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Document 62017CC0569
Opinion of Advocate General Tanchev delivered on 28 March 2019.
Conclusions de l'avocat général M. E. Tanchev, présentées le 28 mars 2019.
Conclusions de l'avocat général M. E. Tanchev, présentées le 28 mars 2019.
ECLI identifier: ECLI:EU:C:2019:271
Édition provisoire
CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. EVGENI TANCHEV
présentées le 28 mars 2019 (1)
Affaire C‑569/17
Commission européenne
contre
Royaume d’Espagne
« Manquement d’État – Article 258 TFUE – Directive 2014/17/UE – Crédit hypothécaire – Article 260, paragraphe 3, TFUE – Manquement à l’obligation de communiquer des mesures de transposition d’une directive adoptée conformément à une procédure législative – Sanctions financières – Astreinte »
I. Introduction
1. Dans la présente affaire, la Commission a introduit un recours en manquement contre le Royaume d’Espagne au titre de l’article 258 TFUE pour ne pas avoir adopté les mesures nécessaires aux fins de transposer, au plus tard le 21 mars 2016, la directive 2014/17/UE du Parlement européen et du Conseil, du 4 février 2014, sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage résidentiel et modifiant les directives 2008/48/CE et 2013/36/UE et le règlement (UE) no 1093/2010 (la « directive sur le crédit hypothécaire ») (2) ou, en tout état de cause, pour avoir omis de communiquer ces mesures à la Commission. La Commission demande également à la Cour d’infliger, conformément à l’article 260, paragraphe 3, TFUE, une astreinte journalière de 105 991.60 euros au Royaume d’Espagne, à compter de la date du prononcé de l’arrêt de la Cour constatant le manquement à l’obligation qui lui incombe de communiquer des mesures de transposition de la directive 2014/17.
2. Par conséquent, cette affaire donne à la Cour l’occasion de se prononcer pour la première fois sur l’interprétation et l’application de l’article 260, paragraphe 3, TFUE (3). Cette disposition, introduite par le traité de Lisbonne, permet à la Commission de former un recours en manquement devant la Cour en vertu de l’article 258 TFUE lorsqu’un État membre a « manqué à son obligation de communiquer des mesures de transposition d’une directive adoptée conformément à une procédure législative » et de demander à la Cour d’infliger dans le même temps des sanctions financières à cet État membre (4).
3. Les problèmes essentiels qui se posent aux fins de la résolution du litige sont, en substance, les points de savoir, premièrement, si l’article 260, paragraphe 3, TFUE s’applique en cas de communication par un État membre de mesures de transposition incomplètes ou incorrectes ; deuxièmement, par rapport à quelles règles doit être calculée l’astreinte infligée au titre de cette disposition ; et, troisièmement, si l’astreinte en cause est proportionnée.
II. Le cadre légal
4. L’article 260, paragraphe 3, TFUE énonce :
« Lorsque la Commission saisit la Cour d’un recours en vertu de l’article 258, estimant que l’État membre concerné a manqué à son obligation de communiquer des mesures de transposition d’une directive adoptée conformément à une procédure législative, elle peut, lorsqu’elle le considère approprié, indiquer le montant d’une somme forfaitaire ou d’une astreinte à payer par cet État, qu’elle estime adapté aux circonstances.
Si la Cour constate le manquement, elle peut infliger à l’État membre concerné le paiement d’une somme forfaitaire ou d’une astreinte dans la limite du montant indiqué par la Commission. L’obligation de paiement prend effet à la date fixée par la Cour dans son arrêt ».
5. L’article 42, paragraphe 1, de la directive 2014/17 énonce :
« Les États membres adoptent et publient, au plus tard le 21 mars 2016, les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive. Ils communiquent immédiatement à la Commission le texte de ces dispositions ».
III. La procédure précontentieuse
6. N’ayant reçu, à l’expiration du délai de transposition du 21 mars 2016, aucune communication du Royaume d’Espagne concernant les mesures de transposition de la directive 2014/17 en droit espagnol, la Commission lui a adressé une lettre de mise en demeure, en date du 26 mai 2016, l’invitant à procéder à cette communication.
7. Dans sa réponse transmise par courrier en date du 28 juillet 2016, le Royaume d’Espagne a indiqué qu’il n’avait pas été en mesure de transposer la directive 2014/17 en raison de circonstances exceptionnelles liées à la nature intérimaire du gouvernement, mais que des travaux préparatoires concernant le projet de loi de transposition de cette directive avaient débuté.
8. Par avis motivé du 17 novembre 2016, la Commission a indiqué que le Royaume d’Espagne n’avait toujours pas adopté les mesures de transposition de la directive 2014/17 ni communiqué ces mesures. La Commission l’a invité à prendre les mesures nécessaires dans un délai de deux mois à compter de la réception de cet avis motivé.
9. Dans sa réponse à cet avis motivé, transmise par courrier en date du 19 janvier 2017, le Royaume d’Espagne a informé la Commission de l’état d’avancement de l’avant-projet de loi de transposition de la directive 2014/17.
10. Considérant que le Royaume d’Espagne n’avait toujours pas transposé la directive 2014/17 ni communiqué aucune mesure de transposition, la Commission a décidé, le 27 avril 2017, d’introduire un recours en manquement devant la Cour.
IV. La procédure devant la Cour
11. Par sa requête présentée le 27 septembre 2017, la Commission a formé le présent recours devant la Cour sur le fondement de l’article 258 et de l’article 260, paragraphe 3, TFUE. La Commission conclut à ce qu’il plaise à la Cour :
– premièrement, constater que, en ayant omis d’adopter avant le 21 mars 2016 les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la directive 2014/17 ou, en tout état de cause, en ayant omis de communiquer ces dispositions à la Commission, le Royaume d’Espagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 42, paragraphe 1, de cette directive ;
– deuxièmement, condamner le Royaume d’Espagne, conformément à l’article 260, paragraphe 3, TFUE, au paiement d’une astreinte journalière de 105 991.60 euros, avec effet à compter de la date du prononcé de l’arrêt constatant le manquement à l’obligation d’adopter ou, en tout état de cause, de communiquer à la Commission les dispositions nécessaires pour se conformer à la directive 2014/17 ; et
– troisièmement, condamner le Royaume d’Espagne aux dépens.
12. Dans son mémoire en défense, déposé le 15 décembre 2017, le Royaume d’Espagne conclut à ce qu’il plaise à la Cour :
– premièrement, rejeter le présent recours dans son intégralité ou, à titre subsidiaire, réduire le montant de l’astreinte ; et
– deuxièmement, condamner la Commission aux dépens.
13. La Commission et le Royaume d’Espagne ont également déposé un mémoire en réplique et un mémoire en duplique, respectivement le 26 janvier et le 12 mars 2018.
14. Par requête présentée le 26 décembre 2017, la République française a demandé à intervenir à la procédure au soutien du Royaume d’Espagne. Par décision du 30 janvier 2018, il a été fait droit à sa demande d’intervention et, le 7 mars 2018, la République française a déposé son mémoire en intervention. Le 14 mai 2018, la Commission et le Royaume d’Espagne ont présenté des observations sur le mémoire en intervention de la République française.
15. Une audience s’est tenue le 21 janvier 2019, au cours de laquelle la Commission, le Royaume d’Espagne et la République française ont présenté des observations orales.
V. Les arguments des parties
A. Le manquement au titre de l’article 258 TFUE
16. La Commission fait valoir que le Royaume d’Espagne n’a pas adopté, à la date limite du 21 mars 2016 prévue à l’article 42, paragraphe 1, de la directive 2014/17, les mesures nécessaires pour transposer cette directive ni communiqué ces mesures à la Commission.
17. Le Royaume d’Espagne ne conteste pas ne pas avoir communiqué de mesures de transposition de la directive 2014/17. Le Royaume d’Espagne a indiqué lors de l’audience que la loi nationale de transposition devait être adoptée le 14 février 2019.
B. L’application de l’article 260, paragraphe 3, TFUE
18. La Commission soumet tout d’abord quelques observations liminaires relatives à sa communication de 2011 sur la mise en œuvre de l’article 260, paragraphe 3, TFUE (ci-après la « communication de 2011 ») (5). La Commission souligne notamment que l’objectif de l’article 260, paragraphe 3, TFUE est d’inciter plus fortement les États membres à transposer les directives dans les délais fixés par le législateur de l’Union et à assurer ainsi l’efficacité réelle de la législation de l’Union (6). En outre, en réponse aux arguments de la République française, la Commission fait valoir que l’article 260, paragraphe 3, TFUE ne sanctionne pas seulement un manquement à l’obligation purement « formelle » de communication des mesures de transposition, mais également à l’obligation « matérielle » de procéder à la transposition elle-même, c’est-à-dire, le fait pour l’État membre de ne pas avoir adapté son ordre juridique interne à la directive en question. La Commission soutient ensuite que l’article 260, paragraphe 3, TFUE s’applique à l’omission totale par un État membre de communiquer des mesures de transposition, comme cela est le cas en l’espèce, tout comme à l’omission partielle de communiquer des mesures de transposition, comme cela est le cas lorsque ces mesures ne couvrent pas l’ensemble du territoire de l’État membre ou ne correspondent pas à l’ensemble des dispositions de la directive en question (7).
19. S’agissant de la fixation de sanctions financières, la Commission soutient que les sanctions proposées en vertu de l’article 260, paragraphe 3, TFUE devraient être calculées selon la même méthode que celle prévue à l’article 260, paragraphe 2, TFUE (8). En réponse aux arguments présentés par la République française, la Commission souligne notamment que, par l’introduction de l’article 260, paragraphe 3, TFUE, les traités prévoient que l’omission par un État membre d’adopter et de communiquer des mesures de transposition constitue une violation du droit de l’Union qui n’est pas moins importante que les manquements sanctionnés en vertu de l’article 260, paragraphe 2, TFUE et que cette obligation d’adopter et de communiquer des mesures de transposition découle de l’article 288, troisième alinéa, TFUE et de l’article 4, paragraphe 3, TUE.
