Choose the experimental features you want to try

This document is an excerpt from the EUR-Lex website

Document 62015TJ0121

Arrêt du Tribunal (sixième chambre) du 24 septembre 2019.
Fortischem a.s. contre Commission européenne.
Aides d’État – Industrie chimique – Décision déclarant l’aide incompatible avec le marché intérieur – Notion d’aide d’État – Ressources d’État – Avantage – Récupération – Continuité économique – Principe de bonne administration – Obligation de motivation.
Affaire T-121/15.

Court reports – general – 'Information on unpublished decisions' section

ECLI identifier: ECLI:EU:T:2019:684

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

24 septembre 2019 ( *1 )

« Aides d’État – Industrie chimique – Décision déclarant l’aide incompatible avec le marché intérieur – Notion d’aide d’État – Ressources d’État – Avantage – Récupération – Continuité économique – Principe de bonne administration – Obligation de motivation »

Dans l’affaire T‑121/15,

Fortischem a.s., établie à Nováky (Slovaquie), représentée par Mes C. Arhold, P. Hodál et M. Staroň, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par Mme L. Armati et M. G. Conte, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

AlzChem AG, établie à Trostberg (Allemagne), représentée initialement par M. P. Alexiadis, solicitor, Mes A. Borsos et I. Georgiopoulos, avocats, puis par M. Alexiadis, Mes Borsos et V. Dolka, avocats,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation des articles 1er et 3 à 5 de la décision (UE) 2015/1826 de la Commission, du 15 octobre 2014, concernant l’aide d’État SA.33797 (2013/C) (ex 2013/NN) (ex 2011/CP) mise à exécution par la Slovaquie en faveur de l’entreprise NCHZ (JO 2015, L 269, p. 71),

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. G. Berardis, président, S. Papasavvas et Mme O. Spineanu‑Matei (rapporteur), juges,

greffier : M. P. Cullen, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 10 avril 2019,

rend le présent

Arrêt

I. Antécédents du litige

1

Novácké chemické závody, a.s. v konkurze (ci-après « NCHZ ») était un producteur chimique détenu par des capitaux privés et doté de trois divisions. Cette société exploitait une usine chimique installée dans la région de Trenčín (Slovaquie). Elle avait pour cœur d’activité la production de carbure de calcium et de gaz techniques, de polychlorure de vinyle et de ses sous-produits ainsi que d’une part croissante de produits de chimie lourde et de chimie fine de faible tonnage.

2

Le 8 octobre 2009, NCHZ, appartenant alors à Disor Holdings Ltd et ayant déclaré son incapacité à poursuivre ses activités et déposé son bilan, a fait l’objet d’une procédure de faillite.

3

Le 5 novembre 2009, la République slovaque a adopté la zákon č. 493/2009 Z.z. o niektorých opatreniach týkajúcich sa strategických spoločností a o zmene a doplnení niektorých zákonov (loi no 493/2009 sur certaines mesures concernant les sociétés stratégiques et sur la modification de certaines lois, ci-après la « loi sur les sociétés stratégiques »). Cette loi, entrée en vigueur le 1er décembre 2009, conférait à l’État un droit de préemption l’autorisant à acheter les sociétés stratégiques faisant l’objet d’une procédure de faillite et exigeait la présence d’un administrateur de faillite afin d’assurer la poursuite de l’exploitation de la société stratégique durant cette procédure. Le 2 décembre 2009, NCHZ a été qualifiée par les autorités slovaques de « société stratégique » au sens de ladite loi et a bénéficié de ce statut jusqu’à l’expiration de celle-ci, le 31 décembre 2010 (ci-après la « première période de la faillite »). NCHZ a été la seule société à faire l’objet d’une application de ladite loi, qui imposait à l’administrateur de faillite de maintenir l’exploitation de la société et d’empêcher les licenciements collectifs injustifiés.

4

Le 28 décembre 2009, le « comité compétent », au sens de l’article 82 de la zákon č. 7/2005 Z.z. o konkurze a reštrukturalizácii a o zmene a doplnení niektorých zákonov (loi no 7/2005 sur la faillite et la restructuration et sur les modifications de certaines lois, ci-après la « loi sur la faillite ») (ci-après le « comité compétent »), a été formé. Ledit comité était composé, conformément à ladite loi, du comité des créanciers, représentant les créanciers chirographaires titulaires de créances non garanties à l’encontre de la société en faillite à la date de l’ouverture de la procédure de faillite et ayant inscrit leurs créances comme « créances préfaillite » (ci-après le « comité des créanciers »), des créanciers privilégiés, à savoir les créanciers dont les créances étaient garanties par certaines sûretés, et du súd v Trenčíne (tribunal de Trenčín, Slovaquie).

5

Le 29 décembre 2009, le premier administrateur a été remplacé pour des raisons personnelles par un nouvel administrateur (ci-après l’« administrateur »).

6

Le 17 juin 2010, le súd v Trenčíne (tribunal de Trenčín) a ordonné à l’administrateur de vendre NCHZ en tant qu’entreprise en activité conformément aux étapes de la procédure qu’il avait élaborées. Après l’annonce de l’appel d’offres le 12 août 2010 (ci-après l’« appel d’offres de 2010 »), le comité compétent a, le 24 novembre 2010, rejeté l’unique offre soumise. Le 3 décembre 2010, le súd v Trenčíne (tribunal de Trenčín) a ordonné à l’administrateur d’établir une analyse circonstanciée de la situation économique de NCHZ. En fonction des résultats de cette analyse, l’administrateur devait soit accepter, soit rejeter l’unique offre soumise. L’analyse a été établie le 8 décembre 2010 et l’administrateur a annoncé que l’offre serait rejetée.

7

Après le 31 décembre 2010, NCHZ a été soumise à l’application de la loi sur la faillite (ci-après la « seconde période de la faillite »). Lors de la réunion commune du 26 janvier 2011 entre les créanciers réunis au sein du comité des créanciers et les créanciers privilégiés, l’administrateur a informé ceux-ci du fait que les charges d’exploitation générées par l’activité de NCHZ étaient supérieures aux produits d’exploitation. Il leur a, en outre, communiqué son analyse économique du23 décembre 2010, laquelle a été complétée par une présentation des dirigeants. Les créanciers susmentionnés ont décidé la poursuite de l’exploitation de NCHZ (ci-après la « décision du 26 janvier 2011 »). Cette décision ayant été approuvée par une décision du súd v Trenčíne (tribunal de Trenčín) le 17 février 2011, l’administrateur a poursuivi cette exploitation.

8

Le 7 juin 2011, le súd v Trenčíne (tribunal de Trenčin) a rendu une ordonnance exécutoire demandant à l’administrateur de procéder à la vente de NCHZ conformément à la procédure d’appel d’offres organisée par ledit tribunal (ci-après la « procédure d’appel d’offres de 2011 »). Après l’annonce de l’appel d’offres le 12 juillet 2011 (ci-après l’« appel d’offres de 2011 »), deux offres ont été soumises le 29 novembre 2011.

9

Le 13 octobre 2011, la Commission européenne a reçu une plainte d’AlzChem AG, concernant une aide illégale que la République slovaque aurait accordée à NCHZ. AlzChem est une société ayant son siège social en Allemagne et exerçant son activité sur plusieurs marchés de produits de chimie fine dans un certain nombre d’États membres de l’Union européenne, parmi lesquels la République slovaque. Cette plainte a été complétée le 14 juin 2012.

10

Le 17 octobre 2011, la Commission a transmis aux autorités slovaques la plainte reçue, accompagnée d’une demande de renseignements. Les 22 mars et 21 juin 2012, la Commission leur a adressé de nouvelles demandes de renseignements. Les autorités slovaques ont répondu à l’ensemble de ces demandes.

11

Le 7 décembre 2011, l’administrateur a informé le súd v Trenčíne (tribunal de Trenčín) des résultats de la procédure d’appel d’offres de 2011 et du vote des créanciers au sein du comité compétent. Le 14 décembre 2011, le súd v Trenčíne (tribunal de Trenčín) a demandé à l’administrateur d’évaluer une offre supplémentaire. Le 15 décembre 2011, l’administrateur a rédigé une analyse selon laquelle, cette offre ne portant que sur une partie des actifs de NCHZ, elle ne servait pas au mieux les intérêts des créanciers. Le 29 décembre 2011, le súd v Trenčíne (tribunal de Trenčín) a rendu une ordonnance exécutoire demandant à l’administrateur de déclarer adjudicataire Via Chem Slovakia a.s. Après la conclusion du contrat d’acquisition entre cette société et NCHZ le 16 janvier 2012, la vente a été approuvée par le Protimonopolný úrad SR (autorité de concurrence slovaque) le 19 juillet 2012 et a été finalisée le 31 juillet 2012.

12

Le 1er août 2012, Via Chem Slovakia a vendu la division chimique de NCHZ, à l’exception des biens immobiliers (bâtiments et terrains), à la requérante, Fortischem a.s., laquelle exerce son activité dans le secteur de la production de produits chimiques. La requérante est détenue par Energochemica SE et, ainsi qu’elle l’a indiqué au Tribunal lors de l’audience, en réponse à une question de celui-ci, a été créée en mai 2012. Les biens immobiliers nécessaires à la production chimique ont été mis à la disposition de la requérante en vertu d’un contrat de location.

13

Le 24 janvier 2013, une réunion s’est tenue entre la Commission et AlzChem, à la demande de cette dernière, laquelle a transmis des informations complémentaires par courriels des 8 et 22 mars 2013.

14

Par lettre du 2 juillet 2013, la Commission a notifié aux autorités slovaques sa décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen, en vertu de l’article 108, paragraphe 2, TFUE (JO 2013, C 297, p. 85), s’agissant, d’une part, de l’autorisation de l’État, du fait de la loi sur les sociétés stratégiques, de poursuivre l’exploitation de NCHZ de décembre 2009 à décembre 2010 et, d’autre part, de la décision du 26 janvier 2011 de poursuivre l’exploitation de NCHZ, après l’expiration de la loi sur les sociétés stratégiques. La Commission a en outre émis des doutes sur le caractère inconditionnel de l’appel d’offres de 2011 ayant permis la vente de NCHZ et a indiqué que des indices sérieux laissaient penser que la continuité économique entre NCHZ et la nouvelle entité n’avait pas été interrompue.

15

À la suite de la décision du 2 juillet 2013, la Commission a reçu des observations des autorités slovaques ainsi que d’AlzChem et d’une autre partie intéressée. Les observations de ces parties tierces intéressées, accompagnées de nouvelles questions, ont été envoyées aux autorités slovaques, qui ont présenté leurs observations le 14 janvier 2014.

16

Les 7 octobre 2013 et 17 février 2014, des réunions ont eu lieu entre les services de la Commission et les autorités slovaques, à la demande de ces dernières. Le 20 mars 2014, la Commission a envoyé une demande d’explications complémentaire à l’une des parties tierces intéressées, qui y a répondu le 6 mai 2014. Le 2 mai 2014, la Commission a adressé aux autorités slovaques de nouvelles questions, auxquelles elles ont répondu les 14 et 30 mai 2014.

II. Décision attaquée

17

Le 15 octobre 2014, la Commission a adopté la décision (UE) 2015/1826, concernant l’aide d’État SA.33797 (2013/C) (ex 2013/NN) (ex 2011/CP) mise à exécution par la Slovaquie en faveur de l’entreprise NCHZ (JO 2015, L 269, p. 71, ci-après la « décision attaquée »).

18

La Commission a considéré que l’attribution du statut de société stratégique à NCHZ (ci-après la « première mesure ») constituait un avantage sélectif au profit de celle-ci, était imputable à l’État, avait conduit à l’utilisation de ressources d’État et avait faussé la concurrence sur un marché ouvert aux échanges entre les États membres. Elle en a conclu que cette mesure constituait une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE et que cette aide était illégale et incompatible avec le marché intérieur (considérants 110 et 114 à 124 de la décision attaquée). Après avoir estimé que le montant de l’aide d’État s’élevait à 4783424,10 euros, elle a considéré que l’aide devait être récupérée auprès de NCHZ et que l’ordre de récupération devrait être étendu à la requérante, celle-ci étant liée à NCHZ dans le cadre d’une continuité économique (considérants 101 et 174 de la décision attaquée).

19

En revanche, la Commission a estimé que la poursuite de l’exploitation de NCHZ en vertu de la décision du 26 janvier 2011 ne constituait pas une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, étant donné qu’au moins deux conditions cumulatives conditionnant l’existence d’une aide d’État, à savoir l’imputabilité de la mesure en cause à l’État et l’existence d’un avantage économique, n’étaient pas remplies (considérant 113 de la décision attaquée).

20

Le dispositif de la décision attaquée est libellé comme suit :

« Article premier

L’aide d’État à hauteur de 4783424,10 [euros] accordée à NCHZ du fait du statut de société stratégique qui lui a été attribué en vertu de la loi [sur les sociétés stratégiques] et qui l’a préservée de l’application standard de la loi sur la faillite, a été mise à exécution de manière illégale par la [République slovaque], en violation de l’article 108, paragraphe 3, du [TFUE], et est incompatible avec le marché intérieur.

[…]

Article 3

1.   La [République slovaque] récupérera auprès de NCHZ l’aide illégale visée à l’article 1er.

2.   Compte tenu de la continuité économique entre NCHZ et [la requérante], l’obligation de remboursement de l’aide est étendue à [la requérante].

3.   Les sommes à récupérer produisent des intérêts depuis la date à laquelle elles ont été mises à la disposition de NCHZ, et jusqu’à leur récupération effective.

4.   Les intérêts sont calculés sur une base composée, conformément au chapitre V du règlement (CE) no 794/2004 […] et au règlement (CE) no 271/2008 modifiant le règlement (CE) no 794/2004.

Article 4

1.   La récupération de l’aide visée à l’article 1er est immédiate et effective.

2.   La [République slovaque] veille à ce que la présente décision soit appliquée dans un délai de quatre mois à compter du jour de sa notification.

Article 5

1.   Dans les deux mois suivant la notification de la présente décision, la [République slovaque] communiquera les informations suivantes :

a)

le montant total (principal et intérêts) à récupérer auprès des bénéficiaires ;

b)

une description détaillée des mesures qu’elle a déjà prises ou qu’elle prévoit de prendre pour se conformer à la présente décision ;

c)

les documents attestant que le bénéficiaire a été sommé de restituer l’aide.

2.   La [République slovaque] informera la Commission de l’état d’avancement des mesures nationales prises en vue d’exécuter la présente décision, jusqu’à la récupération de l’aide mentionnée à l’article 1er. Elle transmettra aussi immédiatement, sur simple demande de la Commission, toute information sur les mesures qu’elle a déjà prises ou qu’elle prévoit de prendre pour se conformer à la présente décision. Elle transmettra également des informations détaillées sur le montant de l’aide et les intérêts sur la somme à récupérer que les bénéficiaires ont déjà remboursés.

Article 6

La [République slovaque] est destinataire de la présente décision. »

III. Procédure

21

Par requête déposée au greffe du Tribunal le 6 mars 2015, la requérante a introduit le présent recours.

22

Par acte déposé au greffe du Tribunal le 14 juillet 2015, AlzChem a demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions de la Commission.

23

Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 6 août 2015, la requérante a demandé que certains éléments contenus dans la requête et ses annexes ainsi que dans la réplique et une annexe de celle-ci fassent l’objet d’un traitement confidentiel à l’égard d’AlzChem, si celle-ci était admise à intervenir. Elle a joint une version non confidentielle desdites écritures à sa demande.

24

Par ordonnance du président de la neuvième chambre du 22 septembre 2015, AlzChem a été admise à intervenir au soutien des conclusions de la Commission. Des versions non confidentielles de la requête, de la réplique et de leurs annexes, préparées par la requérante, ont été communiquées à l’intervenante. Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 8 octobre 2015, l’intervenante a contesté la demande de traitement confidentiel.

25

Le 8 octobre 2015, la présente affaire a été attribuée à un nouveau juge rapporteur siégeant dans la neuvième chambre. Par décision du président du Tribunal du 3 octobre 2016, la présente affaire a été attribuée à un nouveau juge rapporteur. La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, en application de l’article 27, paragraphe 5, du règlement de procédure du Tribunal, le juge rapporteur a été affecté à la sixième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

26

Le 6 février 2017, le Tribunal (sixième chambre) a posé par écrit des questions à la requérante concernant sa demande de traitement confidentiel. Elle a répondu à ces questions dans les délais impartis.

27

Par ordonnance du 13 septembre 2017, Fortischem/Commission (T‑121/15, non publiée, EU:T:2017:648), le président de la sixième chambre du Tribunal a accueilli la demande de confidentialité à l’égard de certaines informations contenues dans la requête ainsi que de certaines données contenues dans plusieurs annexes de la requête et de la réplique et a rejeté la demande de confidentialité pour le surplus. Les dépens ont été réservés. Le 26 octobre 2017, une version non confidentielle, préparée par la requérante, des pièces mentionnées aux points 1 et 2 du dispositif de l’ordonnance du 13 septembre 2017, Fortischem/Commission (T‑121/15, non publiée, EU:T:2017:648), a été communiquée à l’intervenante.

28

Le 5 janvier 2018, l’intervenante a déposé le mémoire en intervention au greffe du Tribunal.

29

Les 5 et 7 février 2018, la Commission et la requérante ont respectivement déposé leurs observations sur le mémoire en intervention au greffe du Tribunal.

30

Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal (sixième chambre) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 du règlement de procédure, a posé aux parties des questions écrites ainsi que demandé la production d’un document. Elles ont répondu à ces questions dans les délais impartis et produit le document demandé.

31

Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 10 avril 2019.

IV. Conclusions des parties

32

La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

annuler les articles 1er et 3 à 5 de la décision attaquée ;

condamner la Commission aux dépens.

33

La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le recours ;

condamner la requérante aux dépens.

34

L’intervenante conclut, en substance, au rejet du recours.

V. En droit

35

Au soutien du recours, la requérante invoque six moyens. Le premier moyen est tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. Le deuxième moyen est tiré de la méconnaissance de l’obligation de procéder à un examen diligent et impartial ainsi que de la violation de l’obligation de coopération pesant sur la Commission. Le troisième moyen est tiré de la violation de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE concernant la conclusion de la Commission relative à l’existence d’une aide d’État consentie à NCHZ. Le quatrième moyen est tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 1, et de l’article 108, paragraphe 2, TFUE ainsi que de l’article 14, paragraphe 1, du règlement (CE) no 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [108 TFUE] (JO 1999, L 83, p. 1), du fait de l’extension de l’obligation de récupération de l’aide d’État alléguée à la requérante. Le cinquième moyen, invoqué à titre subsidiaire, est tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 1, et de l’article 108, paragraphe 2, TFUE, ainsi que de l’article 14, paragraphe 1, du règlement no 659/1999, du fait de l’absence de limitation de l’extension de l’obligation de récupération de l’aide d’État alléguée à la requérante à 60 % du montant de ladite aide. Le sixième moyen est tiré de la violation de l’article 296 TFUE concernant la conclusion de la Commission relative à l’existence d’une continuité économique.

36

Le Tribunal estime qu’il est opportun d’examiner, successivement, le troisième moyen, le premier moyen, pris en ses deux premières branches, le deuxième moyen, la troisième branche du premier moyen, le sixième moyen, le quatrième moyen et, enfin, le cinquième moyen.

A. Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE concernant la conclusion de la Commission relative à l’existence d’une aide d’État consentie à NCHZ

37

Selon la requérante, la Commission doit, conformément à la jurisprudence, exposer de manière suffisante les raisons pour lesquelles des éléments de fait et de droit qu’elle a réunis prouvent l’existence d’une aide d’État. La Commission devrait, dès lors, également expliquer les raisons pour lesquelles les arguments de fait et de droit présentés par l’État concerné n’ont pas suffi à réfuter l’existence d’une telle aide. La requérante prétend que la décision attaquée est entachée d’un défaut de motivation à plusieurs égards. En premier lieu, ladite décision présenterait un tel défaut s’agissant des conclusions de la Commission selon lesquelles la loi sur les sociétés stratégiques a conféré à NCHZ un avantage économique que cette société n’aurait pas reçu dans le cadre normal d’une procédure de faillite. Selon la requérante, bien que les autorités slovaques aient communiqué des arguments de fait circonstanciés montrant que les créanciers auraient choisi la poursuite de l’activité de NCHZ, la Commission ne s’est pas penchée sur le contenu de ces indices, se contentant en lieu et place d’émettre des doutes généraux et arbitraires. En second lieu, la décision attaquée serait entachée d’un défaut de motivation en ce que la loi sur les sociétés stratégiques n’a pas satisfait au critère de l’opérateur en économie de marché.

38

La Commission, soutenue par l’intervenante, conteste le bien-fondé de l’argumentation de la requérante.

39

Ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence constante, la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et au juge de l’Union d’exercer son contrôle [voir arrêt du 13 décembre 2018, AlzChem/Commission, T‑284/15, EU:T:2018:950, point 70 (non publié) et jurisprudence citée].

40

L’obligation de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées par l’acte au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE peuvent avoir à recevoir des explications [arrêt du 13 décembre 2018, AlzChem/Commission, T‑284/15, EU:T:2018:950, point 71 (non publié)].

41

Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée. En particulier, la Commission n’est pas tenue de prendre position sur tous les arguments invoqués devant elle par les intéressés. Il lui suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision [voir arrêt du 13 décembre 2018, AlzChem/Commission, T‑284/15, EU:T:2018:950, point 72 (non publié) et jurisprudence citée].

42

Enfin, le moyen tiré de la violation de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE est un moyen distinct de celui tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. En effet, alors que le premier, qui vise un défaut ou une insuffisance de motivation, relève de la violation des formes substantielles, au sens de l’article 263 TFUE, et constitue un moyen d’ordre public qui doit être relevé d’office par le juge de l’Union, le second, qui porte sur la légalité au fond d’une décision, relève de la violation d’une règle de droit relative à l’application du traité FUE, au sens du même article 263 TFUE, et ne peut être examiné par le juge de l’Union que s’il est invoqué par la partie requérante. L’obligation de motivation est dès lors une question distincte de celle du bien-fondé des motifs de la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêt du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, EU:C:1998:154, point 67).

43

C’est à la lumière des considérations mentionnées aux points 39 à 42 ci-dessus qu’il convient d’examiner si la décision attaquée est entachée d’un défaut ou d’une insuffisance de motivation au sens de l’article 296 TFUE.

44

Dans la décision attaquée, la Commission a constaté que les dettes de NCHZ à l’égard de diverses entités publiques avaient été contractées en raison du caractère déficitaire des activités poursuivies. Elle a estimé que, contrairement à la pratique conforme au régime de droit commun de la faillite, aucune analyse n’avait été effectuée par l’administrateur de faillite en fonction et aucune réunion de créanciers n’avait pu décider de l’avenir de NCHZ. Elle a relevé que l’administrateur de faillite en fonction avait reconnu qu’il était contraint par la loi sur les sociétés stratégiques de continuer à faire fonctionner NCHZ, sans aucune possibilité de réfléchir à d’autres solutions (considérants 79 et 80 de la décision attaquée).

45

À cet égard, la Commission a considéré que la décision d’appliquer la loi sur les sociétés stratégiques à NCHZ ne reposait pas sur des considérations dont ses créanciers auraient tenu compte, mais sur d’autres considérations de politique publique, le texte de la décision du gouvernement slovaque évoquant uniquement la perte d’emplois et de compétitivité dans l’industrie chimique slovaque, et donc l’économie slovaque dans son ensemble. Selon elle, la décision de l’État d’appliquer ladite loi à NCHZ n’était, dès lors, manifestement pas justifiée sur le fondement du critère du créancier en économie de marché (considérant 82 de la décision attaquée).

