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Document 62015FJ0041

    Arrêt du Tribunal de la fonction publique (troisième chambre) du 11 avril 2016.
    FN e.a. contre Collège européen de police (CEPOL).
    Fonction publique – Personnel du CEPOL – Agents temporaires – Agents contractuels – Lieu d’affectation correspondant au siège du CEPOL – Déménagement du CEPOL à Budapest (Hongrie) – Changement corrélatif du lieu d’affectation des agents – Conséquences contractuelles – Nécessité du consentement des agents – Coefficient correcteur applicable au nouveau lieu d’affectation – Confiance légitime – Principe de bonne administration.
    Affaire F-41/15 DISS II.

    Court reports – Reports of Staff Cases

    ECLI identifier: ECLI:EU:F:2016:70

    ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE DE L’UNION EUROPÉENNE (troisième chambre)

    11 avril 2016 ( *1 )

    «Fonction publique — Personnel du CEPOL — Agents temporaires — Agents contractuels — Lieu d’affectation correspondant au siège du CEPOL — Déménagement du CEPOL à Budapest (Hongrie) — Changement corrélatif du lieu d’affectation des agents — Conséquences contractuelles — Nécessité du consentement des agents — Coefficient correcteur applicable au nouveau lieu d’affectation — Confiance légitime — Principe de bonne administration»

    Dans l’affaire F‑41/15 DISS II,

    ayant pour objet un recours introduit au titre de l’article 270 TFUE,

    FN, agent temporaire du Collège européen de police, demeurant à Budapest (Hongrie),

    FP, agent temporaire du Collège européen de police, demeurant à Bratislava (Slovaquie),

    FQ, agent temporaire du Collège européen de police, demeurant à Les Fonts Benitachell (Espagne),

    représentés par Mes L. Levi et A. Blot, avocats,

    parties requérantes,

    contre

    Collège européen de police (CEPOL), représenté par MM. F. Bánfi et R. Woldhuis, en qualité d’agents, assistés de Me B. Wägenbaur, avocat,

    partie défenderesse,

    LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE (troisième chambre),

    composé de MM. S. Van Raepenbusch, président, H. Kreppel et J. Svenningsen (rapporteur), juges,

    greffier : Mme W. Hakenberg,

    vu la procédure écrite,

    vu la décision prise, avec l’accord des parties, de statuer sans audience en application de l’article 59, paragraphe 2, du règlement de procédure,

    rend le présent

    Arrêt

    1

    Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 9 mars 2015, FN, FP, FQ et quatre autres requérants, à savoir FK, FL, FM et FO, ont introduit un recours enregistré sous la référence F‑41/15 et tendant, notamment, à :

    l’annulation de la décision no 17/2014/DIR du directeur du Collège européen de police (CEPOL ou, ci‑après, l’« Agence »), du 23 mai 2014, relative au déménagement du CEPOL à Budapest (Hongrie) (ci‑après la « décision attaquée ») ;

    l’annulation des différentes décisions du CEPOL, du 28 novembre 2014, rejetant leurs réclamations, introduites individuellement entre les 8 et 21 août 2014, contre la décision attaquée ;

    l’indemnisation par le CEPOL de préjudices matériels et moraux.

    Cadre juridique

    1. Sur l’engagement des agents temporaires et contractuels

    2

    Aux termes de l’article 2, sous a), du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (ci‑après le « RAA »), est considéré comme agent temporaire, au sens dudit régime, « [l]’agent engagé en vue d’occuper un emploi compris dans le tableau des effectifs annexé à la section du budget afférente à chaque institution et auquel les autorités budgétaires ont conféré un caractère temporaire ».

    3

    Sous le chapitre relatif à la « [f]in de l’engagement », l’article 47 du RAA prévoit :

    « Indépendamment du cas du décès de l’agent temporaire, l’engagement de ce dernier prend fin :

    a)

    à la fin du mois au cours duquel l’agent atteint l’âge de 66 ans […] ; ou

    b)

    pour les contrats à durée déterminée :

    i)

    à la date fixée dans le contrat ;

    ii)

    à l’issue du préavis fixé dans le contrat et donnant à l’agent ou à l’institution la faculté de résilier celui‑ci avant son échéance. Le préavis ne peut être inférieur à un mois par année de service, avec un minimum d’un mois et un maximum de trois mois. Pour l’agent temporaire dont l’engagement a été renouvelé, le maximum est de six mois. […] En cas de résiliation du contrat par l’institution, l’agent a droit à une indemnité égale au tiers de son traitement de base pour la période comprise entre la date de cessation de ses fonctions et la date à laquelle expirait son contrat ;

    iii)

    […]

    c)

    pour les contrats à durée indéterminée :

    i)

    à l’issue du préavis fixé dans le contrat, le préavis ne pouvant être inférieur à un mois par année de service accompli, avec un minimum de trois mois et un maximum de dix mois. […] ;

    […] »

    4

    En vertu de l’article 119 du RAA, l’article 47 du RAA est applicable par analogie aux agents contractuels.

    2. Sur les coefficients correcteurs

    5

    Aux termes de l’article 64, premier alinéa, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci‑après le « statut »), applicable par analogie aux agents temporaires et aux agents contractuels en vertu de l’article 20, paragraphe 1, et de l’article 92 du RAA, « [l]a rémunération du fonctionnaire exprimée en euros, après déduction des retenues obligatoires visées au […] statut ou aux règlements pris pour son application, est affectée d’un coefficient correcteur supérieur, inférieur ou égal à 100 %, selon les conditions de vie dans les différents lieux d’affectation ».

    6

    Selon l’actualisation annuelle des coefficients correcteurs applicables à compter du 1er juillet 2014 aux rémunérations et aux pensions des fonctionnaires et autres agents de l’Union européenne (JO 2014, C 444, p. 10), le 1er octobre 2014, le coefficient correcteur applicable aux rémunérations était de 71,4 % pour la Hongrie et de 150,7 % pour le Royaume‑Uni.

    Faits à l’origine du litige

    1. Sur les situations contractuelles des requérants dans la présente affaire

    7

    FN a été engagé par le CEPOL en qualité d’agent temporaire pour occuper un emploi relevant du groupe de fonctions des assistants (AST), de grade AST 3, à compter du 1er avril 2009 et pour une période de quatre ans, avec possibilité de renouvellement unique du contrat pouvant conduire à une durée d’engagement maximale de six années. Le contrat d’engagement précisait que l’intéressé était engagé au titre de l’article 2 du RAA. Par un avenant du 1er mars 2013, FN et le CEPOL ont toutefois décidé, nonobstant les termes du contrat initial, que la durée du contrat d’engagement serait prolongée d’une période de cinq ans, allant du 1er avril 2013 au 31 mars 2018, portant ainsi la période totale d’engagement à neuf ans.

    8

    FP a été engagée par le CEPOL, au moyen d’un contrat conclu au titre de l’article 2, sous a), du RAA, en qualité d’agent temporaire pour occuper un emploi du groupe de fonctions des administrateurs (AD) de grade AD 5 pour une période de cinq ans allant du 1er décembre 2012 au 30 novembre 2017, assorti d’une possibilité de renouvellement du contrat d’engagement « conformément aux règles applicables au sein du CEPOL ».

    9

    FQ a été engagée par le CEPOL, au moyen d’un contrat conclu au titre de l’article 2, sous a), du RAA, en qualité d’agent temporaire pour occuper un emploi de grade AST 3 pour une période de quatre ans allant du 1er septembre 2010 au 31 août 2014, avec possibilité de renouvellement unique pouvant conduire à une durée d’engagement maximale de six ans, soit jusqu’au 31 août 2016. Par avenant du 27 février 2014, FQ et le CEPOL ont toutefois contractuellement décidé de renouveler le contrat pour une période de cinq ans, allant du 1er septembre 2014 au 31 août 2019, portant ainsi la période totale d’engagement à neuf ans.

    2. Sur le changement de siège du CEPOL

    10

    Par décision du Conseil 2000/820/JAI, du 22 décembre 2000, portant création du [CEPOL] (JO 2000, L 336, p. 1), le Conseil de l’Union européenne a décidé de la création de cette agence.

    11

    Aux termes de l’article 1er, sous a), de la décision prise du commun accord des représentants des États membres réunis au niveau des chefs d’État ou de gouvernement, du 13 décembre 2003, relative à la fixation des sièges de certains organismes de l’Union européenne (JO 2004, L 29, p. 15), le siège du CEPOL a été fixé à Bramshill (Royaume‑Uni).

    12

    Selon l’article 4 de la décision du Conseil 2005/681/JAI, du 20 septembre 2005, instituant le [CEPOL] et abrogeant la décision 2000/820/JAI (JO 2005, L 256, p. 63), il était également prévu que « [l]e siège du CEPOL [était] fixé à Bramshill, au Royaume‑Uni ».

    Sur la décision politique adoptée au niveau des chefs d’État ou de gouvernement des États membres et au sein du Conseil

    13

    Par lettre du 12 décembre 2012 adressée au directeur du CEPOL, et tout en adressant en substance la même lettre au commissaire européen en charge des Affaires intérieures, le ministre de l’Intérieur du Royaume‑Uni (« Home Secretary », ci‑après le « ministre de l’Intérieur ») a informé le directeur du CEPOL de la décision de ce ministère de fermer le centre national de formation de la police britannique implanté sur le site de Bramshill, site qui accueillait également les locaux du CEPOL. Cette lettre indiquait que le site en question serait vendu d’ici 2014 et que, jusqu’à cette date, le CEPOL se verrait garantir un contrat de bail de douze mois à compter du 1er mars 2013. Le ministre de l’Intérieur soulignait qu’il était au courant de l’intention de la Commission européenne de proposer, au début de l’année 2013, l’adoption d’un nouveau règlement gouvernant le fonctionnement du CEPOL ou prévoyant, éventuellement, la fusion du CEPOL avec l’Office européen de police (Europol). Il précisait que ceci serait une opportunité pour les États membres de s’entendre sur la détermination d’un nouveau siège pour le CEPOL si celui‑ci devait rester une agence de l’Union à part entière.