20. Par conséquent, la Commission propose l’imposition au Royaume d’Espagne d’une astreinte journalière de 105 991.60 euros, calculée en multipliant le forfait de base uniforme (680) par des coefficients de gravité (10) et de durée (1.3) ainsi que par le facteur « n » (11.99) (9), qui devrait prendre effet à la date du prononcé de l’arrêt de la Cour (10). La Commission demande également à la Cour de ne pas préciser dans son arrêt le compte « Ressources propres de l’Union européenne » sur lequel l’astreinte devrait être payée, afin qu’elle puisse indiquer le compte approprié dans la note de débit établie à l’attention du Royaume d’Espagne, conformément aux règles de l’Union applicables.
21. S’agissant de la gravité du manquement, la Commission propose un coefficient de 10 sur une échelle de 1 à 20, en prenant en compte les critères établis, à savoir, premièrement, l’importance des dispositions du droit de l’Union qui font l’objet du manquement et, deuxièmement, les effets du manquement sur les intérêts généraux et particuliers (11).
22. Premièrement, s’agissant de l’importance de la directive 2014/17, la Commission fait valoir que cette directive vise notamment à établir un marché intérieur plus transparent, efficace et compétitif en matière de contrats de crédit concernant des biens immobiliers à usage résidentiel tout en garantissant un niveau élevé de protection des consommateurs. La Commission souligne que la directive 2014/17 exige des prêteurs qu’ils fournissent certaines informations aux consommateurs et qu’ils évaluent la solvabilité des consommateurs conformément à des normes communes applicables au niveau de l’Union et que cette directive garantit aux consommateurs un certain nombre de droits spécifiques. La Commission souligne ensuite que la directive 2014/17 introduit des normes de qualité et des règles de conduite applicables à tous les prêteurs au sein de l’Union et qu’elle établit un système de passeports permettant aux intermédiaires de crédit autorisés à exercer dans un État membre de proposer leurs services sur tout le territoire de l’Union, ce qui favorise la stabilité financière.
23. Deuxièmement, s’agissant des effets de l’absence de transposition de la directive 2014/17 en droit espagnol, la Commission soutient que les consommateurs espagnols ne peuvent pas se prévaloir des droits que leur accorde cette directive et que les intermédiaires de crédit ne sont pas en mesure d’utiliser le système de passeports pour exercer leurs activités professionnelles. Selon la Commission, l’absence de transposition pourrait avoir des effets néfastes pour la concurrence sur les marchés du crédit hypothécaire, notamment en Espagne, et est susceptible d’entraîner une offre de services plus réduite et des prix plus élevés. La Commission soutient également que, dans une perspective plus large, l’ordre juridique espagnol ne respecte pas les normes strictes de la directive 2014/17 qui visent à garantir que les prêteurs et les intermédiaires de crédit adoptent un comportement responsable sur le marché.
24. À cet égard, la Commission conteste les arguments du Royaume d’Espagne selon lesquels elle a calculé de manière erronée le coefficient de gravité. En particulier, la Commission conteste la pertinence de certaines données fournies par la Banque d’Espagne ainsi que la pertinence d’études réalisées par le Royaume-Uni et invoquées par le Royaume d’Espagne. La Commission a souligné en outre lors de l’audience que l’appréciation de la gravité est une appréciation objective et qu’elle n’est pas tenue de prendre en compte certaines mesures nationales invoquées par le Royaume d’Espagne pour la première fois dans son mémoire en défense, qui ne lui ont pas été communiquées et ne sont pas suffisantes à assurer la transposition de la directive 2014/17.
25. S’agissant de la durée du manquement, la Commission propose un coefficient de 1.3, correspondant à 13 mois multipliés par un facteur de 0.1. Elle considère que cette période débute le jour qui suit l’expiration du délai de transposition de la directive 2014/17 (22 mars 2016) et se termine à la date à laquelle la Commission a décidé d’introduire le recours en manquement (27 avril 2017) (12). À cet égard, la Commission conteste l’argument du Royaume d’Espagne selon lequel la période comprise entre le 20 décembre 2015 et le 29 octobre 2016, au cours de laquelle il existait des difficultés pour constituer un gouvernement, ne devrait pas être prise en considération au titre du coefficient de durée, car cette situation relève de circonstances internes dont il ne doit pas être tenu compte, conformément à la jurisprudence de la Cour.
26. Le Royaume d’Espagne fait valoir tout d’abord que, bien que la Cour puisse statuer dans cette affaire sans devoir se prononcer sur la portée exacte de l’article 260, paragraphe 3, TFUE, il conteste l’interprétation de cette disposition, retenue par la Commission et considère que celle-ci ne s’applique pas aux cas de figure concernant la communication par un État membre de mesures de transposition incomplètes ou incorrectes.
27. En outre, le Royaume d’Espagne considère que la jurisprudence de la Cour en matière de détermination du montant des astreintes sur le fondement de l’article 260, paragraphe 2, TFUE peut s’appliquer par analogie à l’article 260, paragraphe 3, TFUE et il ne conteste pas la demande de la Commission tendant à ce que la Cour ne précise pas le compte sur lequel, le cas échéant, l’astreinte sera payée.
28. En l’espèce, le Royaume d’Espagne soutient toutefois que l’astreinte journalière proposée est disproportionnée, et ce, pour deux raisons.
29. Premièrement, le Royaume d’Espagne affirme que la période comprise entre le 20 décembre 2015 et le 29 octobre 2016, au cours de laquelle prévalait une situation inhabituelle liée à des difficultés à constituer un gouvernement, ne devrait pas être prise en considération au titre du coefficient de durée et il estime que cette circonstance justifie, en tout état de cause, une réduction de l’astreinte. Le Royaume d’Espagne a souligné lors de l’audience que cette situation n’était pas prévisible au cours de la période de transposition de la directive 2014/17.
30. Deuxièmement, le Royaume d’Espagne soutient que la Commission a évalué de manière erronée le coefficient de gravité et, notamment, les effets de l’absence de transposition de la directive 2014/17. À cet égard, le Royaume d’Espagne conteste l’affirmation de la Commission selon laquelle l’absence de transposition pourrait avoir des effets néfastes pour la concurrence sur les marchés du crédit hypothécaire, notamment en Espagne, et est susceptible d’entraîner une offre de services plus réduite et des prix plus élevés (voir point 23 des présentes conclusions), au motif que les données fournies par la Banque d’Espagne montrent que les tarifs des crédits hypothécaires en Espagne sont, dans la majorité des cas, inférieurs à la moyenne de la zone euro et que certaines études réalisées au Royaume‑Uni laissent, en outre, entendre que les effets de la transposition de la directive 2014/17 ne vont pas au-delà d’une simple éventualité en termes d’amélioration de la protection des consommateurs.
31. Le Royaume d’Espagne conteste ensuite l’affirmation de la Commission selon laquelle l’ordre juridique espagnol ne respecte pas les normes strictes de la directive 2014/17 (voir point 23 des présentes conclusions) et il affirme que, depuis 2011, il existe certaines mesures nationales qui réglementent des aspects liés à la directive 2014/17 (13). Le Royaume d’Espagne a souligné lors de l’audience que ces mesures sont pertinentes aux fins de l’examen de la proportionnalité, car elles mettent notamment en œuvre les objectifs de la directive 2014/17 en résolvant les problèmes rencontrés dans le secteur du crédit hypothécaire au-delà du champ d’application de cette directive et que la jurisprudence de la Cour dans l’affaire Gavieiro Gavieiro et Iglesias Torres (14), selon laquelle les mesures ne faisant pas référence à une directive ne sont pas nécessairement exclues en tant que mesures valables de transposition, devrait être étendue à l’article 260, paragraphe 3, TFUE.
32. Au soutien du Royaume d’Espagne, la République française fait valoir que l’article 260, paragraphe 3, TFUE s’applique uniquement à une absence de communication par un État membre de mesures nationales de transposition, alors que l’omission de communiquer des mesures constituant une transposition incomplète ou incorrecte est régie par l’article 258 et l’article 260, paragraphe 2, TFUE. La République française considère également que l’article 260, paragraphe 3, TFUE est applicable s’il ressort d’un examen prima facie des mesures nationales de transposition communiquées à la Commission que ces mesures ne transposent pas l’intégralité de la directive.
33. En ce qui concerne l’évaluation des sanctions financières, la République française soutient notamment que l’article 260, paragraphe 3, TFUE poursuit un autre objectif que l’article 260, paragraphe 2, TFUE. Cette dernière disposition sanctionne la « double violation » du droit de l’Union et le non-respect par un État membre du premier arrêt de la Cour, tandis que l’article 260, paragraphe 3, TFUE sanctionne le manquement par un État membre à une obligation résultant du droit dérivé de l’Union. Partant, la République française fait valoir qu’une échelle moins élevée de coefficients de gravité devrait s’appliquer pour les astreintes prévues par l’article 260, paragraphe 3, TFUE et que le coefficient de gravité de 10 n’est pas justifié en l’espèce.
VI. Analyse
A. Le manquement au titre de l’article 258 TFUE
1. La jurisprudence pertinente de la Cour
34. Il convient de rappeler que les dispositions d’une directive doivent être mises en œuvre avec une force contraignante incontestable, avec la spécificité, la précision et la clarté requises, afin que soit satisfaite l’exigence de la sécurité juridique qui requiert que, lorsque la directive vise à créer des droits pour les particuliers, les bénéficiaires soient mis en mesure de connaître la plénitude de leurs droits (15).
35. En outre, dans le cadre d’un recours fondé sur l’article 258 TFUE, la question de savoir si un État membre a manqué à ses obligations est appréciée en fonction de la situation de l’État membre telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé (16).
36. Ainsi que la Cour l’a également itérativement jugé, un recours introduit sur le fondement de l’article 258 TFUE repose sur la constatation objective du point de savoir si l’État membre a manqué ou non aux obligations qui lui incombent en vertu du droit de l’Union (17). Par conséquent, un État membre ne saurait exciper de dispositions, de pratiques ou de situations relevant de son ordre juridique interne, telles que la tenue d’élections législatives (18) ou le caractère intérimaire du gouvernement (19), pour justifier son manquement aux obligations qui lui incombent en vertu du droit de l’Union, y compris aux délais prescrits par une directive (20).