46

En réponse aux arguments avancés par les autorités slovaques selon lesquels les créanciers auraient probablement décidé de poursuivre les activités de NCHZ même si la loi sur les sociétés stratégiques ne lui avait pas été appliquée, la Commission a précisé, notamment, qu’il n’existait pas d’examen des autres solutions possibles fiable dans l’analyse du premier administrateur du 26 octobre 2009 (ci-après l’« analyse du 26 octobre 2009 »), invoquée par les autorités slovaques, qu’un examen plus approfondi n’avait pas été mené et que la décision de poursuivre l’activité de NCHZ prise au début de la seconde période de la faillite l’avait été alors que la situation économique des créanciers était différente (considérants 82 à 84 de la décision attaquée). Selon la Commission, l’analyse de l’administrateur de mars 2014 (ci-après l’« analyse de mars 2014 »), reposant sur la méthodologie utilisée pour l’analyse de la situation durant ladite seconde période, était très succincte, hypothétique et rédigée ex post (considérant 87 de la décision attaquée). Elle a conclu que les autorités slovaques n’avaient pas prouvé que, si la loi sur les sociétés stratégiques n’avait pas été appliquée à NCHZ, la poursuite de l’activité de cette société aurait été approuvée, au début de la procédure de faillite ou au cours de l’année 2010, sur le fondement d’une analyse approfondie en bonne et due forme et d’une discussion de toutes les parties (considérant 88 de la décision attaquée).

47

Par ailleurs, la Commission a souligné la suppression, du fait de l’application de la loi sur les sociétés stratégiques, de l’incertitude inhérente à la prise de décision dans le cadre du régime de droit commun de la faillite, la poursuite de la totalité des activités de NCHZ ayant été garantie au moins jusqu’à l’expiration de ladite loi à la fin de l’année 2010. Selon la Commission, cela avait constitué un « signal fort » dans un secteur, à savoir celui de l’industrie chimique, dans lequel la sécurité de l’approvisionnement était particulièrement importante pour les clients. Elle a indiqué que NCHZ avait perdu certains clients en 2009 et en 2010, comme l’aurait montré l’analyse économique de l’administrateur élaborée après l’expiration de la loi sur les sociétés stratégiques. Elle a, dès lors, estimé que, si cette loi n’avait pas été appliquée à NCHZ, il aurait existé un risque beaucoup plus important que les ventes chutent en raison de l’incertitude découlant de la procédure de faillite ainsi qu’un risque accru que les créanciers puissent considérer la poursuite des activités de NCHZ comme étant irrationnelle sur le plan économique et recourent à la possibilité de faire cesser l’activité de NCHZ (considérants 85, 86, 88 et 89 de la décision attaquée).

48

La Commission a conclu que l’application de la loi sur les sociétés stratégiques avait procuré à NCHZ un avantage économique en protégeant cette société contre le déroulement normal de la procédure de faillite selon la loi sur la faillite, l’administrateur de faillite en fonction, les créanciers et le tribunal de la faillite ayant été privés de la possibilité de mettre un terme aux activités de NCHZ ou de réduire significativement les effectifs, que ce fût au début de la procédure de faillite ou au cours de l’année 2010, eu égard à l’évolution de la situation économique de cette société. Selon la Commission, la première mesure a également octroyé à NCHZ, ainsi qu’aux tiers, notamment aux clients et aux fournisseurs, la certitude de la poursuite des activités de cette société, alors qu’une telle poursuite ne serait jamais garantie dans les conditions normales d’une faillite, en faisant ainsi bénéficier ladite société d’un traitement privilégié par rapport à ses concurrents en situation similaire (considérants 78, 85, 89 et 90 de la décision attaquée).

49

Il découle de ces considérations de la Commission dans la décision attaquée que, contrairement aux affirmations de la requérante, elle a indiqué les raisons pour lesquelles elle avait estimé que l’application de la loi sur les sociétés stratégiques à NCHZ avait conféré à cette société un avantage économique qu’elle n’aurait pas reçu dans le cadre du régime de droit commun de la faillite. Elle a ainsi décrit son analyse des conséquences de l’application de cette loi, à savoir une poursuite automatique de l’activité de NCHZ et une entrave aux licenciements collectifs, et ce indépendamment de l’évolution de la situation économique de cette société et alors que celle-ci n’était pas en mesure de rembourser ses dettes, notamment envers diverses entités publiques. La Commission a également mentionné son appréciation selon laquelle cette poursuite automatique de l’activité de NCHZ avait conféré à ses clients et à ses fournisseurs une garantie qui n’aurait pas existé dans le cadre normal d’une procédure de faillite.

50

De plus, contrairement aux allégations de la requérante, la Commission a indiqué les raisons pour lesquelles elle estimait que l’application de la loi sur les sociétés stratégiques ne satisfaisait pas au critère de l’opérateur en économie de marché et n’a pas « cantonn[é] son raisonnement à l’observation selon laquelle l’application de la[dite] loi […] reposait sur des considérations de politique publique qu’un créancier privé n’aurait pas prises en considération ». En effet, après avoir formulé cette appréciation, la Commission a, contrairement aux allégations de la requérante, également répondu aux arguments des autorités slovaques concernant les prises de position du premier administrateur et de l’administrateur. À cet égard, elle a exposé les raisons pour lesquelles, d’une part, elle écartait tant l’analyse du 26 octobre 2009 que celle de mars 2014 et, d’autre part, elle estimait ne pas disposer de preuves que le comité compétent se serait prononcé en faveur de la poursuite de l’activité de NCHZ durant la première période de la faillite. Elle a ainsi indiqué estimer que l’analyse de mars 2014, reposant sur la méthodologie utilisée pour l’analyse de ladite période, était très succincte, hypothétique et rédigée ex post, en renvoyant à cet égard à divers points de trois arrêts du juge de l’Union, dans lesquels il a été considéré que, aux fins de l’application du critère de l’investisseur privé, étaient seuls pertinents les éléments disponibles et les évolutions prévisibles au moment où la décision étatique en cause avait été prise. Elle a, en outre, mentionné qu’elle estimait que les autorités slovaques n’avaient pas apporté la preuve que, au début de la procédure de faillite ou au cours de l’année 2010, la poursuite des activités de NCHZ aurait été réellement approuvée sur le fondement d’une analyse approfondie en bonne et due forme et d’une discussion de toutes les parties concernées. Elle a, enfin, fait état de la différence de la situation économique des créanciers lors de la prise de la décision au début de la seconde période.

51

Par ailleurs, l’argumentation de la requérante concernant l’absence d’explications de la Commission quant aux raisons pour lesquelles le comité compétent se serait prononcé contre un maintien de l’activité de NCHZ ne vise pas le caractère suffisant de la motivation de la décision attaquée, mais révèle un désaccord de la requérante quant au bien-fondé du raisonnement suivi par la Commission lors de son analyse ainsi que de ses conclusions, en ce sens que la requérante conteste le fait que la preuve de ce qu’aurait été la décision du comité compétent n’a pas été apportée. Or, la question du respect de l’obligation de motivation et celle du bien-fondé des motifs de la décision attaquée doivent être distinguées, conformément à la jurisprudence citée au point 42 ci-dessus.

52

Partant, il ne saurait être conclu que la décision attaquée est entachée d’un défaut de motivation concernant la conclusion de la Commission relative à l’existence d’une aide d’État consentie à NCHZ et le troisième moyen doit donc être rejeté.

B. Sur les première et deuxième branches du premier moyen, tirées de l’absence, respectivement, d’un transfert de ressources d’État et d’un avantage économique conféré à NCHZ

53

Le premier moyen, tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, s’articule en trois branches. Par la première branche, la requérante conteste que le fait de qualifier NCHZ de « société stratégique » ait donné lieu à un transfert de ressources d’État. Par la deuxième branche, elle fait valoir que cette mesure n’a pas conféré d’avantage économique à NCHZ. Par la troisième branche, elle prétend que, quand bien même la Commission aurait pu conclure à bon droit à l’octroi d’une aide d’État en faveur de NCHZ du fait de la première mesure, elle a commis une erreur manifeste d’appréciation lorsqu’elle a calculé le montant de ladite aide.

54

Le Tribunal estime opportun d’examiner tout d’abord les deux premières branches du premier moyen, qui sont relatives à la qualification de la mesure en cause d’aide d’État, tandis que sa troisième branche, qui porte sur le calcul du montant de cette aide, sera examinée après l’analyse du deuxième moyen.

55

Par la première branche du premier moyen, la requérante fait valoir que l’appréciation de la Commission aux considérants 75 à 77 de la décision attaquée ne prouve pas le transfert de ressources d’État du fait de la qualification de NCHZ de « société stratégique ». En premier lieu, elle soutient que la qualification de NCHZ de société stratégique n’a pas donné lieu à un tel transfert, puisque l’État slovaque n’a eu à supporter aucune charge supplémentaire par rapport à la charge qui aurait dû être supportée si la procédure de faillite de droit commun avait été suivie. Selon la requérante, il découle de la jurisprudence qu’un transfert de ressources d’État requiert plus qu’un risque abstrait de renforcement du passif public généré par la poursuite de l’exploitation d’une société au cours de la procédure de faillite, dans la mesure où l’augmentation du passif public est une conséquence inhérente à l’application de la loi sur la faillite en cause. La requérante renvoie à cet égard à l’arrêt du 1er décembre 1998, Ecotrade (C‑200/97, EU:C:1998:579, points 36, 41 et 43). En deuxième lieu, dans ses observations sur le mémoire en intervention, elle soutient qu’il est impossible de considérer les conséquences naturelles de la poursuite de l’activité pendant la procédure de faillite comme un « renoncement de fait aux créances publiques ». Selon elle, s’il était fait droit à un tel argument, toute poursuite de l’activité accompagnée d’un accroissement de dettes envers les créanciers publics pendant une procédure de faillite pourrait être assimilée à un transfert de ressources d’État. En troisième lieu, dans la réplique, elle indique admettre que le critère dégagé dans l’arrêt du 1er décembre 1998, Ecotrade (C‑200/97, EU:C:1998:579), afin d’établir si des ressources d’État ont été transférées, est assez proche du critère permettant d’établir si un avantage économique a été consenti.

56

Par la deuxième branche du premier moyen, la requérante invoque l’erreur manifeste d’appréciation commise par la Commission concernant l’existence d’un avantage économique conféré à NCHZ du fait de la qualification de cette société de « société stratégique ». En premier lieu, NCHZ n’aurait obtenu aucun avantage qu’elle n’aurait obtenu en application du régime de droit commun de la faillite, dans la mesure où, en tout état de cause, ses créanciers auraient choisi la poursuite de son activité et où l’interdiction temporaire des licenciements collectifs n’aurait favorisé que l’État slovaque, et non NCHZ. En second lieu, l’application de la loi sur les sociétés stratégiques aurait satisfait au critère de l’opérateur en économie de marché, car elle aurait été économiquement avantageuse pour les créanciers publics.

57

La Commission, soutenue par l’intervenante, conteste le bien-fondé de l’argumentation de la requérante.

1.   Rappel de la jurisprudence

58

À titre liminaire, il convient de rappeler que la qualification d’aide requiert que toutes les conditions visées à l’article 107, paragraphe 1, TFUE soient remplies. Ainsi, premièrement, il doit s’agir d’une intervention de l’État ou au moyen de ressources d’État. Deuxièmement, cette intervention doit être susceptible d’affecter les échanges entre États membres. Troisièmement, elle doit accorder un avantage sélectif à son bénéficiaire. Quatrièmement, elle doit fausser ou menacer de fausser la concurrence [voir arrêt du 13 décembre 2018, AlzChem/Commission, T‑284/15, EU:T:2018:950, point 59 (non publié) et jurisprudence citée].

59

Selon une jurisprudence constante, seuls les avantages accordés directement ou indirectement au moyen de ressources d’État ou constituant une charge supplémentaire pour l’État sont à considérer comme des aides au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. En effet, il résulte des termes mêmes de cette disposition et des règles de procédure instaurées à l’article 108 TFUE que les avantages accordés par d’autres moyens que des ressources d’État ne tombent pas dans le champ d’application des dispositions en cause (voir, en ce sens, arrêts du 17 mars 1993, Sloman Neptun, C‑72/91 et C‑73/91, EU:C:1993:97, point 19 ; du 1er décembre 1998, Ecotrade, C‑200/97, EU:C:1998:579, point 35, et du 13 mars 2001, PreussenElektra, C‑379/98, EU:C:2001:160, point 58).

60

Or, il importe de relever que, selon une jurisprudence constante, il n’est pas nécessaire d’établir, dans tous les cas, qu’il y a eu un transfert de ressources d’État pour que l’avantage accordé à une ou à plusieurs entreprises puisse être considéré comme une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE (arrêt du 28 mars 2019, Allemagne/Commission, C‑405/16 P, EU:C:2019:268, point 55 ; voir également, en ce sens, arrêts du 15 mars 1994, Banco Exterior de España, C‑387/92, EU:C:1994:100, point 14, et du 19 mai 1999, Italie/Commission, C‑6/97, EU:C:1999:251, point 16).

61

Ainsi, la notion d’« aide » comprend non seulement des prestations positives telles que des subventions, mais également des interventions qui, sous des formes diverses, allègent les charges qui grèvent normalement le budget d’une entreprise et qui, par là, sans être des subventions au sens strict du mot, sont de même nature et ont des effets identiques (voir arrêt du 21 mars 2013, Commission/Buczek Automotive, C‑405/11 P, non publié, EU:C:2013:186, point 30 et jurisprudence citée ; voir également, en ce sens, arrêt du 19 mars 2013, Bouygues et Bouygues Télécom/Commission e.a. et Commission/France e.a., C‑399/10 P et C‑401/10 P, EU:C:2013:175, point 101 et jurisprudence citée).

62

Par ailleurs, selon la jurisprudence, la notion d’aide d’État, telle qu’elle est définie dans le traité, présente un caractère juridique et doit être interprétée sur la base d’éléments objectifs. Pour cette raison, le juge de l’Union doit, en principe et compte tenu tant des éléments concrets du litige qui lui est soumis que du caractère technique ou complexe des appréciations portées par la Commission, exercer un entier contrôle en ce qui concerne la question de savoir si une mesure entre dans le champ d’application de l’article 107, paragraphe 1, TFUE (arrêt du 22 décembre 2008, British Aggregates/Commission, C‑487/06 P, EU:C:2008:757, point 111).

63

À cet égard, il convient de rappeler que certes, dans le cadre du contrôle que le juge de l’Union exerce sur les appréciations économiques complexes faites par la Commission dans le domaine des aides d’État, il ne lui appartient pas de substituer son appréciation économique à celle de la Commission (arrêts du 24 janvier 2013, Frucona Košice/Commission, C‑73/11 P, EU:C:2013:32, point 75, et du 21 mars 2013, Commission/Buczek Automotive, C‑405/11 P, non publié, EU:C:2013:186, point 49).

64

Toutefois, le juge de l’Union doit notamment vérifier non seulement l’exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence, mais également contrôler si ces éléments constituent l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe et s’ils sont de nature à étayer les conclusions qui en sont tirées (arrêts du 24 janvier 2013, Frucona Košice/Commission, C‑73/11 P, EU:C:2013:32, point 76, et du 21 mars 2013, Commission/Buczek Automotive, C‑405/11 P, non publié, EU:C:2013:186, point 50).

2.   Décision attaquée

65

S’agissant des considérations de la Commission, dans la décision attaquée, concernant l’existence d’un avantage économique conféré à NCHZ du fait de la qualification de cette société de « société stratégique », elles sont exposées aux points 44 à 48 ci-dessus.

66

Concernant l’utilisation de ressources d’État du fait de la première mesure, la Commission a estimé que, « [c]ompte tenu de l’octroi d[u] statut [de société stratégique], l’activité de [NCHZ] a[vait] été maintenue malgré l’existence d’un risque évident (qui s’[étai]t réalisé) que les recettes ne suffisent pas à couvrir les coûts d’exploitation pendant la faillite, incluant les prélèvements de sécurité sociale et autres obligations envers l’État » (considérant 74 de la décision attaquée). Elle a ajouté que « la poursuite des activités et l’accumulation de dettes additionnelles en raison de l’application de la loi [sur les sociétés stratégiques] [avaie]nt compliqué pour les créanciers publics de NCHZ le recouvrement de leurs créances existantes » (considérant 76 de la décision attaquée). Elle a conclu que l’attribution du statut de société stratégique à NCHZ avait conduit à l’octroi de ressources d’État sous la forme d’un manque à gagner s’agissant de créances publiques que NCHZ n’avait pas honorées pendant la première période de la faillite (considérant 77 de la décision attaquée).

3.   Sur la qualification d’aide d’État par la Commission de la première mesure

67

À titre liminaire, il doit être constaté, s’agissant des conditions devant être remplies afin qu’une intervention puisse être qualifiée d’aide d’État, conformément à la jurisprudence citée au point 58 ci-dessus, que la requérante ne conteste ni le caractère sélectif de la première mesure, ni que celle-ci soit susceptible d’affecter les échanges entre États membres.

68

En outre, il y a lieu de relever que, si, par son argumentation au soutien de la présente branche du premier moyen, la requérante ne remet pas en cause le fait que la première mesure soit imputable à l’État, elle indique vouloir contester le fait que ladite mesure a impliqué des ressources d’État au sens d’une charge supplémentaire pour l’État ou des entités publiques et elle vise à démontrer que NCHZ ne se serait pas trouvée dans une situation différente si sa situation avait été régie par les dispositions de la loi sur la faillite. Toutefois, il doit être constaté que, par cette argumentation, la requérante remet en cause essentiellement l’existence d’un avantage économique. Dans la requête, s’agissant de son analyse de la condition relative à l’existence d’un avantage, elle renvoie au demeurant aux « éléments exposés précédemment », à savoir ceux qu’elle a exposés concernant la notion de transfert de ressources d’État, et indique qu’ils font clairement apparaître que NCHZ n’a reçu aucun avantage que cette société n’aurait reçu en application du régime de droit commun de la faillite. Partant, cette argumentation de la requérante doit être rattachée à l’examen de la deuxième branche du premier moyen et il convient d’examiner ensemble les deux premières branches de ce moyen.

69

Afin d’apprécier l’existence d’un avantage économique accordé à NCHZ du fait de la première mesure et la légalité de la décision attaquée sur ce point, il convient de constater que, si la requérante et la Commission, soutenue par l’intervenante, s’accordent sur la pertinence, en l’espèce, de l’arrêt du 1er décembre 1998, Ecotrade (C‑200/97, EU:C:1998:579), elles en tirent des enseignements différents.

70

La requérante estime que, afin d’apprécier si l’application de la loi sur les sociétés stratégiques a conféré un avantage économique à NCHZ, il y a lieu de procéder à un examen en deux étapes. En premier lieu, il conviendrait d’établir si ladite loi a permis à NCHZ de bénéficier d’un avantage économique dont cette société n’aurait pas bénéficié en cas d’application de la loi sur la faillite et d’examiner le « scénario alternatif », ce qui requerrait une analyse hypothétique a posteriori. En cas de réponse négative à cette première question, l’existence d’un avantage économique pourrait être exclue, puisque, de fait, NCHZ n’aurait pas été plus favorisée qu’elle ne l’aurait été en vertu du régime de droit commun de la faillite. En second lieu, en cas de réponse positive à cette première question, l’existence d’un avantage économique pourrait être écartée si, en appliquant la loi sur les sociétés stratégiques à NCHZ, l’État slovaque a agi comme un opérateur en économie de marché, et donc que l’application de ladite loi a été conforme aux intérêts économiques dudit État.

71

En revanche, la Commission estime que la position défendue par la requérante vide de son contenu la jurisprudence relative au critère de l’opérateur en économie de marché.

72

Il doit être relevé que, conformément aux arrêts du 1er décembre 1998, Ecotrade (C‑200/97, EU:C:1998:579, point 45), et du 17 juin 1999, Piaggio (C‑295/97, EU:C:1999:313, point 43), l’application à une entreprise d’un régime dérogatoire aux règles de droit commun en matière de faillite doit être considérée comme donnant lieu à l’octroi d’une aide d’État dans deux situations. Dans la première situation, il est établi, en substance, que cette entreprise a été autorisée à poursuivre son activité économique dans des circonstances où une telle éventualité aurait été exclue dans le cadre de l’application des règles de droit commun en matière de faillite. Dans la seconde situation, il est établi, en substance, que cette entreprise a bénéficié d’un ou de plusieurs avantages, tels qu’une garantie d’État, un taux réduit d’impôt, une exonération de l’obligation de paiement d’amendes et d’autres sanctions pécuniaires ou un renoncement effectif, total ou partiel, aux créances publiques, auxquels n’aurait pas pu prétendre une autre entreprise insolvable dans le cadre de l’application des règles de droit commun en matière de faillite.

73

C’est à la lumière de ces considérations que doit être contrôlée l’appréciation de la première mesure par la Commission dans la décision attaquée afin d’examiner si c’est sans commettre d’erreur qu’elle a conclu à l’octroi d’une aide d’État à NCHZ par celle-ci.

74

À cet égard, il convient d’examiner, en premier lieu, les conditions dans lesquelles la poursuite de l’activité de NCHZ a été autorisée du fait de l’application de la loi sur les sociétés stratégiques et les conséquences attachées à cette application. Il convient d’examiner, en deuxième lieu, l’allégation de la requérante selon laquelle la décision de l’État slovaque d’appliquer à NCHZ la loi sur les sociétés stratégiques satisfaisait au critère de l’opérateur en économie de marché. Il convient d’examiner, en troisième lieu, les allégations de la requérante relatives à l’identité de situation si NCHZ avait été soumise au régime de droit commun de la faillite.

a)   Sur les conditions de l’application de la loi sur les sociétés stratégiques à NCHZ du fait de sa qualification de « société stratégique » et les conséquences attachées à cette application

75

Il est établi que, en l’espèce, du fait de la qualification de NCHZ de « société stratégique », le premier administrateur n’a eu d’autre choix que de poursuivre l’exploitation de NCHZ, laquelle était imposée du fait de l’application de la loi sur les sociétés stratégiques (considérant 80 de la décision attaquée). Partant, pendant la première période de la faillite, durant laquelle NCHZ était soumise à ladite loi, cette société devait poursuivre son activité, quelle qu’ait été sa situation économique et indépendamment de toute considération relative à l’intérêt de ses créanciers, et, ainsi, même si ses dettes augmentaient et étaient supérieures à ses recettes (considérants 78, 80 et 81 de la décision attaquée).

76

Dans ces circonstances, alors que l’activité de NCHZ était déficitaire à la fin de l’année 2009, ce qui est indiqué dans l’analyse du 26 octobre 2009, les créanciers publics préfaillite disposant de créances postfaillite, ont été mis dans la situation de devoir subir pendant une période incompressible une augmentation hautement probable des impayés à leur égard.

77

À cet égard, le fait que, dans le cadre de l’application de la loi sur les sociétés stratégiques, la poursuite automatique de l’activité de NCHZ était couplée à une entrave aux licenciements collectifs engendrait encore davantage le risque d’une augmentation des dettes de NCHZ, en particulier à l’égard des créanciers publics, dont la Sociálna poisťovňa, a.s. (compagnie d’assurance sociale, Slovaquie) et la Všeobecná zdravotná poisťovňa, a.s. (compagnie d’assurance maladie, Slovaquie). En effet, du fait de ladite entrave, les coûts de fonctionnement de NCHZ ne pouvaient pas être limités par le biais d’une réduction du personnel. Or, NCHZ devait pouvoir payer ses fournisseurs dans le cadre de la poursuite automatique de son activité et, eu égard à sa situation financière, NCHZ ne pouvait pas, parallèlement, assumer pleinement les coûts sociaux à l’égard des deux créanciers publics susmentionnés. Il doit être relevé que, en revanche, ladite entrave lui permettait de conserver son personnel afin de poursuivre son activité.

