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Document 62014CC0085

Conclusions de l'avocat général Bot présentées le 16 avril 2015.
KPN BV contre Autoriteit Consument en Markt (ACM).
Demande de décision préjudicielle: College van Beroep voor het bedrijfsleven - Pays-Bas.
Renvoi préjudiciel - Réseaux et services de communications électroniques - Service universel et droits des utilisateurs - Directive 2002/22/CE - Article 28 - Accès aux numéros et aux services - Numéros non géographiques - Directive 2002/19/CE - Articles 5, 8 et 13 - Pouvoirs des autorités réglementaires nationales - Contrôle des prix - Services de transit des appels - Réglementation nationale imposant aux fournisseurs de services de transit des appels téléphoniques de ne pas pratiquer des tarifs plus élevés pour les appels vers des numéros non géographiques que pour les appels vers des numéros géographiques - Entreprise dépourvue d’une puissance significative sur le marché - Autorité nationale compétente.
Affaire C-85/14.

Court reports – general

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2015:245

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. YVES BOT

présentées le 16 avril 2015 ( 1 )

Affaire C‑85/14

KPN BV

contre

Autoriteit Consument en Markt (ACM)

[demande de décision préjudicielle formée par le College van Beroep voor het Bedrijfsleven (Pays‑Bas)]

«Renvoi préjudiciel — Réseaux et services de communications électroniques — Directive 2002/22/CE — Article 28 — Intérêts et droits des utilisateurs finals — Accès aux numéros non géographiques et aux services utilisant ces numéros — Réglementation nationale imposant aux fournisseurs de services de transit des appels téléphoniques de ne pas pratiquer des tarifs plus élevés pour les appels vers des numéros non géographiques que pour les appels vers des numéros géographiques — Situation d’accès transfrontalier — Contrôle de proportionnalité de la mesure nécessaire par le juge national — Notion d’‘autorités nationales compétentes’»

1. 

En matière de communications électroniques, l’existence d’un marché unique européen implique, notamment, que, en principe, toutes les personnes physiques puissent avoir accès à tous les numéros géographiques et non géographiques dans l’Union européenne ainsi qu’aux services proposés au moyen des numéros non géographiques.

2. 

Au sein du nouveau cadre réglementaire applicable aux services de communications électroniques (ci‑après le «NCR») ( 2 ) , l’article 28 de la directive «service universel» vise à garantir un tel accès aux numéros et aux services.

3. 

En effet, cet article 28, lequel figure au chapitre IV de la directive «service universel» ( 3 ) , prévoit, à son paragraphe 1, que les États membres veillent à ce que les autorités nationales compétentes prennent toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que les utilisateurs finals ( 4 ) disposent d’un accès aux services utilisant des numéros non géographiques dans l’Union et à tous les numéros fournis dans l’Union.

4. 

Selon l’article 2, sous d) et f), de la directive «service universel», un numéro non géographique, défini par opposition à un numéro géographique ( 5 ) , est un numéro du plan national de numérotation dont la structure numérique ne contient aucune des significations géographiques utilisées pour acheminer les appels vers le lieu physique du point de terminaison du réseau. Il s’agit, notamment, des numéros mobiles, des numéros d’appel gratuits et des numéros à taux majoré.

5. 

Par la présente demande de décision préjudicielle, la Cour est invitée, pour la première fois, à préciser le champ d’application et la portée de l’article 28 de la directive «service universel».

6. 

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant KPN BV (ci‑après «KPN»), l’opérateur historique de télécommunications aux Pays‑Bas, à l’Autoriteit Consument en Markt (ACM) (Autorité des consommateurs et des marchés), agissant en tant qu’autorité réglementaire nationale (ci‑après «ARN»), en raison de la violation par KPN de la législation nationale transposant l’article 28 de la directive «service universel».

7. 

