguistiques de l’article 244, paragraphe 1, du règlement d’exécution, disposition qui correspond, en substance, à l’article 248, paragraphe 1, du règlement d’application, varient. En effet, les versions en langues allemande et estonienne laissent entendre qu’une telle constitution est une faculté, alors que les autres versions précitées semblent indiquer qu’il s’agit d’une obligation ( 183 ). Compte tenu des divergences entre les différentes versions linguistiques de l’article 244, paragraphe 1, du règlement d’exécution, son libellé ne permet pas, à mon sens, de parvenir à une conclusion univoque quant au point de savoir si cette disposition exige la constitution d’une garantie en tant que condition pour la mainlevée des marchandises ou si les autorités douanières des États membres disposent d’une marge d’appréciation au regard des spécificités de chaque cas d’espèce ( 184 ). En cas de disparité entre les diverses versions linguistiques d’un texte de l’Union, la disposition en cause doit être interprétée en fonction de l’économie générale et de la finalité de la réglementation dont elle constitue un élément. À cet égard, s’agissant du contexte dans lequel s’inscrivent les dispositions susmentionnées, j’estime qu’il convient de tenir compte, aux fins de l’interprétation de l’article 248, paragraphe 1, du règlement d’application et de l’article 74, paragraphe 1, du code des douanes communautaire, qu’« il ne peut être donné mainlevée des marchandises faisant l’objet [d’une déclaration douanière] que si le montant de la dette douanière a été payé ou garantie » ( 185 ). Pour ce qui est de l’article 244 du règlement d’exécution, l’article 89 et les dispositions suivantes de ce code détaillent les diverses situations dans lesquelles il y a lieu de recourir à la constitution de garanties, en précisant d’ailleurs les hypothèses dans lesquelles une telle constitution ne doit pas avoir lieu ( 186 ). Il s’ensuit, aux fins du présent moyen, que si les autorités douanières d’un État membre disposent d’une certaine marge d’appréciation lorsqu’elles décident d’exiger la constitution de garanties, celle‑ci est, à mon sens, limitée par l’exigence de protection efficace des intérêts financiers de l’Union, au sens de l’article 325 TFUE, qui a déjà été mise en exergue dans le cadre des présentes conclusions ( 187 ). La nécessité de sauvegarder les intérêts financiers de l’Union et des États membres découle, en outre, du considérant 27 du règlement d’exécution, qui énonce, notamment, que « [c]ompte tenu de la nécessité de protéger de manière appropriée les intérêts financiers de l’Union et des États membres et de garantir des conditions de concurrence équitables entre les opérateurs économiques, il est nécessaire d’établir des règles de procédure en ce qui concerne la constitution d’une garantie », et des considérants 36 et 37 du code des douanes de l’Union ( 188 ). Dès lors, j’estime il y a lieu d’approuver l’approche de la Commission selon laquelle l’application des mesures de contrôle douanier et l’exigence de constitution de garanties doivent être traitées différemment selon qu’il s’agit d’entreprises reconnues qui possèdent des actifs ( 189 ) ou qu’il s’agit, comme en l’espèce, de sociétés dites « phénix » qui ont pour seul objectif de commettre une fraude et qui font l’objet de liquidation dès la mise en libre circulation des marchandises qu’elles ont déclarées.

219.

Pour ce qui est, en l’occurrence, des éléments de preuve relatifs à l’absence d’application des garanties par le Royaume‑Uni au cours de la période d’infraction, ceux‑ci ont déjà été examinés dans les présentes conclusions, notamment dans la partie relative à l’obligation de recourir à une analyse des risques et des contrôles préalables, de sorte qu’il n’y a pas lieu de les réitérer dans la présente partie ( 190 ).

220.

En outre, le Royaume‑Uni fait valoir que, d’une part, le fait d’adopter une conception aussi générale que celle que propose la Commission quant aux garanties à exiger porte une atteinte inacceptable aux droits patrimoniaux des importateurs, en vertu de l’article 17 de la Charte et de l’article 1er du premier protocole additionnel, et que, d’autre part, les autorités du Royaume-Uni ne disposaient d’aucun élément probant permettant de déterminer une valeur de remplacement, de sorte qu’elles n’étaient pas en mesure d’exiger la constitution de garanties sur la base de cette valeur de remplacement.

221.

Ces arguments doivent être, à mon sens, écartés.

222.

En ce qui concerne l’argument du Royaume‑Uni selon lequel le droit de propriété, tel que consacré à l’article 17 de la Charte, ne permettrait pas aux autorités douanières de demander de manière générale des garanties aux importateurs, j’observe que cet État n’explique pas les motifs exacts pour lesquels la demande de constitution de garantie serait une violation de ce droit. Or, en vertu de l’adage actor incumbit probatio, reus in excipiendo fit actor, il incombe audit État membre de prouver son allégation qui vise à remettre en cause l’obligation de constituer des garanties sur laquelle s’appuie la Commission ( 191 ).

223.

En tout état de cause, il me semble, à première vue, que le Royaume‑Uni n’allègue pas que l’article 248 du règlement d’application ou l’article 244 du règlement d’exécution étaient eux‑mêmes contraire aux droits fondamentaux consacrés à l’article 17 de la Charte. En outre, il convient de passer brièvement en revue les critères relatifs à l’article 1er du premier protocole additionnel, tels qu’ils ont été caractérisés dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (ci‑après la « Cour EDH »), qui doit être prise en considération aux fins de l’interprétation de cet article 17, conformément à la clause d’homogénéité prévue à l’article 52, paragraphe 3, de la Charte ( 192 ). En vertu de cette jurisprudence, l’imposition fiscale constitue, en principe, une ingérence dans le droit de propriété ( 193 ), mais cette ingérence se justifie conformément au second alinéa dudit article 1er prévoyant expressément une exception en ce qui concerne le paiement des impôts ou d’autres contributions ( 194 ). Dans ce contexte, il importe de souligner que, lorsque les États élaborent et mettent en œuvre une politique en matière fiscale, ils jouissent d’une large marge d’appréciation ( 195 ). De plus, ainsi que le fait valoir la Commission, la constitution d’une garantie douanière n’a qu’un caractère temporaire et celle‑ci est levée dès que les droits de douane corrects sont acquittés ou dès que l’importateur a démontré l’absence de sous-évaluation. Il me semble que, en soutenant que les autorités douanières ne peuvent pas adopter une conception aussi générale que celle qu’envisage la Commission quant aux garanties à exiger, le Royaume‑Uni remet en cause la compatibilité éventuelle de la pratique administrative que préconise cette institution avec le droit fondamental de la propriété prévu à l’article 17 de la Charte. Il est vrai que, en vertu de la jurisprudence constante de la Cour, les droits fondamentaux garantis dans l’ordre juridique de l’Union ont vocation à être appliqués dans toutes les situations régies par le droit de l’Union, mais pas en dehors de telles situations, la mise en œuvre du droit de l’Union pouvant inclure des pratiques administratives ( 196 ), telles que celle en cause en l’espèce ( 197 ). Toutefois, l’objection susmentionnée avancée par le Royaume‑Uni paraît revêtir un caractère hypothétique dans les conditions de la présente affaire, dans la mesure où la compatibilité des décisions et du comportement des autorités nationales avec la Charte peut être appréciée non pas de manière abstraite, mais uniquement dans le contexte d’un acte administratif particulier. Dès lors que le Royaume‑Uni n’a présenté aucun cas spécifique dans lequel une constitution de garantie, en vertu des dispositions du droit de l’Union, aurait conduit à une violation d’un droit fondamental consacré par la Charte d’un opérateur concerné, il n’y a pas lieu, à mon sens, pour la Cour d’examiner cet argument en défense.

224.

En ce qui concerne l’argument du Royaume‑Uni selon lequel ses autorités n’étaient pas en mesure d’exiger des garanties au motif qu’elles ne disposaient d’aucun élément permettant de déterminer une valeur de remplacement pour les marchandises importées, il me semble que le Royaume‑Uni justifie l’absence de mise en œuvre d’une mesure douanière par l’absence d’adoption d’une autre mesure, à savoir le défaut de contrôles préalables à la mainlevée et de prélèvement d’échantillons. Plus particulièrement, cette omission a eu pour effet que cet État n’était pas en mesure de déterminer, conformément aux articles 70 et 74 du code des douanes de l’Union, la valeur des produits concernés, ce qui est pourtant nécessaire pour la constitution de garanties. Enfin, il y a lieu d’attirer l’attention sur une incohérence dans les moyens de défense du Royaume‑Uni qui fait valoir, en substance, que, dans une situation où ses autorités douanières n’ont pas correctement appliqué les dispositions du code des douanes de l’Union relatives à la détermination de la valeur en douane des marchandises en cause, il n’en serait pas moins possible, ainsi que le Royaume-Uni le met en exergue avec l’opération Breach ( 198 ), de déterminer la différence entre la valeur des marchandises sur la base de laquelle les droits de douane ont été perçus et leur valeur réelle.

3.   Résumé des éléments retenus à l’encontre du Royaume‑Uni

225.

À titre de résumé, il y a lieu de retenir que les mesures que le Royaume‑Uni a prises pour la période d’infraction ne peuvent pas être considérées comme étant efficaces au sens de l’article 325 TFUE et des dispositions du droit dérivé dans le domaine douanier. En effet, j’estime que, pour ce qui est des produits concernés, cet État a omis, pendant la période d’infraction, d’exécuter des contrôles douaniers fondés sur l’analyse de risques et des contrôles préalables à la mainlevée des marchandises, ainsi que d’exiger des garanties avant la mise en libre pratique de celles‑ci. Les mesures de contrôle postérieures au dédouanement des marchandises n’ont été ni suffisantes ni effectives en vertu desdites dispositions. Ainsi, les mesures adoptées par le Royaume‑Uni étaient manifestement dépourvues d’effectivité, compte tenu des caractéristiques de la fraude en cause et de la connaissance que les autorités du Royaume-Uni pouvaient en avoir pendant la période d’infraction.

226.

Une telle conclusion résulte également des données statistiques fournies par la Commission, dont il découle que, sur la base de la méthodologie OLAF, alors que 32,44 % des importations ont été déclarées à un niveau inférieur du prix minimal acceptable en 2013, cette proportion est passée à 50,50 % en 2016 ( 199 ). Le Royaume‑Uni reconnaît que, sur la base de l’approche élaborée par les HMRC, 35,2 % de l’ensemble des importations relevant des chapitres 61 à 64 en provenance de Chine a été, pendant la période d’infraction, sous-évalué, tandis que, en appliquant la méthodologie OLAF, ce chiffre serait à hauteur de 44,8 % ( 200 ). Or, force est de constater que les deux parties s’accordent sur le fait que l’opération Swift Arrow a eu pour effet de réduire le volume de produits sous-évalués, le chiffre du premier trimestre des années 2017 et 2018 faisant apparaître des volumes d’importation inférieurs au prix minimal acceptable très faibles ( 201 ). Les deux parties reconnaissent également que les contrôles douaniers de cette opération consistaient en des contrôles antérieurs à la mainlevée des marchandises sur la base d’une analyse de risques, contrôles qui étaient accompagnés de prises d’échantillons. Ces données permettent, à mon sens, de conclure à l’existence d’un lien direct entre la présence de la fraude à la sous-évaluation et les méthodes de contrôle douanier mises en œuvre par l’État membre, ce qui implique que la fraude massive à la sous-évaluation en cause commise pendant la période d’infraction n’avait pas un caractère inévitable. Dès lors, j’estime que doit être rejeté l’argument, qui occupe une place centrale dans la défense du Royaume‑Uni, selon lequel il ne saurait être déduit du succès de l’opération Swift Arrow que les mesures prises auparavant étaient manifestement inappropriées, dès lors que les données empiriques examinées précédemment confirment précisément le contraire.

227.

La conclusion qui précède en ce qui concerne le caractère insuffisant des mesures prises, au cours de la période d’infraction, par le Royaume‑Uni pour lutter contre la fraude à la sous-évaluation n’est pas infirmée par l’argument qu’il tire du fait qu’il a participé à toutes les opérations menées par la Commission et qu’il en a initié lui‑même, cette institution ayant d’ailleurs confirmé qu’il a entrepris toutes les démarches requises à cet égard ( 202 ). En effet, ainsi que l’a affirmé le Royaume‑Uni lui‑même, il incombe aux États membres de veiller à l’application du droit douanier de l’Union, ce qui implique que ceux‑ci ont la charge de réaliser des contrôles douaniers appropriés et de protéger, de manière efficace, les intérêts financiers de l’Union. L’accomplissement de cette mission nécessite, de la part de ces autorités, un travail continu, cohérent et systémique pour la protection de la frontière douanière de l’Union, qui ne peut pas se limiter à la participation ponctuelle à des opérations douanières, dont les effets ne peuvent qu’être temporaires.

4.   Sur l’obligation pour les États membres de déterminer les montants des droits de douane et de prendre en compte les montants correspondants

228.

La Commission fait valoir que, pendant la période d’infraction, le Royaume‑Uni s’est livré à une violation continue de l’article 105, paragraphe 3, du code des douanes de l’Union et de la disposition correspondante de l’article 220, paragraphe 1, du code des douanes communautaire, faute d’avoir pris en compte les dettes douanières restant à recouvrer s’agissant des importations frauduleusement sous-évaluées en cause, dès que les autorités douanières se sont aperçues de la situation ayant conduit à la constatation de ces dettes.

229.

Le Royaume‑Uni, en revanche, soutient, en substance, que, dès lors qu’il n’est pas tenu de vérifier les déclarations en douane en cause ni de calculer les droits supplémentaires, il n’aurait nulle obligation d’inscrire dans la comptabilité les dettes douanières en cause.

230.

Tout d’abord, aux termes de l’article 104, paragraphe 1, du code des douanes de l’Union et de la disposition correspondante de l’article 218, paragraphe 1, du code des douanes communautaire, les autorités douanières prennent en compte, conformément à la législation nationale, le montant des droits à l’importation ou à l’exportation exigibles. D’une part, bien que la prise en compte prévue à ces dispositions soit le corollaire des obligations de constater et de mettre à disposition de l’Union des ressources propres traditionnelles, qui découlent, notamment, des dispositions des règlements nos 1150/2000 et 609/2014 examinées dans le cadre du deuxième moyen des présentes conclusions ( 203 ), elle intervient indépendamment de ces obligations ( 204 ) et doit donc être distinguée de celles‑ci ( 205 ). D’autre part, l’obligation de prendre en compte les montants des droits en vertu des dispositions précitées est, dans la cadre de la présente affaire, une conséquence directe et inévitable de l’adoption des mesures douanières, telles que le recours à l’analyse de risque et les contrôles douaniers préalables à la mainlevée déjà examinés, de sorte que leur omission implique nécessairement l’absence de prise en compte desdits montants. Partant, j’estime que le grief relatif à la violation de l’obligation de la prise en compte des montants concernés doit s’analyser conjointement avec les griefs relatifs à l’obligation d’adopter des mesures douanières nécessaires, qui ont déjà été discutés dans le cadre du présent moyen.

231.

Sur le fond, en vertu de la jurisprudence, la prise en compte des montants de droits de douane consiste, notamment, en l’inscription, par les autorités douanières, dans les registres comptables ou sur tout autre support qui en tient lieu, lorsque ces autorités sont en mesure de calculer le montant légalement dû et d’en déterminer le débiteur ( 206 ), du montant à recouvrer. Cela implique que, lorsqu’une autorité douanière constate qu’il y a eu absence totale ou partielle de paiement des dettes douanières et qu’elle est en mesure de calculer le montant des droits nés d’une telle dette et de déterminer le débiteur, elle est tenue de prendre en compte ce montant conformément aux dispositions susmentionnées. En l’espèce, ainsi que cela a déjà été relevé, le Royaume‑Uni était conscient de la fraude à la sous-évaluation des marchandises, ce qui implique que ses autorités avaient non seulement l’obligation de déterminer les valeurs en douane correctes et d’effectuer les contrôles des déclarations en douane, mais aussi de déterminer les montants afférents aux importations en cause et de les prendre en compte, en vertu de l’article 105, paragraphe 3, du code des douanes de l’Union et de la disposition correspondante de l’article 220, paragraphe 1, du code des douanes communautaire ( 207 ). Dans la mesure où le Royaume‑Uni n’a pas procédé à ces déterminations et à ces prises en compte, le grief tiré de ces dispositions qui n’a, en réalité, pas de contenu autonome, devrait être considéré également comme étant fondé en tant que conséquence directe des violations examinées aux points précédents des présentes conclusions. En effet, faute d’avoir adopté les mesures nécessaires précitées en vertu des dispositions pertinentes du code des douanes communautaire et du code des douanes de l’Union, lus à la lumière du principe d’effectivité consacré à l’article 325 TFUE, le Royaume‑Uni n’a forcément pas déterminé les montants afférents aux importations en cause et a omis de les prendre en compte, en vertu de l’article 105, paragraphe 3, du code des douanes de l’Union et de la disposition correspondante de l’article 220, paragraphe 1, du code des douanes communautaire.

232.

Dans ces conditions, il y a lieu de considérer le premier moyen comme étant fondé pour autant qu’il concerne les obligations en vertu de l’article 325 TFUE, des articles 13 et de l’article 220, paragraphe 1, du code des douanes communautaire, des articles 3, 46 et de l’article 105, paragraphe 3, du code des douanes de l’Union, de l’article 248, paragraphe 1, du règlement d’application, et de l’article 244 du règlement d’exécution.

C. Sur le manquement à la législation de l’Union relative aux ressources propres et à l’estimation de pertes de ressources propres traditionnelles que constituent les droits de douane

233.

La Commission considère que le Royaume‑Uni a manqué à la législation relative aux ressources propres traditionnelles et, notamment, aux articles 2 et 8 des décisions 2007/436 et 2014/335, ainsi qu’aux articles 2, 6, 9, 10, 11 et 17 du règlement no 1150/2000, auxquels correspondent, respectivement, les articles 2, 6, 9, 10, 12 et 13 du règlement no 609/2014. Selon la Commission, cet État n’a pas, au cours de la période d’infraction, effectué les contrôles douaniers appropriés, de sorte que les marchandises frauduleusement sous-évaluées n’ont pas été déclarées correctement en douane. Compte tenu de cette évaluation incorrecte, les droits de douane dus pour ces marchandises n’auraient pas été calculés correctement et les montants de ressources propres correspondant aux droits qui auraient dû être constatés ne l’auraient pas été et donc n’auraient pas été mis à la disposition du budget de l’Union au moment où ils auraient dû l’être. La Commission reproche également au Royaume‑Uni le fait que les autorités du Royaume-Uni ont constaté, puis annulé, des dettes douanières relatives à certaines importations de marchandises sous-évaluées, en commettant ainsi une erreur administrative. En résumé, la Commission considère que le Royaume‑Uni est responsable des pertes de ressources propres traditionnelles qui en résultent.

234.

Avant d’analyser le bien‑fondé du présent moyen, il est nécessaire d’apporter des précisions quant au régime juridique relatif à la mise à disposition des ressources propres traditionnelles en vue de déterminer les obligations des États membres en la matière (section 1). S’agissant du fond de ce moyen, tout d’abord, il y a lieu d’examiner l’argument de la Commission selon lequel, en n’ayant pas pris les mesures appropriées après avoir constaté une dette douanière supplémentaire pour certaines marchandises sous-évaluées pour une période allant de novembre 2011 à novembre 2014, et en annulant ces dettes supplémentaires constatées, les autorités du Royaume-Uni ont commis une erreur administrative dont le Royaume‑Uni est financièrement responsable (section 2). Ensuite, il convient d’analyser la problématique épineuse quant à la détermination des pertes de ressources propres traditionnelles résultant du fait du manquement reproché (section 3) et, enfin, à titre subsidiaire, les arguments de défense du Royaume‑Uni relatifs aux intérêts de retard (section 4).

1.   Sur le régime juridique de la prise en compte des montants dus et de la mise à disposition des ressources propres traditionnelles

235.

Les recettes provenant des droits du tarif douanier commun constituent, conformément à l’article 2, paragraphe 1, sous a) et b), de la décision 2007/436 et à l’article 2, paragraphe 1, sous a), de la décision 2014/335, des ressources propres traditionnelles de l’Union ( 208 ). Ces dernières sont définies « comme des recettes affectées une fois pour toutes à l’Union pour financer son budget et lui revenant de droit sans qu’aucune décision ultérieure des autorités nationales ne soit nécessaire » ( 209 ). Si les États membres sont chargés de percevoir, conformément à l’article 8, paragraphe 1, desdites décisions, les ressources propres de l’Union, ils ont néanmoins l’obligation de les mettre à la disposition de l’Union, sans pouvoir s’y opposer ( 210 ).

236.

Le caractère impératif de la mise à disposition de l’Union des ressources propres traditionnelles découle des dispositions du règlement no 609/2014 ( 211 ), relatif aux modalités et à la procédure de mise à disposition, notamment, des ressources propres traditionnelles ( 212 ). À cet égard, en vertu de l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 609/2014 ( 213 ), un droit de l’Union sur les ressources propres traditionnelles est constaté dès que sont remplies les conditions prévues par la réglementation douanière en ce qui concerne la prise en compte du montant du droit et sa communication au redevable ( 214 ), et, aux termes de l’article 13, paragraphe 1, de ce règlement ( 215 ), les États membres sont tenus de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les montants correspondant aux droits constatés soient mis à la disposition de la Commission. Par ailleurs, la Cour a déjà précisé que cette disposition constitue une expression spécifique des exigences de coopération loyale résultant de l’article 4, paragraphe 3, TUE, selon lesquelles les États membres, notamment, doivent soumettre à la Commission les problèmes rencontrés dans l’application du droit de l’Union ( 216 ).

237.

Étant donné que les recettes déficitaires d’une ressource propre devront être compensées soit par une autre ressource propre, soit par une adaptation des dépenses, les États membres ont l’obligation de constater les droits de l’Union sur les ressources propres traditionnelles, sous peine d’admettre que l’équilibre financier de l’Union soit bouleversé par le comportement d’un État membre ( 217 ). Aux fins de la mise à disposition des ressources propres, l’article 9, paragraphe 1, du règlement no 609/2014 impose que chaque État membre inscrive les ressources propres au crédit du compte ouvert à cet effet au nom de la Commission, selon les modalités définies à l’article 10 de ce règlement ( 218 ). À cet égard, l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 609/2014 prévoit que les États membres doivent tenir une comptabilité des ressources propres auprès du Trésor public ou de l’organisme désigné par eux. Lorsque les conditions requises pour la constatation de la dette douanière sont remplies, les États membres sont tenus de la reprendre dans la comptabilité conformément aux dispositions de l’article 6, paragraphe 3, premier alinéa, de ce règlement (la comptabilité A) ou, si les conditions ad hoc sont réunies, de la reprendre dûment dans la comptabilité prévue à l’article 6, paragraphe 3, deuxième alinéa, dudit règlement (la comptabilité B) ( 219 ).

238.

À cet égard, il y a lieu de préciser que la protection générale des intérêts financiers de l’Union constitue un objectif autonome qui est inscrit à la sixième partie, titre II (dispositions financières), du traité FUE, distincte de l’union douanière prévue à la troisième partie, titre II, chapitre 1, TFUE, relative aux politiques de l’Union ( 220 ). Toutefois, ainsi que l’a relevé l’avocate générale Trstenjak ( 221 ), il existe, entre les dispositions douanières et les dispositions relatives aux ressources propres de l’Union, un lien en ce sens que les autorités douanières nationales compétentes doivent, en vertu des dispositions douanières, évaluer, imposer et collecter les droits de douane en tant que ressources propres ( 222 ). Dans ce contexte, la Cour a jugé qu’il existe un lien indissociable entre l’obligation de constater les ressources propres de l’Union, celle de les inscrire au compte de la Commission dans les délais impartis et celle de verser des intérêts de retard ( 223 ). Ces derniers sont d’ailleurs exigibles quelle que soit la raison du retard avec lequel ces ressources ont été portées au compte de la Commission ( 224 ).

239.

La Cour se montre particulièrement attentive dans l’interprétation des dispositions susmentionnées, en rappelant, notamment, que les dispositions financières du droit de l’Union comptent au nombre des normes fondamentales du système juridique de l’Union, dont le strict respect est indispensable pour assurer le fonctionnement effectif de celle‑ci ( 225 ). Étant donné que l’Union doit disposer des ressources propres « dans les meilleures conditions possibles » ( 226 ), la Cour a rappelé que diverses règles relatives au recouvrement des droits douaniers ont pour objectif d’assurer une application uniforme et diligente des dispositions en matière douanière, dans l’intérêt d’une mise à disposition rapide et efficace des ressources propres de l’Union ( 227 ). Dès lors, il résulte d’une jurisprudence constante que, si une erreur commise par les autorités douanières d’un État membre a pour effet que les ressources propres de l’Union n’ont pas été recouvrées, une telle erreur ne saurait remettre en cause l’obligation de l’État membre concerné de payer les droits qui ont été constatés ainsi que les intérêts de retard ( 228 ). À titre d’exemple, ont été rejetées les justifications avancées par les États membres, tirées d’une erreur de comptabilisation par les autorités nationales ( 229 ), de la distinction entre une erreur matérielle et une erreur juridique avancée par l’État membre en cause ou encore de la nature non intentionnelle du retard dans l’inscription des montants au compte de la Commission ( 230 ). Il en découle qu’un État membre qui s’abstient de constater le droit de l’Union sur les ressources propres et de mettre le montant correspondant à la disposition de la Commission, sans que l’une des conditions prévues à l’article 13, paragraphe 2, du règlement no 609/2014 soit remplie, manque à ses obligations en vertu du droit de l’Union ( 231 ).

240.

Eu égard à ces observations, je ne peux que partager la position de la Commission selon laquelle la violation de l’obligation qui incombe à l’État membre, en vertu du droit de l’Union, de protéger les intérêts financiers de l’Union et de lutter contre la fraude, ainsi que de procéder à des contrôles douaniers sur la base d’une analyse des risques et d’exiger la constitution de garanties, constatée dans les présentes conclusions, s’accompagne nécessairement du calcul erroné des montants des ressources propres traditionnelles à mettre à la disposition du budget de l’Union et de l’absence de constatation et de mise à disposition de ces ressources au moment où celles‑ci auraient dû l’être.

2.   Sur la violation de l’obligation du Royaume‑Uni de mettre à la disposition de la Commission les montants correspondant aux droits de douane constatés dans le cadre de l’opération Snake

241.

Il découle des considérations précédentes que le Royaume‑Uni était tenu, conformément à l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000, auquel correspond l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 609/2014, de constater l’existence de ressources propres de l’Union et de les mettre, en application des articles 6, 9 et 10 de ces deux règlements, à disposition de celle‑ci. Dans sa requête, par son premier grief, la Commission reproche, en substance, aux autorités du Royaume-Uni d’avoir annulé dans la comptabilité B des montants importants de dettes douanières. Ces montants correspondraient aux dettes supplémentaires constatées à la suite de l’opération Snake menée en 2014 et notifiées par les autorités du Royaume-Uni au moyen de l’émission des avis de paiement C18 Snake, mais qui ont été retirés par les autorités du Royaume-Uni entre les mois de juin et de novembre 2015 ( 232 ). Selon la Commission, en n’ayant pas pris les mesures douanières appropriées après avoir constaté des dettes douanières supplémentaires et en annulant ces dernières, ces autorités ont commis une erreur administrative pour laquelle le Royaume‑Uni devrait être tenu financièrement responsable.

242.

Cet État critique le présent grief, en substance, pour deux motifs. D’une part, il fait valoir qu’il n’existait, au moment de l’émission des avis de paiement C18 Snake, aucune méthodologie pour procéder à une détermination de la valeur en douane a posteriori, après la mainlevée des marchandises sous-évaluées. D’autre part, le Royaume‑Uni soutient que les montants en cause se sont avérés « irrécouvrables », au sens de ces dispositions, pour des raisons qui ne sont pas imputables aux autorités du Royaume-Uni, dans la mesure où les importateurs visés par les 23 avis de paiement C18 Snake étaient des sociétés « phénix », c’est‑à‑dire des sociétés qui disparaissent dès la mise en libre pratique des marchandises. Dès lors, il aurait été définitivement impossible de procéder au recouvrement des droits concernés, pour des raisons qui ne peuvent lui être imputées, conformément à l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 et à l’article 13, paragraphe 2, sous b), du règlement no 609/2014. Il en découlerait que le Royaume‑Uni était dispensé de mettre à la disposition du budget de l’Union les montants correspondant aux droits constatés.

243.

Ainsi, dans le cadre du présent grief, la question est de savoir si, en ne procédant pas au recouvrement des droits de douane constatés par les avis de paiement C18 Snake, le Royaume‑Uni a agi de manière incompatible avec les dispositions susmentionnées des règlements nos 1150/2000 et 609/2014.

244.

À cet égard, conformément à l’article 13, paragraphe 1, du règlement no 609/2014 et à la disposition correspondante de l’article 17, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000, les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour que les montants correspondant aux droits constatés soient mis à la disposition du budget de l’Union. En l’occurrence, il convient de rappeler que les autorités britanniques ont considéré que certaines importations contrôlées dans le cadre de l’opération Snake étaient sous-évaluées, qu’elles ont pris en compte les montants en cause, notifié aux opérateurs les 23 avis de paiement C18 Snake et constaté les dettes douanières correspondant à ceux‑ci. Les montants correspondant à ces dettes ont été initialement inscrits dans la comptabilité B, conformément à l’article 6, paragraphe 3, des règlements nos 1150/2000 et 609/2014, en tant que droits constatés, non recouvrés et pour lesquels aucune caution n’avait été fournie. Par la suite, le Royaume‑Uni a procédé à leur annulation.

245.

Dans ce contexte, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 13, paragraphe 2, du règlement no 609/2014 et de l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000, les États membres ne sont dispensés de mettre à la disposition de la Commission les montants correspondant aux droits constatés que si le recouvrement n’a pu être effectué pour des raisons de force majeure ou lorsqu’il s’avère qu’il est définitivement impossible de procéder à ce recouvrement pour des raisons qui ne peuvent leur être imputées. Il y a également lieu de rappeler que la Cour a interprété les notions de « raisons de force majeure » et « d’autres raisons qui ne [...] sont pas imputables aux États membres » de manière stricte. À titre d’exemple, elle a refusé de considérer qu’un mouvement de grève prévisible puisse constituer un fait justificatif de retard dans l’inscription des ressources ( 233 ) ou qu’un État membre puisse apprécier l’opportunité d’exécuter une demande d’inscription anticipée de ressources ( 234 ). La Cour a d’ailleurs rejeté une justification d’un État membre tenant aux comportements frauduleux de fonctionnaires douaniers ( 235 ).

246.

Au regard de la jurisprudence susmentionnée, il me semble que, en l’espèce, les arguments de défense du Royaume‑Uni ne peuvent prospérer. En premier lieu, il est constant que cet État n’invoque pas la force majeure pour justifier l’annulation des avis de paiement C18 Snake, mais se borne plutôt à faire valoir qu’il ne saurait être tenu responsable de la perte des droits de douane supplémentaires réclamés dans ces avis de paiement. Bien que l’insolvabilité du débiteur de la dette douanière constitue, prima facie, un facteur qui ne dépend pas de la volonté d’un État membre, il faut garder à l’esprit que, en l’espèce, la Commission reproche au Royaume‑Uni de ne pas avoir pris toutes les mesures nécessaires pour que les montants correspondant aux droits de l’Union sur les ressources propres traditionnelles soient mis à la disposition du budget de l’Union. Il ressort des écrits des parties que celles-ci ne contestent pas que les droits de douane supplémentaires ont été constatés, étant donné que les autorités britanniques ont identifié les marchandises dont la mainlevée avait déjà été autorisée, ni que des garanties pour assurer le recouvrement intégral des montants réclamés n’ont pas été demandées auprès des importateurs concernés ( 236 ). Il est important de souligner que, pendant ce temps, ces autorités britanniques avaient pleine connaissance du schéma de fraude en question, qui consistait, notamment, en la cessation de toute activité des sociétés en cause, dès la première contestation de la déclaration en douane présentée aux fins de l’importation des marchandises. J’estime donc dénué de fondement l’argument du Royaume‑Uni selon lequel le recouvrement des dettes douanières supplémentaires visées par les avis de paiement C18 Snake aurait été impossible au motif que ces créances ne pouvaient pas être exécutées. En effet, après la constatation des droits de douane supplémentaires, cet État aurait dû demander, selon les dispositions du code des douanes communautaire et du code des douanes de l’Union en vigueur, telles qu’interprétées à la lumière du principe de la protection effective des intérêts financiers de l’Union consacré à l’article 325 TFUE, la constitution de garanties suffisantes pour couvrir le montant exigible ( 237 ). Dès lors, il me semble que la justification tirée de l’insolvabilité des débiteurs de dettes douanières, telle qu’invoquée par le Royaume‑Uni, ne constitue pas, en tant que telle, une raison pouvant dispenser l’État membre de recouvrer cette dette douanière en application des dispositions en cause.

