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Document 62015CJ0223

Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 22 septembre 2016.
combit Software GmbH contre Commit Business Solutions Ltd.
Demande de décision préjudicielle, introduite par l'Oberlandesgericht Düsseldorf.
Renvoi préjudiciel – Règlement (CE) nº 207/2009 – Marque de l’Union européenne – Caractère unitaire – Constatation d’un risque de confusion pour une partie seulement de l’Union – Portée territoriale de l’interdiction visée à l’article 102 dudit règlement.
Affaire C-223/15.

Court reports – general

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2016:719

ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

22 septembre 2016 ( *1 )

«Renvoi préjudiciel — Règlement (CE) no 207/2009 — Marque de l’Union européenne — Caractère unitaire — Constatation d’un risque de confusion pour une partie seulement de l’Union — Portée territoriale de l’interdiction visée à l’article 102 dudit règlement»

Dans l’affaire C‑223/15,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Oberlandesgericht Düsseldorf (tribunal régional supérieur de Düsseldorf, Allemagne), par décision du 12 mai 2015, parvenue à la Cour le 18 mai 2015, dans la procédure

combit Software GmbH

contre

Commit Business Solutions Ltd,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. M. Ilešič (rapporteur), président de chambre, Mme C. Toader, M. A. Rosas, Mme A. Prechal et M. E. Jarašiūnas, juges,

avocat général : M. M. Szpunar,

greffier : M. M. Aleksejev, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 3 mars 2016,

considérant les observations présentées :

pour combit Software GmbH, par Me J. Vogtmeier, Rechtsanwältin,

pour Commit Business Solutions Ltd, par Me C. Thomas, Rechtsanwalt,

pour le gouvernement polonais, par M. B. Majczyna, en qualité d’agent,

pour la Commission européenne, par Mme J. Samnadda et M. T. Scharf, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 25 mai 2016,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant combit Software GmbH à Commit Business Solutions Ltd, au sujet d’une procédure visant à interdire à cette dernière de faire usage d’un signe verbal.

Le cadre juridique

3

Le règlement no 207/2009 a, avec effet au 23 mars 2016, été modifié par le règlement (UE) 2015/2424 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015, modifiant le règlement no 207/2009 et le règlement (CE) no 2868/95 de la Commission portant modalités d’application du règlement (CE) no 40/94 du Conseil sur la marque communautaire, et abrogeant le règlement (CE) no 2869/95 de la Commission relatif aux taxes à payer à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (JO 2015, L 341, p. 21). Compte tenu de la date des faits au principal, le présent renvoi préjudiciel est, toutefois, examiné au regard du règlement no 207/2009 tel qu’en vigueur avant cette modification (ci-après le « règlement no 207/2009 »).

4

Aux termes du considérant 3 du règlement no 207/2009 :

« Pour poursuivre les objectifs [...] de l’Union [européenne], il apparaît nécessaire de prévoir un régime [...] des marques conférant aux entreprises le droit d’acquérir, selon une procédure unique, des marques de l’Union européenne qui jouissent d’une protection uniforme et produisent leurs effets sur tout le territoire de l’Union. Le principe du caractère unitaire de la marque de l’Union européenne ainsi exprimé devrait s’appliquer sauf disposition contraire du présent règlement. »

5

L’article 1er, paragraphe 2, de ce règlement dispose :

« La marque de l’Union européenne a un caractère unitaire. Elle produit les mêmes effets dans l’ensemble de l’Union : elle ne peut être enregistrée, transférée, faire l’objet d’une renonciation, d’une décision de déchéance des droits du titulaire ou de nullité, et son usage ne peut être interdit, que pour l’ensemble de l’Union. Ce principe s’applique sauf disposition contraire du présent règlement. »

6

Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, dudit règlement :

« Sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement :

[...]

b)

lorsqu’en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque est protégée ; le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. »

7

L’article 9, paragraphe 1, de ce même règlement, dans sa version applicable à la date des faits au principal, dispose :

« La marque [de l’Union européenne] confère à son titulaire un droit exclusif. Le titulaire est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires :

[...]

b)

d’un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque [de l’Union européenne] et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services couverts par la marque [de l’Union européenne] et le signe, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public ; le risque de confusion comprend le risque d’association entre le signe et la marque ;

[...] »

8

L’article 95, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 énonce :

« Les États membres désignent sur leurs territoires un nombre aussi limité que possible de juridictions nationales de première et de deuxième instance, ci-après dénommées “tribunaux des marques de l’Union européenne”, chargées de remplir les fonctions qui leur sont attribuées par le présent règlement. »

9

Aux termes de l’article 96 de ce règlement :

« Les tribunaux des marques de l’Union européenne ont compétence exclusive :

a)

pour toutes les actions en contrefaçon et – si la loi nationale les admet – en menace de contrefaçon d’une marque de l’Union européenne ;

[...] »

10

L’article 97 dudit règlement dispose :

« 1.   [...] les procédures résultant des actions et demandes visées à l’article 96 sont portées devant les tribunaux de l’État membre sur le territoire duquel le défendeur a son domicile ou, si celui-ci n’est pas domicilié dans l’un des États membres, de l’État membre sur le territoire duquel il a un établissement.

2.   Si le défendeur n’a ni son domicile, ni un établissement sur le territoire d’un État membre, ces procédures sont portées devant les tribunaux de l’État membre sur le territoire duquel le demandeur a son domicile ou, si ce dernier n’est pas domicilié dans l’un des États membres, de l’État membre sur le territoire duquel il a un établissement.

[...] »

11

L’article 98, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 énonce :

« Un tribunal des marques de l’Union européenne dont la compétence est fondée sur l’article 97, paragraphes 1 à 4, est compétent pour statuer sur :

a)

les faits de contrefaçon commis ou menaçant d’être commis sur le territoire de tout État membre ;

[...] »

12

L’article 102, paragraphe 1, de ce règlement dispose :

« Lorsqu’un tribunal des marques de l’Union européenne constate que le défendeur a contrefait ou menacé de contrefaire une marque de l’Union européenne, il rend, sauf s’il y a des raisons particulières de ne pas agir de la sorte, une ordonnance lui interdisant de poursuivre les actes de contrefaçon ou de menace de contrefaçon. Il prend également, conformément à la loi nationale, les mesures propres à garantir le respect de cette interdiction. »

Le litige au principal et la question préjudicielle

13

combit Software, société de droit allemand, est titulaire des marques verbales allemande et de l’Union européenne combit pour des produits et des services dans le domaine de l’informatique. Les activités de cette société consistent notamment dans le développement et la commercialisation de logiciels.

14

Commit Business Solutions, société de droit israélien, vend, dans plusieurs pays, par l’intermédiaire de son site internet www.commitcrm.com, des logiciels pourvus du signe verbal « Commit ». À l’époque des faits en cause au principal, ses offres de vente pouvaient être consultées en langue allemande et les logiciels qu’elle commercialisait, une fois achetés, pouvaient être livrés en Allemagne.

15

En sa qualité de titulaire des marques combit, combit Software a, en vertu de l’article 97, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, introduit un recours contre Commit Business Solutions devant le Landgericht Düsseldorf (tribunal régional de Düsseldorf, Allemagne). À titre principal, elle demandait, en invoquant la marque de l’Union européenne dont elle est titulaire, qu’il soit ordonné à Commit Business Solutions de cesser de faire usage, dans l’Union, du signe verbal « Commit » pour les logiciels que celle-ci commercialisait. À titre subsidiaire, elle demandait, en se prévalant de la marque allemande dont elle est titulaire, à ce qu’il soit ordonné à cette même société de cesser de faire usage, en Allemagne, de ce signe verbal.

16

Le Landgericht Düsseldorf (tribunal régional de Düsseldorf) a rejeté la demande principale de combit Software, mais a accueilli sa demande subsidiaire.

17

Estimant que le Landgericht Düsseldorf (tribunal régional de Düsseldorf) aurait dû ordonner à Commit Business Solutions de cesser de faire usage du signe verbal « Commit » dans toute l’Union, combit Software a interjeté appel devant l’Oberlandesgericht Düsseldorf (tribunal régional supérieur de Düsseldorf, Allemagne).

