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Document 62014TO0141

Ordonnance du président du Tribunal du 23 mai 2014.
SolarWorld AG, Brandoni solare SpA et Solaria Energia y Medio Ambiente, SA contre Conseil de l'Union européenne.
Référé - Dumping - Importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules) originaires ou en provenance de Chine - Droit antidumping définitif - Demande de sursis à exécution - Défaut d’urgence.
Affaire T-141/14 R.

ECLI identifier: ECLI:EU:T:2014:281

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

1er février 2016 (*)

« Recours en annulation – Dumping – Importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et de leurs composants essentiels (cellules) originaires ou en provenance de Chine – Droit antidumping définitif – Exonération des importations faisant l’objet d’un engagement accepté – Indissociabilité – Irrecevabilité »

Dans l’affaire T‑141/14,

SolarWorld AG, établie à Bonn (Allemagne),

Brandoni solare SpA, établie à Castelfidardo (Italie),

Solaria Energia y Medio Ambiente, SA, établie à Madrid (Espagne),

représentées par Me L. Ruessmann, avocat, et M. J. Beck, solicitor,

parties requérantes,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par M. B. Driessen, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

soutenu par

Commission européenne, représentée par MM. J.-F. Brakeland, T. Maxian Rusche et Mme A. Stobiecka-Kuik, en qualité d’agents,

par

Canadian Solar Manufacturing (Changshu), Inc., établie à Changshu (Chine),

Canadian Solar Manufacturing (Luoyang), Inc., établie à Luoyang (Chine),

Csi Cells Co. Ltd, établie à Suzhou (Chine),

et

Csi Solar Power (China), Inc., établie à Suzhou,

représentées par Mes A. Willems, S. De Knop, avocats, et M. K. Daly, solicitor,

et par

China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products, établie à Pékin (Chine), représentée par Mes J.-F. Bellis, F. Di Gianni et A. Scalini, avocats,

parties intervenantes,

ayant pour objet une demande d’annulation de l’article 3 du règlement d’exécution (UE) n° 1238/2013 du Conseil, du 2 décembre 2013, instituant un droit antidumping définitif et collectant définitivement le droit antidumping provisoire institué sur les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules) originaires ou en provenance de la République populaire de Chine (JO L 325, p. 1),

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. A. Dittrich, président, J. Schwarcz (rapporteur) et Mme V. Tomljenović, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents du litige

1        Les requérantes, SolarWorld AG, Brandoni solare SpA et Solaria Energia y Medio Ambiente, SA, sont des producteurs européens de modules photovoltaïques en silicium cristallin et de leurs composants essentiels.

2        Une association de producteurs européens de modules photovoltaïques en silicium cristallin et de leurs composants essentiels, EU ProSun, a déposé une plainte auprès de la Commission européenne, le 25 juillet 2012, concernant des pratiques de dumping relatives aux importations de ces produits en provenance de la République populaire de Chine.

3        Le 6 septembre 2012, la Commission a publié un avis d’ouverture d’une procédure antidumping concernant les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules et wafers) originaires de la République populaire de Chine (JO C 269, p. 5).

4        Les requérantes ont coopéré dans cette procédure.

5        Le 8 novembre 2012, la Commission a publié un avis d’ouverture d’une procédure antisubventions concernant les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules et wafers) originaires de la République populaire de Chine (JO C 340, p. 13).

6        Le 4 juin 2013, la Commission a adopté le règlement (UE) n° 513/2013, instituant un droit antidumping provisoire sur les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules et wafers) originaires ou en provenance de la République populaire de Chine et modifiant le règlement (UE) n° 182/2013 soumettant à enregistrement ces importations originaires ou en provenance de la République populaire de Chine (JO L 152, p. 5).

7        Le recours en annulation du règlement n° 513/2013 a été rejeté par une ordonnance du 14 avril 2015, SolarWorld et Solsonica/Commission (T‑393/13, EU:T:2015:211), faisant l’objet d’un pourvoi pendant devant la Cour (affaire C‑312/15 P).

