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Document 62017CJ0185

    Arrêt de la Cour (dixième chambre) du 22 février 2018.
    Mitnitsa Varna contre « SAKSA » ООD.
    Demande de décision préjudicielle, introduite par l'Administrativen sad - Varna.
    Renvoi préjudiciel – Tarif douanier commun – Classement des marchandises – Norme européenne harmonisée EN 590:2013 – Sous‑position 2710 19 43 de la nomenclature combinée – Critères pertinents en vue du classement d’une marchandise en tant que gazole.
    Affaire C-185/17.

    Court reports – general – 'Information on unpublished decisions' section

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2018:108

    ARRÊT DE LA COUR (dixième chambre)

    22 février 2018 ( *1 )

    « Renvoi préjudiciel – Tarif douanier commun – Classement des marchandises – Norme européenne harmonisée EN 590:2013 – Sous-position 2710 19 43 de la nomenclature combinée – Critères pertinents en vue du classement d’une marchandise en tant que gazole »

    Dans l’affaire C‑185/17,

    ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Administrativen sad - Varna (tribunal administratif de Varna, Bulgarie), par décision du 30 mars 2017, parvenue à la Cour le 10 avril 2017, dans la procédure

    Mitnitsa Varna

    contre

    « SAKSA » ООD,

    en présence de :

    Okrazhna prokuraturaVarna,

    LA COUR (dixième chambre),

    composée de M. E. Levits, président de chambre, Mme M. Berger (rapporteur) et M. F. Biltgen, juges,

    avocat général : M. Y. Bot,

    greffier : M. A. Calot Escobar,

    vu la procédure écrite,

    considérant les observations présentées :

    pour Mitnitsa Varna, par M. G. Kostov, en qualité d’agent,

    pour « SAKSA » ООD, par Me S. Zhelyazkova, адвокат,

    pour le gouvernement bulgare, par Mmes E. Petranova et L. Zaharieva, en qualité d’agents,

    pour la Commission européenne, par M. A. Caeiros ainsi que par Mmes Y. Marinova et P. Mihaylova, en qualité d’agents,

    vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

    rend le présent

    Arrêt

    1

    La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la note g du tableau 3 de la norme harmonisée EN 590, dans sa version du mois de septembre 2013, intitulée « Carburants pour automobiles – Carburants pour moteur diesel (gazole) – Exigences et méthodes d’essai » (ci–après la « norme EN 590:2013 »), ainsi que de la note complémentaire 2 du chapitre 27, sous d) et e), de la nomenclature combinée figurant à l’annexe I du règlement (CEE) no 2658/87 du Conseil, du 23 juillet 1987, relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun (JO 1987, L 256, p. 1), dans sa version résultant du règlement d’exécution (UE) no 1101/2014 de la Commission, du 16 octobre 2014 (JO 2014, L 312, p. 1) (ci–après la « NC »).

    2

    Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Mitnitsa Varna (douanes de Varna, Bulgarie) à « SAKSA » OOD au sujet du classement tarifaire d’une huile minérale au sein de la NC déclarée par cette société.

    Le cadre juridique

    Le droit de l’Union

    La NC

    3

    La NC, instaurée par le règlement no 2658/87, est fondée sur le système harmonisé de désignation et de codification des marchandises, élaboré par le Conseil de coopération douanière, devenu l’Organisation mondiale des douanes (OMD), et institué par la convention internationale sur le système harmonisé de désignation et de codification des marchandises, conclue à Bruxelles le 14 juin 1983. Cette convention a été approuvée, avec son protocole d’amendement du 24 juin 1986, au nom de la Communauté économique européenne, par la décision 87/369/CEE du Conseil, du 7 avril 1987 (JO 1987, L 198, p. 1).

    4

    Les règles générales pour l’interprétation de la NC, qui figurent dans la première partie, titre I, section A, de celle–ci, disposent notamment :

    « Le classement des marchandises dans la nomenclature combinée est effectué conformément aux principes ci-après :

    1.

    Le libellé des titres de sections, de chapitres ou de sous-chapitres est considéré comme n’ayant qu’une valeur indicative, le classement étant déterminé légalement d’après les termes des positions et des notes de sections ou de chapitres et, lorsqu’elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et notes, d’après les règles suivantes.