18

Cette dernière juridiction considère que l’usage du signe verbal « Commit » par Commit Business Solutions crée, dans l’esprit du consommateur moyen germanophone, un risque de confusion avec la marque combit.

19

Il n’y aurait, en revanche, pas de risque de confusion dans l’esprit du consommateur moyen anglophone. En effet, celui-ci pourrait aisément comprendre la différence conceptuelle existant entre, d’une part, le verbe anglais to commit et, d’autre part, le terme « combit », ce dernier étant composé des lettres « com » pour computer, et des lettres « bit » pour binary digit. La similitude phonétique entre « Commit » et « combit » serait, dans l’esprit dudit consommateur anglophone, neutralisée par cette différence conceptuelle.

20

Cette même juridiction conclut à l’existence d’un risque de confusion dans les États membres germanophones et à l’absence d’un tel risque dans les États membres anglophones.

21

Elle s’interroge sur la question de savoir de quelle manière il convient, dans une telle situation, de mettre en œuvre le principe du caractère unitaire de la marque de l’Union européenne énoncé à l’article 1er, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, notamment en ce qui concerne l’appréciation du risque de confusion et l’ordonnance d’interdiction visée à l’article 102, paragraphe 1, de ce règlement.

22

Dans ces conditions, l’Oberlandesgericht Düsseldorf (tribunal régional supérieur de Düsseldorf) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« Quelles conséquences cela a-t-il sur l’appréciation du risque de confusion entre une marque verbale de l’Union européenne et une dénomination dont il est allégué qu’elle contrefait ladite marque lorsque, du point de vue du consommateur moyen d’une partie des États membres, la similitude phonétique entre la marque et la dénomination est neutralisée par une différence conceptuelle, mais non du point de vue du consommateur moyen d’autres États membres :

a)

Est-ce le point de vue du consommateur moyen des premiers États membres qui est déterminant pour apprécier le risque de confusion ou le point de vue du consommateur moyen des autres États membres, ou encore le point de vue d’un consommateur moyen fictif de tous les États membres ?

b)

Convient-il de considérer que la contrefaçon de la marque de l’Union européenne est constituée, ou n’est pas constituée, sur l’ensemble du territoire de l’Union lorsque le risque de confusion n’existe que sur une partie de ce territoire ou convient-il [d’opérer une différence] alors entre les États membres ? »

Sur la question préjudicielle

23

Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 1er, paragraphe 2, l’article 9, paragraphe 1, sous b), et l’article 102, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 doivent être interprétés en ce sens que, lorsqu’un tribunal des marques de l’Union européenne constate que l’usage d’un signe crée un risque de confusion avec une marque de l’Union européenne dans une partie du territoire de l’Union, tout en ne créant pas un tel risque dans une autre partie de ce territoire, ce tribunal doit conclure qu’il y a violation du droit exclusif conféré par cette marque et prononcer un ordre de cessation dudit usage pour l’ensemble du territoire de l’Union.

24

À cet égard, il convient de relever d’emblée que, dans une affaire telle que celle au principal, dans laquelle la juridiction saisie statue en sa qualité de tribunal des marques de l’Union européenne sur un recours introduit au titre de l’article 97, paragraphes 1 à 4, du règlement no 207/2009, cette juridiction est, conformément à l’article 98, paragraphe 1, de ce règlement, compétente pour examiner l’existence de faits de contrefaçon commis ou menaçant d’être commis sur le territoire de tout État membre.

25

Lorsque, comme en l’occurrence, le tribunal des marques de l’Union européenne saisi constate, dans l’exercice de cette compétence, que l’usage d’un signe crée, dans une partie de l’Union, un risque de confusion avec une marque de l’Union européenne, tandis que, dans une autre partie de l’Union, le même usage ne crée pas un tel risque, cette juridiction ne saurait conclure à l’absence de violation du droit exclusif conféré par cette marque. Il lui incombe, au contraire, de constater qu’il existe une atteinte à la fonction d’indication d’origine de ladite marque et que, en conséquence, il y a violation du droit exclusif conféré par celle-ci.