    14

    Par courriel du même 12 décembre 2012, FQ a, au nom du directeur de l’Agence, communiqué la lettre susmentionnée du ministre de l’Intérieur à l’ensemble du personnel du CEPOL. Dans ce courriel, FQ indiquait notamment que cette communication s’inscrivait dans le prolongement de la réunion du personnel qui avait eu lieu le même jour au sujet du déménagement du CEPOL.

    15

    Par lettre du 8 février 2013 adressée au directeur du CEPOL, le ministre de l’Intérieur a tenu à rassurer ce dernier sur le fait que l’Agence pourrait continuer à occuper le site de Bramshill au moins jusqu’au mois de mars 2014. Par courriel du 12 février 2013, adressé au nom du directeur de l’Agence à l’ensemble du personnel du CEPOL, FQ a communiqué la lettre susmentionnée.

    16

    Le 10 juin 2013, une deuxième réunion du personnel du CEPOL a été organisée au sujet du changement du siège de l’Agence. FN et FQ ont participé à cette réunion, FQ ayant d’ailleurs été chargée d’en rédiger le compte rendu, tandis que FP était absente. Lors de cette réunion, le personnel a été informé de ce que, d’une part, une large majorité des États membres s’était opposée à l’idée de fusionner le CEPOL et Europol et, d’autre part, plusieurs États membres avaient manifesté leur intérêt à accueillir le CEPOL sur leur territoire.

    17

    Le 23 septembre 2013, une troisième réunion du personnel du CEPOL a été organisée, réunion à laquelle ont participé FN et FQ, cette dernière ayant à nouveau été chargée d’en rédiger le compte rendu. La présence de FP à cette réunion n’est pas attestée par ledit compte rendu, son nom ne figurant pas sur la liste des présents. À cette occasion, le personnel a été informé du fait que sept États membres, à savoir l’Irlande, la Grèce, l’Espagne, l’Italie, la Hongrie, les Pays‑Bas et la Finlande, avaient soumis leur candidature pour accueillir le CEPOL sur leur territoire.

    18

    Le 8 octobre 2013, en marge d’une session de la formation « Justice et affaires intérieures » du Conseil, les États membres ont décidé d’un commun accord que, dès qu’il aurait quitté le site de Bramshill, le CEPOL serait hébergé à Budapest et qu’il continuerait d’être une agence de l’Union à part entière.

    19

    Le 4 décembre 2013, une initiative, adoptée sur le fondement de l’article 76, sous b), et de l’article 87, paragraphe 2, sous b), TFUE par 25 États membres lors d’une session de la formation « Justice et affaires intérieures » du Conseil du 13 novembre 2013, a été présentée en vue de modifier la décision 2005/681/JAI. La Commission a, le 16 janvier 2014, formulé son avis sur ladite initiative (COM/2014/07 final) tandis que le Parlement européen a, le 14 avril 2014, rendu son avis en première lecture.

    20

    Le 6 mai 2014, un compromis a été dégagé entre le Conseil et le Parlement et a été approuvé par le Comité des représentants permanents des États membres permettant l’adoption par le Conseil et le Parlement, le 15 mai 2014, du règlement (UE) no 543/2014 du Parlement européen et du Conseil modifiant la décision 2005/681/JAI […] (JO 2014, L 163, p. 5).

    21

    Les considérants 2, 3 et 9 du règlement no 543/2014 se lisent comme suit :

    22

    En application de l’article 1er du règlement no 543/2014, l’article 4 de la décision 2005/681/JAI a été remplacé et prévoit désormais que « [l]e siège du CEPOL est fixé à Budapest, en Hongrie ».

    Sur la mise en œuvre du règlement no 543/2014 par le CEPOL

    23

    Par lettre du 25 avril 2014, le directeur du CEPOL a demandé à la direction générale « Affaires intérieures » de la Commission son avis sur certaines questions relatives au transfert du personnel inhérent au transfert du siège du CEPOL à Budapest. À la suite d’une réunion tenue le 12 mai 2014 en présence notamment du directeur de la direction « Gestion des crises et sécurité intérieure » de la direction générale « Affaires intérieures » (ci‑après le « directeur de tutelle ») et du directeur du CEPOL, le premier a, par lettre du 16 mai 2014, rappelé au directeur du CEPOL que l’article 7 du RAA permettait à l’Agence de décider, de manière dûment motivée, d’affecter un agent à tout autre lieu de travail dans l’intérêt du service, indépendamment de la mention dans le contrat d’engagement dudit agent d’un lieu d’affectation précis. Dans le cas présent, le directeur de tutelle considérait que le transfert du siège du CEPOL constituait évidemment une justification valable à une décision unilatérale de l’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement (ci‑après l’« AHCC ») de réaffecter un agent, sans nécessité de conclure un avenant au contrat d’engagement ni d’octroyer de compensation financière pour une fin prématurée du contrat. Selon l’avis du service juridique de la Commission, exprimé lors de la réunion du 12 mai 2014, un agent refusant sa nouvelle affectation à Budapest avait la possibilité de démissionner.

    24

    Le directeur de tutelle soulignait, dans sa lettre du 16 mai 2014, qu’aucune disposition du RAA ne régissait la question du délai dans lequel le CEPOL devait aviser son personnel du déménagement de l’Agence, mais qu’il fallait s’en tenir au principe de bonne administration. Or, à cet égard, compte tenu, d’une part, des démarches d’information et des entretiens individualisés des membres du personnel de l’Agence conduits par le directeur du CEPOL ainsi que, d’autre part, des informations diffusées en temps utile quant à l’évolution des discussions au niveau des États membres sur la détermination du nouveau siège du CEPOL, le directeur de tutelle considérait que le personnel du CEPOL était au courant depuis un certain temps de l’imminence du transfert du siège du CEPOL à Budapest. En ce qui concerne le temps de réflexion devant être donné aux membres du personnel pour indiquer leur choix individuel de poursuivre leur engagement contractuel auprès du nouveau siège à Budapest, le directeur de tutelle indiquait qu’il n’existait pas non plus de disposition spécifique dans le RAA sur cette question, mais qu’il fallait cependant donner le plus de temps possible au personnel, tout en prenant en compte les besoins organisationnels du CEPOL de savoir à une date donnée quels membres du personnel rejoindraient le nouveau siège et quels membres ne le rejoindraient pas.

    25

    Toujours dans sa lettre du 16 mai 2014, le directeur de tutelle rappelait au directeur du CEPOL que le statut, notamment les dispositions de l’annexe VII du statut, qui s’appliquent par analogie aux agents temporaires en vertu de l’article 20, paragraphe 2, du RAA, prévoyait un certain nombre d’indemnités en lien avec le déménagement du personnel du CEPOL à Budapest, notamment l’indemnité d’installation, les indemnités journalières, le remboursement des frais de déménagement, le remboursement des frais de voyage et le droit de conserver le bénéfice de l’indemnité d’installation versée en lien avec la prise de fonctions à Bramshill.

    26

    Quant à la proposition du directeur du CEPOL de reclasser l’ensemble du personnel de l’Agence à l’occasion de son transfert à Budapest afin de limiter la baisse de rémunération nette des agents en raison de l’application à leurs traitements de base du coefficient correcteur prévu pour la Hongrie, le directeur de tutelle indiquait que, en vertu de l’article 54 du RAA, le reclassement ne pouvait se faire qu’« au grade immédiatement supérieur » et « exclusivement au choix, parmi les agents [justifiant d’un minimum de deux ans d’ancienneté dans leur grade], après examen comparatif des mérites de [ces] agents ».

    27

    À cet égard, le directeur de tutelle contestait la prémisse du directeur du CEPOL, l’estimant non étayée, selon laquelle les agents du CEPOL seraient employés à un niveau inférieur par rapport aux autres agences de l’Union, avec des différences de deux ou trois grades. Par ailleurs, le directeur de tutelle soulignait qu’une modification dans le tableau des effectifs (« establishment plan »), basée sur la différence de coefficient correcteur entre la Hongrie et le Royaume‑Uni, était inacceptable puisqu’elle serait contraire aux règles statutaires. Or, rappelant que « [l]’adaptation du salaire est un mécanisme mondial qui suit de près les différences relatives de coût de la vie entre les États membres », le directeur de tutelle estimait qu’« [i]l [était] par conséquent incorrect d’affirmer qu’il y a[vait] une “perte de revenus”, étant donné que la baisse du salaire nominal [en raison de l’affectation en Hongrie] correspond[ait] à l’augmentation du pouvoir d’achat ».

    28

    Le 23 mai 2014, le directeur du CEPOL a, en sa qualité d’AHCC, adopté la décision attaquée, laquelle prévoit à l’article 1er, relatif à la date du déménagement, qu’« [i]l est attendu de tout le personnel […] qu’il prenne ses fonctions au nouveau quartier général du CEPOL […] à Budapest le 1er octobre 2014 ou à une date convenue entre le [d]irecteur et le membre du personnel [concerné et que l]e non‑respect de cette instruction sera considéré comme une démission avec effet au 30 septembre 2014 ».

    29

    L’article 2 de la décision attaquée prévoit que « [chaque membre du] personnel est invité à indiquer au [d]irecteur par écrit, pour le 30 juin 2014, son intention de rejoindre le CEPOL à son nouveau [siège ; d]ans le cas où le membre du personnel [concerné] informe le [d]irecteur, dans ce délai, qu’il [ou] elle ne souhaite pas déménager à Budapest, le [d]irecteur peut utiliser cette information pour lancer une procédure afin d’établir une liste de réserve concernant le poste de ce membre du personnel ». Ce même article précise que les délais de préavis pour démissionner prévus dans les contrats de travail respectifs des membres du personnel pouvaient être négociés avec le directeur du CEPOL.

    30

    En ce qui concerne l’information des membres du personnel, il ressort de l’article 3 de la décision attaquée que le directeur du CEPOL devait fournir par écrit les informations pertinentes à chaque membre du personnel pour le 10 juin 2014 et que, en vue de faciliter la mise en œuvre de la décision attaquée, chaque membre du personnel pouvait solliciter une entrevue personnelle avec son supérieur direct.

    31

    L’article 4, paragraphe 2, de la décision attaquée précise pour sa part que le personnel qui ne déménagerait pas avec l’Agence à Budapest aurait droit à des congés spéciaux dans les conditions prévues par la réglementation applicable au personnel.