Le Royaume des Pays‑Bas a transposé cet article 28 dans le droit national par l’article 6.5 de la loi sur les télécommunications (Telecommunicatiewet), lequel prévoit la possibilité d’établir des règles plus détaillées par ou en vertu d’une mesure générale d’administration ( 6 ) afin de garantir l’obligation d’accès aux numéros géographiques et non géographiques ainsi qu’aux services utilisant ces derniers numéros.

8. 

Le gouvernement néerlandais a fait usage de cette possibilité en adoptant l’article 5 de l’arrêté relatif aux règles sur l’interopérabilité des services de communications électroniques publics, l’accès à l’espace de numérotation téléphonique européen et l’accès transfrontalier aux numéros non géographiques (Besluit houdende regels met betrekking tot interoperabiliteit van openbare elektronische communicatiediensten, toegang tot de Europese telefoonnummeringsruimte en landsgrensoverschrijdende toegang tot niet‑geografische nummers – Besluit Interoperabiliteit, ci‑après la «mesure nationale tarifaire»). Cette mesure, après modification le 1 er juillet 2013, vise à garantir un accès aux services utilisant les numéros non géographiques en interdisant aux fournisseurs de réseaux ou de services de communications électroniques accessibles au public de facturer, pour les appels vers des numéros non géographiques, des tarifs plus élevés que ceux qu’ils facturent pour les appels vers des numéros géographiques.

9. 

Il ressort des pièces du dossier que la mesure nationale tarifaire est applicable à tous les fournisseurs intervenant lors de l’appel d’un numéro non géographique, y compris aux fournisseurs de services de transit d’appels ( 7 ) , tels que KPN aux Pays‑Bas.

10. 

L’article 28 de la directive «service universel» permet‑il l’adoption d’une telle mesure à l’encontre de fournisseurs de services de transit d’appels? Telle est, en substance, la question centrale à laquelle la Cour est invitée à répondre.

11. 

Selon KPN et la Commission européenne, il devrait être répondu à cette question par la négative pour, principalement, trois raisons. Premièrement, l’article 28 de la directive «service universel» ne saurait régir les relations entre les fournisseurs (marché de gros). Il s’appliquerait seulement aux relations entre les fournisseurs et les particuliers (marché de détail). Deuxièmement, le NCR n’autoriserait l’adoption de la mesure nationale tarifaire qu’au terme d’une analyse du marché effectuée par l’ARN à l’encontre d’un opérateur disposant d’une puissance significative sur le marché en cause, et non pas, comme en l’occurrence, à l’encontre d’un ensemble de fournisseurs. Troisièmement, seule une ARN, et non pas le gouvernement néerlandais, serait l’autorité nationale compétente pour imposer une telle mesure.

12. 

Dans les présentes conclusions, nous expliquerons les raisons pour lesquelles nous considérons que la réponse à donner à ladite question doit, au contraire, être affirmative. Selon nous, l’article 28 de la directive «service universel» doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à ce qu’une autorité autre qu’une ARN édicte une mesure tarifaire telle que celle en cause au principal, sans qu’il soit apparu d’une analyse du marché qu’un opérateur dispose d’une puissance significative sur le marché, pourvu que cette mesure soit nécessaire afin de garantir les droits que les utilisateurs finals tirent de cet article 28, ce qu’il appartiendra au juge national de vérifier.

I – Le cadre juridique

A – La législation de l’Union

1. La directive «accès»

13.

Conformément à l’article 8 de la directive «accès»:

«1.   Les États membres veillent à ce que les [ARN] soient habilitées à imposer les obligations visées aux articles 9 à 13 bis .

2.   Lorsqu’à la suite d’une analyse du marché effectuée conformément à l’article 16 de la [directive‑cadre] un opérateur est désigné comme disposant d’une puissance significative sur un marché donné, les [ARN] lui imposent les obligations énumérées aux articles 9 à 13 de la présente directive, selon le cas.