247.

Il convient, par ailleurs, d’écarter l’argument du Royaume‑Uni selon lequel l’annulation des avis de paiement C18 Snake était inévitable, dès lors qu’aucune méthodologie pour déterminer la valeur en douane des marchandises de manière correcte n’existait. Plus particulièrement, cet État soutient que ses autorités ont retiré les avis de paiement C18 Snake après leur contestation par certains opérateurs, au motif que la méthodologie OLAF qu’elles avaient utilisée pour déterminer la valeur en douane correcte des importations sous-évaluées et ayant fait l’objet de contestations lors de l’opération Snake n’était pas appropriée pour procéder à la « réévaluation » de ces importations. Selon le Royaume‑Uni, ses autorités ont dû retirer les avis de paiement C18 Snake, dès lors que ceux-ci reposaient uniquement sur la méthodologie OLAF.

248.

À cet égard, il y a lieu de noter que, selon une jurisprudence constante de la Cour, la réglementation de l’Union relative à la détermination de la valeur en douane vise à établir un système équitable, uniforme et neutre qui exclut l’utilisation de valeurs en douane arbitraires ou fictives ( 238 ). La Cour a également relevé qu’il résulte des articles 29 à 31 du code des douanes communautaire (devenus articles 70 à 74 du code des douanes de l’Union) que les méthodes de détermination de la valeur en douane prévues par ces dispositions sont établies dans un ordre hiérarchique et présentent un lien de subsidiarité, de sorte que, lorsqu’une telle valeur ne peut être déterminée par application d’une disposition donnée, il y a lieu de se référer à la disposition qui vient immédiatement après celle‑ci dans l’ordre établi ( 239 ). En l’espèce, il doit être rappelé que, selon le dossier, ainsi qu’il résulte de l’examen du premier moyen ( 240 ), la méthodologie OLAF n’était censée être utilisée, à l’origine, que comme un outil d’analyse de risque dans les activités habituelles de douane. En outre, contrairement à ce que prétend le Royaume‑Uni, ce n’est pas lors de la réunion du 20 février 2015 que l’OLAF a indiqué, pour la première fois, que le prix moyen corrigé ne devait pas être utilisé à des fins de « réévaluation », mais c’est dès le début de l’ACP Discount que les États membres ont été informés que l’objectif de la méthodologie OLAF était la détection des fraudes. Partant, lorsque les autorités britanniques ont eu recours aux prix moyens corrigés fondés sur la méthodologie OLAF pour calculer les droits de douane supplémentaires réclamés dans les avis de paiement C18 Snake ( 241 ), elles n’ont pas utilisé cette méthodologie suivant les objectifs pour lesquels celle‑ci a été conçue. Je partage donc la position de la Commission ( 242 ) selon laquelle les autorités britanniques auraient dû, après avoir identifié les marchandises frauduleusement sous-évaluées, déterminer leur valeur en douane correcte, conformément aux méthodes séquentielles précisées dans le code des douanes communautaire et dans le code des douanes de l’Union, sur la base des méthodes de détermination susmentionnées, en tenant compte du fait qu’il s’agissait des marchandises importées visées par des contrôles douaniers ( 243 ). Par conséquent, il semble que, en n’ayant pas suivi les étapes relatives à la détermination de la valeur en douane, en vertu des dispositions douanières applicables et citées au point précédent, en ce qui concerne les marchandises identifiées comme sous-évaluées dans le cadre de l’opération Snake, et en appliquant la méthodologie OLAF au lieu de ces dispositions, le Royaume‑Uni n’a pas respecté la législation douanière de l’Union, de sorte que les montants déterminés dans les avis de paiement C18 Snake ne reflètent pas les montants effectivement dus par les opérateurs.

249.

Il ressort effectivement du dossier soumis à la Cour que les autorités britanniques se sont rendues compte elles‑mêmes des erreurs qu’elles avaient commises dans la détermination des montants supplémentaires ( 244 ), mais, au lieu de corriger les erreurs et de réémettre des ordres de paiement, elles ont choisi d’annuler définitivement les avis de paiement C18 Snake. Le Royaume‑Uni soutient que, en l’absence d’une méthodologie acceptable, il était préférable d’annuler les dettes ( 245 ). Ainsi que le fait valoir la Commission, il était possible pour le Royaume‑Uni d’émettre à nouveau des avis de paiement, ce qu’il a choisi de ne pas faire.

250.

Eu égard à ce qui précède, je considère que le Royaume‑Uni, après avoir constaté, pris en compte et notifié aux débiteurs les droits de douane réclamés par les 23 avis de paiement C18 Snake, n’a pas respecté les obligations en vertu de l’article 13, paragraphe 1, du règlement no 609/2014 et de la disposition correspondante de l’article 17, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000, suivant lesquelles il incombe aux États membres de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les montants correspondant aux droits constatés soient mis à la disposition du budget de l’Union. L’annulation de ces avis de paiement, ainsi que les décisions précédentes y relatives, doivent être considérées comme étant des erreurs administratives des autorités britanniques, dont la conséquence est le non‑recouvrement des ressources propres traditionnelles de l’Union. En outre, je partage la position de la Commission selon laquelle le Royaume‑Uni a préféré annuler les montants réclamés par les avis de paiement C18 Snake et inscrits dans la comptabilité B que suivre la procédure prévue à l’article 13 du règlement no 609/2014 et à la disposition correspondante de l’article 17 du règlement no 1150/2000, permettant aux États membres d’être exemptés de l’obligation de mettre à la disposition du budget de l’Union les montants correspondant aux droits qui s’avèrent irrécouvrables. Il s’ensuit que le Royaume‑Uni ne pouvait pas, dans ces conditions, se prévaloir de l’exemption prévue à l’article 13, paragraphe 2, du règlement no 609/2014 et à la disposition correspondante de l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000, dans la mesure où les erreurs administratives décrites sont imputables à cet État. Il s’ensuit que, en vertu de la jurisprudence bien établie ( 246 ), un État membre qui, après avoir constaté un droit de l’Union sur les ressources propres, s’abstient de mettre le montant correspondant à la disposition de la Commission, sans que l’une des conditions prévues par les dispositions susmentionnées soit remplie, manque à ses obligations en vertu du droit de l’Union. Par conséquent, il convient de considérer que, en raison de l’annulation des 23 avis de paiement C18 Snake et de l’absence de mise à disposition des montants y afférents, des ressources propres traditionnelles sont dues pour le budget de l’Union pour la période allant de novembre 2011 à novembre 2014.

3.   Sur l’évaluation des pertes des ressources propres traditionnelles

251.

Afin d’apprécier l’ampleur des pertes des ressources propres traditionnelles pour le budget de l’Union résultant du manquement au droit de l’Union reproché au Royaume‑Uni dans le cadre du présent recours, la Commission s’est fondée, en l’espèce, sur la méthodologie OLAF et sur les données qui lui étaient disponibles. Sur cette base, elle estime, concernant la période comprise entre le mois de novembre 2011 et le 11 octobre 2017, que le montant de 2679637088,86 euros (montant brut, diminué des frais de perception) aurait dû être mis à la disposition de la Commission au titre des ressources propres traditionnelles.

252.

Le Royaume‑Uni, en revanche, conteste dans sa défense tant la méthodologie utilisée que le montant calculé par la Commission. Sur la base de sa propre évaluation, il a établi le montant des ressources propres supplémentaires liées aux importations sous-évaluées de Chine pour la période d’infraction à hauteur de 217646623 GBP ( 247 ), chiffre qu’il a revu à la baisse dans son mémoire en duplique et fixé à 123819268 GBP. Ce faisant, bien que cet État persiste à contester le manquement qui lui est reproché, il me semble que, en réalité, il reconnaît implicitement, dans une certaine mesure, que son omission de mettre en œuvre des mesures efficaces pour lutter contre la fraude douanière à la sous-évaluation a entraîné une perte de ressources propres traditionnelles pour le budget de l’Union ( 248 ). Dès lors, la question centrale du présent moyen est de savoir comment déterminer l’ampleur des pertes en cause.

253.

Avant d’examiner cette question sur le fond, j’estime qu’il convient de formuler des observations relatives aux objections liminaires avancées par le Royaume‑Uni concernant, d’une part, l’absence de compétence de la Commission et de la Cour de procéder à l’évaluation et à la constatation des ressources propres traditionnelles, cette compétence relevant des États membres (section 1), et, d’autre part, le caractère du présent recours qui constituerait, en réalité, un recours en indemnisation, de sorte qu’il incombe à la Commission de prouver le lien de causalité direct entre le manquement spécifique de l’État et le dommage que celui‑ci a causé (section 2).

a)   Observations liminaires

1) Sur la compétence de la Commission pour procéder à l’évaluation des pertes de ressources propres traditionnelles et celle de la Cour pour statuer sur cette question

254.

Le Royaume‑Uni soutient que, lorsque les autres méthodes qui interviennent à un stade antérieur dans la séquence des procédures prévues aux articles 70 à 74 du code des douanes de l’Union ( 249 ) en vue de déterminer la valeur en douane ne peuvent être appliquées ( 250 ), il relève de la compétence exclusive de l’État membre de mettre en œuvre, au lieu de la méthode ordinaire qui se base sur la valeur transactionnelle d’une marchandise, une méthode subsidiaire ( 251 ), prévue à l’article 74, paragraphe 3, du code des douanes de l’Union et à l’article 31 du code des douanes communautaire, et ainsi de déterminer la valeur en douane des marchandises concernées sur la base des données disponibles et par des « moyens raisonnables » ( 252 ). Cette détermination impliquerait un certain nombre de décisions complexes et des choix méthodologiques difficiles de la part des autorités nationales, qui disposent à cet égard d’un large pouvoir d’appréciation.

255.

Je ne partage pas cet argument de défense fondé sur l’application des dispositions douanières, dès lors que, à l’instar de la Commission, j’estime que l’utilisation de la méthodologie OLAF, en tant que moyen pour estimer les pertes des ressources propres traditionnelles, ne vise pas à déterminer la valeur en douane des marchandises importées au sens de ces dispositions, ce qui relève de la compétence exclusive des États membres ( 253 ). En effet, en vertu des articles 69 à 74 du code des douanes de l’Union, l’État membre doit déterminer la valeur en douane des marchandises et recourir, si nécessaire, aux méthodes secondaires pour ce faire ( 254 ). En l’espèce, il incombait au Royaume‑Uni de déterminer la valeur en douane des produits textiles et de chaussures en provenance de Chine, eu égard aux indicateurs concrets qui signalaient leur sous-évaluation. Or, en l’occurrence, de telles déterminations n’ont pas eu lieu, ainsi qu’il résulte de l’examen du premier moyen du présent recours. Il s’ensuit que la Commission ne peut pas se substituer aux États membres pour procéder à une telle évaluation lorsque l’État membre en cause a omis de le faire selon les méthodes susmentionnées. Une telle détermination n’est plus, de toute manière, possible. Cette circonstance est inhérente à la nature statistique de la méthodologie OLAF en tant qu’outil de calcul des pertes de ressources propres traditionnelles, qui a pour but de déterminer, sur le fondement des données statistiques, l’ampleur des pertes intervenues en raison de la violation par le Royaume‑Uni des dispositions de la législation de l’Union en matière de ressources propres traditionnelles, dans la mesure où ses autorités n’ont pas effectué les contrôles douaniers appropriés concernant les marchandises en cause ( 255 ), de sorte que les droits de douane dus pour ces dernières n’ont pas été calculés correctement.

256.

Il découle de la jurisprudence constante précitée ( 256 ) qu’il existe, en règle générale, un lien direct entre la violation du droit douanier de l’Union reprochée à l’État membre et la perte de ressources propres traditionnelles qui en résulte pour le budget de l’Union. Dans ce contexte, la Cour a déjà jugé, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 9 juillet 2020, République tchèque/Commission ( 257 ), qu’il est inhérent au système des ressources propres de l’Union, tel que celui-ci est actuellement conçu en droit de l’Union, que la Commission a la faculté de soumettre à l’appréciation de la Cour, dans le cadre d’un recours en manquement, un différend l’opposant à un État membre quant à l’obligation de celui‑ci de mettre un certain montant de ressources propres de l’Union à la disposition de cette institution ( 258 ).

257.

En l’espèce, dans la mesure où le Royaume‑Uni a décidé de ne pas mettre à la disposition de la Commission, dans le délai fixé par l’avis motivé, le montant des ressources propres traditionnelles en cause, mais s’est limité à contester la position de la Commission quant à son obligation de mettre en œuvre ce montant, j’estime que c’est à juste titre que cette institution a considéré que cet État a manqué à ses obligations en vertu de la réglementation en matière de ressources propres traditionnelles et a décidé d’introduire un recours en manquement à cet effet. Dans ce contexte, il incombe à la Commission d’établir l’existence du manquement allégué et d’apporter à la Cour les éléments nécessaires à la vérification par celle‑ci de l’existence de ce manquement, sans pouvoir se fonder sur une présomption quelconque ( 259 ). Ainsi, il appartient à la Cour de vérifier si la Commission a démontré à suffisance de droit le montant des pertes de ressources propres qu’elle réclame pour la période d’infraction. Il s’ensuit que doit être écarté l’argument du Royaume‑Uni relatif à l’ordre d’examen des méthodologies et selon lequel la Cour doit d’abord examiner l’estimation proposée de cet État.

258.

Le Royaume‑Uni soutient, en outre, que, si la Cour devait juger, dans un premier temps, que la Commission a prouvé à suffisance de droit un manquement dans son chef à l’obligation de combattre la fraude ( 260 ), il incombe à la Commission, dans un second temps, de prouver que la méthodologie proposée par le Royaume‑Uni pour déterminer les ressources propres supplémentaires qui seraient dues repose sur des choix et une appréciation des preuves qui sont manifestement déraisonnables. Plus particulièrement, selon le Royaume‑Uni, il découle de l’articulation des articles 258 et 260 TFUE que, en incluant dans l’objet de son recours la question relative aux estimations des pertes de ressources propres traditionnelles, la Commission dépasse le cadre d’un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, qui est limité à la question de savoir si l’État membre a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du droit de l’Union. Dans une telle hypothèse, la Commission serait tenue d’apporter la preuve d’un autre type d’illégalité, à savoir le caractère manifestement déraisonnable de l’évaluation des droits impayés effectuée par le Royaume‑Uni.

259.

À cet égard, j’observe que cet argument ne tient pas compte du fait que le présent recours vise à ce que la Cour constate, notamment, que le Royaume‑Uni a manqué aux obligations qui lui incombent en matière de ressources propres en vertu du droit de l’Union, ce qui implique nécessairement que la Commission fournisse une démonstration par rapport à l’ampleur des pertes de ces ressources et du manquement. Une telle estimation n’empiète pas sur un éventuel recours à la procédure au titre de l’article 260 TFUE, dans l’hypothèse où l’État membre n’aurait pas acquitté le montant principal ou les intérêts à la suite d’un éventuel arrêt qui l’aurait condamné pour violation des obligations résultant du régime des ressources propres. En tout état de cause, la question de savoir si l’État membre a agi de manière raisonnable, en « réévaluant » les importations sous-évaluées, ne se pose pas en l’espèce. En effet, la jurisprudence invoquée par le Royaume‑Uni pour fonder sa thèse concernant la « réévaluation » des marchandises est relative aux obligations de l’État membre, lorsque celui-ci procède, en cas de doutes apparus dans le cadre de contrôles douaniers, à une détermination de la valeur en douane des marchandises importées ( 261 ). Or, ainsi que cela a déjà été souligné, la Commission vise, dans le cadre de ce deuxième moyen, non pas à déterminer la valeur en douane des marchandises spécifiques, mais à estimer les pertes de ressources propres traditionnelles sur la base des données statistiques.

260.

Par ailleurs, dans ses demandes d’information des 22 juin 2018 et 22 mars 2019, le Royaume‑Uni a notamment demandé à la Commission de lui fournir des informations sur le calcul des pertes de ressources propres réclamées à hauteur de 2679637088,86 euros afin de pouvoir recalculer ce montant. À cet égard, je constate que, dans son mémoire en réplique, la Commission a expliqué que la méthodologie suivie et les données utilisées pour calculer ce montant avaient toujours été connues du Royaume‑Uni étant donné, notamment, qu’il s’agissait d’informations provenant de cet État lui‑même au moyen de la base de données Surveillance 2.

2) Sur la prétendue obligation de démontrer le dommage et le lien de causalité, ainsi que le scénario contrefactuel

261.

Le Royaume‑Uni soutient qu’il incombe à la Commission de fonder sa demande sur les standards d’une procédure de responsabilité, dès lors qu’elle demande que la Cour condamne cet État à payer des dommages et intérêts. Or, en l’espèce, la Commission ne parviendrait pas à prouver, d’une part, l’existence d’un dommage concret et quantifiable, ainsi que, d’autre part, la présence d’un lien de causalité direct entre le manquement commis par le Royaume‑Uni et ce dommage.

262.

À cet égard, tout d’abord, il convient de rappeler que la procédure devant la Cour, conformément à l’article 258 TFUE, est une procédure en manquement et non une procédure en responsabilité ou en réparation. Partant, dans le cadre du recours en manquement, il incombe à la Commission de démontrer que le Royaume‑Uni a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du droit de l’Union ( 262 ). Dès lors que le présent recours ne tend pas à obtenir de la Cour qu’elle condamne l’État défendeur à payer des dommages et intérêts, la Cour ne doit pas examiner les éléments avancés par le Royaume‑Uni en ce qui concerne l’existence du dommage et du lien de causalité entre le manquement en matière douanière et le prétendu dommage. En tout état de cause, cet argument du Royaume‑Uni doit être rejeté eu égard à la jurisprudence constante de la Cour dont il résulte que le recours en manquement revêt un caractère objectif ( 263 ). En effet, le non‑respect d’une obligation imposée par une règle du droit de l’Union est en lui‑même constitutif d’un manquement, ce qui a pour effet que la considération que ce non‑respect n’a pas engendré de conséquences négatives est dépourvue de pertinence ( 264 ). Ainsi, je suis d’avis que le présent recours ne vise pas, en raison des caractéristiques de la procédure en manquement, à obtenir de la Cour qu’elle condamne l’État membre défendeur à payer des dommages et intérêts.

263.

Toutefois, il y a lieu de relever que, dans sa requête, la Commission n’a pas demandé, en tout état de cause, à obtenir l’indemnisation d’un dommage. En effet, la position du Royaume‑Uni selon laquelle il incombe à la Commission de démontrer l’existence d’un « dommage », dont la quantification n’est possible qu’après avoir préalablement établi l’existence d’un lien de causalité résultant du comportement fautif de l’État membre, est, à mon sens, fondée sur une lecture erronée de la requête et d’autres écrits de la procédure en cause. Plus particulièrement, il ressort du troisième alinéa du premier chef des conclusions que la Commission reproche au Royaume‑Uni de ne pas avoir mis à la disposition du budget de l’Union les montants corrects de ressources propres traditionnelles, ce qui aurait abouti à la violation des dispositions relatives à ces ressources. Ainsi que cela a déjà été exposé, il incombe aux États membres, en vertu des articles 9 et 10 du règlement no 1150/2000, auxquels correspondent, respectivement, les articles 9 et 10 du règlement no 609/2014, lus en combinaison avec les articles 2 et 8 des décisions 2007/436 et 2014/335, de constater le droit de l’Union sur les ressources propres traditionnelles dès que sont remplies les conditions prévues par la réglementation douanière en ce qui concerne la prise en compte du montant du droit et sa notification au redevable.

264.

Par conséquent, il résulte sans équivoque de la requête et, notamment, des dispositions de l’Union y citées, que la Commission reproche au Royaume‑Uni de ne pas avoir mis à la disposition de l’Union les montants correctement calculés des ressources propres traditionnelles et non le préjudice causé à cette dernière. Le manquement décrit dans le petitum de la requête (et, notamment, le passage « en ne prenant pas en compte les montants corrects des droits de douane et en ne mettant pas à disposition le montant correct des ressources propres traditionnelles ») constitue donc, par nature, une demande visant à faire constater un manquement à l’obligation d’agir incombant à l’État, c’est‑à‑dire son omission de satisfaire à ses obligations en vertu du droit de l’Union, et non un dommage causé par cet État.

265.

Pour ce qui est, ensuite, de l’argument du Royaume‑Uni, tiré de la nécessité de démontrer un lien de causalité entre le manquement spécifique de l’État membre et les pertes des ressources propres, la Cour a déjà souligné qu’un « lien direct » existe entre la perception des recettes provenant des droits de douane et la mise à la disposition au budget de l’Union des ressources correspondantes ( 265 ). Or, je suis d’avis qu’il ressort de cette jurisprudence que, si, en raison d’une erreur commise par les autorités douanières d’un État membre, les droits de douane ne sont pas recouvrés, cela ne remet pas en cause l’obligation de l’État membre de mettre à disposition les montants qui auraient dû être constatés et de payer des intérêts de retard. Bien qu’il existe une corrélation sine qua non entre, d’une part, le manquement d’un État membre dans le domaine de la réglementation douanière et, d’autre part, le montant des ressources propres qui n’aurait pas été mis à la disposition du budget de l’Union, le premier ayant inévitablement un effet sur le second, cela ne signifie pas que ces deux éléments devraient être analysés en termes de dommage causé par le comportement fautif de l’État membre. Un État membre, qui s’abstient de constater le droit de l’Union sur les ressources propres et de mettre le montant correspondant à la disposition de la Commission, sans que l’une des conditions prévues à l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 ou à l’article 13, paragraphe 2, du règlement no 609/2014 soit remplie, manque à ses obligations en vertu du droit de l’Union et, notamment, à celles découlant des articles 2 et 8 des décisions 2000/597 et 2007/436 ( 266 ). Cette conclusion est corroborée par la jurisprudence invoquée par le Royaume‑Uni dans son mémoire en défense, dont il découle que le comportement erroné des autorités douanières concernant le calcul des droits de douane dus entraîne inévitablement des pertes de ressources propres traditionnelles relevant de la responsabilité des États membres ( 267 ). Dans ce contexte, l’article 340 TFUE et la jurisprudence y afférente invoqués par le Royaume‑Uni sont dénués de pertinence.

266.

En outre, il me semble qu’une conclusion différente ne peut pas être tirée de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Commission/Royaume‑Uni ( 268 ), invoquée par le Royaume‑Uni et les parties intervenantes, dès lors que cette affaire concernait une situation différente de celle à l’origine de la présente procédure. Dans cette affaire, il était effectivement question d’établir la responsabilité du Royaume‑Uni en raison d’une éventuelle délivrance de certificats EXP par les autorités d’Anguilla, un pays et territoire d’outre-mer (PTOM), en méconnaissance de la décision dite « PTOM ». La Commission faisait valoir, notamment, que le Royaume‑Uni devait, en tant qu’État membre, assumer la responsabilité des actes adoptés et des négligences commises par les autorités d’Anguilla et contraires à cette décision, compte tenu des relations particulières qu’il entretient avec son PTOM, lequel n’est pas un État indépendant. Le Royaume‑Uni considérait qu’aucun acte de droit de l’Union ne permettait de tenir Anguilla pour responsable, à l’égard de l’Union, des erreurs commises par ses propres autorités dans l’application de ladite décision et de la perte de ressources propres en résultant, de sorte que le Royaume‑Uni ne pouvait pas non plus être considéré comme étant responsable de telles erreurs au seul motif qu’il est l’État membre auquel Anguilla est rattachée ( 269 ). Dès lors, le problème central dans ladite affaire concernait la responsabilité d’un État membre de l’Union face au comportement des autorités d’un PTOM avec lequel il entretient des liens spéciaux, comportement qui violait le droit de l’Union, ce qui a entraîné la perte des ressources propres. Par voie de conséquence, dans la mesure où la présente affaire concerne la responsabilité propre du Royaume‑Uni et non celle d’une autre entité, les conclusions dudit arrêt ne sauraient être transposées à la présente affaire, contrairement à ce que soutient cet État.

267.

Enfin, le Royaume‑Uni soulève, sous la forme d’une exception d’irrecevabilité, l’argument selon lequel la Commission n’aurait pas démontré que les mesures que cet État avait choisies pour lutter contre la fraude à la sous-évaluation avaient effectivement entraîné des pertes de ressources propres traditionnelles pour le budget de l’Union ( 270 ). D’après lui, la thèse de la Commission selon laquelle la fraude à la sous-évaluation s’est poursuivie en raison de l’absence d’analyses de risque et de contrôles efficaces préalables au dédouanement suppose nécessairement, en présence de telles mesures, la disparition des échanges commerciaux et des pertes de ressources propres traditionnelles qui y sont associées. En d’autres termes, s’il avait mis en place les mesures de lutte contre la fraude que la Commission estime appropriées, l’importation de marchandises sous-déclarées aurait été éradiquée, ce dont il déduit qu’aucun droit de douane supplémentaire significatif n’aurait été dû au budget de l’Union. Le Royaume‑Uni affirme qu’il ne devrait être tenu pour responsable que des pertes pour le budget de l’Union correspondant à la différence entre les ressources propres traditionnelles qui auraient été exigibles dans son scénario contrefactuel et les ressources propres traditionnelles qu’il a effectivement mises à disposition.

268.

À cet égard, il résulte d’une jurisprudence constante qu’est dénué de pertinence le fait de savoir si, dans la situation où les ressources propres traditionnelles ont fait l’objet de pertes en raison d’événements antérieurs dus à une erreur administrative des autorités de l’État membre, il aurait été possible que ces événements se produisent sans cette erreur et donc sans pertes de ressources propres ( 271 ). Par souci d’exhaustivité, il y a lieu d’observer que, outre les contrôles ponctuels ( 272 ), le Royaume‑Uni n’a effectué pratiquement aucun contrôle pendant la période d’infraction. Ce faisant, il a créé une situation irréversible qui a eu pour effet une perte considérable de ressources propres traditionnelles devant, à mon sens, être constatée. Je suis d’avis que, dans un tel contexte, il n’appartient pas à la Cour de spéculer sur ce qui se serait produit si le Royaume‑Uni avait respecté ses obligations au titre du droit de l’Union. En effet, une analyse contrefactuelle, telle que préconisée par le Royaume‑Uni, ne saurait remettre en doute la réalité de cette perte ni le fait que celle‑ci aurait pu être évitée si des contrôles adéquats avaient été effectués par les autorités douanières britanniques préalablement à la mise en libre pratique des marchandises en cause. En effet, un tel argument est dénué de fondement, dès lors qu’il y a lieu de tenir compte de la situation factuelle, telle qu’elle se présentait en raison des violations des droits de l’Union, et non du volume de marchandises sous-évaluées qui auraient pu être importées si l’État membre avait, hypothétiquement, rempli les obligations qui lui incombent en vertu du droit de l’Union. Par conséquent, j’estime qu’un tel scénario contrefactuel ne saurait prospérer en matière de perte de ressources propres.

b)   Sur le fond

1) Sur l’aperçu de la méthodologie OLAF et son application en tant qu’outil de calcul de pertes de ressources propres traditionnelles

269.

La Commission estime qu’il est nécessaire de recourir à une évaluation fondée sur toutes les informations disponibles, pour établir les pertes de ressources propres traditionnelles, étant donné qu’il n’est plus possible d’établir la valeur correcte des marchandises sous-évaluées en appliquant l’une ou l’autre des méthodes prévues dans le code des douanes communautaire et le code des douanes de l’Union. Compte tenu de l’absence de coopération du Royaume‑Uni, aucun élément de preuve directe ne permettrait d’attester de la valeur en douane des marchandises concernées. La Commission serait donc parvenue à une estimation des pertes de ressources propres traditionnelles sur la base de la méthodologie OLAF, fondée sur des données statistiques et sur la moyenne corrigée des prix des marchandises en cause importées dans l’Union.

270.

Plus particulièrement, l’utilisation de la méthodologie OLAF, en tant que méthodologie pour déterminer l’ampleur des pertes de ressources propres traditionnelles, suit le schéma suivant. Dans un premier temps, sont considérées comme étant sous-évaluées les importations se situant en dessous du seuil du prix minimal acceptable (lowest acceptable price), qui, pour rappel, est calculé comme étant égal à 50 % du prix moyen corrigé à l’échelle de l’Union (cleaned average price). Sont incluses en tant qu’importations sous-évaluées les importations d’une catégorie de produits relevant des chapitres 61 à 64 de la nomenclature combinée (pour chaque code de produits de la nomenclature combinée à huit chiffres) ( 273 ) dont la valeur agrégée quotidienne (moyenne pondérée journalière) est inférieure au prix minimal acceptable du code de produits concerné, sur le fondement des données prélevées de la base de données Surveillance 2 et employées dans la base de données Comext ( 274 ). Dans une seconde étape, la portée des pertes de ressources propres pour les quantités considérées comme étant sous-évaluées est calculée en termes de droits de douane supplémentaires dus sur la base de la différence entre la valeur déclarée et le prix moyen corrigé.

271.

Dès lors, en l’absence de toute information directe sur le volume et la nature des importations sous-évaluées au Royaume‑Uni au cours de la période pertinente, l’estimation du volume des marchandises sous-évaluées sur laquelle s’appuie le recours est fondée, en principe, sur le prix minimal acceptable pour les différents codes produits (50 % du prix moyen corrigé) ( 275 ), tandis que l’estimation de la valeur des quantités sous-évaluées est calculée en fonction du prix moyen corrigé. Bien que la méthodologie ainsi décrite s’appuie sur les données pertinentes fournies à la Commission par les États membres, par l’intermédiaire des bases de données susmentionnées, les montants ainsi calculés sur le fondement de la méthodologie OLAF constituent par conséquent une estimation budgétaire rétrospective des pertes pour l’Union et non la preuve directe des montants correspondant aux droits constatés que cet État aurait été tenu de mettre à la disposition du budget de l’Union pendant la période d’infraction ( 276 ) si les contrôles appropriés lors des dédouanements avaient été correctement effectués.

272.

Le Royaume‑Uni, soutenu sur ce point par les parties intervenantes, fait valoir que la Commission ne peut pas utiliser la méthodologie OLAF pour calculer les pertes de ressources propres traditionnelles, en soulignant que celle‑ci n’est qu’un outil d’analyse de risque. Dans ce cadre, le Royaume‑Uni et les parties intervenantes affirment que la Commission a utilisé la méthodologie OLAF dans sa requête pour déterminer la valeur en douane correcte des marchandises importées sous-évaluées.

273.

Une telle argumentation ne saurait, à mon sens, être retenue.

274.

