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Document 62015TJ0402

    Arrêt du Tribunal (septième chambre) du 1er mars 2018 (Extraits).
    République de Pologne contre Commission européenne.
    FEDER – Refus de confirmer une contribution financière à un grand projet – Article 41, paragraphe 1, du règlement (CE) no 1083/2006 – Évaluation de la contribution d’un grand projet à la réalisation des objectifs du programme opérationnel – Article 41, paragraphe 2, du règlement no 1083/2006 – Dépassement du délai.
    Affaire T-402/15.

    Court reports – general

    ECLI identifier: ECLI:EU:T:2018:107

    ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

    1er mars 2018 ( *1 )

    « FEDER – Refus de confirmer une contribution financière à un grand projet – Article 41, paragraphe 1, du règlement (CE) no 1083/2006 – Évaluation de la contribution d’un grand projet à la réalisation des objectifs du programme opérationnel – Article 41, paragraphe 2, du règlement no 1083/2006 – Dépassement du délai »

    Dans l’affaire T‑402/15,

    République de Pologne, représentée par M. B. Majczyna, en qualité d’agent,

    partie requérante,

    contre

    Commission européenne, représentée par M. B.-R. Killmann et Mme M. Siekierzyńska, en qualité d’agents,

    partie défenderesse,

    ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision C(2015) 3228 final de la Commission, du 11 mai 2015, refusant de confirmer à la République de Pologne une contribution financière du Fonds européen de développement régional (FEDER) au grand projet « Centre européen de services partagés – Systèmes logistiques intelligents » dans le cadre de l’axe prioritaire no 4 du programme opérationnel « Économie innovante »,

    LE TRIBUNAL (septième chambre),

    composé de Mmes V. Tomljenović, président, A. Marcoulli (rapporteur) et M. A. Kornezov, juges,

    greffier : M. E. Coulon,

    rend le présent

    Arrêt ( 1 )

    [omissis]

    Procédure et conclusions des parties

    16

    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 22 juillet 2015, la République de Pologne a introduit le présent recours. Elle conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

    annuler la décision attaquée ;

    condamner la Commission aux dépens.

    17

    Le 4 novembre 2015, la Commission a déposé au greffe du Tribunal un mémoire en défense. La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

    rejeter le recours comme non fondé ;

    condamner la République de Pologne aux dépens.

    18

    La République de Pologne a déposé une réplique le 5 janvier 2016 et la Commission a déposé une duplique le 11 mars 2016.

    19

    Aucune des parties n’a demandé la tenue d’une audience.

    20

    Le Tribunal (septième chambre) a décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure.

    En droit

    21

    La République de Pologne invoque quatre moyens au soutien du recours, tirés, en substance, le premier, d’une part, de la violation des dispositions combinées de l’article 41, paragraphe 1, de l’article 56, paragraphe 3, et de l’article 60, sous a), du règlement no 1083/2006 ainsi que de la violation du principe de coopération loyale et, d’autre part, de la violation de l’article 41, paragraphe 2, du règlement no 1083/2006, le deuxième, d’une erreur d’appréciation du degré de diffusion de l’innovation et du caractère innovant du projet, le troisième, d’une erreur d’appréciation du caractère des emplois créés par le projet et, le quatrième, d’une erreur d’appréciation du projet concernant la valeur ajoutée et l’effet d’incitation.

    22

    Il y a lieu de relever que le premier moyen du recours porte sur les modalités procédurales et substantives d’évaluation du projet, tandis que les trois derniers moyens portent successivement sur les trois motifs en vertu desquels la Commission a considéré que le projet ne contribuait pas à la réalisation des objectifs du POEI au sens de l’article 41, paragraphe 1, du règlement no 1083/2006, à savoir l’absence de diffusion de l’innovation, l’absence d’emplois hautement qualifiés et l’absence de valeur ajoutée (voir point 15 ci-dessus).

