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Document 62015TO0384

    Ordonnance du Tribunal (deuxième chambre) du 13 septembre 2016.
    EDF Luminus contre Parlement européen.
    Clause compromissoire – Contrat de fourniture d’électricité CNT(2009) No 137 – Paiement par le Parlement de la contribution régionale versée par la requérante à la Région de Bruxelles‑Capitale et calculée sur la base de la puissance tenue à la disposition du Parlement – Absence d’obligation contractuelle – Absence d’obligation résultant des dispositions du droit national applicable.
    Affaire T-384/15.

    Court reports – general

    ECLI identifier: ECLI:EU:T:2016:512

    ORDONNANCE DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

    13 septembre 2016 ( *1 )

    «Clause compromissoire — Contrat de fourniture d’électricité CNT(2009) No 137 — Paiement par le Parlement de la contribution régionale versée par la requérante à la Région de Bruxelles-Capitale et calculée sur la base de la puissance tenue à la disposition du Parlement — Absence d’obligation contractuelle — Absence d’obligation résultant des dispositions du droit national applicable»

    Dans l’affaire T‑384/15,

    EDF Luminus, établie à Bruxelles (Belgique), représentée par Mes D. Verhoeven et O. Vanden Berghe, avocats,

    partie requérante,

    contre

    Parlement européen, représenté par Mme L. Darie et M. P. Biström, en qualité d’agents,

    partie défenderesse,

    soutenu par

    Commission européenne, représentée par Mmes F. Clotuche-Duvieusart et I. Martínez del Peral, en qualité d’agents,

    partie intervenante,

    ayant pour objet une demande fondée sur l’article 272 TFUE et tendant à obtenir la condamnation du Parlement à payer à la requérante la somme de 439672,95 euros, majorée d’intérêts, correspondant au montant de la contribution régionale versée par elle à la Région de Bruxelles-Capitale et calculée sur la base de la puissance tenue à la disposition du Parlement,

    LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

    composé de Mme M. E. Martins Ribeiro, président, MM. S. Gervasoni (rapporteur) et L. Madise, juges,

    greffier : M. E. Coulon,

    rend la présente

    Ordonnance

    Cadre juridique

    Sur le droit de l’Union

    1

    En vertu des articles 343 TFUE et 191 EA, l’Union européenne et la Communauté européenne de l’énergie atomique jouissent sur le territoire des États membres des privilèges et immunités nécessaires à l’accomplissement de leur mission dans les conditions définies au protocole du 8 avril 1965 sur les privilèges et immunités de l’Union européenne, annexé initialement au traité instituant un Conseil unique et une Commission unique des Communautés européennes (JO 1967, 152, p. 13), puis, en vertu du traité de Lisbonne, aux traités UE, FUE et CEEA (ci‑après le « protocole »).

    2

    L’article 3 du protocole dispose ce qui suit :

    « L’Union, ses avoirs, revenus et autres biens sont exonérés de tous impôts directs.

    Les gouvernements des États membres prennent, chaque fois qu’il leur est possible, les dispositions appropriées en vue de la remise ou du remboursement du montant des droits indirects et des taxes à la vente entrant dans les prix des biens immobiliers ou mobiliers lorsque l’Union effectue pour son usage officiel des achats importants dont le prix comprend des droits et taxes de cette nature. Toutefois, l’application de ces dispositions ne doit pas avoir pour effet de fausser la concurrence à l’intérieur de l’Union.

    Aucune exonération n’est accordée en ce qui concerne les impôts, taxes et droits qui ne constituent que la simple rémunération de services d’utilité générale. »

    Sur le droit belge

    3

    L’ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale (Belgique) du 19 juillet 2001 relative à l’organisation du marché de l’électricité en Région de Bruxelles‑Capitale (Moniteur belge du 17 novembre 2001, p. 39135, ci‑après l’« ordonnance “électricité” ») prévoit à son article 26 ce qui suit :

    « § 1er   La détention d’une autorisation de fourniture délivrée sur la base de l’article 21 donne lieu à la perception mensuelle d’un droit à charge de la personne physique ou morale bénéficiant de l’autorisation, ci‑après dénommée le redevable.