Tout d’abord, d’une part, compte tenu de la nature des importations et de l’omission des autorités douanières britanniques d’effectuer les contrôles douaniers en cause, il est indubitable qu’une fois la mise en libre pratique sur le territoire douanier de l’Union autorisée par les autorités douanières nationales, il n’est objectivement plus possible de faire revenir ces marchandises à des fins de contrôles douaniers, même s’il s’avère postérieurement que les contrôles douaniers n’ont pas été effectués ou qu’ils étaient erronés. Cette conclusion ne semble pas non plus être contestée par le Royaume‑Uni ( 277 ). Par conséquent, je ne peux que partager la position de la Commission selon laquelle aucun élément de preuve directe ne permet d’attester du volume ni de la valeur en douane des marchandises concernées. D’autre part, s’il est vrai que la méthodologie OLAF était initialement conçue et approuvée par les États membres de manière consensuelle en tant qu’outil d’analyse de risque pour aider les autorités douanières nationales à identifier les marchandises potentiellement sous-déclarées, il est également vrai qu’elle permet, d’un côté, de déterminer, sur la base des données statistiques douanières fournies par les États membres à la Commission, les volumes d’importations déclarées à une valeur inférieure au seuil de risque et, d’un autre côté, en employant le critère du prix moyen corrigé pour les marchandises concernées à l’échelle de l’Union, élaborée en appliquant la même méthodologie, d’estimer le montant des ressources propres que l’État membre aurait perçu et mis à disposition du budget de l’Union s’il avait satisfait à ses obligations en vertu de la réglementation relative aux ressources propres traditionnelles. Partant, je suis d’avis qu’il n’existe aucune contradiction à ce que la méthodologie OLAF, bien qu’initialement conçue en tant qu’outil d’analyse des risques douaniers, puisse également servir de base pour estimer la portée des pertes des ressources traditionnelles lorsque les importations ont été mises en libre pratique sur le territoire douanier de l’Union sans que des contrôles appropriés à la mainlevée aient été effectués, ce qui reflète une perte pour le budget de l’Union.

2) Sur l’application de l’arrêt Commission/Portugal

275.

Selon la Commission, une approche fondée sur des données statistiques et mise au point dans le cadre de la méthode aux fins du calcul des pertes de ressources propres traditionnelles est confirmée par l’arrêt Commission/Portugal ( 278 ).

276.

Je partage l’avis de la Commission selon lequel l’estimation des pertes de ressources propres sur le fondement des données statistiques ne représente pas, en principe, une terra incognita pour la Cour. L’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Commission/Portugal ( 279 ), qu’invoque la Commission, était relative au traitement de l’introduction en libre pratique de bananes par certains bureaux de douane portugais. Dans sa requête, la Commission demandait à la Cour de constater que, en raison de l’acceptation systématique, au cours des années 1998 à 2002, de déclarations en douane de mise en libre pratique de bananes fraîches par ses autorités douanières, alors que celles-ci savaient ou devaient raisonnablement savoir que le poids déclaré des bananes ne correspondait pas à leur poids réel, et en raison du refus des autorités portugaises de mettre à disposition les ressources propres correspondant à la perte de recettes et aux intérêts de retard dus, la République portugaise avait manqué aux obligations qui lui incombaient en vertu du droit de l’Union. La Cour a jugé que, étant donné que les montants effectivement dus au titre des droits sur les ressources propres des Communautés auraient pu être constatés correctement dès la réalisation des opérations d’importation et de leur dédouanement consécutif si les autorités nationales avaient effectué les vérifications nécessaires, la République portugaise devait être placée, pour la période litigieuse, dans une situation équivalente à celle où elle aurait constaté correctement les droits et les aurait inscrits dans la comptabilité ( 280 ).

277.

Il y a lieu de souligner que la Cour a rejeté sans équivoque l’argument de défense de la République portugaise selon lequel il était exclu de quantifier le montant des ressources propres qui n’avaient pas été dûment constatées au cours des années en cause, en relevant que l’impossibilité de procéder à des vérifications en l’absence des marchandises concernées était la conséquence inéluctable de l’omission des autorités portugaises. La Cour a jugé que, en raison de cette impossibilité, il n’était pas inapproprié, dans cette affaire, de quantifier le montant des ressources propres qui n’avaient pas été dûment constatées au cours des années en cause, à savoir des années 1998 à 2002, sur la base des résultats des contrôles effectués après celles‑ci entre le 1er août et le 31 octobre 2003 ( 281 ). Toutefois, il y a lieu de relever que la Cour a, en définitive, rejeté la demande de la Commission visant à déterminer le montant des ressources propres résultant de la pratique du contrôle douanier illégal, dans la mesure où la méthode statistique proposée comportait un cadre de référence erroné pour effectuer cette détermination ( 282 ).

278.

Ainsi, la solution adoptée par la Cour, dans l’arrêt Commission/Portugal ( 283 ), confirme, d’une part, qu’il n’est pas exclu que la Commission puisse se fonder, en ce qui concerne les manquements au droit douanier de l’Union par l’État membre dans lequel des marchandises importées ont déjà été mises en libre pratique sur le territoire douanier de l’Union, sur certaines données statistiques caractérisant le manquement reproché pour, notamment, déterminer a posteriori l’ampleur de la perte des ressources propres pour le budget de l’Union qui en résulte. D’autre part, force est de constater que l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt concernait une violation douanière bien définie, à savoir l’acceptation de la différence entre le poids déclaré des bananes et le poids réel d’une boîte, pour laquelle, sur la base des données exactes recueillies lors des contrôles ultérieurs relatifs au même manquement, il était relativement facile de tirer des conclusions statistiques sur la différence de poids éventuellement déclarée et réelle entre les marchandises importées au cours de la période d’infraction. En revanche, la méthodologie retenue, en l’espèce, pour calculer l’ampleur des ressources propres traditionnelles est caractérisée par la multiplicité des indicateurs pertinents, tels que le volume des importations sous-évaluées frauduleusement sur l’ensemble des importations réalisées pendant la période d’infraction et la « juste valeur » en douane à attribuer à ces importations. Ces indicateurs caractérisent ainsi l’impact de la fraude à la sous-évaluation des marchandises au budget de l’Union et, plus généralement, l’ampleur du manquement reproché au Royaume‑Uni, tout en fournissant des éléments relatifs aux pertes de ressources propres traditionnelles de manière plus indirecte que les données statistiques en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Commission/Portugal ( 284 ).

3) Sur l’admission de principe de l’approche proposée par la Commission pour évaluer les pertes de ressources propres traditionnelles

279.

La méthodologie OLAF proposée par la Commission en vue de déterminer l’étendue des pertes des ressources propres traditionnelles pour le budget de l’Union semble, ainsi qu’il résulte de l’analyse qui précède, aller au-delà des problèmes juridiques concernant la quantification des ressources propres résolus jusqu’à présent par la Cour. Ainsi, afin de déterminer si et dans quelle mesure l’approche méthodologique proposée par la Commission est conforme aux critères relatifs au recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, j’estime qu’il convient de tenir compte, d’une part, des critères concernant la charge de la preuve établie par la jurisprudence de la Cour et, d’autre part, des caractéristiques essentielles de cette approche méthodologique.

280.

L’objectif du recours en manquement prévu à l’article 258 TFUE est, selon la jurisprudence classique, d’aboutir à l’élimination effective des manquements des États membres et de leurs conséquences ( 285 ). Ainsi que cela a déjà été rappelé dans le cadre des présentes conclusions ( 286 ), selon une jurisprudence constante, la procédure au titre de cette disposition repose sur la constatation objective du non‑respect, par un État membre, des obligations que lui imposent le traité FUE ou tout acte de droit dérivé ( 287 ). À cet égard, il convient de rappeler que l’absence de prise de mesures en matière de ressources propres constitue également un manquement au sens de ladite disposition ( 288 ). En outre, ainsi que cela a déjà été rappelé, il incombe à la Commission, qui a la charge d’établir l’existence du manquement allégué, d’apporter à la Cour, dans le cadre d’une procédure en manquement en vertu de l’article 258 TFUE, les éléments nécessaires à la vérification par celle‑ci de l’existence dudit manquement, sans pouvoir se fonder sur une présomption quelconque ( 289 ). C’est seulement lorsque la Commission a fourni « suffisamment d’éléments faisant apparaître certains faits » relatifs au manquement par l’État membre défendeur qu’« il incombe à celui‑ci de contester de manière substantielle et détaillée les données ainsi présentées et les conséquences qui en découlent » ( 290 ).

281.

Il résulte, à mon sens, de ce qui précède que, dans le cadre d’une procédure en manquement dans laquelle la Commission reproche à un État membre, notamment, une violation des règles du droit de l’Union relatives à la perception des ressources propres traditionnelles et de son obligation de mettre à disposition du budget de l’Union certains montants, la Commission doit présenter à la Cour les éléments qui sont nécessaires à cette dernière pour vérifier l’existence du grief qui est fait au Royaume‑Uni d’avoir manqué à son obligation de mettre un certain montant de ressources propres de l’Union à la disposition de celle‑ci, sans que la Commission puisse se fonder sur des hypothèses spéculatives. Cela signifie également que, afin de déterminer l’étendue des pertes de ces ressources, la Cour est non pas tenue d’opérer un choix entre les différentes approches méthodologiques proposées par les parties, comme le Royaume‑Uni semble le suggérer dans son mémoire en défense, mais seulement d’apprécier la méthodologie OLAF proposée par la Commission à l’appui de son recours.

282.

Cela étant, compte tenu de la nature de la violation du droit douanier de l’Union reprochée au Royaume‑Uni, qui fait l’objet du premier moyen de la présente procédure en manquement, la Cour ne saurait ignorer le cadre factuel de l’affaire, tel qu’exposé dans le cadre de l’examen de ce moyen ( 291 ) dont il résulte que, alors qu’il était pleinement conscient de l’existence et de la nature de la fraude à la sous-évaluation massive de produits textiles et de chaussures en provenance de Chine aux frontières douanières de l’Union, le Royaume‑Uni n’a pas pris de mesures efficaces pour lutter contre une telle fraude douanière pendant la période d’infraction, notamment en ne procédant pas à des analyses de risque, en n’effectuant pas de contrôles douaniers physiques et en ne constituant pas de garanties auprès des importateurs. Ce faisant, le Royaume‑Uni n’a pas prélevé d’échantillons pour déterminer la valeur en douane correcte des importations suspectées d’être sous-évaluées conformément au code des douanes communautaire et au code des douanes de l’Union. Ainsi, la détermination de la proportion des marchandises concernées par la fraude à la sous-évaluation pendant la période d’infraction, ainsi que la détermination de la valeur en douane « correcte » de celles‑ci, est, en substance, compromise par le manquement décrit ci‑dessus.

283.

C’est donc à juste titre que la Commission, dans ses écrits de procédure, souligne que la non‑application de la séquence des procédures douanières, telle que celle prévue par le code des douanes communautaire et par le code des douanes de l’Union, constitue le facteur déterminant, qui dicte l’ampleur des pertes des ressources propres traditionnelles pour le budget de l’Union, sur la base d’une analyse statistique ex post des données qui la caractérisent indirectement. Dès lors, il est donc impossible de rétablir une situation compatible avec le droit douanier de l’Union en ce qui concerne les importations frauduleuses spécifiques, de sorte que ni les autorités compétentes du Royaume‑Uni ni celles de la Commission ne disposent, notamment, de la possibilité d’établir la valeur en douane correcte en application des règles en matière d’évaluation prévues par la législation douanière de l’Union. Dans la mesure où cette situation résulte, de manière objective, du manquement de l’État membre lui‑même aux dispositions douanières, il lui appartient, en cas de constatation de ce manquement, d’assumer les pertes pour le budget de l’Union, telles que déterminées sur la seule base d’une analyse « indirecte » des données et en recourant à la probabilité la plus grande qui est nécessairement associée à cette détermination. En conséquence, j’estime qu’il n’est pas exclu, en principe, que la Commission démontre, dans le cadre d’une procédure en manquement au titre de l’article 258 TFUE, l’étendue d’un manquement au droit des ressources propres de l’Union au moyen d’une méthodologie fondée sur des données statistiques, lorsque l’impossibilité de procéder à des vérifications est la conséquence inévitable de l’omission des autorités douanières de l’État membre. Cette interprétation est également corroborée par l’obligation des États membres de protéger les intérêts financiers de l’Union, qui découle, notamment, de l’article 325 TFUE.

284.

Toutefois, en raison de la nature de la méthodologie OLAF fondée sur les données statistiques, les problèmes relatifs à la valeur de preuve qui y sont associés ne peuvent pas être sous-estimés ( 292 ). En effet, il ne saurait être négligé que, aux fins de mesurer l’ampleur des éventuelles pertes budgétaires, différentes solutions méthodologiques peuvent être utilisées et produire des résultats différents en termes de montants. La présente affaire illustre particulièrement bien ce problème, étant donné que les parties requérante et défenderesse ont présenté chacune une approche radicalement différente pour quantifier les pertes des ressources propres traditionnelles. La Commission elle‑même ne nie pas la multiplicité des méthodes possibles pour évaluer ces pertes, en indiquant, dans ses réponses aux questions écrites posées par la Cour, que, en principe, le résultat du manquement en cause pourrait également être fondé sur d’autres méthodes d’évaluation desdites pertes. Bien que j’éprouve de sérieux doutes quant aux prétendus avantages de la méthodologie OLAF, à savoir la « robustesse » que la Commission a mise en avant à plusieurs reprises dans ses écrits de procédure ( 293 ), elle constitue le critère pertinent pour apprécier la valeur probante des méthodes statistiques et il faut reconnaître que l’ampleur de la perte du budget ainsi évaluée reste largement tributaire de l’aléa de la méthode spécifique choisie.

285.

En outre, il convient de garder à l’esprit le fait que, pour autant que l’estimation des pertes de ressources propres traditionnelles est calculée sur la base d’informations figurant dans les bases de données Surveillance 2 (données relatives aux importations de produits relevant des chapitres 61 à 64 de la nomenclature combinée en provenance de Chine) et Comext (calcul des prix moyens corrigés), qui sont par nature des éléments factuels, le montant définitif est également tributaire des choix méthodologiques, tels que les critères relatifs à la détermination du volume des marchandises sous-évaluées et à la définition de la valeur de référence pour « réévaluer » ces marchandises. Ces choix méthodologiques sont par nature des critères plutôt normatifs, en ce qu’ils dépendent des choix opérés par l’institution qui a mis au point la méthode en question. Dès lors, je ne peux que partager l’argument du Royaume‑Uni selon lequel le rapport technique sur lequel se fonde le calcul de l’OLAF n’est justifié que dans le contexte d’un « prix équitable »(fair price) prédéterminé au niveau de l’Union-28 ( 294 ). Le problème relatif à la variation des critères d’évaluation et à leur impact sur le résultat du montant des pertes est mis en exergue, notamment, par la réponse écrite de la Commission aux questions posées par la Cour, dont il découle que le résultat du calcul définitif varie, entre autres, en fonction du prix minimal acceptable (entre 10 % et 50 % du niveau des prix moyens) ( 295 ) et la Commission a « envisagé cette approche ». Bien que la Commission estime que, du fait du manquement reproché aux autorités britanniques, les pertes de ressources propres traditionnelles pour le budget de l’Union s’éléveraient au total à 2092703277,93 euros, dans l’hypothèse où le prix minimal acceptable serait fixé au niveau de 10 % du prix moyen corrigé, il n’en demeure pas moins que ce montant correspond à 78,1 % de celui demandé par la Commission dans le cadre de la présente affaire, sur le fondement du prix minimal acceptable fixé au niveau de 50 % du prix moyen corrigé, ce qui, à mon sens, est non négligeable. Il convient donc de reconnaître que l’utilisation d’une méthodologie fondée sur des données statistiques s’accompagne de la possibilité d’établir des points de repère différents, mais tout aussi valables, qui font dépendre le résultat obtenu de cette méthodologie.

286.

Au vu de ce qui précède, je considère, dans le cadre d’une procédure en manquement au titre de l’article 258 TFUE, qu’il ne saurait être exclu que, aux fins de l’estimation des pertes de ressources propres traditionnelles pour le budget de l’Union dues au manquement aux obligations douanières par l’État membre en cause, en l’absence de preuves directes causées par l’omission de cet État membre, le recours de la Commission soit fondé sur une méthodologie établie sur des données statistiques. Toutefois, afin de ne pas s’écarter des objectifs et du but de la procédure en manquement, l’application d’une telle méthodologie, pour estimer les pertes de ressources propres traditionnelles, ne peut être acceptée que dans la mesure où le choix d’une méthode spécifique se justifie au regard des particularités du cas d’espèce, les références de base n’étant ni arbitraires ni biaisées, et que le recours à cette méthodologie constitue une analyse quantitative cohérente fondée sur l’ensemble des données pertinentes disponibles. En outre, plus les éléments de preuve directs corroborant les données de base afférentes à la méthodologie en cause sont limités, plus la sélection de critères normatifs employés par cette méthodologie doit être prudente. Cet aspect est d’autant plus important que l’estimation des pertes de ressources propres traditionnelles dans le cadre d’une procédure en manquement, au titre de l’article 258 TFUE, vise à placer l’État membre, pour la période litigieuse, dans une situation équivalente à celle où il aurait constaté correctement les droits et les aurait inscrits dans la comptabilité ( 296 ). Enfin, la fiabilité de la méthodologie choisie afin de déterminer les pertes de ressources propres traditionnelles du fait du manquement reproché est renforcée si le choix méthodologique retenu est accompagné par des précisions concernant les éventuelles méthodes alternatives, les résultats obtenus du fait de leur utilisation ainsi que les motifs pour lesquels la Commission a opté pour la méthodologie en cause.

4) Sur l’utilisation de la méthodologie fondée sur des données statistiques en l’espèce

287.

Tout d’abord, il convient de relever qu’il ressort des écrits des parties ainsi que du dossier dans son ensemble que, en raison de la nature de la violation des dispositions du droit douanier, peu de preuves directes ont été réunies pour apprécier l’ampleur des pertes de ressources propres traditionnelles en ce qui concerne les importations réalisées au Royaume‑Uni pendant la période d’infraction. Plus particulièrement, ces preuves se limitent, pour l’essentiel, à douze articles analysés en laboratoire par les autorités douanières britanniques en 2017 ( 297 ) et à des résultats de contrôle provenant des douanes chinoises ( 298 ). Or, de telles preuves ne sont pas représentatives pour apprécier la valeur en douane correcte des importations en cause et l’ampleur des pertes des ressources propres traditionnelles subies par le budget de l’Union en raison de la sous-évaluation frauduleuse des importations en cause ( 299 ). Ainsi que cela a déjà été exposé à plusieurs reprises dans le cadre des présentes conclusions, l’impossibilité de quantifier ces pertes résulte, en l’espèce, d’éléments objectifs, à savoir l’inaction du Royaume‑Uni face au risque connu de déclarations sous-évaluées. Dès lors, je partage la thèse de la Commission selon laquelle, dans la mesure où les marchandises sous-évaluées ont déjà été mises en libre pratique sur le territoire douanier de l’Union, leur valeur réelle ne peut plus être déterminée, si bien que le montant des pertes des ressources propres traditionnelles pour le budget de l’Union ne peut se calculer qu’au moyen d’une estimation rétrospective stricto sensu. Il me semble que ce point de départ n’est pas, en réalité, contesté par le Royaume‑Uni, dès lors qu’il présente, pour le cas où le manquement qui lui est reproché dans le cadre du premier moyen devrait être accueilli, sa propre méthode statistique pour déterminer les éventuelles pertes de ressources propres traditionnelles.

288.

Dans ce contexte, il y a lieu d’observer que, sur la base des données à leur disposition, les parties s’accordent sur le fait qu’il y avait une fraude douanière sur le territoire du Royaume‑Uni au cours de la période d’infraction, en raison d’une sous-évaluation de marchandises importées en provenance de Chine, et sur le fait que l’augmentation du volume des importations sous-évaluées a considérablement augmenté entre 2012 et 2016 ( 300 ). De même, il est constant, entre les parties, que l’opération Swift Arrow ( 301 ) a eu pour effet, si l’on compare les données du premier semestre 2017 et du premier semestre 2018, une diminution considérable du volume de produits concernés importés au Royaume‑Uni dont la valeur en douane était frauduleusement sous-évaluée, alors que le volume des importations légitimes est resté à un niveau comparable. Même si les parties restent en désaccord quant à l’interprétation qu’il convient de donner à ces faits, elles acceptent ce fait en tant que tel. Les parties ne s’opposent pas non plus s’agissant de la pertinence de l’utilisation, en principe, d’une méthodologie fondée sur des données statistiques afin d’apprécier les pertes de ressources propres traditionnelles en raison d’une fraude douanière, impliquant, dans un premier temps, la détermination du volume des importations frauduleusement sous-estimées au cours de la période d’infraction, puis la détermination de la valeur en douane « correcte » de ces marchandises. Dans un second temps, le montant des droits de douane supplémentaire est calculé sur la base de la différence entre la valeur déclarée et cette valeur « correcte ».

289.

En revanche, les parties sont en profond désaccord au sujet des éléments de base des méthodologies utilisées pour calculer les pertes de ressources propres traditionnelles. En premier lieu, en ce qui concerne la détermination du volume de marchandises sous-évaluées, selon la Commission, il convient de tenir compte du volume des importations situées en dessous du prix minimal acceptable, établi sur la base d’une valeur moyenne au niveau de l’Union-28 et des données agrégées quotidiennes figurant dans la base Surveillance 2, alors que, d’après le Royaume‑Uni, pour déterminer ce volume, il y a lieu de recourir à un « seuil de conformité », établi en fonction des valeurs déclarées à l’importation seulement au Royaume‑Uni, en dessous duquel les importations des produits concernés sont susceptibles d’être sous-évaluées ( 302 ). En second lieu, s’agissant de la valeur de référence pour « réévaluer » les marchandises sous-évaluées, la Commission estime qu’il convient de recourir à la différence entre la valeur déclarée et le prix moyen corrigé pour l’Union-28, alors que le Royaume‑Uni considère que les articles qui se situent en dessous du « seuil de conformité » peuvent être « réévalués » en calculant la différence entre la valeur déclarée (par article) et la valeur de ce même seuil. La différence dans les approches méthodologiques a pour effet une énorme disparité quant au résultat de l’estimation des pertes de ressources propres traditionnelles. Sur la base de la méthodologie OLAF, la Commission estime qu’un montant de 2679637088,86 euros (montant brut, à diminuer des frais de perception) aurait dû être mis à la disposition de la Commission en tant que ressources propres traditionnelles. Or, le Royaume‑Uni estime ce montant, dans un premier temps, à hauteur de 217646623 GBP ( 303 ), avant déduction au titre des avis de paiement C18 Breach ( 304 ). Dans un second temps, il revoit ce chiffre à la baisse, à hauteur de 143115553 GBP, desquels doivent être déduits 44296285 GBP au titre des avis de paiement C18 Breach. En résumé, l’une des différences les plus importantes entre les méthodes avancées par les parties réside dans le fait que, si l’approche de la Commission repose sur des prix moyens au niveau de l’Union dans son ensemble, la méthode britannique se fonde sur l’utilisation des seules données du Royaume‑Uni.

290.

Cela étant dit, il convient d’examiner successivement les deux étapes de la méthodologie sur laquelle s’est fondée la Commission pour estimer la perte des ressources traditionnelles, à savoir celle de la détermination du volume des importations sous-évaluées et celle de la valeur de référence pour « réévaluer » ces importations.

i) Sur la détermination du volume des importations sous-évaluées

291.

Le Royaume‑Uni fait valoir, d’une part, qu’il n’existe aucune justification convaincante pour utiliser le prix minimal acceptable déduit des prix moyens pour l’Union-28 pour déterminer le volume de marchandises sous-évaluées pendant la période d’infraction. D’autre part, cet État soutient qu’il ressort de la requête et des écritures de la Commission émises en phase précontentieuse que les pertes des ressources propres traditionnelles constatées sur la période allant de novembre 2011 à novembre 2014 se limitent aux droits de douane supplémentaires qui étaient réclamés par les autorités britanniques dans les avis de paiement C18 Snake, et qui ont été annulés.

292.

Compte tenu des arguments de défense susmentionnés avancés par le Royaume‑Uni, il est nécessaire, pour étudier la problématique de la détermination du volume des importations sous-évaluées pendant la période d’infraction, de l’examiner en deux temps, en prenant position, d’abord, sur la période allant de novembre 2011 à novembre 2014, puis sur les estimations effectuées par la Commission pour la période allant du 1er janvier 2015 au 11 octobre 2017.

– Sur la période allant de novembre 2011 à novembre 2014

293.

Concernant l’objet de la demande pour la période allant de novembre 2011 à novembre 2014, la Commission a précisé, en particulier, en réponse aux questions posées par la Cour, qu’elle reproche au Royaume‑Uni d’avoir manqué à ses obligations relatives au régime de ressources propres traditionnelles et qu’elle réclame à ce titre des montants relatifs aux importations sous-évaluées établies sur le fondement de la méthodologie OLAF.

294.

À cet égard, il résulte de l’article 120 du règlement de procédure de la Cour et de la jurisprudence y relative, que toute requête introductive d’instance doit indiquer l’objet du litige et l’exposé sommaire des moyens sur lesquels elle se fonde, et que cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et à la Cour d’exercer son contrôle. Il en découle que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels un recours est fondé doivent ressortir de façon cohérente et compréhensible du texte de la requête elle‑même et que les conclusions de cette dernière doivent être formulées de manière non équivoque afin d’éviter que la Cour ne statue ultra petita ou n’omette de statuer sur un grief ( 305 ). En particulier, le recours de la Commission doit contenir un exposé cohérent et détaillé des raisons l’ayant amenée à la conviction que l’État membre intéressé a manqué à l’une des obligations qui lui incombent en vertu des traités. Partant, une contradiction dans l’exposé du moyen soulevé par la Commission à l’appui de son recours en manquement ne satisfait pas aux exigences posées ( 306 ).

295.

En l’occurrence, j’observe que, s’agissant de l’évaluation des pertes de ressources propres traditionnelles présentées dans la requête, la Commission a explicitement indiqué que la période allant de novembre 2011 à novembre 2014 était « couverte en raison des dettes que le Royaume‑Uni lui‑même a constatées et annulées par la suite ». En outre, dans la partie de la requête relative à la description du manquement, la Commission consacre de longs développements pour caractériser le manquement en raison de l’erreur administrative commise lors de l’annulation des avis de paiement C18 Snake ( 307 ). Selon elle, par cette erreur administrative, dont les autorités britanniques sont financièrement responsables, le Royaume‑Uni a causé des pertes des ressources propres traditionnelles dans le budget de l’Union. Il me semble que, ce faisant, la requête parvient à démontrer un lien entre l’erreur administrative imputable au Royaume‑Uni, d’une part, et les pertes de ressources propres traditionnelles que cet État serait tenu de mettre à la disposition de la Commission, d’autre part. Dans sa réplique, la Commission a ajouté que le « présent recours en manquement concerne les dettes douanières constatées par le Royaume‑Uni dans le cadre de [l’opération] Snake ».

296.

Il me semble donc que, par ces indications, en ce qui concerne cette période, la Commission a elle‑même limité l’objet du deuxième moyen aux pertes de ressources propres traditionnelles dont le Royaume‑Uni serait responsable en raison des dettes que cet État lui‑même a constatées dans le cadre de l’opération Snake, ce qui comprend, notamment, les 23 avis de paiement C18 Snake, qui ont été adressés aux opérateurs et annulés par la suite. Une telle lecture est, à mon avis, corroborée par les griefs formulés par la Commission dans la lettre de mise en demeure et dans l’avis motivé. Ainsi, il ressort de la lettre de mise en demeure que, « sur la base des 24 dettes établies et annulées ultérieurement, les montants à titre de ressources propres pour la période concernée (novembre 2011‑2014) sont dus » ( 308 ). Il importe également de souligner que l’avis motivé contient, dans un premier temps, la même formulation que celle figurant dans la requête, et précise, dans un second temps, de manière sans équivoque, que « pour autant que cet argument du Royaume‑Uni vise à limiter la portée temporelle de l’infraction, il y a lieu d’observer que la réclamation de la Commission pour la période allant de 2011 à la fin de l’[opération] Snake en 2014 porte sur les montants concernés par les ordres de recouvrement a posteriori que les douanes britanniques ont émis après cette opération, avant de les annuler ensuite » ( 309 ).

297.

Il résulte des considérations qui précèdent que, en ce qui concerne la période allant de novembre 2011 à novembre 2014, l’objet du deuxième moyen est limité à la constatation des pertes de ressources propres traditionnelles dont le Royaume‑Uni est responsable en raison des dettes douanières supplémentaires constatées dans le cadre de l’opération Snake et, notamment, des 23 avis de paiement C18 Snake qui ont été annulés à la suite d’erreurs administratives imputables à cet État membre ( 310 ).

– Sur la période allant du 1er janvier 2015 au 11 octobre 2017

298.

En ce qui concerne la période allant du 1er janvier 2015 au 11 octobre 2017, afin de déterminer les montants des pertes de ressources propres traditionnelles et, notamment, les volumes des importations sous-évaluées, la Commission utilise, dans sa requête, la méthodologie OLAF. L’approche de la Commission est que le volume des importations déclarées à une valeur inférieure à un seuil de risque de 50 % du prix moyen corrigé sert de fondement à la détermination du montant de ces pertes, qui correspond ainsi au montant des ressources propres traditionnelles que le Royaume‑Uni aurait perçu et mis à disposition de l’Union s’il avait satisfait à ses obligations. Selon le Royaume‑Uni, ce choix opéré par la Commission est arbitraire. Il conteste ainsi l’approche selon laquelle toute déclaration de marchandises en dessous de ce seuil constitue, de manière automatique, une déclaration sous-évaluée, et estime qu’une telle circonstance est simplement de nature à justifier l’existence de doutes pouvant conduire à des contrôles supplémentaires.

299.

À cet égard, il y a lieu d’observer que la Commission partage, en principe, l’approche selon laquelle toute marchandise importée dont la valeur déclarée est inférieure au prix moyen des produits de même catégorie ne saurait, en principe, être considérée comme étant par définition sous-évaluée, en soutenant que la méthodologie OLAF n’a pas été appliquée à l’ensemble des marchandises importées au Royaume‑Uni et déclarées à une valeur inférieure au seuil de 50 % du prix corrigé moyen, mais qu’elle utilise des agrégats quotidiens. Ce recours aux agrégats quotidiens aurait pour effet que, si certains lots de marchandises ont une valeur inférieure au seuil de 50 % du prix corrigé moyen et que d’autres lots permettent d’avoir une moyenne au-dessus du prix minimal acceptable journalier à l’échelle de l’Union-28, la moyenne de l’agrégat journalier sera supérieure au prix minimal acceptable, si bien que l’agrégat journalier comprenant ces lots sous-évalués ne sera pas inclus dans les pertes de ressources calculées ( 311 ). Cette institution affirme que, si l’utilisation de données journalières agrégées risque d’entraîner l’inclusion de certaines importations légitimes dans le volume d’importations déclarées en dessous du prix minimal acceptable, la méthodologie OLAF exclut, notamment, une certaine proportion de marchandises sous-évaluées. Il me semble que, dans ses réponses écrites aux questions de la Cour, le Royaume‑Uni renonce à sa position antérieure et est, en réalité, d’accord avec cet argument de la Commission, dès lors qu’il indique que la seule raison pour laquelle la somme calculée par la Commission au titre des ressources propres traditionnelles est beaucoup plus importante que celle calculée selon la méthode du Royaume‑Uni est que la méthodologie OLAF utilise des prix de « réévaluation » beaucoup plus élevés ( 312 ).

300.

En conclusion, s’agissant de la différence d’approche des parties en ce qui concerne le volume des marchandises sous-évaluées importées pendant la période d’infraction, prises en compte pour le calcul des pertes des ressources propres traditionnelles, elle peut s’expliquer, de toute évidence, par les seuils différents choisis par ces parties. En effet, tandis que la méthodologie OLAF est fondée sur le prix minimal acceptable constituant 50 % du prix moyen corrigé pour l’Union‑28, le Royaume‑Uni préconise un calcul basé sur des déclarations d’importation individuelles collectées par les autorités douanières britanniques pour définir le seuil de sous-évaluation ( 313 ). Compte tenu des différences entre ces critères et du fait que, tant la méthodologie OLAF que celle proposée par le Royaume‑Uni visent à évaluer toutes les deux les mêmes pertes, mais à un niveau différent, c’est‑à‑dire, respectivement, du point de vue de l’Union dans son ensemble et du point de vue de l’État concerné, je suis d’avis que la méthodologie avancée par ce dernier pourrait former une référence de comparaison pertinente pour apprécier de manière critique les volumes d’importations sous-évalués pendant la période d’infraction calculés sur la base de la méthodologie OLAF. En répondant aux questions de la Cour sur le point de savoir quel serait l’impact éventuel sur le montant de la perte des ressources propres si le seuil de sous-évaluation britannique était utilisé, au lieu du prix minimal acceptable comme valeur de référence des importations sous-évaluées par la Commission, le Royaume‑Uni a observé que, bien qu’il ne pût pas reproduire exactement les calculs de cette institution, le pourcentage de réduction des pertes des ressources propres traditionnelles estimé serait de 4,4 ou de 4,7 %. Dès lors, ainsi que le Royaume‑Uni l’a indiqué à juste titre, je considère que l’énorme différence entre l’estimation des pertes des ressources propres traditionnelles avancée par la Commission et celle préconisée par le Royaume‑Uni dans le cadre de la présente affaire s’explique principalement par la valeur de référence pour la « réévaluation » des marchandises sous-déclarées plutôt que par le volume ( 314 ).