78

Par ailleurs, la première mesure a conféré aux clients la certitude du maintien de l’activité de NCHZ durant toute la première période de la faillite, ainsi que l’a exposé la Commission dans la décision attaquée (considérants 85 et 86 de la décision attaquée).

79

Partant, c’est sans commettre d’erreur que la Commission a relevé les conséquences découlant de l’application de la loi sur les sociétés stratégiques à NCHZ.

b)   Sur l’allégation de la requérante selon laquelle la décision de l’État slovaque de qualifier NCHZ de « société stratégique » satisfaisait au critère de l’opérateur en économie de marché

80

Selon la requérante, l’application de la loi sur les sociétés stratégiques satisfaisait au critère de l’opérateur en économie de marché, car elle aurait été économiquement avantageuse pour les créanciers publics. En premier lieu, le critère de l’opérateur en économie de marché ne s’appliquerait pas seulement aux mesures pouvant être théoriquement prises par des opérateurs privés, mais également à celles qui, relevant de la souveraineté de l’État, ne peuvent être adoptées que par ce dernier, à l’instar des actes législatifs. En outre, les considérations de politique publique n’excluraient pas qu’il soit satisfait au critère de l’opérateur en économie de marché, car l’article 107, paragraphe 1, TFUE ne distinguerait pas les différents objectifs des mesures, ou leurs différentes causes, ne définissant celles-ci qu’en fonction de leurs effets.

81

En second lieu, le critère du créancier privé serait applicable non seulement à l’égard des créances de l’État de droit privé, mais également de ses créances de droit public, telles que celles afférentes au versement des cotisations de sécurité sociale. En l’espèce, il serait satisfait audit critère, car la poursuite de l’activité de NCHZ devrait être considérée comme le scénario de loin le plus favorable sur le plan économique pour les créanciers publics. Pour procéder à cette comparaison, toutes les données pertinentes connues à la date de l’adoption de la première mesure devraient être prises en considération.

82

Premièrement, selon la requérante, tous les créanciers publics préfaillite, chirographaires et privilégiés, avaient un intérêt manifeste à la poursuite de l’activité de NCHZ, puisqu’elle constituait l’unique moyen d’obtenir un règlement au moins partiel de leurs créances préfaillite et qu’ils ne couraient aucun risque de supporter une charge financière plus lourde. Il ressortirait nettement de la décision de l’État slovaque de qualifier NCHZ de « société stratégique » qu’il savait que la situation de ces créanciers serait pire dans l’hypothèse d’une liquidation de la société.

83

Deuxièmement, pendant la procédure formelle d’examen, les autorités slovaques auraient présenté des informations circonstanciées prouvant que, à la date de l’adoption de la première mesure, la poursuite de l’activité de NCHZ constituait également la meilleure option économique lorsque la possible augmentation du passif impayé au cours du maintien de l’exploitation était prise en compte. Par exemple, il aurait été démontré que la situation de la compagnie d’assurance sociale, laquelle constituait le plus important créancier public postfaillite, aurait été manifestement pire dans le cas d’une liquidation immédiate de NCHZ. Or, dans la décision attaquée, la Commission n’aurait même pas évoqué ces arguments. Dans la réplique, la requérante ajoute qu’il serait inutilement restrictif de distinguer entre les coûts qui auraient dû être supportés par la compagnie d’assurance sociale dans l’hypothèse, d’une part, d’un maintien de l’exploitation de NCHZ et, d’autre part, d’une liquidation immédiate de NCHZ.

84

Troisièmement, la requérante fait valoir que la Commission ne conteste ni dans la décision attaquée ni devant le Tribunal l’exactitude des chiffres présentés.

85

Selon la jurisprudence, le critère du créancier privé suppose que soit comparé le comportement d’un créancier public à celui d’un créancier privé se trouvant dans une situation la plus proche possible. Peuvent être requis des éléments faisant apparaître que la décision de l’État est fondée sur les évaluations économiques comparables à celles qu’un créancier privé aurait fait établir (voir, en ce sens, arrêt du 18 mai 2017, Fondul Proprietatea, C‑150/16, EU:C:2017:388, points 25 et 26 et jurisprudence citée).

86

Toutefois, le critère du créancier privé ne saurait être considéré comme étant applicable en l’espèce. En effet, il n’existe aucun élément qui aurait été apporté par l’État slovaque durant la procédure administrative et qui ferait apparaître qu’il a adopté la décision de qualifier NCHZ de « société stratégique » dans le cadre d’une action de nature économique et en sa qualité de créancier, et non en tant que puissance publique (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 5 juin 2012, Commission/EDF, C‑124/10 P, EU:C:2012:318, points 81 et 82).

87

En tout état de cause, selon la jurisprudence, dans l’hypothèse où la Commission aurait dû avoir un doute quant à l’applicabilité dudit critère, il appartient à cette dernière d’effectuer une appréciation globale prenant en compte, outre les éléments fournis par cet État membre, tout autre élément pertinent en l’espèce lui permettant de déterminer si la mesure en cause ressortit à la qualité d’opérateur économique ou à celle de puissance publique dudit État membre. En particulier, peuvent être pertinents à cet égard la nature et l’objet de cette mesure, le contexte dans lequel elle s’inscrit ainsi que l’objectif poursuivi et les règles auxquelles ladite mesure est soumise. En revanche, des évaluations économiques établies après l’adoption de la mesure, le constat rétrospectif de la rentabilité effective de la mesure adoptée par l’État membre concerné ou des justifications ultérieures du choix du procédé effectivement retenu ne sauraient suffire à établir que cet État membre a pris, préalablement ou simultanément à cette adoption, une telle décision en sa qualité d’opérateur économique (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 5 juin 2012, Commission/EDF, C‑124/10 P, EU:C:2012:318, points 85 et 86).

88

Or, il ressort de la loi sur les sociétés stratégiques et de la décision du gouvernement slovaque de conférer à NCHZ le statut de société stratégique que l’État slovaque avait pour seul objectif d’éviter les effets négatifs de la cessation de l’activité de NCHZ sur le fonctionnement et la compétitivité de toute l’industrie chimique en Slovaquie ainsi que l’impact négatif sur l’emploi dans la région concernée de sorte que l’économie slovaque serait mise en péril. En revanche, contrairement aux allégations de la requérante, il ne ressort pas de la décision de l’État slovaque de qualifier NCHZ de « société stratégique » qu’il savait que la situation des créanciers publics préfaillite serait pire dans l’hypothèse de la liquidation de cette société.

89

Comme le soutient la Commission, l’entrave aux licenciements collectifs s’inscrivait dans la logique du principal objectif de la loi sur les sociétés stratégiques, qui était de maintenir les activités de telles sociétés, ce qui aurait sans aucun doute été rendu, à tout le moins, difficile, voire impossible, si, s’agissant de NCHZ, les mesures prises par l’administrateur en fonction avaient pu entraîner une importante compression du personnel.

90

Par ailleurs, en premier lieu, l’argumentation de la requérante supposerait d’estimer que l’État peut être considéré comme un créancier public unique. Cependant, une telle approche a été rejetée dans l’arrêt du 13 décembre 2018, AlzChem/Commission [T‑284/15, EU:T:2018:950, points 184 à 196 (non publiés)].

91

En outre, ainsi que la Commission l’a, en substance, relevé dans la décision attaquée (considérants 81, 83, 87 et 88 de la décision attaquée), il n’existe aucune étude suffisante et contemporaine de l’application de la loi sur les sociétés stratégiques à NCHZ qui aurait examiné la poursuite de l’activité de cette société eu égard aux intérêts des créanciers publics, alors que sont seuls pertinents, aux fins de l’applicabilité et de l’application du critère du créancier privé, les éléments disponibles et les évolutions prévisibles au moment où la décision en cause a été prise (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 5 juin 2012, Commission/EDF, C‑124/10 P, EU:C:2012:318, point 105). La requérante souligne d’ailleurs qu’elle « n’est pas en mesure de vérifier si de telles évaluations approfondies [quant au fait que la situation des créanciers publics préfaillite aurait été pire dans l’hypothèse d’une liquidation de NCHZ] ont été réalisées avant l’adoption de la décision [de qualifier NCHZ de ‘‘société stratégique’’] ». Elle précise également que, du fait de cette qualification, l’administrateur en fonction n’aurait pas pu effectuer d’analyse exhaustive à cette époque, en ce sens, comme elle l’a précisé lors de l’audience, en réponse à une question du Tribunal, qu’il n’y avait pas lieu de réaliser cette analyse, en raison de l’application de la loi sur les sociétés stratégiques.

92

En second lieu, même en prenant en compte seulement la situation de la compagnie d’assurance sociale, comme les autorités slovaques l’ont également invoqué dans leur deuxième réponse à la Commission du 29 novembre 2013, l’argumentation de la requérante ne saurait prospérer. Si elle fait valoir que, en cas de liquidation immédiate, ladite compagnie, qui constituait le plus important créancier public postfaillite, aurait eu une créance de plus de 3 millions d’euros, elle n’indique pas le montant de la créance de ladite compagnie en cas de poursuite de l’activité de NCHZ, lequel aurait dû être estimé au moment où cette société a été qualifiée de « société stratégique », ainsi que l’exige la jurisprudence citée au point 91 ci-dessus.

93

De plus, l’argument de la requérante, avancé dans la réplique, selon lequel l’État slovaque aurait pris en compte le fait qu’il aurait dû verser, par le biais de la compagnie d’assurance sociale, des allocations de chômage en cas de liquidation de NCHZ doit être écarté. À cet égard, la requérante fait valoir qu’auraient dû être versées des allocations de chômage pour les anciens salariés de NCHZ ainsi que pour ceux d’autres sociétés directement affectées par la liquidation et que le montant total de ces versements aurait été largement supérieur au montant de l’aide alléguée. Or, si de telles allocations avaient dû être versées, elles n’auraient pas été versées à NCHZ, mais à des salariés, dont certains travaillant au sein d’autres sociétés que NCHZ. Partant, le fait que l’État slovaque puisse devenir débiteur à l’égard d’anciens salariés, de NCHZ ou d’autres sociétés, ne peut pas être pris en considération lorsqu’il s’agit d’examiner son comportement en tant que créancier de NCHZ. Ainsi que la Commission l’avance, la requérante admet que l’État slovaque a pu être alors avantagé en tant qu’autorité publique responsable des prestations de chômage à l’égard d’anciens salariés, mais non l’État slovaque en tant que créancier de NCHZ, ce qui rend non pertinents les chiffres qu’elle avance, à les supposer exacts. À cet égard, force est, en effet, de constater que le raisonnement de la requérante repose sur des suppositions, tant eu égard au nombre des salariés qui auraient pu être concernés que du chiffrage effectué.

94

Par conséquent, à supposer le critère de l’opérateur en économie de marché applicable en l’espèce, l’allégation de la requérante selon laquelle l’application de la loi sur les sociétés stratégiques à NCHZ satisfaisait audit critère doit être rejetée.

c)   Sur les allégations de la requérante concernant l’identité de situation si NCHZ avait été soumise au régime de droit commun de la faillite

95

La requérante fait valoir, en se fondant sur un certain nombre d’éléments factuels, que l’application de la loi sur la faillite à NCHZ aurait conduit à la même situation que celle engendrée par l’application de la loi sur les sociétés stratégiques à cette société, laquelle n’aurait dès lors bénéficié d’aucun avantage supplémentaire dans le cadre du maintien de son activité imposée par la loi sur les sociétés stratégiques.

1) Sur l’allégation selon laquelle le premier administrateur s’était prononcé en faveur de la poursuite de l’exploitation de NCHZ avant l’adoption de la loi sur les sociétés stratégiques

96

En premier lieu, selon la requérante, le premier administrateur s’était prononcé, le 14 octobre 2009, et ainsi avant l’adoption de la loi sur les sociétés stratégiques, en faveur de la poursuite de l’activité de NCHZ. Afin d’étayer cette affirmation, la requérante renvoie à une déclaration reprise par une agence de presse. Cependant, il doit être constaté qu’il s’agissait alors davantage d’une déclaration d’intention que d’une décision pouvant engager le premier administrateur, celui-ci ayant indiqué qu’il « [ferait] tout [s]on possible pour maintenir l’entreprise en activité ». Par ailleurs, il était mentionné le fait que ledit administrateur devait encore fournir, au ministre slovaque concerné, une analyse économique de la préservation de la poursuite de l’activité de NCHZ, laquelle a été présentée le 26 octobre 2009.

97

En deuxième lieu, la requérante affirme que le premier administrateur avait considéré que les conditions légales pour poursuivre l’activité de NCHZ étaient réunies, comme il s’en était expliqué dans son discours à l’intention des salariés de NCHZ lors d’une réunion tenue le 20 octobre 2009. La requérante ne cite, cependant, qu’une partie dudit discours. Dans celui-ci, le premier administrateur a certes fait référence au fait que l’appréciation initiale l’avait conduit à conclure que la valeur de NCHZ en tant que société en activité était sensiblement plus élevée que si les actifs étaient vendus d’une autre manière. Il a néanmoins également ajouté qu’une autre, et non moins importante, raison de sa décision de poursuivre l’exploitation était la signification économique et sociale de l’entité en faillite pour toute la région concernée, et non seulement pour le « petit nombre » des employés de NCHZ, mais aussi pour leurs familles. Ces deux raisons, à savoir la valeur économique de NCHZ et l’impact social, sont en outre reprises ensuite dans son discours. La seconde raison mentionnée rejoint d’ailleurs celle invoquée dans le cadre de l’adoption de la loi sur les sociétés stratégiques. Partant, la décision du premier administrateur ne saurait être considérée comme ayant été seulement liée à l’analyse de la situation économique de NCHZ.

98

En troisième lieu, la requérante invoque l’analyse du 26 octobre 2009. À titre liminaire, il y a lieu de constater que ce que la requérante qualifie d’analyse est une présentation comportant des graphiques, des listes de considérations sommaires relatives aux résultats économiques pour la période de janvier à novembre 2009, les mesures économiques du premier administrateur pour le quatrième trimestre de 2009, le plan économique pour 2010 ainsi qu’une partie conclusive en trois points.

99

Premièrement, si la requérante soutient que la plupart des mesures mentionnées dans l’analyse du 26 octobre 2009 étaient fondées sur des évolutions du marché ou sur des négociations avec des parties privées, cela ne ressort nullement du document communiqué. De plus, ainsi que la Commission l’avance, il doit être relevé que certaines mesures, comme des allégements fiscaux, supposaient une intervention des autorités publiques.

100

Deuxièmement, dans l’analyse du 26 octobre 2009, le premier administrateur a certes conclu, comme la requérante le soutient, qu’il y avait lieu de maintenir NCHZ en activité afin de la vendre en tant qu’entreprise en activité et de satisfaire ainsi au mieux les créanciers de NCHZ. Toutefois, il a ajouté qu’il « procédera[it] strictement de manière à garantir qu’aucun passif en cours inhérent à l’exploitation de la société ne survî[nt] pendant l’exploitation de [NCHZ] ». Partant, même si le premier administrateur a estimé en octobre 2009 que la décision de poursuivre les activités de NCHZ était alors la meilleure solution, cela n’implique pas que cette décision serait demeurée inchangée eu égard à l’évolution de la situation économique de NCHZ en 2010.

101

Troisièmement, si la requérante fait valoir que l’analyse du 26 octobre 2009 avait été confortée par les chiffres de la production et par les nouvelles commandes passées de septembre à novembre 2009 qui auraient prouvé que NCHZ restait opérationnelle, dans la mesure où ces résultats étaient similaires à ceux obtenus au cours des huit mois précédents de l’année 2009 et qu’il y avait tout lieu de croire que l’activité de la société permettrait d’attirer des investisseurs, il doit être relevé que, d’une part, l’importance à accorder au maintien du niveau des commandes passées est limitée du fait de l’annonce en octobre 2009 concernant l’adoption d’une loi sur les sociétés stratégiques. De surcroît, il ressort de la deuxième réponse des autorités slovaques à la Commission, du 29 novembre 2013, qu’il y avait à cette époque plutôt une tendance à la baisse à la fois des revenus tirés des ventes et des nouvelles commandes. D’autre part, l’argumentation de la requérante repose sur de pures suppositions quant à l’existence de futurs investisseurs.

102

Il s’ensuit que, même s’il devait être considéré que, au-delà d’une simple déclaration d’intention, le premier administrateur s’était prononcé en faveur de la poursuite de l’exploitation de NCHZ avant l’adoption de la loi sur les sociétés stratégiques, ce que la Commission semble disposée à admettre, ce fait ne saurait, en tout état de cause, impliquer qu’il aurait nécessairement maintenu cette opinion durant toute la première période de la faillite, ni que l’administrateur aurait suivi celle-ci.

2) Sur l’allégation selon laquelle la décision initiale du premier administrateur aurait été confirmée par le comité compétent

103

Selon la requérante, rien ne porte à croire que le comité compétent n’aurait pas confirmé la décision initiale du premier administrateur. Elle fait valoir qu’il était d’ores et déjà clair que, dans l’hypothèse d’une liquidation de NCHZ, les créanciers préfaillite n’auraient obtenu aucun remboursement et n’avaient dès lors rien à perdre en votant pour la poursuite de l’activité de cette société et que tant les créanciers privilégiés que le comité des créanciers et le tribunal de la faillite auraient pris position en faveur de la poursuite de l’activité de NCHZ. Au soutien de son argumentation, elle invoque l’analyse de mars 2014, laquelle aurait été effectuée ex post à la demande expresse de la Commission. Selon la requérante, il était évident que les coûts de la dépollution du site s’élèveraient à des millions d’euros et seraient prioritaires par rapport aux créances préfaillite. Elle affirme, en outre, que les indicateurs économiques en 2009 étaient d’ailleurs assurément meilleurs que ceux en 2010 et que, si l’évolution réelle de NCHZ a subi l’influence néfaste de certaines évolutions du marché survenues en 2010, celles-ci ne pouvaient pas être anticipées à la fin de l’année 2009. Par ailleurs, elle fait valoir que, même si le maintien de l’activité de NCHZ n’avait pas été dans l’intérêt des créanciers publics chirographaires postfaillite, ceux-ci n’auraient pas pu s’y opposer.

104

À cet égard, en premier lieu, il doit être relevé que l’argumentation de la requérante repose sur des suppositions et des affirmations, en ce qu’elle s’appuie sur l’analyse du 26 octobre 2009, laquelle ne peut être considérée comme étant suffisante (voir points 98 à 101 ci-dessus), et ne mentionne aucune analyse qui aurait été effectuée au cours de la première période de la faillite, l’absence d’une telle analyse n’étant pas surprenante, puisque, ainsi que la requérante l’a elle-même indiqué (voir point 91 ci-dessus), quels qu’aient été le contenu et les conclusions d’une analyse alors, l’activité de NCHZ devait se poursuivre (considérant 80 de la décision attaquée). En outre, dans leur troisième réponse à la Commission, du 13 janvier 2014, les autorités slovaques avaient indiqué que, même si elles considéraient que les décisions prises ensuite pouvaient servir d’indicateur clair que le comité compétent se serait prononcé en faveur de la poursuite de l’exploitation de NCHZ, ce que ledit comité aurait pu décider finalement en décembre 2009 ne leur était pas connu.

105

En deuxième lieu, le fait que le niveau des prix des principales matières premières et de certains produits pouvait évoluer de manière défavorable, comme cela a été le cas, ce que la requérante indique dans la réplique, est un facteur qui aurait dû être pris en considération par l’administrateur en fonction et le comité compétent. Si la requérante fait valoir que ces évolutions n’étaient pas prévisibles lorsque le premier administrateur a statué sur le maintien de l’activité de NCHZ et pouvaient même ne pas être connues à la fin de l’année 2009, il doit néanmoins être relevé que, dans l’analyse du 26 octobre 2009, l’augmentation du prix de l’énergie et la diminution du prix de produits étaient mentionnées comme des motifs justifiant les résultats négatifs entre juin et juillet 2009 et que, à tout le moins, la question du prix des matières premières stratégiques était indiquée comme un facteur de risques concernant la gestion financière pour le quatrième trimestre de 2009.

106

En troisième lieu, même en considérant qu’il était notoire que les coûts de dépollution en cas de cessation de l’activité de NCHZ auraient été importants, il n’en demeure pas moins que la question était de savoir si l’administrateur en fonction et le comité compétent, dont le súd v Trenčíne (tribunal de Trenčin), auraient effectivement estimé que la poursuite de l’activité de NCHZ était la solution devant être retenue. Or, l’argumentation de la requérante ne repose sur ce point que sur des suppositions.

107

Premièrement, ne sont pas connues les décisions des membres du comité compétent qui auraient dû être transmises, pour décision, conformément à la loi sur la faillite, au súd v Trenčíne (tribunal de Trenčin), à savoir celles des créanciers privilégiés et du comité des créanciers.

108

En effet, n’est pas significatif le fait que, selon la requérante, le Fond národného majetku Slovenskej Republiky (Fonds du patrimoine national de la République slovaque), lequel était un créancier public préfaillite, à la fois chirographaire et privilégié, a indiqué, dans une déclaration annexée à la première réponse des autorités slovaques à la Commission du 2 septembre 2013 qu’il aurait voté en faveur de la poursuite de l’activité de NCHZ. La déclaration de cette entité date de juillet 2013, soit postérieurement à la première période de la faillite.

109

En outre, si la requérante affirme que les créanciers préfaillite ne couraient aucun risque, elle néglige cependant le fait qu’il ressort du dossier que des créanciers privilégiés ont vu leurs créances augmenter pendant la première période de la faillite. Elle indique d’ailleurs les chiffres de l’augmentation des créances de la commune de Nováky (Slovaquie) et de l’Environmentálny fond (Fonds environnemental, Slovaquie) déjà à la fin de l’année 2009, ces chiffres ressortant également du dossier. Partant, il serait inexact de considérer, sans une analyse plus étayée, que la situation de ces créanciers était si claire qu’ils ne pouvaient alors voter que pour la poursuite de l’activité de NCHZ.

110

De plus, la requérante soutient que le comité des créanciers était composé de cinq créanciers privés, tous chirographaires, qui étaient alors tous privés, lesquels avaient voté en faveur de la poursuite de l’activité de NCHZ le 11 janvier 2010. Or, il convient de constater qu’une telle décision, le 11 janvier 2010, ne saurait être significative, car NCHZ était alors déjà soumise aux dispositions de la loi sur les sociétés stratégiques. Partant, non seulement ce vote ne pouvait avoir qu’une valeur symbolique, mais il pouvait en outre être influencé par le fait que ladite loi s’appliquait. De surcroît, il n’existe aucune certitude, voire indication, que ce vote aurait été répété à l’identique lorsque la situation économique de NCHZ a empiré au cours de la première période de la faillite, en 2010.

111

Deuxièmement, dans la mesure où le súd v Trenčíne (tribunal de Trenčin) devait se prononcer après le comité des créanciers et les créanciers privilégiés, il n’existe aucune certitude quant à sa décision, la requérante se contentant de soutenir, en réponse à un argument de la Commission, qu’il aurait ordonné la poursuite de l’activité, comme il l’a fait en 2011.