    […]

    § 3   Le droit est calculé sur la base de la puissance tenue à disposition des clients finals éligibles, au moyen de réseaux, branchements et lignes directes de 70 kV et moins, sur des sites de consommation situés en Région de Bruxelles‑Capitale. Pour les clients haute tension, la puissance tenue à disposition est la puissance de raccordement. Celle-ci est égale à la puissance maximale, exprimée en kVa, mise à disposition en vertu du contrat de raccordement. À défaut de mention dans le contrat de raccordement ou en cas de dépassement de la puissance prélevée par rapport à la puissance maximale mise à disposition en vertu du contrat de raccordement, la puissance de raccordement est égale à la puissance maximale, exprimée en kVa, prélevée au cours des trente-six mois précédents, multipliée par un facteur 1,2.

    […]

    § 4   Le droit à percevoir mensuellement est fixé à 0,67 euro par kVa pour la haute tension.

    […]

    Ce montant est adapté annuellement à l’indice des prix à la consommation du Royaume. […]

    § 5   Le gouvernement détermine les mesures d’exécution du présent article. Il peut notamment imposer au gestionnaire du réseau de distribution, au gestionnaire du réseau de transport régional et aux utilisateurs de lignes directes de lui fournir les données utiles à la perception du droit.

    Le gouvernement peut charger le gestionnaire du réseau de distribution d’adresser aux redevables une invitation à s’acquitter du droit. L’invitation comprend notamment l’indication de l’exercice, la base de calcul, le taux, l’échéance de paiement et la manière d’acquitter le droit. Toutefois, l’envoi ou le défaut d’envoi de cette invitation ne préjudicie en rien aux droits et obligations des redevables.

    § 6   Le droit est recouvré et poursuivi suivant les règles prévues au Chapitre VI de l’ordonnance du 23 juillet 1992 relative à la taxe régionale à charge des occupants d’immeubles bâtis et de titulaires de droits réels sur certains immeubles. Le délai de paiement du droit est toutefois fixé conformément au paragraphe 3 du présent article.

    […] »

    Antécédents du litige

    4

    Le Parlement européen a signé le 10 juillet 2009 un contrat référencé CNT(2009) No 137 (ci-après le « contrat »), qui porte sur la fourniture, par la requérante, EDF Luminus, d’électricité verte pour ses immeubles situés dans la région bruxelloise. Le contrat prenait effet à la date de fourniture effective de l’électricité par la requérante et devait rester en vigueur pendant une période de deux ans. Le contrat a été reconduit pour une période d’un an, à savoir jusqu’au 31 juillet 2012, par un avenant signé le 15 juillet 2011.

    5

    Par lettre du 13 mai 2011, la requérante a fait savoir au Parlement qu’elle était désormais dans l’obligation de lui facturer le droit relatif à la fourniture d’électricité prévu à l’article 26 de l’ordonnance « électricité » (ci-après la « contribution ») et que, en outre, elle en réclamait le paiement rétroactif à compter de la prise d’effet du contrat. Cette contribution, qui était versée à la Région de Bruxelles-Capitale par la requérante depuis 2009, n’était jusqu’alors pas facturée par cette dernière au Parlement.

    6

    À la suite du refus du Parlement de faire droit à cette demande, la requérante lui a transmis systématiquement deux types de factures, les unes visant uniquement la contribution, les autres visant les éléments non contestés de la fourniture d’électricité. Le Parlement a acquitté les secondes, tout en refusant d’acquitter les premières.

    7

    À la suite d’une nouvelle demande de versement de la contribution et d’un nouveau refus opposé à cette demande, la requérante a introduit le présent recours.

    8

    La requérante a introduit également une action devant le Tribunal de première instance francophone de Bruxelles en vue d’obtenir le remboursement par la Région de Bruxelles-Capitale du montant de la contribution qu’elle lui avait versée.

    9

    Par ailleurs, la Commission européenne a introduit le 4 avril 2014 un recours en manquement à l’encontre du Royaume de Belgique au titre de l’article 258 TFUE. Par arrêt du 14 janvier 2016, Commission/Belgique (C‑163/14, EU:C:2016:4), la Cour a jugé que, en n’accordant pas aux institutions de l’Union l’exonération de la contribution établie par l’article 26 de l’ordonnance« électricité » et en s’opposant au remboursement de la contribution qui avait été perçue par la Région de Bruxelles-Capitale, le Royaume de Belgique avait manqué aux obligations qui lui incombaient en vertu de l’article 3, deuxième alinéa, du protocole.