    [omissis]

    Sur le premier moyen, tiré, en substance, d’une part, de la violation des dispositions combinées de l’article 41, paragraphe 1, de l’article 56, paragraphe 3, et de l’article 60, sous a), du règlement no 1083/2006 ainsi que de la violation du principe de coopération loyale et, d’autre part, de la violation de l’article 41, paragraphe 2, du règlement no 1083/2006

    43

    La République de Pologne fait valoir que la Commission a commis deux violations principales. D’une part, lors de l’évaluation du projet, la Commission serait allée au-delà des critères de sélection. D’autre part, la Commission aurait violé le délai prévu à l’article 41, paragraphe 2, du règlement no 1083/2006.

    [omissis]

    Sur la seconde branche du premier moyen, tirée du non-respect du délai prévu à l’article 41, paragraphe 2, du règlement no 1083/2006

    [omissis]

    65

    L’article 41, paragraphe 2, du règlement no 1083/2006 énonce ce qui suit :

    « La Commission adopte une décision dans les plus brefs délais et au plus tard trois mois après la présentation du grand projet par l’État membre […], à condition qu’il soit soumis conformément à l’article 40 [du règlement no 1083/2006]. Cette décision porte sur la description de l’objet physique, sur l’assiette sur laquelle le taux de cofinancement de l’axe prioritaire […] s’applique, et sur le plan annualisé ou les plans de contribution financière du FEDER ou du Fonds de cohésion. »

    66

    L’article 41, paragraphe 3, du règlement no 1083/2006 énonce ce qui suit :

    « Lorsque la Commission refuse la contribution financière des Fonds à un grand projet, elle en communique les raisons à l’État membre dans les délais et aux conditions fixées au paragraphe 2 [de l’article 41 de ce règlement]. »

    67

    En premier lieu, il convient de déterminer si le délai figurant à l’article 41, paragraphe 2, du règlement no 1083/2006 revêt un caractère indicatif ou impératif, à la lumière du libellé et de l’économie de cette disposition (voir, par analogie, arrêt du 20 janvier 2005, Merck, Sharp & Dohme, C‑245/03, EU:C:2005:41, point 20).

    68

    À cet égard, il convient de relever que l’article 41, paragraphe 2, du règlement no 1083/2006 ne contient pas d’indications permettant de conférer au délai qu’il prévoit un caractère purement indicatif. Au contraire, l’emploi du verbe « adopter » à la forme indicative (« adopte ») montre que la Commission est tenue de respecter ledit délai, ce qui est corroboré, notamment, par la version anglaise de cette disposition, laquelle, en employant les termes « shall adopt », se réfère expressément à une obligation. L’emploi de l’expression « dans les plus brefs délais et au plus tard » ne fait que confirmer que le respect dudit délai n’est pas une faculté, mais une obligation pour la Commission, que le législateur a voulu souligner.

    69

    Il s’ensuit que le délai figurant à l’article 41, paragraphe 2, du règlement no 1083/2006, ainsi qu’il ressort tant du libellé que de l’économie de ladite disposition, est un délai impératif.

    70

    En deuxième lieu, force est de constater que, en l’espèce, comme le soutient à juste titre la République de Pologne (voir point 61 ci-dessus), à la lumière des développements factuels rappelés aux points 3 à 14 ci-dessus, le délai de trois mois prévu à l’article 41, paragraphe 2, du règlement no 1083/2006, applicable à une décision de refus en vertu de l’article 41, paragraphe 3, de ce règlement, a été dépassé par la Commission.

    71

    En effet, il convient de constater que, à la suite du retrait de la première demande de confirmation, qui a mis un terme à la procédure d’évaluation de cette demande, s’agissant de la seconde demande de confirmation, la Commission, tout d’abord, a mis près de onze mois pour transmettre à la République de Pologne, le 24 juin 2014, une lettre contenant son évaluation de cette demande et, ensuite, faisant suite à la réponse de la République de Pologne du 28 août 2014, a mis environ huit mois et demi pour se prononcer formellement sur cette demande et adopter, le 11 mai 2015, la décision attaquée au titre de l’article 41, paragraphe 3, du règlement no 1083/2006.