112

Troisièmement, la requérante soutient que, même si le maintien de l’activité de NCHZ n’avait pas été dans l’intérêt des créanciers publics postfaillite, dont la compagnie d’assurance sociale et la compagnie d’assurance maladie, lesquelles détenaient environ 83 % de l’ensemble du passif impayé des créanciers publics né postérieurement à la faillite, lesdits créanciers n’auraient pas pu s’y opposer. Elle ajoute que, même si l’ensemble de ces créanciers avaient été en droit de donner leur point de vue sur la poursuite de l’activité de NCHZ – quod non –, leur opposition n’aurait pas pu influer sur la décision finale, car le niveau total du passif postérieur à la faillite s’élevait à 8,5 millions d’euros à la fin de l’année 2009 et que les créances des créanciers publics représentaient moins de 9 % de ce montant.

113

Certes, il ne ressort pas des dispositions de la loi sur la faillite, et notamment de l’article 83, paragraphe 4, de ladite loi, que, dans les circonstances de l’espèce, la compagnie d’assurance sociale pouvait intervenir dans la prise de la décision de poursuivre l’exploitation de NCHZ devant le súd v Trenčíne (tribunal de Trenčín) [voir, en ce sens, arrêt du 13 décembre 2018, AlzChem/Commission, T‑284/15, EU:T:2018:950, point 151 (non publié)].

114

Toutefois, à supposer l’ensemble des chiffres avancés par la requérante avérés, il doit être relevé que l’administrateur en fonction avait la responsabilité de payer les créances postfaillite. Or, le fait de laisser les dettes de NCHZ augmenter pendant la première période de la faillite était contraire à cette obligation. Il doit être souligné, à l’instar de la Commission, que, s’il est vrai qu’une entité en faillite peut effectivement être exploitée même lorsqu’elle génère des pertes, le premier administrateur avait indiqué expressément qu’il procéderait de manière à garantir qu’une telle situation ne se produise pas (voir point 100 ci-dessus).

115

De surcroît, l’affirmation de la requérante repose sur la présomption selon laquelle le comité compétent n’aurait pas examiné, ou aurait considéré comme étant non pertinentes, les perspectives envisageables, à la fin de l’année 2009, d’augmentation des créances publiques au cours de l’année 2010 en cas de décision de la poursuite de l’activité de NCHZ. Lors de l’audience, en réponse à une question du Tribunal, la requérante a admis que, dans l’hypothèse d’un montant de dettes postfaillite très important lors de la poursuite de l’exploitation, les créanciers préfaillite auraient été les premiers à approcher l’administrateur afin de demander un arrêt de l’activité, en vue de préserver toute chance éventuelle de récupérer le montant de leurs créances.

116

En quatrième lieu, ne saurait être accueillie l’argumentation de la requérante par laquelle elle conteste le fait que, bien que la Commission n’ait pas mis en doute l’exactitude de l’analyse de mars 2014, qu’elle avait elle-même demandé aux autorités slovaques de fournir, elle ne l’a pas admise en tant qu’élément de preuve, en prétendant qu’elle était très succincte, hypothétique et ex post (considérant 87 de la décision attaquée).

117

D’une part, contrairement aux affirmations de la requérante, l’analyse de mars 2014 est à tout le moins incomplète. En effet, il était important de connaître les coûts potentiels de la poursuite de l’activité de NCHZ pour les créanciers préfaillite qui pouvaient avoir également des créances postfaillite (voir point 109 ci-dessus). Or, l’analyse ne donne aucune indication à cet égard.

118

D’autre part, l’argumentation de la requérante remettant en cause l’appréciation de la Commission relative au caractère hypothétique de l’analyse de mars 2014 et à l’absence de pertinence d’une analyse ex post ne saurait être accueillie.

119

À cet égard, la requérante conteste le fait que la Commission écarte dans la décision attaquée les éléments de preuve en excipant de leur nature ex post, sans fournir une explication significative, si ce n’est une référence à une jurisprudence dans une note en bas de page isolée, alors que cette jurisprudence n’étayerait pas l’argument de la Commission relatif au défaut de pertinence de l’analyse ex post. Selon la requérante, la fiabilité de l’analyse de mars 2014 était particulièrement élevée, puisque les principaux facteurs de coûts dus à la liquidation de NCHZ étaient liés à la nature de l’activité de cette société ainsi qu’aux engagements de l’industrie chimique et n’auraient pas pu être affectés par une quelconque évolution de la situation économique de NCHZ au cours de la faillite. La Commission n’aurait pas contesté les faits et les chiffres en question. Par ailleurs, dans ce type de situation, l’analyse ex post serait permise (voir, en ce sens, arrêt du 29 mars 2007, Scott/Commission, T‑366/00, EU:T:2007:99, points 136 à 138). En outre, du fait de l’application de la loi sur les sociétés stratégiques, l’administrateur en fonction n’aurait pas pu effectuer d’analyse exhaustive à cette époque, ce qui distinguerait la situation de NCHZ de celles ayant donné lieu à la jurisprudence mentionnée par la Commission en note en bas de page no 13 de la décision attaquée. Selon la requérante, il importe de distinguer précisément le critère dégagé par l’arrêt du 1er décembre 1998, Ecotrade (C‑200/97, EU:C:1998:579), et celui de l’opérateur en économie de marché. Alors que, dans le cadre du critère de l’opérateur en économie de marché, il serait permis de douter de la pertinence d’une analyse ex post dans certaines circonstances, l’analyse exigée par cet arrêt, laquelle consisterait à déterminer si NCHZ aurait poursuivi son activité y compris dans l’hypothèse où le régime de droit commun de la faillite lui aurait été appliqué, nécessiterait, par définition, une analyse hypothétique ex post. En vertu du critère dégagé dans cet arrêt, il conviendrait d’apprécier ce qui, selon toute probabilité, se serait produit si la loi sur les sociétés stratégiques n’avait pas existé.

120

Il importe de relever que, contrairement aux allégations de la requérante, le point 36 de l’arrêt du 1er décembre 1998, Ecotrade (C‑200/97, EU:C:1998:579), n’établit pas une exigence quant à une « analyse contrefactuelle hypothétique », mais vise à répondre à l’argument de la Commission, avancé dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, selon lequel la diminution des bénéfices du fait de la mesure litigieuse pouvait entraîner une perte de ressources fiscales pour l’État, ce qui impliquait un transfert de ressources d’État du fait de ladite mesure. En outre, aucun autre point de cet arrêt n’établit l’exigence d’une « analyse contrefactuelle hypothétique ».

121

S’agissant de l’appréciation de la Commission relative au caractère ex post de l’analyse de mars 2014 et à son absence de pertinence, il est indéniable que, sans l’application de la loi sur les sociétés stratégiques à NCHZ, d’une part, l’entrave aux licenciements collectifs n’aurait pas été imposée et, d’autre part, la poursuite de l’activité de cette société aurait dû être décidée par le comité compétent et n’aurait pas été automatique. À cet égard, contrairement aux allégations de la requérante, le fait de comparer la situation qui s’est produite du fait de l’application de la loi sur les sociétés stratégiques à NCHZ et la situation qui se serait produite si NCHZ avait été soumise au régime de droit commun de la faillite ne peut que reposer sur une analyse fondée sur la connaissance de la situation et les données existant au moment où il fallait que la décision relative à la poursuite éventuelle de l’activité de NCHZ fût prise et alors que celle-ci a été qualifiée de « société stratégique » (voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général Fennelly dans l’affaire Ecotrade, C‑200/97, EU:C:1998:378, point 31).

122

Or, la requérante ne soutient pas que l’analyse de mars 2014 a été réalisée à partir de données contemporaines à la qualification de NCHZ de « société stratégique ». Il ressort d’ailleurs de ladite analyse, produite par la requérante, que l’administrateur n’a pas rédigé celle-ci en se fondant sur des données disponibles en 2009, mais qu’il a utilisé des données de décembre 2010, afin d’établir si ces données pouvaient être valables en décembre 2009, sans les réexaminer autrement que pour considérer que certaines d’entre elles étaient indifférentes au facteur temps. Il a d’ailleurs souligné l’existence de difficultés liées à la collecte de données contemporaines à décembre 2009.

123

Partant, il ne saurait être considéré comme certain que l’analyse de mars 2014 correspond à l’analyse de la situation de NCHZ qui aurait pu être effectuée si cette société n’avait pas été qualifiée de « société stratégique ». Ainsi, l’appréciation de la Commission dans la décision attaquée selon laquelle l’analyse de mars 2014 était dénuée de pertinence, en ce qu’elle était hypothétique et ex post, doit être considérée comme n’étant pas erronée.

124

En cinquième lieu, selon la requérante, aucun élément de preuve ne permet de démontrer qu’une liquidation immédiate de NCHZ aurait présenté un intérêt. Au soutien de cet argument, elle fait valoir que, dans la décision attaquée, la Commission n’a pas examiné le contenu des éléments de preuve soumis au cours de la procédure formelle d’examen, s’est contentée de faire montre, globalement et arbitrairement, de scepticisme envers ceux-ci (considérants 83, 84 et 87 de la décision attaquée), sans apporter la moindre preuve au soutien de son opinion selon laquelle le comité compétent n’aurait pas accepté que l’activité de NCHZ se poursuivît. La Commission n’aurait pas remis en cause les chiffres et données soumis par les autorités slovaques, admettant ainsi manifestement qu’ils étaient exacts.

125

À cet égard, contrairement aux affirmations de la requérante, il doit être considéré qu’il appartenait à l’État membre concerné, en l’occurrence la République slovaque, et non à la Commission, de démontrer que la situation aurait été la même si le régime de droit commun de la faillite, et non la loi sur les sociétés stratégiques, avait été appliqué à NCHZ. Or, dans la décision attaquée, la Commission a exposé les raisons pour lesquelles elle n’avait pas retenu les données communiquées à cette fin (voir points 98 à 101 et 116 à 123 ci-dessus) et force est de constater que, contrairement à l’affirmation de la requérante, elle n’a pas admis que les chiffres et les données soumis par le gouvernement slovaque étaient exacts. Par conséquent, l’allégation de la requérante selon laquelle aucun élément de preuve ne démontre qu’une liquidation immédiate aurait présenté un intérêt doit être écartée.

126

En outre, eu égard à la jurisprudence citée au point 91 ci-dessus, l’absence d’une étude suffisante et contemporaine de l’application de la loi sur les sociétés stratégiques à NCHZ ayant examiné la poursuite de l’activité de cette société eu égard aux intérêts des créanciers publics justifie le fait qu’il n’existait pas, contrairement aux allégations de la requérante, de nécessité pour la Commission de répondre, dans la décision attaquée, aux arguments de l’État slovaque concernant les coûts qu’aurait entraînés la liquidation de NCHZ pour la compagnie d’assurance sociale et qui étaient fondés sur l’analyse de mars 2014.

127

Partant, contrairement aux affirmations de la requérante, il ne saurait être conclu que rien ne porte à croire que le comité compétent n’aurait pas confirmé la décision initiale du premier administrateur.

128

De surcroît, doit être rejetée l’argumentation de la requérante, avancée en réponse à un argument de la Commission, et selon laquelle la décision de poursuivre l’activité de NCHZ aurait de toute manière été prise et n’est pas en contradiction avec la décision du gouvernement slovaque d’appliquer à NCHZ la loi sur les sociétés stratégiques. Selon elle, cette dernière décision doit être appréhendée en ayant à l’esprit le fait que la crise économique et financière était alors à son paroxysme et en considérant que, sous l’emprise de la peur et peut-être dans la perspective des élections de 2010 qui se profilaient, ledit gouvernement a agi de façon proactive, sans disposer d’une information concrète sur la situation réelle de NCHZ et sans que le premier administrateur ait sollicité une quelconque intervention de l’État slovaque.

129

Cette argumentation de la requérante n’est pas convaincante, car elle repose sur la prémisse que l’État slovaque a adopté une loi et a décidé de son application à une seule société, sans disposer d’informations concrètes sur la situation de celle-ci. Or, il doit être rappelé que le premier administrateur devait fournir une information aux autorités slovaques, ce qu’il a fait avec l’analyse du 26 octobre 2009 (voir point 96 ci-dessus). Si le sens de la décision que prendrait le comité compétent était alors aussi certain que la requérante le soutient, il n’y avait aucune raison pour les autorités slovaques de douter du fait que NCHZ serait maintenue en activité. En revanche, l’existence d’une crainte en perspective des élections, invoquée par la requérante, tend à démontrer qu’une autre décision, à savoir la liquidation de NCHZ, était susceptible d’être prise par le comité compétent, eu égard à la situation économique de NCHZ et aux perspectives d’évolution de celle-ci.

130

Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, l’allégation de la requérante selon laquelle, si NCHZ avait été soumise au régime de droit commun de la faillite, la décision de l’administrateur en fonction aurait été confirmée par le comité compétent, lequel aurait alors décidé la poursuite des activités de NCHZ, doit être rejetée.

3) Sur l’allégation selon laquelle une décision du comité compétent aurait donné la même sécurité aux clients et aux fournisseurs que la loi sur les sociétés stratégiques

131

En premier lieu, selon la requérante, une décision du comité compétent aurait donné la même sécurité aux clients et aux fournisseurs que la loi sur les sociétés stratégiques, contrairement aux affirmations de la Commission (considérant 88 de la décision attaquée). Elle prétend que, quand bien même ces affirmations seraient exactes – quod non –, cette sécurité n’aurait eu d’incidence sur le degré de probabilité et le montant du règlement (partiel) des dettes de NCHZ que dans l’hypothèse d’une poursuite de l’exploitation de la société, et non dans l’hypothèse d’une liquidation immédiate de celle-ci. La requérante conteste, en outre, l’appréciation de la Commission selon laquelle l’existence d’une meilleure garantie, donnée aux clients et aux fournisseurs par l’application de la loi sur les sociétés stratégiques, que NCHZ poursuivrait au moins son activité jusqu’à l’expiration de ladite loi est démontrée par le fait que, en dépit de l’application de ladite loi, NCHZ a perdu des clients en 2009 et en 2010 (considérants 85 et 86 de la décision attaquée).

132

Dans la décision attaquée, la Commission a estimé que la première mesure avait octroyé à NCHZ ainsi qu’aux tiers, notamment à ses clients et à ses fournisseurs, la certitude de la poursuite de l’activité de cette société, alors qu’une poursuite de l’exploitation d’une société en faillite ne serait jamais garantie dans les conditions normales d’une faillite, et avait ainsi fait bénéficier NCHZ d’un traitement privilégié par rapport à ses concurrents en situation similaire (considérants 78, 85, 89 et 90 de la décision attaquée). Elle a relevé que, en dépit du bouclier instauré par l’application de la loi sur les sociétés stratégiques, NCHZ avait perdu certains clients en 2009 et en 2010, comme l’avait démontré l’analyse économique de l’administrateur élaborée après l’expiration de ladite loi (considérant 86 de la décision attaquée). Elle a considéré que, « si la[dite] loi n’avait pas été appliquée à NCHZ, cette dernière aurait été confrontée à d’autres conséquences négatives (par exemple au départ de clients vers des fournisseurs plus sûrs), ce qui aurait considérablement accru le risque que, à ce stade, les créanciers recourent à la possibilité de faire cesser les activités de [la société] » (considérant 88 de la décision attaquée).

133

Il ressort ainsi clairement de la décision attaquée que la Commission n’a pas seulement pris en considération la situation au moment où NCHZ a été soumise à l’application de la loi sur les sociétés stratégiques, mais a entendu indiquer que la décision d’arrêter l’exploitation de NCHZ aurait pu être prise au cours de l’année 2010, alors que ladite loi a produit ses effets pendant toute la première période de la faillite, à savoir un peu plus d’un an, en figeant la situation durant toute cette période. La requérante souligne elle-même que, lorsque l’échec de la stratégie de l’administrateur de faillite est avéré, le comité compétent doit être convoqué, conformément à l’article 88, paragraphe 2, de la loi sur la faillite.

134

L’argumentation de la requérante ne prend pas en compte le fait que des créanciers préfaillite, notamment publics, pouvaient voir leurs créances postfaillite croître lors de la poursuite de l’activité de NCHZ durant la première période de la faillite et que, dès lors, si l’exploitation de NCHZ était poursuivie, leur intérêt était que NCHZ pût dégager un bénéfice afin que leurs créances postfaillite soient payées, sinon c’était une perte additionnelle, s’ajoutant à celle de la créance préfaillite. Comme la Commission l’a indiqué (considérant 86 de la décision attaquée), dans une situation dans laquelle des clients ou des fournisseurs partaient, ces créanciers auraient pu revoir leur position au cours de l’année 2010 si NCHZ avait été placée sous le régime de droit commun de la faillite. En outre, même les créanciers uniquement préfaillite auraient pu être amenés à préconiser l’arrêt de l’activité de NCHZ (voir point 115 ci-dessus).

135

Or, si, comme la requérante l’avance, l’application de la loi sur les sociétés stratégiques ne garantissait pas la réalisation effective des livraisons, elle garantissait que le personnel était maintenu, du fait de l’entrave aux licenciements collectifs, et assurait notamment aux clients et aux fournisseurs que l’activité de NCHZ serait poursuivie au moins jusqu’à l’expiration de ladite loi, quels que soient les impayés des créances notamment publiques.

136

La requérante n’apporte aucun élément afin de démontrer la manière dont une décision du comité compétent aurait donné la même certitude aux tiers, et ce en imposant la poursuite de l’activité de NCHZ pour une durée équivalente à la durée d’application de la loi sur les sociétés stratégiques. Il n’est en particulier pas allégué que, conformément aux dispositions de la loi sur la faillite, il aurait été possible pour le comité compétent, ou même envisagé par celui-ci, de fixer une telle durée certaine de poursuite de l’activité de NCHZ. La requérante ne fait en effet qu’affirmer que, eu égard à la durée de la poursuite de l’activité de NCHZ durant la seconde période de la faillite, il est possible de supposer que la durée d’une décision du comité compétent de poursuivre l’activité de NCHZ durant le dernier trimestre de l’année 2009 aurait pu être équivalente.

137

En outre, s’agissant de la perte de clients en 2009 et en 2010, mentionnée par la Commission au considérant 86 de la décision attaquée, la requérante se contente d’invoquer la stabilité à la fin de l’année 2009. Or, il ressort du dossier qu’il y avait à cette époque plutôt une tendance à la baisse à la fois des revenus tirés des ventes et des nouvelles commandes (voir point 101 ci-dessus). Partant, il n’était pas certain que la prétendue stabilité invoquée par la requérante pouvait perdurer durant la première période de la faillite en cas d’application du régime de droit commun de la faillite.

138

En second lieu, en réponse à un argument de la Commission selon lequel la situation de NCHZ durant la période entre la déclaration de faillite et l’adoption de la loi sur les sociétés stratégiques, suivie de son application à NCHZ, était quelque peu faussée par les informations du domaine public qui indiquaient clairement qu’une solution législative était en cours d’élaboration, la requérante soutient que, si la Commission fait référence à plusieurs déclarations, celles-ci ont été toutes prononcées le même jour, le 26 octobre 2009, lors de la visite du site de NCHZ par le ministre de l’Économie slovaque. Selon la requérante, les déclarations publiques ayant été faites seulement dix jours avant l’adoption de la loi sur les sociétés stratégiques, leur effet a été limité à la période ayant précédé cette adoption, alors que les deux premiers mois après que NCHZ avait déposé le bilan avaient été déterminants pour assurer le succès de la poursuite de son exploitation pendant la procédure de faillite, car la direction de NCHZ et le premier administrateur avaient dû entreprendre de nombreuses négociations avec les principaux clients et fournisseurs. Les déclarations susmentionnées seraient plutôt une preuve solide de la robustesse financière de NCHZ pendant la procédure de faillite.

139

À cet égard, tout d’abord, il convient de considérer que, ainsi que la Commission le fait valoir, à supposer que NCHZ ait mis en œuvre une bonne stratégie de communication, celle-ci ne pouvait cependant pas garantir le maintien des relations commerciales de la société. Ensuite, il a déjà été relevé que le premier administrateur avait indiqué son intention de faire tout son possible pour maintenir NCHZ en activité. Enfin, ainsi que le souligne la Commission, il ressort du premier article cité par la Commission, publié le 26 octobre 2009, que le porte-parole du ministère de l’Économie slovaque avait déclaré à la presse qu’une loi sur les sociétés stratégiques était en voie d’élaboration et que ce seul fait avait déjà rassuré les créanciers de NCHZ. Dans le même article, il est indiqué que le ministre de l’Économie slovaque avait souligné, dans ses déclarations publiques, que ladite loi devrait représenter pour les fournisseurs une certaine garantie de ne pas perdre leurs créances. De plus, il ressort du second article cité par la Commission, publié le 26 octobre 2009, que, le même jour, le ministre de l’Économie slovaque avait présenté, lors de sa visite à NCHZ, une loi sur les sociétés stratégiques, qui était en cours d’élaboration et qui devrait aider cette société et créer des garanties pour ses créanciers.

140

Partant, l’allégation de la requérante selon laquelle une décision du comité compétent aurait donné la même sécurité aux clients et aux fournisseurs que la loi sur les sociétés stratégiques doit être rejetée.

4) Sur l’allégation selon laquelle NCHZ n’a bénéficié d’aucun avantage supplémentaire dans le cadre du maintien de son activité imposée par la loi sur les sociétés stratégiques

141

Dans la réplique, en réponse à un argument de la Commission selon lequel la poursuite de l’activité de NCHZ à perte a vraisemblablement eu une incidence sur la priorité des dettes des créanciers, en se traduisant peut-être par le renoncement de fait de l’État à ses créances, la requérante fait valoir que, durant la première période de la faillite, l’administrateur en fonction était tenu d’appliquer également les règles habituelles de la faillite et, lorsqu’une société en faillite est exploitée dans la perspective de sa vente suivant le principe d’une continuation de l’activité, il s’agit de favoriser les créanciers titulaires de créances préfaillite, indépendamment de leur statut public ou privé. NCHZ n’aurait dès lors bénéficié d’aucun avantage supplémentaire dans le cadre du maintien de l’exploitation prévue par la loi sur les sociétés stratégiques.

142

Cette argumentation ne saurait prospérer.

143

En premier lieu, la requérante ne saurait valablement soutenir que les dettes impayées n’étaient pas la résultante de la mise en œuvre de la loi sur les sociétés stratégiques, mais plutôt, pour l’essentiel, celle d’une exploitation normale en cours de faillite. En effet, une telle argumentation implique qu’une entreprise en faillite est nécessairement exploitée à perte. Or, selon l’article 88, paragraphe 2, de la loi sur la faillite, dans un tel cas, que ce soit au début de la première période de la faillite ou au cours de celle-ci, l’administrateur en fonction aurait été tenu de se tourner vers le comité compétent afin d’obtenir des instructions quant à la poursuite de l’activité de NCHZ, la loi sur la faillite tenant d’abord compte de l’intérêt des créanciers. Les créanciers préfaillite auraient pu également alerter ledit administrateur à cet égard (voir point 115 ci-dessus). Partant, dans le cadre de l’application du régime de droit commun de la faillite, il existait des possibilités de limiter une exploitation à perte, ce que l’application de la loi sur les sociétés stratégiques excluait.

144

En second lieu, du fait de la poursuite de l’activité de NCHZ imposée par la loi sur les sociétés stratégiques, cette société devait honorer ses dettes liées à la production, ce qui, eu égard à sa situation financière, ne pouvait qu’avoir un impact négatif sur, notamment, le règlement de ses dettes envers les deux entités publiques qu’étaient les compagnies d’assurance sociale et d’assurance maladie.