    Conclusions des parties et procédure

    10

    La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

    condamner le Parlement à lui payer la somme de 439672,95 euros ;

    condamner le Parlement à lui payer les intérêts contractuels sur cette somme, à compter de l’exigibilité des factures ;

    condamner le Parlement aux dépens.

    11

    Le Parlement conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

    déclarer que le présent recours est devenu sans objet à la suite de l’arrêt du 14 janvier 2016, Commission/Belgique (C‑163/14, EU:C:2016:4) ;

    à titre subsidiaire, rejeter le recours comme manifestement non fondé ;

    dire que c’est à la Région de Bruxelles‑Capitale qu’il appartient de rembourser à la requérante la somme réclamée ;

    condamner la requérante aux dépens.

    12

    La requérante précise qu’elle présente sa requête « dans la mesure où [elle] ne pourrait obtenir le remboursement [de la contribution] à charge de la Région de Bruxelles-Capitale dans une procédure introduite devant le Tribunal de première instance francophone de Bruxelles ».

    13

    La Commission a demandé à intervenir au soutien du Parlement. Par décision du président de la deuxième chambre du Tribunal du 16 février 2016, elle a été autorisée à intervenir dans la présente affaire, au soutien des conclusions du Parlement.

    14

    Le président de la deuxième chambre du Tribunal a décidé, conformément à l’article 69, sous c), du règlement de procédure du Tribunal, de suspendre l’affaire jusqu’au prononcé de la décision mettant fin à l’instance dans l’affaire C‑163/14, Commission/Belgique. La procédure a repris le 14 janvier 2016 au moment du prononcé de l’arrêt dans cette affaire.

    15

    Le Parlement a déposé son mémoire en défense au greffe du Tribunal le 22 mars 2016. Dans ce mémoire, il s’est notamment prévalu de l’arrêt du 14 janvier 2016, Commission/Belgique (C‑163/14, EU:C:2016:4).

    16

    Par mesure d’organisation de la procédure, le Tribunal a invité la requérante et la Commission à présenter leurs observations sur les conséquences à tirer de cet arrêt dans la présente affaire. Celles-ci ont présenté leurs observations dans les délais requis.

    En droit

    17

    En vertu de l’article 126 du règlement de procédure, lorsque le Tribunal est manifestement incompétent pour connaître d’un recours ou lorsqu’un recours est manifestement irrecevable ou manifestement dépourvu de tout fondement en droit, le Tribunal peut, sur proposition du juge rapporteur, à tout moment décider de statuer par voie d’ordonnance motivée, sans poursuivre la procédure.

    18

    En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide de statuer sans poursuivre la procédure.

    19

    Il convient tout d’abord d’examiner les conclusions du Parlement visant à ce que le Tribunal prononce un non-lieu à statuer.

    Sur la demande de non-lieu à statuer

    20

    Le Parlement, se fondant sur l’arrêt du 14 janvier 2016, Commission/Belgique (C‑163/14, EU:C:2016:4), conclut à un non-lieu à statuer. Il fait valoir que les contributions indûment perçues par la Région de Bruxelles-Capitale devront nécessairement, en vertu de cet arrêt, faire l’objet d’un remboursement dont bénéficiera la requérante, de sorte qu’il n’y aurait plus lieu pour celle-ci de réclamer au Parlement le paiement des sommes correspondant à ces contributions.

    21

    Il convient ici de rappeler que, dans le cadre du présent litige, introduit sur la base du contrat passé entre le Parlement et la requérante, cette dernière demande que le Parlement soit condamné à lui payer, d’une part, une somme correspondant à la contribution qu’elle a versée à la Région de Bruxelles-Capitale et qui a été calculée sur la base de la puissance tenue à la disposition du Parlement en vertu du contrat et, d’autre part, les intérêts contractuels appliqués à cette somme.