    32

    Par lettres du 30 juin 2014, FN, FP et FQ ont indiqué au directeur du CEPOL qu’ils souhaitaient poursuivre leurs relations contractuelles d’emploi respectives au nouveau siège du CEPOL à Budapest, tout en soulignant que cette réponse sur leur intention, formulée dans le délai prévu par la décision attaquée, ne préjugeait pas de la légalité de cette décision portant, selon eux, modification unilatérale de leur lieu d’emploi défini contractuellement ni de leur possibilité de contester la légalité de cette décision.

    Sur la procédure précontentieuse

    33

    Par lettre du 13 août 2014, FP a, au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut, introduit une réclamation contre la décision attaquée en faisant valoir que, par cette décision, le directeur du CEPOL avait unilatéralement et, partant, illégalement modifié les conditions contractuelles de son engagement. En effet, son contrat d’engagement prévoyant Bramshill comme lieu d’affectation, elle aurait eu des attentes salariales légitimes dépendant de l’application du coefficient correcteur prévu pour le Royaume‑Uni. Partant, la décision attaquée méconnaîtrait son contrat d’engagement et le principe de confiance légitime.

    34

    Par lettre du 18 août 2014, FQ a, au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut, introduit une réclamation contre la décision attaquée en faisant valoir que le directeur du CEPOL ne pouvait pas, au moyen de la décision attaquée, modifier unilatéralement et sans compensation financière les termes de son contrat prévoyant, notamment, Bramshill comme lieu de travail. FQ contestait la pertinence, dans le contexte de l’espèce, de la jurisprudence résultant de l’arrêt du 11 juillet 1996, Aubineau/Commission (T‑102/95, EU:T:1996:104, ci‑après l’« arrêt Aubineau »), et elle faisait valoir que la modification unilatérale de son lieu d’emploi constituait un évènement anormal et imprévisible. Ainsi, FQ estimait qu’elle ne pouvait pas être contrainte de rejoindre Budapest sans l’octroi d’une compensation financière adéquate et critiquait le fait que le coefficient correcteur prévu pour la Hongrie serait désormais appliqué à son traitement en lieu et place de celui, beaucoup plus élevé, applicable pour le Royaume‑Uni et dont elle avait escompté bénéficier tout au long de son engagement. FQ demandait ainsi au directeur du CEPOL d’adopter des mesures de compensation à sa réaffectation forcée, en l’occurrence par l’octroi d’une compensation financière adéquate.

    35

    Par lettre du 19 août 2014, FN a, au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut, introduit une réclamation contre la décision attaquée en faisant valoir que le lieu de son affectation ne pouvait pas être modifié unilatéralement par le CEPOL sans compensation financière, étant donné que ce lieu était renseigné dans son contrat de travail comme étant Bramshill et qu’il devait être considéré comme une condition essentielle de son contrat d’engagement. FN considérait, en particulier, que la situation d’une agence, telle que le CEPOL, n’ayant qu’un seul lieu de travail ne pouvait pas être comparée à celle d’une institution, telle que la Commission ou le Parlement, disposant de plusieurs lieux de travail auxquels les fonctionnaires et agents peuvent être affectés. Ainsi, la jurisprudence résultant de l’arrêt Aubineau (EU:T:1996:104), citée par le directeur de tutelle dans sa lettre du 16 mai 2014, ne serait pas d’application au cas d’espèce, de sorte que la modification unilatérale du lieu d’affectation de FN devrait être considérée comme un évènement anormal et imprévisible. FN invoquait également une violation du principe de confiance légitime au regard des assurances claires et précises qui lui auraient été données sur le fait qu’il travaillerait à Bramshill durant toute la durée de son contrat. Il critiquait en outre la brièveté du délai d’un mois qui lui avait été donné pour faire savoir au CEPOL s’il rejoignait le nouveau siège à Budapest et le fait que la décision attaquée ne lui donnait comme seule alternative au déménagement vers Budapest que la démission sans compensation financière.

    36

    Par lettres du 28 novembre 2014, le directeur du CEPOL a, en sa qualité d’AHCC, rejeté les réclamations de FN, de FP et de FQ ainsi que celles des autres requérants visés au point 1 du présent arrêt en soulignant, premièrement, que la décision de transférer le siège du CEPOL avait été adoptée par le législateur de l’Union, lequel dispose d’un large pouvoir d’appréciation en la matière ; deuxièmement, qu’aucune assurance précise n’avait été donnée quant au bénéfice du coefficient correcteur applicable au Royaume‑Uni sur toute la durée des engagements, puisque la mention, dans les avis de vacance afférents aux postes occupés par les requérants visés au point 1 du présent arrêt, de Bramshill comme lieu d’affectation et de l’application du coefficient correcteur applicable au Royaume‑Uni ne faisait que refléter la situation de l’époque, à savoir que le siège de l’Agence se trouvait dans cette ville, et qu’une affectation au Royaume‑Uni donnait droit à l’application dudit coefficient correcteur ; troisièmement, que, conformément à la jurisprudence, l’AHCC pouvait décider, dans l’intérêt du service, de réaffecter ses agents dans d’autres lieux de travail, puisque ceci serait, pour lesdits agents, inhérent au fait de travailler pour une organisation internationale telle que l’Union, et, quatrièmement, qu’il n’était pas dans l’intérêt du service du CEPOL de maintenir du personnel à Bramshill, compte tenu de la décision du Conseil de transférer à Budapest le siège de l’Agence.

    37

    Par ailleurs, dans les décisions de rejet des réclamations de FN et de FQ, le directeur du CEPOL soulignait que le personnel de l’Agence avait été informé de longue date du changement de siège du CEPOL, même si le calendrier précis n’avait été annoncé qu’en mai 2014, et que le court délai de réponse qu’il avait fixé dans la décision attaquée s’expliquait par la nécessité d’organiser rapidement le déménagement face à la demande du ministre de l’Intérieur de libérer le site de Bramshill pour le 30 septembre 2014.

    38

    La décision de rejet de la réclamation de FQ mentionnait également le fait que c’était en parfaite connaissance de la décision du Conseil de changer le siège du CEPOL et de l’existence d’un compromis politique sur le choix de Budapest que l’intéressée avait, le 27 février 2014, signé un avenant prévoyant le renouvellement de son contrat de travail pour cinq ans. En ce qui concernait la demande de FQ, formulée dans sa réclamation, d’obtenir une compensation financière adéquate, le directeur du CEPOL rappelait à celle‑ci qu’elle était éligible, dans les conditions statutaires, au remboursement de ses frais de déménagement ainsi qu’au bénéfice des indemnités journalières et à celui de l’indemnité d’installation.

    Procédure et conclusions des parties

    39

    Par lettre du greffe du 14 juillet 2015, le Tribunal a invité les sept requérants visés au point 1 du présent arrêt à prendre position, en application de l’article 44, paragraphes 1 et 2, du règlement de procédure, au sujet d’une éventuelle dissociation de leurs cas. Ceux‑ci ayant déposé leurs observations à cet égard le 2 septembre 2015, le président de la troisième chambre du Tribunal, à laquelle le recours a été attribué, a, par ordonnance du 16 septembre 2015, FK e.a./CEPOL (F‑41/15, EU:F:2015:104, non publiée), décidé, dans un souci de bonne administration de la justice, de dissocier du cas de FK les cas, respectivement, d’une part, de FL, FM et FO ainsi que, d’autre part, de FN, FP et FQ.

    40

    Les situations respectives de FK, d’une part, ainsi que de FL, FM et FO, d’autre part, ont fait l’objet de règlements amiables initiés par le Tribunal (voir ordonnances du 8 octobre 2015, FK/CEPOL,F‑41/15, EU:F:2015:119, et du 12 novembre 2015, FL e.a./CEPOL, F‑41/15 DISS I, EU:F:2015:132). Par ailleurs, le recours introduit par FM et FO, enregistré sous la référence F‑105/15 et tendant à l’annulation de la décision du 22 décembre 2014, par laquelle l’AHCC du CEPOL avait mis en application à leur égard son annonce, faite dans la décision attaquée, de considérer un refus de prise de fonctions à Budapest comme valant démission, a également donné lieu à un règlement amiable initié par le Tribunal (voir ordonnance du 12 novembre 2015, FM et FO/CEPOL, F‑105/15, EU:F:2015:133).

    41

    Dans le cadre de la présente affaire, enregistrée sous la référence F‑41/15 DISS II, les parties ont été informées, par lettre du greffe du 27 octobre 2015, que le Tribunal avait décidé, en application de l’article 55 du règlement de procédure, qu’un second échange de mémoires était nécessaire. À cet égard, les requérants dans la présente affaire (ci‑après les « requérants ») ont été priés, dans le cadre de leur mémoire en réplique, d’une part, d’adapter leurs conclusions compte tenu de la dissociation décidée le 16 septembre 2015 et, d’autre part, de prendre position sur leur intérêt à agir contre la décision attaquée ainsi que sur la recevabilité de leurs conclusions indemnitaires au regard des arguments, développés par le CEPOL dans son mémoire en défense, relatifs aux exigences afférentes à la procédure précontentieuse.

    42

    Dans leur mémoire en réplique, les requérants demandent au Tribunal :

    de déclarer le recours recevable ;

    d’annuler la décision attaquée ;

    d’annuler, pour autant que de besoin, les décisions de rejet des réclamations les concernant ;

    de réparer les préjudices matériels et moraux qu’ils ont subis ;

    de condamner le CEPOL aux dépens.

    43

    Dans son mémoire en duplique, le CEPOL demande au Tribunal :

    de rejeter le recours ;

    de condamner les requérants aux dépens.

    44

    À la suite du second échange de mémoires, les parties ont été invitées à indiquer au Tribunal si elles étaient d’accord à ce qu’il soit fait application en l’espèce de l’article 59, paragraphe 2, du règlement de procédure. Les requérants et le CEPOL l’ayant informé, respectivement les 25 et 22 février 2016, qu’ils n’avaient pas d’objection à cet égard, le Tribunal a alors décidé, en vertu de cette disposition, de statuer sans audience.