2. Application en l’espèce
37. En l’espèce, le Royaume d’Espagne ne conteste pas avoir manqué à son obligation, prévue à l’article 42, paragraphe 1, de la directive 2014/17, d’adopter les mesures nécessaires pour transposer cette directive en droit interne et de communiquer ces mesures à la Commission avant l’expiration du délai prescrit dans l’avis motivé, à savoir le 18 janvier 2017 (21).
38. Je propose donc que la Cour considère le premier chef de conclusions de la Commission au titre de l’article 258 TFUE, faisant valoir que le Royaume d’Espagne a manqué à ses obligations de transposer la directive 2014/17 ou de communiquer ces mesures à la Commission, comme étant fondé.
B. L’application de l’article 260, paragraphe 3, TFUE
39. L’aspect essentiel dans cette affaire porte sur la proportionnalité de l’astreinte journalière proposée. Cela soulève certaines questions d’ordre général quant au calcul des sanctions financières au titre de l’article 260, paragraphe 3, TFUE, notamment en ce qui concerne le point de savoir si la Commission est autorisée à utiliser la même méthode de calcul pour les sanctions financières infligées en vertu de l’article 260, paragraphe 2, et celles infligées en application de l’article 260, paragraphe 3, TFUE. Cela pose également la question de savoir si la jurisprudence de la Cour concernant la fixation de sanctions financières au titre de l’article 260, paragraphe 2, TFUE s’applique à l’article 260, paragraphe 3, TFUE, et cela suscite enfin des interrogations concernant l’étendue du pouvoir d’appréciation de la Cour au titre de l’article 260, paragraphe 3, TFUE.
40. En outre, bien qu’il soit constant que l’article 260, paragraphe 3, TFUE s’applique dans le cadre de la présente procédure (22), cela soulève néanmoins la question de la signification du « manquement à l’obligation de communiquer des mesures de transposition » visé par cette disposition, que j’examinerai dans un premier temps.
1. Le champ d’application matériel de l’article 260, paragraphe 3, TFUE : le manquement à l’obligation de communiquer des mesures de transposition
41. Conformément à l’article 260, paragraphe 3, TFUE, le champ d’application matériel de cet article se limite aux recours introduits en vertu de l’article 258 TFUE, qui concernent le manquement par un État membre à son obligation de communiquer des mesures de transposition d’une directive adoptée conformément à une procédure législative (23). La réponse à la question de savoir comment il convient d’interpréter le « manquement » par un État membre « à l’obligation de communiquer » des mesures de transposition, visé à l’article 260, paragraphe 3, TFUE, est notablement complexe. La doctrine est divisée sur cette question, certains juristes retenant une approche restrictive (24), tandis que d’autres sont en faveur d’une approche intermédiaire (25) ou large (26).
42. Cette problématique comporte notamment deux questions essentielles étroitement liées. Une première question porte sur le point de savoir si le champ d’application de l’article 260, paragraphe 3, TFUE se limite au manquement par un État membre à son obligation « procédurale » de communiquer des mesures de transposition, ainsi que le soutiennent le Royaume d’Espagne et la République française, ou si le champ d’application de l’article 260, paragraphe 3, TFUE englobe un manquement par un État membre à une obligation « matérielle » de transposition elle-même, comme le fait valoir la Commission. Une deuxième question porte sur le point de savoir si l’article 260, paragraphe 3, TFUE s’applique dans des cas de figure dans lesquels un État membre communique des mesures constituant une transposition incomplète (partielle), comme le soutient la Commission, ou une transposition incorrecte, ainsi que l’affirme l’avocat général Wathelet dans ses conclusions dans l’affaire Commission/Pologne (27).
43. Conformément à une jurisprudence constante, lors de l’interprétation d’une disposition du droit de l’Union, il y a lieu de tenir compte non seulement des termes de celle-ci et des objectifs qu’elle poursuit, mais également de son contexte ainsi que de l’ensemble des dispositions du droit de l’Union. La genèse d’une disposition du droit de l’Union peut également revêtir des éléments pertinents pour son interprétation (28).
44. Partant, je propose d’interpréter l’article 260, paragraphe 3, TFUE au sens d’un manquement par un État membre à son obligation « matérielle » de transposer la directive, qui inclut donc un manquement total par un État membre à l’obligation de communiquer des mesures de transposition, comme cela est le cas en l’espèce, ainsi que la communication par un État membre de mesures constituant une transposition incomplète ou incorrecte de la directive en question. Alors qu’il existe certains arguments convaincants au soutien de chacune des approches interprétatives envisageables, une interprétation large de l’article 260, paragraphe 3, TFUE est, à cet égard, conforme au libellé de l’article 260, paragraphe 3, TFUE et contribue autant que possible à la mise en œuvre des objectifs et du régime prévus par l’article 260, paragraphe 3, TFUE, afin de garantir que l’article 260, paragraphe 3, TFUE constitue un moyen réellement efficace d’assurer la transposition dans les délais des directives par les États membres.
a) Le libellé
45. L’article 260, paragraphe 3, TFUE mentionne un manquement par un État membre « à son obligation de communiquer » des mesures de transposition d’une directive adoptée conformément à une procédure législative. Bien qu’une interprétation littérale de ce libellé soit susceptible de viser simplement le manquement à l’obligation de communiquer des mesures de transposition, il existe des doutes sur le point de savoir si cette disposition peut englober le manquement à l’obligation de transposition, ainsi qu’une transposition incomplète ou incorrecte.
46. Selon moi, l’on ne saurait tirer d’arguments en faveur d’une interprétation restrictive de l’article 260, paragraphe 3, TFUE de l’affirmation selon laquelle un article explicite aurait été prévu si les auteurs du traité avaient visé le manquement à l’obligation de communiquer toutes les mesures de transposition, qui inclurait donc également une transposition incomplète (cette disposition prévoit notamment en néerlandais : « tot mededeling van maatregelen » et non « tot mededeling van de maatregelen » ; en français : « communiquer des mesures de transposition » et non « communiquer les mesures de transposition » ; en allemand : « Verpflichtung verstoßen hat, Maßnahmen zur Umsetzung » et non « Verpflichtung verstoßen hat, die Maßnahmen zur Umsetzung »). Non seulement certaines versions linguistiques sont susceptibles d’être interprétées au sens pertinent de « les mesures » (par exemple, en bulgare « да съобщи за мерките » ; en italien : « comunicare le misure di attuazione » ; en espagnol : « informar sobre las medidas de transposición »), mais le fait que les versions linguistiques susmentionnées mentionnent des « mesures » au sens général (voir également, par exemple, en anglais : « notify measures »; en maltais : « jinnotifika miżuri ») plaide également en faveur d’une interprétation large de l’article 260, paragraphe 3, TFUE.
47. Conformément à la jurisprudence de la Cour, l’information concernant la transposition d’une directive qu’un État membre est tenu de notifier (communiquer) à la Commission, conformément au principe de coopération loyale consacré à l’article 4, paragraphe 3, TUE, doit être claire et précise et indiquer sans ambiguïté quelles sont les mesures législatives, réglementaires et administratives au moyen desquelles l’État membre considère avoir rempli les différentes obligations que lui impose la directive, en permettant ainsi à la Commission de vérifier si cet État membre a réellement et complètement transposé la directive (29).
48. Par conséquent, les obligations de communiquer des mesures de transposition et de transposer la directive sont des obligations liées en ce sens que l’obligation de communiquer des mesures de transposition met en œuvre l’obligation de transposer la directive (30), étant donné que, comme l’a indiqué la Commission, l’obligation de communiquer des mesures de transposition est une étape essentielle pour garantir que l’obligation de transposer la directive est satisfaite. L’obligation incombant à un État membre de prendre toutes les mesures nécessaires pour transposer une directive conformément à la jurisprudence de la Cour (voir point 34 des présentes conclusions) (31) va de pair avec son obligation d’informer la Commission qu’il a procédé à cette transposition (32). Ainsi, la jurisprudence de la Cour (33) plaide en ce sens que l’article 260, paragraphe 3, TFUE, doit être interprété comme incluant une obligation « procédurale » de communiquer des mesures de transposition ainsi qu’une obligation « matérielle » de transposer la directive.
49. Le fait que l’article 260, paragraphe 3, TFUE mentionne un manquement à l’obligation de communiquer des mesures de transposition plutôt qu’un manquement à l’obligation de transposer la directive, apparaît comme un moyen logique, voire ingénieux, de garantir que les États membres remplissent les deux obligations. Il serait également absurde qu’un État membre ait satisfait à son obligation de transposer la directive sans communiquer les mesures de transposition à la Commission à aucun stade de la procédure prévue à l’article 258 et l’article 260, paragraphe 3, TFUE.
b) La genèse de cette disposition
50. L’article 260, paragraphe 3, TFUE tire son origine directe du cercle de discussion sur la Cour de justice qui s’est tenu dans le cadre de la Convention européenne. L’une des questions à l’ordre du jour de ce cercle de discussion portait sur le régime de sanctions dans le cadre de la procédure en manquement. Au cours des discussions initiales, les membres ont généralement fait preuve d’ouverture vis-à-vis de l’idée de prévoir une procédure « fast track » à l’article 228 TCE alors en vigueur (devenu l’article 260 TFUE), en supprimant les exigences de mise en demeure et d’avis motivé, et « pour certaines affaires comme celles de “non-communication” », il a, par exemple, même été proposé d’« attribuer à la Commission le droit de demander à la Cour, lorsqu’elle l’estime opportun, dans la même procédure, à la fois la constatation d’un manquement et la condamnation à une sanction » (34).