8        Par lettre adressée à la Commission le 27 juillet 2013, la chambre de commerce chinoise pour l’importation et l’exportation de machines et de produits électroniques (ci-après la « CCCME ») a soumis, dans le cadre de l’enquête antidumping, une offre d’engagement conjoint de plusieurs producteurs-exportateurs chinois. En substance, elle proposait, au nom de ceux-ci et en son nom propre, l’application de prix minimaux à l’importation pour les modules photovoltaïques et pour chacun de leurs éléments essentiels (cellules et wafers) jusqu’à un certain niveau annuel d’importation (ci-après les « PMI »).

9        Le 29 juillet 2013, une déclaration du membre de la Commission chargé du commerce (memo/13/730), portant sur la solution amiable trouvée dans l’affaire relative aux panneaux solaires opposant l’Union européenne et la Chine, a été publiée.

10      Après communication par la Commission d’une version non confidentielle de l’offre d’engagement le 29 juillet 2013, EU ProSun a fait part, le 1er août 2013, de ses observations sur cette offre.

11      Le 2 août 2013, la Commission a adopté la décision 2013/423/UE, portant acceptation d’un engagement offert dans le cadre de la procédure antidumping concernant les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules et wafers) originaires ou en provenance de la République populaire de Chine (JO L 209, p. 26) par un groupe de producteurs-exportateurs chinois ayant coopéré, en concertation avec la CCCME, et qui sont énumérés en annexe à ladite décision.

12      Les considérants 5 et 6 de la décision 2013/423 indiquent que les producteurs-exportateurs chinois énumérés à son annexe se sont engagés à respecter des PMI pour les modules photovoltaïques et pour chacun de leurs éléments essentiels (cellules et wafers), et qu’ils ont proposé de garantir que le volume des importations effectuées dans le cadre de l’engagement serait fixé à un niveau annuel correspondant approximativement à leur performance sur le marché au moment de la formulation de l’offre. Il découle, en outre, du considérant 8 de la décision 2013/423 qu’un droit antidumping provisoire sera perçu sur les importations dépassant ledit volume annuel.

13      Le règlement (UE) n° 748/2013 de la Commission, du 2 août 2013, portant modification du règlement n° 513/2013 (JO L 209, p. 1), a été adopté afin de tenir compte de la décision 2013/423. Parmi d’autres modifications, il a introduit un article 6 dans le règlement n° 513/2013, qui prévoit, pour autant que certaines conditions soient remplies, que les importations de certains produits déclarées pour la mise en libre pratique et facturées par des sociétés dont les engagements ont été acceptés par la Commission et qui sont énumérées à l’annexe de la décision 2013/423 sont exonérées du droit antidumping provisoire institué par l’article 1er du règlement n° 513/2013.

14      Par lettre du 25 septembre 2013, d’abord, la CCCME, en son nom propre ainsi qu’en tant que représentant des producteurs-exportateurs dont l’offre d’engagement initial avait été acceptée, a demandé à la Commission d’accepter les termes de cet engagement en vue d’éliminer également les effets préjudiciables des importations faisant l’objet de subventions. Ensuite, elle lui a demandé, en tant que représentant d’un certain nombre de producteurs-exportateurs additionnels, d’inclure ces derniers dans la liste des entreprises dont l’offre d’engagement avait été acceptée. Enfin, elle l’a informée qu’elle demandait une révision de l’engagement de façon à tenir compte de l’exclusion des wafers du champ de l’enquête.

15      Par lettre du 24 octobre 2013, la Commission a informé EU ProSun qu’un projet de décision confirmant l’acceptation d’un engagement offert dans le cadre des procédures antidumping et antisubventions concernant les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et de leurs composants essentiels (cellules) originaires ou en provenance de la République populaire de Chine, ainsi qu’une version non confidentielle de l’offre d’engagement modifiée, avaient été mis à disposition dans le dossier non confidentiel. EU ProSun a été invitée à fournir ses observations éventuelles dans un délai de dix jours. En outre, la Commission a répondu aux observations qu’EU ProSun avait présentées au cours de la procédure. Elle l’a notamment informée que ses services avaient utilisé « différentes méthodologies, sources et indicateurs » afin d’examiner si l’engagement modifié fournissait la même protection que les droits antidumping ad valorem.