    En droit

    1. Sur les conclusions en annulation

    Sur la nature d’acte faisant grief de la décision attaquée

    Arguments des parties

    45

    Le CEPOL excipe de l’irrecevabilité des conclusions en annulation de la décision attaquée en soutenant que les requérants n’ont pas qualité à agir contre ladite décision. En effet, selon le CEPOL, la décision attaquée ne serait que la concrétisation par le directeur du CEPOL, en vertu d’une compétence liée, de la décision du législateur de l’Union de transférer le siège du CEPOL à Budapest. Or, les requérants n’ont ni introduit de recours contre le règlement no 543/2014 ni excipé de son illégalité dans le cadre du présent recours. En outre, la décision attaquée pourrait être considérée comme un acte confirmatif de la décision du législateur matérialisée dans ce règlement, de sorte que, en appliquant par analogie la jurisprudence relative à l’irrecevabilité de conclusions en annulation dirigées contre un acte confirmatif émanant de la même entité administrative, les conclusions en annulation de la décision de l’AHCC du CEPOL seraient également, prises sous cet angle, irrecevables.

    46

    Selon les requérants, ils ont un intérêt à agir contre la décision attaquée puisque l’annulation de cette dernière impliquerait qu’il ne serait plus attendu d’eux qu’ils aient pris leurs fonctions à Budapest le 1er octobre 2014 et que le non‑respect de l’obligation de prendre leurs fonctions en Hongrie ne pourrait plus être considéré comme une démission. Par conséquent, la situation des requérants resterait uniquement régie par les termes de leurs contrats d’engagement respectifs, de sorte qu’ils continueraient à bénéficier des droits correspondant à l’exercice de leurs fonctions à Bramshill, y compris en ce qui concerne le coefficient correcteur applicable.

    Appréciation du Tribunal

    47

    À titre liminaire, il importe de rappeler que, même s’il est constant que les requérants ont individuellement consenti à prendre leurs fonctions à Budapest, ce consentement n’est pas de nature à faire perdre à la décision attaquée la nature d’acte faisant grief (arrêt du 11 juillet 1996, Ortega Urretavizcaya/Commission, T‑587/93, EU:T:1996:100, point 28).

    48

    Ensuite, le Tribunal considère que, en l’espèce, l’AHCC du CEPOL a, par la décision attaquée, communiqué à l’ensemble du personnel de l’Agence le fait que, en application de la décision 2005/681/JAI, telle que modifiée par le règlement no 543/2014, elle avait décidé du lieu et de la date de la nouvelle affectation du personnel de l’Agence. En effet, il ressort de la décision attaquée qu’elle fixe le principe d’une prise de fonctions du personnel de l’Agence à Budapest le 1er octobre 2014.

    49

    Or, pareille communication, alors même qu’elle mettrait en œuvre un acte de portée générale du Conseil et du Parlement, doit être considérée comme une décision qui fait grief aux requérants en ce qu’elle modifie leur lieu d’affectation dans des conditions qui seraient prétendument illégales. Partant, il doit être reconnu à la décision attaquée la nature d’acte attaquable (voir, en ce sens, arrêt du 24 février 1981, Carbognani et Coda Zabetta/Commission, 161/80 et 162/80, EU:C:1981:51, point 14), de sorte que l’exception d’irrecevabilité soulevée à cet égard par le CEPOL doit être écartée.

    Sur l’objet du recours

    50

    Il convient de rappeler que, conformément au principe d’économie de la procédure, le juge de l’Union peut décider qu’il n’y a pas lieu de statuer spécifiquement sur les conclusions dirigées contre la décision portant rejet de la réclamation lorsqu’il constate que celles‑ci sont dépourvues de contenu autonome et se confondent, en réalité, avec celles dirigées contre la décision contre laquelle la réclamation a été présentée. Il peut, notamment, en être ainsi lorsqu’il constate que la décision portant rejet de la réclamation est purement confirmative de la décision faisant l’objet de la réclamation et que, partant, l’annulation de celle‑là ne produirait sur la situation juridique de la personne intéressée aucun effet distinct de celui découlant de l’annulation de celle‑ci (arrêts du 19 novembre 2014, EH/Commission, F‑42/14, EU:F:2014:250, point 85, et du 16 juillet 2015, Murariu/AEAPP, F‑116/14, EU:F:2015:89, point 49).

    51

    En l’espèce, les décisions de rejet des réclamations contiennent, par rapport au contenu de la décision attaquée, des prises de position nouvelles de l’AHCC du CEPOL en réponse aux demandes et arguments formulés par les requérants dans leurs réclamations respectives introduites contre la décision attaquée. Par conséquent, il convient de statuer sur la légalité tant de la décision attaquée que des décisions de rejet des réclamations (voir arrêt du CW/Parlement, F‑124/13, EU:F:2015:23, point 33, faisant l’objet d’un pourvoi devant le Tribunal de l’Union européenne, affaire T‑309/15 P).

    Sur les moyens d’annulation

    52

    À l’appui de leurs conclusions en annulation de la décision attaquée et des décisions de rejet des réclamations, les requérants soulèvent trois moyens, tirés, respectivement, premièrement, de la violation de l’article 47 du RAA ; deuxièmement, de la violation des dispositions contractuelles les liant au CEPOL ainsi que de leurs droits acquis et, troisièmement, de la violation du principe de bonne administration et du devoir de sollicitude.

    Sur le premier moyen, tiré d’une méconnaissance de l’article 47 du RAA

    – Arguments des parties

    53

    Dans la requête initiale présentée par les sept requérants visés au point 1 du présent arrêt, le premier moyen était développé essentiellement en lien avec le cas de trois de ces requérants initiaux qui avaient refusé de prendre leurs fonctions à Budapest à partir du 1er octobre 2014. À cet égard, était contesté le fait que le refus de ces trois requérants initiaux de prendre leurs fonctions au nouveau siège du CEPOL puisse, comme le prévoyait la décision attaquée, être considéré comme une démission de leur part.

    54

    Dans leur mémoire en réplique, les requérants ont essentiellement fait valoir que la question, toujours pertinente dans leur cas, soulevée par le premier moyen tient au point de savoir si, par la décision attaquée, le directeur du CEPOL pouvait considérer, par principe, que le refus de prendre leurs fonctions à Budapest le 1er octobre 2014 devait s’analyser comme une démission de la part des agents ayant exprimé un tel refus. Les requérants critiquent une telle approche en ce qu’elle ne leur aurait laissé aucune marge de manœuvre dans leur liberté d’accepter ou non leur prise de fonctions au nouveau lieu d’affectation et en ce que, par conséquent, l’AHCC du CEPOL aurait ainsi ajouté un nouveau cas de démission non prévu ni envisagé par l’article 47 du RAA.

    55

    Le CEPOL conclut au rejet du moyen en faisant valoir que, dans la mesure où chacun des trois requérants a précisément déménagé à Budapest et pris ses fonctions auprès du nouveau siège de l’Agence, les questions de savoir si un manquement à l’instruction du directeur du CEPOL figurant dans la décision attaquée de prendre ses fonctions à Budapest peut être qualifié de démission et si une démission dans de telles conditions est contraire à l’article 47 du RAA sont hypothétiques. En tout état de cause, le CEPOL observe en substance que, en vertu de l’article 47 du RAA, ni le licenciement par décision de l’AHCC ni la démission de l’agent ne requièrent le consentement de l’autre partie au contrat d’engagement.

    – Appréciation du Tribunal

    56

    D’emblée, le Tribunal relève que, même s’ils critiquent le délai qui leur a été octroyé dans la décision attaquée pour informer le directeur du CEPOL de leur intention de rejoindre ou non le nouveau siège du CEPOL et contestent les conséquences statutaires, notamment pécuniaires, liées à leur acceptation de leur nouvelle affectation en dehors du Royaume‑Uni, les requérants ont chacun, le 30 juin 2014, accepté de poursuivre leurs relations contractuelles respectives avec le CEPOL et de prendre leurs fonctions au nouveau siège de celui‑ci à Budapest le 1er octobre 2014.

    57

    Dans ces conditions, l’avertissement figurant dans la décision attaquée, selon lequel le refus d’un agent du CEPOL de prendre ses fonctions au nouveau siège à Budapest le 1er octobre 2014 serait considéré comme une démission de sa part à cette date, n’a pas été mis en application par l’AHCC du CEPOL dans le cas des requérants. Partant, l’argument des requérants visant à contester le fait que, dans le contexte du déménagement du CEPOL, le refus de l’un de ses agents de prendre ses fonctions à Budapest le 1er octobre 2014 pouvait être considéré, en l’espèce, comme valant démission est inopérant.

    58

    En tout état de cause, le Tribunal de l’Union européenne a déjà jugé que le fait pour un agent de ne pas se présenter sur son lieu de travail, en l’occurrence défini par l’AHCC du CEPOL comme étant Budapest à partir du 1er octobre 2014, peut être considéré comme traduisant de la part de cet agent un comportement démissionnaire valant, par conséquent, démission au sens de l’article 47 du RAA (arrêt du 9 avril 2003, Walton/Commission, T‑155/01, EU:T:2003:105, points 31 à 34).

    59

    À cet égard, le Tribunal relève que, en l’espèce, l’AHCC du CEPOL n’avait aucune marge de manœuvre dans la mise en œuvre de l’article 4 de la décision 2005/681/JAI, telle que modifiée par le règlement no 543/2014, puisque, en prévoyant que, désormais, « [l]e siège du CEPOL est fixé à Budapest, en Hongrie », le législateur de l’Union, à savoir le Conseil et le Parlement, statuant selon la procédure législative ordinaire, avait implicitement mais nécessairement décidé que le personnel de l’Agence devait être réaffecté auprès du nouveau siège.

    60

    Or, le fonctionnement de l’administration de l’Union comporte, pour tout fonctionnaire ou agent de la fonction publique européenne, l’obligation d’accepter toute affectation répondant au groupe de fonctions et au grade de son emploi, conformément aux exigences du service, dans l’ensemble de l’Union, en tout lieu de travail de l’institution ou agence auprès de laquelle il a pris ses fonctions (arrêt du 24 février 1981, Carbognani et Coda Zabetta/Commission, 161/80 et 162/80, EU:C:1981:51, points 23 et 37). Par ailleurs, conformément à l’article 20 du statut, applicable par analogie aux agents temporaires et contractuels en vertu des articles 11 et 81 du RAA, les fonctionnaires et agents de l’Union sont tenus de résider au lieu de leur affectation ou à une distance telle de celui‑ci qu’ils ne soient pas gênés dans l’exercice de leurs fonctions.