145

En outre, dans ce contexte, l’entrave aux licenciements collectifs, imposée également par la loi sur les sociétés stratégiques, a aggravé la situation. En effet, ainsi que la requérante l’indique, si NCHZ avait été soumise au régime de droit commun de la faillite, des licenciements collectifs auraient été décidés au début de la faillite, et non, comme tel a été le cas, en 2011. La requérante fait certes valoir que les coûts de NCHZ en auraient été significativement réduits et que la réalité a été autre, car, NCHZ n’ayant pas pu disposer de cette possibilité, cette société a dû supporter des charges supplémentaires quasi superflues, une part significative de ces charges correspondant à des versements en faveur des compagnies d’assurance sociale et d’assurance maladie. Elle omet toutefois d’observer que NCHZ ne pouvait pas assumer l’ensemble de ces dettes et que les dettes à l’égard de ces deux entités publiques se sont accrues, alors que, parallèlement, NCHZ conservait le bénéfice de disposer de ses salariés aux fins de la poursuite de son activité. Partant, l’argument de la requérante selon lequel l’interdiction des licenciements économiques ne constituait pas un avantage économique pour NCHZ ne saurait prospérer et, contrairement aux allégations de la requérante, ladite entrave a entraîné une charge supplémentaire pour des créanciers publics, par rapport à ce qui aurait découlé de l’application du régime de droit commun de la faillite.

146

Par ailleurs, il a déjà été répondu à l’argument de la requérante selon lequel la loi sur les sociétés stratégiques n’aurait conféré un avantage économique qu’à l’État slovaque, car, si NCHZ avait licencié ces salariés auparavant, ledit État aurait dû supporter l’essentiel de ces charges sous la forme d’allocations de chômage et d’autres transferts sociaux (voir point 93 ci-dessus).

147

Par conséquent, l’allégation selon laquelle NCHZ n’a bénéficié d’aucun avantage supplémentaire dans le cadre du maintien de l’activité de NCHZ prévue par la loi sur les sociétés stratégiques ne saurait prospérer.

148

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, l’argumentation de la requérante selon laquelle l’application du régime de droit commun de la faillite à NCHZ aurait conduit à la même situation que celle engendrée par l’application de la loi sur les sociétés stratégiques à cette société doit être écartée.

d)   Conclusion

149

Il doit être constaté que, du fait de la qualification de NCHZ de « société stratégique » par les autorités slovaques, ont été imposés, d’une part, la poursuite de son activité, indépendamment de toute prise en considération de sa situation économique et de sa capacité d’honorer ses dettes, notamment publiques, ainsi que, d’autre part, le maintien de son personnel, du fait de l’entrave aux licenciements collectifs, lui permettant ainsi de poursuivre son activité avec la certitude donnée à ses clients et à ses fournisseurs que son activité serait poursuivie jusqu’à la fin de l’année 2010. Parallèlement, l’application de la loi sur les sociétés stratégiques à NCHZ a fait peser sur certains de ses créanciers, notamment publics, le risque, inévitable eu égard à sa situation financière au moment de sa qualification de « société stratégique », d’une augmentation du montant de leurs créances pendant la première période de la faillite. Ce risque s’est au demeurant réalisé durant la première période de la faillite, tant pour des créanciers publics disposant de créances préfaillite et postfaillite que pour ceux ayant des créances seulement postfaillite.

150

Or, il ne saurait être considéré que, dans des circonstances qui correspondent aux conditions normales du marché, NCHZ pouvait obtenir le même avantage que celui qui a été mis à sa disposition, et ce aux moyens de ressources d’État au sens de la jurisprudence citée aux points 59 à 61 ci-dessus. D’une part, le critère de l’opérateur en économie de marché n’était pas applicable en l’espèce et, en tout état de cause, il n’a pas été établi que la première mesure satisfaisait audit critère. D’autre part, il ne peut être conclu que la situation aurait été identique si NCHZ avait été soumise au régime de droit commun de la faillite et qu’aucune charge supplémentaire n’a été imposée aux créanciers publics (voir points 94 et 148 ci-dessus). Sur ce dernier point, l’argumentation de la requérante relative à l’arrêt du 1er décembre 1998, Ecotrade (C‑200/97, EU:C:1998:579, point 36), ne permet pas de remettre en cause cette appréciation. Au point 36 dudit arrêt, la Cour a jugé, en substance, que le fait que la mesure en cause dans cette affaire pût entraîner une diminution des bénéfices des créanciers privés et, partant, une éventuelle perte de recettes fiscales, ne permettait pas de conclure à la qualification de ladite mesure d’aide d’État. En effet, le lien était trop indirect entre ladite mesure et l’éventuelle perte de ressources fiscales (voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général Fennelly dans l’affaire Ecotrade, C‑200/97, EU:C:1998:378, point 24). Or, eu égard à la première mesure, les considérations de la Commission dans la décision attaquée ne sont aucunement fondées sur des considérations analogues ou un tel lien indirect.

151

Ainsi, la première mesure, combinant l’obligation de poursuivre l’activité de NCHZ et l’entrave aux licenciements collectifs, s’inscrit dans le cadre tant de la première situation que de la seconde situation envisagées dans les arrêts du 1er décembre 1998, Ecotrade (C‑200/97, EU:C:1998:579, point 45), et du 17 juin 1999, Piaggio (C‑295/97, EU:C:1999:313, point 43) (voir point 72 ci-dessus).

152

Par conséquent, la Commission n’a pas commis d’erreur en concluant, du fait de la qualification de cette société de « société stratégique », à l’existence d’un avantage économique conféré à NCHZ et impliquant des ressources d’État.

153

Eu égard à tout ce qui précède, les première et seconde branches du premier moyen doivent être rejetées.

C. Sur le deuxième moyen, tiré de la méconnaissance de l’obligation de procéder à un examen diligent et impartial ainsi que de la violation de l’obligation de coopération pesant sur la Commission

154

Selon la requérante, la Commission a manqué à l’obligation de procéder à un examen diligent et impartial de la mesure constituant l’aide d’État alléguée, car, en substance, elle aurait dû demander davantage d’informations avant d’adopter la décision attaquée.

155

La Commission, soutenue par l’intervenante, conteste le bien-fondé de l’argumentation de la requérante.

156

En premier lieu, la requérante fait valoir que, si la Commission estimait qu’une analyse ex post plus circonstanciée était nécessaire, il lui incombait de la demander, ce qu’elle n’aurait pourtant pas fait. En outre, l’analyse de mars 2014 aurait été à tort ignorée au seul motif qu’elle aurait été rédigée ex post, alors que la Commission n’aurait pas contesté l’exactitude et la fiabilité des renseignements qu’elle contenait, lesquels n’étaient pas sensibles au facteur temps.

157

Selon la jurisprudence relative aux principes en matière d’administration de la preuve dans le secteur des aides d’État, la Commission est tenue de conduire la procédure d’examen des mesures incriminées de manière diligente et impartiale, afin qu’elle dispose, lors de l’adoption d’une décision finale établissant l’existence et, le cas échéant, l’incompatibilité ou l’illégalité de l’aide, des éléments les plus complets et fiables possibles pour ce faire (arrêts du 2 septembre 2010, Commission/Scott, C‑290/07 P, EU:C:2010:480, point 90, et du 3 avril 2014, France/Commission, C‑559/12 P, EU:C:2014:217, point 63).

158

La Commission est habilitée à adopter une décision sur la base des informations disponibles, si l’État membre s’abstient, en violation de son devoir de coopération envers cette institution résultant de l’article 4, paragraphe 3, TUE, de lui fournir les informations qu’elle lui a demandées soit pour examiner la qualification et la compatibilité avec le marché intérieur d’une aide nouvelle ou modifiée, soit pour vérifier l’application régulière d’une aide précédemment approuvée. Toutefois, avant de prendre une telle décision, la Commission doit enjoindre à l’État membre de lui fournir, dans le délai qu’elle fixe, tous les documents et informations nécessaires pour exercer son contrôle. Ce n’est que si l’État membre omet, malgré l’injonction de la Commission, de fournir les renseignements sollicités, que celle-ci a le pouvoir de mettre fin à la procédure et de prendre, sur la base des éléments dont elle dispose, une décision (arrêt du 13 septembre 2010, Grèce e.a./Commission, T‑415/05, T‑416/05 et T‑423/05, EU:T:2010:386, point 226).

159

Il convient de constater que l’analyse du 21 mars 2014 a été communiquée par les autorités slovaques, en annexe à leur quatrième réponse à la Commission du 14 mai 2014.

160

Il doit être relevé, d’une part, que la question de savoir ce qui se serait passé en décembre 2009 si NCHZ n’avait pas été qualifiée de « société stratégique » a été abordée, à plusieurs reprises, par les autorités slovaques elles-mêmes. Elle avait, en effet, déjà été traitée par celles-ci dans leur deuxième réponse à la Commission du 29 novembre 2013 ainsi que dans leur troisième réponse à la Commission du 13 janvier 2014. Partant, il ne saurait être reproché à cette dernière de ne pas avoir demandé une nouvelle analyse aux autorités slovaques afin d’obtenir, après leur quatrième réponse, de nouvelles informations. À cet égard, il importe de souligner que, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 13 septembre 2010, Grèce e.a./Commission (T‑415/05, T‑416/05 et T‑423/05, EU:T:2010:386), auquel la requérante renvoie, la situation était différente. En effet, dans cette affaire, la décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen ne contenait pas d’évaluation préliminaire des mesures litigieuses en vue de déterminer si elles comportaient un élément d’aide et il n’y avait eu, lors de la procédure administrative, aucune mise en cause explicite desdites mesures, ni la moindre demande de renseignements relative à la conformité de ces mesures avec les conditions du marché. Dans ces circonstances, le juge de l’Union a estimé qu’il ne pouvait pas être fait grief à l’État membre concerné de ne pas avoir fourni d’informations suffisantes à la Commission pour lui permettre d’apprécier les mesures litigieuses en connaissance de cause et qu’il incombait à celle-ci, conformément à son obligation d’examen diligent et impartial dans l’intérêt d’une bonne administration des règles du traité relatives aux aides d’État, de poursuivre ses investigations et d’approfondir son enquête (voir, en ce sens, arrêt du 13 septembre 2010, Grèce e.a./Commission, T‑415/05, T‑416/05 et T‑423/05, EU:T:2010:386, points 240, 246 et 249).

161

Il doit être relevé, d’autre part, que, contrairement aux allégations de la requérante, il ne pouvait pas être « clair » que les renseignements devant être recueillis auprès de l’administrateur devaient l’être au moyen d’une analyse ex post. En effet, dans leur première réponse à la Commission du 2 septembre 2013, les autorités slovaques ont soutenu que le critère du créancier privé devrait être appliqué à la compagnie d’assurance sociale et à la compagnie d’assurance maladie. Ensuite, dans leur deuxième réponse à la Commission du 29 novembre 2013 lesdites autorités ont indiqué que « [l]’État [slovaque] a[vait] fait ce que la Commission lui avait demandé de faire eu égard au critère du créancier privé ». Elles ont également indiqué que tous les créanciers privés auraient opté pour la poursuite de l’activité de NCHZ, en ajoutant que le critère du créancier privé devrait être appliqué seulement à la compagnie d’assurance sociale eu égard à la jurisprudence, aux aspects économiques de NCHZ et au principe de bonne administration. Par ailleurs, la requérante souligne que l’analyse ex post « s’est penchée sur les questions pertinentes pour le ‘‘transfert de ressources d’État’’ ainsi que le ‘‘critère du créancier privé’’ ».

162

Or, à supposer que le critère du créancier privé eût été applicable, conformément à la jurisprudence, une analyse ex post ne pouvait pas être pertinente (voir, en ce sens, arrêt du 16 mai 2002, France/Commission, C‑482/99, EU:C:2002:294, point 71 ; voir également, en ce sens et par analogie, arrêt du 5 juin 2012, Commission/EDF, C‑124/10 P, EU:C:2012:318, point 105). En outre, contrairement aux allégations de la requérante, une telle analyse ne constitue pas « manifestement l’outil adéquat » pour les besoins du critère dégagé par l’arrêt du 1er décembre 1998, Ecotrade (C‑200/97, EU:C:1998:579). En effet, l’analyse de l’évolution probable sous l’empire de la loi sur la faillite, c’est-à-dire, selon les termes de la requérante, l’examen de « ce qu’auraient décidé les créanciers privés dans le cadre du comité compétent », devait être fondée sur les données de l’époque de la qualification de NCHZ de « société stratégique » et de l’application à celle-ci de la loi sur les sociétés stratégiques (voir point 121 ci-dessus).

163

Dans ce contexte, dans la mesure où seule une analyse utilisant des données ex post avait été communiquée par les autorités slovaques, avec l’explication de la méthodologie suivie, en annexe à leur quatrième réponse à la Commission du 14 mai 2014, ce qui est constant, il doit être considéré, à l’instar de la Commission, qu’il n’était pas nécessaire pour elle de demander d’autres renseignements sur ce point.

164

En second lieu, la requérante soutient que la décision de récupération de l’aide d’État alléguée a été adoptée sur le fondement de chiffres provisoires, sans une demande préalable de confirmation des chiffres définitifs, ce qui constituerait un manquement manifeste de la Commission tant à son obligation de coopération qu’à son devoir d’adopter des décisions sur le fondement d’informations sérieuses. Elle prétend que le fait de demander les renseignements adéquats après la clôture de l’examen formel ne saurait remédier à la violation de son obligation de solliciter la communication des informations pertinentes.

165

Dans la décision attaquée, la Commission a considéré que le montant de l’aide correspondait aux dettes non remboursées envers l’État et les entités publiques qui s’étaient accumulées pendant la période où la loi sur les sociétés stratégiques avait été appliquée à NCHZ. Elle a indiqué que, sur le fondement des informations fournies par les autorités slovaques, le montant des créances non remboursées envers les créanciers publics s’élevait à 735817,44 euros au 31 décembre 2009 et à 5519241,54 euros au 31 décembre 2010. Elle a mentionné le fait que ces montants représentaient les estimations disponibles les plus précises, ainsi que relativement prudentes, des montants des créances non honorées à ces dates. En effet, selon elle, les autorités slovaques avaient affirmé qu’il n’existait aucune information précise quant aux montants des créances non remboursées envers les créanciers publics à la date à laquelle NCHZ avait été qualifiée de « société stratégique », ni lorsque la loi sur les sociétés stratégiques avait cessé de lui être appliquée. La Commission a conclu que le montant de l’aide s’élevait à 4783424,10 euros (considérant 101 de la décision attaquée).

166

Il doit être rappelé que, conformément à l’article 14, paragraphe 3, du règlement no 659/1999, la récupération d’une aide illégale de la part d’une autorité nationale compétente auprès du bénéficiaire doit être effectuée selon les modalités prévues par le droit national (voir arrêt du 13 février 2014, Mediaset, C‑69/13, EU:C:2014:71, point 34 et jurisprudence citée). Le droit de l’Union n’exige pas que la récupération d’une telle aide s’opère sur la seule base de la décision de récupération de la Commission (arrêt du 11 septembre 2014, Commission/Allemagne, C‑527/12, EU:C:2014:2193, point 39).

167

Il s’ensuit que, dans le domaine des aides d’État, aucune disposition du droit de l’Union n’exige que la Commission, lorsqu’elle ordonne la restitution d’une aide déclarée incompatible avec le marché intérieur, fixe le montant exact de l’aide à restituer. Il suffit que la décision de la Commission comporte des indications permettant à son destinataire de déterminer lui-même, sans difficultés excessives, ce montant (arrêts du 12 octobre 2000, Espagne/Commission, C‑480/98, EU:C:2000:559, point 25, et du 12 mai 2005, Commission/Grèce, C‑415/03, EU:C:2005:287, point 39).

168

Il ressort ainsi de la jurisprudence que la Commission peut valablement se limiter à constater l’obligation de restitution de l’aide en question et laisser aux autorités nationales le soin de calculer le montant précis des sommes à restituer (voir, en ce sens, arrêt du 12 mai 2005, Commission/Grèce, C‑415/03, EU:C:2005:287, point 40). D’ailleurs, l’obligation pour un État membre de calculer le montant précis de l’aide à récupérer s’inscrit dans le cadre plus large de l’obligation de coopération loyale, consacrée à l’article 4, paragraphe 3, TUE, liant mutuellement la Commission et les États membres dans la mise en œuvre des règles du traité en matière d’aides d’État (voir, en ce sens, arrêt du 13 juin 2002, Pays-Bas/Commission, C‑382/99, EU:C:2002:363, point 91). La quantification précise du montant de l’aide peut intervenir ultérieurement, au stade de la récupération de l’aide, c’est-à-dire après l’adoption de la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêt du 13 décembre 2017, Grèce/Commission, T‑314/15, non publié, EU:T:2017:903, point 203).

169

En l’espèce, il doit être relevé que la question du montant des créances a été discutée lors de la procédure administrative. Il en a été ainsi notamment dans la quatrième réponse des autorités slovaques du 14 mai 2014. Comme la Commission le fait valoir, elle a expressément demandé, ainsi qu’en témoigne la réponse des autorités slovaques, « le détail des dettes (créanciers publics et privés, privilégiés et non privilégiés, de NCHZ [et] montants dus) à cinq moments différents : i) au début de la période de [la] faillite, ii) en décembre 2009 (déclaration de NCHZ comme société stratégique), iii) en janvier 2011, iv) à la date de la vente de NCHZ à Via Chem Slovakia et v) à la fin de la période de [la] faillite ». Les montants retenus par la Commission, comme correspondant au montant des créances publiques au début et à la fin de la période concernée (considérant 101 de la décision attaquée), sont la somme des montants indiqués par les autorités slovaques comme étant dus, respectivement, au 31 décembre 2009 et au 31 décembre 2010. À cet égard, les autorités slovaques ont précisé que leur réponse était fondée sur les données dont disposait l’administrateur et ont précisé que ces données pouvaient ne pas représenter le montant « réel » des créances, notamment, car une créance existant en décembre 2010 pouvait avoir été payée en janvier 2011. Il doit dès lors être constaté que cette réponse impliquait qu’avaient été communiquées les informations qui étaient disponibles. En outre, il doit être relevé que la requérante ne conteste pas le fait que la Commission a exposé sa méthode de calcul du montant de l’aide devant être récupéré.

170

Eu égard à ce qui précède, il ne saurait être reproché à la Commission de ne pas avoir attendu la communication de nouveaux chiffres de la part des autorités slovaques avant d’adopter la décision attaquée.

171

Par ailleurs, il ne saurait être considéré, comme le sous-entend la requérante, que la Commission aurait voulu marquer sa désapprobation en ce qui concerne l’illégalité de la mesure en cause en ordonnant la récupération d’un montant supérieur à la valeur reçue par le bénéficiaire. La requérante ne cite d’ailleurs aucun élément du dossier afin d’étayer cette affirmation.

172

À titre surabondant, il convient de rappeler que, en vertu de l’obligation de coopération loyale, consacrée à l’article 4, paragraphe 3, TUE, liant mutuellement la Commission et les États membres dans la mise en œuvre des règles du traité en matière d’aides d’État (voir, en ce sens, arrêt du 13 juin 2002, Pays-Bas/Commission, C‑382/99, EU:C:2002:363, point 91), la Commission et l’État membre concerné doivent collaborer de bonne foi. Dans le cadre de ses réponses aux questions posées par le Tribunal au titre des mesures d’organisation de la procédure (voir point 30 ci-dessus), la Commission a précisé que, lors de la phase de récupération de l’aide en cause, les différents créanciers publics de NCHZ avaient fourni des chiffres plus précis, dont elle ne disposait pas avant l’adoption de la décision attaquée et concernant notamment les créances détenues par la Slovenský vodohospodársky podnik (société de gestion de l’eau slovaque, Slovaquie), et qu’il ressortait des chiffres ainsi communiqués que le montant de l’aide réel aurait pu être supérieur au montant de l’aide indiqué dans la décision attaquée, ce qui n’a pas été contesté par la requérante.

173

Partant, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir retenu dans la décision attaquée des estimations fondées sur les données communiquées par les autorités slovaques, ni d’avoir agi en violation de l’obligation de coopération pesant sur elle.

174

Il en découle que le deuxième moyen doit être rejeté.

D. Sur la troisième branche du premier moyen, tirée de l’erreur manifeste d’appréciation lors du calcul du montant de l’aide d’État alléguée

175

La requérante prétend que, quand bien même la Commission aurait pu conclure à bon droit à l’octroi d’une aide d’État en faveur de NCHZ par la première mesure, elle a commis une erreur manifeste d’appréciation lors du calcul du montant de ladite aide.

176

La Commission, soutenue par l’intervenante, conteste le bien-fondé de l’argumentation de la requérante.

177

Dans la décision attaquée, la Commission a considéré que le montant de l’aide correspondait aux dettes non remboursées envers l’État slovaque et les entités publiques qui s’étaient accumulées pendant la période où la loi sur les sociétés stratégiques avait été appliquée à NCHZ (considérant 101 de la décision attaquée) (voir point 165 ci-dessus).

178

En premier lieu, selon la requérante, une grande partie des dettes impayées de NCHZ se serait accumulée, y compris dans l’hypothèse où une décision de liquider cette société aurait été adoptée durant la première période de la faillite. La Commission aurait dès lors commis une erreur manifeste d’appréciation en ne tenant pas compte de ces dettes dans le « scénario contrefactuel ». En effet, la liquidation de NCHZ n’aurait pas pu avoir lieu avant mai 2010 et la quote-part des dettes publiques impayées accumulées jusque-là ne saurait être considérée comme générée par la loi sur les sociétés stratégiques et, partant, comme une aide d’État. En outre, une telle liquidation aurait également généré des dettes impayées de NCHZ à l’égard de la compagnie d’assurance sociale.

179

Il importe de rappeler que la Commission a estimé à bon droit que NCHZ avait bénéficié d’un avantage ayant entraîné une charge supplémentaire pour l’État slovaque du fait de l’application de la loi sur les sociétés stratégiques à NCHZ durant la première période de la faillite (voir point 152 ci-dessus).

180

Or, selon une jurisprudence constante, l’obligation pour l’État de supprimer une aide considérée par la Commission comme incompatible avec le marché intérieur vise au rétablissement de la situation antérieure (voir arrêt du 4 avril 1995, Commission/Italie, C‑350/93, EU:C:1995:96, point 21 et jurisprudence citée ; voir également, en ce sens, arrêt du 17 juin 1999, Belgique/Commission, C‑75/97, EU:C:1999:311, points 64 et 65). Par la restitution, le bénéficiaire perd l’avantage dont il avait bénéficié sur le marché par rapport à ses concurrents et la situation antérieure à l’octroi de l’aide est rétablie (voir, en ce sens, arrêts du 15 décembre 2005, Unicredito Italiano, C‑148/04, EU:C:2005:774, point 113, et du 4 mars 2009, Associazione italiana del risparmio gestito et Fineco Asset Management/Commission, T‑445/05, EU:T:2009:50, point 193).

181

Il en découle que la Commission n’a pas commis d’erreur en considérant que, afin de rétablir la situation antérieure, le montant de l’aide devant être récupéré devait correspondre au montant des créances publiques impayées durant la période d’application de la loi sur les sociétés stratégiques à NCHZ.