26

Dans ce contexte, la Cour a déjà jugé, dans une affaire portant sur le droit du titulaire d’une marque de l’Union européenne de faire opposition, en vertu de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, à l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne similaire qui créerait un risque de confusion, qu’une telle opposition doit être accueillie dès lors que l’existence du risque de confusion est établie dans une partie de l’Union, cette partie pouvant être, par exemple, le territoire d’un État membre (voir, en ce sens, arrêt du 18 septembre 2008, Armacell/OHMI, C‑514/06 P, non publié, EU:C:2008:511, points 56 et 57, ainsi que ordonnance du 16 septembre 2010, Dominio de la Vega/OHMI, C‑459/09 P, non publiée, EU:C:2010:533, points 30 et 31).

27

Une solution analogue s’impose dans les affaires portant sur le droit du titulaire d’une marque de l’Union européenne de faire interdire l’usage d’un signe qui crée un risque de confusion. L’article 9, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 protège le titulaire d’une marque de l’Union européenne contre tout usage qui porte atteinte ou est susceptible de porter atteinte à la fonction d’indication d’origine de cette marque [voir, en ce qui concerne l’article 5, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2008, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 2008, L 299, p. 24), dont le libellé correspond à celui de l’article 9, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, arrêt du 3 mars 2016, Daimler, C‑179/15, EU:C:2016:134, point 27 et jurisprudence citée]. Dès lors, ce titulaire a le droit de faire interdire un tel usage, même si celui-ci ne porte atteinte à ladite fonction que dans une partie de l’Union.

28

Il résulte des éléments exposés ci-dessus qu’un risque de confusion dans la partie germanophone de l’Union, tel que celui constaté en l’occurrence par la juridiction de renvoi, doit conduire le tribunal des marques de l’Union européenne saisi à conclure à l’existence d’une violation du droit exclusif conféré par la marque concernée.

29

Conformément à l’article 102, paragraphe 1, du règlement no 207/2009, la juridiction ayant procédé à cette constatation doit rendre une ordonnance interdisant la poursuite des actes de contrefaçon ou de menace de contrefaçon. S’il est vrai que, selon cette disposition, l’existence de « raisons particulières » peut justifier qu’une telle ordonnance ne soit pas rendue, cette dérogation doit, ainsi que la Cour l’a déjà jugé, être interprétée restrictivement et ne vise que certaines situations exceptionnelles non en cause dans l’affaire au principal (voir, en ce sens, arrêts du 14 décembre 2006, Nokia, C‑316/05, EU:C:2006:789, point 30, et du 22 juin 2016, Nikolajeva, C‑280/15, EU:C:2016:467, point 33).

30

En vue de garantir la protection uniforme dont jouit la marque de l’Union européenne sur l’ensemble du territoire de l’Union, l’interdiction de poursuivre les actes de contrefaçon ou de menace de contrefaçon doit, en principe, s’étendre à tout ce territoire [voir, en ce qui concerne le règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), abrogé et remplacé par le règlement no 207/2009, arrêt du 12 avril 2011, DHL Express France, C‑235/09, EU:C:2011:238, points 39 à 44].

31

Toutefois, ainsi qu’il découle du point 48 de l’arrêt du 12 avril 2011, DHL Express France (C‑235/09, EU:C:2011:238), dans le cas où, comme dans l’affaire au principal, le tribunal des marques de l’Union européenne constate que l’usage du signe similaire en question pour des produits identiques à ceux pour lesquels la marque de l’Union européenne en cause est enregistrée ne crée, notamment pour des motifs linguistiques, aucun risque de confusion dans une certaine partie de l’Union et n’y est donc pas susceptible de porter atteinte à la fonction d’indication d’origine de cette marque, ce tribunal doit limiter la portée territoriale de ladite interdiction.