    61

    Dans ces conditions, il ne peut être reproché à l’AHCC du CEPOL d’avoir, en exécution de la décision du législateur de l’Union de transférer le siège du CEPOL à Budapest, demandé à son personnel de prendre ses fonctions dans ce nouveau lieu (voir, en ce sens, arrêt du 6 juillet 1983, Geist/Commission, 285/81, EU:C:1983:192, point 15).

    62

    Par conséquent, compte tenu également du large pouvoir d’appréciation de l’Agence dans l’organisation et la structuration de ses services (voir arrêt du 10 septembre 2014, Tzikas/AFE, F‑120/13, EU:F:2014:197, point 82 et jurisprudence citée), le Tribunal considère que, en tout état de cause, dans les circonstances particulières du cas d’espèce, l’AHCC du CEPOL pouvait, face à l’éventuel refus de l’un des agents du CEPOL de prendre ses fonctions auprès du nouveau siège de celui‑ci fixé à Budapest par le législateur de l’Union, décider, dans l’exercice de son large pouvoir d’appréciation, que pareil refus équivalait à une démission.

    63

    Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient d’écarter le premier moyen.

    Sur le deuxième moyen, tiré de la violation des dispositions contractuelles liant les requérants au CEPOL ainsi que de la violation de leurs droits acquis

    – Arguments des parties

    64

    Les requérants font valoir, à l’appui de leur deuxième moyen, que, en exigeant d’eux qu’ils déménagent de Bramshill à Budapest, l’AHCC du CEPOL a, par la décision attaquée, unilatéralement et, partant, illégalement modifié l’une des conditions essentielles de leurs contrats d’engagement respectifs. En effet, chacun de ces contrats précisait que le lieu d’affectation était Bramshill. Or, selon les requérants, ceci constituait une condition essentielle de leurs contrats respectifs puisque, dans le cas de FN, avant de prendre ses fonctions au CEPOL, celui‑ci résidait déjà dans le Hampshire (Royaume‑Uni), où se situaient précisément les locaux du CEPOL, tandis que, pour FP et FQ, leurs décisions respectives de postuler pour un emploi auprès du CEPOL avaient été prises compte tenu du lieu de travail et du traitement proposés. En outre, les requérants soutiennent que la décision attaquée a été adoptée sans qu’ils aient donné leur accord au changement de lieu d’affectation alors même que la conclusion d’avenants, signés des requérants, aurait été nécessaire pour procéder à tout changement du lieu d’affectation.

    65

    Dans la mesure où leur lien d’emploi est de nature contractuelle, les requérants considèrent que l’AHCC du CEPOL ne pouvait pas invoquer l’article 7 du statut au soutien de la décision attaquée, d’autant plus que cet article ne s’appliquerait, en vertu de l’article 10 du RAA, qu’aux agents temporaires et non aux agents contractuels. En outre, selon les requérants, « [l]a décision du Conseil de transférer le siège du CEPOL est une décision qui ne découle même pas des contrats d’engagement, même en y incluant le RAA ».

    66

    Le CEPOL conclut au rejet du deuxième moyen. Il souligne notamment que la décision attaquée ne constitue dans le chef de l’AHCC, d’une part, qu’une mesure d’exécution, prise en situation de compétence liée, de la décision du législateur de l’Union de transférer le siège du CEPOL de Bramshill à Budapest et, d’autre part, qu’une réponse opérationnelle à l’injonction des autorités du Royaume‑Uni de quitter le site de Bramshill à la date du 30 septembre 2014.

    67

    Tout en concédant que les contrats d’engagement des requérants indiquent que leur lieu d’affectation est Bramshill, le CEPOL considère que ces clauses ne constituent pas des éléments essentiels desdits contrats dont la modification nécessiterait l’approbation des agents concernés. En effet, premièrement, le CEPOL n’aurait pas garanti et n’aurait d’ailleurs pas pu garantir, au moyen de ces clauses, que le lieu d’affectation des requérants, tributaire du lieu du siège de l’Agence déterminé par le seul législateur de l’Union, demeurerait inchangé en toutes circonstances. Deuxièmement, selon le CEPOL, en cas de transfert du siège d’une agence, la base même de l’intérêt du service serait transférée vers le nouveau siège de l’agence de sorte que, en application de l’article 7 du statut, l’AHCC serait en droit de réaffecter les agents temporaires en conséquence, voire elle serait dans l’obligation de le faire puisqu’elle ne pourrait pas mettre en échec la décision du législateur de l’Union commandant un tel transfert. Il en irait de même à l’égard des agents contractuels, nonobstant l’absence de disposition dans le RAA prévoyant à leur égard une application par analogie de l’article 7 du statut.

    – Appréciation du Tribunal

    68

    Selon une jurisprudence constante, la base du rapport d’emploi d’un agent, temporaire ou contractuel, avec l’institution ou l’agence concernée est constituée par un contrat d’engagement (voir arrêts du 18 octobre 1977, Schertzer/Parlement, 25/68, EU:C:1977:158, point 40 ; du 19 juin 1992, V./Parlement, C‑18/91 P, EU:C:1992:269, point 39, et du 16 juillet 2015, Murariu/AEAPP, F‑116/14, EU:F:2015:89, point 101).

    69

    Ainsi, l’échange des volontés des parties contractantes, matérialisé notamment par la signature du contrat d’engagement, fait naître des obligations de nature contractuelle qui limitent le pouvoir de l’AHCC d’agir unilatéralement en dehors des hypothèses expressément prévues par le RAA (arrêt du 16 juillet 2015, Murariu/AEAPP, F‑116/14, EU:F:2015:89, point 103). Cependant, la portée et les conditions d’exercice de cette liberté contractuelle sont encadrées et limitées par les droits et obligations prévus dans le RAA, résultant le cas échéant d’une application par analogie des dispositions du statut, de sorte que les co‑contractants ne sauraient, par la voie contractuelle, s’affranchir des obligations découlant de la mission particulière d’intérêt général confiée aux institutions, organes et organismes de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 12 février 2014, Bodson e.a./BEI,F‑73/12, EU:F:2014:16, point 52 et jurisprudence citée).

    70

    S’agissant du point de savoir si le lieu d’affectation, lorsqu’il est mentionné dans le contrat d’engagement d’un agent temporaire ou contractuel, peut être modifié unilatéralement par l’AHCC, il convient de souligner que le législateur de l’Union ou, selon les cas, les chefs d’État ou de gouvernement des États membres peuvent modifier à tout moment les sièges des différentes institutions et agences de l’Union. Il y a également lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’obligation incombant aux institutions et agences de l’Union d’affecter leur personnel dans le seul intérêt du service s’applique même lorsqu’elle est susceptible d’entraîner une modification du lieu d’affectation non voulue par l’intéressé (arrêt du 24 février 1981, Carbognani et Coda Zabetta/Commission, 161/80 et 162/80, EU:C:1981:51, point 28).

    71

    Même dans une situation mettant en cause, comme en l’espèce, un contrat d’engagement contenant une clause stipulant explicitement un lieu d’affectation précis (voir conclusions de l’avocat général Slynn dans les affaires jointes Aldinger et Virgili/Parlement, 23/87 et 24/87, EU:C:1988:336, p. 4403 et 4406), la Cour a confirmé l’enseignement jurisprudentiel exposé au point précédent du présent arrêt (arrêt du 14 juillet 1988, Aldinger et Virgili/Parlement, 23/87 et 24/87, EU:C:1988:406, point 17).

    72

    Par ailleurs, il est également de jurisprudence constante que, au regard de la liberté dont les institutions doivent disposer dans l’organisation de leurs services et dans leur adaptation à l’évolution des besoins, l’AHCC peut, dans l’intérêt du service, modifier le lieu d’affectation d’un agent temporaire sans que le consentement de l’intéressé, qui doit toutefois être entendu, soit nécessaire (arrêts du 24 février 1981, Carbognani et Coda Zabetta/Commission, 161/80 et 162/80, EU:C:1981:51, point 28 ; Aubineau, EU:T:1996:104, point 29, et du 4 juin 2009, Plasa/Commission, F‑52/08, EU:F:2009:54, point 77).

    73

    S’agissant des agents contractuels, indépendamment de la question de savoir si l’article 7 du statut leur est applicable par analogie et étant précisé que l’argument était soulevé dans la requête initiale en tant qu’elle était présentée par FM et FO, lesquels ne sont pas parties dans la présente affaire, l’AHCC peut également décider de leur affectation et réaffectation dans un autre lieu, puisque, ainsi que la Cour l’a jugé, seuls les agents locaux, qui sont recrutés par contrat précisément dans un lieu déterminé, sont en droit de s’opposer à un changement du lieu de leur affectation, car, dans leur cas, la stabilité du lieu de travail fait partie des conditions mêmes de l’emploi. La Cour a retenu à cet égard que cette stabilité a sa contrepartie dans le fait que les agents locaux ne bénéficient pas de certains avantages réservés aux fonctionnaires et applicables par analogie aux agents temporaires ainsi qu’aux agents contractuels (voir, en ce sens, arrêt du 24 février 1981, Carbognani et Coda Zabetta/Commission, 161/80 et 162/80,EU:C:1981:51, point 34), tels que, notamment, l’indemnité de dépaysement, l’indemnité d’installation, l’indemnité journalière ou encore le remboursement des frais de déménagement vers le nouveau lieu d’affectation et le remboursement des frais de voyage vers le lieu d’origine.

    74

    Par conséquent, même en faisant abstraction du fait que les requérants ont accepté de prendre leurs fonctions à Budapest, le deuxième moyen relatif au non‑respect par l’AHCC des termes contractuels et des droits prétendument acquis des requérants d’être affectés à Bramshill pendant toute la durée de leurs contrats d’engagement respectifs, renouvellements inclus, doit, en tout état de cause, être écarté.