301.

Il résulte de ce qui précède que la méthode de la Commission ne surestime pas de manière manifeste le volume des marchandises sous-évaluées pendant de la période d’infraction. Prenant en considération la longueur de ladite période, ainsi que la nature de la fraude en question, il me semble que les positions des parties concernant cet élément ne divergent pas significativement dans la mesure où le décalage de moins de 5 % entre les estimations opérées, respectivement par la Commission et par le Royaume‑Uni, reste dans des limites raisonnables. Partant, il y lieu d’accueillir les estimations des volumes des importations sous-évaluées, en tant que base pour déterminer les montants de pertes des ressources propres traditionnelles, telles qu’avancées par la Commission dans sa requête.

ii) Sur la valeur de référence pour déterminer les montants des pertes des ressources propres

302.

Ainsi que cela a déjà été relevé dans le cadre des présentes conclusions, les positions des parties divergent principalement sur le point de savoir à quel niveau de prix devrait être effectué la « réévaluation » des marchandises considérées comme étant sous-évaluées pour calculer les droits de douane supplémentaires et pour déterminer l’ampleur des pertes des ressources propres traditionnelles pour le budget de l’Union. Selon la Commission, une telle correction doit s’opérer au niveau des prix moyens corrigés, dans la mesure où, d’une part, le prix des textiles et des chaussures ne varie pas de manière significative au fil du temps et où, d’autre part, en l’absence de contrôles physiques et d’échantillons prélevés par les autorités douanières britanniques à un niveau statistiquement représentatif, il y a lieu de supposer que les prix et la qualité des marchandises sous-évaluées correspondent à la répartition des prix non concernés par la sous-évaluation. Le Royaume‑Uni estime, en revanche, que ce choix méthodologique n’est pas justifié, car aucune preuve ne permet d’étayer l’hypothèse selon laquelle les marchandises sous-déclarées ont les mêmes caractéristiques de prix et de qualité que les autres marchandises importées de Chine. Au contraire, les éléments recueillis sembleraient indiquer que les importations sous-évaluées visaient le segment bas de gamme du marché britannique.

303.

À cet égard, comme je l’ai déjà souligné, la valeur de référence, en tant que critère normatif, ne saurait être arbitraire et vise à placer l’État membre, pour la période litigieuse, dans une situation équivalant à celle où il aurait constaté correctement les droits et les aurait inscrits dans sa comptabilité. En effet, j’estime que la valeur de référence devrait être en conformité avec l’ensemble des circonstances factuelles et juridiques du manquement en cause, dès lors qu’il s’agit de l’un des critères de base dans la détermination de l’ampleur des pertes de ressources propres traditionnelles ( 315 ).

304.

Tout d’abord, il ressort de l’analyse de la Commission, qui n’est d’ailleurs pas contestée, en substance, par le Royaume‑Uni, que les importations sous-évaluées de textiles et de chaussures en provenance de Chine ont été, pour la plupart, en termes de volume, effectuées sous le régime douanier 42, c’est‑à‑dire qu’elles étaient destinées à d’autres États membres du territoire douanier de l’Union. À titre d’exemple, il ressort du rapport de l’OLAF que, en 2016, 87 % des importations de produits textiles et de chaussures de faible valeur entrées par le Royaume‑Uni ont été effectuées sous le régime douanier 42, alors que, au cours de la même période, le régime douanier 40 n’a été utilisé que pour 13 % des importations de produits textiles et de chaussures en provenance de Chine. Cette disparité confirme, me semble-t-il, le déplacement, vers le Royaume‑Uni, d’opérations frauduleuses menées à destination d’autres États membres ( 316 ). À mon avis, c’est également à juste titre que la Commission soutient que, s’agissant de la perception des droits de douane, il n’y a pas lieu de faire la distinction entre les marchandises relevant de ces deux régimes douaniers dans la mesure où les 13 % d’importations restantes déclarées sous le régime douanier 40 auraient pu être acheminées vers d’autres États membres une fois le dédouanement effectué au Royaume‑Uni. Il s’ensuit que la grande majorité des importations sous-évaluées étaient directement ou indirectement dirigées vers le marché des produits textiles et des chaussures de l’Union dans son ensemble et non spécifiquement vers le marché britannique, de sorte qu’il n’existe aucune raison raisonnable de les « réévaluer » sur la base d’une valeur de référence différente de celle qui caractérise le niveau des prix des produits concernés de l’Union dans leur ensemble.

305.

Ensuite, il ressort des écrits que le Royaume‑Uni critique l’utilisation de la valeur de référence fondée sur les prix moyens corrigés basés sur les prix moyens à l’échelle de l’Union, au motif qu’elle ne tient pas compte de la qualité des marchandises concernées et de leur État membre d’entrée, d’autant que la Commission n’a pas apporté la preuve de la valeur des marchandises en cause. Dès lors, les données qui sont propres au Royaume‑Uni devraient être préférées audit prix moyen corrigé de l’Union. À cet égard, comme cela a déjà été exposé dans le cadre des présentes conclusions ( 317 ), il est difficile de reprocher à la Commission de ne pas avoir apporté les preuves directes relatives à la valeur des importations sous-évaluées, dans la mesure où cette omission est la conséquence de l’inaction des autorités douanières britanniques. Je suis d’avis que, en l’absence de preuves directes concernant la valeur des marchandises en cause, une preuve fondée sur les données statistiques, telle que celles en cause, peut être admise dans le cadre d’un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE afin de déterminer les pertes de ressources propres pour le budget de l’Union.

306.

En outre, s’agissant de ces critiques, il convient de rappeler que la détermination de l’ampleur des pertes de ressources propres dans le cas d’espèce doit viser à déterminer quelle aurait dû être la contribution de l’État membre concerné au budget de l’Union à la suite de la perception de droits de douane au cours de la période d’infraction, en l’absence des irrégularités décrites dans le cadre du premier moyen du présent recours. Les recettes provenant des droits de douane constituent, ainsi que cela a déjà été relevé ( 318 ), des ressources propres traditionnelles de l’Union, qui doivent être mises à la disposition de l’Union par les États membres, en vertu des dispositions combinées des règlements nos 1150/2000 et 609/2014 ( 319 ). La perception des droits de douane à l’importation est précédée par la détermination de la valeur en douane des marchandises et par le calcul des droits de douane afférents à celles‑ci, ces deux éléments constituant des étapes préalables à la mise en libre pratique des marchandises importées sur le territoire douanier de l’Union et à leur mise à la consommation définitive. Dès lors, s’agissant notamment des droits de douanes, l’estimation des pertes pour le budget de l’Union résultant de l’absence de contrôles douaniers ne peut pas être fondée sur la destination éventuelle des marchandises concernées sur le marché individuel d’un État membre et, notamment, sur les segments inférieurs ou supérieurs de ce marché en termes de qualité de produits, ce qui revêt, en l’absence de preuve directe, un caractère spéculatif, étant donné que la valeur en douane des marchandises importées dans l’Union est déterminée par les autorités douanières compétentes. Par conséquent, je ne peux que partager l’argument du Royaume‑Uni selon lequel la valeur en douane des marchandises correspond à leur coût d’achat à l’exportateur, cette valeur étant déterminée par la nature et la qualité des marchandises, et non par leur destination ( 320 ). Il s’ensuit que, afin de déterminer la valeur en douane des marchandises à l’entrée du territoire de l’Union, l’identification de l’État membre de destination est dénuée de pertinence, de sorte que c’est à bon droit que, pour déterminer l’ampleur des pertes de ressources propres traditionnelles en raison d’une fraude douanière causée par la sous-évaluation des marchandises, la Commission n’a opéré aucune distinction en fonction de la destination des produits concernés au sein de l’Union ( 321 ).

307.

À titre surabondant, s’agissant du choix du prix moyen corrigé pour l’Union-28, en tant que valeur de référence pour évaluer l’ampleur des pertes des ressources propres traditionnelles pour le budget de l’Union, ainsi que cela a déjà été relevé dans les présentes conclusions ( 322 ), d’une part, l’Union forme une union douanière unique, de sorte que l’adoption de la réglementation en matière douanière relève de la compétence exclusive de l’Union. D’autre part, la perception des droits de douane, calculés sur les importations en provenance de pays tiers, détermine la taille du budget de l’Union. J’en déduis que, dans un cas comme celui en cause, où c’est en raison de l’inaction des autorités nationales qu’il n’existe pas de preuve directe permettant de déterminer l’ampleur des pertes des ressources propres, il convient de confirmer l’approche méthodologique de la Commission fondée sur une référence commune, sans tenir compte des spécificités de chaque État membre, telles que le niveau de vie et le pouvoir d’achat de sa population, qui sont susceptibles de dicter les prix de vente des produits concernés dans chacun des États membres, pris individuellement. Pour ces raisons, je suis d’avis qu’il y a lieu d’entériner l’approche de la Commission consistant à retenir, en tant que valeur de référence, les prix moyens corrigés à l’échelle de l’Union, ces dernier s’appuyant eux‑mêmes sur les valeurs déclarées par les États membres dans la base de données commune Surveillance 2 ( 323 ). Cette valeur de référence constitue donc celle qui aurait dû être appliquée pour calculer les ressources propres traditionnelles mises à disposition du budget de l’Union s’il y avait eu application correcte du droit douanier de l’Union. Dans la mesure où cette méthodologie est fondée sur la moyenne des prix déclarés, cette valeur reflète la nature et la qualité de tous les produits importés pendant la période d’infraction, sans attribuer une préférence quelconque aux segments de marché auxquels appartiennent les marchandises en cause. Étant donné que les parties ne contestent pas la prémisse selon laquelle les produits textiles et de chaussures en provenance de Chine en cause sont des produits dont les prix sont assez stables ( 324 ), il y a lieu de considérer, à mon sens, que les prix moyens corrigés sur l’échelle de l’Union constituent une valeur de référence appropriée et non arbitraire pour évaluer les pertes aux ressources propres pour le budget de l’Union ( 325 ).

5) Résumé relatif à l’évaluation des ressources propres traditionnelles

308.

Eu égard aux considérations exposées, j’estime que les arguments avancés par la Commission, dans sa requête, ne mettent pas la Cour en mesure de se prononcer avec certitude sur l’étendue exacte des pertes des ressources propres traditionnelles visée par le présent recours.

309.

En premier lieu, en ce qui concerne la période allant de novembre 2011 à novembre 2014, l’objet de la requête est, comme cela a été exposé précédemment dans les présentes conclusions ( 326 ), limité aux dettes correspondant aux avis de paiement C18 Snake. Ainsi, les pertes de ressources propres traditionnelles dont la constatation peut être demandée par la Commission doivent être logiquement celles qui résultent de l’annulation de ces avis de paiement, et ne sauraient être plus élevées que celles‑ci. Toutefois, dans sa requête, la Commission a formulé une demande correspondant à des pertes de ressources propres de l’Union, pour la période susmentionnée, de l’ordre de 1001511991,60 euros ( 327 ). À cet égard, comme l’observe, à mon avis, à juste titre le Royaume‑Uni, ce montant ne reflète pas l’argumentation de la Commission dont il découle que, pour la période susvisée, sa demande porte sur les montants concernés par les avis de paiement C18 Snake émis par les douanes britanniques, qui ont été annulés par la suite. Il convient de souligner que, bien que ces autorités aient fixé la valeur en douane des marchandises identifiées comme étant sous-évaluées dans le cadre de l’opération Snake en appliquant les prix moyens corrigés à l’échelle de l’Union, ce qui était une erreur administrative imputable au Royaume‑Uni ( 328 ), l’estimation des pertes de ressources propres liées aux avis de paiement C18 Snake ne serait susceptible, en aucun cas, de dépasser 357 millions de GBP ( 329 ). En outre, selon le Royaume‑Uni, le montant qui résulte des avis de paiement C18 Snake notifiés aux opérateurs s’élève à 192568694,30 GBP ( 330 ). Cette contradiction entre, d’une part, les montants réclamés dans les conclusions de la requête et, d’autre part, les motifs de la requête, en tant que fondement de la demande de constatation des pertes de ressources propres pour la période d’infraction, ne s’explique, selon moi, que par la sélection erronée de la base de référence effectuée par la Commission, qui consiste à inclure dans son calcul, outre les montants liés au recouvrement des avis de paiement C18 Snake, toutes les importations sous-évaluées pour ladite période sur le fondement des données statistiques. En l’espèce, dès lors que d’importantes incertitudes demeurent quant à l’exactitude du montant demandé par la Commission pour la période allant de novembre 2011 à novembre 2014 au titre des pertes de ressources propres pour le budget de l’Union, j’estime qu’elle n’a pas démontré à suffisance de droit l’intégralité de celui‑ci.

310.

En second lieu, il résulte de ce qui précède que la méthodologie OLAF que la Commission a appliquée pour estimer les pertes de ressources propres traditionnelles pour la période allant du 1er janvier 2015 au 11 octobre 2017 revêt un caractère approprié et non arbitraire, de sorte qu’elle peut être utilisée pour déterminer le volume des marchandises sous-évaluées pendant la période d’infraction et pour déterminer la valeur de référence aux fins de leur « réévaluation ».

311.

Si la Cour peut, en principe, faire droit à la demande de la Commission de quantifier le montant des ressources propres traditionnelles en ce qui concerne la période allant du 1er janvier 2015 au 11 octobre 2017, se pose néanmoins la question de savoir si, s’agissant de la période allant du 1er mai 2015 au 11 octobre 2017, correspondant aux droits de douanes supplémentaires visés par les avis de paiement C18 Breach émis, à partir du mois de mai 2018, dans le cadre de l’opération Breach, les montants visés par ces avis de paiement doivent être « comptabilisés » dans l’estimation du montant dont la constatation est demandée par la Commission. À cet égard, le Royaume‑Uni affirme qu’il a réclamé un total de 25 millions de GBP de droits de douane auprès de 27 opérateurs et a inscrit les montants correspondants ( 331 ) dans la comptabilité B ( 332 ). Plus particulièrement, le Royaume‑Uni soutient que la Commission, alors qu’elle avait connaissance de huit de ces avis de paiement depuis le mois de mai 2018 ( 333 ), n’a pas déduit les montants correspondants auxdits avis de paiement de son estimation des montants des pertes de ressources propres traditionnelles. La décision de procéder à cette inscription n’aurait été contestée ni dans l’avis motivé ni dans la requête, alors que, pour huit de ces avis de paiement C18 Breach, les inscriptions dans la comptabilité B dateraient de mai 2018, de sorte que la Commission en avait connaissance pendant la période précontentieuse. La Commission, quant à elle, réplique que le Royaume‑Uni a refusé, tout au long de la période précontentieuse et contentieuse, de communiquer le détail de ses calculs (et notamment d’indiquer les déclarations, les volumes et les valeurs de « réévaluation » utilisées), de sorte qu’elle n’était pas en mesure de séparer ces importations du volume total d’importations couvertes par l’approche fondée sur les données agrégées quotidiennes de Surveillance 2.

312.

À cet égard, en vertu de la jurisprudence constante, un recours en manquement sur le fondement de l’article 258 TFUE ne peut être exercé que lorsque l’État membre en cause ne s’est pas conformé à l’avis motivé dans le délai imparti dans ce dernier ( 334 ). L’existence d’un manquement doit, par conséquent, être appréciée en fonction de la situation de l’État membre telle qu’elle se présentait au terme de ce délai ( 335 ). En l’espèce, il ressort du mémoire en défense, sans que cet élément de fait soit contesté par la Commission, que le Royaume‑Uni a émis, au cours du mois de mai 2018, et donc avant la date d’expiration du délai fixé dans l’avis motivé du 24 septembre 2018, huit avis de paiement C18 Breach, qui portaient sur la période commençant le 1er mai 2015. Ainsi, étant donné que la Commission en avait connaissance avant la communication de l’avis motivé, elle aurait dû inclure les montants à ce titre dans l’avis motivé émis le 24 septembre 2018. Dès lors, en vue du calcul du montant définitif dû pour la période du 1er mai au 11 octobre 2017, le Royaume‑Uni ne peut prétendre qu’à la déduction des huit avis de paiement C18 Breach. Pour déterminer si les montants correspondant auxdits huit avis de paiement doivent être pris en considération, aux fins de la présente affaire, ainsi que cela a été relevé à plusieurs reprises dans le cadre des présentes conclusions, il convient de tenir compte de l’article 13, paragraphe 1, du règlement no 609/2014 et de l’article 17, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000, qui imposent aux États membres de mettre à la disposition de la Commission tous montants correspondant aux droits constatés ( 336 ). Or, il ne ressort pas du dossier, et il n’est d’ailleurs pas soutenu par les parties, que les huit avis de paiement C18 Breach en cause soient devenus irrécouvrables, en vertu de l’article 13, paragraphe 2, deuxième et troisième alinéas, du règlement no 609/2014, ni qu’il s’agisse des créances prescrites au sens de l’article 103 du code des douanes de l’Union ( 337 ). Il s’ensuit que, à ce jour, les montants correspondant à ces huit avis de paiements devraient, en principe, être déduits du montant de l’estimation des ressources propres traditionnelles pour la période de 2015 à 2017, d’autant plus que, dans sa réponse écrite aux questions de la Cour, le Royaume‑Uni a produit des éléments pour procéder à cette soustraction ( 338 ). Toutefois, je suis d’avis que, dans le cadre d’une procédure en manquement au titre de l’article 258 TFUE, il n’incombe pas à la Cour de se substituer à la Commission, en calculant elle‑même le montant précis correspondant auxdits huit avis de paiement C18 Breach, ni de les « déduire » du montant demandé par la Commission au titre des pertes de ressources propres pour le budget de l’Union.

313.

Sur la base des considérations qui précèdent, j’arrive à la conclusion que le deuxième moyen doit être accueilli pour autant qu’il vise à faire constater le manquement du Royaume‑Uni aux dispositions relatives aux ressources propres susmentionnées, mais que la demande de la Commission consistant à quantifier le montant des ressources propres traditionnelles doit être rejetée.

314.

Je propose donc que la Cour constate que, s’agissant de la période allant de novembre 2011 à novembre 2014, le Royaume‑Uni n’a pas mis à disposition le montant correct des ressources propres traditionnelles relatives aux importations frauduleuses qu’il a constatées dans le cadre de l’opération Snake et aux avis de paiement C18 Snake annulés par la suite, et que, ce faisant, il a violé les articles 2 et 8 des décisions 2007/436 et 2014/335, ainsi que les articles 2, 6, 9, 10, 11 et 17 du règlement no 1150/2000, auxquels correspondent, respectivement, les articles 2, 6, 9, 10, 12 et 13 du règlement no 609/2014. Toutefois, je propose à la Cour de rejeter intégralement la demande figurant au troisième alinéa du premier chef des conclusions de la requête, pour autant qu’il vise cette période, en ce que la Commission n’a pas démontré l’exactitude des montants y figurant.

315.

En ce qui concerne la période allant du 1er janvier 2015 au 11 octobre 2017, je conclus que le Royaume‑Uni a manqué aux dispositions susmentionnées en ne mettant pas à disposition les montants dus. Toutefois, dès lors que le montant correspondant à huit avis de paiement C18 Breach devrait être soustrait du montant des ressources propres traditionnelles et qu’il n’appartient pas à la Cour de se substituer à la Commission pour cette détermination, le montant des ressources propres traditionnelles pour la période du 1er janvier 2015 au 11 octobre 2017 ne peut pas être déterminé dans le cadre du présent recours.

316.

Si la Cour suit ma proposition de conclusion relative au deuxième moyen, la question relative au taux de change devant être utilisé pour calculer le montant des pertes de ressources propres devient sans objet. C’est donc à titre subsidiaire, et seulement dans l’hypothèse où la Cour déciderait de quantifier le montant réclamé par la Commission au titre de pertes de ressources propres traditionnelles, que j’examine ci‑après brièvement le bien‑fondé de cet argument.

4.   Sur les intérêts de retard

317.

S’agissant de l’exception d’irrecevabilité soulevée par le Royaume‑Uni selon laquelle la conclusion de la Commission au titre des intérêts de retard, en vertu de l’article 12 du règlement no 609/2014 serait irrecevable, dès lors que, dans son avis motivé, la Commission n’aurait fait mention d’aucun manquement en ce qui concerne le paiement d’intérêts de retard, j’observe que cet avis mentionne explicitement, notamment, l’article 12 de ce règlement ( 339 ), qui correspond à l’article 11 du règlement no 1150/2000. La requête n’élargit donc pas la portée du litige établie dans l’avis motivé, contrairement à ce que fait valoir cet État, de sorte que cette exception d’irrecevabilité doit être rejetée.

318.

La Commission estime que, compte tenu de l’existence d’un lien indissociable entre, d’une part, les obligations de constater les ressources propres de l’Union et de les inscrire au compte de la Commission dans les délais impartis, et, d’autre part, celle de verser des intérêts de retard ( 340 ), le Royaume‑Uni était tenu de verser ces intérêts au titre de l’article 12 du règlement no 609/2014. En se référant au libellé de cette disposition, elle considère que le montant des intérêts ne sera calculé qu’une fois que le Royaume‑Uni aura mis le montant principal à disposition, mettant ainsi fin à son retard d’inscription des montants des ressources propres traditionnelles en question sur ce compte. En réponse, le Royaume‑Uni soutient que la demande relative aux intérêts de retard est irrecevable, dans la mesure où il est prématuré de formuler une telle demande, étant donné que cette obligation d’acquitter les intérêts de retard ne naîtrait qu’à un moment ultérieur. À cet égard, comme cela a déjà été expliqué précédemment ( 341 ), la jurisprudence de la Cour établit l’existence d’un lien indissociable entre, d’une part, l’ obligation de constater les ressources propres de l’Union et de les inscrire au compte de la Commission dans les délais impartis et, d’autre part, celle de verser des intérêts de retard. L’obligation d’inscription au compte des ressources propres et l’obligation de verser des intérêts pour l’inscription tardive au compte sont, l’une vis-à-vis de l’autre, une obligation principale et une obligation accessoire ( 342 ). Il en découle que, si la Cour accueille le deuxième moyen et considère que le Royaume‑Uni a manqué à ses obligations aux titres de la constatation et de l’inscription des ressources propres, alors il s’ensuit que cet État est tenu de verser des intérêts de retard. Par souci de complétude, je note que les parties semblent être d’accord sur le fait que, lorsque le Royaume‑Uni acquittera les montants en cause, il conviendra d’y appliquer le plafond de 16 % prévu à l’article 1er, paragraphe 6, du règlement 2016/804 ( 343 ).

D. Sur la violation du principe de coopération loyale consacrée à l’article 4, paragraphe 3, TUE

319.

Le grief tiré d’une violation de l’obligation de coopération loyale telle que consacrée à l’article 4, paragraphe 3, TUE me semble devoir être examiné de manière autonome pour autant qu’il concerne les allégations de la Commission relatives à l’absence de communication d’informations ( 344 ). En effet, par ce grief, la Commission reproche à cet État d’avoir refusé de lui fournir, d’une part, une copie de l’évaluation juridique ou de toute autre indication concernant le contenu de cette évaluation qui a conduit à l’annulation des avis de paiement C18 Snake et, d’autre part, tous les éléments nécessaires à la détermination des pertes de ressources propres traditionnelles qui en résultaient. Or, ces allégations sont indépendantes de l’argument avancé par la Commission, dans le cadre de son premier moyen, selon lequel le défaut de prendre des mesures de contrôles douaniers constituerait un manquement à l’obligation pour les autorités douanières de prendre des mesures visant à protéger les intérêts financiers de l’Union.

320.

Il convient, d’emblée, de rappeler qu’il résulte du principe de coopération loyale, consacré à l’article 4, paragraphe 3, TUE, que les États membres sont tenus de prendre toutes les mesures propres à garantir la portée et l’efficacité du droit de l’Union ( 345 ). Il doit être souligné qu’il appartient aux États membres, en vertu de l’article 4, paragraphe 3, TUE, de faciliter à la Commission l’exécution de sa mission, qui consiste, notamment, selon l’article 17, paragraphe 1, TUE, à veiller à l’application des dispositions des traités ainsi que des dispositions prises par les institutions en vertu de ceux‑ci ( 346 ).

321.

En l’espèce, en premier lieu, en ce qui concerne le premier reproche de la Commission ( 347 ), il ressort du dossier que cette institution avait demandé à ce que le Royaume‑Uni fournisse la copie de l’évaluation juridique en cause, qui justifiait l’annulation des avis de paiement C18 Snake ( 348 ). Dans sa réponse du 22 juin 2018 à la lettre de mise en demeure, le Royaume‑Uni a indiqué que l’annulation des dettes avait été décidée en toute indépendance par l’agent réviseur ( 349 ) et sans que celui‑ci se fonde sur une évaluation juridique quelconque, cet État contestant d’ailleurs l’existence même de cette dernière. En lieu et place, les autorités nationales se sont bornées à fournir des copies de plusieurs lettres d’annulation émises. Le Royaume‑Uni souligne que l’évaluation juridique en cause aurait concerné les procédures de liquidation engagées contre certains opérateurs, mais qu’elle n’aurait pas conduit à l’annulation des avis de paiement C18 Snake.

322.

À cet égard, il convient de relever que, dans le contexte particulier de la divulgation de documents douaniers, afin d’aider la Commission dans sa mission de veiller au respect des traités, les États membres doivent notamment lui fournir les données utiles pour vérifier la régularité des versements des ressources propres ( 350 ). Il s’ensuit, à mon sens, que, même si l’évaluation juridique en cause n’était pas pertinente afin d’examiner le fondement juridique de la décision d’annulation adoptée par l’agent réviseur, la Commission était en droit d’exiger que l’État membre lui fournisse ce document, dès lors qu’il résulte du dossier que cet État avait reconnu à plusieurs reprises l’existence de celui‑ci ( 351 ). Il doit également être souligné que, si c’est en raison des explications avancées par le Royaume‑Uni que la Commission a forgé sa façon d’appréhender l’évaluation juridique en tant que fondement de l’annulation des avis de paiement C18 Snake, c’est du fait de l’absence de recouvrement des montants dus en vertu de ces avis qu’elle a formulé sa demande tendant à obtenir la production du document en cause, dans la mesure où ils concernaient les ressources propres traditionnelles de l’Union et, donc, le budget de cette dernière. La circonstance selon laquelle il est apparu ultérieurement que l’annulation des avis de paiement C18 Snake était causée par d’autres motifs ne change en rien, à mon sens, au bien‑fondé de cette demande de la Commission, qui relève de sa mission susmentionnée.

323.

J’observe que les parties ne s’opposent pas, en principe, sur la non‑production de l’évaluation juridique en cause par le Royaume‑Uni. Ce dernier, sans nier l’absence de cette production, soutient, néanmoins, que, même si les avis de paiement C18 Snake ont été annulés sur la base de l’évaluation juridique en cause, plutôt que sur une décision indépendante de l’agent réviseur, cette évaluation serait, en tout état de cause, protégée par le secret professionnel et qu’il ne serait pas possible de déroger à la protection fondamentale de son caractère confidentiel. Selon lui, l’obligation de mettre les documents utiles à la disposition de la Commission est soumise à des « conditions raisonnables » ( 352 ), de sorte qu’il ne lui incombait pas de communiquer ce document à la Commission.

324.

Cette argumentation ne peut, à mon sens, être retenue. À cet égard, j’estime, ainsi que la Commission l’a souligné à juste titre, que cette obligation découle d’une interprétation erronée de l’arrêt Commission/Italie ( 353 ) invoqué par le Royaume‑Uni. En effet, il apparaît que, dans cette affaire, la Commission avait demandé à la République italienne un relevé justifiant l’ensemble des montants en cause, incluant les références à tous les documents douaniers sous‑jacents. C’est en répondant à l’argument avancé par cet État membre, selon lequel la demande présentée par la Commission nécessitait un « travail de préparation considérable nécessaire », en raison duquel il ne pouvait pas y donner une suite favorable « dans le délai imposé » ( 354 ), que la Cour a relevé que, lorsque la Commission demande des documents, elle doit le faire dans des conditions raisonnables. En conséquence, cet arrêt ne me semble pas pertinent pour la présente affaire et j’observe qu’il n’est pas relatif à la problématique concernant la divulgation de documents couverts par le secret professionnel.

325.

S’agissant, notamment, de l’argument de défense avancé par le Royaume‑Uni selon lequel l’évaluation juridique en cause était protégée par le « secret professionnel », lui conférant un caractère confidentiel, j’estime que celui‑ci n’a pas démontré, en l’espèce, pour quel motif un document rédigé par des services des HMRC, au moyen d’un agent réviseur, qui semble relever également de cette autorité ( 355 ) même s’il était couvert par le secret professionnel, ne pouvait être divulgué à la Commission. En effet, dès lors que l’évaluation juridique en cause était adressée à un service appartenant à la même autorité, elle semble relever de la jurisprudence de la Cour concernant les avis in-house ( 356 ). Il importe de rappeler, par ailleurs, que, selon une jurisprudence bien établie, un État membre ne saurait exciper de dispositions, de pratiques ou de situations de son ordre juridique interne pour justifier l’inobservation des obligations résultant du droit de l’Union ( 357 ). Il s’ensuit que le Royaume‑Uni ne saurait, afin de justifier la non‑exécution de son obligation de coopération susmentionnée, se prévaloir de ce type de difficultés pour justifier sa décision de ne pas divulguer à la Commission des documents relatifs aux avis de paiements C18 Snake.

326.

En ce qui concerne le second reproche relatif à la violation du principe de coopération loyale formulé par la Commission ( 358 ) selon lequel le Royaume‑Uni n’a pas fourni toutes les informations nécessaires pour déterminer les montants des pertes de ressources propres qui résultent des avis de paiement C18 Snake, malgré les demandes répétées de la Commission, il me semble que cet État ne remet pas en cause, en réalité, ces allégations. En outre, il ressort du dossier que ce n’est que dans le cadre de la procédure contentieuse que le Royaume‑Uni a répondu à ces allégations. Compte tenu de ces éléments, il y a lieu, par conséquent, de constater que le Royaume‑Uni a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du principe de coopération loyale.

327.

Eu égard aux considérations qui précèdent, je suis d’avis que, en n’ayant pas communiqué à la Commission l’évaluation juridique en cause et tous les éléments nécessaires à la détermination des montants des pertes de ressources propres résultant des avis de paiement C18 Snake, le Royaume‑Uni a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4, paragraphe 3, TUE.

E. Sur le manquement aux obligations en vertu de la réglementation relative à la TVA et aux ressources propres provenant de la TVA

328.

Par son troisième moyen, la Commission considère que le Royaume‑Uni a manqué aux obligations en vertu de l’article 4, paragraphe 3, TUE, de l’article 310, paragraphe 6, et de l’article 325 TFUE, et de l’article 2, paragraphe 1, sous b) et d), des articles 83, 85 à 87 et de l’article 143, paragraphe 1, sous d), de la directive 2006/112. Au soutien de ce moyen, la Commission fait valoir, en substance, que la détermination incorrecte de la valeur en douane des marchandises importées relevant tant du régime douanier 40 que du régime douanier 42 a eu pour conséquence de diminuer la base d’imposition de la TVA, en sorte que l’Union a été privée d’une partie de ses ressources propres.

329.