16      La Commission a adopté la décision d’exécution 2013/707/UE, du 4 décembre 2013, confirmant l’acceptation d’un engagement offert dans le cadre des procédures antidumping et antisubventions concernant les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules) originaires ou en provenance de la République populaire de Chine pour la période d’application des mesures définitives (JO L 325, p. 214).

17      Il découle du considérant 4 de la décision d’exécution 2013/707 que, à la suite de l’adoption des mesures antidumping provisoires, la Commission a poursuivi l’enquête sur le dumping, le préjudice et l’intérêt de l’Union ainsi que la procédure antisubventions menée parallèlement, et que les wafers ont été exclus du champ des deux enquêtes et, donc, du champ d’application des mesures définitives.

18      Selon le considérant 5 de la décision d’exécution 2013/707, l’enquête antidumping a confirmé les conclusions provisoires concernant l’existence d’un dumping préjudiciable.

19      Il ressort des considérants 7 à 10 et de l’article 1er de la décision d’exécution 2013/707 que, à la suite de la notification des conclusions finales des procédures antidumping et antisubventions, les producteurs-exportateurs chinois, en concertation avec la CCCME, ont présenté une notification en vue de modifier leur offre d’engagement initiale. Cette modification de l’engagement portait sur l’exclusion des wafers du champ de l’enquête, sur la participation d’un certain nombre de producteurs-exportateurs additionnels à cet engagement et sur l’extension des termes de l’engagement en vue d’éliminer également les effets préjudiciables des importations faisant l’objet de subventions.

20      Le recours en annulation de la décision 2013/423 et de la décision d’exécution 2013/707 a été rejeté par une ordonnance du 14 janvier 2015, SolarWorld e.a./Commission (T‑507/13, Rec, EU:T:2015:23), faisant l’objet d’un pourvoi pendant devant la Cour (affaire C‑142/15 P).

21      Les conclusions définitives de l’enquête figurent dans le règlement d’exécution (UE) n° 1238/2013 du Conseil, du 2 décembre 2013, instituant un droit antidumping définitif et collectant définitivement le droit antidumping provisoire institué sur les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules) originaires ou en provenance de la République populaire de Chine (JO L 325, p. 1, ci-après le « règlement définitif »).

22      Selon l’article 1er du règlement définitif, il est institué un droit antidumping définitif sur les importations de modules ou panneaux photovoltaïques en silicium cristallin et de cellules du type utilisé dans les modules ou panneaux photovoltaïques en silicium cristallin relevant de certains codes de la nomenclature douanière, originaires ou en provenance de la République populaire de Chine.

23      Aux termes de l’article 3, paragraphe 1, du règlement définitif, qui s’applique à certains produits dont les références sont spécifiées au regard de la nomenclature douanière et qui sont facturés par des sociétés dont la Commission a accepté des engagements et dont les noms figurent à l’annexe de la décision d’exécution 2013/707, les importations déclarées pour la mise en libre pratique sont exonérées du droit antidumping institué par l’article 1er dudit règlement si certaines conditions sont respectées.

24      L’article 3, paragraphe 2, du règlement définitif énonce qu’une dette douanière naît au moment de l’acceptation de la déclaration de mise en libre pratique dès lors qu’il est établi qu’une ou plusieurs des conditions énoncées à l’article 3, paragraphe 1, n’ont pas été remplies ou lorsque la Commission retire son acceptation de l’engagement.

 Procédure et conclusions des parties

25      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 28 février 2014, les requérantes ont introduit le présent recours.

26      Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 31 mars 2014, les requérantes ont introduit, en vertu de l’article 278 TFUE et des articles 104 et suivants du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991, une demande de sursis à l’exécution de l’article 3 du règlement définitif, jusqu’à ce que le Tribunal ait statué au fond sur le présent recours.