    72

    En troisième lieu, dans ces circonstances, il y a lieu de déterminer les conséquences du dépassement du délai de trois mois prévu à l’article 41, paragraphe 2, du règlement no 1083/2006 et, notamment, d’évaluer s’il doit emporter automatiquement, de ce seul fait, l’annulation de la décision attaquée.

    73

    Dès lors que l’article 41 du règlement no 1083/2006 ne contient aucune indication quant aux conséquences du dépassement, par la Commission, du délai de trois mois qu’il prévoit, conformément à la jurisprudence de la Cour, il y a lieu d’examiner la finalité et la structure de ce règlement afin de déterminer les conséquences dudit dépassement (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 20 janvier 2005, Merck, Sharp & Dohme, C‑245/03, EU:C:2005:41, points 25 et 26).

    74

    À titre liminaire, il convient de rappeler que le délai prévu à l’article 41, paragraphe 2, du règlement no 1083/2006 est un délai qui s’impose à la Commission pour répondre à une demande qui lui est présentée par un tiers, en l’occurrence par un État membre. Ce n’est que si l’absence de réponse dans ledit délai entraîne l’accueil de la demande ou la perte du pouvoir de la Commission de statuer sur celle-ci qu’une réponse négative adoptée hors délai pourrait être annulée automatiquement, du seul fait du dépassement d’un tel délai (voir, par analogie, arrêt du 18 mars 2009, Shanghai Excell M & E Enterprise et Shanghai Adeptech Precision/Conseil, T‑299/05, EU:T:2009:72, point 116). Il y a donc lieu d’examiner si, à la lumière de sa finalité et de sa structure, le règlement no 1083/2006 doit être interprété en ce sens que le dépassement dudit délai entraîne l’accueil de la demande ou la perte du pouvoir de la Commission de statuer sur celle-ci.

    75

    S’agissant de la question de savoir s’il ressort de la finalité et de la structure du règlement no 1083/2006 que le dépassement du délai de trois mois entraîne l’accueil de la demande de confirmation présentée par l’État membre, il y a lieu de relever, premièrement, que la teneur d’une décision d’accueil exclut une telle possibilité.

    76

    En effet, il ressort de l’article 41, paragraphe 2, du règlement no 1083/2006 que la décision de la Commission accueillant la demande de confirmation indique, notamment, l’assiette sur laquelle le taux de cofinancement du programme opérationnel s’applique (voir point 33 ci-dessus). Seule la décision de la Commission accueillant une telle demande détermine le montant de base sur lequel le taux de cofinancement découlant du programme opérationnel pertinent s’applique et, ainsi, le montant de la contribution financière de l’Union. En l’absence de décision de la Commission, la contribution financière de l’Union ne saurait être concrètement déterminée et, par conséquent, considérée comme étant confirmée.

    77

    Cela est corroboré, d’ailleurs, par le considérant 49 du règlement no 1083/2006, lequel énonce que les grands projets doivent pouvoir être évalués et, le cas échéant, approuvés par la Commission (voir point 29 ci-dessus). Il s’ensuit que, en matière de grand projets, l’idée sous-jacente au règlement no 1083/2006 est que leur financement par un État membre au moyen de ressources du FEDER ou du Fonds de cohésion est subordonné à l’approbation de la Commission.

    78

    Deuxièmement, il convient de constater que, lorsque le règlement no 1083/2006 entendait sanctionner l’inobservation d’un délai par une acceptation de plein droit, il l’indiquait expressément (voir, par analogie, arrêt du 20 janvier 2005, Merck, Sharp & Dohme, C‑245/03, EU:C:2005:41, point 31). Ainsi, par exemple, l’article 62, paragraphe 4, du règlement no 1083/2006 dispose que la stratégie d’audit présentée à la Commission par le comité de suivi « est réputée acceptée » en l’absence d’observations de la Commission dans le délai de trois mois suivant sa réception. De même, l’article 67, paragraphe 4, du règlement no 1083/2006 dispose que le rapport final du programme opérationnel transmis par l’autorité de gestion à la Commission « est réputé accepté » si la Commission ne répond pas dans le délai fixé. De même, l’article 89, paragraphe 3, du règlement no 1083/2006 dispose que la déclaration de clôture transmise par l’État membre à la Commission « est réputée acceptée en l’absence d’observations de la Commission dans un délai de cinq mois ».