182

En revanche, l’argumentation de la requérante repose sur l’hypothèse d’un « scénario alternatif » et d’une décision du comité compétent d’arrêter l’activité de NCHZ au début de la première période de la faillite. Cependant, les montants à restituer ne sauraient être déterminés en considération d’opérations différentes qui auraient pu être mises en œuvre en l’absence de la mesure ayant conduit à l’attribution de l’aide et le rétablissement de la situation antérieure n’implique pas une reconstitution différente du passé en fonction d’éléments hypothétiques tels que les choix, souvent multiples, qui auraient pu être faits par les opérateurs intéressés (voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 15 décembre 2005, Unicredito Italiano, C‑148/04, EU:C:2005:774, points 114 et 118, et du 4 mars 2009, Associazione italiana del risparmio gestito et Fineco Asset Management/Commission, T‑445/05, EU:T:2009:50, point 203). Il doit être relevé à cet égard que, si la requérante avance des données chiffrées très précises, prétendant, en particulier, que les créances détenues par la compagnie d’assurance sociale et celles détenues par la compagnie d’assurance maladie doivent être réduites respectivement de 1590091,20 euros et de 276626,24 euros, ces données ne reposent que sur des hypothèses. En effet, premièrement, en suivant le scénario exposé par la requérante, la date à laquelle la décision de l’arrêt de l’activité de NCHZ aurait été prise est inconnue. Deuxièmement, contrairement à ses allégations, selon l’étude de juin 2010 à laquelle elle se réfère, l’arrêt de la production requerrait un délai de 10 à 18 semaines, et non nécessairement de 18 semaines. Troisièmement, toujours en suivant le scénario exposé par la requérante, il n’existe aucune certitude quant au nombre de salariés qui auraient dû être licenciés, certains salariés ayant pu décider de quitter NCHZ avant la cessation d’activité de la société, ce qui aurait eu des conséquences quant aux montants dus aux deux entités publiques susmentionnées.

183

Partant, l’argumentation de la requérante doit être rejetée en ce qu’elle repose sur la prémisse erronée selon laquelle la Commission devait prendre en considération les coûts d’une liquidation de NCHZ au début de la première période de la faillite.

184

En second lieu, la requérante soutient que l’estimation par la Commission des dettes accumulées au cours de la première période de la faillite est fondée sur des chiffres inexacts et des estimations. Cependant, il a été déjà indiqué, dans le cadre du deuxième moyen, que les chiffres utilisés afin de calculer le montant de l’aide sont ceux communiqués par les autorités slovaques et que, en tout état de cause, la détermination de la somme exacte des créances détenues par ladite entité peut être effectuée lors de la phase de récupération (voir points 164 à 173 ci-dessus).

185

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, la troisième branche du premier moyen doit être rejetée.

186

Par conséquent, le premier moyen doit être rejeté dans son ensemble.

E. Sur le sixième moyen, tiré de la violation de l’article 296 TFUE concernant la conclusion de la Commission relative à l’existence d’une continuité économique

187

La requérante prétend ne pas parvenir à comprendre les raisons ayant conduit la Commission à conclure à l’existence d’une continuité économique et soutient que la motivation de la décision attaquée à cet égard n’est pas suffisante pour permettre au Tribunal d’exercer un contrôle juridictionnel sur ladite décision. Dans la réplique, elle fait valoir que le simple fait que la Commission ait été contrainte de s’expliquer, dans le mémoire en défense, sur ce qui l’avait poussée à « (ne pas) appliquer » concrètement, dans la décision attaquée, les indicateurs qu’elle avait qualifiés de pertinents pour les besoins de cette appréciation (considérant 132 de la décision attaquée), prouve l’insuffisance de la motivation de la décision attaquée sur ce point.

188

La Commission, soutenue par l’intervenante, conteste le bien-fondé de l’argumentation de la requérante.

189

Il doit être relevé, tout d’abord, que, dans la décision attaquée, la Commission a précisé qu’elle analyserait seulement l’existence d’une éventuelle continuité économique entre NCHZ et la requérante, invoquant le fait que, Via Chem Slovakia ayant cédé NCHZ à la requérante le 1er août 2012, soit seulement un jour après l’achèvement de son acquisition de NCHZ, elle n’avait ni géré ni exploité NCHZ (considérants 133 et 134 de la décision attaquée). Elle a indiqué reconnaître que le périmètre de ces deux opérations n’était pas tout à fait identique, dans la mesure où Via Chem Slovakia était restée propriétaire d’un certain nombre de biens immobiliers. Elle a observé que, néanmoins, les biens immobiliers nécessaires à la poursuite des activités économiques de NCHZ avaient été mis à la disposition de la requérante en vertu d’un contrat de location. Elle a précisé que, dès lors, les spécificités des deux opérations seraient prises en considération dans la mesure où elles étaient pertinentes pour cette appréciation (considérant 135 de la décision attaquée).

190

Il doit être relevé, ensuite, que la Commission a indiqué que l’obligation de récupération d’une aide d’État incompatible pouvait être étendue à une nouvelle société à laquelle la société ayant bénéficié de ladite aide a transféré ou vendu une partie de ses actifs, lorsque ce transfert ou cette vente permettait de constater une continuité économique entre les deux sociétés (considérant 130 de la décision attaquée). Elle a ajouté que, selon la jurisprudence, l’appréciation de la continuité économique entre le bénéficiaire d’une aide et l’entreprise à laquelle ses actifs ont été transférés se faisait au moyen d’un faisceau d’indices, qu’elle a énumérés (considérant 132 de la décision attaquée).

191

La Commission a analysé les deux opérations de vente au regard des indices énumérés. Premièrement, elle s’est interrogée sur le fait que le prix de vente versé par Via Chem Slovakia, puis celui payé par la requérante pour les « actifs » de l’entreprise correspondaient au prix du marché et a conclu que tel n’était probablement pas le cas (considérants 136 à 148 de la décision attaquée). Deuxièmement, s’agissant de l’étendue de chacune des opérations de vente, elle a estimé que l’objet de la vente de NCHZ à Via Chem Slovakia était l’ensemble de NCHZ en tant qu’entreprise en activité comprenant tous les actifs et tous les droits et obligations rattachés à NCHZ et que la requérante poursuivait les activités de NCHZ sans aucun changement majeur dans sa politique commerciale, de personnel ou de production (considérants 149 à 158 de la décision attaquée). Troisièmement, elle a indiqué supposer l’absence de lien entre les anciens et les nouveaux propriétaires de NCHZ, cédée à la requérante, dans la mesure où elle ne disposait d’aucune preuve du contraire (considérants 159 à 162 de la décision attaquée). Quatrièmement, s’agissant du moment de « la vente », elle a conclu que celle-ci s’était déroulée après que la Commission avait ouvert une enquête préliminaire sur la plainte et avait transmis ses résultats aux autorités slovaques pour observations (considérant 163 de la décision attaquée). Cinquièmement, concernant la logique économique de l’opération, elle a considéré qu’il n’y avait eu aucun changement de stratégie commerciale et que la requérante utilisait simplement les actifs de la même façon que le vendeur (considérants 164 à 167 de la décision attaquée).

192

Il doit être relevé, enfin, que la Commission a estimé que les seuls changements semblaient concerner le nom de la société et la personne morale à laquelle NCHZ appartenait. Elle a renvoyé aux conditions de l’appel d’offres de 2011 et au contrat de vente entre NCHZ et Via Chem Slovakia du 16 janvier 2012, selon lesquels, en substance, NCHZ était vendue comme un ensemble d’actifs corporels et incorporels et avec son personnel. Elle a précisé que « l’acquéreur » avait conservé le portefeuille de produits et poursuivait la politique commerciale de NCHZ et que le prix versé pour NCHZ ne constituait probablement pas un prix de marché (considérant 168 de la décision attaquée). Elle a conclu à l’existence d’une continuité économique entre NCHZ et la requérante (considérant 169 de la décision attaquée).

193

Ainsi, il doit être constaté que la Commission a mentionné les raisons l’ayant conduite à retenir l’existence d’une continuité économique entre NCHZ et la requérante. Certes, au considérant 168 de la décision attaquée, venant sous le titre « Conclusion sur la continuité économique entre NCHZ et les activités économiques acquises et exploitées par [la requérante] », elle a mentionné des éléments relatifs à l’opération d’acquisition de NCHZ par Via Chem Slovakia. Toutefois, tant en ce qui concerne le portefeuille de produits que le prix versé, la référence doit être considérée, eu égard aux appréciations figurant dans les considérants 146 et 157 de la décision attaquée, comme concernant, en tout état de cause, la requérante.

194

De plus, la Commission ayant précisé que l’appréciation de la continuité économique devait se faire au moyen d’un faisceau d’indices, il peut être compris que, après avoir analysé un certain nombre d’éléments, les indices mentionnés au considérant 168 de la décision attaquée étaient ceux sur lesquels elle avait fondé sa conclusion.

195

En outre, contrairement à ce que soutient la requérante, la Commission a indiqué son raisonnement s’agissant du prix de vente entre NCHZ et Via Chem Slovakia, lequel ne peut être qualifié d’imprécis et de flou, ainsi que celui s’agissant du prix de vente entre Via Chem Slovakia et la requérante, lequel ne peut être qualifié d’opaque. En effet, elle a, premièrement, exposé les raisons pour lesquelles elle estimait que les conditions de l’appel d’offres de 2011 ne permettaient pas d’attirer le nombre maximal de candidats qui se seraient livrés à une concurrence en présentant leurs meilleures offres, remplissant ainsi la condition première d’une vente au prix de marché le plus avantageux possible (considérants 136 à 144 de la décision attaquée). Elle a, deuxièmement, précisé que la vente était organisée comme la vente d’une entreprise en activité, ce qui excluait la possibilité de maximiser le prix final en recourant à des procédures pour les différents domaines d’activité de NCHZ (considérant 145 de la décision attaquée). Elle a, troisièmement, relevé que, dans le cas de la vente de NCHZ par Via Chem Slovakia à la requérante, il s’était agi d’une opération entre deux sociétés privées en dehors de tout appel d’offres, que ces deux entités s’étaient simplement entendues sur un prix, sans qu’une autre entité ait la possibilité de proposer un meilleur prix, et que, par conséquent, les doutes portant sur la question de savoir si le prix versé par Via Chem Slovakia correspondait au prix du marché concernaient aussi le prix payé par la requérante (considérant 146 de la décision attaquée).

196

Il s’ensuit que, conformément à la jurisprudence citée aux points 39 à 41 ci-dessus, la décision attaquée doit être considérée comme étant suffisamment motivée concernant l’appréciation de la Commission quant à l’existence d’une continuité économique entre NCHZ et la requérante et, partant, le sixième moyen doit être rejeté.

F. Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 1, et de l’article 108, paragraphe 2, TFUE ainsi que de l’article 14, paragraphe 1, du règlement no 659/1999 du fait de l’extension de l’obligation de récupération de l’aide d’État alléguée à la requérante

197

La requérante allègue que la Commission a contrevenu à l’article 107, paragraphe 1, et à l’article 108, paragraphe 2, TFUE, ainsi qu’à l’article 14, paragraphe 1, du règlement no 659/1999, en estimant qu’il existait une continuité économique entre NCHZ et elle-même et en lui étendant l’obligation de récupération de l’aide d’État constatée.

198

En premier lieu, la requérante affirme que, selon la jurisprudence, une aide d’État ne peut être transférée à l’acquéreur des actifs du bénéficiaire de ladite aide que si ceux-ci ont été acquis à un prix inférieur à celui du marché. Or, dans la mesure où Via Chem Slovakia puis la requérante auraient acheté les actifs de NCHZ au prix du marché, la requérante ne saurait être considérée comme ayant bénéficié d’une aide d’État et ce seul motif suffirait à exclure toute récupération auprès de la requérante (voir, en ce sens, arrêts du 29 avril 2004, Allemagne/Commission, C‑277/00, EU:C:2004:238, point 70, et du 1er juillet 2009, Operator ARP/Commission, T‑291/06, EU:T:2009:235, point 67). Partant, l’approche de la Commission en l’espèce violerait l’article 14 du règlement no 659/1999, puisque, en vertu de cette disposition et en conformité avec une jurisprudence établie, l’aide d’État ne peut être recouvrée qu’auprès de son bénéficiaire.

199

Selon la requérante, l’arrêt du 28 mars 2012, Ryanair/Commission (T‑123/09, EU:T:2012:164, points 161 et 162), n’étaye pas l’assertion de la Commission selon laquelle le prix du marché n’est pas le critère décisif, car, dans cet arrêt, le fait qu’un prix correspondant à la valeur du marché a été versé a rendu superflu l’examen des autres critères pour apprécier la continuité économique. La Commission aurait d’ailleurs confirmé cette compréhension de la jurisprudence dans sa communication intitulée « Vers une mise en œuvre effective des décisions de la Commission enjoignant aux États membres de récupérer les aides d’État illégales et incompatibles avec le marché [intérieur] » (JO 2007, C 272, p. 4, ci-après la « communication de 2007 »), car elle y indiquerait, au point 33, qu’elle n’est en droit d’étendre la récupération que lorsqu’elle peut prouver que les actifs ont été vendus à un prix inférieur à celui du marché. Or, en l’espèce, elle prétendrait être libre d’utiliser comme bon lui semble les indicateurs mentionnés dans l’arrêt susmentionné et, à l’exception de l’allégation selon laquelle l’ampleur de l’opération doit constituer l’indicateur le plus important, elle n’aurait même pas pris la peine de s’expliquer sur la hiérarchie conférée aux différents indicateurs.

200

En deuxième lieu, la requérante soutient que, même dans le cas particulier où des actifs du bénéficiaire de l’aide ont été transférés à un prix inférieur à celui du marché, ce fait à lui seul n’autorise pas la Commission à étendre la décision de récupération à l’acheteur de ces actifs. Celle-ci devrait au contraire établir que le transfert des actifs a eu lieu afin de contourner l’ordre de récupération, et ce en prouvant l’existence d’une continuité économique entre le bénéficiaire de l’aide et l’acheteur à la lumière de certains critères (voir, en ce sens, arrêt du 29 avril 2004, Allemagne/Commission, C‑277/00, EU:C:2004:238, point 86). En l’espèce, ces critères militeraient incontestablement contre l’éventualité d’un contournement ou d’une continuité économique. En effet, quand bien même elles seraient exactes, les constatations de la Commission ne permettraient pas de justifier sa conclusion quant à l’existence d’une continuité économique, car, eu égard à sa pratique décisionnelle et à la jurisprudence, l’ampleur du transfert ne serait pas suffisante à elle seule pour aboutir à une telle conclusion, y compris s’agissant d’une vente suivant le principe d’une continuité de l’entreprise, la requérante ayant, en outre, démontré que le prix du marché maximal avait été obtenu. Partant, il ne saurait y avoir ni une continuité économique entre NCHZ et Via Chem Slovakia, ni, à plus forte raison, entre NCHZ et la requérante.

201

En troisième lieu, la requérante estime que, particulièrement dans les affaires de faillite, l’approche de la Commission a des effets économiques dévastateurs et n’est pas indispensable sous l’angle du droit de la concurrence. Celle-ci essayerait de créer une jurisprudence bien plus stricte, selon laquelle l’ampleur de l’opération devrait constituer le critère décisif, le prix de vente devenant tout au plus un critère accessoire.

202

La Commission, soutenue par l’intervenante, conteste le bien-fondé de l’argumentation de la requérante. Elle considère avoir pris en considération les divers éléments énoncés dans la jurisprudence et tenu compte des spécificités de l’espèce et ne pas avoir commis d’erreur en ayant constaté l’existence d’une continuité économique en l’espèce et en ayant, dès lors, étendu l’obligation de récupération à la requérante.

203

S’agissant des considérations de la Commission figurant dans la décision attaquée concernant l’existence d’une continuité économique entre NCHZ et la requérante, elles sont exposées aux points 189 à 192 ci-dessus.

1.   Observations liminaires

204

Il y a lieu de rappeler que l’article 14, paragraphe 1, du règlement no 659/1999, intitulé « Récupération de l’aide », énonce ce qui suit :

« En cas de décision négative concernant une aide illégale, la Commission décide que l’État membre concerné prend toutes les mesures nécessaires pour récupérer l’aide auprès de son bénéficiaire [...] »

205

Selon une jurisprudence constante, le principal objectif visé par le remboursement d’une aide d’État versée illégalement est d’éliminer la distorsion de concurrence causée par l’avantage concurrentiel procuré par l’aide illégale. Le rétablissement de la situation antérieure au versement d’une aide illégale ou incompatible avec le marché intérieur constitue une exigence nécessaire à la préservation de l’effet utile des dispositions des traités relatives aux aides d’État (voir arrêt du 7 mars 2018, SNCF Mobilités/Commission, C‑127/16 P, EU:C:2018:165, point 104 et jurisprudence citée).

206

Si le règlement no 659/1999 ne prévoit pas expressément l’hypothèse d’une décision de la Commission constatant l’existence d’une continuité économique entre le bénéficiaire initial de l’aide en cause et une autre entité, ce principe a été développé par le juge de l’Union afin de permettre à la Commission d’étendre l’obligation de récupération d’une aide au repreneur des actifs du bénéficiaire initial de l’aide en cause et de garantir l’effet utile des décisions de récupération.

207

Ainsi, les aides illégales doivent être récupérées auprès de la société qui poursuit l’activité économique de l’entreprise ayant bénéficié de ces aides lorsqu’il est établi que cette société conserve la jouissance effective de l’avantage concurrentiel lié au bénéfice desdites aides (voir arrêt du 7 mars 2018, SNCF Mobilités/Commission, C‑127/16 P, EU:C:2018:165, point 106 et jurisprudence citée).

208

Selon la jurisprudence, afin d’apprécier l’existence d’une telle continuité économique, les éléments suivants peuvent être pris en considération : l’objet du transfert (actifs et passifs, maintien de la force de travail, actifs groupés), le prix du transfert, l’identité des actionnaires ou des propriétaires de l’entreprise qui reprend et de l’entreprise de départ, le moment où le transfert a lieu (après le début de l’enquête, l’ouverture de la procédure ou la décision finale) ou encore la logique économique de l’opération (voir, en ce sens, arrêts du 8 mai 2003, Italie et SIM 2 Multimedia/Commission, C‑328/99 et C‑399/00, EU:C:2003:252 point 78, dernier tiret ; du 7 mars 2018, SNCF Mobilités/Commission, C‑127/16 P, EU:C:2018:165, point 108 ; du 13 septembre 2010, Grèce e.a./Commission, T‑415/05, T‑416/05 et T‑423/05, EU:T:2010:386, point 135, et du 28 mars 2012, Ryanair/Commission, T‑123/09, EU:T:2012:164, point 155). Le juge de l’Union a précisé qu’il n’était pas imposé à la Commission de prendre en compte l’ensemble de ces éléments, ce dont il était attesté par l’emploi de l’expression « peuvent être pris en considération » (voir, en ce sens, arrêts du 28 mars 2012, Ryanair/Commission, T‑123/09, EU:T:2012:164, point 156, et du 17 décembre 2015, SNCF/Commission, T‑242/12, EU:T:2015:1003, point 235).

209

S’agissant du prix de vente, même si le prix du marché constitue l’un des critères les plus importants, il n’est pas un critère suffisant pour conclure à l’absence de continuité économique (voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général Mengozzi dans l’affaire SNCF Mobilités/Commission, C‑127/16 P, EU:C:2017:577, point 116). À cet égard, il doit être relevé que, contrairement à ce que soutient la requérante, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 28 mars 2012, Ryanair/Commission (T‑123/09, EU:T:2012:164, points 157 à 161), la Commission avait conclu à l’absence de continuité économique en fondant sa décision tant sur l’objet et le prix du transfert des actifs, conforme au prix du marché, que sur l’absence d’identité des actionnaires et la logique économique de l’opération, et non uniquement sur le prix du transfert.

210

En outre, selon la jurisprudence, dès lors que l’entreprise bénéficiaire des aides illégales est en faillite et qu’une société a été créée afin de poursuivre une partie des activités de cette entreprise en faillite, la poursuite de cette activité, sans que les aides concernées aient été intégralement récupérées, est susceptible de faire perdurer la distorsion de concurrence causée par l’avantage concurrentiel dont cette société a profité sur le marché par rapport à ses concurrents. Ainsi, une telle société nouvellement créée peut, si cet avantage persiste à son profit, être tenue au remboursement des aides en cause. Tel est le cas, en particulier, lorsque celle-ci procède à l’acquisition des actifs de la société en liquidation sans verser en contrepartie un prix conforme aux conditions du marché ou lorsqu’il est établi que la création d’une telle société a eu pour effet de contourner l’obligation de restitution desdites aides, ce qui vaudrait, en particulier, lorsque le versement d’un prix conforme aux conditions du marché ne suffit pas pour neutraliser l’avantage concurrentiel lié au bénéfice des aides illégales (arrêts du 11 décembre 2012, Commission/Espagne, C‑610/10, EU:C:2012:781, points 104 à 107 ; du 24 janvier 2013, Commission/Espagne, C‑529/09, EU:C:2013:31, points 107 et 109, et du 17 décembre 2015, SNCF/Commission, T‑242/12, EU:T:2015:1003, point 234).

211

Enfin, il doit être rappelé que les critères jurisprudentiels d’identification du bénéficiaire effectif d’une aide présentent un caractère objectif et la présence d’un élément intentionnel n’est pas nécessaire pour constater que l’obligation de restitution est contournée par le transfert d’actifs (voir, en ce sens, arrêt du 13 septembre 2010, Grèce e.a./Commission, T‑415/05, T‑416/05 et T‑423/05, EU:T:2010:386, point 146).

212

Partant, il découle de la jurisprudence que, si le fait que le prix du transfert n’est pas le prix du marché peut entraîner l’extension de l’obligation de récupération, la circonstance que le prix du transfert soit conforme aux conditions du marché peut, contrairement aux allégations de la requérante, ne pas suffire à exclure, à lui seul, l’existence d’une continuité économique et n’empêche pas, dans certaines circonstances, l’extension de l’obligation de récupération, laquelle sera due à l’existence d’un effet de contournement, sans que doive exister l’intention d’un tel contournement.

213

Par ailleurs, il convient de préciser que la communication de 2007 à laquelle la requérante renvoie a été adoptée antérieurement, notamment, aux arrêts du 13 septembre 2010, Grèce e.a./Commission (T‑415/05, T‑416/05 et T‑423/05, EU:T:2010:386), et du 28 mars 2012, Ryanair/Commission (T‑123/09, EU:T:2012:164). Partant, dans ladite communication, la Commission n’a, par définition, pas pu prendre en considération les développements jurisprudentiels postérieurs à 2007 et il ne saurait lui être reproché d’en tenir compte désormais.

214

Enfin, s’agissant de l’objet du transfert en l’espèce, il doit être précisé que, si, dans la décision attaquée, il est parfois fait mention de la vente des actifs de NCHZ, il n’est pas contesté que, à l’exception des biens immobiliers, la vente entre Via Chem Slovakia et la requérante portait sur tous les actifs et droits liés à la production chimique (dont les machines et équipements de production, contrats), ainsi que tous les passifs liés à la production chimique (y compris tous les contrats de travail) (considérant 135 de la décision attaquée).

215

C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner l’analyse de la Commission relative à l’existence d’une continuité économique justifiant l’extension de l’obligation de récupération de l’aide d’État à la requérante.

2.   Sur le prix de vente de NCHZ

216

La requérante prétend que la Commission ne pouvait pas étendre l’obligation de récupération au-delà de NCHZ, puisque les actifs de l’entité en faillite ont été vendus au prix du marché.

217

La Commission conteste le bien-fondé de l’argumentation de la requérante.