27      Par ordonnance du 23 mai 2014, SolarWorld e.a./Conseil (T‑141/14 R, EU:T:2014:281), le président du Tribunal a rejeté la demande de sursis à exécution pour défaut d’urgence.

28      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 15 avril 2014, la Commission a demandé à intervenir au soutien des conclusions du Conseil de l’Union européenne. Le Conseil et les requérantes ont présenté leurs observations écrites, respectivement, les 30 avril et 15 mai 2014.

29      Par ordonnance du président de la cinquième chambre du Tribunal du 4 juin 2014, la Commission a été admise à intervenir.

30      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 20 juin 2014, Canadian Solar Manufacturing (Changshu), Inc., Canadian Solar Manufacturing (Luoyang), Inc., Csi Cells Co. Ltd, et Csi Solar Power (China), Inc. (ci-après, prises ensemble, « Canadian Solar ») et Canadian Solar EMEA GmbH ont demandé à intervenir au soutien des conclusions du Conseil. La Commission, le Conseil et les requérantes ont présenté leurs observations écrites, respectivement, les 17 juillet, 22 juillet et 8 août 2014.

31      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 20 juin 2014, la CCCME a demandé à intervenir au soutien des conclusions du Conseil. La Commission, le Conseil et les requérantes ont présenté leurs observations écrites, respectivement, les 17 juillet, 22 juillet et 8 août 2014.

32      Par deux ordonnances du président de la cinquième chambre du Tribunal du 28 novembre 2014, Canadian Solar et la CCCME ont été admises à intervenir, la demande d’intervention de Canadian Solar EMEA GmbH étant rejetée au motif que cette dernière n’avait pas prouvé qu’elle avait un intérêt à la solution du litige.

33      Par actes déposés au greffe du Tribunal les 8 août et 6 novembre 2014, les requérantes ont demandé le traitement confidentiel à l’égard de Canadian Solar et de la CCCME de certains éléments figurant dans la requête et dans ses annexes, ainsi que dans le mémoire en défense, la réplique et la duplique. La CCCME a déclaré ne pas avoir d’objection. Canadian Solar n’a pas émis d’observations.

34      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 22 septembre 2015, le Conseil a demandé que le présent recours soit joint à l’affaire T‑142/14, SolarWorld e.a./Conseil, aux fins de la procédure orale et de la décision mettant fin à l’instance. Les requérantes ont présenté leurs observations écrites sur cette demande le 13 octobre 2015.

35      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 23 novembre 2015, Canadian Solar a déclaré retirer son intervention dans la présente affaire. Par courriers déposés au greffe du Tribunal les 7 et 9 décembre 2015, la Commission et le Conseil ont, respectivement, fait savoir qu’ils n’avaient pas d’observation sur le retrait de Canadian Solar. Ni les requérantes ni la CCCME n’a présenté d’observation.

36      Les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        constater que le recours est recevable et fondé ;

–        annuler l’article 3 du règlement définitif (ci-après la « disposition attaquée ») ;

–        joindre la présente affaire à l’affaire T‑507/13, SolarWorld e.a./Commission ;

–        condamner le Conseil aux dépens ;

–        condamner la Commission aux dépens afférents à son intervention ;

–        condamner Canadian Solar et la CCCME à supporter leurs propres dépens.

37      Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme étant non fondé ;

–        condamner les requérantes aux dépens.

38      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme irrecevable ;

–        à titre subsidiaire, rejeter le recours comme non fondé ;

–        joindre la présente affaire à l’affaire T‑142/14, SolarWorld e.a./Conseil ;

–        condamner les requérantes aux dépens, y compris ceux qu’elle a exposés.

39      La CCCME conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        faire droit aux conclusions du Conseil, à savoir rejeter la requête comme non fondée ;

–        condamner les requérantes aux dépens.

40      Canadian Solar conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours irrecevable ;

–        à titre subsidiaire, rejeter le recours comme non fondé ;

–        condamner les requérantes aux dépens, y compris ceux qu’elle a exposés.