    79

    Il s’ensuit que, dans le cadre du règlement no 1083/2006, ainsi qu’il ressort de sa finalité et de sa structure, l’absence de réponse à la demande de confirmation dans le délai prévu à l’article 41, paragraphe 2, de ce règlement n’entraîne pas l’approbation de la demande de confirmation.

    80

    Cette conclusion n’est pas remise en cause par les arguments de la République de Pologne tirés, d’une part, de la jurisprudence de la Cour relative au délai pour adopter une correction financière et, d’autre part, de la nouvelle procédure d’approbation tacite prévue à l’article 102, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement no 1303/2013.

    81

    Quant au premier argument, si, certes, ainsi que le fait valoir la République de Pologne, dans la jurisprudence relative au pouvoir de la Commission, prévu à l’article 99 du règlement no 1083/2006, d’adopter des corrections financières, la Cour a considéré que le dépassement du délai, prévu à l’article 100, paragraphe 5, de ce même règlement, pour adopter de telles corrections constituait une violation des formes substantielles devant être relevée d’office par le juge de l’Union et entraînant l’annulation de la décision adoptée hors délai (arrêts du 4 septembre 2014, Espagne/Commission, C‑192/13 P, EU:C:2014:2156, points 103 et 104, et du 21 septembre 2016, Commission/Espagne, C‑140/15 P, EU:C:2016:708, points 114 et 118), une telle jurisprudence ne saurait trouver application en l’espèce.

    82

    En effet, la jurisprudence visée au point 81 ci-dessus a pour objet un délai de nature différente de celle du délai prévu à l’article 41, paragraphe 2, du règlement no 1083/2006.

    83

    Tout d’abord, alors que, dans le cadre de l’évaluation des grands projets, le délai prévu à l’article 41, paragraphe 2, du règlement no 1083/2006 est un délai qui s’impose à la Commission pour répondre à une demande de cofinancement qui lui est présentée par un État membre, en revanche, dans le cadre de la procédure de correction financière, le délai prévu à l’article 100, paragraphe 5, de ce même règlement est un délai qui s’impose à la Commission pour l’adoption, de sa propre initiative, d’une décision annulant tout ou partie de la participation financière de l’Union à un programme opérationnel. Ainsi, en substance, le premier est un délai pour accorder une contribution financière, tandis que le second est un délai pour annuler une contribution financière déjà accordée.

    84

    Ensuite, dans le cadre de l’évaluation des grands projets, en l’absence de décision sur la demande de confirmation adoptée dans le délai et de toute disposition prévoyant les conséquences d’une telle absence de décision, la demande de confirmation demeure sans réponse et ne saurait être considérée comme étant approuvée (voir points 75 à 79 ci-dessus). En revanche, en matière de corrections financières, en l’absence de décision dans le délai prévu à cet effet, l’État membre maintient la contribution des Fonds qui lui a déjà été accordée. Ainsi, en l’absence de décision de correction financière adoptée dans le délai, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence évoquée au point 81 ci-dessus, la Commission ne saurait appliquer une correction financière et l’État membre ne saurait se voir appliquer une telle correction.

    85

    Enfin, contrairement à ce qui a été allégué par la République de Pologne, il ne ressort pas de la jurisprudence évoquée au point 81 ci-dessus que la Cour se serait prononcée dans le sens que les délais prévus à l’article 100, paragraphe 5, et à l’article 41, paragraphe 2, du règlement no 1083/2006 auraient la même nature. En revanche, il ressort de ladite jurisprudence que la Cour a examiné uniquement le délai imparti pour l’adoption d’une décision de correction financière et qu’elle s’est référée explicitement à la nature d’une telle décision (arrêts du 4 septembre 2014, Espagne/Commission, C‑192/13 P, EU:C:2014:2156, points 82 et 102, et du 21 septembre 2016, Commission/Espagne, C‑140/15 P, EU:C:2016:708, points 70, 72 et 113).