218

Dans la décision d’ouverture de la procédure formelle d’examen, la Commission a mis en doute le fait que les prix versés successivement par Via Chem Slovakia et par la requérante pour les actifs de NCHZ correspondaient au prix du marché et, dans la décision attaquée, elle a indiqué continuer de nourrir ces doutes (considérants 136, 146 et 147 de la décision attaquée). À cet égard, en premier lieu, la Commission a relevé que, d’une part, la procédure d’appel d’offres pour la vente à Via Chem Slovakia contenait une faculté d’opter pour des engagements, consistant en un maintien à un niveau de la production minimal pendant cinq ans, en un montant minimal d’investissements et en une limitation pendant cinq ans de la possibilité de vendre ou de transférer des actifs de NCHZ, ce qui pouvait dissuader des candidats potentiels ou avoir un impact négatif sur les offres soumises (considérants 17, 138 à 144 de la décision attaquée), et, d’autre part, les soumissionnaires ne pouvaient acheter que l’ensemble des actifs en vue de la poursuite de l’exploitation, ce qui ne permettait pas d’écarter l’hypothèse que la vente des différents secteurs de l’entreprise NCHZ aurait pu aboutir à un prix de vente total plus élevé (considérant 145 de la décision attaquée). En second lieu, elle a relevé que la cession de NCHZ par Via Chem Slovakia à la requérante avait consisté en une opération entre deux sociétés privées en dehors de tout appel d’offres (considérant 146 de la décision attaquée). Elle en a conclu qu’« il sembl[ait] probable que les actifs de NCHZ n’[aie]nt pas été vendus de manière à garantir [la] maximisation des [revenus] tirés de la cession de l’entreprise » (considérant 147 de la décision attaquée).

a)   Sur la charge de la preuve

219

La requérante soutient que la charge de la preuve concernant l’avantage économique dont bénéficie l’acquéreur des actifs du bénéficiaire de l’aide incombe à la Commission et qu’il ne suffit pas qu’elle exprime des doutes. Or, elle n’aurait présenté aucun élément prouvant que le prix de vente était effectivement inférieur au prix du marché.

220

La Commission conteste les allégations de la requérante.

221

Il doit être relevé que, dans la mesure où, conformément à la jurisprudence, un élément parmi ceux devant être pris en considération afin d’apprécier l’existence d’une continuité économique ne suffit pas à lui seul afin d’exclure l’extension de l’obligation de récupération à une autre entreprise que le bénéficiaire initial de l’aide en cause, tel que, par exemple, un prix de vente au prix du marché, la Commission ne doit pas nécessairement prouver l’absence d’un tel prix de vente afin de conclure à une continuité économique et l’absence de garantie d’un tel prix de vente peut être prise en compte dans le cadre de l’appréciation globale de la Commission des différents éléments examinés.

b)   Sur la vente à Via Chem Slovakia

1) Sur la présomption alléguée d’une vente réalisée au prix du marché lorsqu’elle intervient dans le cadre d’une procédure de faillite sous le contrôle d’une juridiction

222

Selon la requérante, puisque la vente a été réalisée dans le cadre d’une procédure de faillite sous le contrôle d’un tribunal de la faillite ayant l’obligation d’agir dans l’intérêt des créanciers de la société en cessation de paiements, les actifs sont présumés avoir été vendus au prix le plus élevé possible (voir, en ce sens, arrêt du 29 avril 2004, Allemagne/Commission, C‑277/00, EU:C:2004:238, points 93 et 94).

223

Selon la Commission, il n’existe aucune présomption selon laquelle toute vente réalisée dans le cadre d’une procédure de faillite aurait lieu au prix du marché.

224

À cet égard, il convient d’observer que, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 29 avril 2004, Allemagne/Commission (C‑277/00, EU:C:2004:238, points 92 et 93), la Commission n’avait pas remis en question l’affirmation selon laquelle la vente avait été effectuée au prix du marché et n’avait pas constaté que les conditions liées à la vente avaient eu pour effet de réduire le prix de vente. Partant, la requérante procède à une lecture extensive de cet arrêt.

225

Par ailleurs, le fait que la vente se déroule sous le contrôle d’une juridiction offre certes une garantie que les règles fixées seront respectées et que le tribunal de la faillite veillera à la satisfaction la plus complète possible des créanciers. Cependant, en l’espèce, il appartenait à la Commission de vérifier si les conditions de la vente à Via Chem Slovakia étaient de nature à assurer le paiement d’un prix de marché et d’examiner la manière dont cette vente s’était déroulée.

2) Sur la prétendue garantie d’un prix de vente le plus élevé possible du fait de la vente dans le cadre d’une procédure d’appel d’offres ouverte, transparente et inconditionnelle

226

Selon la requérante, s’agissant de la vente de NCHZ à Via Chem Slovakia, le vendeur était juridiquement tenu d’obtenir le prix de vente le plus élevé possible. La procédure d’appel d’offres mise en œuvre par l’administrateur, en conformité avec les exigences fixées par le súd v Trenčíne (tribunal de Trenčín), ayant été ouverte, transparente et inconditionnelle, aurait garanti que les actifs de NCHZ ont été vendus au prix le plus élevé possible sur le marché. Elle fait observer que la Commission ne met pas en doute la transparence du second appel d’offres, mais que ses doutes visaient l’option sur les engagements (considérants 137 à 144 de la décision attaquée) et l’impossibilité d’acheter des actifs individuels, au lieu de les acheter en bloc. Elle conteste les appréciations de la Commission à cet égard.

227

En premier lieu, aux considérants 17 et 137 de la décision attaquée, la Commission a constaté que, aux termes de l’appel d’offres de 2011, les candidats potentiels pouvaient soumettre une offre avec ou sans « engagements de l’acquéreur » (ci-après, respectivement, une « offre avec engagements » et une « offre sans engagements »). Elle a observé qu’il était prévu que, si l’offre la plus élevée émanait d’un candidat ayant choisi de ne pas reprendre les engagements, le candidat ayant soumis l’offre la plus élevée parmi les candidats ayant présenté une offre avec engagements avait la possibilité de s’aligner sur l’offre la plus élevée des candidats ayant présenté une offre sans engagements.

228

La Commission a estimé que la possibilité accordée à un candidat de majorer son offre après la soumission de toutes les offres pouvait dissuader des candidats potentiels ou avoir un impact négatif sur les offres soumises. Elle a expliqué que l’offre d’un participant qui soumettait une offre avec engagements serait potentiellement inférieure à ce qu’elle serait si les conditions de l’appel d’offres de 2011 ne prévoyaient pas une telle possibilité d’alignement. Elle a considéré que cette condition pouvait dissuader les candidats qui ne souhaitaient pas soumettre une offre avec engagements, en sachant que, même si leur offre était la plus élevée, elle pouvait être rejetée. Elle a conclu que la possibilité de soumettre une offre avec engagements pouvait avoir une influence sur le prix proposé (considérants 138 à 140 et 143 de la décision attaquée).

229

À titre liminaire, il y a lieu d’écarter l’argument de la requérante selon lequel l’option sur les engagements n’a, de fait, eu aucune incidence sur le prix de vente, puisque aucun soumissionnaire n’en a fait usage. D’une part, il repose sur une constatation factuelle a posteriori. D’autre part, un tel argument n’est pas pertinent aux fins d’examiner si les conditions posées par l’appel d’offres lui-même permettaient de garantir un prix le plus élevé possible.

230

Il convient de relever que la Commission a affirmé au considérant 141 de la décision attaquée que les conditions de l’appel d’offres de 2011 privilégiaient les participants disposés à accepter les engagements, ce qui pourrait être une indication de ce que le prix offert dans une offre sans engagements pourrait être supérieur au prix proposé par le candidat retenu. Il doit cependant être observé que, en tout état de cause, pour qu’une offre avec engagements fût retenue, le prix proposé dans celle-ci devait être revu et aligné sur le prix proposé dans une offre sans engagements.

231

Il est néanmoins exact que, ainsi que la Commission l’a relevé au considérant 139 de la décision attaquée, l’un des éléments garantissant un prix maximal dans un appel d’offres est l’incertitude concernant le prix proposé par les autres soumissionnaires. Or, une procédure d’appel d’offres permettant à certains soumissionnaires de modifier le prix qu’ils proposent implique le risque, d’une part, que ceux pouvant modifier leur offre tentent de ne pas proposer le prix le plus élevé auquel ils évaluent l’entreprise mise en vente, en attendant de voir la nécessité de devoir remonter leur offre, et, d’autre part, que ceux ne pouvant pas modifier leur offre tentent de proposer un prix également inférieur au prix le plus élevé auquel ils évaluent l’entreprise mise en vente, voire décident de ne pas soumissionner, en estimant qu’ils pourront de toute manière être écartés par un soumissionnaire disposé à accepter les engagements.

232

Partant, il ne saurait être exclu que les conditions posées par l’appel d’offres de 2011 prévoyant la possibilité de modifier le prix de vente proposé aient pu avoir un impact sur le prix de vente, en ce sens qu’il n’aurait pas été le plus élevé possible.

233

En deuxième lieu, dans la décision attaquée, la Commission a estimé que le fait que la vente était organisée comme la vente d’une entreprise en activité, c’est-à-dire de l’ensemble de ses actifs, excluait la possibilité de maximiser le prix final en recourant à des procédures pour les différents secteurs d’activité de NCHZ, en supprimant ou en réduisant par la même occasion les difficultés potentielles découlant d’une éventuelle cessation de l’activité de cette société. Elle a constaté que les documents présentés par les autorités slovaques mentionnaient l’existence de candidats potentiels intéressés par l’acquisition de seulement certaines parties de NCHZ. Selon elle, il était donc impossible d’écarter l’hypothèse que la vente des différents secteurs d’activité de NCHZ aurait pu aboutir à un prix de vente total plus élevé (considérant 145 de la décision attaquée).

234

La requérante prétend qu’il n’est pas important de déterminer si la vente des actifs séparés aurait permis d’obtenir un prix de vente plus élevé, mais de savoir si l’acquéreur a versé, pour les actifs, un prix conforme à celui du marché et la seule question appelant une réponse serait celle de savoir si l’acheteur a reçu un avantage économique. De plus, selon la requérante, la Commission aurait dû apporter des éléments de preuve démontrant qu’il aurait été possible d’obtenir un meilleur résultat en vendant les actifs individuellement.

235

La Commission conteste cette argumentation en affirmant que, s’il était possible d’obtenir un prix plus élevé par une vente séparée des actifs, mais que, néanmoins, il a été décidé de procéder à une cession groupée de la société en tant qu’entreprise en activité, pour garantir la poursuite de l’activité économique de NCHZ, et non pour maximiser le produit de la vente, il est clair que la vente n’a pas eu lieu au prix du marché, c’est-à-dire au prix le plus élevé susceptible d’être obtenu sur le marché.

236

Il y a lieu de relever que, à tout le moins, un candidat a manifesté son intérêt pour une vente non globale (considérant 145 de la décision attaquée) et que le súd v Trenčíne (tribunal de Trenčín) a demandé à l’administrateur d’évaluer cette offre supplémentaire. Toutefois, il doit être constaté que, en réponse à une question du Tribunal, la Commission a indiqué, sans être contredite par la requérante, que l’appel d’offres de 2011 interdisait la vente des actifs de manière séparée.

237

Il convient de considérer que le prix à prendre en considération est celui de l’entreprise mise en vente. Or, il ne peut pas être présumé que, en ne proposant que l’achat de celle-ci de manière globale, à savoir par un seul acheteur, le prix obtenu pour la vente de l’entreprise a été le prix le plus élevé qui pouvait être obtenu sur le marché. En effet, même si l’objectif recherché était la poursuite de l’activité de NCHZ, cela n’impliquait pas d’interdire une vente des actifs de manière séparée.

238

D’une part, l’activité de l’entreprise vendue pouvait manifestement être poursuivie alors que la propriété des différents actifs était divisée entre plusieurs entités. La vente subséquente à la requérante a en effet montré qu’une entreprise pouvait être intéressée par l’achat d’une partie des actifs, tandis qu’elle prenait l’autre partie en location, et disposer ainsi de la jouissance de l’ensemble de ces actifs.

239

D’autre part, ainsi que la Commission et l’intervenante l’ont fait valoir lors de l’audience, la possibilité qui aurait pu être offerte d’une vente des actifs de manière séparée n’impliquait pas la réalisation d’une telle vente, notamment dans l’hypothèse où elle aurait été financièrement moins avantageuse.

240

Une telle possibilité de vente, ne limitant pas l’objet du transfert à une unité économique globale, aurait néanmoins permis de ne pas limiter le choix des acquéreurs potentiels (voir, en ce sens, arrêt du 28 mars 2012, Ryanair/Commission, T‑123/09, EU:T:2012:164, point 158) et de pouvoir présumer, sous réserve que les autres conditions de l’appel d’offres de 2011 eussent été différentes (voir point 232 ci-dessus), que la vente de l’entreprise avait été réalisée au prix le plus élevé.

241

À titre surabondant, il convient de relever que la requérante fait valoir que lorsque, comme en l’espèce, les actifs sont vendus à un tiers dans le cadre d’une procédure d’appel d’offres s’inscrivant dans une procédure de faillite, la motivation économique des parties serait évidente et que celle de l’acheteur serait de réaliser une opération qui, selon lui, laisserait entrevoir la réalisation d’un bénéfice. Or, il doit être constaté que, dans la mesure où Via Chem Slovakia n’a pas exploité NCHZ, mais l’a vendue à la suite de son acquisition, le raisonnement de la requérante appliqué à la première vente impliquerait que Via Chem Slovakia ait proposé et ait versé un prix inférieur au prix du marché.

242

En troisième lieu, si la requérante soutient que les deux procédures d’appel d’offres confirment que le prix de vente à Via Chem Slovakia a été conforme aux conditions du marché, il doit toutefois être relevé que, ainsi que la Commission l’a indiqué au considérant 16 de la décision attaquée, l’appel d’offres de 2010 n’a suscité l’offre que d’un seul soumissionnaire, que l’administrateur a refusée, en pensant pouvoir obtenir une meilleure offre.

243

Par ailleurs, les deux candidats lors de la dernière étape de l’appel d’offres de 2011 ayant déposé des offres proches de la première offre (considérant 16 de la décision attaquée), la requérante en tire la conclusion que ce fait constituait une preuve qu’il s’agissait du prix du marché. Cet argument doit toutefois être rejeté, d’une part, puisque l’un des deux soumissionnaires était la société dont l’offre avait été rejetée lors de l’appel d’offres de 2010 et, d’autre part, pour les raisons exposées aux points 232 et 240 ci-dessus.

244

En quatrième lieu, en réponse à un argument de la requérante, la Commission fait valoir que l’« analyse ex post », effectuée par l’administrateur, du prix offert par Via Chem Slovakia n’a pas prouvé que le prix ainsi obtenu correspondait effectivement à un prix de marché. Cette analyse aurait porté sur la question de savoir si, à ce stade, vendre l’entreprise à Via Chem Slovakia était la meilleure solution.

245

À cet égard, il doit être relevé que, en réponse à une question du Tribunal lors de l’audience, la Commission a indiqué qu’elle qualifiait l’analyse d’« ex post », car elle avait été réalisée après la réception des offres reçues dans le cadre de la procédure d’appel d’offres de 2011. Il ressort de cette analyse, communiquée par la Commission dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure, qu’elle portait sur la question de savoir si, à ce stade, vendre l’entreprise à Via Chem Slovakia était la meilleure solution. Il en ressort également que l’administrateur n’a pas estimé que le prix proposé par Via Chem Slovakia représentait sans nul doute le prix du marché, mais qu’il a indiqué qu’il fallait procéder à la vente de NCHZ, car un report de celle-ci impliquerait d’autres répercussions négatives sur cette société, en particulier si son activité était poursuivie dans le cadre de la faillite.

246

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il doit être considéré que, contrairement aux allégations de la requérante, les conditions de l’appel d’offres de 2011 ne permettaient pas de présumer que la vente avait pour objectif d’obtenir le produit maximal et la Commission a, à juste titre, estimé qu’il n’existait pas de garanties quant au fait que le prix de vente payé par Via Chem Slovakia était le prix du marché pour l’entreprise NCHZ.

c)   Sur la vente par Via Chem Slovakia à la requérante

247

La requérante fait valoir que, nonobstant le fait que les conditions de vente entre Via Chem Slovakia et elle-même sont dépourvues de pertinence en raison du fait que la première vente a été réalisée au prix du marché, il doit être considéré que le prix de vente négocié entre des opérateurs privés en économie de marché est présumé être conforme aux conditions du marché, y compris en l’absence de passation d’appel d’offres.

248

Dans la décision attaquée, la Commission a estimé que, dans le cas de la vente de Via Chem Slovakia à la requérante, il s’agissait d’une opération entre deux sociétés privées en dehors de tout appel d’offres. Elle a relevé que lesdites sociétés s’étaient simplement entendues sur un prix sans qu’une autre entité ait eu la possibilité de proposer un meilleur prix. Elle a conclu que les doutes portant sur la question de savoir si le prix versé par Via Chem Slovakia correspondait au prix du marché concernaient dès lors aussi le prix payé par la requérante (considérant 146 de la décision attaquée).

249

Il convient d’écarter la référence faite par la requérante à une pratique décisionnelle, dans la mesure où la pratique décisionnelle de la Commission concernant d’autres affaires ne saurait affecter la validité de la décision attaquée, qui ne peut s’apprécier qu’au regard des règles objectives du traité (voir, en ce sens, arrêt du 20 mai 2010, Todaro Nunziatina & C., C‑138/09, EU:C:2010:291, point 21, et du 17 décembre 2015, SNCF/Commission, T‑242/12, EU:T:2015:1003, point 121).

250

Par ailleurs, il est exact que, ainsi que la Commission l’a estimé dans la décision attaquée, le fait qu’il n’y ait pas eu de mise en concurrence n’offre pas de certitude quant au fait que ce prix était conforme au prix du marché ou lui était inférieur.

d)   Conclusion

251

Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, ainsi que la Commission l’a estimé, en substance, aux considérants 144 à 146 et 168 de la décision attaquée, il doit être conclu qu’il ne peut être tenu pour certain que les deux ventes successives aient été réalisées au prix du marché.

3.   Sur l’ampleur de l’opération

252

Selon la requérante, le seul critère qui ne milite pas contre l’existence d’un contournement réside dans l’ampleur de l’opération. Elle allègue que, même si une vente séparée des actifs de NCHZ avait permis à elle seule d’écarter l’existence d’une continuité économique, le seul fait que les actifs de NCHZ aient été vendus suivant le principe d’une continuation de l’activité entre NCHZ et Via Chem Slovakia n’est pas suffisant pour constater l’existence d’une continuité économique. En outre, s’agissant de la vente de certains actifs de Via Chem Slovakia à la requérante, puisque seuls 60 % de l’activité de NCHZ ont été transférés, il serait même possible de soutenir que l’ampleur du transfert n’a pas été suffisante pour satisfaire à ce critère, de sorte que la continuité économique pourrait être écartée sur ce seul fondement.

253

La Commission, soutenue par l’intervenante, conteste l’argumentation de la requérante. Elle estime que l’ampleur de l’opération est un critère particulièrement important et relève que la requérante ne remet pas en cause les arguments développés sur ce point dans la décision attaquée, mais tente de minimiser l’importance de cet aspect, sans que la jurisprudence permette d’étayer son point de vue.

254

Dans la décision attaquée, en premier lieu, la Commission a indiqué que, plus la part de l’entreprise initiale transférée à une nouvelle entité était importante, plus il était probable que l’activité économique liée à ces actifs continuât à bénéficier des avantages de l’aide incompatible (considérant 149 de la décision attaquée).

255

En second lieu, la Commission a observé, d’une part, que la vente à Via Chem Slovakia portait sur l’ensemble de l’activité de NCHZ, en tant qu’entreprise en activité (considérants 150 et 151 de la décision attaquée). Elle a observé, d’autre part, que, s’agissant de la vente à la requérante, le périmètre de l’activité de l’entreprise acquise par la requérante demeurait identique au périmètre antérieur des activités de NCHZ et que plus de 95 % des salariés de NCHZ étaient repris (considérant 152 de la décision attaquée). Elle a également noté que, à l’exception des biens immobiliers, tous les actifs et tous les droits et obligations rattachés à l’entreprise cédée avaient été repris par la requérante (considérants 153 et 156 de la décision attaquée). Selon la Commission, le fait qu’une partie de ces actifs soient utilisés en vertu d’un contrat de location, plutôt qu’au titre d’un droit de propriété direct, ne change rien au fait que la requérante poursuit « tout bonnement » les activités économiques de NCHZ dans la même étendue qu’avant l’opération (considérant 156 de la décision attaquée). De surcroît, la Commission a observé que la requérante avait maintenu la direction de NCHZ en place (considérant 154 de la décision attaquée), après avoir annoncé dans la presse, au moment de l’acquisition de l’activité de cette société, qu’elle ne prévoyait aucun changement majeur en ce qui concernait les effectifs ou la production et qu’elle maintenait la direction en place (considérant 155 de la décision attaquée). Ainsi, selon la Commission, la requérante a poursuivi les activités de NCHZ sans aucun changement majeur dans sa politique commerciale, de personnel ou de production (considérant 158 de la décision attaquée).

256

Il doit être relevé que, afin de démontrer que l’ampleur de l’opération est en réalité un critère négatif pouvant permettre à lui seul d’éliminer, lorsqu’il n’est pas satisfait, la possibilité que l’opération en cause vise à contourner la décision de récupération, la requérante fait valoir que cette conclusion ressort de la jurisprudence et cite à cet égard le point 67 des conclusions de l’avocat général Tizzano dans l’affaire Allemagne/Commission (C‑277/00, EU:C:2003:354). Or, ce point reprend un argument de la Commission et ne renvoie, contrairement à ses affirmations, à aucune référence complémentaire. De plus, s’il ressort de la jurisprudence que divers éléments peuvent être pris en considération, parmi lesquels figure « l’objet du transfert (actifs et passifs, maintien de la force de travail, actifs groupés) » (voir point 208 ci-dessus), il n’en ressort en revanche pas que la continuité économique doit être écartée en cas de faible ampleur de l’opération.

257

Par ailleurs, il y a lieu de constater que, comme la Commission le fait valoir, la requérante n’avance aucun argument afin de contester les appréciations énoncées dans la décision attaquée s’agissant de l’ampleur des deux opérations de vente successives, à l’exception toutefois de l’argument selon lequel seuls 60 % de l’activité ont été transférés à la requérante. Néanmoins, la Commission a répondu à cet argument au considérant 153 de la décision attaquée et la requérante n’avance aucun argument afin de contredire les considérations selon lesquelles elle louait à Via Chem Slovakia les biens immobiliers (terrains et bâtiments) qu’elle n’avait pas acquis et qui étaient nécessaires à la production chimique. En outre, elle n’avance aucun argument afin de contester les autres considérations de la Commission selon lesquelles la requérante poursuivait les activités de NCHZ sans aucun changement majeur dans sa politique commerciale, de personnel ou de production (voir point 255 ci-dessus).

258

Or, les considérations de la Commission dans la décision attaquée n’apparaissent pas comme étant entachées d’erreur et permettent de considérer que, en l’espèce, l’ampleur de l’opération, au sens de l’objet du transfert, milite en faveur de l’existence d’une continuité économique entre NCHZ et la requérante. Le fait que cette dernière n’ait pas acquis les biens immobiliers nécessaires à la production chimique, constitués par les terrains et les bâtiments, mais les ait pris en location, ne saurait infirmer cette conclusion, puisque c’est elle qui dispose de l’usage de l’ensemble des éléments permettant la poursuite de l’activité de NCHZ.