    [...] »

    5

    La deuxième partie de la NC, intitulée « Tableau des droits », comprend une section V, à laquelle figure notamment le chapitre 27, intitulé « Combustibles minéraux, huiles minérales et produits de leur distillation ; matières bitumineuses ; cires minérales ».

    6

    Le chapitre 27 de la NC comprend la position 2710, laquelle est libellée comme suit :

    « 2710

    Huiles de pétrole ou de minéraux bitumineux, autres que les huiles brutes [...] »

    7

    Ce chapitre 27 comprend également les sous-positions suivantes :

    « 2710 12

    – – Huiles légères et préparations :

    [...]

    [...]

    2710 19

    – – autres :

     

    – – – Huiles moyennes :

    [...]

    [...]

     

    – – – – destinées à d’autres usages :

     

    – – – – – Pétrole lampant :

    2710 19 21

    – – – – – – Carburéacteurs

    2710 19 25

    – – – – – – autre

    [...]

    [...]

     

    – – – Huiles lourdes :

     

    – – – – Gazole :

    [...]

    [...]

     

    – – – – – destiné à d’autres usages :

    2710 19 43

    – – – – – – d’une teneur en poids de soufre n’excédant pas 0,001 % »

    8

    La note complémentaire 2 du chapitre 27 de la NC énonce :

    « Pour l’application du no 2710, on considère comme :

    [...]

    c)

    “huiles moyennes” (sous-positions 2710 19 11 à 2710 19 29), les huiles et préparations distillant en volume, y compris les pertes, moins de 90 % à 210 degrés Celsius et 65 % ou plus à 250 degrés Celsius, d’après la méthode ISO 3405 (équivalente à la méthode ASTM D 86) ;

    d)

    “huiles lourdes” (sous-positions 2710 19 31 à 2710 19 99 et 2710 20 11 à 2710 20 90), les huiles et préparations distillant en volume, y compris les pertes, moins de 65 % à 250 degrés Celsius, d’après la méthode ISO 3405 (équivalente à la méthode ASTM D 86), ou pour lesquelles le pourcentage de distillation à 250 degrés Celsius ne peut être déterminé par cette méthode ;

    e)

    “gazole” (sous-positions 2710 19 31 à 2710 19 48 et 2710 20 11 à 2710 20 19), les huiles lourdes définies au point d) et distillant en volume, y compris les pertes, 85 % ou plus à 350 degrés Celsius, d’après la méthode ISO 3405 (équivalente à la méthode ASTM D 86) ;

    [...] »

    La directive 98/70

    9

    La directive 98/70/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 octobre 1998, concernant la qualité de l’essence et des carburants diesel et modifiant la directive 93/12/CEE du Conseil (JO 1998, L 350, p. 58), telle que modifiée par la directive 2014/77/UE de la Commission, du 10 juin 2014 (JO 2014, L 170, p. 62) (ci-après la « directive 98/70 »), dispose, à son article 1er, intitulé « Champ d’application » :

    « La présente directive fixe, pour les véhicules routiers [...] :

    a)

    aux fins de la protection de la santé et de l’environnement, les spécifications techniques applicables aux carburants destinés à être utilisés pour des moteurs à allumage commandé et des moteurs à allumage par compression, compte tenu des spécifications techniques desdits moteurs ; et

    b)

    un objectif pour la réduction des gaz à effet de serre émis sur l’ensemble du cycle de vie. »

    10

    Aux termes de l’article 4 de cette directive, intitulé « Carburants diesel » :

    « 1.   Les États membres veillent à ce que les carburants diesel ne puissent être mis sur le marché sur leur territoire que s’ils sont conformes aux spécifications fixées à l’annexe II.

    [...] »

    11

    L’annexe II de ladite directive précise les spécifications environnementales applicables aux carburants de type gazole sur le marché destiné aux véhicules équipés de moteur à allumage par compression. Aux termes de la note 1 à cette annexe :

    « Les méthodes d’essai sont celles mentionnées dans la norme EN 590:2013. Les États membres peuvent adopter, le cas échéant, la méthode d’analyse fixée dans la norme de remplacement EN 590:2013, à condition qu’il puisse être établi que cette méthode assure au moins la même exactitude et le même niveau de précision que la méthode d’analyse qu’elle remplace. »

    La norme EN 590:2013

    12

    La norme EN 590:2013 a été élaborée par le Comité technique CEN/TC 19 « Carburants et combustibles gazeux et liquides, lubrifiants et produits connexes, d’origines pétrolière, synthétique et biologique » et approuvée par le Comité européen de normalisation (CEN), le 26 juillet 2013, conformément à un mandat de la Commission européenne, donné le 13 novembre 2006 (M 394 – Mandat adressé au CEN pour la révision de la norme EN 590 en vue de porter la concentration de FAME et de FAEE à 10 % en volume).