    86

    Quant au deuxième argument, il convient d’observer que le règlement no 1303/2013 ne trouve pas application en l’espèce, dans la mesure où son article 152, paragraphe 1, dispose que le règlement no 1083/2006 continue à s’appliquer aux interventions et aux opérations, y compris les programmes opérationnels et les grands projets, approuvées par la Commission sur la base de ce règlement et où son article 152, paragraphe 2, ajoute que les demandes d’assistance présentées ou approuvées dans le cadre du règlement no 1083/2006 restent valables. Au demeurant, il convient de relever que l’article 102, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement no 1303/2013 prévoit une procédure d’approbation tacite uniquement lorsque la demande présentée par l’État membre est accompagnée d’une évaluation de qualité réalisée par des experts indépendants conformément à l’article 101, troisième alinéa, de ce règlement. Cette procédure n’a pas d’équivalent dans le système prévu aux articles 39 à 41 du règlement no 1083/2006, ce qui corrobore la conclusion selon laquelle, dans le cadre de ce dernier règlement, le silence de la Commission dans le délai de trois mois ne saurait être interprété comme une confirmation tacite de la contribution financière à un grand projet. D’ailleurs, il est constant que, en l’espèce, le projet n’a pas été présenté conformément à l’article 102, paragraphe 1, du règlement no 1303/2013, de sorte que la procédure d’approbation tacite prévue par cette disposition ne saurait trouver application.

    87

    S’agissant de la question de savoir s’il ressort de la finalité et de la structure du règlement no 1083/2006 que le dépassement du délai de trois mois entraîne la perte du pouvoir de la Commission de statuer sur la demande de confirmation présentée par l’État membre, premièrement, il convient d’observer que, si la Commission devait s’abstenir de continuer son examen de la demande de confirmation si elle dépassait le délai de trois mois, cela nuirait finalement au but de la demande initiale de l’État membre, à savoir l’obtention de la confirmation d’une contribution financière du FEDER ou du Fonds de cohésion, et ce pour des raisons qui échapperaient à son contrôle. De même, si la Commission devait commencer une nouvelle procédure d’évaluation d’un grand projet, sujette à un nouveau délai de trois mois, cela ne ferait qu’aggraver, en pratique, la méconnaissance dudit délai, en reportant la décision sur la demande de confirmation à un moment ultérieur. Par ailleurs, étant donné que ledit dépassement ne vaut pas approbation de la demande, ainsi qu’il a déjà été relevé, l’annulation éventuelle d’une décision au motif qu’elle a été adoptée au-delà du délai, ne ferait, également, qu’aggraver la méconnaissance de ce délai.

    88

    Deuxièmement, il ressort de l’article 78, paragraphe 4, du règlement no 1083/2006, rappelé au point 34 ci-dessus, qu’un État membre peut faire commencer la réalisation d’un grand projet et soumettre à la Commission les dépenses qui y sont afférentes bien avant que cette dernière n’ait rendu sa décision, et ce donc indépendamment du délai prévu pour rendre cette décision. L’État membre qui opte pour cette possibilité le fait à ses propres risques, compte tenu du fait que la Commission peut arrêter une décision refusant de confirmer le concours financier de l’Union à un grand projet. Partant, dès lors que l’État membre n’est pas tenu d’attendre une décision de la Commission pour réaliser ses projets de développement régional et déclarer à la Commission les dépenses qui y sont afférentes pour le cas où elles seraient prises en charge par l’Union, le dépassement du délai prévu pour adopter une telle décision ne prive pas la Commission du pouvoir de statuer sur une demande de confirmation.

    89

    Troisièmement, il ressort de la jurisprudence que, lorsque, comme en l’espèce, le législateur n’a pas attaché au silence de l’administration la conséquence de la perte du pouvoir d’adopter une décision, aucun principe juridique ne fait perdre à l’administration la compétence pour répondre à une demande, même en dehors des délais impartis à cet effet (voir, par analogie, arrêt du 19 janvier 2010, Co-Frutta/Commission, T‑355/04 et T‑446/04, EU:T:2010:15, points 57 et 59).