51. Le rapport final du cercle de discussion (35) contenait des suggestions concernant ces aspects qui ont été retenues par le Praesidium de la Convention (36). Ainsi que le souligne le document du Praesidium, le système n’était pas suffisamment efficace, dans la mesure où il pouvait s’écouler des années avant qu’une sanction pécuniaire soit infligée à un État membre et, par conséquent, il convenait « de trouver des moyens visant à une plus grande efficacité et simplicité des mécanismes de sanctions pour non - exécution des arrêts de la Cour » (37). À cet effet, parallèlement à la proposition de supprimer l’avis motivé dans la procédure menant au second arrêt, la proposition suivante a été faite :
« Le paragraphe 3 (nouveau) résulte d’une suggestion présentée par la Commission devant le cercle de discussion. Il s’agit d’accorder à la Commission la possibilité de saisir la Cour, à la fois (dans la même procédure) d’un recours en vertu de l’article 226 TCE [désormais article 258 TFUE] et d’une demande d’infliger une sanction. Si, sur demande de la Commission, la Cour inflige la sanction dans le même arrêt de condamnation, une telle sanction s’appliquerait après un certain délai, à compter du prononcé de l’arrêt, si l’État défendeur ne se conformait pas à la condamnation. […] Un tel dispositif permettrait d’alléger et d’accélérer considérablement la procédure pour des sanctions concernant des cas de “non-communication” d’une mesure nationale de transposition » (38).
52. Une note en bas de page indiquait : « On distingue dans la pratique ces cas de “non-communication” (lorsque l’État membre n’a pris aucune mesure de transposition) des cas de transposition incorrecte [lorsque les mesures de transposition prises par l’État membre ne sont pas, de l’avis de la Commission, conformes à la directive (ou loi‑cadre (39))]. Le dispositif proposé ne s’appliquerait pas au deuxième cas de figure » (40).
53. Cette proposition a été reprise dans la version de 2003 du projet de traité constitutionnel [à l’article III-267(3)] (41) de la manière suivante :
« Lorsque la Commission saisit la Cour de justice d’un recours en vertu de l’article III-265 estimant que l’État concerné a manqué à son obligation de communiquer des mesures de transposition d’une loi-cadre européenne, elle peut, lorsqu’elle le considère approprié, demander à la Cour de justice d’infliger, dans le même recours, le paiement d’une somme forfaitaire ou d’une astreinte dans le cas où elle constaterait un manquement. Si la Cour de justice fait droit à la demande de la Commission, le paiement en question prend effet dans le délai imparti par la Cour de justice dans son arrêt. »
54. Dans la version de 2004 du projet de traité constitutionnel, la disposition [visée à l’article III-362(3)] (42) a été scindée en deux paragraphes et modifiée (soulignement en italiques ajouté par mes soins) de la manière suivante :
« Lorsque la Commission saisit la Cour de justice de l’Union européenne d’un recours en vertu de l’article III-360, estimant que l’État membre concerné a manqué à son obligation de communiquer des mesures de transposition d’une loi-cadre européenne, elle peut, lorsqu’elle le considère approprié, indiquer le montant d’une somme forfaitaire ou d’une astreinte à payer par cet État, qu’elle estime adapté aux circonstances.
Si la Cour constate le manquement, elle peut infliger à l’État membre concerné le paiement d’une somme forfaitaire ou d’une astreinte dans la limite du montant indiqué par la Commission. L’obligation de paiement prend effet à la date fixée par la Cour dans son arrêt. »
55. Les travaux préparatoires de l’article 260, paragraphe 3, TFUE permettent de formuler les observations suivantes :
56. Premièrement, il peut être déduit de la note en bas de page figurant dans les documents de la Convention européenne susmentionnés (voir point 52 des présentes conclusions) que l’article 260, paragraphe 3, TFUE, du moins dans sa formulation initiale, a vocation à se limiter aux cas de figure dans lesquels l’État membre omet de prendre et de communiquer des mesures de transposition et que cet article exclut les cas de transposition incorrecte. Toutefois, cette note en bas de page assimile communication et transposition et ne mentionne pas la transposition incomplète qui peut vraisemblablement être incluse, compte tenu de la pratique de la Commission à laquelle cette note en bas de page fait clairement référence (43).
57. Deuxièmement, il peut être déduit de certaines modifications apportées au libellé de la disposition figurant dans la version de 2004 du projet de traité constitutionnel, libellé qui, par rapport aux versions antérieures du texte, est presque identique à celui de l’article 260, paragraphe 3, TFUE, que l’intention des auteurs du traité était, dans une large mesure, d’aligner le libellé des deuxième et troisième paragraphes de l’article 260 TFUE. L’article 260, paragraphe 3, deuxième alinéa, TFUE prévoit que la Cour peut infliger des sanctions financières « dans la limite du montant indiqué par la Commission » et que l’obligation de paiement « prend effet à la date fixée par la Cour dans son arrêt ». Je reviendrai sur cet aspect ultérieurement dans mon analyse (voir points 76 à 79 des présentes conclusions).
58. Troisièmement, il est utile de souligner que quelques commentaires critiques et des propositions visant à supprimer cette disposition ont été exprimés au cours de la Convention européenne. Ces commentaires et propositions résultaient en partie de préoccupations liées au fait que, en premier lieu, si cette disposition se limitait à une obligation procédurale de communiquer des mesures de transposition, cela la rendrait inutile et il ne serait en outre pas approprié d’infliger des sanctions financières uniquement sur ce fondement et, en second lieu, au fait que cela suscitait des difficultés pour déterminer si un État membre avait transposé une directive et pour distinguer entre transposition tardive, incomplète et incorrecte (44).
59. Je suis donc enclin à considérer que, bien que les travaux préparatoires de l’article 260, paragraphe 3, TFUE soient susceptibles de plaider dans une certaine mesure en faveur d’une interprétation restrictive, ces travaux n’apportent pas une réponse concluante.
c) Les objectifs
60. L’article 260, paragraphe 3, TFUE instaure pour l’imposition de sanctions financières à l’encontre d’États membres une procédure dite « accélérée » qui vise à être plus rapide et efficace que la procédure de traditionnelle prévue à l’article 260, paragraphe 2, TFUE. L’imposition de sanctions financières ne dépend plus d’une procédure particulièrement longue qui implique un premier arrêt de la Cour constatant le manquement au titre de l’article 258 TFUE, puis un second arrêt de la Cour rendu sur le fondement de l’article 260, paragraphe 2, TFUE, à la suite du non-respect par l’État membre du premier arrêt. L’article 260, paragraphe 3, TFUE tend également à inciter plus fortement les États membres à transposer les directives dans les délais de manière à garantir l’efficacité et l’application uniforme du droit de l’Union et à veiller ainsi à ce que les citoyens de l’Union puissent bénéficier des droits qui découlent de ces directives.
61. Au regard de ces objectifs, il y a lieu de considérer, premièrement, en accord avec la position retenue par l’avocat général Wathelet dans ses conclusions dans l’affaire Commission/Pologne (45), que s’il était suffisant pour un État membre de communiquer un quelconque document en tant que mesure de transposition, cela viderait l’article 260, paragraphe 3, TFUE de sa substance.
62. Deuxièmement, la procédure prévue à l’article 260, paragraphe 3, TFUE ne doit pas être « entravée » par la pratique de la Commission consistant à introduire des procédures distinctes pour un manquement total ou partiel à l’obligation de transposition et pour une transposition incorrecte (46). Cela est contraire à l’objectif poursuivi par l’article 260, paragraphe 3, TFUE, qui vise à rendre la procédure plus rapide et efficace en associant la constatation du manquement et l’imposition des sanctions dans une seule procédure.
63. Aucune distinction claire ne peut être établie entre les cas de transposition incomplète et de transposition incorrecte et les tentatives d’établir une telle distinction risquent de soulever, dans le cadre de la mise en œuvre de la procédure prévue à l’article 260, paragraphe 3, TFUE, des difficultés susceptibles de compromettre la réalisation des objectifs visés par cette procédure. Cela peut être illustré par des exemples tirés de la jurisprudence de la Cour, dans lesquels un recours en manquement à l’obligation de transposer en tout ou partie la directive comporte un examen des dispositions préexistantes de droit national et, en conséquence, de la conformité de la transposition (47). Cette difficulté est confirmée par le point 19 de la communication de 2011, au titre duquel la Commission indique que les différends liés aux règles existant en droit national doivent être traités conformément à la procédure normale concernant la transposition correcte de la directive prévue à l’article 258 TFUE.
64. Cette distinction est également contraire à la jurisprudence de la Cour et, en particulier, à ses arrêts Commission/Italie (48) et Commission/Luxembourg (49), dans lesquels la Cour a jugé que, dans le cadre de procédures en manquement, la Commission peut convertir un grief tiré d’une absence totale de transposition en un grief tiré d’une transposition incomplète ou incorrecte, lorsque l’État membre communique ses mesures de transposition existantes de manière tardive et rend ainsi difficile pour la Commission de former un recours pour défaut de transposition à un stade précoce ; dans ce cas, le grief tiré d’une transposition incomplète ou incorrecte est inclus dans le grief tiré d’une absence totale de transposition et revêt un caractère subsidiaire par rapport à ce dernier.
65. Il est vrai que la jurisprudence de la Cour est susceptible de fournir des exemples dans lesquels l’absence de transposition d’une directive par un État membre est appréciée séparément du caractère (incomplet ou incorrect) des mesures de transposition (50).Toutefois, ces exemples attestent, selon moi, des difficultés à procéder de la sorte et ne traitent pas des problèmes quant à la mise en œuvre de l’article 260, paragraphe 3, TFUE, résultant de cette distinction.
66. En outre, le fait de se fonder sur un examen prima facie est problématique. Je considère que la Commission dispose d’un pouvoir d’appréciation considérable, du fait de l’examen prima facie des mesures de transposition communiquées, pour déterminer si l’État membre a procédé à une transposition complète. Cela est susceptible, notamment, de favoriser le point de vue de la Commission en ce qui concerne la question de savoir ce qui constitue une transposition (in)complète et cela prive les États membres du pouvoir d’appréciation dont ils disposent en vertu du droit de l’Union pour choisir la forme et les moyens pour transposer les directives, ainsi que le prévoit l’article 288, troisième alinéa, TFUE (51).
d) Le contexte
67. L’article 260, paragraphe 3, TFUE s’inscrit dans le cadre de la procédure en manquement prévue aux articles 258 à 260 TFUE, et, plus précisément, dans le cadre du régime des sanctions financières visé à l’article 260 TFUE. L’article 260, paragraphe 3, TFUE a été introduit conjointement à des modifications apportées à l’article 260, paragraphe 2, TFUE et, donc, en tant que complément à l’article 260, paragraphe 2, TFUE. Par conséquent, les arguments selon lesquels l’article 260, paragraphe 3, TFUE constitue une exception à l’article 260, paragraphe 2, TFUE et devrait être interprété de manière restrictive ne sauraient convaincre.