    13

    Il est précisé dans l’avant-propos de cette norme :

    « Cette Norme européenne devra recevoir le statut de norme nationale [...], et toutes les normes nationales en contradiction devront être retirées au plus tard en mars 2014.

    [...]

    Le présent document a été élaboré sous mandat donné au CEN par la Commission européenne et l’Association européenne de libre-échange [...]

    Les exigences de la [directive 98/70] [...], y compris celles des Amendements [...], sont prises en comptes. [...] »

    14

    Le point 1 de ladite norme énonce :

    « La présente Norme européenne prescrit des exigences et des méthodes d’essai pour le carburant pour moteur diesel (gazole) mis sur le marché et livré. »

    15

    Le point 5.6.1 de la norme EN 590:2013 est libellé comme suit :

    « Pour les exigences dépendant des conditions climatiques, des options sont prévues pour permettre de fixer au plan national des qualités saisonnières. Les options se composent de six qualités en matière de température limite de filtrabilité (TFL) pour les climats tempérés et de cinq classes différentes pour les climats arctiques ou à hivers rigoureux. Les exigences dépendant des conditions climatiques sont indiquées dans le Tableau 2 (climats tempérés) et Tableau 3 (climats arctiques ou à hivers rigoureux). Lorsqu’il est testé conformément aux méthodes d’essai indiquées dans les Tableaux 2 et 3, le carburant pour moteur diesel (gazole) doit être conforme aux limites prescrites dans ces tableaux. »

    16

    Le tableau 3 de cette norme, intitulé « Exigences et méthodes d’essai relatives aux conditions climatiques – Climats arctiques ou à hivers rigoureux », a le contenu suivant :

    « Propriété

    Unité

    Limites

    Méthode d’essai […]

    Classe 0

    Classe 1

    Classe 2

    Classe 3

    Classe 4

    [...]

    Distillation g), h)

     

     

     

     

     

     

    EN ISO 3405 i)

    EN ISO 3924

    récupéré à 180 °C

    % (V/V) max.

    10,0

    10,0

    10,0

    10,0

    10,0

    récupéré à 340 °C

    % (V/V) min.

    95,0

    95,0

    95,0

    95,0

    95,0

    [...]

    g)

    La définition donnée dans le tarif commun des douanes de l’UE peut ne pas s’appliquer aux classes définies pour les climats arctiques ou à hivers rigoureux.

    [...] »

    Le droit bulgare

    Le code des douanes

    17

    En vertu de l’article 234, paragraphe 1, point 1, du Zakon za mitnitsite (code des douanes), dans sa version applicable à l’affaire au principal, quiconque contourne ou tente de contourner partiellement ou totalement le paiement de droits de douane commet une fraude douanière.

    18

    Il résulte de l’article 234, paragraphe 3, point 1, de ce code que la fraude douanière ayant pour objet des marchandises soumises à accises est sanctionnée, pour les personnes morales, par une sanction pécuniaire de 150 à 250 % du montant des droits non acquittés.

    La norme BDS EN 590:2014

    19

    La norme EN 590:2013 a été transposée en Bulgarie par l’Institut bulgare de normalisation au moyen de la norme BDS EN 590:2014.

    Le litige au principal et les questions préjudicielles

    20

    Le 10 août 2015, le pétrolier Cosmo est arrivé au port de Varna, chargé d’un poids total brut sous vide de 4384630 kg d’huile minérale. SAKSA s’est identifiée comme étant le destinataire de la marchandise et a déclaré celle-ci, décrite comme du « gazole 10PPM hydrotraité, contenant jusqu’à 0,001 % de soufre, pour les zones climatiques arctiques, classe 4 selon la norme EN 590, 1236742 kg sous vide, 1235100 kg à l’air libre, 1517660 litres, densité à 15° Celsius 816,1 kg/m3, dans 24 wagons-citernes, conformément à l’inventaire joint », au bureau des douanes du port de Varna dans la sous-position tarifaire 2710 19 43 de la NC, en vue d’obtenir sa mise en libre pratique.