32

En effet, lorsque le tribunal des marques de l’Union européenne conclut, sur la base des éléments qui doivent, en principe, lui être soumis par le défendeur, à l’absence d’un risque de confusion dans une partie de l’Union, le commerce légitime résultant de l’usage du signe en question dans cette partie de l’Union ne saurait être interdit. Ainsi que l’a relevé M. l’avocat général aux points 25 à 27 de ses conclusions, une telle interdiction irait au-delà du droit exclusif conféré par la marque de l’Union européenne, ce droit permettant seulement au titulaire de cette marque de protéger ses intérêts spécifiques en tant que tels, c’est-à-dire de s’assurer que ladite marque est en mesure de remplir ses fonctions propres (voir, en ce sens, arrêt du 12 avril 2011, DHL Express France, C‑235/09, EU:C:2011:238, points 46 et 47).

33

La constatation de l’absence d’un risque de confusion dans une partie de l’Union ne peut, conformément à la jurisprudence constante de la Cour, se fonder que sur un examen de tous les facteurs pertinents du cas concerné. L’appréciation doit comprendre une comparaison visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, en tenant compte, en particulier, de leurs éléments distinctifs et dominants (arrêt du 25 juin 2015, Loutfi Management Propriété intellectuelle, C‑147/14, EU:C:2015:420, point 23 et jurisprudence citée).

34

Il importe, par ailleurs, que la partie de l’Union pour laquelle le tribunal des marques de l’Union européenne concerné constate l’absence d’atteinte ou de risque d’atteinte aux fonctions de la marque soit identifiée avec précision par ce tribunal, de manière à ce qu’il découle sans ambiguïté de l’ordonnance prononcée en vertu de l’article 102 du règlement no 207/2009 quelle partie du territoire de l’Union n’est pas visée par l’interdiction d’usage du signe en cause. Lorsque, comme en l’occurrence, ce tribunal entend exclure de l’interdiction d’usage certaines zones linguistiques de l’Union telles que celles qualifiées par le terme « anglophone », il lui incombe de préciser de manière complète quelles zones il vise par ce terme.

35

L’interprétation selon laquelle l’interdiction de l’usage d’un signe créant un risque de confusion avec une marque de l’Union européenne s’applique à l’ensemble du territoire de l’Union, à l’exception de la partie de ce territoire pour laquelle l’absence d’un tel risque est constatée, ne porte pas atteinte au caractère unitaire de la marque de l’Union européenne visé à l’article 1er, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 dès lors que se trouve préservé le droit du titulaire de celle‑ci de faire interdire tout usage portant atteinte aux fonctions propres de cette marque.

36

Eu égard à tout ce qui précède, il convient de répondre à la question posée que l’article 1er, paragraphe 2, l’article 9, paragraphe 1, sous b), et l’article 102, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 doivent être interprétés en ce sens que, lorsqu’un tribunal des marques de l’Union européenne constate que l’usage d’un signe crée un risque de confusion avec une marque de l’Union européenne dans une partie du territoire de l’Union, tout en ne créant pas un tel risque dans une autre partie de ce territoire, ce tribunal doit conclure qu’il y a violation du droit exclusif conféré par cette marque et prononcer un ordre de cessation dudit usage pour l’ensemble du territoire de l’Union, à l’exception de la partie de celle-ci pour laquelle l’absence d’un risque de confusion a été constatée.

Sur les dépens

37

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) dit pour droit :

 

L’article 1er, paragraphe 2, l’article 9, paragraphe 1, sous b), et l’article 102, paragraphe 1, du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne, doivent être interprétés en ce sens que, lorsqu’un tribunal des marques de l’Union européenne constate que l’usage d’un signe crée un risque de confusion avec une marque de l’Union européenne dans une partie du territoire de l’Union européenne, tout en ne créant pas un tel risque dans une autre partie de ce territoire, ce tribunal doit conclure qu’il y a violation du droit exclusif conféré par cette marque et prononcer un ordre de cessation dudit usage pour l’ensemble du territoire de l’Union européenne, à l’exception de la partie de celle-ci pour laquelle l’absence d’un risque de confusion a été constatée.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : l’allemand.

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