S’agissant du régime douanier 40, la Commission souligne que, en application de l’article 2, paragraphe 1, sous d), et des articles 85 à 87 de la directive 2006/112, la TVA doit être perçue par l’État membre d’importation et que la base d’imposition de cette taxe comprend la valeur en douane ainsi que les droits de douane et les frais accessoires. Elle considère que, puisque la TVA n’a pas été perçue en tenant compte de la valeur en douane correcte des marchandises importées, les montants correspondants n’ont pas été pris en considération dans la détermination de la base des ressources propres provenant de la TVA.

330.

Au titre du régime douanier 42, la Commission relève, tout d’abord, que, selon le rapport OLAF, en 2016, 87 % des marchandises ont été importées par l’intermédiaire du Royaume‑Uni vers d’autres États membres. Elle expose, ensuite, que pour les marchandises relevant du régime douanier 42 la base d’imposition de la TVA est constituée, conformément à l’article 83 de la directive 2006/112, par le prix d’achat des biens ou de biens similaires ou, à défaut de prix d’achat, par le prix de revient, déterminés au moment de la livraison. Elle soutient, enfin, que si la valeur en douane des marchandises importées est incorrecte, le calcul de la TVA à prélever sur celles‑ci par l’État membre destinataire ou du transport sera, par conséquent, erroné.

331.

La Commission déduit de l’ensemble de ces éléments que, en s’abstenant de prendre des mesures de nature à remédier à la sous-évaluation de la valeur en douane des marchandises importées, le Royaume‑Uni a manqué aux obligations découlant de l’article 4, paragraphe 3, TUE ainsi que de l’article 310, paragraphe 6, et de l’article 325 TFUE, et, faute d’avoir garanti la perception intégrale des recettes de TVA, a privé l’Union d’une partie des ressources propres provenant de cette taxe. Plus particulièrement, la Commission ajoute que l’article 143, paragraphe 2, de la directive 2006/112, qui fixe les conditions applicables aux importations relevant du régime douanier 42, impose aux États membres de prendre toutes les mesures appropriées pour assurer le recouvrement de la TVA. En conséquence, en s’abstenant d’avoir pris de telles mesures, le Royaume‑Uni aurait compromis la capacité des autres États membres à percevoir la TVA et devrait être tenu responsable de cette situation.

332.

Le Royaume‑Uni soutient, en revanche, que la réclamation de la Commission ne repose sur aucune base juridique. À cet égard, il expose que ni les dispositions de la directive 2006/112 ni celles de l’article 4, paragraphe 3, TUE n’impliquent une responsabilité d’un État membre pour les pertes de ressources propres traditionnelles ou de ressources propres provenant de la TVA subies dans d’autres États membres. Il ajoute que la Commission, qui se borne à invoquer les obligations générales de coopération loyale et de lutte contre la fraude, n’est pas en mesure de préciser le fondement juridique sur lequel un État membre serait tenu, au-delà de ses frontières, de répondre du prélèvement de la TVA dans un autre État de l’Union. Il observe également que, si la thèse de la Commission devait être retenue, il serait impossible de mesurer le degré de responsabilité d’un État membre dans la perte de ressources propres subies dans un autre État membre en raison d’un manquement de ce premier à ses obligations.

333.

Le Royaume‑Uni souligne, en outre, que, en application de l’article 83 de la directive 2006/112, la base d’imposition de la TVA fixée aux marchandises importées relevant du régime douanier 42 repose sur le prix d’achat facturé à l’acquéreur final situé dans l’État membre de destination. Il relève qu’il appartient à ce second État de vérifier et de garantir que la TVA sur ces acquisitions est bien déclarée. Il en déduit que le prétendu lien de causalité invoqué par la Commission n’est pas établi. Enfin, le Royaume‑Uni affirme qu’il ne ressort d’aucun des éléments de fait présentés par la Commission qu’il aurait, par son comportement, empêché les autres États membres de percevoir la TVA.

334.

Au regard de ces arguments, il convient, dans un premier temps, d’apporter quelques précisions sur le régime juridique des ressources propres provenant de la TVA (section 1), puis, dans un second temps, d’analyser successivement les griefs propres aux régimes douaniers 40 (section 2) et 42 (section 3).

1.   Sur le régime juridique de la mise à disposition au budget de l’Union des ressources provenant de la TVA

335.

Afin d’assurer l’instauration d’un marché intérieur au sein duquel la concurrence n’est pas faussée et la libre circulation des marchandises et services est garantie, le législateur de l’Union s’est efforcé d’harmoniser les règles relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires au moyen d’un système de TVA, laquelle constitue un impôt sur la consommation englobant la plupart des aspects de l’économie. Dans cette optique, la directive 2006/112 prévoit une règle commune de base d’imposition. Plus précisément, aux termes de l’article 73 de cette directive, la base d’imposition sur laquelle est appliquée le taux de TVA comprend « tout ce qui constitue la contrepartie obtenue ou à obtenir par le fournisseur ou le prestataire pour ces opérations de la part de l’acquéreur, du preneur ou d’un tiers, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations » ( 359 ). Au-delà de ce principe, la base d’imposition est régie par des règles particulières, notamment dans le cas des acquisitions intracommunautaires ( 360 ) de biens ou dans celui des importations de biens ( 361 ).

336.

Par ailleurs, conformément à l’article 2, paragraphe 1, sous b), de la décision 2007/436 et à l’article 2, paragraphe 1, sous b), de la décision 2014/335, les ressources propres de l’Union comprennent, outre les ressources propres traditionnelles, les recettes provenant de l’application d’un taux uniforme ( 362 ) à l’assiette harmonisée de la TVA déterminée selon les règles de l’Union. Ce taux uniforme constitue un « taux d’appel » de cette ressource et non un taux d’imposition dès lors qu’il ne crée pas d’obligations fiscales pour les contribuables, mais impose seulement aux États de prélever le montant dont ils sont redevables à l’égard de l’Union sur n’importe quelle source de leur budget ( 363 ).

337.

Quant à l’assiette de cette ressource propre, laquelle est distincte de la base d’imposition prévue par la directive 2006/112, l’article 3 du règlement no 1553/89 énonce, en substance, que la base des ressources provenant de la TVA est obtenue en divisant le total des recettes nettes de TVA encaissées par l’État membre au cours de l’année soit par le taux auquel cette taxe est perçue pendant cette même année, soit par le taux moyen pondéré de la TVA, lorsque plusieurs taux sont appliqués dans un État membre ( 364 ).

338.

Ce système de ressources propres vise, donc, s’agissant des ressources provenant de la TVA, à créer à la charge des États membres, une obligation de mettre à la disposition de l’Union, en tant que ressources propres, une part des montants qu’ils perçoivent au titre de la TVA ( 365 ).

339.

Il en résulte qu’un lien direct existe entre la perception des recettes provenant de la TVA dans le respect du droit de l’Union applicable et la mise à disposition du budget de l’Union des ressources provenant de la TVA correspondantes, dès lors que toute lacune dans la perception des premières se trouve potentiellement à l’origine d’une réduction des secondes ( 366 ). En conséquence, les États membres sont tenus de garantir un prélèvement efficace des ressources propres de l’Union en procédant au recouvrement des sommes correspondant à ces ressources qui, en raison de fraudes, ont été soustraites au budget de l’Union ( 367 ).

340.

À cet égard, il y a lieu de rappeler que, en matière de TVA, il découle, notamment, des articles 2 et 273 de la directive 2006/112, lue en combinaison avec l’article 4, paragraphe 3, TUE que les États membres ont non seulement l’obligation générale de prendre toutes les mesures législatives et administratives propres à garantir la perception de l’intégralité de la TVA due sur leurs territoires respectifs, mais doivent aussi lutter contre la fraude ( 368 ). En outre, ainsi que cela a déjà été souligné ( 369 ), l’article 325 TFUE oblige les États membres à lutter contre les activités illicites portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union par des mesures dissuasives et effectives et, en particulier, leur impose de prendre les mêmes mesures pour combattre la fraude ( 370 ) portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union que celles qu’ils prennent pour combattre la fraude portant atteinte à leurs propres intérêts financiers ( 371 ).

341.

Au regard des développements qui précédent, il me paraît peu douteux que, dans le cas présent, l’absence de mesures appropriées de nature à combattre le risque de fraude et à assurer une évaluation correcte des marchandises importées ( 372 ) soit de nature à constituer, sous l’angle des ressources propres provenant de la TVA, un manquement à l’article 325 TFUE, qui concrétise l’article 4, paragraphe 3, TUE ( 373 ), susceptible d’avoir porté atteinte aux intérêts financiers de l’Union. Cela étant, il résulte de la jurisprudence précédemment citée que le lien entre la perception des recettes provenant de la TVA par un État membre et la mise à disposition au budget de l’Union des ressources provenant de la TVA est seulement potentiel. En conséquence, je considère qu’il appartient de vérifier, au regard des règles propres à chacun des régimes douaniers applicables en l’espèce, si l’omission par les autorités du Royaume-Uni d’effectuer des contrôles douaniers, telle que présentée dans le cadre du premier moyen, a privé concrètement le budget de l’Union d’une partie des ressources propres provenant de la TVA.

2.   Sur le grief tenant à la perte de ressources propres provenant de la TVA au titre du régime douanier 40

342.

Le régime douanier 40 correspond au cas où les marchandises importées à partir d’un pays tiers sont directement mises en libre pratique ( 374 ). Conformément à l’article 2, paragraphe 1, sous d), de la directive 2006/112, les importations de biens sont comprises parmi les opérations soumises à la TVA. Aux termes de l’article 85 de cette directive, « [p]our les importations de biens, la base d’imposition de la TVA est constituée par la valeur définie comme la valeur en douane par les dispositions communautaires en vigueur ». Cette base d’imposition est ajustée selon les règles prévues aux articles 86 et 87 de la directive 2006/112 ( 375 ). En outre, l’article 70, paragraphe 1, du code des douanes de l’Union ( 376 ) précise la définition de la valeur en douane des marchandises, laquelle est « la valeur transactionnelle, c’est‑à‑dire le prix effectivement payé ou à payer pour les marchandises lorsqu’elles sont vendues pour l’exportation à destination du territoire douanier de l’Union ». Il en découle que l’objectif poursuivi par l’article 85 de la directive 2006/112, lu en combinaison avec l’article 70, paragraphe 1, du code des douanes de l’Union, est d’inclure dans la base d’imposition tout ce qui constitue la valeur du bien pour l’acquéreur final de celui‑ci ( 377 ).

343.

Au regard de ces éléments, il est certain que l’absence de mise en œuvre de mesures adéquates destinées à lutter contre la fraude douanière n’a pas permis au Royaume‑Uni d’appliquer les règles de détermination de la base d’imposition de la TVA lors des importations de marchandises relevant du régime douanier 40. Cependant, il reste à déterminer si les ressources propres provenant de cette taxe ont été concrètement affectées par cette circonstance. Sur ce point, la Commission, à laquelle il incombe de prouver l’existence des manquements qu’elle allègue ( 378 ), fait valoir de manière générale que la minoration des ressources propres provenant de la TVA découle ipso facto de la sous-évaluation de la valeur en douane des marchandises importées.

344.

Néanmoins, je ne pense pas que cet argument permette d’établir avec suffisance l’existence d’un lien direct entre l’omission du Royaume‑Uni et une éventuelle diminution des ressources propres provenant de la TVA. En effet, comme je l’ai déjà indiqué ( 379 ), il ressort de l’article 3 du règlement no 1553/89 que la base de ressources de TVA est calculée à partir du total des recettes nettes de TVA encaissées par l’État membre divisé par le taux de la TVA. Or, s’agissant des marchandises importées, le total des recettes nettes perçues dépend non seulement de la valeur en douane des biens, mais également du prix de vente facturé à l’acquéreur final. Ainsi, le montant des recettes provenant de la TVA demeure identique lorsque l’acquéreur final a acquitté un prix d’achat équivalant à la valeur en douane réelle du bien. Il en résulte que la seule constatation de la sous-évaluation de la valeur en douane des marchandises importées n’emporte pas automatiquement une réduction de l’assiette sur laquelle sont calculées les ressources propres provenant de la TVA.

345.

Dans ces conditions, j’estime que le raisonnement d’ordre général sur lequel se fonde la Commission pour soutenir que, s’agissant des importations de biens relevant du régime douanier40, l’Union a été privée d’une partie des ressources propres provenant de la TVA ne peut constituer, à lui seul, une preuve suffisante de la réalité de ce grief. En conséquence, je propose à la Cour de rejeter la demande formée de ce chef par la Commission.

3.   Sur le grief tenant à la perte des ressources propres provenant de la TVA au titre du régime douanier 42

346.

Tout d’abord, il est opportun de rappeler que, selon le rapport OLAF, 87 % du volume total des marchandises importées en 2016 relevaient du régime douanier 42 ( 380 ).

347.

Ainsi que cela a déjà été expliqué dans le cadre des présentes conclusions, le régime douanier 42 correspond au cas où, au moment de l’importation, il est certain que les marchandises importées sont destinées à un autre État membre ( 381 ). Dans une telle hypothèse, la TVA est due dans l’État membre de destination finale des marchandises et non dans celui de l’importateur. Plus précisément, cette exonération ressort de l’article 143, paragraphe 1, sous d), de la directive 2006/112 selon lequel les États membres exonèrent les importations de biens expédiés ou transportés à partir d’un territoire tiers ou d’un pays tiers dans un État membre autre que celui d’arrivée de l’expédition ou du transport, dans le cas où la livraison de ces biens, effectuée par l’importateur désigné ou reconnu comme redevable de la taxe en vertu de l’article 201 de ladite directive, est exonérée conformément à l’article 138 de la même directive. En d’autres termes, l’exonération de la TVA prévue à l’article 143 de la directive 2006/112 est fondée sur la circonstance que l’importation est suivie d’une livraison intracommunautaire, elle‑même exonérée au titre de l’article 138 de ladite directive.

348.

Par ailleurs, il ressort de l’article 68 de la directive 2006/112 que le fait générateur de la TVA intervient au moment où l’acquisition intracommunautaire est effectuée, c’est‑à‑dire, selon le second alinéa de cet article, « au moment où la livraison [à l’intérieur du pays] de biens similaires [...] est considérée comme effectuée ». À ce titre, la Cour juge que la notion de « livraison de biens » ne se réfère pas au transfert de propriété dans les formes prévues par le droit national applicable, mais inclut toute opération de transfert d’un bien corporel par une partie qui habilite l’autre partie à en disposer en fait comme si elle était le propriétaire de ce bien ( 382 ).

349.

Enfin, pour les acquisitions intracommunautaires de biens, il résulte des articles 76 et 83 de la directive 2006/112 que la base d’imposition de la TVA est constituée par le prix d’achat des biens ou de biens similaires ou, à défaut de prix d’achat, par le prix de revient, déterminés au moment où s’effectue la livraison.

350.

Dans le cas présent, il me paraît difficile de souscrire au postulat de la Commission selon lequel la détermination incorrecte par le Royaume‑Uni de la valeur en douane des marchandises importées a eu une incidence sur le montant des ressources propres provenant de la TVA mises à la disposition de l’Union. Eu égard aux règles précitées applicables aux opérations relevant du régime douanier 42, ce lien direct, que, au demeurant, la Commission n’étaye pas dans ses écritures, ne me semble pas établi pour deux raisons. D’une part, la base d’imposition de la TVA applicable aux marchandises relevant dudit régime est corrélée non pas à la valeur en douane des biens importés, mais au prix d’achat de ces biens dans l’État membre de destination finale. D’autre part, dans le cadre du régime douanier 42, l’intégralité de la TVA doit être prélevée et payée dans l’État membre où les marchandises sont finalement livrées.

351.

J’ajoute que la faiblesse systémique du régime douanier 42 interdit de tenir un seul État membre pour responsable de la perte de ressources propres provenant de la TVA. À ce titre, j’observe que, dans son rapport spécial no 13/2011 portant sur un contrôle relatif au régime douanier 42, la Cour des comptes a constaté que l’application du régime douanier a entraîné des pertes significatives qu’elle a évaluées à environ 2200 millions d’euros ( 383 ) et a déploré l’insuffisance des contrôles opérés par les sept États membres sélectionnés dans son étude ( 384 ). La Cour des comptes a notamment recommandé d’améliorer la communication des données clés dans les États membres et entre eux, d’encourager la vérification automatique des numéros d’identification de TVA et de créer un profil de risque commun à l’échelle de l’Union pour les importations effectuées sous le régime douanier 42 ( 385 ). Dans son rapport spécial no 24/2015 relatif à la lutte contre la fraude à la TVA intracommunautaire, la Cour des comptes a souligné la persistance de ces difficultés en relevant que « [l]es améliorations législatives apportées par la Commission en ce qui concerne le régime douanier 42 et les suites données aux recommandations formulées dans le rapport spécial no 13/2011 sont des éléments positifs, mais [que] la lutte contre la fraude est entravée par une mise en œuvre médiocre et par les cas de non‑respect détectés dans les États membres au cours de l’audit » ( 386 ). À ce titre, la Cour des comptes a également souligné, d’une part, que la plupart des États membres visités ne réalisent pas de contrôles croisés efficaces entre les données douanières et fiscales, et d’autre part, que l’exactitude, l’exhaustivité et l’actualité des informations relatives à la TVA échangées entre les États membres posent problème ( 387 ). De telles constatations me conduisent également à écarter la thèse de la Commission selon laquelle le Royaume‑Uni aurait, par ses omissions, empêché les autres États membres de percevoir intégralement la TVA.

352.

Dans ces conditions et en dépit des omissions du Royaume‑Uni dans la détermination de la valeur en douane des marchandises en cause, il n’est pas possible, faute de lien direct, d’imputer à cet État une diminution des ressources propres provenant de la TVA au titre des opérations relevant du régime douanier 42. En conséquence, je suggère à la Cour de rejeter sur ce point la demande formée par la Commission.

353.

En considération de l’ensemble de ces développements, je propose à la Cour de rejeter le troisième moyen, tant sur le grief tenant à la perte de ressources propres provenant de la TVA au titre du régime douanier 40 que sur celui tenant à la perte de ressources propres provenant de la TVA au titre du régime douanier 42.

VII. Sur les dépens

354.

Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Conformément à l’article 138, paragraphe 3, de ce règlement, si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, chaque partie supporte ses propres dépens. Toutefois, si cela apparaît justifié au vu des circonstances de l’espèce, la Cour peut décider que, outre ses propres dépens, une partie supporte une fraction des dépens de l’autre partie. La Commission ayant conclu à la condamnation du Royaume‑Uni aux dépens et celle‑ci ayant succombé en l’essentiel de ses moyens, il y a lieu, eu égard aux circonstances de l’espèce, de condamner le Royaume‑Uni à supporter, outre ses propres dépens, quatre cinquièmes des dépens de la Commission. Cette dernière supportera un cinquième de ses dépens.

355.

Conformément à l’article 140, paragraphe 1, du règlement de procédure, selon lequel les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens, le Royaume de Belgique, la République d’Estonie, la République hellénique, la République de Lettonie, la République portugaise et la République slovaque supporteront leurs propres dépens.

VIII. Conclusion

356.

Pour les motifs exposés dans les présentes conclusions, je propose à la Cour de statuer comme suit :

1)

En ne prenant pas, pendant la période d’infraction, de mesures visant à protéger les intérêts financiers de l’Union et en ne prenant pas en compte les montants corrects des droits de douane relatifs à certaines importations de produits textiles et de chaussures en provenance de Chine, le Royaume‑Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord a manqué aux obligations qui lui incombaient en vertu de l’article 325 TFUE, de l’article 13 et de l’article 220, paragraphe 1, du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire, tel que modifié par le règlement (CE) no 648/2005 du Parlement européen et du Conseil, du 1er avril 2005, des articles 3, 46 et de l’article 105, paragraphe 3, du règlement (UE) no 952/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 9 octobre 2013, établissant le code des douanes de l’Union, de l’article 248, paragraphe 1, du règlement (CEE) no 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d’application du règlement no 2913/92, tel que modifié par le règlement (CE) no 1335/2003 de la Commission, du 25 juillet 2003, et de l’article 244 du règlement d’exécution (UE) 2015/2447 de la Commission, du 24 novembre 2015, établissant les modalités d’application de certaines dispositions du règlement (UE) no 952/2013 du Parlement européen et du Conseil établissant le code des douanes de l’Union.

2)

En ne mettant pas à disposition de l’Union le montant correct des ressources propres traditionnelles relatives à ces importations, le Royaume‑Uni a manqué aux obligations qui lui incombaient en vertu des articles 2 et 8 de la décision UE, Euratom, 2014/335 du Conseil, du 26 mai 2014, relative au système des ressources propres de l’Union européenne et de la décision 2007/436/CE, Euratom, du Conseil, du 7 juin 2007, relative au système des ressources propres des Communautés européennes, des articles 2, 6, 9, 10, 12 et 13 du règlement (UE, Euratom) no 609/2014 du Conseil, du 26 mai2014, relatif aux modalités et à la procédure de mise à disposition des ressources propres traditionnelles, de la ressource propre fondée sur la TVA et de la ressource propre fondée sur le RNB et aux mesures visant à faire face aux besoins de trésorerie, et des articles 2, 6, 9, 10, 11 et 17 du règlement (CE, Euratom) no 1150/2000 du Conseil, du 22 mai 2000, portant application de la décision 94/728.

3)

En n’ayant pas communiqué à la Commission européenne l’évaluation juridique du service juridique des Her Majesty’s Revenue and Customs (administration fiscale et douanière du Royaume-Uni) et tous les éléments nécessaires à la détermination des montants des pertes de ressources propres résultant des avis de paiement a posteriori émis dans le cadre de l’opération Snake, le Royaume‑Uni a manqué aux obligations qui lui incombaient en vertu du principe de coopération loyale, tel que consacré à l’article 4, paragraphe 3, TUE.

4)

Le recours est rejeté pour le surplus.

5)

Le Royaume‑Uni supporte, outre ses propres dépens, quatre cinquièmes des dépens de la Commission européenne.

6)

La Commission européenne supporte un cinquième de ses dépens.

7)

Le Royaume de Belgique, la République d’Estonie, la République hellénique, la République de Lettonie, la République portugaise et la République slovaque supportent leurs propres dépens.


( 1 ) Langue originale : le français.

( 2 ) Je tiens à souligner que la Cour est compétente en vertu de l’article 86 de l’accord sur le retrait du Royaume‑Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord de l’Union européenne et de la Communauté européenne de l’énergie atomique (JO 2020, L 29, p. 7), approuvé par la décision (UE) 2020/135 du Conseil, du 30 janvier 2020, relative à la conclusion de l’accord sur le retrait du Royaume‑Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord de l’Union européenne et de la Communauté européenne de l’énergie atomique (JO 2020, L 29, p. 1), pour connaître de tout recours introduit par ou contre cet État avant la fin de la période de transition, le 1er janvier 2021.

( 3 ) Décision du Conseil du 26 mai 2014 relative au système des ressources propres de l’Union européenne (JO 2014, L 168, p. 105).

( 4 ) JO 2007, L 163, p. 17.

( 5 ) JO 2000, L 130, p. 1.

( 6 ) Revenu national brut.

( 7 ) JO 2014, L 168, p. 39.

( 8 ) Règlement du 17 mai 2016 modifiant le règlement no 609/2014 (JO 2016, L 132, p. 85).

( 9 ) JO 2014, L 168, p. 29.

( 10 ) Règlement (CEE, Euratom) du Conseil du 29 mai 1989 concernant le régime uniforme définitif de perception des ressources propres provenant de la taxe sur la valeur ajoutée (JO 1989, L 155, p. 9).

( 11 ) JO 1992, L 302, p. 1.

( 12 ) JO 2005, L 117, p. 13.

( 13 ) JO 2013, L 269, p. 1.

( 14 ) JO 1993, L 253, p. 1.

( 15 ) JO 2003, L 187, p. 16.

( 16 ) JO 2015, L 343, p. 558.

( 17 ) JO 2006, L 347, p. 1, et rectificatif JO 2007, L 335, p. 60.

( 18 ) JO 2009, L 175, p. 12.

( 19 ) Ci‑après les « produits concernés » ou « produits textiles et de chaussures en provenance de Chine ».

( 20 ) Il convient de préciser que la période d’infraction est antérieure à l’entrée en vigueur de l’accord de retrait (voir note 2 des présentes conclusions), de sorte que l’Union était composée de 28 États membres. Aux fins des présentes conclusions, il est ainsi fait référence à l’« Union-28 ».

( 21 ) Il découle de l’annexe B du règlement d’exécution, titre II, intitulé « Codes liés aux exigences communes en matière de données pour les déclarations et les notifications », au point 1/10, intitulé « Régime », que, lors de dépôt de déclaration de douane, l’importateur est tenu d’indiquer un code à quatre chiffres, dont les deux premiers chiffres représentent le régime sollicité. Le « code 40 » correspond à la mise à la consommation avec mise en libre pratique simultanée de marchandises (ci‑après le « régime douanier 40 »), tandis que le code 42 relève de la mise à la consommation avec mise en libre pratique simultanée de marchandises avec exonération de la TVA pour livraison vers un autre État membre.

( 22 ) Il s’agit d’une « perte potentielle » pour la période de mai 2013 à mars 2015 de 589676121 euros sur une quantité de près d’un milliard et demi de kilogrammes de produits concernés.

( 23 ) Il ressort de ce rapport que, en 2016, 87 % des importations de produits textiles et de chaussures de faible valeur au Royaume‑Uni ont été effectués dans le cadre du régime douanier 42, alors que, au cours de la même période, ce régime n’a été utilisé que pour 15 % des importations de produits textiles et de chaussures en provenance de Chine enregistrées dans l’ensemble de l’Union28. Selon l’OLAF, cette disparité confirme le déplacement vers le Royaume‑Uni d’opérations frauduleuses menées au départ d’autres États membres.

( 24 ) Voir point 58 des présentes conclusions.

( 25 ) L’OLAF a fixé à 1987429507,96 euros le montant total de ces pertes et a ventilé ce montant comme suit : 325230822,55 euros en 2013 ; 480098912,45 euros en 2014 ; 535290329,16 euros en 2015 et 646809443,80 euros en 2016.

( 26 ) J’observe que la Cour n’y a pas encore répondu.

( 27 ) S’agissant de la formulation des conclusions présentées au soutien du présent recours, il y a lieu d’observer qu’elles sont reproduites deux fois dans la requête, au début et à la fin de celle‑ci. Or, les chefs de conclusions ne sont pas formulées de manière identique. Ainsi, la partie entre crochets (ci‑après le « troisième alinéa du premier chef des conclusions »), bien qu’elle ne figure pas dans le petitum présenté au début de la requête, est insérée dans les conclusions figurant à la fin de la requête (point 370) et est réitérée dans la réplique de la Commission (point 285).

( 28 ) Dans le cadre du régime douanier 42, l’importateur des marchandises doit indiquer, dans le document administratif unique, un code commençant par les chiffres 42 pour obtenir une exonération de la TVA. Il s’applique lorsque les marchandises importées de l’extérieur de l’Union dans un État membre sont destinées à être transportées dans un autre État membre. En vertu de l’article 143 de la directive 2006/112, lorsque ce régime douanier est utilisé, les importations sont exonérées de la TVA dans l’État membre d’arrivée mais doivent être imposées dans l’État membre de destination des biens.

( 29 ) Voir, notamment, arrêts du 8 décembre 2005, Commission/Luxembourg (C‑33/04, EU:C:2005:750, point 70) ; du 31 mai 2018, Commission/Pologne (C‑526/16, non publié, EU:C:2018:356, point 49), et du 18 octobre 2018, Commission/Roumanie (C‑301/17, non publié, EU:C:2018:846, point 32).

( 30 ) Voir a du 19 septembre 2017, Commission/Irlande (Taxe d’immatriculation) (C‑552/15, EU:C:2017:698, points 28 et 29, ainsi que jurisprudence citée).

( 31 ) Voir, en ce sens, arrêts du 8 avril 2008, Commission/Italie (C‑337/05, EU:C:2008:203, point 23), et du 13 février 2014, Commission/Royaume‑Uni (C‑530/11, EU:C:2014:67, point 40).

( 32 ) Voir a du 11 juillet 2018, Commission/Belgique (C‑356/15, EU:C:2018:555, point 33 et jurisprudence citée).

( 33 ) Voir arrêt du 11 juillet 2018, Commission/Belgique (C‑356/15, EU:C:2018:555, point 34 et jurisprudence citée).

( 34 ) Demande annexée à sa réponse à la lettre de mise en demeure du 22 juin 2018.

( 35 ) Voir points 301 à 326 de l’avis motivé.

( 36 ) Il s’agit, notamment, d’une part, du rapport technique du JRC, intitulé « The estimation of fair prices of traded goods from outlier-free trade data » (L’estimation du juste prix des marchandises commercialisées à partir des données commerciales hors valeurs extrêmes), et, d’autre part, du document de l’OLAF, intitulé « La sous-évaluation des importations de produits textiles et de chaussures : méthode de calcul des pertes estimées en matière de droits de douane ».

( 37 ) En ce qui concerne ces pertes estimées de ressources propres traditionnelles pour le budget de l’Union, le téléchargement (nommé « DL 53 ») utilisé par l’OLAF pour calculer ces pertes aurait été déjà disponible sur le site web Theseus au moment où l’OLAF a publié son rapport final, le 1er mars 2017, ainsi que ultérieurement. Il était également inclus à l’annexe 7 du rapport OLAF. En réponse aux questions du Royaume‑Uni, la Commission y a fait référence aux points 307 et 308 de l’avis motivé.

( 38 ) Voir annexe A.32 de la requête, reprenant les tableaux figurant à l’annexe D du rapport joint à la réponse du 11 février 2019.

( 39 ) Rapports intitulés « La sous-évaluation des importations de produits textiles et de chaussures : méthode de calcul des pertes estimées en matière de droits de douane » et « L’estimation du juste prix des marchandises commercialisées à partir des données commerciales hors valeurs extrêmes » (annexe A.35).

( 40 ) Il ressort de cette annexe que les prix moyens corrigés sont calculés sur la base des données relatives aux importations extraites de la base de données statistiques Comext pour une période de 48 mois. C’est une base de données de référence pour le commerce international de biens, gérée par Eurostat. L’avis motivé y fait référence expresse au point 309.

( 41 ) Selon la Commission, le Royaume‑Uni peut accéder aux données non agrégées au moyen de l’application SurvRecapp. Il peut donc consulter, insérer, mettre à jour ou supprimer les différentes données qu’il possède.

( 42 ) Voir annexe D.5, p 149 à 1332.

( 43 ) Voir arrêt du 18 novembre 2010, Commission/Espagne (C‑48/10, EU:C:2010:704, point 33 et jurisprudence citée).

( 44 ) Voir point 126 des présentes conclusions.

( 45 ) Voir, en ce sens, arrêt du 15 décembre 2009, Commission/Allemagne, C‑372/05, EU:C:2009:780, point 33.

( 46 ) Voir point 77 des présentes conclusions.

( 47 ) Voir points 116 et suiv. du mémoire en défense.

( 48 ) Voir point 28 de ce rapport.

( 49 ) Cette première assurance approuverait bien les efforts et les mesures prises par le Royaume‑Uni pour réaliser ces progrès jusqu’en juin 2014 et non seulement, comme le ferait valoir à tort la Commission, les projets futurs envisagés par cet État.

( 50 ) Or, selon le Royaume‑Uni, la Commission était bien informée à l’époque du fait que, dans le cadre de l’APC Discount, les autorités britanniques avaient effectué des contrôles documentaires avec des visites de suivi après la mainlevée des marchandises mais n’avaient pas exercé de contrôles préalables, ni relevé d’échantillons ou demandé des garanties.

( 51 ) Voir a du 26 mai 1982, Allemagne et Bundesanstalt für Arbeit/Commission (44/81, EU:C:1982:197, points 16 à 18).

( 52 ) Cette affirmation ne pourrait être remise en cause par le principe, consacré par la jurisprudence, selon lequel une confiance légitime ne peut s’appuyer sur une pratique illégale (arrêt du 11 avril 2018, SEB bankas, C‑532/16, EU:C:2018:228, point 50) et selon lequel une confiance légitime ne peut être invoquée à l’encontre d’une disposition non équivoque d’un texte de droit de l’Union [arrêt du 7 avril 2011, Sony Supply Chain Solutions (Europe), C‑153/10, EU:C:2011:224, point 47].