    21

    Par une lettre du 11 août 2015, le service des douanes de Varna a envoyé, en vue d’une analyse, au laboratoire régional des douanes de Ruse (Bulgarie), deux échantillons de la marchandise déclarée, afin d’en établir la nature et d’en déterminer le classement tarifaire. Ce laboratoire a estimé que l’échantillon étudié était composé d’une huile de pétrole à laquelle ont été ajoutés de la paraffine et des hydrocarbures naphténiques. Les indicateurs de distillation et les autres indicateurs déterminés auraient révélé que cet échantillon avait les caractéristiques propres aux « huiles moyennes », tels qu’ils résultent de la note complémentaire 2, sous c), du chapitre 27 de la NC. Sur la base des résultats obtenus, l’échantillon a été considéré comme étant un produit de la transformation du pétrole, plus précisément du kérosène.

    22

    Étant donné que la marchandise en cause n’a pas été vendue pour des moteurs à réaction, le service des douanes a considéré qu’elle aurait dû être classée sous un code tarifaire autre que celui qui a été déclaré le 10 août 2015, à savoir que celle-ci aurait dû être inscrite dans la sous-position 2710 19 25 de la NC, soumise à des droits de douane de 4,7 % à l’égard des pays tiers. Par conséquent, le directeur des douanes de Varna, par décision du 3 novembre 2015, a rectifié le code tarifaire et a imposé un paiement supplémentaire de droits de douane, d’un montant de 53864,18 leva bulgares (BGN) (environ 27560 euros), et de taxe sur la valeur ajoutée d’un montant de 10772,83 BGN (environ 5500 euros).

    23

    De surcroît, le service des douanes a considéré que la responsabilité pénale à caractère administratif de SAKSA, au sens de l’article 234, paragraphe 1, point 1, du code des douanes, devait être engagée. En conséquence, le 18 février 2016, le directeur des douanes de Varna lui a infligé une sanction pécuniaire d’un montant de 96955,52 BGN (environ 49600 euros) sur la base de l’article 234, paragraphe 3, point 1, du code des douanes, lu conjointement avec l’article 234, paragraphe 1, point 1, de ce code.

    24

    SAKSA a introduit un recours contre cette sanction devant le Varnenski Rayonen sad (tribunal d’arrondissement de Varna, Bulgarie). Par décision du 20 octobre 2016, cette juridiction a annulé la sanction, ayant constaté, sur la base d’une expertise chimique ordonnée sur la demande de SAKSA, que l’huile minérale litigieuse correspondait à la définition d’un carburant pour moteur diesel, destiné aux climats arctiques ou à des conditions d’hivers rigoureux, classe 4, dont les caractéristiques sont déterminées par la norme « EN 590:2014 ».

    25

    Le service des douanes s’est pourvu en cassation contre cette décision devant l’Administrativen sad Varna (tribunal administratif de Varna, Bulgarie). Il fait valoir que la norme EN 590, invoquée par SAKSA, qui prescrit des exigences et des méthodes d’essai pour le carburant pour moteur diesel mis sur le marché, n’est pas déterminante pour établir le classement tarifaire des carburants.

    26

    Selon l’Administrativen sad Varna (tribunal administratif de Varna), il apparaît nécessaire d’interpréter la note figurant dans la norme EN 590 selon laquelle « [l]a définition [de gazole] donnée dans le tarif commun des douanes de l’[Union européenne] peut ne pas s’appliquer aux classes définies pour les climats arctiques ou à hivers rigoureux ». En effet, la définition à laquelle il doit être recouru s’agissant de ce carburant ne ressortirait pas clairement de cette note et ne permettrait pas de délimiter le pouvoir d’appréciation du service douanier compétent à cet égard. De plus, le lien entre les exigences et les méthodes d’examen de ladite norme, d’une part, et le classement tarifaire des carburants, d’autre part, ne serait pas indiqué.

    27

    C’est dans ces conditions que l’Administrativen sad Varna (tribunal administratif de Varna) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

    « 1)

    La règle inscrite dans les explications du tableau 3 de la norme EN 590 (désormais la norme EN 590:2014), selon laquelle “[l]a définition [de gazole] donnée dans le tarif commun des douanes de [l’Union européenne] peut ne pas s’appliquer aux classes définies pour les climats arctiques ou à hivers rigoureux”, signifie-t-elle que, pour ce type de carburant, il est possible de ne pas appliquer les règles générales de la note complémentaire 2 du chapitre 27, sous d) et e), [de la NC] aux fins du classement tarifaire de la marchandise ?