3.   Sans préjudice:

des dispositions de l’article 5, paragraphe 1, et de l’article 6,

des dispositions des articles 12 et 13 de la [directive‑cadre], de la condition 7 à la section B de l’annexe de la [directive ‘autorisation’] appliquée en vertu de l’article 6, paragraphe 1, de ladite directive, et des articles 27, 28 et 30 de la [directive ‘service universel’] et des dispositions pertinentes de la [directive 2002/58] qui imposent des obligations à des entreprises autres que celles qui sont désignées comme disposant d’une puissance significative sur le marché, ou

de la nécessité de se conformer aux engagements internationaux,

les [ARN] n’imposent pas les obligations définies aux articles 9 à 13 aux opérateurs qui n’ont pas été désignés conformément au paragraphe 2.

[...]»

14.

L’article 13, paragraphe 1, de la directive «accès» prévoit ce qui suit:

«Les [ARN] peuvent, conformément aux dispositions de l’article 8, imposer des obligations liées à la récupération des coûts et au contrôle des prix, y compris des obligations concernant l’orientation des prix en fonction des coûts et des obligations concernant les systèmes de comptabilisation des coûts, pour la fourniture de types particuliers d’interconnexion et/ou d’accès, lorsqu’une analyse du marché indique que l’opérateur concerné peut, en l’absence de concurrence efficace, maintenir des prix à un niveau excessivement élevé, ou comprimer les prix, au détriment des utilisateurs finals. [...]»

2. La directive «service universel»

15.

L’article 17, paragraphe 1, de la directive «service universel» se lit comme suit:

«Les États membres veillent à ce que les [ARN] imposent des obligations réglementaires adéquates aux entreprises déterminées comme étant puissantes sur un marché de détail donné, conformément à l’article 14 de la [directive‑cadre] lorsque:

a)

à la suite d’une analyse du marché effectuée conformément à l’article 16 de la [directive‑cadre], une [ARN] constate qu’un marché de détail donné, déterminé conformément à l’article 15 de ladite directive, n’est pas en situation de concurrence réelle; et

b)

l’[ARN] conclut que les obligations imposées au titre des articles 9 à 13 de la [directive ‘accès’] ne permettraient pas de réaliser les objectifs fixés à l’article 8 de la [directive‑cadre].»

16.

L’article 28, paragraphe 1, sous a), de la directive «service universel» prévoit:

«Les États membres veillent à ce que, lorsque cela est techniquement et économiquement possible et sauf lorsque l’abonné appelé a choisi, pour des raisons commerciales, de limiter l’accès des appelants situés dans certaines zones géographiques, les autorités nationales compétentes prennent toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que les utilisateurs finals puissent:

a)

avoir accès aux services utilisant des numéros non géographiques dans la Communauté, et utiliser ces services [...]»

B – Le droit néerlandais

17.

L’article 28 de la directive «service universel», nous le rappelons, a été transposé en droit néerlandais par l’article 6.5 de la loi sur les télécommunications. Ce dernier article dispose:

«1.   Les fournisseurs de réseaux de communications électroniques accessibles au public ou de services de communications électroniques accessibles au public, qui, à cette occasion, contrôlent l’accès aux utilisateurs finals, veillent à ce que les utilisateurs finals situés dans l’Union [...] aient accès à tous:

a)

les numéros fournis dans l’Union [...] d’un plan national de numérotation,

b)

les numéros de l’espace de numérotation téléphonique européen, et

c)

les numéros fournis par l’[Internationale Unie voor Telecommunicatie],

et puissent utiliser les services utilisant les numéros visés sous a) à c), à moins que cela ne soit techniquement ou économiquement pas possible ou qu’un abonné appelé ait choisi de limiter l’accès des appelants situés dans certaines zones géographiques.

2.   Des règles plus détaillées peuvent être établies par ou en vertu d’une mesure générale d’administration pour garantir l’obligation visée au paragraphe 1. Ces règles peuvent, notamment, porter sur les rémunérations pour l’accès aux numéros visés au paragraphe 1.