    22

    À supposer même que le remboursement à la requérante par la Région de Bruxelles‑Capitale, laquelle n’est partie ni au présent litige ni au contrat, des sommes demandées par la requérante puisse permettre de conclure à la disparition de l’intérêt à agir de celle-ci dans le cadre du présent litige, il convient en tout état de cause de constater que le Parlement et la Commission n’établissent pas, ni même n’allèguent, que le remboursement des sommes demandées, y compris les intérêts contractuels, aurait été effectué ou que la requérante disposerait à ce titre d’une créance à l’égard de la Région de Bruxelles-Capitale. Une telle créance pourrait, par exemple, ressortir d’un jugement du Tribunal de première instance francophone de Bruxelles statuant sur l’action introduite par la requérante devant lui (voir point 8 ci-dessus). Au demeurant, dans ses observations présentées le 10 mai 2016 en réponse à la mesure d’organisation de la procédure visée au point 16 ci-dessus, la requérante fait valoir que, à cette date, la Région de Bruxelles-Capitale « refus[ait] de [lui] rembourser les cotisations litigieuses payées, malgré l’arrêt C‑163/14 intervenu ».

    23

    À titre surabondant, il convient de relever que, si la Cour a jugé, par son arrêt du 14 janvier 2016, Commission/Belgique (C‑163/14, EU:C:2016:4), que, en n’accordant pas aux institutions de l’Union l’exonération de la contribution établie par l’article 26 de l’ordonnance « électricité » et en s’opposant au remboursement des contributions ainsi perçues par la Région de Bruxelles-Capitale, le Royaume de Belgique avait manqué aux obligations qui lui incombaient en vertu de l’article 3, deuxième alinéa, du protocole, l’ordonnance « électricité » est maintenue, dans le libellé qui en a été donné plus haut, tant que le Royaume de Belgique n’a pas exécuté cet arrêt. Or, le Parlement n’a apporté aucun élément permettant de conclure que le droit applicable aurait à ce jour été modifié.

    24

    Il résulte de ce qui précède que le présent recours n’est pas dépourvu d’objet, dans la mesure où l’intérêt à agir de la requérante n’a pas disparu, de sorte qu’il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de non-lieu à statuer présentée par le Parlement.

    Sur le bien-fondé du recours

    25

    Au soutien de ses conclusions, présentées sur le fondement de l’article 272 TFUE, la requérante invoque trois moyens, tirés, le premier, de la méconnaissance par le Parlement de ses obligations contractuelles, le deuxième, de la méconnaissance des dispositions de l’article 26 de l’ordonnance « électricité » et, enfin, le troisième, de la violation du principe d’égalité de traitement.

    Sur le premier moyen

    26

    La requérante soutient que le contrat lui permet d’exiger du Parlement le paiement de la contribution.

    27

    Il convient tout d’abord de relever que le contrat ne prévoit pas que la contribution soit facturée au Parlement. En particulier, aucune référence n’est faite à la contribution dans l’annexe 2 du contrat qui mentionne les modalités de calcul du prix de la fourniture d’électricité.

    28

    De plus, selon les stipulations du point 3.2 du contrat, sous l’article 3, « [l]es prix sont fixés en tenant compte du fait que les institutions européennes sont exonérées des droits de douane, droits indirects et taxes à la vente, en particulier de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) ».

    29

    Il est précisé, toujours au point 3.2 du contrat, que « les taxes, redevances et autres contributions régionales et fédérales ne pourront être facturées ».

    30

    Il peut donc être conclu que le contrat ne prévoit aucune obligation imposant au Parlement de payer à la requérante la contribution qui a été calculée sur la base de la puissance tenue à sa disposition en vertu du contrat.

    31

    Il y a lieu d’ajouter que, selon l’article 19 du contrat, ce dernier est « régi par les lois belges et appliqué et interprété conformément à ces lois dans le cas où la législation [de l’Union], y compris le règlement financier, ne règle pas la question ». Par conséquent, les termes du contrat doivent d’abord être interprétés au regard du droit de l’Union.

    32

    Or, dans l’arrêt du 14 janvier 2016, Commission/Belgique (C‑163/14, EU:C:2016:4, point 39), la Cour a jugé que la contribution devait être considérée comme un droit indirect relevant de l’article 3, deuxième alinéa, du protocole.

    33

    Ainsi, la référence, dans le contrat et, en particulier, à son point 3.2, aux « droits indirects », doit être comprise comme visant la contribution. Cela confirme que les parties au contrat ont entendu exonérer le Parlement du paiement de celle-ci.