 En droit

41      En vertu de l’article 129 de son règlement de procédure, sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal peut, à tout moment, d’office, les parties principales entendues, décider de statuer par voie d’ordonnance motivée sur les fins de non-recevoir d’ordre public.

42      En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et considère qu’il y a lieu, par conséquent, de statuer sans poursuivre la procédure.

43      Sans présenter d’exception d’irrecevabilité, le Conseil, soutenu par les intervenants, soulève deux motifs d’irrecevabilité du recours. D’une part, la disposition attaquée ne pourrait être dissociée du règlement définitif. D’autre part, les requérantes n’auraient pas qualité pour agir au sens de l’article 263 TFUE, puisqu’elles ne seraient ni directement ni individuellement concernées et qu’elles ne pourraient se fonder sur l’hypothèse prévue par le dernier membre de phrase de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE pour se voir reconnaître qualité pour agir.

44      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que les requérantes demandent l’annulation de la seule disposition attaquée, à savoir l’article 3 du règlement définitif. La disposition attaquée prévoit, dans son paragraphe 1, que le Conseil exonère du droit antidumping institué par l’article 1er dudit règlement, sous réserve du respect de certaines conditions, les importations de certains produits dont les références sont spécifiées au regard de la nomenclature douanière, facturées par des sociétés dont la Commission a accepté des engagements et dont les noms figurent à l’annexe de la décision d’exécution 2013/707.

45      Il convient tout particulièrement d’examiner le premier motif d’irrecevabilité soulevé, à savoir l’absence de caractère détachable de la disposition attaquée.

46      Le Conseil, soutenu par la Commission et la CCCME, soutient que la disposition attaquée est indissociable du reste du règlement définitif et qu’elle ne peut en être séparée, puisque son annulation modifierait la substance même du règlement. Le règlement définitif reposerait sur l’effet économique de la combinaison des mesures adoptées. Si les droits antidumping étaient étendus à l’ensemble des importations, la mesure serait sensiblement différente de celle adoptée, alors qu’il n’est pas certain qu’un règlement instituant des droits antidumping à l’égard de toutes les importations aurait été adopté. Dans la duplique, le Conseil reproche aux requérantes de ne pas tenir compte du fait que l’annulation de la disposition attaquée augmenterait substantiellement le nombre d’importations sur lesquelles les droits antidumping seraient perçus, transformant ainsi l’institution partielle de droits antidumping en une institution complète, ce qui aboutirait à une modification substantielle du règlement définitif.

47      Les requérantes estiment que tous les articles du règlement définitif peuvent s’appliquer sans la disposition attaquée et qu’ils ne sont pas ambigus, ce qui rend inutile leur interprétation par référence aux considérants dudit règlement. Elles insistent sur le fait que rien dans le règlement définitif ne fait dépendre l’imposition de droits antidumping de la disposition attaquée, la question de l’application des PMI à un niveau d’importation étant sans pertinence pour déterminer si la disposition attaquée peut être détachée. Elles sont également d’avis que la volonté des producteurs-exportateurs chinois n’a pas d’incidence sur ce point, puisque, au contraire, l’imposition de droits antidumping ne dépend pas de l’accord des producteurs-exportateurs concernés et que l’engagement qu’ils offrent dépend, lui, de l’accord de la Commission. Elles notent que l’engagement offert n’a pas été une condition de l’adoption du règlement définitif.

48      Il ressort de la jurisprudence que l’annulation partielle d’un acte de l’Union n’est possible que pour autant que les éléments dont l’annulation est demandée soient détachables du reste de l’acte (arrêts du 10 décembre 2002, Commission/Conseil, C‑29/99, Rec, EU:C:2002:734, point 45 ; du 30 septembre 2003, Allemagne/Commission, C‑239/01, Rec, EU:C:2003:514, point 33, et du 24 mai 2005, France/Parlement et Conseil, C‑244/03, Rec, EU:C:2005:299, point 12).