3.   Les règles visées au paragraphe 2 peuvent être différentes pour des catégories, à déterminer par lesdites règles, de fournisseurs, tels que visés au paragraphe 1. Par ces règles, des missions peuvent être transférées et des compétences peuvent être attribuées à l’[ACM].»

18.

Il a été fait usage de la possibilité de fixer des règles plus détaillées par l’adoption de la mesure nationale tarifaire qui prévoit, à compter du 1 er juillet 2013, ce qui suit:

«1.

Le fournisseur de services téléphoniques accessibles au public ou le fournisseur, impliqué dans ceux‑ci, de réseaux de communications électroniques accessibles au public, qui, à cette occasion, contrôle l’accès aux utilisateurs finals, veille à ce que les utilisateurs finals puissent utiliser les services utilisant des numéros non géographiques dans l’Union [...]

2.

L’obligation visée au paragraphe 1 implique, en toute hypothèse, que les fournisseurs, visés au paragraphe 1, de services téléphoniques accessibles au public et de réseaux de communications électroniques accessibles au public appliquent, pour les appels d’un numéro de la série 0800, 084, 085, 087, 088, 0900, 0906, 0909, 116, 14 ou 18, des tarifs ou d’autres rémunérations qui sont comparables aux tarifs ou aux autres rémunérations que ces fournisseurs appliquent pour les appels de numéros géographiques, et qu’ils appliquent un tarif dérogatoire ou une rémunération dérogatoire uniquement si cela est nécessaire pour couvrir les coûts additionnels qui sont liés aux appels de ces numéros non géographiques. [...]

[...]»

II – Les faits du litige au principal et les questions préjudicielles

19.

Il ressort de la décision de renvoi que KPN fournit des services de transit d’appels vers des numéros non géographiques aux Pays‑Bas.

20.

L’ACM, ayant constaté que KPN, en violation de la mesure nationale tarifaire, appliquait des tarifs plus élevés pour les services de transit d’appels vers des numéros non géographiques que pour les mêmes services vers des numéros géographiques et que cette différence n’était pas justifiée par les coûts additionnels, a, par une décision du 18 octobre 2013, imposé à KPN une injonction d’ajuster ses tarifs sous une astreinte journalière de 25000 euros, avec un montant maximal de 5 millions d’euros.

21.

KPN a interjeté appel contre cette décision d’injonction devant le College van Beroep voor het Bedrijfsleven (cour d’appel du contentieux administratif en matière économique, Pays‑Bas).

22.

Lors de la procédure en appel, KPN a, notamment, soulevé que la mesure nationale tarifaire ne serait pas conforme au NCR, et en particulier à l’article 28 de la directive «service universel».

23.

Dans le cadre du recours dont elle a été saisie, la juridiction de renvoi s’est alors interrogée sur le champ d’application et la portée de l’article 28 de la directive «service universel». Éprouvant des doutes quant à l’interprétation de celui‑ci, le College van Beroep voor het Bedrijfsleven a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)   L’article 28 de la directive ‘service universel’ autorise‑t‑il qu’une réglementation tarifaire soit imposée sans qu’il soit apparu d’une analyse du marché qu’un opérateur dispose, s’agissant du service réglementé, d’une puissance significative sur le marché, alors qu’il est techniquement possible d’appeler, de manière transfrontalière, des numéros de téléphone non géographiques et que la seule entrave à l’accès à ces numéros consiste dans le fait qu’il est appliqué des tarifs par lesquels l’appel d’un numéro non géographique est plus coûteux que l’appel d’un numéro géographique?

2)   S’il est répondu à la première question par l’affirmative, se posent à la juridiction de renvoi les deux questions suivantes:

a)

La compétence de réglementation tarifaire vaut‑elle également lorsque l’influence de tarifs plus élevés sur le volume d’appels de numéros non géographiques n’est que limitée?

b)

Dans quelle mesure le juge national dispose‑t‑il encore d’une marge d’appréciation quant à la question de savoir si une mesure tarifaire nécessaire selon l’article 28 de la directive ‘service universel’ n’est pas une charge excessive pour le fournisseur de transit, compte tenu des objectifs à atteindre avec celle‑ci?