( 53 ) Voir, en ce sens, arrêts du 11 mars 1987, Van den Bergh en Jurgens et Van Dijk Food Products (Lopik)/CEE (265/85, EU:C:1987:121, point 44 et jurisprudence citée), et du 7 avril 2011, Grèce/Commission (C‑321/09 P, EU:C:2011:218, point 45 et jurisprudence citée).

( 54 ) Voir, en ce sens, arrêt du 19 mai 1992, Mülder e.a./Conseil et Commission (C‑104/89 et C‑37/90, EU:C:1992:217, point 15).

( 55 ) Voir, en ce sens, arrêts du 6 décembre 2001, Grèce/Commission (C‑373/99, EU:C:2001:662, point 56) ; du 24 avril 2007, Commission/Pays‑Bas (C‑523/04, EU:C:2007:244, point 28) ; du 1er juin 2016, Hongrie/Commission (T‑662/14, EU:T:2016:328, point 57), ainsi que ordonnance du 23 mars 2011, Estonie/Commission (C‑535/09 P, non publiée, EU:C:2011:171, points 72 et 73).

( 56 ) Voir, notamment, arrêts du 7 avril 2011, Grèce/Commission (C‑321/09 P, EU:C:2011:218, point 25), et du 19 juillet 2016, Kotnik e.a. (C‑526/14, EU:C:2016:570, point 62).

( 57 ) Voir, par analogie, en ce qui concerne la cessation dans les délais du manquement, conclusions de l’avocate générale Trstenjak dans l’affaire Commission/Allemagne (C‑536/07, EU:C:2009:340, point 39).

( 58 ) Voir première assurance invoquée par le Royaume‑Uni, exposée au point 141 des présentes conclusions.

( 59 ) Voir première assurance invoquée par le Royaume‑Uni, exposée au point 140 des présentes conclusions.

( 60 ) Voir deuxième assurance invoquée par le Royaume‑Uni, exposée au point 142 des présentes conclusions.

( 61 ) Voir, notamment, message d’assistance mutuelle AM 2007/015, du 20 avril 2007, et lignes directrices de l’ACP Discount de 2011.

( 62 ) Voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 24 avril 2007, Commission/Pays‑Bas (C‑523/04, EU:C:2007:244, point 28 et jurisprudence citée), et du 6 octobre 2009, Commission/Espagne (C‑562/07, EU:C:2009:614, point 18).

( 63 ) Voir, en ce sens, arrêt du 15 juin 2000, Commission/Allemagne (C‑348/97, EU:C:2000:317, point 45 et jurisprudence citée).

( 64 ) Voir, notamment, points 114, 115 et 131 du mémoire en défense.

( 65 ) Voir, arrêts du 14 avril 2005, Commission/Allemagne (C‑104/02, EU:C:2005:219, points 48 à 51), et du 5 octobre 2006, Commission/Allemagne (C‑105/02, EU:C:2006:637, points 43 à 45).

( 66 ) C‑392/02, EU:C:2005:683.

( 67 ) Emploi du futur dans la version en langue anglaise.

( 68 ) Point 237 du mémoire en défense, citant l’arrêt du 14 avril 2005, Commission/Allemagne (C‑104/02, EU:C:2005:219, points 48 à 51), et arrêt du 5 octobre 2006, Commission/Allemagne (C‑105/02, EU:C:2006:637, points 43 à 45).

( 69 ) Plus particulièrement, dans ces affaires, la Commission demandait à la Cour de constater, respectivement, que la République fédérale d’Allemagne était « tenue de verser au budget communautaire des intérêts dus en cas d’inscription comptable tardive » (arrêt du 14 avril 2005, Commission/Allemagne, C‑104/02, EU:C:2005:219, point 1) et « de créditer immédiatement le compte de la Commission des ressources propres non acquittées du fait des manquements » (arrêt du 5 octobre 2006, Commission/Allemagne, C‑105/02, EU:C:2006:637, point 1).

( 70 ) Arrêts du 14 avril 2005, Commission/Allemagne (C‑104/02, EU:C:2005:219, points 49 et 50), et du 5 octobre 2006, Commission/Allemagne (C‑105/02, EU:C:2006:637, points 44 et 45).

( 71 ) Arrêts du 14 avril 2005, Commission/Allemagne (C‑104/02, EU:C:2005:219, point 49), et du 5 octobre 2006, Commission/Allemagne (C‑105/02, EU:C:2006:637, point 44).

( 72 ) Voir von Bardeleben, E., Donnat, F., et Siritzky, D., La Cour de justice de l’Union européenne et le droit du contentieux européen, La Documentation française, Paris, 2012, p. 196, et conclusions de l’avocate générale Sharpston dans l’affaire Commission/République tchèque (Mécanisme temporaire de relocalisation de demandeurs de protection internationale) (C‑719/17, EU:C:2019:917, point 100).

( 73 ) Voir, par exemple, arrêts du 21 septembre 1989, Commission/Grèce (68/88, EU:C:1989:339) ; du 15 novembre 2005, Commission/Danemark (C‑392/02, EU:C:2005:683 ; du 3 avril 2014, Commission/Royaume‑Uni (C‑60/13, non publié, EU:C:2014:219), et, plus récemment, du 11 juillet 2019, Commission/Italie (Ressources propres – Recouvrement d’une dette douanière) (C‑304/18, non publié, EU:C:2019:601).

( 74 ) Arrêt du 15 novembre 2005 (C‑392/02, EU:C:2005:683, points 31 à 34).

( 75 ) Arrêt du 11 juillet 2019Commission/Italie (Ressources propres – Recouvrement d’une dette douanière) (C‑304/18, non publié, EU:C:2019:601, point 76 et dispositif).

( 76 ) Voir arrêt du 9 juillet 2020, République tchèque/Commission (C‑575/18 P, EU:C:2020:530, point 68).

( 77 ) Voir arrêt du 11 juillet 2019, Commission/Italie (Ressources propres – Recouvrement d’une dette douanière) (C‑304/18, non publié, EU:C:2019:601).

( 78 ) Il est utile de rappeler que cet article 325 TFUE est le successeur de l’article 280 CE, entré en vigueur avec le traité d’Amsterdam en 1999, qui constituait lui‑même une évolution du précédent article 209A du traité de Maastricht de 1992.

( 79 ) Les États membres constatent les ressources propres traditionnelles et communiquent les montants des droits constatés à la Commission. Ainsi, la convention relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes a été introduite par l’acte du Conseil du 26 juillet 1995 (Acte du Conseil, du 26 juillet 1995, établissant la convention relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes, JO 1995, C 316, p. 48).

( 80 ) Ces montants sont communiqués à la Commission au moyen des relevés mensuels de la comptabilité A. Les droits constatés qui n’ont pas été inscrits dans la comptabilité A parce qu’ils n’ont pas été recouvrés par les États membres et qu’aucune garantie n’a été constituée (ou même si une garantie a été fournie, lorsque les droits font tout de même l’objet d’une contestation) figurent dans une comptabilité séparée. Ces droits font l’objet d’une dépréciation en fonction des informations transmises chaque année par les États membres.

( 81 ) Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et à la Cour des comptes – Comptes annuels consolidés de l’Union européenne 2017 (JO 2018, C 348, p. 1).

( 82 ) SWD (2013) 483 final.

( 83 ) Voir Djurdjevic, Z., « Fraud adversely affecting the budget of the European Union : the forms, methods and causes », Financial Theory and Practice, 2006, vol. 30, p. 254 et255.

( 84 ) Sur la définition des notions de « fraude » et de « toute autre activité illégale », au sens de l’article 325 TFUE, et leur distinction, voir conclusions de l’avocat général Bobek dans l’affaire Scialdone (C‑574/15, EU:C:2017:553, points 65 et suiv.). Sur l’évolution historique de cette disposition, avant le traité de Lisbonne (article 209 A du traité CE), voir conclusions de l’avocat général Jacobs dans l’affaire Commission/BCE (C‑11/00, EU:C:2002:556).

( 85 ) Voir, notamment, arrêts du 8 septembre 2015, Taricco e.a. (C‑105/14, EU:C:2015:555, points 50 et 51), et du 5 décembre 2017, M.A.S. et M.B. (C‑42/17, EU:C:2017:936, point 38). Par ailleurs, la Cour a rappelé que, si les États membres sont tenus de prendre des mesures effectives permettant de recouvrer les sommes indûment versées au bénéficiaire d’une subvention partiellement financée par le budget de l’Union, l’article 325 TFUE ne leur impose toutefois aucune contrainte autre que celle tenant au caractère effectif des mesures, quant à la procédure qui doit permettre d’aboutir à un tel résultat [arrêt du 1er octobre 2020, Úrad špeciálnej prokuratúry (C‑603/19, EU:C:2020:774, point 55)].

( 86 ) Voir, en ce sens, arrêts du 8 septembre 2015, Taricco e.a. (C‑105/14, EU:C:2015:555, point 51) ; du 5 décembre 2017, M.A.S. et M.B. (C‑42/17, EU:C:2017:936, point 38), et du 5 juin 2018, Kolev e.a. (C‑612/15, EU:C:2018:392, points 51 à 53).

( 87 ) Voir, notamment, arrêt du 31 octobre 2019, Commission/Royaume‑Uni (C‑391/17, EU:C:2019:919, point 70).

( 88 ) Voir arrêts du 11 octobre 1990, Italie/Commission (C‑34/89, EU:C:1990:353, point 12) ; du 21 février 1991, Allemagne/Commission (C‑28/89, EU:C:1991:67, point 31), et du 21 janvier 1999, Allemagne/Commission (C‑54/95, EU:C:1999:11, point 66).

( 89 ) Voir, notamment, conclusions de l’avocat général Bobek dans l’affaire Scialdone (C‑574/15, EU:C:2017:553, point 75 et suiv.). Le chevauchement de fond entre les obligations imposées par l’article 325, paragraphe 2, TFUE et le principe de coopération loyale prévu à l’article 4, paragraphe 3, TUE trouve son origine dans la genèse de la première disposition. D’une certaine manière, l’article 325, paragraphe 2, TFUE représente une codification, propre à une matière spécifique de la jurisprudence de la Cour relative au principe de coopération loyale. En outre, il est de jurisprudence constante que, si une réglementation de droit de l’Union ne prévoit pas de sanction pour les cas de violation de celle‑ci, ou si elle renvoie aux dispositions légales et administratives nationales, les États membres sont tenus en vertu de l’article 4, paragraphe 3, TUE d’adopter toutes les mesures appropriées pour garantir l’application et l’efficacité du droit de l’Union [voir, par exemple, arrêts du 21 septembre 1989, Commission/Grèce (68/88, EU:C:1989:339, point 23), et du 15 janvier 2004, Penycoed (C‑230/01, EU:C:2004:20, point 36)].

( 90 ) Il n’en est pas de même s’agissant de l’application de ce principe dans le contexte des reproches de la Commission concernant la communication des documents et des éléments pour qu’elle puisse déterminer les montants en cause. Ces reproches seront examinées à la section D des présentes conclusions.

( 91 ) Voir, en ce sens, arrêt du 8 juillet 2010, Commission/Italie (C‑334/08, EU:C:2010:414, point 39).

( 92 ) Voir, par analogie, arrêt du 26 février 2013, Åkerberg Fransson (C‑617/10, EU:C:2013:105, point 26), dans lequel la Cour a établi le « lien direct » entre les recettes provenant de l’application d’un taux uniforme à l’assiette harmonisée de la TVA et les ressources propres, ayant pour conséquence que toute lacune dans la perception des premières se trouve potentiellement à l’origine d’une réduction des secondes.

( 93 ) Selon la jurisprudence, si les États membres sont tenus de garantir le respect des obligations auxquelles les assujettis à la TVA sont soumis et qu’ils bénéficient, à cet égard, d’une certaine latitude en ce qui concerne, notamment, la manière d’utiliser les moyens dont ils disposent, cette latitude est toutefois limitée, notamment, par l’obligation de garantir un prélèvement efficace des ressources propres de la Communauté (arrêt du 17 juillet 2008, Commission/Italie, C‑132/06, EU:C:2008:412, points 21 et 37 à 39). Voir, par ailleurs, article 3, sous a) à d), du code des douanes de l’Union.

( 94 ) Voir, notamment, arrêts du 7 avril 2016, Degano Trasporti (C‑546/14, EU:C:2016:206, points 20 et 21) ; du 5 décembre 2017, M.A.S. et M.B. (C‑42/17, EU:C:2017:936, points 33 à 36), et du 17 janvier 2019, Dzivev e.a. (C‑310/16, EU:C:2019:30, points 27, 30 et 34, ainsi que jurisprudence citée).

( 95 ) Voir arrêts du 17 juillet 2008, Commission/Italie (C‑132/06, EU:C:2008:412) et du 11 décembre 2008, Commission/Italie (C‑174/07, non publié, EU:C:2008:704), dans lesquels la Cour a estimé que la République italienne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 2 et 22 de la sixième directive 77/388, ainsi que de l’article 10 CE (devenu l’article 4, paragraphe 3, TUE). Si, en effet, une réglementation de l’Union ne prévoit pas de sanction pour les cas de violation de celle‑ci, ou si elle renvoie aux dispositions légales et administratives nationales, les États membres sont tenus en vertu de l’article 4, paragraphe 3, TUE d’adopter toutes les mesures appropriées pour garantir l’application et l’efficacité du droit de l’Union [jurisprudence constante depuis l’arrêt du 21 septembre 1989, Commission/Grèce (68/88, EU:C:1989:339, point 23)].

( 96 ) Conclusions de l’avocat général Bot dans l’affaire M.A.S. et M.B. (C‑42/17, EU:C:2017:564, point 83).

( 97 ) En effet, aux termes des points 34 et 35 de l’arrêt du 5 décembre 2017, M.A.S. et M.B. (C‑42/17, EU:C:2017:936), indépendamment de la marge d’appréciation dont les États membres disposent pour choisir leurs mécanismes répressifs, ils doivent ériger en infractions pénales les cas de fraude grave, afin d’assurer une protection efficace des intérêts financiers de l’Union. Ainsi, dans les conclusions citées par le Royaume‑Uni, l’avocat général Bot a estimé qu’un droit n’est effectif que si sa violation est sanctionnée, le cadre juridique national pour sanctionner les fraudes à la TVA devant être adéquat contre le risque d’impunité [conclusions de l’avocat général Bot dans l’affaire M.A.S. et M.B. (C‑42/17, EU:C:2017:564, points 82 à 87)]. Sur l’exigence d’effectivité, voir, également, conclusions de l’avocat général Bobek dans l’affaire Scialdone (C‑574/15, EU:C:2017:553, point 77).

( 98 ) Voir arrêt du 8 juillet 2010, Commission/Italie (C‑334/08, EU:C:2010:414, point 49).

( 99 ) Voir points 175 des présentes conclusions.

( 100 ) Pour cette raison, en vertu de l’article 2, paragraphe 3, de la décision 2014/335, les États membres retiennent 20 % de droits de douane au titre de frais de perception. Ce pourcentage était de 25 % conformément à l’article 2, paragraphe 3, de la décision 2007/436.

( 101 ) Voir arrêts du 16 mai 1991, Commission/Pays‑Bas (C‑96/89, EU:C:1991:213, point 37), du 15 juin 2000, Commission/Allemagne (C‑348/97, EU:C:2000:317, point 64), et du 18 octobre 2007, Commission/Danemark (C‑19/05, EU:C:2007:606, point 18).

( 102 ) Il résulte de la jurisprudence qu’il existe un lien indissoluble entre l’obligation de constater un droit sur le montant de la dette douanière et celle de l’inscrire au compte de la Commission dans le délai imparti, en y ajoutant éventuellement des intérêts de retard, ce lien dépendant de la constatation des ressources propres et ne pouvant pas dépendre de l’arbitraire ou de l’attitude négligente d’un État membre, ainsi que l’a souligné l’avocat général Geelhoed dans ses conclusions dans l’affaire Commission/Danemark (C‑392/02, EU:C:2005:142, point 57). Par ailleurs, les États membres doivent constater les créances, même s’ils les contestent. Faute d’un tel constat, l’État membre concerné risque de bouleverser l’équilibre financier de l’Union, ne serait-ce que temporairement [voir, en ce sens, arrêts du 18 octobre 2007(Commission/Danemark, C‑19/05, EU:C:2007:606) ; du 16 mai 1991 (Commission/Pays‑Bas, C‑96/89, EU:C:1991:213, point 38), et du 15 juin 2000(Commission/Allemagne, C‑348/97, EU:C:2000:317, point 11)]. Il s’ensuit, à mon sens, qu’un État membre ne saurait unilatéralement se dispenser de constater les créances.

( 103 ) Voir arrêts du 12 mai 2005, Commission/Belgique (C‑287/03, EU:C:2005:282, point 27 et jurisprudence citée), ainsi que du 19 mai 2011, Commission/Malte (C‑376/09, EU:C:2011:320, point 32 et jurisprudence citée).

( 104 ) Voir, en ce sens, arrêt du 17 mars 2011, Commission/Portugal (C‑23/10, non publié, EU:C:2011:160, point 54), dont il résulte, mutatis mutandis, que le fait de ne pas éliminer les risques de la fraude douanière et de ne pas adopter des mesures relatives à ces risques ne peut être reproché aux États membres que si leurs autorités avaient connaissance de ces risques au cours de la période d’infraction.

( 105 ) Rapport OLAF, résumé et point 6.

( 106 ) Voir point 2.6 du rapport d’une société de conseil annexé à la réponse du Royaume‑Uni du 11 février 2019.

( 107 ) Point 2.4 du rapport d’une société de conseil annexé à la réponse du Royaume‑Uni du 11 février 2019.

( 108 ) Le Royaume‑Uni soutient également que la Cour devrait rejeter toute allégation de manquement pour la période antérieure à juin 2015, étant donné que ce n’est qu’à ce moment, lorsque l’OLAF a envoyé un message d’assistance mutuelle formel aux États membres (AM/2015/013 du 16 juin 2015), en recommandant de prendre certaines mesures de contrôle afin de lutter contre cette fraude, que le Royaume‑Uni a eu suffisamment connaissance de ladite fraude.

( 109 ) Notamment lors de la réunion ad hoc des 25 et 26 février 2015 organisée par la Commission. Au cours de cette réunion, l’OLAF a « fortement recommandé », notamment, que les États membres utilisent des filtres de risque appropriés pour identifier des envois potentiellement sous-évalués, qu’ils exigent des garanties pour les envois identifiés comme étant suspects et qu’ils mènent des enquêtes afin d’établir la valeur en douane.

( 110 ) À savoir au cours de l’opération Octopus.

( 111 ) Selon cet État membre, il ressort du message d’assistance mutuelle AM/2015/013 du 16 juin 2015, qui est un message formel d’assistance mutuelle envoyé par l’OLAF aux États membres et du point 83 du rapport spécial no 24/2015 de la Cour des comptes européenne, intitulé « Lutte contre la fraude à la TVA intracommunautaire : des actions supplémentaires s’imposent », que les autorités britanniques n’étaient pas conscientes d’une pratique généralisée de fausses déclarations en douane.

( 112 ) Voir message d’assistance mutuelle AM 2007/015 du 20 avril 2007. Par ailleurs, ce message d’assistance mutuelle indiquait déjà, après une enquête initiale, l’existence de ce problème détecté en Allemagne en 2005.

( 113 ) Ce message d’assistance mutuelle appelait déjà « tous les États membres » à rechercher « les indices éventuels d’un maintien des factures [pour des produits textiles et de chaussures en provenance de Chine] à des niveaux artificiellement faibles » ; à « déterminer la valeur réelle [...] des marchandises [en présence de tels indices de sous-évaluation] » ; à « procéder à des contrôles appropriés lors des dédouanements effectués à l’avenir sur [de telles importations] », et à « prendre des mesures de sauvegarde appropriées ».

( 114 ) Voir message d’assistance mutuelle AM 2007/015 du 20 avril 2007, notamment point 12.

( 115 ) Voir message d’assistance mutuelle AM 2009/001 du 23 janvier 2009, notamment points 10 à 12. Il portait également à l’attention des États membres, à cet égard, sur les conseils que l’OLAF avait déjà donnés dans le message d’assistance mutuelle AM 2007/015 du 20 avril 2007. Plus spécifiquement, il demandait à tous les États membres de « repérer les envois à haut risque » et de « vérifier l’existence des importateurs ». Par ailleurs, il convient de souligner que le message d’assistance mutuelle AM 2015/013, invoqué notamment par la République portugaise dans son mémoire en intervention, rappelle les avertissements envoyés par l’OLAF aux États membres dans les messages AM 2007/015 et AM 2009/001.

( 116 ) Il s’agit des instruments prévus à l’article 17, paragraphe 2, et à l’article 18, paragraphe 1, du règlement (CE) no 515/97 du Conseil, du 13 mars 1997, relatif à l’assistance mutuelle entre les autorités administratives des États membres et à la collaboration entre celles‑ci et la Commission en vue d’assurer la bonne application des réglementations douanière et agricole (JO 1997, L 82, p. 1). Aux termes de cet article 17, paragraphe 2, « [l]a Commission communique aux autorités compétentes de chaque État membre, dès qu’elle en dispose, toutes informations de nature à leur permettre d’assurer le respect des réglementations douanière et agricole ». L’article 18, paragraphe 1, dispose que « [l]a Commission communique ces informations [transmises par les autorités compétentes d’un État membre, lesquelles ont constaté des opérations contraires ou paraissant être contraires aux réglementations douanière et agricole et présentant un intérêt particulier sur le plan communautaire] aux autorités compétentes des autres États membres ».

( 117 ) Sur la compétence de l’Union dans le domaine de l’union douanière et l’exercice des rôles de contrôle par les autorités nationales, voir Albert, J.-L., « Section 1 – Un pluralisme national préservé », Le droit douanier de l’Union européenne, Bruxelles, Bruylant, 2019, p. 466 à 473, et Natarel, V. E., « Le phénomène douanier dans le marché intérieur : à propos de l’exemple français »,Revue des affaires européennes, 2005, no 4, p. 637.

( 118 ) Le Royaume‑Uni invoque également le résumé des conclusions de la réunion du comité du code des douanes, du 9 mars 2012, pour faire valoir que ni l’OLAF ni les États membres ne saisissaient pleinement l’étendue de la fraude en mars 2012. Il résulte de ce document que les informations y contenues ont été seulement réitérées. Voir résumé des conclusions de la réunion du comité du code des douanes du 9 mars 2012, point 5, sous b).

( 119 ) Les opérations douanières conjointes, telles que l’opération Snake, constituent une « surveillance spéciale » au sens de l’article 7 du règlement no 515/97, plus spécifiquement, conformément au point c) de cet article, une surveillance spéciale de la circulation de marchandises identifiées comme faisant l’objet de violations potentielles de la législation douanière. Le but de l’opération est, notamment, de coordonner l’action des États membres au niveau de l’Union afin de mieux lutter contre une fraude spécifique.

( 120 ) Voir, rapport spécial no 19/2017 de la Cour des comptes, intitulé « Procédures d’importation : les intérêts financiers de l’UE pâtissent d’insuffisances au niveau du cadre juridique et d’une mise en œuvre inefficace », point 94.

( 121 ) Ainsi, doit être écarté l’argument avancé par le Royaume‑Uni selon lequel c’est le 16 juin 2015 que l’OLAF, lorsqu’il a adressé aux États membres le message d’assistance mutuelle AM 2015/013, a demandé, pour la première fois, à ceux‑ci de prendre des mesures particulières pour lutter contre la fraude à la sous-évaluation.

( 122 ) Rapport spécial no 24/2015, précité à la note 111 des présentes conclusions. À cet égard, cet État membre cite le point 83 de ce rapport dans lequel la Cour des comptes a indiqué qu’une opération douanière conjointe avec l’OLAF avait permis de constater que « 40 % des [textiles et chaussures originaires de la Chine] [mis] en libre pratique sous le régime douanier 42 étaient sous-évalués ».

( 123 ) La méthodologie OLAF utilise une moyenne des prix des États membres calculée sur une période de 48 mois.

( 124 ) Arrêt du 16 juin 2016, C‑291/15, EU:C:2016:455, points 38 et 39.

( 125 ) Arrêt du 17 mars 2011, C‑23/10, non publié, EU:C:2011:160, points 50 et 54.

( 126 ) Voir point 55 des présentes conclusions.

( 127 ) Arrêt du 16 juin 2016, C‑291/15, EU:C:2016:455.

( 128 ) Arrêt du 17 mars 2011, C‑23/10, non publié, EU:C:2011:160, points 50 et 54.

( 129 ) J’observe que, dans sa requête, la Commission se réfère, certes, à la violation du principe général de coopération loyale consacré à l’article 4, paragraphe 3, TUE comme base juridique du premier moyen. Toutefois, ainsi que cela a déjà été exposé au point 174 des présentes conclusions, l’article 325 TFUE et les dispositions douanières en cause doivent être considérées comme l’expression spécifique de ce principe général, de sorte qu’il n’y a pas lieu d’examiner la violation de l’obligation générale de coopération loyale dans le cadre du présent moyen.

( 130 ) Voir points 175 à 177 des présentes conclusions.

( 131 ) Il me semble que, d’une part, la Commission, en admettant qu’elle doit démontrer, dans sa requête, que les mesures prises par le Royaume-Uni n’étaient pas effectives, accepte cet argument de défense de cet État. D’autre part, la Commission conteste l’argument du Royaume‑Uni selon lequel elle est tenue de démontrer que les éventuelles mesures prises par cet État étaient manifestement inappropriées. Or, compte tenu de l’objectif de lutte contre la fraude consacré à l’article 325 TFUE, ces arguments reviennent, en réalité, à dire la même chose en d’autres termes.

( 132 ) Règlement du Parlement européen et du Conseil du 13 avril 2005 modifiant le règlement no 2913/92 (JO 2005, L 117, p. 13).

( 133 ) Règlement (CE) no 1875/2006 de la Commission, du 18 décembre 2006, modifiant le règlement no 2454/93 (JO 2006, L 360, p 64).

( 134 ) Il s’agit du système de contrôle des importations appelé « Import Control System » (ICS) entré en vigueur le 1er janvier 2011. Cette réglementation concrétisait le programme international lancé à l’origine par les États‑Unis (« Customs Trade Partnership Against Terrorism »), et par la suite, en 2005, par l’Organisation mondiale des douanes (OMD), établissant, notamment, le cadre des normes dites « SAFE » visant à sécuriser les échanges de marchandises sans nuire à leur fluidité en anticipant l’envoi des données aux autorités compétentes.

( 135 ) Souligné par mes soins. En outre, l’article 46, paragraphe 2, du code des douanes de l’Union prévoit que « les contrôles douaniers autres que les contrôles inopinés sont principalement fondés sur l’analyse de risque pratiquée à l’aide de procédés informatiques de traitement des données, et visent à déceler et à évaluer les risques et à élaborer les contre-mesures nécessaires » (souligné par mes soins).

( 136 ) Sur la distinction entre la notion de « gestion de risque » et celle d’« analyse de risque », voir Drobot, E., et Klevleeva, A., « Risk management in customs control », Munich Personal RePEc Archive, 2016. Toutefois, au regard des dispositions de l’article 46 du code des douanes de l’Union et des travaux préparatoires de l’article 13, paragraphe 2, du code des douanes communautaire, l’expression « gestion de risque » semble viser la gestion nationale ou commune (au niveau de l’Union) des risques. La notion d’« analyse de[s] risques » me semble se référer spécifiquement à l’analyse pratiquée par les États, dans le cadre du contrôle douanier, visant « à déceler et à évaluer les risques et à élaborer les contre-mesures nécessaires ».

( 137 ) Voir Widdowson, D., « Managing risk in the customs context », dans De Wolf, L., et Sokol, J. B. (éds), Customs Modernization Handbook, World Bank, Washington D.C., p. 91 à 99.

( 138 ) Voir Widdowson, D., op.cit. Voir, également, Dunne, M. « À propos de la gestion des risques », OMD Actualité, juin 2010, ainsi que Jacob, C., et Zaharia, S., « Risk management – a new priority system customs and its consequences », Munich Personal RePEc Archive Paper 39352, mis à disposition le 17 juin 2012.

( 139 ) Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CEE) no 2913/92 (COM/2003/0452 final), voir modification de l’article 4.

( 140 ) Pourtant, à ma connaissance, il n’existe pas en droit de l’Union de définition de la notion d’« analyse de risque ». L’OMD la qualifie d’« utilisation systématique de l’information pour déterminer dans quelle fréquence les risques déterminés se produisent et la magnitude de leurs conséquences probables ». Voir Berr, C., Répertoire de droit commercial, Douanes, Dalloz, janvier 2013 (actualisation : mars 2019), point 68. Voir, également, le recueil de l’OMD sur la gestion des risques en matière douanière, disponible sur https://ec.europa.eu/taxation_customs/general-information-customs/customs-risk-management/international-cooperation_fr#heading_2.

( 141 ) Voir proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement no 2913/92 (COM/2003/0452 final), exposé des motifs, point 3. Voir, également, communiqué IP/03/1100. Ces propositions ont été approuvées par le Parlement européen, de sorte que le règlement no 648/2005 a été publié au Journal officiel de l’Union européenne le 4 mai 2005 (JO 2005, L 117, p. 13) et est entré en vigueur le 11 mai 2005.

( 142 ) Voir proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement no 2913/92.

( 143 ) Voir point 175 des présentes conclusions.

( 144 ) Voir points 188 à 190 des présentes conclusions.

( 145 ) La Commission invoque d’ailleurs la violation par le Royaume‑Uni de son obligation d’adopter des outils d’analyse de risque dans un délai raisonnable, en soulignant que cet État aurait dû mettre en place ces outils plus tôt.

( 146 ) Le Royaume‑Uni insiste sur le fait qu’il devait « se doter d’installations appropriées pour développer et effectuer des contrôles préalables en dehors du port », « consacrer un temps et des ressources considérables aux travaux préparatoires, à l’élaboration et à l’expérimentation des processus applicables aux contrôles préalables compte tenu de l’ampleur de la fraude, mais aussi à la mise en place des orientations opérationnelles correspondantes, à l’élaboration au niveau national des politiques et des processus en matière de garanties prises sur les envois particuliers soupçonnés de fraude à la sous-évaluation, à l’élaboration d’un programme de surveillance des opérateurs suspects et de leurs chaînes d’approvisionnement, et à la mise en place d’un programme de formation des opérateurs ».

( 147 ) Il est constant que, dans le cadre de l’ACP Discount, qui s’est déroulée en novembre et décembre 2011, le Royaume‑Uni n’a pas eu recours à l’analyse de risque, alors que les lignes directrices de cette opération prévoyaient, entre autres, la détermination d’un seuil de risque à appliquer sur les prix des marchandises. En outre, l’opération Samurai, qui a eu lieu en septembre 2016 et dans le cadre de laquelle le Royaume‑Uni aurait mené des actions de contrôle et d’apprentissage avant dédouanement, a eu une portée limitée, s’étendant uniquement à deux importateurs en particulier. L’opération Breach, menée depuis le mois de mai 2015 et qui serait toujours en cours, selon les affirmations du Royaume‑Uni à l’audience, ne comportait que des mesures visant seulement à contester a posteriori les valeurs jugées trop faibles pour être crédibles (voir rapport OLAF, point 2, notamment 2.1.6 et 2.3, et, également, « Guidelines for preventing and Detecting Irregularities (under-invoicing) in imports of textiles and footwear », points 5 à 9).

( 148 ) Ainsi, il résulte du compte rendu de la réunion entre les HMRC et l’OLAF du 13 juin 2014 que le Royaume‑Uni allait conduire des enquêtes concernant les importateurs qui étaient susceptibles de sous-évaluer les marchandises. Il a été souligné que, dès lors que les autorités britanniques avaient pris des mesures postérieures à la mainlevée, il était « peu probable [...] qu’une quelconque dette soit recouvrée ».