    2)

    En cas de réponse affirmative à la première question et s’il est établi que la marchandise soumise à des droits de douane correspond à la définition du “carburant diesel destiné à être utilisé dans un climat arctique ou dans des conditions d’hivers rudes”, conformément aux critères de la norme EN 590, celle-ci doit-elle être classée sous le code tarifaire 2710 19 43 de la NC, correspondant au “gazole” ou faut-il appliquer les règles générales de la note complémentaire 2 du chapitre 27, sous d) et e), [de la NC] ?

    3)

    En cas de réponse affirmative à la première question, selon quels critères convient-il de déterminer quand s’applique la définition du gazole selon le tarif douanier commun de l’Union européenne et quand il est nécessaire de recourir aux exigences et aux méthodes d’examen de la norme EN 590 aux fins du classement tarifaire de la marchandise ?

    4)

    Les méthodes et les indicateurs d’analyse figurant dans la note complémentaire 2 du chapitre 27, sous d) et e), [de la NC] sont-ils suffisants pour caractériser pleinement et précisément une marchandise en tant que “gazole” ou convient-il de prendre en considération tous les indicateurs chimiques caractéristiques de ladite marchandise ? »

    Sur les questions préjudicielles

    28

    À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, dans le cadre de la procédure de coopération entre les juridictions nationales et la Cour instituée à l’article 267 TFUE, il appartient à celle-ci de donner au juge national une réponse utile qui lui permette de trancher le litige dont il est saisi. Dans cette optique, il incombe, le cas échéant, à la Cour de reformuler les questions qui lui sont soumises (arrêt du 16 février 2017, Aramex Nederland, C‑145/16, EU:C:2017:130, point 19 et jurisprudence citée).

    29

    De plus, il importe de préciser que, si la juridiction de renvoi se réfère à la norme « EN 590:2014 », la version de la norme EN 590 applicable à la date des faits au principal est celle du mois de septembre 2013, qui a été désignée par le CEN comme étant la norme EN 590:2013 et qui est toujours en vigueur.

    30

    Par ses questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi cherche à savoir, en substance, si la NC doit être interprétée en ce sens qu’une huile minérale, telle que celle en cause au principal, peut être classée en tant que gazole dans la sous-position 2710 19 43 de la NC, lorsque celle-ci satisfait aux exigences visées dans la norme EN 590:2013 relatives à un gazole destiné à des climats arctiques ou à hivers rigoureux.

    31

    Selon la jurisprudence constante de la Cour, le critère décisif pour la classification tarifaire des marchandises doit être recherché, d’une manière générale, dans leurs caractéristiques et leurs propriétés objectives, telles que définies par le libellé de la position de la NC et des notes de section ou de chapitre (arrêt du 19 octobre 2017, Lutz, C‑556/16, EU:C:2017:777, point 37 et jurisprudence citée). Ces caractéristiques et ces propriétés objectives des produits doivent pouvoir être vérifiées au moment du dédouanement (arrêt du 26 mai 2016, Latvijas propāna gāze, C‑286/15, EU:C:2016:363, point 33 et jurisprudence citée).

    32

    En l’occurrence, il convient de relever que la sous-position 2710 19 43 de la NC, dont le libellé vise le gazole d’une teneur en poids de soufre n’excédant pas 0,001 %, fait partie de la position 2710 de la NC, qui concerne les huiles de pétrole ou de minéraux bitumineux, autres que les huiles brutes. Pour l’application de cette position, la note complémentaire 2 du chapitre 27 de la NC définit, sous e), la notion de « gazole ».

    33

    À cet égard, il ressort du libellé de ce point e), lu en combinaison avec le point d) de cette note complémentaire, que sont considérées comme étant du « gazole », notamment, les huiles et les préparations distillant en volume, y compris les pertes, moins de 65 % à 250° Celsius et 85 % ou plus à 350° Celsius, selon la méthode ISO 3405.

    34

    Partant, il résulte du libellé même de ces points que, aux fins du classement tarifaire d’une marchandise en tant que gazole, seul est déterminant dans le cadre de la position 2710 de la NC, le taux de distillation aux températures indiquées, selon la méthode ISO 3405.