    34

    Il convient d’ajouter que l’avenant au contrat, conclu le 15 juillet 2011, n’affecte en aucune manière les obligations des parties en ce qui concerne le versement de la contribution.

    35

    La conclusion à laquelle le Tribunal est parvenu au point 33 ci-dessus ne saurait être remise en cause par les arguments invoqués par ailleurs par la requérante.

    36

    En premier lieu, le fait que le point 8.1 du contrat, sous l’article 8 intitulé « Dispositions fiscales », stipule que le « contractant est seul responsable du respect des dispositions fiscales qui lui sont applicables » ne permet pas de conclure à l’existence d’une obligation pour le Parlement de verser la contribution à son cocontractant, c’est-à-dire la requérante.

    37

    En second lieu, la référence, au paragraphe 2 de l’annexe 2 du contrat, à une majoration des prix liée à la « distribution » ne permet pas, compte tenu de l’économie générale du contrat et, en particulier, des stipulations du point 3.2 citées ci-dessus, de conclure à l’existence d’une obligation pour le Parlement de verser la contribution à son cocontractant, c’est-à-dire la requérante.

    38

    Il résulte de ce qui précède que le premier moyen doit être écarté comme manifestement non fondé.

    Sur le deuxième moyen

    39

    La requérante soutient que le Parlement est tenu de lui verser la contribution en vertu des dispositions de l’article 26 de l’ordonnance « électricité ».

    40

    Il y a lieu de constater que, si l’ordonnance « électricité » détermine les obligations fiscales des fournisseurs d’électricité à l’égard d’une administration nationale, la Région de Bruxelles-Capitale, elle ne prévoit pas l’existence, pour le consommateur final, d’une obligation de verser la contribution à son fournisseur d’électricité. Ainsi, la requérante n’est pas fondée à se prévaloir d’une méconnaissance par le Parlement d’une telle obligation.

    41

    Il convient de relever que cette constatation n’est pas en contradiction avec la conclusion selon laquelle le régime fiscal relatif à la contribution est conçu et établi dans le but que la contribution soit répercutée sur le consommateur final (arrêt du 14 janvier 2016, Commission/Belgique, C‑163/14, EU:C:2016:4, point 48). En effet, il y a lieu de distinguer, d’une part, les objectifs d’un régime fiscal et, d’autre part, l’existence d’une obligation contraignante résultant de ce régime dont la méconnaissance pourrait conduire à l’engagement de la responsabilité contractuelle, voire non contractuelle, du consommateur final à l’égard de son fournisseur d’électricité. En l’absence d’une telle obligation contraignante, la répercussion de la contribution sur le consommateur final dépend des seules relations contractuelles convenues entre le fournisseur et le consommateur final.

    42

    À supposer même que l’ordonnance « électricité » puisse être interprétée en ce sens qu’elle imposerait au consommateur final de verser à son fournisseur d’électricité la contribution calculée sur la base de la puissance tenue à sa disposition, le moyen devrait en tout état de cause être écarté.

    43

    En effet, le fait que l’ordonnance « électricité » ne prévoit pas d’exonération de la contribution au bénéfice des institutions de l’Union a conduit la Cour, par l’arrêt du 14 janvier 2016, Commission/Belgique (C‑163/14, EU:C:2016:4), à déclarer que le Royaume de Belgique avait manqué aux obligations qui lui incombaient en vertu de l’article 3, deuxième alinéa, du protocole.

    44

    Or, sur le fondement de l’article 19 du contrat, il appartient au Tribunal, en tant que juge du contrat, de faire application du droit national comme le ferait le juge national.

    45

    En conséquence, l’autorité de la chose jugée s’attachant à l’arrêt du 14 janvier 2016, Commission/Belgique (C‑163/14, EU:C:2016:4), impose au Tribunal de ne pas faire application de l’ordonnance « électricité » pour obliger une institution de l’Union à s’acquitter de la contribution (voir, par analogie, s’agissant des obligations pesant sur des autorités nationales, arrêt du 13 juillet 1972, Commission/Italie, 48/71, EU:C:1972:65, point 7).