68. Cela est corroboré par le fait que, conformément à l’article 260, paragraphe 3, TFUE, la Commission bénéficie d’un pouvoir discrétionnaire (« elle peut, lorsqu’elle le considère approprié ») décider si elle sollicite d’avance des sanctions financières en vertu de cette disposition. Aucune obligation en ce sens ne pèse sur la Commission au titre de l’article 260, paragraphe 3, TFUE (52). La Commission peut invoquer à la place l’article 258 TFUE et l’article 260, paragraphe 2, TFUE (53). Ainsi, la procédure traditionnelle prévue à l’article 260, paragraphe 2, TFUE et la procédure accélérée figurant à l’article 260, paragraphe 3, TFUE ne sont pas hermétiques.
69. D’un point de vue plus général, il convient de noter que la version initiale du traité CEE (à la différence du traité CECA) ne contenait pas de dispositions prévoyant des sanctions pour manquement au droit de l’Union par les États membres. Il a fallu 36 ans, avec l’entrée en vigueur du traité de Maastricht (1957-1993), pour introduire l’article 260, paragraphe 2, TFUE (54). Des efforts ultérieurs pour améliorer la rapidité et l’efficacité de la procédure en manquement et du régime de sanctions par des modifications du traité proposées dans le cadre des traités d’Amsterdam et de Nice ont échoué (55). Avec le traité de Lisbonne, presque deux décennies supplémentaires ont été nécessaires (1993-2009) pour l’introduction de l’article 260, paragraphe 3, TFUE.
70. Partant, bien qu’une interprétation restrictive de l’article 260, paragraphe 3, TFUE tendant à restreindre l’application de cette disposition aux cas simples et rapides de manquement par un État membre à l’obligation de communiquer des mesures de transposition en faisant relever tous les autres cas de figure de la procédure traditionnelle prévue à l’article 258 et l’article 260, paragraphe 2, TFUE, peut être intéressante, cette interprétation conduirait à admettre dans la majorité des cas une procédure particulièrement longue et la tentative d’établir une distinction entre la communication de mesures de transposition incomplètes et la communication de mesures de transposition incorrectes porte, de même, atteinte à la mise en œuvre de l’article 260, paragraphe 3, TFUE.
71. Les analyses littérale, historique, téléologique et contextuelle de l’article 260, paragraphe 3, TFUE qui précèdent me conduisent ainsi à conclure que l’interprétation de l’article 260, paragraphe 3, TFUE que je propose, à savoir comme incluant un manquement par un État membre à l’obligation de communiquer des mesures constituant une transposition incomplète ou incorrecte, est l’interprétation qui met le mieux en œuvre les objectifs de l’article 260, paragraphe 3, TFUE et renforce véritablement le régime de sanctions dans l’Union.
2. L’évaluation du montant des sanctions financières en vertu de l’article 260, paragraphe 3, TFUE
72. Considérant que l’article 260, paragraphe 3, TFUE est applicable, j’aborde à présent la question de l’évaluation du montant des sanctions financières en vertu de cette disposition.
73. Premièrement, je trouve convaincante l’argumentation développée par l’avocat général Wathelet dans ses conclusions dans l’affaire Commission/Pologne (56), selon laquelle la Commission devrait pouvoir utiliser la même méthode de calcul des sanctions financières qu’elle propose dans le cadre de l’article 260, paragraphe 2, et au titre de l’article 260, paragraphe 3, TFUE, et ce, notamment, parce que ces sanctions sont les mêmes, les objectifs poursuivis par ces deux dispositions sont similaires et les critères utilisés par la Commission pour les astreintes correspondent à ceux retenus par la Cour dans sa jurisprudence (57), ce qui favorise une approche cohérente et offre de la prévisibilité pour les États membres. Le fait que l’article 260, paragraphe 2, TFUE sanctionne la « double violation » du droit de l’Union et le non-respect par un État membre du premier arrêt de la Cour, alors que l’article 260, paragraphe 3, TFUE sanctionne un manquement unique au droit de l’Union, ne remet pas en cause, selon moi, le fait que les deux dispositions portent sur des manquements qui tirent leur fondement du droit primaire de l’Union.
74. Il convient de souligner que la méthode de calcul de la Commission ne porte pas préjudice aux États membres dans le cadre de la procédure prévue à l’article 260, paragraphe 3, TFUE, dans la mesure où, ainsi que la Cour l’a jugé en ce qui concerne l’article 260, paragraphe 2, TFUE, c’est à elle qu’il appartient d’apprécier au cas par cas le montant des sanctions financières à infliger. Les propositions et lignes directrices de la Commission contenues dans ses communications ne lient pas la Cour, mais constituent simplement une base de référence utile, garantissant la transparence, la prévisibilité et la sécurité juridique de l’action menée par la Commission (58). Ainsi, la jurisprudence de la Cour en matière d’astreintes infligées sur le fondement de l’article 260, paragraphe 2, TFUE devrait, le cas échéant, servir de base de référence lorsque la Cour fixe le montant d’astreintes au titre de l’article 260, paragraphe 3, TFUE.
75. En outre, dans le cadre de sa jurisprudence relative à l’article 260, paragraphe 2, TFUE et, en particulier, dans son arrêt de principe Commission/France (59), la Cour a jugé qu’elle peut infliger, à la fois, des sanctions financières prévues à l’article 260, paragraphe 2, TFUE (60), et une sanction financière non proposée par la Commission, car « l’opportunité d’imposer une sanction pécuniaire et le choix de la sanction la plus adaptée aux circonstances de l’espèce ne peuvent être appréciés qu’à la lumière des constatations faites par la Cour dans l’arrêt à rendre au titre de l’article [260, paragraphe 2, TFUE] et échappent donc à la sphère politique » (61).
76. Il existe des raisons importantes d’estimer que ces considérations s’appliquent à l’article 260, paragraphe 3, TFUE et que la Cour peut donc infliger, à la fois, une somme forfaitaire et une astreinte ou une sanction financière non proposée par la Commission, dans la limite du plafond concernant le montant de la sanction financière, visé à l’article 260, paragraphe 3, TFUE. Cette appréciation se fonde sur le libellé identique de l’article 260, paragraphe 2, et de l’article 260, paragraphe 3, TFUE en ce qui concerne le paiement « d’une somme forfaitaire ou d’une astreinte ». Cette approche répond également de manière plus adéquate aux objectifs de l’article 260, paragraphe 3, TFUE, visant à lutter contre la transposition tardive des directives par les États membres, en tenant compte de la finalité de l’existence de différentes sanctions financières dans les traités (62).
77. Contrairement aux arguments avancés par la Commission lors de l’audience (63), le fait que l’article 260, paragraphe 3, TFUE, et non l’article 260, paragraphe 2, TFUE, prévoit que la Cour « peut infliger à l’État membre concerné le paiement d’une somme forfaitaire ou d’une astreinte dans la limite du montant indiqué par la Commission » n’infirme pas cette analyse. L’article 260, paragraphe 3, TFUE mentionne uniquement le montant et non le choix de la sanction financière à infliger. Il peut en être déduit que la Cour ne peut pas infliger une sanction financière d’un montant supérieur à celui proposé par la Commission. Néanmoins, cette interprétation ne permet pas, selon moi, de restreindre le pouvoir d’appréciation de la Cour quant au type de sanction pécuniaire à infliger. Ainsi, la Cour peut infliger une sanction pécuniaire non proposée par la Commission ou les deux sanctions financières, d’un montant identique ou inférieur à celui indiqué par la Commission.
78. Cette question est susceptible de revêtir une importance fondamentale pour la jurisprudence de la Cour concernant l’article 260, paragraphe 3, TFUE. Dans la communication de 2011, la Commission a indiqué qu’elle solliciterait en principe uniquement une astreinte dans les procédures introduites au titre de l’article 260, paragraphe 3, TFUE, et qu’elle se désisterait de son recours si l’État membre a procédé à la communication des mesures de transposition requises pour mettre fin au manquement (64). Récemment, la Commission a modifié son approche et elle sollicite désormais en principe les deux sanctions (65). Cela permet d’expliquer pourquoi la Commission s’est désistée dans autant d’affaires avant que la Cour ait pu rendre un arrêt sur le fondement de l’article 260, paragraphe 3, TFUE. (66) Bien que cela ne soit peut-être pas applicable en l’espèce (67), il convient de ne pas méconnaître le fait que la Cour peut infliger une somme forfaitaire, même si la Commission a seulement sollicité une astreinte, lorsqu’un État membre notifie les mesures nécessaires de transposition après qu’un recours a été introduit devant la Cour, mais avant que la Cour rende son arrêt.
79. Il convient également de souligner que, contrairement à l’article 260, paragraphe 2, TFUE, l’article 260, paragraphe 3, TFUE énonce que « l’obligation de paiement prend effet à la date fixée par la Cour dans son arrêt ». La Cour peut, en vertu de l’article 260, paragraphe 2, TFUE, fixer la date de prise d’effet de la sanction financière infligée (68). Néanmoins, il peut être déduit de la mention expresse figurant à l’article 260, paragraphe 3, TFUE que celle-ci peut constituer un outil utile pour la Cour dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation aux fins de moduler l’imposition de sanctions financières dans des circonstances particulières (69).