    Sur le troisième moyen, tiré de la violation du principe de bonne administration et du devoir de sollicitude

    – Arguments des parties

    75

    À l’appui de leur troisième moyen, les requérants font valoir qu’ils pouvaient tirer de leurs contrats d’engagement respectifs des assurances claires et précises sur le fait que leur lieu d’affectation resterait Bramshill pendant toute la durée de ces contrats, notamment parce que, lors de la conclusion desdits contrats, y compris dans le cas de FP engagée le 1er décembre 2012, le gouvernement du Royaume‑Uni n’avait pas encore annoncé sa décision de vendre le site de Bramshill.

    76

    Les requérants considèrent que, contrairement à ce que fait valoir le CEPOL, ils n’auraient été réellement et pleinement informés de l’imminence de leur changement d’affectation et du lieu exact de la réaffectation qu’aux alentours du 15 mai 2014. Ainsi, ils n’auraient disposé que d’un délai de réflexion d’un peu plus d’un mois pour décider de poursuivre ou non leurs relations d’emploi respectives avec le CEPOL à Budapest. Un tel délai serait court et méconnaîtrait le principe de bonne administration.

    77

    Par ailleurs, un régime transitoire aurait dû être mis en place. En ne mettant pas en place un tel régime et en ne prenant pas en compte les exigences personnelles de ses agents, le CEPOL aurait méconnu le principe de bonne administration, tel que consacré à l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

    78

    Selon l’argumentation des requérants, reprise des développements afférents au deuxième moyen mais ayant davantage vocation à être traitée dans le cadre du présent et troisième moyen, même s’ils reconnaissent que les agents du CEPOL ne pouvaient plus rester sur le site de Bramshill en raison de la vente de ce site, les requérants considèrent toutefois que l’AHCC du CEPOL aurait pu décider, au lieu de changer leur lieu d’affectation, de leur proposer de travailler à distance depuis leur domicile au Royaume‑Uni tout en conservant le bénéfice du coefficient correcteur applicable pour cet État membre ou encore de leur offrir une compensation financière accompagnée ou non d’une cessation de fonctions. Ils se réfèrent en l’occurrence à la différence de coefficients correcteurs applicables entre le Royaume‑Uni et la Hongrie.

    79

    Par ailleurs, selon eux, contrairement à ce que soutient le CEPOL, ni la décision du Conseil ni celle du Royaume‑Uni de ne plus accueillir le siège du CEPOL n’impliquaient nécessairement que le personnel de cette agence devait ipso facto être réaffecté au nouveau siège à Budapest.

    80

    Le CEPOL conclut au rejet du troisième moyen. Il souligne notamment que les requérants, qui ne s’appuient que sur une lecture unilatérale de leurs contrats d’engagement respectifs, concèdent implicitement qu’ils n’ont eu d’assurances explicites quant au caractère immuable de leur lieu d’affectation de la part d’aucune personne habilitée à engager l’AHCC du CEPOL. Par ailleurs, quant à la question de l’aménagement d’un régime transitoire, le CEPOL relève que les requérants n’excipent pas de l’illégalité de la décision du législateur de l’Union fixant le nouveau siège du CEPOL à Budapest, de sorte qu’ils ne peuvent se prévaloir de la jurisprudence, résultant notamment des arrêts du 30 septembre 1997, Ryan/Cour des comptes (T‑121/97, EU:T:1998:232, points 98 et 104), ainsi que du 29 novembre 2006, Campoli/Commission (T‑135/05, EU:T:2006:366, point 85), puisque celle‑ci concerne les obligations du législateur de l’Union et non celles de l’AHCC, seule mise en cause en l’espèce.

    – Appréciation du Tribunal

    81

    En premier lieu, le Tribunal rappelle que la réaffectation d’un fonctionnaire ou d’un agent de l’Union, si elle peut causer à ce fonctionnaire ou à cet agent des inconvénients familiaux et des gênes économiques, ne constitue pas pour autant un évènement anormal et imprévisible dans sa carrière, étant entendu que le pouvoir hiérarchique peut être amené à faire face à des exigences de service le mettant dans l’obligation de décider d’une telle réaffectation (arrêts du 14 juillet 1977, Geist/Commission, 61/76, EU:C:1977:127, point 34 ; du 14 juillet 1988, Aldinger et Virgili/Parlement, 23/87 et 24/87, EU:C:1988:406, point 17, et ordonnance du 11 février 1999, Costacurta/Commission, C‑75/98 P, EU:C:1999:73, non publiée, point 49).

    82

    Il en est notamment ainsi lorsque les lieux de travail de l’institution ou de l’agence auprès de laquelle le fonctionnaire ou l’agent est affecté sont répartis entre plusieurs États membres ou dans des États tiers (voir, en ce sens, arrêts du 14 juillet 1977, Geist/Commission, 61/76, EU:C:1977:127, point 34 ; du 14 juillet 1988, Aldinger et Virgili/Parlement, 23/87 et 24/87, EU:C:1988:406, point 17 ; ordonnance du 11 février 1999, Costacurta/Commission, C‑75/98 P, EU:C:1999:73, non publiée, point 49, et arrêt du 14 septembre 2011, Marcuccio/Commission, T‑236/02, EU:T:2011:465, point 248).

    83

    Contrairement à ce que soutiennent les requérants, ceci vaut également et a fortiori lorsque c’est le législateur de l’Union qui a décidé de transférer le siège d’une agence de l’Union d’un État membre vers un autre État membre. En effet, le Tribunal de l’Union européenne a déjà jugé que l’obligation pour les institutions et agences de l’Union d’affecter leur personnel dans le seul intérêt du service et leur droit corollaire d’imposer d’office des modifications du lieu d’affectation non voulues par l’intéressé s’appliquent non seulement à l’égard des fonctionnaires, mais également à l’égard des agents temporaires (arrêt Aubineau, EU:T:1996:104, point 30).

    84

    En deuxième lieu, s’agissant de l’argument tenant à la prétendue confiance légitime dans le caractère immuable de leur lieu d’affectation dont pourraient se prévaloir les fonctionnaires ou agents, la Cour a jugé que le fonctionnement de l’administration de l’Union comporte, pour tout fonctionnaire ou agent de l’Union, l’obligation d’accepter toute affectation répondant au groupe de fonctions et au grade de son emploi, conformément aux exigences du service, dans l’ensemble de l’Union, en tout lieu de travail de l’institution auprès de laquelle il a pris ses fonctions, étant entendu que les contraintes de caractère personnel et familial, que l’exécution du service peut entraîner dans ces conditions, sont compensées par les avantages et prérogatives que comporte la fonction publique européenne (arrêts du 24 février 1981, Carbognani et Coda Zabetta/Commission, 161/80 et 162/80, EU:C:1981:51, points 23 et 37, et du 23 janvier 1986, Rasmussen/Commission, 173/84, EU:C:1986:29, point 25).

    85

    De plus, le principe de protection de la confiance légitime, qui s’inscrit parmi les principes fondamentaux du droit de l’Union, implique que tout fonctionnaire ou agent n’a le droit de se prévaloir de ce principe que lorsqu’il se trouve dans une situation de laquelle il ressort que l’administration de l’Union, en lui fournissant des assurances précises et conformes aux normes applicables, a fait naître à son égard des espérances fondées (arrêt du 16 juillet 2015, Murariu/AEAPP, F‑116/14, EU:F:2015:89, point 97 et jurisprudence citée). En outre, la portée de ce principe est déterminée par les circonstances auxquelles il s’applique et, en particulier, par les relations entre les parties concernées (arrêt Aubineau, EU:T:1996:104, point 44).

    86

    À cet égard, le Tribunal relève, premièrement, que les agents du CEPOL ont été informés sans délai par l’AHCC du CEPOL au fur et à mesure que les différentes étapes décisionnelles relatives au changement de siège du CEPOL étaient portées à sa connaissance. En particulier, trois réunions d’information ont été organisées, répondant en cela au principe de bonne administration.

    87

    Ainsi, à partir du 12 décembre 2012, date de l’annonce par le gouvernement du Royaume‑Uni de sa volonté de ne plus accueillir l’Agence, les agents du CEPOL ne pouvaient plus ignorer que cette dernière n’aurait plus ses activités opérationnelles à Bramshill et, à partir du 8 octobre 2013, date à laquelle les États membres se sont entendus d’un commun accord sur la ville de Budapest pour accueillir le nouveau siège du CEPOL, ils ne pouvaient plus ignorer que, selon toute vraisemblance, ils seraient tenus, dans l’intérêt du service, de prendre leurs fonctions auprès du nouveau siège fixé par le législateur de l’Union. Dans ces conditions, les agents du CEPOL ont disposé, dans le respect du principe de bonne administration, d’une période raisonnablement suffisante pour réfléchir à l’opportunité de poursuivre leurs activités professionnelles au service du CEPOL au nouveau siège (voir, en ce sens, arrêt du 14 juillet 1988, Aldinger et Virgili/Parlement, 23/87 et 24/87, EU:C:1988:406, point 19).

    88

    En particulier, le délai, formellement fixé au 30 juin 2014 dans la décision attaquée, qui a été accordé aux agents du CEPOL pour exprimer leurs décisions respectives à cet égard n’apparaît pas manifestement déraisonnable au regard des circonstances particulières de l’espèce. En effet, le Tribunal relève que, dès l’adoption définitive par le législateur de l’Union, le 15 mai 2014, de sa décision de transférer le CEPOL à Budapest, l’AHCC du CEPOL, en l’occurrence son directeur, a immédiatement entrepris les consultations nécessaires avec la Commission et a adopté la décision attaquée avant même la publication au Journal officiel de l’Union européenne, le 29 mai 2014, du règlement no 543/2014. Ce faisant, l’AHCC du CEPOL a agi avec la diligence requise pour répondre à la fois à l’urgence exprimée par le législateur de l’Union au considérant 9 du règlement no 543/2014 et aux exigences du Royaume‑Uni quant à la libération du site de Bramshill au 30 septembre 2014.