( 149 ) Dans le cadre du présent moyen, il convient d’examiner les critiques de la méthodologie OLAF en tant qu’outil de détection des risques tandis que l’analyse de cette méthodologie en tant que base pour calculer les pertes de ressources propres traditionnelles fait partie de l’examen du deuxième moyen du présent recours.

( 150 ) Les critiques du Royaume‑Uni relatives à l’utilisation de la même méthode pour calculer le déficit de ressources propres traditionnelles seront examinées dans le cadre de l’examen du deuxième moyen du recours.

( 151 ) Après avoir examiné les résultats de l’opération Snake, un certain nombre d’États membres, à savoir la République tchèque, la Hongrie, la République de Pologne, la République de Slovénie et la République slovaque, ont décidé de développer leur propre système de seuil de prix acceptables, cela, notamment, au motif de l’objection émise par la République tchèque selon laquelle cet État membre disposait d’un niveau de prix moyens de marchandises considérablement inférieur. La Commission ajoute que la République de Pologne a soulevé des questions sur la méthodologie OLAF, en demandant au JRC des documents supplémentaires à cet effet. Cette circonstance confirme, à mon sens, que cette méthodologie n’a jamais été considérée par la Commission comme une méthode d’évaluation obligatoire pour les États membres.

( 152 ) Le volet externe de cette compétence est la politique commerciale commune pour laquelle l’Union a également une compétence exclusive en vertu de l’article 3, paragraphe 1, sous e), TFUE, les dispositions du droit dérivé ayant comme base juridique, entre autres, l’article 207 TFUE qui consacre cette politique. En ce qui concerne, notamment, la détermination de la valeur en douane, qui est à l’origine de la fraude douanière en cause, les dispositions du code des douanes communautaire et du code des douanes de l’Union visent à mettre en œuvre l’accord relatif à la mise en œuvre de l’article VII de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994, figurant à l’annexe 1A de l’accord établissant l’Organisation mondiale du commerce, ces règles étant également un domaine de compétence exclusive de l’Union [voir, notamment, avis 1/94 (Accords annexés à l’accord OMC), du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, point 34), et Fabio, M., Customs Law of the European Union, 4e éd., Wolters Kluwer, 2012, point 4.01].

( 153 ) La base juridique du code des douanes de l’Union est constituée par les articles 33, 114 et 207 TFUE.

( 154 ) Sur la répartition des compétences depuis le traité de Lisbonne, voir Grave J.-M., « The Impact of the Lisbon Treaty on Customs Matters : A Legal Assessment », Global Trade and Customs Journal, vol. 5, no 3, 2010, p. 110. Sur le « fédéralisme exécutif », voir Limbach, K., Uniformity of Customs Administration in the European Union , Bloomsbury Publishing, Londres, novembre 2015, p. 132.

( 155 ) En matière de contrôle douanier, les États membres se sont vu conférer certains pouvoirs, si bien que la doctrine évoque la « compétence résiduelle » des États membres dans le domaine douanier (voir, notamment, Albert, J.-L, « L’Union douanière, les apparences d’une solidarité européenne historique », Gestion & finances publiques, vol. 4, no 4, 2017, p. 59 à 69, et Natarel, E., « Le phénomène douanier dans le marché intérieur : à propos de l’exemple français », Revue des affaires européennes, no 4, 2005, p. 637). Sur l’« abandon » des compétences traditionnelles en matière douanière des États au profit des autorités de l’Union, voir, notamment, Soulard, C., « Union douanière – Taxation des marchandises », JurisClasseur Europe, fasc. 500, 2016, points 35 et 58.

( 156 ) Pour cette raison, l’article 33 TFUE prévoit une base juridique relative à la coopération douanière entre les États membres et la Commission. S’agissant, notamment, de la coordination en matière de fraude, il convient d’ajouter que l’article 325, paragraphe 3, TFUE énonce que les États membres coordonnent leur action visant à protéger les intérêts financiers de l’Union contre la fraude, en organisant, avec l’aide de la Commission, une collaboration étroite et régulière entre les autorités compétentes.

( 157 ) Antérieurement article 280 CE.

( 158 ) Voir, par exemple, règlement (CE, Euratom) no 2988/95 du Conseil, du 18 décembre 1995, relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes (JO 1995, L 312, p. 1), règlement (Euratom, CE) no 2185/96 du Conseil, du 11 novembre 1996, relatif aux contrôles et vérifications sur place effectués par la Commission pour la protection des intérêts financiers des Communautés européennes contre les fraudes et autres irrégularités (JO 1996, L 292, p. 2), et règlement (CE) no 1073/1999 du Parlement européen et du Conseil, du 25 mai 1999, relatif aux enquêtes effectuées par l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) (JO 1999, L 136, p. 1).

( 159 ) Voir, notamment, communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen relative à la gestion des risques en matière douanière et à la sécurité de la chaîne d’approvisionnement, COM/2012/0793 final.

( 160 ) S’agissant, plus particulièrement, de la réglementation douanière, le législateur de l’Union a prévu une obligation de recourir à une analyse de risques fondée sur les « critères définis au niveau national, communautaire et, le cas échéant, au niveau international ». Voir libellés de l’article 13, paragraphe 2, du code des douanes communautaire et de l’article 46, paragraphe 2, du code des douanes de l’Union.

( 161 ) Il ressort de l’article 17, paragraphe 1, TUE que la Commission, notamment, « promeut l’intérêt général de l’Union », « surveille l’application du droit de l’Union » et « exerce des fonctions de coordination, d’exécution et de gestion conformément aux conditions prévues par les traités ». Sur l’application de cette disposition en matière douanière, voir Lyons, T., EC Customs Law, Oxford University Press, Oxford, 2018, p. 138.

( 162 ) Voir Lyons, T., op. cit., p. 147.

( 163 ) Dans la « Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen relative à la stratégie et au plan d’action de l’UE sur la gestion des risques en matière douanière : faire face aux risques, renforcer la sécurité de la chaîne d’approvisionnement et faciliter le commerce » (COM/2014/527), la Commission a souligné que la « gestion des risques liés aux mouvements de marchandises […] [requérait] une capacité d’identification, d’évaluation et d’analyse de tout l’éventail des menaces et des risques associés aux marchandises et à leurs mouvements », une telle gestion devant « tenir compte de la diversité des risques, […] de leur impact et de leurs conséquences au cas où ces risques devaient se concrétiser, afin d’atténuer ces risques et de prendre des mesures de contrôle au moment et à l’endroit convenant le mieux dans la chaîne d’approvisionnement. » (voir annexe de la communication, point I).

( 164 ) Voir Charroux, G., et Woerth, E., « Rapport sur l’évaluation de l’action de la douane dans la lutte contre les fraudes et trafics », du 3 juin 2015, pour l’Assemblée nationale, Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques.

( 165 ) Si l’analyse de risque a été introduite dans le code des douanes communautaire en 2005, il a fallu neuf ans pour que la Commission adopte la communication citée à la note 163, qui prévoyait une analyse de la mise en œuvre de la politique de gestion des risques en matière douanière et proposait une stratégie en la matière. Voir, notamment, la « Stratégie de l’UE sur la gestion des risques en matière douanière », annexée à ce document et disponible sur https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=COM%3A2014 %3A0527 %3AFIN.

( 166 ) La Commission a ajouté que, lors du réexamen de l’ACP Discount (novembre et décembre 2011) effectué par les services de la Commission une fois l’action achevée, un large consensus s’est dégagé parmi tous les États membres sur le fait que les seuils de prix justes devraient être maintenus. Pour cette raison, l’opération Snake de 2014 aurait appliqué, à nouveau, le prix minimal acceptable fixé à 50 % du prix moyen corrigé. Les États membres n’auraient pas soulevé la question d’une modification de ce seuil lors de l’analyse des résultats de l’opération Snake. Toutefois, la Commission confirme qu’aucun État membre n’a demandé un abaissement du prix minimal acceptable.

( 167 ) Voir arrêt du 16 juin 2016, EURO 2004. Hungary (C‑291/15, EU:C:2016:455). Au point 38 de cet arrêt, la Cour a pris le soin de souligner que « l’autorité douanière en cause [avait] considéré que la valeur transactionnelle déclarée des marchandises importées était exceptionnellement basse par rapport à la valeur statistique moyenne à l’importation de marchandises comparables », en confirmant ainsi que la « valeur statistique moyenne » des marchandises peut être utilisée afin de contester l’exactitude de la valeur en douane déclarée.

( 168 ) Ce paragraphe a été formulé dans ces termes dès son adoption [voir proposition de règlement (CEE) du Conseil établissant le code des douanes communautaire (COM/90/71final, JO 1990, C 128, p. 1)] et est actuellement repris de manière similaire à l’article 46, paragraphe 1, du code des douanes de l’Union. Sur l’évolution de cette disposition, voir 202 des présentes conclusions.

( 169 ) En outre, j’observe que l’article 5, paragraphe 3, du code des douanes de l’Union, qui définit la notion de « contrôles douaniers », inclut « les actes spécifiques accomplis par les autorités douanières pour garantir la conformité avec la législation douanière et les autres dispositions régissant l’entrée, la sortie, le transit, la circulation, le stockage et la destination particulière de marchandises circulant entre le territoire douanier de l’Union et les pays ou les territoires situés en dehors de ce dernier, et la présence et la circulation sur le territoire douanier de l’Union de marchandises non Union et de marchandises placées sous le régime de la destination particulière ».

( 170 ) Voir, notamment, Albert, J.-L., Le droit douanier de l’Union européenne, Bruxelles, Bruylant, 2019, p. 525.

( 171 ) Voir, notamment, article 73 du code des douanes de l’Union et conclusions de l’avocat général Jääskinen dans l’affaire Codirex Expeditie (C‑542/11, EU:C:2013:123, points 51 et suiv.).

( 172 ) Voir points 175 à 177 des présentes conclusions.

( 173 ) Sur la mission des autorités douanières en vertu de cette disposition, voir Lyons, T., op. cit., p. 72 et suiv.

( 174 ) Le Royaume‑Uni fait valoir que l’opération Breach impliquait également des contrôles préalables. Toutefois, il convient d’observer que, d’une part, le Royaume‑Uni n’a pas précisé en quoi ces contrôles consistaient et que, d’autre part, la phase d’intervention de cette opération se déroulait uniquement sur deux journées. Voir compte rendu de la réunion du 3 février 2016.

( 175 ) Voir points 175 à 177 des présentes conclusions.

( 176 ) L’inefficacité des mesures prises et l’absence de celles‑ci sont corroborées par des rapports de missions d’inspections conduites pendant cette période. La Commission relève avoir identifié plusieurs envois spécifiques présentant des valeurs déclarées très faibles au cours de la période concernée. À titre d’exemple, il ressort du rapport d’inspection 17‑11‑1 que les autorités britanniques ont confirmé qu’elles n’avaient pas mis en place les mesures demandées par l’OLAF à la suite de l’opération Snake en 2014 et que celui‑ci avait de nouveau réclamées dans le rapport d’inspection 16‑11‑1. En outre, il résulte du rapport d’inspection 17‑11‑2 que cinq lots importés le 29 septembre 2017 et sélectionnés par les agents de la Commission présentaient en moyenne une valeur déclarée se situant à 3,3 % seulement du prix moyen corrigé. Les HMRC ont confirmé que les envois ultérieurs déclarés par ces opérateurs avaient été interceptés et que des ordres de recouvrement de droits supplémentaires avaient été émis dans le cadre de l’opération Swift Arrow.

( 177 ) Arrêt du 17 mars 2011, C‑23/10, non publié, EU:C:2011:160, point 50.

( 178 ) Ainsi qu’il ressort du code des douanes de l’Union, le droit douanier de l’Union encourage l’échange de telles informations. Plus particulièrement, il résulte de l’article 46, paragraphe 3, de ce code que les contrôles douaniers sont réalisés dans un cadre commun de gestion des risques, fondé sur l’échange d’informations en matière de risque et de résultats d’analyses de risque entre les administrations douanières et l’établissement de critères et de normes communs en matière de risque, ainsi que de mesures de contrôle et de domaines de contrôle prioritaires. Je note que les paragraphes 4 et 5 de cet article prévoient des obligations similaires.

( 179 ) Arrêt du 17 mars 2011, C‑23/10, non publié, EU:C:2011:160.

( 180 ) L’article 248 du règlement d’application reproduit, dans une très large mesure, les termes de l’article 20 de la directive 82/57/CEE de la Commission, du 17 décembre 1981, fixant certaines dispositions d’application de la directive 79/695/CEE du Conseil, relative à l’harmonisation des procédures de mise en libre pratique des marchandises (JO 1982, L 28, p. 38), alors que l’article 244 du règlement d’exécution vise à mettre en œuvre les dispositions du titre V, chapitre 3, section 1, intitulée « Vérification », , du code des douanes de l’Union.

( 181 ) Disposition qui était en vigueur du début de la période d’infraction jusqu’au 1er mai 2016.

( 182 ) En effet, les versions en langues espagnole, allemande, estonienne, anglaise, française et italienne de l’article 248 du règlement d’application semblent indiquer que la mainlevée est obligatoirement soumise à la constitution d’une garantie.

( 183 ) Version en langue allemande : « Sind die Zollbehörden der Auffassung, dass aufgrund einer Überprüfung der Zollanmeldung höhere Einfuhr- oder Ausfuhrabgaben oder andere Abgaben zu entrichten sein könnten als aufgrund der Angaben in der Zollanmeldung, so kann die Überlassung der Waren von einer Sicherheitsleistung abhängig gemacht werden, die die Differenz zwischen dem aufgrund der Angaben in der Zollanmeldung ermittelten Betrag und dem Betrag abdeckt, der letztlich zu entrichten sein könnte. » Version en langue estonienne : « Kui toll leiab, et tollideklaratsiooni õigsuse kontrollimisest tulenev impordi- või eksporditollimaksu või muude tasutavate maksude summa võib olla suurem kui tollideklaratsiooni andmetest tulenev summa, võib kauba vabastamine sõltuda tagatise esitamisest, mis on piisav deklaratsiooni andmete põhjal kindlaksmääratud summa ja hiljem tasumisele kuuluda võiva lõppsumma vahe tasumiseks. » (Souligné par mes soins.)

( 184 ) Voir, notamment, arrêt Profisa (C‑63/06, EU:C:2007:233, point 13 et jurisprudence citée).

( 185 ) Voir arrêt du 1er février 2001, D. Wandel (C‑66/99, EU:C:2001:69, point 36), et ordonnance du 16 septembre 2014, Kyocera Mita Europe/Commission (T‑35/11, non publiée, EU:T:2014:795, points 41 et 42). J’observe que l’article 194 du code des douanes de l’Union prévoit des obligations similaires.

( 186 ) Voir, Lyons, T., op. cit., p. 462 et 463.

( 187 ) Voir point 177 des présentes conclusions.

( 188 ) Ces considérants 36 et 37, relatifs à la constitution de garanties, mettent en exergue, notamment, l’objectif de « sauvegarder les intérêts financiers de l’Union et des États membres et pour prévenir les opérations frauduleuses », et précisent qu’il convient de tenir compte du degré de risque et de la situation particulière des opérateurs économiques concernés.

( 189 ) Cette thèse relative à un traitement différent des opérateurs en fonction de leur « légitimité » est corroborée, à mon sens, par l’existence d’un statut particulier, à savoir le statut d’opérateur économique agréé par le code des douanes de l’Union (article 38 et suiv.).

( 190 ) Voir points 201 à 216 des présentes conclusions.

( 191 ) Voir, par analogie, arrêt du 15 décembre 2009, Commission/Allemagne (C‑372/05, EU:C:2009:780, points 72 à 77).

( 192 ) Selon les explications relatives à la Charte, cet article 17 correspond à l’article 1er du premier protocole additionnel (JO 2007, C 303, p. 17).

( 193 ) La Cour EDH a rappelé, maintes fois, que l’article 1er du premier protocole additionnel, qui garantit en substance le droit de propriété, contient trois normes distinctes : la première, qui s’exprime dans la première phrase du premier alinéa et revêt un caractère général, énonce le principe du respect de la propriété ; la deuxième, figurant dans la seconde phrase du même alinéa, vise la privation de propriété et la subordonne à certaines conditions ; quant à la troisième, consignée dans le second alinéa, elle reconnaît aux États contractants le pouvoir, entre autres, de réglementer l’usage des biens conformément à l’intérêt général, en mettant en vigueur les lois qu’ils estiment nécessaires à cette fin. Il ne s’agit pas pour autant de règles dépourvues de rapport entre elles. La deuxième et la troisième ont trait à des exemples particuliers d’atteintes au droit de propriété ; dès lors, elles doivent être interprétées à la lumière du principe consacré par la première [voir, notamment, Cour EDH, 21 février 1986, James et autres c. Royaume‑Uni (CE:ECHR:1986:0221JUD000879379, § 37), et Cour EDH, 16 juin 2015, Sargsyan c. Azerbaïdjan (CE:ECHR:2015:0616JUD004016706, § 217)].

( 194 ) Voir, notamment, Cour EDH, 29 avril 2008, Burden c. Royaume‑Uni (CE:ECHR:2008:0429JUD001337805, § 59).

( 195 ) Voir Cour EDH, 23 octobre 1997, National & Provincial building society, Leeds permanent building society et Yorkshire building society c. Royaume‑Uni (CE:ECHR:1997:1023JUD002131993, § 80).

( 196 ) Voir, à titre d’exemple, arrêt du 14 janvier 2021, Okrazhna prokuratura – Haskovo et Apelativna prokuratura – Plovdiv (C‑393/19, EU:C:2021:8, point 31 et jurisprudence citée).

( 197 ) Sur l’exemple abstrait lorsque l’obligation financière née du prélèvement d’impôts ou d’une contribution peut léser le droit de propriété, voir Cour EDH, 3 juillet 2003, Buffalo s.r.l. en liquidation c. Italie (CE:ECHR:2003:0703JUD003874697, en particulier § 36 et 37).

( 198 ) Le Royaume‑Uni souligne que, dans le cadre de cette opération, 239 opérateurs à haut risque auraient été identifiés et que des ordres de recouvrement a posteriori (avis C18) auraient été notifiés à plusieurs de ces opérateurs. Cet État fait valoir que, lors de ladite opération « [u]ne trentaine d’inspections préalables ont également été réalisées et [que] des échantillons ont été prélevés », sans préciser toutefois quand et dans quelle mesure les échantillons ont été prélevés et pour quelles raisons il a été préféré de renoncer à exiger des garanties avant d’octroyer la mainlevée des marchandises, alors que leur recouvrement a posteriori est, pour des raisons pratiques, une mesure moins efficace.

( 199 ) Rapport OLAF, point 2.1.4.

( 200 ) Selon ses écrits, la Commission n’est pas en mesure de confirmer le chiffre susmentionné avancé par le Royaume‑Uni.

( 201 ) Selon la Commission, ces données démontrent non seulement que le Royaume‑Uni était responsable de 74,60 % des pertes de ressources propres traditionnelles dues à la sous-évaluation des produits textiles et de chaussures en provenance de Chine en 2015, de 79,15 % de ces pertes en 2016 et de 66,90 % de ces mêmes pertes en 2017, mais également que, depuis le lancement de l’opération Swift Arrow et de son extension progressive, ce chiffre aurait considérablement baissé, dès lors qu’il était, par exemple, de 33,86 % en novembre 2017 et de 4,73 % en juin 2018 (base de données Surveillance 2 pour les importations de produits textiles et de chaussures en provenance de Chine). La Commission explique également que, bien que le Royaume‑Uni ait pris des mesures relativement limitées (en ne vérifiant que quelques opérateurs, sur la base de seuils de faible valeur, à quelques ports uniquement), les importations sous-évaluées ont reculé de façon spectaculaire et presque immédiate (moins 90 % en trois mois et moins 96 % en un an).

( 202 ) Le Royaume‑Uni se réfère, notamment, aux opérations ACP Discount, Snake, Breach et Samurai.

( 203 ) Voir points 235 à 240 des présentes conclusions.

( 204 ) En effet, s’il ressort de la jurisprudence de la Cour que les États membres sont tenus de constater un droit de l’Union sur les ressources propres dès que les autorités douanières sont en mesure de calculer le montant des droits qui résulte d’une dette douanière et de déterminer le redevable (arrêts du 23 février 2006, Commission/Espagne, C‑546/03, non publié, EU:C:2006:132, point 29 ; du 15 novembre 2005, Commission/Danemark, C‑392/02, EU:C:2005:683, points 59 et 61 ; du 17 juin 2010, Commission/Italie, C‑423/08, EU:C:2010:347, point 40, et du 17 mars 2011, Commission/Portugal, C‑23/10, non publié, EU:C:2011:160, point 59), il n’est pas nécessaire que la prise en compte ait effectivement lieu (voir, en ce sens, arrêt du 15 novembre 2005, Commission/Danemark, C‑392/02, EU:C:2005:683, Rec. p. I‑9811, point 58), ce qui implique qu’il s’agit de deux régimes juridiques distincts.

( 205 ) Ordonnance du 9 juillet 2008, Gerlach & Co. (C‑477/07, non publiée, EU:C:2008:390, point 22).

( 206 ) Voir, notamment, arrêts du 16 juillet 2009, Distillerie Smeets Hasselt e.a. (C‑126/08, EU:C:2009:470, point 22), du 8 novembre 2012, KGH Belgium (C‑351/11, EU:C:2012:699, point 21), ainsi que ordonnance du 9 juillet 2008, Gerlach & Co. (C‑477/07, non publiée, EU:C:2008:390, point 17) relatifs à l’article 217, paragraphe 1, et à l’article 220, paragraphe 1, du code des douanes communautaire.

( 207 ) Voir arrêt du 17 juin 2010, Commission/Italie (C‑423/08, EU:C:2010:347, points 37 et suiv.).

( 208 ) Voir arrêt du 3 avril 2014, Commission/Royaume-Uni (C–60/13, non publié, EU:C:2014:219, point 40). Pour un aperçu sur le régime des ressources propres, voir Albert, J.-L., Le droit douanier de l’Union européenne, Bruylant, Bruxelles, 2019, p. 132 à 144 ; Berlin, D., Politiques de l’Union européenne, Bruylant, Bruxelles, 2016, p. 53 à 64, et Aubert, M.-H., « Rapport : Système des ressources propres des Communautés européennes », Assemblée nationale (documents d’information de l’Assemblée nationale. Onzième législature, no 3436), Paris, 2001.

( 209 ) Commission européenne, Les finances publiques de l’Union européenne, Office des publications officielles des Communautés européennes, Luxembourg, 2007, p. 143.

( 210 ) Potteau, A., « Budget de l’Union européenne – Contenu du budget », JurisClasseur Europe Traité, fasc. 198, 4 novembre 2016, point 33.

( 211 ) Cette disposition correspond à l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000.

( 212 ) Voir Berlin, D., op.cit., point 34.

( 213 ) Cette disposition a remplacé l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000.

( 214 ) La Cour a déjà jugé qu’« un droit est constaté dès que la créance correspondante a été dûment établie » (arrêt du 22 février 1989, Commission/Italie, 54/87, EU:C:1989:76). Pour un exemple plus récent, voir arrêt du 3 avril 2014, Commission/Royaume‑Uni (C‑60/13, non publié, EU:C:2014:219, point 43 et jurisprudence citée). L’avocate générale Sharpston a d’ailleurs soutenu que les États membres ne jouissaient d’aucune marge à cet égard (conclusions dans l’affaire République tchèque/Commission, C‑575/18 P, EU:C:2020:205, point 43).

( 215 ) Cette disposition a remplacé l’article 17, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000.

( 216 ) Voir, en ce sens, arrêt du 5 octobre 2006, Commission/Allemagne, C‑105/02, EU:C:2006:637, point 87.

( 217 ) La Cour a déjà jugé que la disposition antérieure, l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000, doit être interprétée en ce sens que les États membres ne peuvent pas se dispenser de constater les créances, même s’ils les contestent, sous peine d’admettre que l’équilibre financier de l’Union soit bouleversé, ne fût-ce qu’à titre temporaire, par le comportement d’un État membre (arrêt du 17 mars 2011, Commission/Portugal, C‑23/10, non publié, EU:C:2011:160, point 58). Voir, également, arrêts du 15 novembre 2005, Commission/Danemark (C‑392/02, EU:C:2005:683, points 54 et 60), et du 7 avril 2011, Commission/Finlande (C‑405/09, EU:C:2011:220, point 37 et jurisprudence citée).

( 218 ) Voir arrêt du 8 juillet 2010, Commission/Italie (C‑334/08, EU:C:2010:414, point 67).

( 219 ) La Cour a déjà relevé que, en application de l’article 6, paragraphe 3, sous a) et b), du règlement no 1150/2000, les États membres sont obligés de reprendre dans la comptabilité A les droits constatés conformément à l’article 2 du même règlement au plus tard le premier jour ouvrable après le 19 du deuxième mois suivant celui au cours duquel le droit a été constaté, sans préjudice de la faculté d’inscrire dans la comptabilité B, dans le même délai, les droits constatés qui n’ont « pas encore été recouvrés » et pour lesquels « aucune caution n’a été fournie », ainsi que les droits constatés et « couverts par des garanties, qui font l’objet de contestations et sont susceptibles de subir des variations à la suite des différends survenus » (arrêt du 8 juillet 2010, Commission/Italie, C‑334/08, EU:C:2010:414, point 66 et jurisprudence citée).

( 220 ) Voir, à cet égard, Lyons, T., op. cit., p. 52 et 53.

( 221 ) Voir conclusions de l’avocate générale Trstenjak dans l’affaire Commission/Italie (C‑275/07, EU:C:2008:334, point 82 et note en bas de page 39).

( 222 ) Voir, notamment, arrêts du 21 septembre 1989, Commission/Grèce (C‑68/88, (EU:C:1989:339, point 17) ; du 16 mai 1991, Commission/Pays‑Bas (C‑96/89, EU:C:1991:213, point 38), et du 12 juin 2003, Commission/Italie (C‑363/00, EU:C:2003:335, point 43).

( 223 ) Voir, notamment, arrêt du 11 juillet 2019, Commission/Italie (Ressources propres – Recouvrement d’une dette douanière) (C‑304/18, non publié, EU:C:2019:601, point 70 et jurisprudence citée).

( 224 ) Voir jurisprudence citée à la note 222 des présentes conclusions.

( 225 ) Voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général Lenz dans l’affaire Commission/Grèce (70/86, EU:C:1987:250).

( 226 ) Considérant 3 du règlement no 609/2014 et arrêt du 22 février 1989, Commission/Italie (54/87, EU:C:1989:76).

( 227 ) Voir, en ce sens, arrêts du 5 octobre 2006, Commission/Belgique (C‑275/04, EU:C:2006:641, point 68) ; du 5 octobre 2006, Commission/Pays‑Bas (C‑312/04, EU:C:2006:643, point 54) ; du 5 octobre 2006, Commission/Belgique (C‑377/03, EU:C:2006:638, point 69), et du 19 mars 2009, Commission/Italie (C‑275/07, EU:C:2009:169, point 84).

( 228 ) Voir arrêts du 8 juillet 2010, Commission/Italie (C‑334/08, EU:C:2010:414, point 50 et jurisprudence citée), et du 11 juillet 2019, Commission/Italie (Ressources propres – Recouvrement d’une dette douanière) (C‑304/18, non publié, EU:C:2019:601, point 61).

( 229 ) Voir, notamment, arrêt du 22 février 1989, Commission/Italie (54/87, EU:C:1989:76).

( 230 ) Voir, en ce sens, arrêt du 12 juin 2003, Commission/Italie (C‑363/00, EU:C:2003:335, point 45 et jurisprudence citée).

( 231 ) Voir, en ce sens, arrêts du 3 avril 2014, Commission/Royaume‑Uni (C‑60/13, non publié, EU:C:2014:219, point 50) ; du 17 mars 2011, Commission/Portugal (C‑23/10, non publié, EU:C:2011:160, point 61 et jurisprudence citée), ainsi que du 11 juillet 2019, Commission/Italie (Ressources propres – Recouvrement d’une dette douanière) (C‑304/18, non publié, EU:C:2019:601, point 61).

( 232 ) Quant au nombre d’avis de paiement C18 émis dans le cadre de l’opération Snake, il résulte des explications du Royaume‑Uni relatives à l’annexe D.5 de la duplique et des réponses du Royaume‑Uni aux questions posées par la Cour que ses autorités ont émis 23 avis de paiement C18 d’environ 201828809,62 GBP, ce chiffre étant revu, dans la duplique, en baisse à la hauteur de 192568694,30 GBP, dès lors que toutes les marchandises visées ne relèveraient pas du manquement en cause.

( 233 ) Voir arrêt du 17 septembre 1987, Commission/Grèce (70/86, EU:C:1987:374).

( 234 ) Voir, en ce sens, arrêt du 18 décembre 1986, Commission/Royaume‑Uni (93/85, EU:C:1986:499).

( 235 ) Voir, en ce sens, arrêt du 8 juillet 2010, Commission/Italie (C‑334/08, EU:C:2010:414). Pour un commentaire, voir Potteau, A., « Les finances publiques de l’Union européenne en 2008‑2009 », Revue trimestrielle de droit européen, no 2, 2010, p. 380.

( 236 ) Voir points 201 à 216 et 219 des présentes conclusions.

( 237 ) Voir points 217 à 224 des présentes conclusions.

( 238 ) Voir arrêt du 15 juillet 2010, Gaston Schul (C‑354/09, EU:C:2010:439, point 27 et jurisprudence citée).

( 239 ) Voir, en ce sens, arrêt du 16 juin 2016, EURO 2004. Hungary (C‑291/15, EU:C:2016:455, point 29 et jurisprudence citée).

( 240 ) Voir points 193 à 210 des présentes conclusions.

( 241 ) Annexe D.5 du mémoire en duplique.

( 242 ) Cette position a été exprimée par la Commission dès après l’opération Snake (voir rapport d’inspection 16‑11‑1 figurant à l’annexe A.16 de la requête, point 3.1.1).

( 243 ) En ce qui concerne les avis de paiement C18 Snake, il y avait lieu de déterminer la valeur en douane des importations spécifiques et non l’estimation des pertes pour les ressources propres traditionnelles. Voir, également, point 206 des présentes conclusions.

( 244 ) Voir compte rendu de la réunion du 20 février 2015, annexe B.2 du mémoire en défense.

( 245 ) Réponse du Royaume‑Uni du 22 juin 2018, point 147.

( 246 ) Voir, notamment, arrêt du 11 juillet 2019, Commission/Italie (Ressources propres – Recouvrement d’une dette douanière) (C‑304/18, non publié, EU:C:2019:601).

( 247 ) Ce montant serait susceptible de devoir être réduit d’environ 25 millions de GBP, soit le montant inscrit dans la comptabilité B correspondant aux sommes réclamées dans les avis C18 issus de l’opération Breach et portant sur la période allant de mai 2015 à octobre 2017.

( 248 ) Le Royaume‑Uni ne l’admet qu’à titre supplétif, dans la mesure où sa défense repose sur le rejet de l’existence des violations décrites dans le cadre du premier moyen, tout en proposant, dans le cadre du deuxième moyen, sa propre méthodologie pour mesurer la perte des ressources propres traditionnelles.

( 249 ) Antérieurement les articles 29 à 31 du code des douanes communautaire.

( 250 ) L’expression « moyens raisonnables » implique, selon le Royaume‑Uni, qu’il s’agit de décisions qu’il appartient à l’État membre de prendre dans le cadre de sa compétence exclusive et qu’une très large marge d’appréciation doit lui être accordée dans ses choix de méthodes et d’évaluations. Le Royaume‑Uni aurait besoin de prouver non pas le caractère juste ou non de son estimation, mais seulement son caractère raisonnable. La charge de prouver qu’elle n’est pas raisonnable incomberait pleinement à la Commission.