4.   Sur la logique économique de l’opération

259

La requérante prétend, en renvoyant au point 33 de la communication de 2007, que le critère relatif à la logique économique de l’opération ne vise pas à garantir que l’acheteur utilise les actifs différemment du vendeur, mais à déterminer si une raison économique autre que le contournement de la décision de récupération justifie l’opération. Ce critère n’aurait pas vocation à être utilisé au-delà de cette indication de contournement et se montrerait particulièrement utile dans les opérations intragroupes. Lorsque, comme en l’espèce, les actifs sont vendus à un tiers dans le cadre d’une procédure d’appel d’offres s’inscrivant dans une procédure de faillite, la motivation économique des parties serait évidente. D’une part, le vendeur, en l’occurrence l’administrateur de faillite, chercherait à obtenir des fonds afin de pouvoir rembourser les dettes de la société en faillite et, pour y parvenir, vendrait, comme en l’espèce, les actifs suivant le principe d’une continuation de l’activité afin d’acquitter les créances détenues par les créanciers, si cette vente doit permettre de générer un revenu plus élevé que la vente des actifs séparés. D’autre part, l’acheteur désirerait réaliser une opération qui, selon lui, laisserait entrevoir la réalisation d’un bénéfice. En tout état de cause, l’assertion de la Commission selon laquelle l’acquisition des actifs de NCHZ ne concordait pas avec les autres activités de la requérante (considérant 166 de la décision attaquée) serait « absurde sous l’angle économique ».

260

La Commission estime que la décision attaquée n’est entachée d’aucune erreur à cet égard. Elle fait valoir que la requérante ne cite aucune jurisprudence visant à étayer son interprétation du critère de la logique économique de l’opération et semble négliger le fait qu’il est mentionné dans la jurisprudence comme l’un des éléments pouvant être pris en considération pour établir une continuité économique entre le bénéficiaire de l’aide d’État et l’acquéreur des actifs de ce bénéficiaire, et non pour démontrer un éventuel contournement de l’ordre de récupération.

261

Dans la décision attaquée, la Commission a observé que le critère de la logique économique de l’opération avait pour objectif de vérifier si l’acquéreur faisait usage des actifs acquis de la même façon que le vendeur ou, au contraire, intégrait ces actifs dans sa propre stratégie commerciale et réalisait ainsi des synergies qui expliquaient son intérêt pour l’acquisition desdits actifs (considérant 164 de la décision attaquée). Elle a relevé que la requérante avait acquis toute la division chimique de NCHZ, à savoir la partie principale de l’activité de cette société, en tant qu’entreprise en activité, avec plus de 95 % de ses salariés ainsi que les droits et obligations y afférents, et que le portefeuille de produits et l’étendue des activités de la requérante étaient identiques à ceux de NCHZ (considérant 165 de la décision attaquée). Elle a, en outre, précisé que la requérante avait annoncé dans la presse son intention de ne procéder à aucun changement majeur quant au mode de fonctionnement de NCHZ et du périmètre de ses activités. Selon la Commission, même si la requérante appartenait à un gros groupe de sociétés, il n’existait apparemment pas d’effets de synergie significatifs avec les autres membres du groupe (considérant 166 de la décision attaquée). Elle a conclu à l’absence de changement de stratégie commerciale et à l’utilisation par la requérante des actifs de la même manière que le vendeur (considérant 167 de la décision attaquée).

262

Tout d’abord, il importe de rappeler que la présence d’un élément intentionnel n’est pas nécessaire pour constater le contournement de l’obligation de récupération par le transfert d’actifs (voir point 211 ci-dessus). Partant, contrairement aux allégations de la requérante, le critère de la logique économique de l’opération, lequel figure parmi les éléments cités dans la jurisprudence (voir point 208 ci-dessus), ne vise pas nécessairement et seulement à établir si une raison économique autre qu’un tel contournement justifie l’opération en cause.

263

Ensuite, il doit être relevé qu’il ne peut être affirmé, comme le soutient la requérante, que la logique économique sous-tendant la cession d’actifs de NCHZ suivant le principe d’une continuation de l’activité de cette société était à l’évidence d’obtenir le produit maximal afin d’acquitter les créances détenues par les créanciers. En effet, ainsi qu’il a été conclu, la procédure d’appel d’offres ayant conduit à la vente à Via Chem Slovakia n’était pas organisée de telle sorte que la vente au prix le plus élevé fût garantie (voir point 246 ci-dessus).

264

Enfin, s’agissant de la vente à la requérante, la Commission a reconnu que certains des membres du groupe de sociétés auquel appartenait la requérante étaient également actifs dans l’industrie chimique, mais a relevé que leurs domaines d’activité étaient différents. Or, la requérante ne remet en cause cette appréciation de l’absence de synergies qu’en procédant par voie d’affirmations non étayées. En tout état de cause, le fait, non contesté, que, comme la Commission l’a estimé, la requérante utilisait simplement les actifs de la même façon que NCHZ, sans changement de stratégie commerciale, mène à la conclusion que la logique économique de l’opération de vente à la requérante était, pour celle-ci, la poursuite des activités précédemment conduites par NCHZ.

265

Partant, la Commission a pu, sans commettre d’erreur, conclure que la logique économique de l’opération constituait l’indice d’une continuité économique entre NCHZ et la requérante.

5.   Sur les autres éléments examinés par la Commission

a)   Sur l’intention d’échapper à la décision de récupération

266

La requérante relève que, au considérant 131 de la décision attaquée, en dépit du fait que la Commission a constaté que, même si elle n’avait aucune preuve directe que l’opération avait pour objectif d’éviter les effets d’une éventuelle décision de récupération, elle a néanmoins également déclaré que les autorités slovaques savaient pertinemment qu’elle enquêtait à titre préliminaire à la suite de la plainte déposée le 17 octobre 2011 et connaissaient l’existence de l’amende de 19,6 millions d’euros infligée pour entente à NCHZ par la décision du 22 juillet 2009. Selon la requérante, la Commission a « insinué » à tort que ces deux points prouvaient indirectement l’intention d’échapper à la récupération. Dans la réplique, la requérante indique prendre acte que la Commission admet que la présente affaire ne porte pas sur un cas de contournement.

267

La Commission, soutenue par l’intervenante, fait valoir qu’elle a conclu à l’existence d’une continuité économique entre NCHZ et la requérante, laquelle pouvait exister indépendamment de l’existence d’une intention précise de contourner une décision de récupération et qu’elle n’a jamais prétendu que la présente affaire portait sur un cas de contournement (considérant 131 de la décision attaquée).

268

Il y a lieu de constater que, dans la décision attaquée, la Commission n’a pas conclu à l’existence d’une continuité économique entre NCHZ et la requérante du fait, notamment, d’une intention de contourner l’obligation de récupération imposée par ladite décision. Partant, l’argument de la requérante est inopérant.

b)   Sur les liens entre le propriétaire initial et le nouveau propriétaire de NCHZ

269

Selon la requérante, les actifs ont été vendus à des tiers dépourvus de tout lien avec NCHZ ou ses actionnaires, ce que la Commission aurait admis, en substance, dans la décision attaquée. Un tel lien entre NCHZ et Via Chem Slovakia n’existerait pas davantage. Dans la réplique, elle fait valoir que la Commission ne présente aucun argument juridique ou économique permettant d’expliquer la raison pour laquelle ce critère ne devrait servir que pour démontrer l’existence d’une continuité économique, et non pour infirmer une telle existence. Ce critère permettrait en réalité de déterminer si la vente a été ou non réalisée en vue de contourner la décision de récupération.

270

La Commission, soutenue par l’intervenante, fait observer que cet élément a été pris en considération afin d’apprécier la continuité économique, mais fait valoir qu’aucune conclusion particulière ne peut être tirée du fait que l’identité des propriétaires demeure inconnue, d’autant plus que la décision attaquée ne porte pas sur l’intention de contourner l’ordre de récupération. Dans la duplique, elle conteste, en se référant à l’arrêt du 28 mars 2012, Ryanair/Commission (T‑123/09, EU:T:2012:164, point 156), l’argument de la requérante selon lequel, en l’absence d’identité des propriétaires, aucun contournement et, partant, aucune continuité économique ne peuvent être établis.

271

Dans la décision attaquée, la Commission a indiqué qu’elle « suppos[ait] qu’il n’exist[ait] aucun lien entre les anciens et les nouveaux propriétaires de […] NCHZ cédée à [la requérante], dans la mesure où elle ne dispos[ait] d’aucune preuve du contraire » (considérant 162 de la décision attaquée).

272

Il doit être relevé que, parmi les éléments pertinents cités dans la jurisprudence, figure l’identité des actionnaires ou des propriétaires de l’entreprise qui reprend et de l’entreprise de départ (voir point 208 ci-dessus). Ainsi qu’il ressort des considérants 159 à 162 et 168 à 170 de la décision attaquée, si la Commission a examiné cet élément, elle n’a pas retenu, à juste titre, qu’il constituait un indice de l’existence d’une continuité économique entre NCHZ et la requérante. Elle a néanmoins estimé, et ce également à juste titre, dans le cadre de l’appréciation globale des divers éléments examinés, que l’absence de lien entre les anciens et les nouveaux propriétaires de NCHZ ne permettait pas d’exclure l’existence d’une telle continuité économique.

273

Par ailleurs, concernant l’argument de la requérante selon lequel cet élément permettrait de déterminer si la vente a été ou non réalisée en vue de contourner la décision de récupération, il doit être rejeté comme étant inopérant pour la même raison que celle exposée au point 268 ci-dessus.

c)   Sur le moment de la vente

274

Selon la requérante, les créanciers, l’administrateur et le súd v Trenčíne (tribunal de Trenčín) ont, bien avant un quelconque examen en matière d’aides d’État, décidé de vendre les actifs suivant le principe d’une continuation de l’activité de NCHZ par le biais d’une procédure d’appel d’offres. En outre, la Commission n’alléguerait pas que l’administrateur, le súd v Trenčíne (tribunal de Trenčín), NCHZ, Via Chem Slovakia ou la requérante avaient connaissance, au moment de la ou des ventes, de la procédure qu’elle avait diligentée. Or, la connaissance du risque d’une décision de récupération d’aide d’État constituerait une condition nécessaire à l’existence d’un contournement. Eu égard à la formulation du considérant 168 de la décision attaquée, il devrait être compris que la Commission n’a pas souhaité fonder sa conclusion sur le moment de la vente. Elle aurait concédé implicitement que, en l’espèce, cet élément militait contre l’existence d’un contournement.

275

La Commission, soutenue par l’intervenante, fait observer que ce n’est pas sur le fondement de cet élément qu’elle a constaté l’existence d’une continuité économique entre NCHZ et la requérante, le considérant 163 de la décision attaquée comportant le simple enregistrement d’un fait. En outre, elle prétend ne pas avoir cherché à prouver une intention de contourner l’ordre de récupération. Dans la duplique, elle allègue que la thèse de la requérante selon laquelle l’obligation de récupération ne pourrait jamais être étendue à un acquéreur non averti, en dépit de l’existence objective d’une continuité économique, ne trouve aucun appui dans la jurisprudence, laquelle ne permettrait pas non plus d’avaliser l’idée que la continuité économique ne peut être établie lorsque le transfert des actifs intervient avant l’ouverture de la procédure formelle d’examen.

276

Au considérant 163 de la décision attaquée, la Commission a examiné le critère du moment de la vente. Elle a observé que « [l]a vente s’[étai]t déroulée après [l’ouverture d’]une enquête préliminaire sur la plainte et [la] transmis[sion de] ses résultats à la République slovaque pour observations » et que cette dernière « était tout au moins [informée] que les mesures considérées pouvaient être considérées comme une aide illégale et incompatible qui devrait être récupérée ».

277

Il convient de constater que, parmi les éléments pertinents cités dans la jurisprudence, figure « le moment où le transfert a lieu (après le début de l’enquête, l’ouverture de la procédure ou la décision finale) » (voir point 208 ci-dessus). Si la Commission a ainsi examiné cet élément au considérant 163 de la décision attaquée, elle ne l’a pas cité, aux considérants 168 à 170 de la décision attaquée, lesquels comportent ses conclusions quant à l’existence d’une continuité économique, comme constituant un indice d’une telle continuité en l’espèce.

278

Par ailleurs, contrairement à l’affirmation de la requérante, il ne ressort nullement de la décision attaquée que la Commission aurait concédé implicitement que le moment auquel la vente était intervenue militait contre l’existence d’un contournement. Celle-ci a, en effet, seulement indiqué que, même si elle ne disposait d’aucune preuve directe que l’opération avait pour but d’éviter les effets d’une éventuelle décision de récupération, « les autorités slovaques étaient parfaitement au courant qu[’elle] menait une enquête préliminaire sur la plainte introduite contre NCHZ depuis le 17 octobre 2011 [considérant 2 de la décision attaquée] et qu’il existait un droit au versement de l’amende de 19,6 millions d’[euros] infligée pour entente à NCHZ par la décision du 22 juillet 2009 [considérant 12 de la décision attaquée] » (considérant 131 de la décision attaquée).

279

En outre, il doit être constaté que, par l’argument selon lequel la connaissance d’une décision de récupération d’aide d’État, ou du moins du risque d’une telle décision, constitue une condition nécessaire à l’existence d’un contournement de récupération, la requérante invoque la réalisation d’une vente dans le but d’échapper à la récupération de l’aide d’État. Or, cet argument doit être rejeté comme étant inopérant pour la même raison que celle exposée au point 268 ci-dessus.

280

À titre surabondant, il doit être précisé que, comme le soutient la requérante, la décision de vendre NCHZ selon le principe d’une continuation de l’activité avait été prise avant tout indice du fait que la Commission menait un examen concernant une éventuelle aide d’État. Même en retenant la date de l’appel d’offres de 2010 ou, après l’échec de celui-ci, la date de l’ordonnance exécutoire du súd v Trenčíne (tribunal de Trenčín) imposant à l’administrateur de procéder à la vente en juin 2011, il doit être constaté que la Commission n’avait alors pas reçu la plainte de l’intervenante. En outre, n’est pas nécessairement significatif le fait que le compromis de vente avec Via Chem Slovakia ait été finalement conclu le 16 janvier 2012, à savoir le jour où la Commission a adressé au gouvernement la version slovaque de la plainte, laquelle avait déjà été communiquée, dans une langue autre que le slovaque, le 17 octobre 2011. En revanche, il doit être observé que, lors de la vente de NCHZ à la requérante, en août 2012, l’existence de la plainte était connue et l’examen précédant l’ouverture de la phase formelle d’examen était en cours. La requérante relève elle-même que l’administrateur avait eu un premier indice de l’existence d’un examen préliminaire en matière d’aides par la Commission du fait d’un courrier du 2 avril 2012, qui lui avait été remis le 10 avril 2012. Dès lors, lors de la seconde vente, Via Chem Slovakia et la requérante auraient dû en avoir eu connaissance, car, s’agissant de cette dernière, contrairement à ses affirmations lors de l’audience, en réponse à une question du Tribunal, il doit être relevé que tout opérateur diligent est censé s’informer pleinement de la situation économique de l’entité dont il envisage l’achat.

6.   Sur l’appréciation globale de la Commission quant à l’existence d’une continuité économique entre NCHZ et la requérante

281

Dans la décision attaquée, la Commission a fondé sa conclusion de l’existence d’une continuité économique sur le fait que les prix versés lors des deux ventes successives ne constituaient probablement pas des prix de marché ainsi que sur l’ampleur de l’opération, au sens de l’objet du transfert, et la logique économique de l’opération (considérants 168 et 169 de la décision attaquée).

282

Il découle de l’analyse de la décision attaquée que la Commission n’a pas commis d’erreur en estimant, en premier lieu, que tant l’ampleur de l’opération (l’objet du transfert) que sa logique économique pouvaient constituer des indices de l’existence d’une continuité économique entre NCHZ et la requérante (voir points 254 à 258 et 261 à 265 ci-dessus) et, en second lieu, qu’il ne pouvait être tenu pour certain que les deux ventes successives avaient été réalisées au prix du marché (voir point 251 ci-dessus).

283

Dans ce contexte, eu égard au fait que, conformément à la jurisprudence, d’une part, à supposer que le prix du transfert fût conforme au prix du marché, il ne constituait qu’un élément dans l’analyse de l’existence d’une éventuelle continuité économique et, d’autre part, le versement d’un prix conforme aux conditions du marché peut ne pas suffire pour neutraliser l’avantage concurrentiel lié au bénéfice des aides illégales, il doit être considéré que, en raison des circonstances de l’espèce, la Commission a pu conclure à bon droit à l’extension de l’obligation de récupération à la requérante, indépendamment de toute constatation de l’intention d’un contournement.

284

Par conséquent, le quatrième moyen doit être rejeté.

G. Sur le cinquième moyen, invoqué à titre subsidiaire, tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 1, et de l’article 108, paragraphe 2, TFUE, ainsi que de l’article 14, paragraphe 1, du règlement no 659/1999, du fait de l’absence de limitation de l’extension de l’obligation de récupération de l’aide d’État alléguée à la requérante à 60 % du montant de ladite aide

285

La requérante fait valoir, à titre subsidiaire, que la décision attaquée est entachée d’illégalité, en ce que la Commission n’a pas limité l’obligation de récupération à 60 % du montant de l’aide d’État prétendument octroyée à NCHZ. Elle soutient n’avoir pu être bénéficiaire de l’intégralité dudit montant, puisqu’elle n’a racheté auprès de Via Chem Slovakia que 60 % des actifs de NCHZ et qu’elle ne bénéficie pas non plus indirectement de la fraction restée la propriété de Via Chem Slovakia, car elle verse un loyer qui a été fixé aux conditions du marché.

286

La Commission, soutenue par l’intervenante, conteste le bien-fondé de l’argumentation de la requérante.

287

Dans la décision attaquée, la Commission a précisé que la requérante « lou[ait] à […] Via Chem Slovakia les biens imm[obiliers] (terrains et bâtiments) nécessaires à la production chimique » et que, « [à] l’exception des biens imm[obiliers], tous les actifs et tous les droits et obligations rattachés à l’entreprise cédée [avaie]nt été repris par [la requérante, qui] exploit[ait] donc […] NCHZ et poursui[vai]t avec le même portefeuille de produits » (considérant 153 de la décision attaquée). Elle a conclu que « [l]e fait qu’une partie de ces actifs soient utilisés en vertu d’un contrat de location[,] plutôt qu’au titre d’un droit de propriété direct[,] ne change[ait] rien au fait que [la requérante] poursui[vai]t tout bonnement les activités économiques de NCHZ dans la même étendue qu’avant l’opération » (considérant 156 de la décision attaquée).

288

Ainsi qu’il a été jugé, la Commission a pu conclure à bon droit à l’extension de l’obligation de récupération à la requérante en raison de l’existence d’une continuité économique entre NCHZ et celle‑ci. Or, cette continuité est fondée, entre autres motifs, sur le fait que la requérante disposait de l’ensemble des droits et des obligations de NCHZ afin de poursuivre les mêmes activités.

289

De plus, ainsi que la Commission le fait observer, la requérante ne conteste pas le fait qu’elle louait les biens immobiliers nécessaires à la production chimique qu’elle n’a pas acquis, lesquels constituaient les 40 % restants, détenus par Via Chem Slovakia. Or, la circonstance qu’elle ne possédait pas, mais louait, selon son affirmation, au prix du marché, ces biens immobiliers ne modifiait en rien le fait qu’elle pouvait les utiliser à son bénéfice aux fins de poursuite des activités précédemment conduites par NCHZ.

290

Partant, eu égard aux circonstances de l’espèce ayant mené à la conclusion de l’existence d’une continuité économique entre NCHZ et la requérante, il n’y avait pas lieu de limiter l’extension de l’obligation de récupération à 60 % et le cinquième moyen doit être rejeté.

291

Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de rejeter le présent recours.

Sur les dépens

292

Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

293

Conformément à l’article 138, paragraphe 3, du règlement de procédure, AlzChem, intervenue au soutien des conclusions de la Commission, supportera ses propres dépens.

 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

 

1)

Le recours est rejeté.

 

2)

Fortischem a.s. est condamnée à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission européenne.

 

3)

AlzChem AG supportera ses propres dépens.

 

Berardis

Papasavvas

Spineanu-Matei

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 septembre 2019.

Signatures

Table des matières

 

I. Antécédents du litige

 

II. Décision attaquée

 

III. Procédure

 

IV. Conclusions des parties

 

V. En droit

 

A. Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE concernant la conclusion de la Commission relative à l’existence d’une aide d’État consentie à NCHZ

 

B. Sur les première et deuxième branches du premier moyen, tirées de l’absence, respectivement, d’un transfert de ressources d’État et d’un avantage économique conféré à NCHZ

 

1. Rappel de la jurisprudence

 

2. Décision attaquée

 

3. Sur la qualification d’aide d’État par la Commission de la première mesure

 

a) Sur les conditions de l’application de la loi sur les sociétés stratégiques à NCHZ du fait de sa qualification de « société stratégique » et les conséquences attachées à cette application

 

b) Sur l’allégation de la requérante selon laquelle la décision de l’État slovaque de qualifier NCHZ de « société stratégique » satisfaisait au critère de l’opérateur en économie de marché

 

c) Sur les allégations de la requérante concernant l’identité de situation si NCHZ avait été soumise au régime de droit commun de la faillite

 

1) Sur l’allégation selon laquelle le premier administrateur s’était prononcé en faveur de la poursuite de l’exploitation de NCHZ avant l’adoption de la loi sur les sociétés stratégiques

 

2) Sur l’allégation selon laquelle la décision initiale du premier administrateur aurait été confirmée par le comité compétent

 

3) Sur l’allégation selon laquelle une décision du comité compétent aurait donné la même sécurité aux clients et aux fournisseurs que la loi sur les sociétés stratégiques

 

4) Sur l’allégation selon laquelle NCHZ n’a bénéficié d’aucun avantage supplémentaire dans le cadre du maintien de son activité imposée par la loi sur les sociétés stratégiques

 

d) Conclusion

 

C. Sur le deuxième moyen, tiré de la méconnaissance de l’obligation de procéder à un examen diligent et impartial ainsi que de la violation de l’obligation de coopération pesant sur la Commission

 

D. Sur la troisième branche du premier moyen, tirée de l’erreur manifeste d’appréciation lors du calcul du montant de l’aide d’État alléguée

 

E. Sur le sixième moyen, tiré de la violation de l’article 296 TFUE concernant la conclusion de la Commission relative à l’existence d’une continuité économique

 

F. Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 1, et de l’article 108, paragraphe 2, TFUE ainsi que de l’article 14, paragraphe 1, du règlement no 659/1999 du fait de l’extension de l’obligation de récupération de l’aide d’État alléguée à la requérante

 

1. Observations liminaires

 

2. Sur le prix de vente de NCHZ

 

a) Sur la charge de la preuve

 

b) Sur la vente à Via Chem Slovakia

 

1) Sur la présomption alléguée d’une vente réalisée au prix du marché lorsqu’elle intervient dans le cadre d’une procédure de faillite sous le contrôle d’une juridiction

 

2) Sur la prétendue garantie d’un prix de vente le plus élevé possible du fait de la vente dans le cadre d’une procédure d’appel d’offres ouverte, transparente et inconditionnelle

 

c) Sur la vente par Via Chem Slovakia à la requérante

 

d) Conclusion

 

3. Sur l’ampleur de l’opération

 

4. Sur la logique économique de l’opération

 

5. Sur les autres éléments examinés par la Commission

 

a) Sur l’intention d’échapper à la décision de récupération

 

b) Sur les liens entre le propriétaire initial et le nouveau propriétaire de NCHZ

 

c) Sur le moment de la vente

 

6. Sur l’appréciation globale de la Commission quant à l’existence d’une continuité économique entre NCHZ et la requérante

 

G. Sur le cinquième moyen, invoqué à titre subsidiaire, tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 1, et de l’article 108, paragraphe 2, TFUE, ainsi que de l’article 14, paragraphe 1, du règlement no 659/1999, du fait de l’absence de limitation de l’extension de l’obligation de récupération de l’aide d’État alléguée à la requérante à 60 % du montant de ladite aide

 

Sur les dépens


( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.

Top