    89

    Deuxièmement, le Tribunal considère que les requérants n’auraient pu légitimement croire à la pérennisation de leur relation d’emploi au Royaume‑Uni que pour autant que le CEPOL eut conservé des activités opérationnelles, dont ils auraient pu être en charge, dans cet État membre (voir, en ce sens, arrêt Aubineau, EU:T:1996:104, point 46) et, à cet égard, il doit être rappelé que l’AHCC dispose d’un large pouvoir d’appréciation dans l’organisation de ses services en fonction des missions qui lui sont confiées, en l’occurrence par le législateur de l’Union, ce large pouvoir lui étant indispensable pour lui permettre d’organiser efficacement ses travaux et d’adapter cette organisation à des besoins variables (arrêt du 23 octobre 1990, Pitrone/Commission, T‑46/89, EU:T:1990:62, point 32).

    90

    Or, il ressort clairement de la décision du législateur de l’Union et de la position exprimée par le gouvernement du Royaume‑Uni, notamment dans les lettres du ministre de l’Intérieur du 12 décembre 2012 et du 8 février 2013, que le CEPOL ne conserverait plus d’activités opérationnelles sur le territoire de cet État membre à la suite du changement de siège de l’Agence. Partant et ainsi qu’il a été constaté précédemment, l’AHCC n’avait aucune marge de manœuvre dans la mise en œuvre de l’article 4 de la décision 2005/681/JAI, telle que modifiée par le règlement no 543/2014, puisque, en prévoyant que, désormais, « [l]e siège du CEPOL est fixé à Budapest, en Hongrie », le Conseil et le Parlement, statuant selon la procédure législative ordinaire, avaient implicitement mais nécessairement décidé que le personnel du CEPOL devait être réaffecté au nouveau siège de cette agence.

    91

    En troisième lieu, les requérants, qui n’ont d’ailleurs pas, contrairement à FK, demandé à bénéficier du système de télétravail, pas même dans leurs réclamations respectives, n’ont nullement démontré qu’il aurait pu être dans l’intérêt du service, au regard de leurs responsabilités spécifiques respectives, qu’ils poursuivent leurs activités professionnelles au service du CEPOL depuis leur domicile au Royaume‑Uni.

    92

    En tout état de cause, le Tribunal relève que, en raison de la nature de leurs fonctions respectives au sein du CEPOL et au regard des contraintes opérationnelles particulières d’une telle agence qui ne compte qu’une trentaine d’agents temporaires ou contractuels (voir, en ce sens, arrêts du 4 décembre 2013, ETF/Schuerings, T‑107/11 P, EU:T:2013:624, points 97 et 100, et du 10 septembre 2014, Tzikas/AFE, F‑120/13, EU:F:2014:197, point 93), un régime de télétravail depuis le Royaume‑Uni semble difficilement compatible avec l’intérêt du service d’une agence telle que le CEPOL dont le siège est désormais en Hongrie et dont l’AHCC est la seule autorité à qui il incombe d’apprécier les besoins du service en affectant en conséquence le personnel qui se trouve à sa disposition (voir, en ce sens, arrêt du 23 octobre 1990, Pitrone/Commission, T‑46/89, EU:T:1990:62, point 60 et jurisprudence citée). Il ne saurait donc être reproché à l’AHCC du CEPOL de ne pas avoir proposé aux requérants, dans les décisions de rejet des réclamations, de solliciter le bénéfice d’un régime de télétravail depuis le Royaume‑Uni.

    93

    En quatrième lieu, s’agissant du devoir de sollicitude, le Tribunal constate que, ainsi que l’a souligné le CEPOL, la décision attaquée donnait la possibilité aux agents du CEPOL de différer la date de leur prise de fonctions au nouveau lieu d’affectation. Pareille initiative était de nature à prendre en compte l’intérêt du bon fonctionnement du service et l’intérêt de chaque agent à voir les particularités de sa situation individuelle donner lieu à des aménagements (voir, en ce sens, arrêt du 17 décembre 1981, Demont/Commission, 791/79, EU:C:1981:307, points 8 et 9).

    94

    De plus, quant à la prise en compte par l’AHCC des conséquences financières inhérentes au changement d’affectation pour chacun des membres du personnel, le Tribunal relève que le directeur du CEPOL a pris l’initiative de solliciter l’avis de la Commission pour pouvoir éventuellement procéder à un reclassement de l’ensemble des agents à l’occasion du transfert de l’Agence à Budapest et que l’AHCC du CEPOL a accordé aux requérants le bénéfice des prestations pécuniaires statutaires auxquelles ils pouvaient prétendre en lien avec leur prise de fonctions à Budapest.

    95

    En cinquième et dernier lieu, s’agissant du fait que l’AHCC n’a pas maintenu en faveur des requérants le bénéfice du coefficient correcteur applicable pour le Royaume‑Uni à partir de leur prise de fonctions à Budapest, il convient de rappeler que le bénéfice d’un coefficient correcteur donné ne fait pas partie, en tant que tel, de la rémunération des fonctionnaires et agents et qu’il est précisément variable au cours du temps en fonction de l’environnement économique du lieu d’affectation ou de résidence (arrêts du 5 février 2016, Barnett et Mogensen/Commission, F‑56/15, EU:F:2016:11, point 74 ; Clausen et Kristoffersen/Parlement, F‑62/15, EU:F:2016:12, point 59, et Barnett e.a./CESE, F‑66/15, EU:F:2016:13, point 60).

    96

    En effet, le principe d’équivalence de pouvoir d’achat, auquel répond l’application d’un coefficient correcteur, repose sur le constat d’une différence importante entre les situations économiques des différents États membres et États tiers en tant que lieux d’affectation et implique que les droits pécuniaires des fonctionnaires et agents de l’Union devraient procurer, à situations professionnelles et familiales équivalentes, un pouvoir d’achat identique quel que soit le lieu d’affectation ou de résidence. Ce principe, inspiré du principe d’égalité de traitement, est mis en œuvre par l’application au montant nominal de la rémunération ou, partiellement ou totalement, à celui de certaines pensions du coefficient correcteur exprimant le rapport entre le coût de la vie à Bruxelles (Belgique) et à Luxembourg (Luxembourg), villes de référence, et celui du lieu d’affectation ou de résidence (arrêt du 5 février 2016, Barnett et Mogensen/Commission, F‑56/15, EU:F:2016:11, point 73 et jurisprudence citée).

    97

    Dans ces conditions, il aurait été manifestement contraire aux dispositions statutaires d’appliquer le coefficient correcteur applicable au Royaume‑Uni au traitement des requérants postérieurement à leur prise de fonctions à Budapest puisque, dans pareille hypothèse, les requérants auraient bénéficié d’un pouvoir d’achat substantiellement supérieur non seulement à celui des autres fonctionnaires et agents de l’Union, mais également à celui dont ils bénéficiaient eux‑mêmes lorsqu’ils étaient en fonctions à Bramshill.

    98

    En tout état de cause, ainsi que le souligne le CEPOL, les requérants n’ont pas excipé de l’illégalité du coefficient correcteur applicable pour la Hongrie en ce qu’il ne refléterait pas le coût de la vie, selon eux élevé, auquel ils prétendent être confrontés. Par ailleurs, le retrait unilatéral d’un avantage financier octroyé de manière continue peut certes être subordonné, dans certains cas, à la consultation des agents lorsque celui‑ci leur a été librement accordé par l’employeur (arrêt du 26 février 2016, Bodson e.a./BEI, T‑241/14 P, EU:T:2016:103, point 98). Cependant, l’application des coefficients correcteurs aux traitements des agents temporaires et contractuels ne résulte pas d’un choix de l’AHCC, mais d’une application automatique, en fonction du seul lieu d’affectation des intéressés, des dispositions statutaires, à savoir prévues dans un règlement d’effet direct au sens de l’article 288, deuxième alinéa, TFUE. Partant, nonobstant la circonstance que les contrats d’engagement initiaux des requérants mentionnent Bramshill comme lieu de travail, l’AHCC n’avait aucune marge de manœuvre quant à l’opportunité d’appliquer, à partir du 1er octobre 2014, le coefficient correcteur prévu pour la Hongrie aux traitements des requérants dès lors que leur lieu d’affectation était désormais fixé à Budapest.

    99

    Eu égard à tout ce qui précède, le troisième moyen doit être rejeté et, partant, les conclusions en annulation doivent être rejetées dans leur intégralité.

    2. Sur les conclusions indemnitaires

    Sur les préjudices matériels

    Arguments des parties

    100

    Selon les requérants, leur demande de compensation financière est la conséquence d’un acte faisant grief, en l’occurrence la décision attaquée. En l’absence de cette décision, leurs droits pécuniaires seraient restés fixés en lien avec l’exercice de fonctions à Bramshill. Leurs conclusions indemnitaires seraient ainsi accessoires à leurs conclusions en annulation et, partant, devraient être déclarées recevables, même s’ils n’ont pas introduit de réclamation contre la décision de l’AHCC, contenue dans les décisions de rejet des réclamations, de ne pas leur octroyer une compensation financière équitable, demande qu’ils avaient formulée dans leurs réclamations respectives.

    101

    Les requérants revendiquent un préjudice matériel, principalement représenté par les coûts afférents au déménagement à Budapest.

    102

    FN expose ses différents postes de dépenses, s’expliquant notamment par la composition de son ménage et le fait que son épouse continue de demeurer au Royaume‑Uni. Il s’agit en l’occurrence de dépenses d’hébergement à Budapest ainsi que de dépenses domestiques, telles que des primes d’assurance, des abonnements téléphoniques et de fourniture de gaz et d’électricité. Il revendique pour la période, prévue dans son contrat d’engagement, allant du 1er octobre 2014 au 31 mars 2018, date de son expiration, soit 42 mois, d’une part, 2000 euros mensuels correspondant à la différence de traitement net entre ce qu’il percevait, en raison de l’application du coefficient correcteur prévu pour le Royaume‑Uni, lorsqu’il était affecté à Bramshill et ce qu’il perçoit désormais à Budapest à cause de l’application du coefficient correcteur prévu pour la Hongrie. D’autre part, il revendique, pour cette même période, un montant de 1000 euros mensuels pour compenser l’augmentation de différentes dépenses domestiques en raison de sa prise de fonctions à Budapest. Le montant total minimal qu’il demande est ainsi de 126000 euros. Toutefois, à titre subsidiaire, il invoque des montants de 108780 euros et 67941,72 euros.