3)

L’article 28, paragraphe 1, de la directive ‘service universel’ laisse‑t‑il ouverte la possibilité que les mesures visées à cette disposition soient édictées par une autorité autre que l’[ARN] qui exerce la compétence visée à l’article 13, paragraphe 1, de la directive ‘accès’ et que revienne à cette dernière autorité seulement la compétence d’application?»

III – Notre analyse

A – Sur la première question

24.

Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, à la Cour si l’article 28 de la directive «service universel» fournit une base juridique pour adopter une obligation tarifaire telle que celle en cause au principal, sans qu’il soit apparu d’une analyse du marché concerné qu’un opérateur dispose d’une puissance significative sur ce marché et alors que l’entrave à l’accès aux numéros non géographiques et aux services utilisant ces numéros est d’une nature autre que technique, à savoir tarifaire ( 8 ) .

25.

La juridiction de renvoi s’interroge également sur le point de savoir si l’article 28 de la directive «service universel» vise uniquement les situations d’accès transfrontalier et les entraves techniques.

26.

Nous expliquerons, d’abord, les raisons pour lesquelles nous estimons que l’article 28 de la directive «service universel» autorise l’adoption d’une obligation tarifaire telle que celle en cause au principal, avant de démontrer que cet article 28 ne se limite pas aux situations d’accès transfrontalier et s’applique aux entraves techniques et non techniques.

1. Sur la possibilité d’adopter une obligation tarifaire sur le fondement de l’article 28 de la directive «service universel»

27.

Dans ses observations écrites, KPN soutient que le NCR n’autorise l’adoption d’une mesure tarifaire qu’au terme d’une analyse du marché effectuée par l’ARN, faisant apparaître l’existence d’un opérateur disposant d’une puissance significative sur le marché en cause au principal.

28.

La Commission, quant à elle, soutient, dans ses observations écrites, que le NCR établirait une distinction délibérée et expresse entre la réglementation des aspects pertinents au niveau du marché de détail et celle au niveau du marché de gros. Alors que la première relèverait de la directive «service universel», la seconde serait régie par la directive «accès». Ainsi, selon la Commission, l’article 28 de la directive «service universel» ne saurait servir de fondement juridique afin d’adopter une mesure tarifaire à l’encontre de fournisseurs de services de transit d’appels actifs sur le marché de gros.

29.

Nous ne pouvons adhérer à une telle argumentation, laquelle constitue, selon nous, une lecture erronée du NCR.

30.

Conformément à une jurisprudence constante, il y a lieu, pour l’interprétation d’une disposition du droit de l’Union, de tenir compte non seulement des termes de celle‑ci, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie ( 9 ) .

31.

Dans le cadre de l’affaire au principal, un tel examen implique de prendre en considération l’économie générale et l’objectif non seulement de la directive «service universel», mais également des autres directives qui composent, avec elle, le NCR, notamment de la directive «accès».

32.

Nous constatons, tout d’abord, que le libellé de l’article 28 de la directive «service universel» ne donne aucune indication précise quant au champ d’application de celui‑ci.

33.

Rappelons que, en vertu de cet article 28, les États membres veillent à ce que les autorités nationales compétentes prennent «toutes les mesures nécessaires» pour faire en sorte que les utilisateurs finals puissent, notamment, avoir accès aux services utilisant des numéros non géographiques dans l’Union.

34.

En visant des termes d’une portée extrêmement large, à savoir «toutes les mesures nécessaires», nous estimons que ledit article 28 n’exclut pas a priori l’imposition d’une obligation tarifaire telle que celle en cause au principal dans la mesure où cette dernière permet de garantir l’accès des utilisateurs finals aux numéros non géographiques et aux services proposés au moyen de ces numéros.

35.