3. L’astreinte dans le cadre de la présente procédure
80. Il découle de la jurisprudence de la Cour relative à l’article 260, paragraphe 2, TFUE, que l’astreinte prévue à l’article 260, paragraphe 3, TFUE doit être infligée en fonction du degré de persuasion nécessaire pour que l’État membre modifie son comportement et mette un terme au manquement constaté (70). Il appartient à la Cour, dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation, de fixer le montant de l’astreinte de manière à ce que celle-ci soit, à la fois, adaptée aux circonstances et proportionnée au manquement constaté ainsi qu’à la capacité de paiement de l’État membre concerné. Pour déterminer le montant d’une astreinte, les critères fondamentaux devant être pris en considération sont, en principe, la gravité du manquement, sa durée et la capacité de paiement de l’État membre en question. Pour l’application de ces critères, il doit être tenu compte, en particulier, des conséquences du défaut d’exécution sur les intérêts publics et privés ainsi que de l’urgence pour l’État membre concerné à être incité à se conformer à ses obligations (71).
81. En l’espèce, il convient de considérer que l’imposition d’une astreinte est appropriée en tant que mesure de persuasion. La durée du manquement pourrait être augmentée si la Cour accepte ma proposition que cette durée soit évaluée à partir d’un autre point de départ que celui proposé par la Commission. De plus, le montant forfaitaire pourrait augmenter de 680 à 690 et le facteur « n » se réduire de 11.99 à 11.93, si les chiffres actualisés de la Commission sont pris en compte (72). Cela donnerait une astreinte journalière (690 x 10 x 2.4 x 11.93 = 197 560.80 euros) d’un montant plus élevé que celui indiqué par la Commission (680 x 10 x 1.3 x 11.99 = 105 991.60 euros : voir point 20 des présentes conclusions). Compte tenu du plafond fixé à l’article 260, paragraphe 3, TFUE, je propose que la Cour inflige une astreinte journalière équivalant à l’intégralité du montant indiqué par la Commission.
82. Premièrement, s’agissant de la gravité du manquement, je ne suis pas convaincu que certaines mesures nationales invoquées par le Royaume d’Espagne soient pertinentes aux fins de l’appréciation de la proportionnalité de l’astreinte. Dans l’arrêt Commission/Suède (73), la Cour a rejeté des arguments similaires au motif qu’il était constant que ces mesures ne répondaient pas aux exigences de la directive concernée ; dans le cas contraire, aucun manquement par l’État membre à son obligation de transposer la directive n’aurait été constaté. Étant donné que ces mesures ne constituent pas des mesures de transposition, l’arrêt de la Cour dans l’affaire Gavieiro Gavieiro et Iglesias Torres (74) n’est pas non plus pertinent à cet égard.
83. Contrairement à ce que soutient le Royaume d’Espagne, l’appréciation par la Commission de la gravité ne semble pas résulter d’une erreur, compte tenu de l’importance de la directive en question et des conséquences du manquement sur les intérêts publics et privés, étant précisé que ces éléments sont évalués de manière objective par la Cour (75).
84. Comme cela a été indiqué par la Commission, la directive 2014/17 vise à instaurer un cadre commun pour certains aspects des règles prévues par les États membres concernant les contrats de crédit aux consommateurs garantis par une hypothèque ou un autre crédit relatif à des biens immobiliers à usage résidentiel (76). La directive 2014/17 a été adoptée dans le contexte de la crise financière mondiale et elle vise donc à créer un marché interne du crédit hypothécaire et à promouvoir la stabilité financière en garantissant que les marchés du crédit hypothécaire fonctionnent de manière responsable (77).
85. De manière similaire à ce que la Cour a jugé dans le contexte des aides d’État, les règles établies par la directive 2014/17 constituent l’expression de l’une des tâches essentielles conférées à l’Union par l’article 3, paragraphe 3, TUE, à savoir l’établissement d’un marché intérieur, et le protocole (no 27) sur le marché intérieur et la concurrence qui, conformément à l’article 51 TUE, fait partie intégrante des traités et prévoit que le marché intérieur doit comprendre un système garantissant que la concurrence n’est pas faussée (78).
86. Les conséquences sur les intérêts publics et privés d’un manquement à l’obligation de transposer la directive 2014/17 peuvent également être considérées comme importantes dans le contexte espagnol, compte tenu, notamment, des problèmes existant dans le secteur espagnol du crédit hypothécaire. Cela est illustré, par exemple, par la résolution du Parlement européen du 8 octobre 2015 sur le droit hypothécaire et les instruments financiers à risque en Espagne (79) qui a attiré l’attention sur des centaines de milliers d’expulsions et sur l’absence de protection des emprunteurs qui a été exacerbée par la crise financière. Pour répondre à cette situation, le Parlement a notamment invité la Commission à suivre de près la transposition de la directive 2014/17 dans tous les États membres (80). Comme cela est également indiqué dans cette résolution et dans les observations du Royaume d’Espagne, des clauses et pratiques abusives dans le secteur espagnol du crédit hypothécaire ont fait l’objet d’un grand nombre de demandes de décision préjudicielle devant la Cour (81). Ainsi, la non‑transposition en cause a une incidence importante, comme l’a indiqué la Commission, car elle prive les consommateurs et les opérateurs économiques dans toute l’Espagne des droits qui leur sont reconnus en vertu de cette directive et, en outre, elle porte atteinte au système des règles applicables aux prêteurs et aux intermédiaires de crédit visant à garantir la stabilité du système financier de l’Union.
87. Deuxièmement, s’agissant de la durée du manquement, la Commission considère que l’astreinte devrait être calculée à compter du jour qui suit l’expiration du délai de transposition de la directive 2014/17, à savoir à partir du 22 mars 2016, et prendre fin à la date à laquelle la Commission a décidé d’introduire une procédure en manquement, à savoir le 27 avril 2017 (voir point 25 des présentes conclusions).
88. Dans sa jurisprudence en matière d’astreintes infligées sur le fondement de l’article 260, paragraphe 2, TFUE, la Cour évalue cependant la durée du manquement à compter du prononcé du premier arrêt jusqu’à ce qu’elle examine les faits dans le cadre de la deuxième procédure et non à compter de la date à laquelle l’affaire est portée devant elle par la Commission (82). S’agissant de la procédure prévue à l’article 260, paragraphe 3, TFUE, je propose donc que la Cour retienne comme point de départ pour la durée du manquement la date de référence mentionnée dans l’avis motivé, car il s’agit de la date à laquelle le manquement est établi, conformément à la jurisprudence de la Cour (voir point 35 des présentes conclusions).
89. En l’espèce, si l’on prend comme point de départ la date à laquelle le délai imparti dans l’avis motivé a expiré (18 janvier 2017) et que l’on retient la période écoulée jusqu’à la date de l’audience (21 janvier 2019), la durée du manquement est d’environ 24 mois (2.4), ce qui peut être considéré comme un laps de temps significatif (83).
90. L’argument du Royaume d’Espagne selon lequel il convient d’exclure la période comprise entre le 20 décembre 2015 et le 29 octobre 2016, au cours de laquelle prévalait une situation inhabituelle liée à des difficultés à constituer un gouvernement, de la durée du manquement ou, à tout le moins, de réduire l’astreinte, doit être rejeté. Dans sa jurisprudence relative à l’article 260, paragraphe 2, TFUE, ainsi qu’à l’article 258 TFUE (84), la Cour a itérativement jugé qu’un État membre ne saurait exciper de difficultés d’ordre interne pour justifier l’inobservation des obligations résultant du droit de l’Union (85). En fait, la Cour a récemment rejeté des arguments similaires à ceux avancés en l’espèce par le Royaume d’Espagne dans un cas de figure concernant l’imposition d’une somme forfaitaire sur le fondement de l’article 260, paragraphe 2, TFUE (86). Les mêmes considérations devraient s’appliquer à la procédure introduite en vertu de l’article 260, paragraphe 3, TFUE. En outre, si la durée du manquement est calculée à compter de l’expiration du délai mentionné dans l’avis motivé, à savoir le 18 janvier 2017, cette période (20 décembre 2015 au 29 octobre 2016) est, en tout état de cause, sans incidence.
91. Troisièmement, le Royaume d’Espagne n’a produit devant la Cour aucune preuve relative à sa capacité de paiement.
92. En outre, la Cour a généralement recours à une astreinte journalière dans des cas de figure concernant l’adoption d’amendements législatifs, en particulier, en matière de transposition (87). Aucun argument n’a été invoqué devant la Cour lui demandant de déroger à cette approche dans la présente procédure, pas plus qu’il ne lui a été demandé de modifier la date à laquelle l’obligation de paiement devrait prendre effet. Je suis donc enclin à approuver la demande de la Commission selon laquelle l’astreinte journalière doit prendre effet à la date du prononcé de l’arrêt de la Cour. Eu égard à la demande de la Commission, je propose également que la Cour ne précise pas dans son arrêt le compte « Ressources propres de l’Union européenne ».
VII. Dépens
93. Conformément à l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Étant donné que la Commission a conclu à la condamnation aux dépens du Royaume d’Espagne et que le Royaume d’Espagne a succombé, celui-ci doit être condamné aux dépens. Conformément à l’article 140, paragraphe 1, dudit règlement de procédure, qui prévoit que les États membres et les institutions qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens, la République française doit être condamnée à supporter ses propres dépens.
VIII. Conclusion
94. Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose à la Cour de :
(1) constater que, en ayant omis d’adopter avant le 21 mars 2016 les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la directive 2014/17/UE du Parlement européen et du Conseil, du 4 février 2014, sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage résidentiel et modifiant les directives 2008/48/CE et 2013/36/UE et le règlement (UE) no 1093/2010 ou, en tout état de cause, en ayant omis de communiquer ces dispositions à la Commission, le Royaume d’Espagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 42, paragraphe 1, de cette directive ;
(2) condamner le Royaume d’Espagne, conformément à l’article 260, paragraphe 3, TFUE, au paiement d’une astreinte journalière de 105 991.60 euros, avec effet à compter de la date du prononcé de l’arrêt dans la présente affaire, jusqu’à ce que le Royaume d’Espagne communique à la Commission les dispositions nécessaires pour se conformer à la directive 2014/17 ;
(3) condamner le Royaume d’Espagne aux dépens ;
(4) condamner la République française à supporter ses propres dépens.