    90

    Il s’ensuit que, dans le cadre du règlement no 1083/2006, ainsi qu’il ressort de sa finalité et de sa structure, l’absence de réponse à la demande de confirmation dans le délai prévu à l’article 41, paragraphe 2, de ce règlement n’entraîne pas la perte du pouvoir de la Commission de statuer sur la demande de confirmation.

    91

    Il découle de tout ce qui précède que le règlement no 1083/2006 ne saurait être interprété en ce sens que tout dépassement du délai prévu à l’article 41, paragraphe 2, de ce règlement entraîne automatiquement, de ce seul fait, l’annulation d’une décision de rejet adoptée hors délai.

    92

    En quatrième lieu, il convient d’examiner si le dépassement du délai de trois mois constaté en l’espèce doit entraîner l’annulation de la décision attaquée.

    93

    En effet, il ressort d’une jurisprudence constante que le non-respect d’un délai, tel que celui institué à l’article 41, paragraphe 2, du règlement no 1083/2006 ne saurait conduire à l’annulation de l’acte adopté au terme de la procédure que s’il existe une possibilité que, en raison de cette irrégularité, ladite procédure aurait pu aboutir à un résultat différent. Si la personne qui se prévaut d’une telle irrégularité n’est pas tenue de démontrer que, en son absence, l’acte concerné aurait eu un contenu plus favorable à ses intérêts, elle doit néanmoins prouver, de manière concrète, qu’une telle hypothèse n’est pas entièrement exclue (voir, par analogie, arrêts du 4 février 2016, C & J Clark International et Puma, C‑659/13 et C‑34/14, EU:C:2016:74, point 140, et du 12 juin 2015, Health Food Manufacturers’ Association e.a./Commission, T‑296/12, EU:T:2015:375, point 71).

    94

    En l’espèce, la République de Pologne n’a pas démontré concrètement, ni même soutenu, qu’il n’était pas exclu que la procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent si elle avait été conclue dans le délai de trois mois prévu à l’article 41, paragraphe 2, du règlement no 1083/2006. Dès lors que la République de Pologne n’a pas prouvé que, en l’absence du dépassement dudit délai, la procédure d’évaluation du projet aurait pu avoir une issue différente, ce dépassement, dans les circonstances du cas d’espèce, ne saurait conduire à l’annulation de la décision attaquée.

    95

    Cela étant, dès lors que la Commission a enfreint l’article 41, paragraphe 2, du règlement no 1083/2006 en statuant au-delà du délai de trois mois, il y a lieu de rappeler que la réparation d’un éventuel préjudice causé par le non-respect du délai prévu à l’article 41, paragraphe 2, du règlement no 1083/2006 pour statuer sur une demande de confirmation pourra être recherchée devant le Tribunal, saisi d’un recours en indemnité (voir, par analogie, arrêt du 19 janvier 2010, Co-Frutta/Commission, T‑355/04 et T‑446/04, EU:T:2010:15, points 60 et 71), pour autant que l’ensemble des conditions desquelles dépendent l’engagement de la responsabilité extracontractuelle de l’Union et la mise en œuvre du droit à la réparation du préjudice subi, en vertu de l’article 340, deuxième alinéa, TFUE, soient réunies (voir, en ce sens, arrêt du 9 septembre 2008, FIAMM e.a./Conseil et Commission, C‑120/06 P et C‑121/06 P, EU:C:2008:476, point 106).

    96

    Il résulte de tout ce qui précède que la deuxième branche du premier moyen, tiré de la violation de l’article 41, paragraphe 2, du règlement no 1083/2006, n’est pas fondée et doit être écartée.

    [omissis]

     

    Par ces motifs,

    LE TRIBUNAL (septième chambre)

    déclare et arrête :

     

    1)

    Le recours est rejeté.

     

    2)

    La République de Pologne est condamnée aux dépens.

     

    Tomljenović

    Marcoulli

    Kornezov

    Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 1er mars 2018.

    Signatures


    ( *1 ) Langue de procédure : le polonais.

    ( 1 ) Ne sont reproduits que les points du présent arrêt dont le Tribunal estime la publication utile.

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