( 251 ) J’observe que l’article 74 du code des douanes de l’Union (ancien article 31 du code des douanes communautaire) prévoit que, lorsque la valeur en douane ne peut être déterminée par application de l’article 70 du code des douanes de l’Union, il y a lieu de passer successivement aux méthodes prévues par la suite, chacune d’elles ne pouvant être utilisée que si la précédente, dans l’ordre où elles sont présentées, se révèle inutilisable, induisant ainsi une hiérarchie méthodologique. La méthode prévue au paragraphe 3 de cet article 74, dite la méthode de « dernier recours », qui s’appuie sur des « moyens raisonnables », s’applique lorsque les méthodes consacrées aux paragraphes précédents ne peuvent pas s’appliquer. Voir, notamment, Albert, J.-L., « Section 3 – La valeur en douane », Le droit douanier de l’Union européenne, Bruxelles, Bruylant, 2019, p. 255 à 280.

( 252 ) Le Royaume‑Uni fait observer qu’il est déjà arrivé à la Cour de constater des pertes de ressources propres traditionnelles pour un montant précis dans certaines affaires, mais qu’il semble que les conclusions du recours n’avaient alors soulevé aucune objection et/ou que les sommes en question n’étaient pas contestées : voir, par exemple, arrêt du 21 septembre 1989, Commission/Grèce (C‑68/88, EU:C:1989:339). La situation est très différente en l’espèce.

( 253 ) Voir, en ce sens, arrêt du 16 juin 2016, EURO 2004. Hungary (C‑291/15, EU:C:2016:455).

( 254 ) C’est également pour cette raison que doivent être rejetés, à mon sens, les arguments tirés de la méthode subsidiaire prévue à l’article 74, paragraphe 3, du code des douanes de l’Union.

( 255 ) Voir points 193 à 216 et 225 à 227 des présentes conclusions.

( 256 ) Voir point 177 et notes 92 et 265 des présentes conclusions.

( 257 ) C‑575/18 P, EU:C:2020:530.

( 258 ) Voir point 68 de cet arrêt.

( 259 ) Voir, notamment, arrêts du 27 avril 2006, Commission/Allemagne (C‑441/02, EU:C:2006:253, point 48), et du 2 mai 2019, Commission/Croatie (Décharge de Biljane Donje) (C‑250/18, non publié, EU:C:2019:343, point 33).

( 260 ) Le Royaume‑Uni est d’avis également que, outre la fraude, il incombe à la Commission, dans une première phase, de prouver également un lien de causalité entre ce manquement et un dommage ainsi que la recevabilité de sa demande de versement d’un montant déterminé à l’Union.

( 261 ) Voir, arrêt du 16 juin 2016, EURO 2004. Hungary (C‑291/15, EU:C:2016:455, points 23 et 36).

( 262 ) Voir points 159 à 162 des présentes conclusions et jurisprudence y citée.

( 263 ) Voir, notamment, arrêt du 17 novembre 1993, Commission/Espagne (C‑73/92, EU:C:1993:891, point 19).

( 264 ) Voir, notamment, arrêts du 21 septembre 1999, Commission/Irlande (C‑392/96, EU:C:1999:431, points 60 et 61) ; du 26 juin 2003, Commission/France (C‑233/00, EU:C:2003:371, point 62), et du 26 octobre 2006, Commission/Espagne (C‑36/05, EU:C:2006:672, point 38).

( 265 ) Voir, en ce sens, arrêt du 5 juin 2018, Kolev e.a. (C‑612/15, EU:C:2018:392, points 51 et 52).

( 266 ) Voir, en ce sens, arrêts du 15 novembre 2005, Commission/Danemark (C‑392/02, EU:C:2005:683, point 68) ; du 18 octobre 2007, Commission/Danemark (C‑19/05, EU:C:2007:606, point 32), ainsi que du 3 avril 2014, Commission/Royaume‑Uni (C‑60/13, non publié, EU:C:2014:219, point 50). Voir, s’agissant de la doctrine, Meisse, E., « Application du système des ressources propres des Communautés », Europe, no 346/2006, p. 9.

( 267 ) Tout d’abord, s’agissant de l’arrêt arrêt du 17 mars 2011, Commission/Portugal (C‑23/10, non publié, EU:C:2011:160), le Royaume‑Uni fait valoir que la Cour a indiqué que l’État défendeur était responsable de « la perte de recettes consécutive » et que sa responsabilité était engagée « [s]i une erreur commise par les autorités douanières [...] a pour effet que les droits de douane n’ont pas été recouvrés » (points 57 et 61). Ensuite, quant à l’arrêt arrêt du 8 juillet 2010, Commission/Italie (C‑334/08, EU:C:2010:414), selon le Royaume‑Uni, l’État défendeur était tenu responsable d’une perte de ressources propres traditionnelles en raison du comportement erroné de ses autorités, qui ont délivré à une société des autorisations illégales de placer certains produits sous un régime de franchise de droits de douane alors que ceux‑ci étaient normalement passibles de tels droits (point 40). Enfin, pour ce qui est de l’arrêt du 18 octobre 2007, Commission/Danemark (C‑19/05, EU:C:2007:606), le Royaume‑Uni fait valoir que rien n’indiquait que, si les autorités danoises n’avaient pas commis l’erreur consistant à exempter de droits de douane des marchandises en cause, c’est‑à‑dire si elles avaient bien interprété la portée du régime de la destination particulière, le montant des droits de douane perçu et pris en compte aurait été le même.

( 268 ) Arrêt du 31 octobre 2019, Commission/Royaume‑Uni (C‑391/17, EU:C:2019:919), affaire jugée en même temps que l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 31 octobre 2019, Commission/Pays‑Bas (C‑395/17, EU:C:2019:918).

( 269 ) Voir, notamment, arrêt du 31 octobre 2019, Commission/Royaume‑Uni (C‑391/17, EU:C:2019:919, points 92 à 102). C’est donc pour établir l’existence de la responsabilité d’un État membre pour les actions d’un PTOM donnant lieu à une perte de ressources propres pour le budget de l’Union que la Cour a estimé qu’il convenait d’examiner le point de savoir si cet État membre était responsable vis-à-vis de l’Union, en vertu des obligations lui incombant en tant qu’État membre au titre de l’article 4, paragraphe 3, TUE, et s’il était tenu, en vertu de cette disposition, de compenser le montant en cause.

( 270 ) Il s’agit de l’exception d’irrecevabilité soulevée, de manière subsidiaire, dans le cadre du quatrième moyen.

( 271 ) Voir, en ce sens, arrêt du 18 octobre 2007, Commission/Danemark (C‑19/05, EU:C:2007:606, point 34).

( 272 ) Mentionnés notamment au point 197 des présentes conclusions.

( 273 ) Voir, notamment, données de Surveillance 2 affichant les quantités supérieures et inférieures au prix minimal acceptable des importations relevant des chapitres 61 à 64 de la nomenclature combinée en provenance de la Chine de janvier 2015 à août 2018, figurant dans le tableau intitulé « UK [Lowest Acceptable Price] Quantities of imports » à l’annexe A.34 de la requête.

( 274 ) Voir note 40 des présentes conclusions.

( 275 ) Rapport OLAF, p. 8 et 9.

( 276 ) Cette conclusion découle directement des observations de la Commission elle‑même, telles que formulées dans sa requête, dans sa réplique ainsi que des réponses de la Commission aux questions posées par la Cour.

( 277 ) Le Royaume‑Uni présente, dans le cadre du présent recours, une méthodologie également fondée sur des données statistiques.

( 278 ) Arrêt du 17 mars 2011, Commission/Portugal (C‑23/10, non publié, EU:C:2011:160).

( 279 ) Arrêt du 17 mars 2011, Commission/Portugal (C‑23/10, non publié, EU:C:2011:160).

( 280 ) Arrêt du 17 mars 2011, Commission/Portugal (C‑23/10, non publié, EU:C:2011:160, point 63).

( 281 ) Plus particulièrement, la Cour a relevé, au point 66 de cet arrêt, que, afin de quantifier le montant des ressources propres qui n’ont pas été dûment constatées au cours des années en cause sur la base des résultats des contrôles effectués postérieurement à la période d’infraction entre le 1er août et le 31 octobre 2003, la Commission devait comparer le poids moyen constaté par carton de bananes lors desdits contrôles avec le poids moyen déclaré pendant cette même période.

( 282 ) La méthode de calcul du montant à mettre à la disposition du budget communautaire consistait à contrôler l’ensemble des importations de bananes fraîches entre le 1er août et le 31 octobre 2003, puis à calculer, en fonction des résultats de ce contrôle, le poids moyen des bananes importées au cours des années 1998 à 2002 (point 30 de cet arrêt). Selon la Commission, le montant à mettre à la disposition du budget communautaire pour les années 1998 à 2002 s’élevait à 16087604,41 euros (point 29 dudit arrêt).

( 283 ) Arrêt du 17 mars 2011, Commission/Portugal (C‑23/10, non publié, EU :C:2011:160).

( 284 ) Arrêt du 17 mars 2011, Commission/Portugal (C‑23/10, non publié, EU:C:2011:160).

( 285 ) Voir, notamment, arrêts du 12 juillet 1973, Commission/Allemagne (70/72, EU:C:1973:87, point 13), et du 16 octobre 2012, Hongrie/Slovaquie (C‑364/10, EU:C:2012:630, point 68).

( 286 ) Voir point 160 des présentes conclusions.

( 287 ) Voir, notamment, arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10) (C‑644/18, EU:C:2020:895, point 70 et jurisprudence citée).

( 288 ) À cet égard, la Cour a notamment jugé que, lorsqu’un État membre s’est abstenu de soumettre à la TVA un type d’opération en méconnaissance des exigences découlant de la sixième directive 77/388, une telle violation est également susceptible d’engendrer un manquement dudit État membre à son obligation de mettre à la disposition de la Commission, au titre des ressources TVA, les montants correspondant à la taxe qui aurait dû être prélevée sur lesdites opérations [voir, notamment, arrêts du 12 septembre 2000, Commission/France (C‑276/97, EU:C:2000:424, points 49, 56, 61 et 70) ; Commission/Irlande (C‑358/97, EU:C:2000:425, points 58, 65, 69 et 78), ainsi que Commission/Royaume‑Uni (C‑359/97, EU:C:2000:426, points 70, 77 et 87)].

( 289 ) Voir points 183 et 257 des présentes conclusions.

( 290 ) Voir, notamment, arrêts du 26 avril 2005, Commission/Irlande (C‑494/01, EU:C:2005:250, point 44), et du 28 mars 2019, Commission/Irlande (Système de collecte et de traitement des eaux usées) (C‑427/17, non publié, EU:C:2019:269, point 39).

( 291 ) Voir points 184 à 227 des présentes conclusions.

( 292 ) La question relative à la valeur probante des données statistiques n’est pas étrangère aux débats juridiques. Ainsi, en matière antidumping, afin d’établir le pays analogue pour déterminer la valeur normale de produits, la Cour a déjà jugé, dans l’arrêt GLS (C‑338/10, EU:C:2012:158, point 30), qu’il incombe aux institutions de l’Union d’examiner avec toute la diligence requise les informations dont elles disposent, parmi lesquelles figurent notamment les statistiques d’Eurostat, aux fins de rechercher si un pays analogue peut être retenu. Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Bricmate (C‑569/13, EU:C:2015:572, points 65 et 68), la Cour a jugé que « les institutions de l’Union ont pas examiné avec la diligence requise les données contenues dans les statistiques d’Eurostat ». Cette question se pose également dans le domaine de la discrimination indirecte où la Cour, en renvoyant aux directives fondatrices en la matière, rappelle que « la discrimination indirecte peut être établie par tous moyens, y compris sur la base de données statistiques » [voir, notamment, arrêts du 24 septembre 2020, YS (Pensions d’entreprise de personnel cadre) (C‑223/19, EU:C:2020:753, point 50), ainsi que du 3 octobre 2019, Schuch-Ghannadan (C‑274/18, EU:C:2019:828, point 46 et jurisprudence citée)].

( 293 ) La Commission souligne également le caractère scientifique de la méthodologie choisie, sans toutefois préciser de quoi il s’agit.

( 294 ) Rapport d’une société de conseil en annexe A.32 de la requête et annexe B.5 du mémoire en défense, point 2.12).

( 295 ) Voir annexe E.4 des réponses de la Commission.

( 296 ) Voir arrêt du 17 mars 2011, Commission/Portugal (C‑23/10, non publié, EU:C:2011:160, point 63 et jurisprudence citée).

( 297 ) Voir annexe B.32 du mémoire en défense.

( 298 ) L’annexe 6 du rapport OLAF est jointe en annexe A.36 de la requête.

( 299 ) À cet égard, il y a lieu d’approuver la position de la Commission selon laquelle les échantillons de marchandises prélevés par les autorités douanières du Royaume-Uni, pour la période postérieure à 2017, sont dénués de pertinence aux fins de la présente affaire, dès lors qu’ils se situent en dehors de la période d’infraction visée par le recours.

( 300 ) Voir, notamment, réponses écrites du Royaume‑Uni aux questions posées par la Cour.

( 301 ) Voir point 226 des présentes conclusions.

( 302 ) Cette méthode consiste à étudier la « distribution » de différentes « populations », au niveau de la valeur de l’« extrémité de la pointe » du groupe principal (en termes de volume) constitué de prix bas.

( 303 ) Pour une explication plus détaillée de ce chiffre, voir point 252 des présentes conclusions.

( 304 ) Voir note 247 des présentes conclusions.

( 305 ) Voir, en ce sens, arrêts du 14 janvier 2010, Commission/République tchèque (C‑343/08, EU:C:2010:14, point 26) ; du 15 juin 2010, Commission/Espagne (C‑211/08, EU:C:2010:340, point 32), et du 15 novembre 2012, Commission/Portugal (C‑34/11, EU:C:2012:712, point 44).

( 306 ) Voir arrêts du 2 juin 2016, Commission/Pays‑Bas (C‑233/14, EU:C:2016:396, point 35), et du 2 avril 2020, Commission/Pologne, Hongrie et République tchèque (Mécanisme temporaire de relocalisation de demandeurs de protection internationale) (C‑715/17, C‑718/17 et C‑719/17, EU:C:2020:257, point 116).

( 307 ) La Commission souligne, notamment, que, si les autorités du Royaume-Uni estimaient que les montants correspondant aux dettes constatées n’étaient pas adéquats, elles auraient dû apporter les corrections ad hoc et réémettre les avis de paiement.

( 308 ) Voir point 178 de la lettre de la mise en demeure.

( 309 ) Voir, notamment, points 243 et 338 de l’avis motivé figurant à l’annexe A.31.

( 310 ) Voir points 241 à 243 des présentes conclusions.

( 311 ) Ainsi que l’explique la Commission, à supposer, pour un code donné de nomenclature combinée à huit chiffres, que le prix moyen corrigé pour l’Union-28 soit de 15 GBP/kg, la valeur du prix minimal acceptable est alors de 7,50 GBP/kg. Toujours en admettant, poursuit-elle, que, au cours d’un jour donné, neuf importations régulières d’une faible valeur de 10 GBP/kg et une importation sous-évaluée d’une valeur de 1 GBP/kg aient été effectuées, l’agrégation des données quotidiennes donne un prix moyen de 9,1 GBP/kg. Étant donné que ce prix est supérieur au prix minimal acceptable de 7,50 GBP/kg, l’agrégat journalier comprenant l’envoi sous-évalué ne serait alors pas inclus dans les pertes de ressources propres traditionnelles calculées.

( 312 ) Lors de l’audience, la Commission a soutenu qu’il résultait du point 1.12 du rapport d’une société de conseil (annexe A.32 de la requête et annexe B.5 du mémoire en défense) que le Royaume‑Uni admet que les importations sous-évaluées représentent au moins 35 % de toutes les importations du Royaume‑Uni pendant la période d’infraction.

( 313 ) Voir, notamment, rapport d’une société de conseil en annexe A.32 de la requête et en annexe B.5 du mémoire en défense, point 3.5.

( 314 ) Dans sa réponse aux questions de la Cour, le Royaume‑Uni a évoqué également le « volume commun », c’est‑à‑dire le volume des importations qui serait considéré comme étant sous-évalué sur la base des deux méthodes. Son estimation du « volume commun » pour les années 2015 à 2017 est de 992326582 kg.

( 315 ) Comme il résulte du rapport d’une société de conseil, 80 % de la différence des pertes de ressources propres traditionnelles est attribuable à la valeur de référence (selon la méthodologie OLAF, elle serait de 2,26 à 141,95 GBP, alors que, en appliquant le « seuil de conformité » élaboré par le Royaume‑Uni, il serait de 0,10 à 8,90 GBP ; annexe B.5 du mémoire en défense, point 3.3).

( 316 ) Rapport OLAF, point 2.1.5.

( 317 ) Voir point 274 des présentes conclusions.

( 318 ) Voir point 235 des présentes conclusions, qui se réfère, notamment, à l’article 2, paragraphe 1, sous a) et b), de la décision 2007/436 et à l’article 2, paragraphe 1, sous a), de la décision 2014/335.

( 319 ) Voir, notamment, articles 2, 9 et 10 de ces règlements, ainsi que points 236 à 240 des présentes conclusions.

( 320 ) Voir rapport complémentaire d’une société de conseil en annexe B.6 du mémoire en défense, points 2.25 à 2.26.

( 321 ) Est également pertinente l’affirmation de la Commission selon laquelle, en 2016, 87 % des importations de produits textiles et de chaussures du Royaume‑Uni ont été effectuées dans le cadre du régime douanier 42, ce qui implique que ces marchandises étaient destinées à d’autres États membres, alors que, au cours de la même période, le régime douanier 40 n’a été utilisé que pour 13 % des importations de tels produits, qui pouvaient rester sur le marché britannique ou être dirigés vers d’autres États membres.

( 322 ) Voir point 208 des présentes conclusions.

( 323 ) Voir point 126 des présentes conclusions.

( 324 ) Rapport OLAF, point 2.1.2.

( 325 ) Voir, mutatis mutandis, notamment, arrêt du 16 juin 2016, EURO 2004. Hungary (C‑291/15, EU:C:2016:455, point 23). En outre, il y a lieu de réfuter l’argument avancé par la Commission selon lequel cet arrêt autorise le recours aux prix moyens de produits en cause à l’échelle de l’Union pour servir de base à la « réévaluation » des importations sous-évaluées et pour subséquemment calculer les pertes des ressources propres traditionnelles. En effet, dans cette affaire, la Cour a simplement jugé que, lorsque la valeur transactionnelle déclarée est considérée comme étant anormalement faible par rapport aux prix moyens d’achat fondés sur les moyennes statistiques et pratiqués à l’importation de marchandises similaires, il y a lieu de considérer qu’une telle différence de prix apparaît suffisante pour justifier les doutes éprouvés par l’autorité douanière et le rejet, par celle‑ci, de la valeur en douane déclarée des marchandises en cause. Par conséquent, la Cour n’a pas pris position sur le point de savoir quel niveau de prix des produits concernés devrait constituer la valeur de référence pour déterminer la valeur en douane appropriée.

( 326 ) Voir points 295 à 297 des présentes conclusions.

( 327 ) Ce montant se décompose comme suit : 480098912,45 euros en 2014, 325230822,55 euros en 2013, 173404943,81 euros en 2012 et 22777312,79 euros en 2011.

( 328 ) Voir points 241 à 250 des présentes conclusions en ce qui concerne l’annulation des avis de paiement C18 Snake.

( 329 ) Il faut également garder à l’esprit que ce montant est calculé par les autorités du Royaume-Uni sur une base erronée ainsi que cela a déjà été relevé (voir points 247 à 249 des présentes conclusions).

( 330 ) Dans sa réponse aux questions de la Cour, le Royaume‑Uni explique que la raison pour laquelle les avis de paiement C18 Snake réclament un montant de 201828809,62 GBP, alors que le Royaume‑Uni fait référence, dans sa duplique, à un chiffre d’un peu plus de 192568694,30 GBP, tient au fait que ce dernier chiffre exclut les importations en provenance des autres pays que la Chine et les importations de codes de produit autres que les textiles et les chaussures, qui ne font pas l’objet du présent recours. Par ailleurs, le Royaume‑Uni soutient que ce montant de 192568694,30 GBP devrait par la suite être réduit à un montant d’environ 25 millions de GBP. En effet, il y aurait lieu d’appliquer les valeurs seuils de la méthodologie britannique à la place des prix moyens corrigés au niveau de l’Union et de procéder à un ajustement, sur la base de ces mêmes seuils, du volume des marchandises sous-estimées et devant être « réévaluées » puisque ce volume est inférieur au volume calculé en appliquant la méthodologie OLAF (voir, annexes D.5 et D.10 du mémoire en duplique).

( 331 ) Dans son mémoire en défense, le Royaume‑Uni soutient qu’il a émis 27 avis de paiement C18 Breach à la date de présentation dudit mémoire et que les montants correspondants ont été inscrits dans la comptabilité B, et que, pour huit de ces avis, cette inscription a eu lieu en mai 2018. Dans son mémoire en duplique, le Royaume‑Uni indique que le montant total des droits réclamés par la voie desdits avis de recouvrement a entretemps augmenté et que ce chiffre était alors de 45882997,46 GBP (chiffre révisé, après une analyse complémentaire, à 44296285,04 GBP).

( 332 ) Cela signifie que des droits de douane ont été constatés, mais non repris dans la comptabilité A, parce qu’ils n’ont pas encore été recouvrés et qu’aucune caution n’a été fournie (voir article 6, paragraphe 1 et paragraphe 3, sous a) et b), du règlement no 1150/2000.

( 333 ) Date se situant pendant la procédure précontentieuse après la mise en demeure du 9 mars 2018 et avant la date correspondant au délai de deux mois indiqué à l’avis motivé du 24 septembre 2018.

( 334 ) L’avis motivé a été émis le 24 septembre 2018, ce délai venait à expiration deux mois après cette date.

( 335 ) Voir, notamment, arrêts du 4 mai 2017, Commission/Luxembourg (C‑274/15, EU:C:2017:333, point 47) ; du 27 mars 2019, Commission/Allemagne (C‑620/16, EU:C:2019:256, point 39 et jurisprudence citée), ainsi que du 2 avril 2020, Commission/Pologne, Hongrie et République tchèque (Mécanisme temporaire de relocalisation de demandeurs de protection internationale) (C‑715/17, C‑718/17 et C‑719/17, EU:C:2020:257, point 54).

( 336 ) Voir 236 des présentes conclusions.

( 337 ) Voir arguments présentés dans le cadre de l’analyse de l’avis de paiement C18 Snake.

( 338 ) Cependant, je relève que, contrairement à ce que soutient le Royaume‑Uni, cette prise en compte n’entraîne pas l’irrecevabilité du recours pour la période allant du 1er mai 2015 au 11 octobre 2017, dès lors qu’elle concerne seulement la détermination de l’étendue des pertes de ressources propres traditionnelles.

( 339 ) Voir, avis motivé, cadre juridique, point 272 et dispositif.

( 340 ) Voir point 338 de la requête.

( 341 ) Voir point 238 des présentes conclusions.

( 342 ) Voir conclusions de l’avocate générale Trstenjak dans l’affaire Commission/Italie (C‑275/07, EU:C:2008:334, point 89).

( 343 ) Aux termes de l’article 2, troisième alinéa, du règlement2016/804 : « L’article 1er, point 6), est applicable au calcul des intérêts pour le paiement tardif de ressources propres qui sont exigibles après la date d’entrée en vigueur du présent règlement. Toutefois, la limitation à 16 points de pourcentage applicable à la majoration totale du taux d’intérêt [...] s’appliqu[e] également au calcul des intérêts pour le paiement tardif de ressources propres qui étaient exigibles avant la date d’entrée en vigueur du présent règlement, lorsque ces ressources propres n’ont été portées à la connaissance de la Commission ou de l’État membre concerné qu’après la date d’entrée en vigueur du présent règlement. » (souligné par mes soins).

( 344 ) J’observe que le deuxième alinéa du premier chef de conclusions relatif aux dispositions douanières comprend une mention au principe de coopération loyale consacré à l’article 4, paragraphe 3, TUE et que le premier moyen contient une partie relative à la violation de ce principe (voir point 173 des présentes conclusions). Je note également que le second chef de conclusions renvoie à l’article 2, paragraphes 2, et paragraphe 3, sous d), du règlement no 608/2014, sans que la Commission expose dans les motifs de sa requête en quoi cet État aurait manqué à cette disposition, de sorte qu’il y a lieu de rejeter le manquement aux obligations en vertu de ladite disposition.

( 345 ) Voir, en ce sens, arrêts du 21 septembre 1989, Commission/Grèce (68/88, EU:C:1989:339, point 23), et du 31 octobre 2019, Commission/Royaume‑Uni (C‑391/17, EU:C:2019:919, point 93).

( 346 ) Voir, notamment, arrêts du 25 mai 1982, Commission/Pays‑Bas (96/81, EU:C:1982:192, point 7), et du 12 septembre 2000, Commission/Pays‑Bas (C‑408/97, EU:C:2000:427, point 16). Dans cette perspective, il convient de tenir compte du fait que, dans certains domaines, tels que la procédure fiscale en cause, la Commission est largement tributaire des éléments fournis par l’État membre concerné (voir, en ce sens, arrêt du 12 septembre 2000, Commission/Pays‑Bas, C‑408/97, EU:C:2000:427, point 17).

( 347 ) Voir point 319 des présentes conclusions.

( 348 ) L’évaluation juridique en cause avait été demandée lors des inspections 16‑11‑1, 17‑11‑1 et 17‑11‑2 effectuées par la Commission. En outre, il résulte du rapport d’inspection 17‑11‑2 que, lors de celle‑ci, il n’était pas possible de retrouver les dettes correspondant aux différentes déclarations d’importation, ce qui aurait justifié l’annulation de ces avis de paiement. Selon ce rapport, la Commission a demandé à obtenir une copie de l’évaluation juridique des HMRC qui a donné lieu à l’annulation des avis de paiement C18 Snake et les autorités du Royaume-Uni auraient refusé de fournir ce document, affirmant qu’il était confidentiel et soumis à la protection des communications entre un avocat et son client.

( 349 ) Agissant en vertu de l’article 33E(5) de la Finance Act 2003 (loi de finances de 2003).

( 350 ) Voir, notamment, arrêt du 7 mars 2002, Commission/Italie (C‑10/00, EU:C:2002:146), et conclusions de l’avocat général Ruiz-Jarabo Colomer dans les affaires Commission/Finlande (C‑284/05, C‑294/05, C‑372/05, C‑387/05, C‑409/05, C‑461/05 et C‑239/06, EU:C:2009:67, point 168).

( 351 ) Voir rapport d’inspection 16‑11‑1, point 3.1.2., et rapport d’inspection 17‑11‑1, point 3.1.2., figurant respectivement aux annexes A.16 et A.15 de la requête.

( 352 ) Voir arrêt du 7 mars 2002, Commission/Italie (C‑10/00, EU:C:2002:146, point 91).

( 353 ) Arrêt du 7 mars 2002 (C‑10/00, EU:C:2002:146, point 91).

( 354 ) Voir, en ce sens, arrêt Commission/Italie (C‑10/00, EU:C:2002:146, point 44).

( 355 ) Voir point 144 du mémoire en défense.

( 356 ) Il résulte d’une jurisprudence constante de la Cour que la confidentialité des communications écrites entre avocats et clients est protégée au titre du droit de l’Union, pour autant qu’il s’agisse de correspondance échangée dans le cadre et aux fins du droit de la défense du client et qu’elle émane d’avocats indépendants [voir, en ce sens, arrêts du 18 mai 1982, AM & S Europe/Commission (155/79, EU:C:1982:157, points 21 et 27), et du 14 septembre 2010, Akzo Nobel Chemicals et Akcros Chemicals/Commission e.a. (C‑550/07 P, EU:C:2010:512, point 70)].

( 357 ) Voir, notamment, arrêt du 12 novembre 2019, Commission/Irlande (Parc éolien de Derrybrien) (C‑261/18, EU:C:2019:955, point 89 et jurisprudence citée).

( 358 ) Voir point 319 des présentes conclusions.

( 359 ) Pour des éléments plus détaillés sur la base d’imposition, voir Berlin, D., « Taxe sur le chiffre d’affaires – Fonctionnement de la taxe – Régimes spéciaux », JurisClasseur Europe Traité, fasc. 1640, février 2021, points 16 et suiv.

( 360 ) Articles 83 et 84 de la directive 2006/112.

( 361 ) Articles 85 à 87 de la directive 2006/112.

( 362 ) Ce taux uniforme est fixé à 0,30 % par les décisions 2007/436 et 2014/335.

( 363 ) Voir Potteau, A., « Budget de l’Union européenne – Contenu du budget », JurisClasseur Europe Traité, fasc. 198, 4 novembre 2016, point 21.

( 364 ) Selon Potteau, A., le règlement no 1553/89 a écarté tout lien direct entre la ressource provenant de la TVA et les contribuables en imposant comme méthode unique la méthode des recettes, lequel consiste en un simple calcul statistique (voir note 210 des présentes conclusions).

( 365 ) Voir arrêt du 15 novembre 2011, Commission/Allemagne (C‑539/09, EU:C:2011:733, point 71 et jurisprudence citée).

( 366 ) Voir, en ce sens, arrêts du 5 décembre 2017, M.A.S. et M.B. (C‑42/17, EU:C:2017:936, point 31) ; du 7 avril 2016, Degano Trasporti (C‑546/14, EU:C:2016:206, point 22 et jurisprudence citée), et du 26 février 2013, Åkerberg Fransson (C‑617/10, EU:C:2013:105, point 26 ainsi que jurisprudence citée).

( 367 ) Voir arrêt du 5 décembre 2017, M.A.S. et M.B. (C‑42/17, EU:C:2017:936, point 32).

( 368 ) Voir jurisprudence citée aux points 172 à 175 des présentes conclusions.

( 369 ) Voir points 172 et 173 des présentes conclusions.

( 370 ) Sur l’impact de la fraude, voir Boerselli F., « Pragmatic Policies to tackle VAT fraud in the European Union », International VAT monitor, vol. 19, no 5, 2008, p. 333.

( 371 ) Voir, en ce sens, arrêts du 5 décembre 2017, M.A.S. et M.B. (C‑42/17, EU:C:2017:936, point 30) ; du 20 mars 2018, Menci (C‑524/15, EU:C:2018:197, point 19 et jurisprudence citée), et du 2 mai 2018, Scialdone (C‑574/15, EU:C:2018:295, point 27).

( 372 ) Voir point 225 des présentes conclusions.

( 373 ) Voir point 173 des présentes conclusions.

( 374 ) Voir note 21 des présentes conclusions.

( 375 ) Selon l’article 86, paragraphe 1, de la directive 2006/112, la base d’imposition inclut les impôts, droits et prélèvements dus en dehors de l’État membre d’importation et ceux dus à raison de l’importation. Elle comprend également les frais accessoires, tels que ceux d’emballage, de transport et d’assurance, jusqu’au premier lieu de destination des biens sur le territoire de l’État membre d’importation, ainsi que ceux découlant du transport vers un autre lieu de destination se trouvant dans la Communauté, si ce dernier lieu est connu au moment où intervient le fait générateur de la taxe.

( 376 ) Disposition qui correspond à l’article 29, paragraphe 1, du code des douanes communautaire.

( 377 ) Pour une présentation détaillée de l’évaluation des biens ou services importés, voir Bieber, T., « Customs Valuation and Import VAT », Global Trade and Customs Journal, vol. 14, no 2, p. 73.

( 378 ) Voir, en ce sens, arrêt du 18 juin 2020, Commission/Hongrie (Transparence associative) (C‑78/18, EU:C:2020:476, point 36 et jurisprudence citée).

( 379 ) Voir point 337 des présentes conclusions.

( 380 ) Voir note 23 des présentes conclusions.

( 381 ) Voir note 21 des présentes conclusions.

( 382 ) Voir arrêts du 18 juillet 2013, Evita-K (C‑78/12, EU:C:2013:486, point 33), et du 21 novembre 2013, Dixons Retail (C‑494/12, EU:C:2013:758, point 20).

( 383 ) Voir point VI de la synthèse du rapport 13/2011.

( 384 ) Voir points 26 et suiv. du rapport 13/2011.

( 385 ) Voir rapport 13/2011point 55.

( 386 ) Voir rapport spécial no 24/2015, point 85, p. 34, précité à la note 111 des présentes conclusions.

( 387 ) Voir synthèse de ce rapport, point IV, p. 9.

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