1 Langue originale : l’anglais.
2 JO 2014, L 60, p. 34.
3 Une autre affaire impliquant un recours en manquement introduit par la Commission à l’encontre du Royaume de Belgique (C‑543/17) est actuellement pendante devant la Cour. Cette affaire soulève des aspects similaires, sans être toutefois identiques, au présent cas d’espèce en ce qui concerne l’interprétation et l’application de l’article 260, paragraphe 3, TFUE et elle fait l’objet des conclusions de l’avocat général Szpunar qui doivent être présentées le 11 avril 2019.
4 Plusieurs affaires antérieures ont donné l’occasion à la Cour d’interpréter et d’appliquer l’article 260, paragraphe 3, TFUE, mais la Commission s’est désistée dans ces affaires avant que la Cour rende son arrêt. L’une de ces affaires a fait l’objet des conclusions de l’avocat général Wathelet dans l’affaire Commission/Pologne (C‑320/13, non publiées, EU:C:2014:2441), dont je traiterai ci-après dans le cadre de mon analyse.
5 JO 2011, C 12, p. 1.
6 Communication de 2011, point 7.
7 Communication de 2011, point 19.
8 Communication de 2011, points 23 et 24.
9 Communication de la Commission, SEC(2005)1658, JO 2007, C 126, p. 15. La Commission se réfère aux chiffres figurant dans sa communication C(2016)5091 final du 9 août 2016 (JO 2016, C 290, p. 3), qui était en vigueur lorsque le présent recours a été introduit le 27 septembre 2017.
10 Communication de 2011, point 30.
11 Communication de 2011, point 25.
12 Communication de 2011, point 27.
13 Dans ses observations, le Royaume d’Espagne mentionne les cinq mesures suivantes : (1) Orden EHA/2899/2011, de 28 de octubre, de transparencia y protección del cliente de servicios bancarios, BOE n.°261, de 29 de octubre de 2011, p. 113242 (décret EHA/2899/2011, du 28 octobre 2011, sur la transparence et la protection du client de services bancaires) ; (2) Circular 5/2012 de 27 de junio del Banco de España, a entidades de crédito y proveedores de servicios de pago, sobre transparencia de los servicios bancarios y responsibilidad en la concesión de préstamos, BOE n.°161, de 6 de julio de 2012, p. 48855, última modificación de 13 de agosto de 2015 (circulaire 5/2012, du 27 juin 2012, de la Banque d’Espagne, à l’intention des établissements de crédit et des prestataires de services de paiement, relative à la transparence des services bancaires et à l’octroi responsable de prêts) ; (3) Real Decreto-ley 27/2012, de 15 de noviembre, de medidas urgentes para reforzar la protección a los deudores hipotecarios, BOE n.°276, de 16 de noviembre de 2012, p. 79877 (Décret-loi royal no 27/2012 du 15 novembre 2012 relatif aux mesures urgentes visant à renforcer la protection des débiteurs hypothécaires) ; (4) Ley 1/2013, de 14 de mayo, de medidas para reforzar la protección a los deudores hipotecarios, reestructuración de deuda y alquiler social, BOE n.°116, de 15 de mayo de 2013, p. 36373 (Loi no 1/2013 du 14 mai 2013 relative aux mesures visant à renforcer la protection des débiteurs hypothécaires, à la restructuration de la dette et aux loyers sociaux), et (5) Real Decreto-ley 6/2012, de 9 de marzo, de medidas urgentes de protección de deudores hipotecarios sin recursos, BOE n.°60, de 10 marzo de 2012, p. 22492 (Décret-loi royal no 6/2012 du 9 mars 2012 relatif aux mesures urgentes de protection des débiteurs hypothécaires sans ressources).
14 Arrêt du 22 décembre 2010, Gavieiro Gavieiro et Iglesias Torres (C‑444/09 et C‑456/09, EU:C:2010:819).
15 Voir, notamment, arrêt du 4 octobre 2018, Commission/Espagne (C‑599/17, non publié, EU:C:2018:813, point 19).
16 Voir, notamment, arrêt du 4 octobre 2018, Commission/Espagne (C‑599/17, non publié, EU:C:2018:813, point 14).
17 Voir, notamment, arrêt du 19 décembre 2012, Commission/Italie (C‑68/11, EU:C:2012:815, points 62 et 63).
18 Voir, notamment, arrêt du 1er octobre 2009, Commission/Espagne (C‑502/08, non publié, EU:C:2009:603, points 14 et 24).
19 Voir, notamment, arrêt du 4 octobre 2018, Commission/Espagne (C‑599/17, non publié, EU:C:2018:813, point 23).
20 Voir, notamment, arrêt du 24 mars 2011, Commission/Espagne (C‑375/10, non publié, EU:C:2011:184, point 21) ; voir également arrêt du 14 mai 2009, Commission/Espagne (C‑266/08, non publié, EU:C:2009:311, points 10 et 11) (rejetant l’allégation de force majeure).
21 En l’espèce, la date de référence se situe deux mois à compter de la réception par le Royaume d’Espagne de l’avis motivé (voir point 8 des présentes conclusions), à savoir, comme l’indique le cachet de réception, le 18 novembre 2016. Voir, à cet égard, arrêt du 18 juillet 2007, Commission/Allemagne (C‑503/04, EU:C:2007:432, points 19 et 20).
22 Il est constant en l’espèce que le Royaume d’Espagne n’a communiqué aucune mesure de transposition de la directive 2014/17, laquelle a été adoptée selon la procédure législative ordinaire conformément à sa base légale visée à l’article 114 TFUE.
23 La limitation du champ d’application de l’article 260, paragraphe 3, TFUE aux directives adoptées conformément à une procédure législative concerne également le champ d’application temporel de cette disposition en ce qui concerne les directives adoptées avant l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne. Voir conclusions de l’avocat général Wathelet dans l’affaire Commission/Pologne (C‑320/13, non publiées, EU:C:2014:2441, points 95 à 103) ; voir également, notamment, Steve Peers, « Sanctions for Infringement of EU Law after the Treaty of Lisbon » (2012) 18 European Public Law 33-64, p. 40 à 44.
24 Voir, notamment, Nils Wahl et Luca Prete, « Between Certainty, Severity and Proportionality : Some Reflections on the Nature and Functioning of Article 260(3) TFEU » (2014) 6 European Law Reporter 170-189, p. 174 à 179.
25 Voir, notamment, Didier Blanc, « Les procédures du recours en manquement, le traité, le juge et le gardien : entre unité et diversité en vue d’un renforcement de l’Union de droit », publication de Stéphanie Mahieu, Contentieux de l’Union européenne : questions choisies (Larcier 2014) 429-461, p. 446 et 447.
26 Voir, notamment, Pål Wennerås, « Making effective use of Article 260 TFEU », publication de András Jakab et Dimitry Kochenov, The Enforcement of EU Law et Values (OUP 2017) 79-111, p. 88 et 89.
27 C‑320/13, non publiées, EU:C:2014:2441, points 114 à 145.
28 Voir, notamment, arrêt du 10 décembre 2018, Wightman e.a. (C‑621/18, EU:C:2018:999, point 47).
29 Voir, notamment, arrêt du 11 juin 2015, Commission/Pologne (C‑29/14, EU:C:2015:379, point 33).
30 Voir, notamment, Tristan Materne, La procédure en manquement d’État, guide à la lumière de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (Larcier 2012) 42-43.
31 S’agissant de la procédure de transposition, voir conclusions de l’avocat général Geelhoed dans l’affaire Commission/Irlande (C‑494/01, EU:C:2004:546, points 23 à 29).
32 Y compris lorsque la directive est transposée par des dispositions nationales existantes : voir, notamment, arrêt du 27 octobre 2011, Commission/Pologne (C‑311/10, non publié, EU:C:2011:702, point 33).
33 Je fais observer qu’aucun argument n’a été invoqué en l’espèce faisant valoir que le manquement à l’obligation de communiquer des mesures de transposition est défini de manière différente selon que l’on se situe avant ou après la date d’entrée en vigueur du traité de Lisbonne.
34 Secrétariat de la Convention européenne, Compte-rendu de la réunion du 3 mars 2003, CONV 619/03, 13 mars 2003, points 10 et 11.
35 Secrétariat de la Convention européenne, Rapport final du Cercle de discussion sur le fonctionnement de la Cour de justice, CONV 636/03, 25 mars 2003, point 28, p. 10 et 11.
36 Secrétariat de la Convention européenne, Articles sur la Cour de justice et le Tribunal de grande instance, CONV 734/03, 12 mai 2003, p. 15 et 16. Il a également été suggéré, en s’inspirant de l’article 88 du traité CECA, d’accorder à la Commission le droit de constater qu’un État membre a violé le droit de l’Union et de permettre à cet État membre de saisir la Cour d’un recours en annulation de la décision de la Commission, mais cette proposition n’a pas été retenue par le Praesidium de la Convention. Voir ibid, p. 13.
37 CONV 734/03, p. 15.
38 CONV 734/03, p. 16.
39 La référence à une loi-cadre européenne, désignant en substance une directive adoptée selon la procédure législative, découlait de modifications proposées au régime des instruments juridiques de l’UE, qui n’ont pas été retenues par le traité de Lisbonne. Voir, en outre, notamment, Koen Lenaerts et Piet Van Nuffel, European Union Law, 3ème édition (publication de Robert Bray et Nathan Cambien, Sweet & Maxwell 2011) 886-887.
40 CONV 734/03, p. 16, note en bas de page 1 ; voir également CONV 636/03, p. 11, note en bas de page 2.
41 JO 2003, C 169, p. 1.
42 JO 2004, C 310, p. 1.
43 Voir, à cet égard, Szilárd Gáspar-Szilágyi, « What Constitutes “Failure à Communiquer” National Measures » (2013) 19 European Public Law 281-294, p. 285.
44 Voir, notamment, Secrétariat de la Convention européenne, Réactions au projet de texte CONV 802/03 – Analyse, CONV 821/03, 27 juin 2003, p. 151 (numéroté ensuite article III-263), notamment, Suggestions for amendment of Article III-263, par Dominique de Villepin, Danuta Hübner, Teija Tiilikainen et autres ; Suggestion for amendment of Article 228, par Maria Berger et autres ; Remarks on the draft final report of the Court of Justice discussion circle, par Reinhard Rack, document de travail no 13, 14 mars 2003, et par Thom de Bruijn, document de travail no 20, 14 mars 2003 ; voir également Gáspar-Szilágyi, note en bas de page 43, p. 285 et 286.