    103

    FP revendique, à titre de réparation de son dommage matériel, le paiement de la différence entre sa rémunération nette perçue à raison de ses fonctions exercées à Bramshill et celle perçue depuis qu’elle est affectée à Budapest, et ce pour la durée totale restant à courir de son contrat d’engagement, soit 36 mois. Le montant total minimal qu’elle réclame est ainsi de 101124,36 euros auquel devrait encore s’ajouter un montant de nature à tenir compte de la possibilité que son contrat d’engagement, expirant le 30 novembre 2017, soit renouvelé.

    104

    FQ revendique, à titre de réparation de son dommage matériel, le paiement de la différence entre sa rémunération nette perçue à raison de ses fonctions exercées à Bramshill et celle perçue depuis qu’elle est affectée à Budapest, et ce pour la durée totale restant à courir de son contrat d’engagement, soit 60 mois. Le montant qu’elle réclame est ainsi de 205080,60 euros, ce montant devant également tenir compte de la perspective de FQ de pouvoir éventuellement bénéficier d’un départ à la retraite anticipé dans cinq ans. À ce montant devrait être ajouté un autre montant de 52000 euros correspondant à la baisse que FQ a dû consentir sur le prix de vente d’une maison dont elle est propriétaire en France, étant souligné qu’elle doit également honorer un prêt concernant un logement sis en Finlande dans lequel elle a engagé des frais importants de rénovation en 2014 et en 2015. FQ demande ainsi un montant total minimal de 257080,60 euros au titre de la réparation de son préjudice matériel.

    105

    Le CEPOL excipe de l’irrecevabilité des conclusions indemnitaires pour non‑respect des exigences afférentes à la procédure précontentieuse. En effet, l’application du coefficient correcteur prévu pour la Hongrie serait une conséquence automatique liée à la prise de fonctions des requérants dans cet État membre. Partant, contrairement à ce qu’ils soutiennent, il leur appartenait d’introduire une demande visant à continuer de bénéficier du coefficient correcteur qui était appliqué à leurs traitements lors de l’exercice de leurs fonctions au Royaume‑Uni et, ensuite, d’introduire une réclamation contre la décision de l’AHCC du CEPOL statuant sur cette demande. Or, en l’espèce, ce ne serait que dans le cadre de leurs réclamations respectives que les requérants auraient, pour la première fois, demandé l’octroi d’une compensation pécuniaire équitable en lien avec leur prise de fonctions en Hongrie. Dans le cadre des réponses à ces réclamations, l’AHCC du CEPOL aurait rejeté pareille demande, mais les requérants n’auraient pas introduit de réclamation contre lesdits rejets, de sorte que les conclusions indemnitaires seraient irrecevables.

    Appréciation du Tribunal

    106

    La procédure précontentieuse en matière de recours indemnitaire diffère selon que le dommage dont la réparation est demandée résulte d’un acte faisant grief au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut ou d’un comportement de l’administration dépourvu de caractère décisionnel. Dans le premier cas, il appartient à l’intéressé de saisir l’autorité investie du pouvoir de nomination ou l’AHCC, dans les délais impartis, d’une réclamation dirigée contre l’acte en cause. Dans le second cas, en revanche, la procédure administrative doit débuter par l’introduction d’une demande au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut, visant à obtenir un dédommagement, et se poursuivre, le cas échéant, par une réclamation dirigée contre la décision de rejet de la demande (ordonnance du 25 février 1992, Marcato/Commission, T‑64/91, EU:T:1992:22, points 32 et 33 ; arrêt du 6 novembre 1997, Liao/Conseil, T‑15/96, EU:T:1997:169, point 57, et ordonnance du 20 mars 2014, Michel/Commission, F‑44/13, EU:F:2014:40, point 43).

    107

    À cet égard, selon une jurisprudence constante, la qualification juridique d’un écrit d’un fonctionnaire de « demande », au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut, ou de « réclamation », au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut, relève de la seule appréciation du juge et non de la volonté des parties (arrêts du 30 avril 1998, Cordiale/Parlement, T‑205/95, EU:T:1998:76, point 34 ; du 15 février 2011, AH/Commission, F‑76/09, EU:F:2011:12, point 38, et ordonnance du 16 décembre 2015, Bärwinkel/Conseil, F‑118/14, EU:F:2015:154, point 61).

    108

    En l’espèce, il est constant que, dans la décision attaquée, l’AHCC du CEPOL n’a pas pris position sur les conséquences pécuniaires statutaires pour chacun des requérants pris individuellement. En particulier, cette décision ne fait aucunement mention de l’application du coefficient correcteur prévu pour la Hongrie en lieu et place de celui prévu pour le Royaume‑Uni.

    109

    Ainsi, il ressort du dossier que, comme le soutient le CEPOL, ce n’est que dans le cadre de leurs réclamations respectives que les requérants, qui avaient alors déjà accepté de prendre leurs fonctions à Budapest, ont formellement demandé à l’AHCC du CEPOL que leur prise de fonctions soit accompagnée de mesures destinées à compenser équitablement la baisse de leur revenu net, résultant notamment, en l’occurrence, de l’application du coefficient correcteur prévu pour la Hongrie. Par suite, le Tribunal considère que cette prétention des requérants à bénéficier d’une compensation financière équitable en lien avec leurs prises de fonctions respectives à Budapest constituait une demande, au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut, demande que l’AHCC du CEPOL a rejetée dans le cadre des décisions de rejet des réclamations.

    110

    Partant, étant donné que, préalablement à l’introduction du présent recours, les requérants n’ont pas introduit de réclamation, au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut, contre le refus de l’AHCC du CEPOL, tel que matérialisé dans les décisions de rejet des réclamations, de leur octroyer une compensation financière équitable, les conclusions indemnitaires des requérants en lien avec leur prétendu préjudice matériel doivent être rejetées comme irrecevables pour non‑respect des exigences afférentes à la procédure précontentieuse.

    111

    En tout état de cause, même à supposer que les conclusions indemnitaires relatives au préjudice matériel puissent être considérées comme étroitement liées aux conclusions en annulation de la décision attaquée et des décisions de rejet des réclamations, le sort de celles‑ci devrait suivre celui desdites conclusions en annulation et, partant, elles devraient de toute façon être rejetées (arrêt du 15 décembre 2015, Bonazzi/Commission, F‑88/15, EU:F:2015:150, point 105 et jurisprudence citée).

    112

    De même, ainsi qu’il a été rappelé au point 84 du présent arrêt, dans le contexte de la réaffectation des fonctionnaires et agents concernés à un autre lieu de travail de l’institution ou agence auprès de laquelle ils ont pris leurs fonctions, les contraintes de caractère personnel et familial, que l’exécution du service peut entraîner dans ces conditions, sont compensées par les prestations pécuniaires statutaires, notamment l’indemnité de dépaysement, l’indemnité d’installation, les indemnités journalières ainsi que le remboursement des frais de déménagement vers le nouveau lieu d’affectation et des frais de voyage vers le lieu d’origine.

    113

    Quant aux prétentions des requérants à continuer de bénéficier du coefficient correcteur applicable au Royaume‑Uni postérieurement à leurs prises de fonctions respectives à Budapest, celles‑ci ne peuvent qu’être écartées, ainsi qu’il a été constaté aux points 95 à 98 du présent arrêt.

    114

    Eu égard à ce qui précède, les conclusions indemnitaires visant la réparation de préjudices matériels doivent être rejetées comme étant irrecevables et, en tout état de cause, comme étant non fondées.

    Sur les préjudices moraux

    Arguments des parties

    115

    Les requérants font valoir qu’ils ont subi un préjudice moral qui ne saurait être réparé par l’annulation de la décision attaquée et des décisions de rejet des réclamations. Outre l’illégalité particulièrement grave dont seraient affectées lesdites décisions, ils invoquent, d’une part, le fait qu’ils n’ont, selon eux, disposé que d’un délai de cinq semaines pour décider de leur déménagement à Budapest, ainsi que, d’autre part, les incertitudes et le sentiment d’insécurité auxquels le CEPOL n’aurait pas remédié, notamment l’obligation pour FN de vivre séparément de sa famille restée au Royaume‑Uni. Les requérants revendiquent ainsi un préjudice moral estimé à 15000 euros chacun.

    116

    Le CEPOL conclut au rejet des conclusions indemnitaires relatives au préjudice moral.

    Appréciation du Tribunal

    117

    Le Tribunal considère que, les conclusions en annulation ayant été rejetées, il doit en être de même des conclusions indemnitaires visant la réparation de préjudices moraux (arrêt du 15 décembre 2015, Bonazzi/Commission, F‑88/15, EU:F:2015:150, point 105 et jurisprudence citée), étant donné que ces conclusions sont étroitement liées et que, en tout état de cause, la démarche du CEPOL en l’espèce n’est entachée d’aucune illégalité.

    118

    Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, les conclusions indemnitaires doivent être rejetées, de même, partant, que le recours dans son intégralité.

    Sur les dépens

    119

    Aux termes de l’article 101 du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe supporte ses propres dépens et est condamnée aux dépens exposés par l’autre partie, s’il est conclu en ce sens. En vertu de l’article 102, paragraphe 1, du même règlement, le Tribunal peut décider, lorsque l’équité l’exige, qu’une partie qui succombe supporte ses propres dépens, mais n’est condamnée que partiellement aux dépens exposés par l’autre partie, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre.

    120

    Il résulte des motifs énoncés dans le présent arrêt que les requérants ont succombé en leur recours. En outre, le CEPOL a, dans ses conclusions, expressément demandé qu’ils soient condamnés aux dépens. Les circonstances de l’espèce ne justifiant pas l’application des dispositions de l’article 102, paragraphe 1, du règlement de procédure, les requérants doivent supporter leurs propres dépens et être condamnés à supporter les dépens exposés par le CEPOL.

     

    Par ces motifs,

    LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE (troisième chambre)

    déclare et arrête :

     

    1)

    Le recours est rejeté.

     

    2)

    FN, FP et FQ supportent leurs propres dépens et sont condamnés à supporter les dépens exposés par le Collège européen de police.

     

    Van Raepenbusch

    Kreppel

    Svenningsen

    Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 avril 2016.

    Le greffier

    W. Hakenberg

    Le président

    S. Van Raepenbusch


    ( *1 )   Langue de procédure : l’anglais.

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