49      Il a, de même, été itérativement jugé qu’il n’était pas satisfait à cette exigence de séparabilité lorsque l’annulation partielle d’un acte aurait pour effet de modifier la substance de l’acte (arrêt France/Parlement et Conseil, point 48 supra, EU:C:2005:299, point 13 ; voir également, en ce sens, arrêts Commission/Conseil, point 48 supra, EU:C:2002:734, point 46, et Allemagne/Commission, point 48 supra, EU:C:2003:514, point 34).

50      Il a également été jugé que la question de savoir si une annulation partielle modifierait la substance de l’acte attaqué constitue un critère objectif et non un critère subjectif lié à la volonté politique de l’autorité qui a adopté ledit acte (arrêts Allemagne/Commission, point 48 supra, EU:C:2003:514, point 37 ; France/Parlement et Conseil, point 48 supra, EU:C:2005:299, point 14, et du 30 mars 2006, Espagne/Conseil, C‑36/04, Rec, EU:C:2006:209, point 14).

51      En outre, la vérification du caractère détachable des dispositions dont l’annulation est demandée suppose l’examen de la portée desdites dispositions, afin de pouvoir évaluer si leur annulation modifierait l’esprit et la substance de l’acte dans lequel elles s’insèrent (voir, en ce sens, arrêt du 29 mars 2012, Commission/Estonie, C‑505/09 P, Rec, EU:C:2012:179, point 112, et ordonnance du 11 décembre 2014, Carbunión/Conseil, C‑99/14 P, EU:C:2014:2446, point 30).

52      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient de déterminer si la disposition attaquée est dissociable du reste du règlement définitif et peut, partant, faire l’objet d’un recours en annulation.

53      En premier lieu, il convient de constater que le Conseil et la Commission sont d’accord avec les requérantes sur les effets de l’annulation de la disposition attaquée sur le règlement définitif. Une telle annulation conduirait à appliquer les droits antidumping à toutes les importations provenant des producteurs-exportateurs chinois ayant offert l’engagement accepté par la décision d’exécution 2013/707. L’article 2 de l’offre d’engagement du 27 juillet 2013, présentée par la CCCME, prévoit la fixation de PMI pour les modules et les cellules jusqu’à un certain niveau annuel, l’article 2.2 précisant que les ventes dans l’Union du produit concerné qui ne tombent pas dans le champ d’application de l’engagement sont soumises au droit antidumping. L’article 1er, paragraphe 2, du règlement définitif fixe les taux spécifiques de droit antidumping pour des producteurs-exportateurs chinois nommément désignés, dont la quasi-totalité a souscrit l’engagement accepté, ainsi que des taux différents pour trois ensembles de sociétés non identifiées.

54      En deuxième lieu, il convient de constater que l’annulation de la disposition attaquée entraînerait une modification des effets du règlement définitif, les importations du produit concerné provenant des producteurs-exportateurs chinois ayant souscrit l’engagement n’étant plus exonérées, dans certaines limites annuelles, des droits antidumping prévus par son article 1er, paragraphe 2. S’il était fait droit à la demande d’annulation de la disposition attaquée, il résulte de l’examen de la portée de ladite disposition que l’esprit et la substance mêmes du règlement définitif seraient modifiés (voir, en ce sens, arrêt Commission/Estonie, point 51 supra, EU:C:2012:179, point 112, et ordonnance Carbunión/Conseil, point 51 supra, EU:C:2014:2446, point 30).

55      En effet, la disposition attaquée accorde, dans une certaine limite quantitative, une exonération de droits antidumping à des opérateurs économiques nommément désignés, sous réserve que les conditions qu’elle prévoit soient respectées. L’annulation de la disposition attaquée aurait pour conséquence, en éliminant l’exonération de droits applicable dans cette limite quantitative, de conférer une portée plus large aux droits antidumping que celle ressortant de l’application du règlement définitif tel qu’il a été adopté par le Conseil, puisque, dans cette hypothèse, lesdits droits frapperaient toutes les importations du produit concerné en provenance de Chine, alors que, en application de l’ensemble dudit règlement, ces droits ne frappent que les importations provenant des exportateurs chinois qui n’ont pas souscrit l’engagement accepté par la Commission au moyen de la décision d’exécution 2013/707, ces importations correspondant, selon les parties, à 30 % des importations totales du produit concerné. Un tel résultat constituerait une modification de la substance de l’acte dans lequel s’insère la disposition dont l’annulation est demandée, ici le règlement définitif.