45 C‑320/13, non publiées, EU:C:2014:2441, points 116 à 120.
46 Voir, notamment, Commission Better Regulation Guidelines, SWD(2017) 350, 7 juillet 2017, Chapitre IV, point 6, p. 42 et 43 ; et Commission Better Regulation Toolbox, Tool #37. Transposition Checks, accessible sur le site https://ec.europa.eu/info/better-regulation-toolbox.
47 Voir, notamment, arrêt du 2 octobre 2014, Commission/Pologne (C‑478/13, non publié, EU:C:2014:2253). Une transposition tardive a été considérée comme une forme de transposition incorrecte : voir, notamment, arrêt du 19 janvier 1982, Becker (8/81, EU:C:1982:7, point 20).
48 Arrêt du 16 juin 2005, Commission/Italie (C‑456/03, EU:C:2005:388, points 38 à 40).
49 Arrêt du 30 novembre 2006, Commission/Luxembourg (C‑32/05, EU:C:2006:749, point 56), dont les faits se distinguent de ceux à l’origine de l’arrêt du 14 avril 2011, Commission/Roumanie (C‑522/09, EU:C:2011:251, point 19).
50 Voir, notamment, arrêt du 16 juillet 2009, Commission/Irlande (C‑427/07, EU:C:2009:457, points 49, 59, 84 et 89).
51 Voir, notamment, arrêt du 24 octobre 2013, Commission/Espagne (C‑151/12, EU:C:2013:690, points 27 et 28).
52 Voir conclusions de l’avocat général Kokott dans l’affaire Commission/Luxembourg (C‑526/08, EU:C:2010:49, point 72).
53 Voir communication de 2011, point 17.
54 Voir, notamment, Luca Prete, Infringement Proceedings in EU Law (Kluwer 2017) 6-10, 301-304 ; Jonas Tallberg, European Governance et Supranational Institutions : Making States Comply (Routledge 2003) 72-82. En annexe était jointe la déclaration (no 19) relative à l’application du droit communautaire (JO 1992, C 191, p. 102) indiquant notamment qu’ « il est essentiel, pour la cohérence et l’unité du processus de construction européenne, que chaque État membre transpose intégralement et fidèlement dans son droit national les directives communautaires dont il est destinataire, dans les délais impartis par celles-ci » (soulignement en italiques ajouté par mes soins).
55 Voir, notamment, Tallberg, note en bas de page 54, p. 82 à 91 ; publication de Alan Dashwood et Angus Johnston, The Future of the Judicial System of the European Union (Hart 2001) 145-204, notamment p. 175 et 176.
56 C‑320/13, non publiées, EU:C:2014:2441, points 146 à 160.
57 Voir point 80 des présentes conclusions.
58 Voir, notamment, arrêt du 11 décembre 2012, Commission/Espagne (C‑610/10, EU:C:2012:781, points 115 et 116).
59 Arrêt du 12 juillet 2005, Commission/France (C‑304/02, EU:C:2005:444).
60 Arrêt du 12 juillet 2005, Commission/France (C‑304/02, EU:C:2005:444, points 80 à 86. Voir également, notamment, arrêt du 25 juillet 2018, Commission/Espagne (C‑205/17, non publié, EU:C:2018:606, point 74).
61 Arrêt du 12 juillet 2005, Commission/France (C‑304/02, EU:C:2005:444, points 90 et 91). En procédant à cette appréciation, la Cour a souligné que les droits de la défense de l’État membre concerné sont respectés : ibid, points 92 et 93. Voir également, notamment, arrêt du 18 juillet 2007, Commission/Allemagne (C‑503/04, EU:C:2007:432, point 22).
62 Voir, notamment, arrêts du 12 juillet 2005, Commission/France (C‑304/02, EU:C:2005:444, point 81) et du 9 décembre 2008, Commission/France (C‑121/07, EU:C:2008:695, point 33).
63 J’ai également une appréciation différente de celle de l’avocat général Wathelet dans ses conclusions dans l’affaire Commission/Pologne (C‑320/13, non publiées, EU:C:2014:2441, point 155).
64 Voir communication de 2011, points 21 et 22.
65 Communication de la Commission, Le droit de l’UE : une meilleure application pour de meilleurs résultats, JO 2017, C 18, p. 10, 15 et 16.
66 Voir, notamment, Laurence W Gormley, « Infringement Proceedings », dans The Enforcement of EU Law et Values, note en bas de page 26, 65-78, p. 71 et 72 ; Ernő Varnay, « Sanctioning Under Article 260(3) TFEU : Much Ado About Nothing ? » (2017) 23 European Public Law 301-316.
67 En réponse à une question posée lors de l’audience sur ce point, le Royaume d’Espagne a souligné l’importance de garantir les droits de la défense de l’État membre et que cela constituerait un élément nouveau dans cette affaire, dans la mesure où cela n’a pas été précisé dans la demande de la Commission.
68 Voir, notamment, communication de 2011, point 29 et jurisprudence citée.
69 Par exemple, lorsque l’État membre démontre qu’il peut remédier à la violation à bref délai : voir Peers, note en bas de page 23, p. 47.
70 Il s’ensuit que la Cour ne peut infliger une astreinte que si le manquement persiste jusqu’à la date du prononcé de son arrêt. Voir, notamment, arrêts du 9 décembre 2008, Commission/France (C‑121/07, EU:C:2008:695, points 26 à 28) et du 4 juillet 2018, Commission/Slovaquie (C‑626/16, EU:C:2018:525, point 74 et point 2 du dispositif).
71 Voir, notamment, arrêt du 11 décembre 2012, Commission/Espagne (C‑610/10, EU:C:2012:781, points 117 à 119).
72 Communication de la Commission C(2018) 5851 final, du 19 septembre 2018, JO 2018, C 340, p. 2. Voir, notamment, arrêt du 14 novembre 2018, Commission/Grèce (C‑93/17, EU:C:2018:903, points 132 à 141) ; conclusions de l’avocat général Kokott dans l’affaire Commission/Italie (C‑196/13, EU:C:2014:2162) et dans l’affaire Commission/Grèce (C‑378/13, EU:C:2014:2172, points 151 et 152).
73 Arrêt du 30 mai 2013 (C‑270/11, EU:C:2013:339, points 31 et 51).
74 Arrêt du 22 décembre 2010 (C‑444/09 et C‑456/09, EU:C:2010:819, points 62 à 64).
75 Voir, notamment, arrêts du 9 décembre 2008, Commission/France (C‑121/07, EU:C:2008:695, points 73 à 76) et du 31 mars 2011, Commission/Grèce (C‑407/09, EU:C:2011:196, points 38 et 39) ; voir également conclusions de l’avocat général Jääskinen dans l’affaire Commission/République tchèque (C‑241/11, EU:C:2013:181, points 50 et 62).
76 Voir article 1er et considérant 15 de la directive 2014/17. Pour une analyse détaillée, voir, notamment, publication de Miriam Anderson et Esther Arroyo Amayelas, The Impact of the Mortgage Credit Directive in Europe : Contrasting Views from Member States (Europa 2017) ; et en ce qui concerne spécifiquement l’Espagne, p. 49 à 111.
77 Voir, notamment, Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur les contrats de crédit relatifs aux biens immobiliers à usage résidentiel, COM(2011) 142 final, présentée par la Commission le 31 mars 2011, exposé des motifs, point 1, p. 2.
78 Voir, notamment, arrêt du 14 novembre 2018, Commission/Grèce (C‑93/17, EU:C:2018:903, point 122).
79 JO 2017, C 349, p. 37 (la « résolution de 2015 »), notamment considérants A à C, I et J. Voir également résolution du Parlement européen du 15 décembre 2016 sur les activités de la commission des pétitions au cours de l’année 2015, JO 2018, C 238, p. 132, point 31.
80 Résolution de 2015, considérant E et point 5. Cela a abouti au présent recours contre l’Espagne, ainsi qu’à un recours contre la Croatie au titre de l’article 258 et de l’article 260, paragraphe 3, TFUE, qui a ensuite été retiré par la Commission : voir ordonnance du président de la Cour du 28 mars 2018, Commission/Croatie (C‑381/17, non publiée, EU:C:2018:260).
81 Voir résolution de 2015 , considérants F et G. Voir, plus récemment, notamment, arrêts du 21 décembre 2016, Gutiérrez Naranjo e.a. (C‑154/15, C‑307/15 et C‑308/15, EU:C:2016:980) ; du 26 janvier 2017, Banco Primus (C‑421/14, EU:C:2017:60) ; du 7 août 2018, Banco Santander et Escobedo Cortés (C‑96/16 et C‑94/17, EU:C:2018:643), et du 19 septembre 2018, Bankia (C‑109/17, EU:C:2018:735) ; voir également conclusions de l’avocat général Szpunar dans les affaires pendantes Abanca Corporación Bancaria et Bankia (C‑70/17 et C‑179/17, EU:C:2018:724) ; Bankia et Banco Bilbao Vizcaya Argentaria (C‑92/16 et C‑167/16, EU:C:2018:727) et Bankia (C‑486/16, EU:C:2018:728).
82 Voir, notamment, arrêt du 14 novembre 2018, Commission/Grèce (C‑93/17, EU:C:2018:903, point 130).
83 Voir, notamment, arrêt du 30 mai 2013, Commission/Suède (C‑270/11, EU:C:2013:339, points 43, 57 et 58) (presque 27 mois).
84 Voir point 36 des présentes conclusions.
85 Voir, notamment, arrêt du 25 juillet 2018, Commission/Espagne (C‑205/17, non publié, EU:C:2018:606, point 62).
86 Arrêt du 13 juillet 2017, Commission/Espagne (C‑388/16, non publié, EU:C:2017:548, points 30 et 41).
87 Voir, notamment, arrêt du 14 mars 2006, Commission/France (C‑177/04, EU:C:2006:173, point 77).