    46

    À supposer même que la requérante ait entendu, par le présent moyen, mettre en cause le Parlement au titre de sa responsabilité non contractuelle, une telle argumentation ne peut être utilement invoquée dans le cadre d’un recours fondé sur l’article 272 TFUE. En tout état de cause, les développements qui précèdent permettraient d’écarter le moyen en tant qu’il serait introduit à cette fin.

    47

    Par ailleurs, la conclusion à laquelle le Tribunal est parvenu au point 40 ci‑dessus n’est pas susceptible d’être remise en cause par le fait que la requérante serait tenue de supporter la contribution. En effet, une telle circonstance est sans conséquence sur l’interprétation des dispositions de l’ordonnance « électricité ».

    48

    À cet égard, il peut être relevé qu’il appartiendra à la requérante, si elle s’y croit fondée, de demander à la juridiction nationale qu’elle a saisie de se prononcer sur la question de savoir si l’exonération que le Royaume de Belgique est tenu d’accorder aux institutions de l’Union impose que les fournisseurs d’électricité soient eux-mêmes exonérés d’une telle contribution lorsque leur client est une institution de l’Union.

    49

    Enfin, la conclusion exposée au point 40 ci-dessus n’est pas susceptible d’être remise en cause par le fait que le Parlement et d’autres institutions de l’Union auraient accepté de verser la contribution à d’autres fournisseurs d’électricité. En effet, une telle circonstance, qui sera examinée de nouveau dans le cadre du troisième moyen, est sans conséquence sur l’interprétation des dispositions de l’ordonnance « électricité ».

    50

    Il résulte de ce qui précède que le deuxième moyen doit être écarté comme manifestement non fondé.

    Sur le troisième moyen

    51

    La requérante soutient que le Parlement a refusé à tort de lui verser la contribution alors même que les institutions de l’Union auraient versé celle-ci à Electrabel, un autre fournisseur d’électricité. En agissant de la sorte, le Parlement aurait méconnu le principe d’égalité de traitement.

    52

    Il y a lieu de souligner que, en l’espèce, le présent moyen, qui n’est pas tiré de la méconnaissance par le Parlement de ses obligations contractuelles ou du droit applicable au contrat, ne saurait utilement être invoqué (voir, en ce sens, arrêt du 16 mars 2016, Hydrex/Commission, T‑45/15, non publié, EU:T:2016:151, point 24 et jurisprudence citée).

    53

    En tout état de cause, il convient de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, le principe de non-discrimination ou d’égalité de traitement, qui constitue un principe fondamental de droit, interdit que des situations comparables soient traitées de manière différente ou que des situations différentes soient traitées de manière égale, à moins que de tels traitements soient objectivement justifiés (voir, en ce sens, arrêt du 8 octobre 1986, Christ-Clemen e.a./Commission, 91/85, EU:C:1986:373, point 19 ; voir, également, arrêt du 8 janvier 2003, Hirsch e.a./BCE, T‑94/01, T‑152/01 et T‑286/01, EU:T:2003:3, point 51 et jurisprudence citée).

    54

    En l’espèce, la requérante doit donc apporter, notamment, des éléments permettant d’identifier l’existence de situations comparables entre elle et Electrabel.

    55

    À cet égard, il ressort des conclusions de l’avocat général Cruz Villalón dans l’affaire Commission/Belgique (C‑163/14, EU:C:2015:441, points 19 et 24) que le contrat conclu avec Electrabel prévoyait que les institutions de l’Union devaient acquitter la contribution. La requérante, qui conteste par ailleurs dans sa requête certains points de ces conclusions, n’apporte aucun élément qui permettrait de mettre en doute un tel fait.

    56

    Or, ainsi qu’il a été dit plus haut (voir point 30 ci-dessus), le contrat conclu entre la requérante et le Parlement ne prévoit pas que ce dernier acquitte la contribution.

    57

    Ainsi, la requérante et Electrabel ne se trouvaient pas dans des situations comparables, puisque le contrat que la requérante avait signé ne prévoyait pas que le Parlement devait acquitter la contribution.

    58

    La circonstance que la requérante ait demandé au Parlement le versement de la contribution est, à cet égard, indifférente.