56      Dans une certaine mesure, les conséquences de l’annulation de la disposition attaquée peuvent être comparées à celles que le juge de l’Union a prises en considération pour juger que des dispositions dont l’annulation était demandée n’étaient pas séparables du reste des actes dans lesquels elles s’inséraient.

57      Premièrement, il s’agit de l’hypothèse selon laquelle la Cour a rejeté comme irrecevable un recours dirigé contre les dispositions d’une directive portant sur l’interdiction totale de publicité en faveur des produits du tabac, au motif que l’annulation aurait eu pour effet de transformer une interdiction totale de publicité en une interdiction partielle (arrêt du 5 octobre 2000, Allemagne/Parlement et Conseil, C‑376/98, Rec, EU:C:2000:544, point 117). Deuxièmement, il s’agit de l’hypothèse selon laquelle le Tribunal a rejeté comme irrecevable un recours dirigé contre l’inscription d’un site comme site d’importance communautaire à l’annexe d’une directive dans la mesure où l’inscription étendait ce site aux eaux territoriales de Gibraltar, au motif que l’annulation aurait nécessité de modifier la superficie du site d’importance communautaire et, donc, la substance de la décision d’inscription (ordonnance du 24 mai 2011, Government of Gibraltar/Commission, T‑176/09, EU:T:2011:239, points 38 à 41, confirmée par ordonnance du 12 juillet 2012, Government of Gibraltar/Commission, C‑407/11 P, EU:C:2012:464, points 30 à 35). Troisièmement, il s’agit de l’hypothèse selon laquelle le Tribunal a rejeté comme irrecevable un recours dirigé contre les dispositions d’une directive portant inscription d’une substance active dans l’annexe de la directive concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, au motif que l’annulation aurait eu pour effet de transformer une inscription de la substance limitée à une certaine durée et pour certaines cultures en une inscription sans limite de durée et pour toutes les cultures, le Tribunal ayant pris en considération les objectifs du régime d’autorisation de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, les limitations contestées constituant des conditions impératives et essentielles de l’inscription de la substance à l’annexe en question [arrêt du 12 avril 2013, Du Pont de Nemours (France) e.a./Commission, T‑31/07, EU:T:2013:167, point 85]. Quatrièmement, il s’agit de l’hypothèse selon laquelle la Cour a rejeté comme irrecevable un recours dirigé contre les dispositions d’une décision en matière d’aide d’État, au motif que l’annulation aurait eu pour effet de transformer l’acceptation d’une aide à des entreprises limitée dans le temps en une acceptation sans limite temporelle (ordonnance Carbunión/Conseil, point 51 supra, EU:C:2014:2446, point 31). Or, les situations qui seraient nées de l’annulation des dispositions attaquées dans ces différentes affaires sont similaires à celle à laquelle l’annulation de la disposition attaquée conduirait.

58      En effet, s’il avait annulé les dispositions alors attaquées, le juge de l’Union aurait été conduit à modifier le champ d’application des mesures comprises dans les actes qui contenaient les dispositions faisant l’objet des recours en annulation. Il en a déduit que les modifications induites par l’annulation des dispositions alors attaquées auraient porté atteinte à la substance des actes qui les contenaient.

59      Par suite, au vu de la modification de la substance du règlement définitif qu’entraînerait l’annulation de la disposition attaquée, qui supprimerait l’exonération de droits antidumping dont bénéficient les importations des producteurs-exportateurs chinois ayant souscrit l’engagement accepté par la Commission, la disposition attaquée n’est pas dissociable du reste de ce règlement.