    35

    Par conséquent, dès lors que, en l’occurrence, il n’est pas contesté entre les parties à la procédure au principal que l’huile minérale en cause distille, selon la méthode ISO 3405, plus de 65 % à 250° Celsius, celle-ci ne relève pas de la définition de « gazole », conformément à la note complémentaire 2, sous e), du chapitre 27 de la NC, et ne peut être classée dans les sous-positions afférentes aux produits relevant de cette définition.

    36

    En outre, si SAKSA fait valoir que le produit en cause a été vendu, après avoir été importé, en tant que gazole (carburant diesel), il convient de rappeler que la destination d’un produit n’est un critère pertinent que si le classement ne peut se faire sur la seule base des caractéristiques et des propriétés objectives du produit (arrêt du 16 février 2017, Aramex Nederland, C‑145/16, EU:C:2017:130, point 23 et jurisprudence citée). Or, tel n’est pas le cas en l’occurrence, dès lors qu’il ressort précisément des caractéristiques de distillation de ce produit qu’il ne rentre pas, pour l’application de la position 2710 de la NC, dans la définition du gazole, au sens de cette note complémentaire 2, sous e).

    37

    La circonstance que SAKSA a fait référence à la note g du tableau 3 de la norme EN 590:2013, selon laquelle la définition de « gazole » donnée dans la NC « peut ne pas s’appliquer aux classes définies pour les climats arctiques ou à hivers rigoureux », est sans incidence à cet égard.

    38

    En effet, la norme EN 590:2013 a été adoptée non par un organe de l’Union, mais par le CEN, un organisme de droit privé.

    39

    Certes, il peut être déduit de la jurisprudence de la Cour qu’une norme harmonisée, élaborée par un organisme de droit privé, peut être considérée comme faisant partie de l’ordre juridique de l’Union lorsque cette norme a été conçue à l’initiative et sous la direction ainsi que sous le contrôle de la Commission, et qu’elle produit des effets juridiques obligatoires à la suite de la publication de ses références au Journal officiel de l’Union européenne (voir, en ce sens, arrêt du 27 octobre 2016, James Elliott Construction, C‑613/14, EU:C:2016:821, points 40, 43 et 44).

    40

    Par ailleurs, il est vrai que la norme EN 590:2013 a été élaborée par le CEN sur le fondement du mandat M 394, donné par la Commission le 13 novembre 2006. En outre, après que le CEN a établi cette norme, la Commission a, par la directive 2014/77, actualisé la référence à cette norme dans la note 1 de l’annexe II de la directive 98/70.

    41

    Cependant, il suffit de constater que le renvoi à la norme EN 590:2013 en application de la note 1 de cette annexe II porte uniquement sur les méthodes d’essai mentionnées dans cette norme.

    42

    Dès lors que la note g du tableau 3 de la norme EN 590:2013 ne présente pas de méthode d’essai, elle ne saurait être considérée comme faisant partie du droit de l’Union et est dépourvue de pertinence aux fins d’établir le classement tarifaire des marchandises.

    43

    Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre aux questions posées que la NC doit être interprétée en ce sens qu’une huile minérale, telle que celle en cause au principal, ne peut pas, en raison de ses caractéristiques de distillation, être classée en tant que gazole dans la sous-position 2710 19 43 de la NC, même lorsque cette huile satisfait aux exigences visées dans la norme EN 590:2013 relatives à un gazole destiné à des climats arctiques ou à hivers rigoureux.

    Sur les dépens

    44

    La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

     

    Par ces motifs, la Cour (dixième chambre) dit pour droit :

     

    La nomenclature combinée figurant à l’annexe I du règlement (CEE) no 2658/87 du Conseil, du 23 juillet 1987, relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun, dans sa version résultant du règlement d’exécution (UE) no 1101/2014 de la Commission, du 16 octobre 2014, doit être interprétée en ce sens qu’une huile minérale, telle que celle en cause au principal, ne peut pas, en raison de ses caractéristiques de distillation, être classée en tant que gazole dans la sous-position 2710 19 43 de cette nomenclature, même lorsque cette huile satisfait aux exigences visées dans la norme harmonisée EN 590, dans sa version du mois de septembre 2013, relatives à un gazole destiné à des climats arctiques ou à hivers rigoureux.

     

    Signatures


    ( *1 ) Langue de procédure : le bulgare.

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