    59

    À titre surabondant, il convient de rappeler que le respect du principe d’égalité de traitement doit se concilier avec le respect du principe de légalité selon lequel nul ne peut invoquer, à son profit, une illégalité commise en faveur d’autrui (arrêt du 4 juillet 1985, Williams/Cour des comptes, 134/84, EU:C:1985:297, point 14). L’exigence de paiement de la contribution imposée aux institutions de l’Union étant contraire au droit de l’Union, ainsi que cela résulte de l’arrêt du 14 janvier 2016, Commission/Belgique (C‑163/14, EU:C:2016:4), le présent moyen ne saurait être accueilli.

    60

    Il résulte de ce qui précède que le troisième moyen doit être écarté comme manifestement non fondé. Par conséquent, l’ensemble des conclusions de la requérante doit être rejeté.

    Sur les conclusions présentées par le Parlement aux fins d’une action déclaratoire

    61

    Le Parlement présente des conclusions tendant à ce que le Tribunal dise que « c’est à la Région de Bruxelles-Capitale [qu’il appartient] de rembourser à la requérante la somme réclamée ».

    62

    Il ressort d’une jurisprudence constante que la compétence du Tribunal, en vertu de l’article 256, paragraphe 1, TFUE et de l’article 272 TFUE, pour connaître d’un recours introduit sur la base d’une clause compromissoire implique nécessairement celle de connaître d’une demande reconventionnelle formulée dans le cadre de ce même recours qui dérive du lien contractuel ou du fait sur lequel est fondée la demande principale ou a un rapport direct avec les obligations qui en découlent (voir arrêt du 16 juillet 2014, Isotis/Commission, T‑59/11, EU:T:2014:679, point 265 et jurisprudence citée).

    63

    Toutefois, en l’espèce, la demande introduite par le Parlement est sans lien avec le contrat, puisqu’elle ne concerne pas les obligations réciproques entre les parties au contrat qui résulteraient de celui-ci, mais porte sur d’éventuelles obligations que la Région de Bruxelles-Capitale, laquelle n’est ni partie au contrat, ni partie au litige, aurait à l’égard de la requérante.

    64

    Le Tribunal n’est donc pas compétent, sur le fondement du présent recours introduit sur la base d’une clause compromissoire, pour connaître des conclusions introduites par le Parlement.

    65

    La conclusion qui précède s’imposerait, pour les mêmes raisons, y compris s’il était retenu que, au regard de son libellé, la clause compromissoire figurant à l’article 20 du contrat, aux termes de laquelle « [t]tout litige entre le Parlement […] et le contractant se rapportant au présent contrat, qui n’a pu faire l’objet d’un règlement amiable, est soumis au Tribunal de première instance des Communautés européennes, en vertu de l’article 255, paragraphe 1, du traité CE », était susceptible de fonder la compétence du Tribunal ou de la Cour pour connaître d’une action déclaratoire portant sur un litige entre le Parlement et la requérante quant à la validité, à l’application ou à l’interprétation du contrat (voir, en ce sens, arrêt du 26 février 2015, Planet/Commission, C‑564/13 P, EU:C:2015:124, point 26).

    66

    Il résulte de tout ce qui précède que le recours doit être rejeté comme manifestement dépourvu de tout fondement en droit et que les conclusions présentées par le Parlement aux fins d’une action déclaratoire doivent également être rejetées, le Tribunal étant manifestement incompétent pour en connaître, sans qu’il soit nécessaire de poursuivre la procédure.

    Sur les dépens

    67

    En vertu de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

    68

    En l’espèce, la requérante ayant succombé pour l’essentiel, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions du Parlement.

    69

    En vertu de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, les institutions qui sont intervenues au litige supportent leurs propres dépens.

    70

    La Commission supportera donc ses propres dépens.

     

    Par ces motifs,

    LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

    ordonne :

     

    1)

    Le recours est rejeté.

     

    2)

    Les conclusions présentées par le Parlement européen aux fins d’une action déclaratoire sont rejetées.

     

    3)

    EDF Luminus supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par le Parlement.

     

    4)

    La Commission européenne supportera ses propres dépens.

    Fait à Luxembourg, le 13 septembre 2016.

     

    Le greffier

    E. Coulon

    Le président

    M. E. Martins Ribeiro


    ( *1 ) Langue de procédure : le français.

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