60      En troisième lieu, force est de constater que les arguments des requérantes, exposés au point 47 ci-dessus, ne sont pas de nature à remettre en cause la conclusion relative à l’indissociabilité de la disposition attaquée. En effet, la question de savoir si tous les articles du règlement définitif peuvent s’appliquer sans la disposition attaquée n’a pas d’incidence sur l’appréciation de la portée de la modification apportée audit règlement en cas d’annulation de cette disposition, appréciation qui constitue le test à effectuer pour déterminer si la substance de l’acte juridique contenant les dispositions dont l’annulation est demandée est modifiée. Il en est de même de la circonstance que les articles du règlement définitif ne seraient pas ambigus, ce qui rendrait inutile leur interprétation par référence aux considérants, du fait que rien dans le règlement définitif ne fait dépendre l’imposition de droits antidumping de la disposition attaquée et du fait que l’engagement offert n’a pas été une condition de l’adoption du règlement définitif. Aucun de ces arguments n’est de nature à remettre en cause la conclusion à laquelle le Tribunal parvient au point 55 ci-dessus, dont il ressort que l’annulation de la disposition attaquée aurait pour conséquence de conférer une portée plus large aux droits antidumping institués par l’article 1er, paragraphe 2, du règlement définitif que celle ressortant de l’application dudit règlement tel qu’il a été adopté par le Conseil, ce qui constituerait, sans doute possible, une modification de la substance du règlement définitif.

61      Dès lors, le recours doit être rejeté comme irrecevable, la disposition attaquée n’étant pas dissociable du règlement définitif. Par suite, il n’est besoin de statuer ni sur la demande de jonction du présent recours avec l’affaire T‑507/13, SolarWorld e.a./Commission et avec l’affaire T‑142/14, SolarWorld e.a./Conseil, ni sur la demande de mesures d’organisation de la procédure afin d’examiner si l’intervention de Canadian Solar est toujours recevable.

 Sur les dépens

62      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Les requérantes ayant succombé, il y a lieu, conformément aux conclusions du Conseil, de les condamner aux dépens, y compris ceux afférents à la procédure de référé.

63      Aux termes de l’article 136, paragraphes 1 et 4, du règlement de procédure, la partie qui se désiste est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens par l’autre partie dans ses observations sur le désistement et, à défaut de conclusions sur les dépens, chaque partie supporte ses propres dépens.

64      Aucune conclusion relative aux dépens afférents à la demande d’intervention de Canadian Solar n’ayant été présentée, il convient de décider que cette dernière supportera ses propres dépens et que chaque partie supportera ses propres dépens relatifs à ladite demande d’intervention.

65      Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, les États membres et les institutions qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens. Il y a donc lieu de dire que la Commission supportera ses propres dépens.

66      Aux termes de l’article 138, paragraphe 3, du règlement de procédure, le Tribunal peut décider qu’un intervenant autre que ceux mentionnés aux paragraphes 1 et 2 du même article supportera ses propres dépens. Il y a donc lieu de dire que la CCCME supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté comme irrecevable.

2)      Canadian Solar Manufacturing (Changshu), Inc., Canadian Solar Manufacturing (Luoyang), Inc., Csi Cells Co. Ltd et Csi Solar Power (China), Inc. sont radiées de l’affaire T‑141/14 en tant que parties intervenantes.

3)      SolarWorld AG, Brandoni solare SpA et Solaria Energia y Medio Ambiente, SA sont condamnées à supporter leurs dépens ainsi que ceux du Conseil de l’Union européenne, y compris ceux afférents à la procédure de référé.

4)      La Commission européenne, Canadian Solar Manufacturing (Changshu), Inc., Canadian Solar Manufacturing (Luoyang), Inc., Csi Cells Co. Ltd, Csi Solar Power (China), Inc. et China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products supporteront leurs propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 1er février 2016.

Le greffier

 

       Le président

E.  Coulon

 

       A. Dittrich


* Langue de procédure : l’anglais.

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