Une telle solution est confirmée par un examen de la directive «accès», et plus précisément de l’article 8 de celle‑ci, portant sur l’imposition, la modification ou la suppression des obligations.

36.

En effet, il ressort de la lecture de l’article 8, paragraphes 2 et 3, de la directive «accès» que, en principe, une obligation tarifaire telle que celle en cause au principal ne saurait être adoptée à l’encontre d’opérateurs qui n’ont pas été désignés comme étant puissants sur le marché concerné ( 10 ) , «sauf dans certains cas», qui y sont limitativement énumérés et parmi lesquels figure l’article 28 de la directive «service universel».

37.

Nous analyserons successivement ces deux paragraphes, ce qui nous permettra de démontrer qu’une obligation tarifaire telle que celle en cause au principal est susceptible de relever du champ d’application de l’article 28 de la directive «service universel».

38.

Conformément à l’article 8, paragraphe 2, de la directive «accès», les obligations tarifaires visées à l’article 13 de la même directive ( 11 ) doivent uniquement être adoptées par les ARN en l’absence de concurrence effective, c’est‑à‑dire sur les marchés où opèrent un ou plusieurs opérateurs disposant d’une puissance significative ( 12 ) . L’imposition de telles obligations vise à éviter que l’opérateur puissant puisse maintenir des prix à un niveau excessivement élevé, ou comprimer les prix, au détriment des utilisateurs finals ( 13 ) et permet, par voie de conséquence, de rétablir une concurrence réelle sur le marché donné.

39.

Or, il ressort des pièces du dossier que, en l’occurrence, l’ACM avait considéré que le marché des services de transit d’appels en cause au principal était effectivement concurrentiel et qu’aucun opérateur ne disposait, sur ce marché, d’une puissance significative ( 14 ) . Par ailleurs, cette conclusion avait également été confirmée par le College van Beroep voor het Bedrijfsleven ( 15 ) .

40.

De surcroît, nous constatons que, depuis l’année 2007, le marché des services de transit d’appels sur le réseau téléphonique public fixe ne fait plus partie des marchés recensés par la Commission à l’annexe de sa recommandation relative aux marchés pertinents ( 16 ) , dont les caractéristiques pourraient justifier l’application d’une obligation réglementaire ex ante à l’encontre d’opérateurs identifiés comme étant puissants sur ce marché.

41.

Faute d’un marché pertinent recensé par la Commission dans cette recommandation et de la présence d’un opérateur puissant sur le marché des services de transit d’appels en cause au principal, l’ACM n’avait, en l’occurrence, pas de compétence pour imposer une obligation tarifaire telle que celle en cause au principal sur le fondement de l’article 13 de la directive «accès» ( 17 ) .

42.

Nous estimons que la même conclusion s’impose concernant l’article 17 de la directive «service universel», intitulé «Contrôles réglementaires concernant les services de détail» ( 18 ) .

43.

En effet, il ressort de l’article 17 de la directive «service universel», à l’instar de ce qui est prévu dans le cadre de l’article 13 de la directive «accès», que les obligations tarifaires ( 19 ) ne peuvent être imposées que dans le cas où le marché de détail visé ne serait pas en situation de concurrence réelle.

44.

Selon KPN, dans de telles circonstances, l’ACM ne pouvait imposer une obligation tarifaire telle que celle en cause au principal aux fournisseurs actifs sur le marché des services de transit d’appels.

45.

Nous ne pouvons souscrire à une telle conclusion, laquelle fait abstraction de l’article 8, paragraphe 3, de la directive «accès».

46.

En effet, cette disposition prévoit que, «sans préjudice» des dispositions des articles 27, 28 et 30 de la directive «service universel», qui imposent des obligations à «des entreprises autres que celles qui sont désignées comme disposant d’une puissance significative sur le marché», les ARN n’imposent pas les obligations définies aux articles 9 à 13 de la directive «accès» aux opérateurs qui n’ont pas été désignés conformément à l’article 8, paragraphe 2, de cette même directive.

47.

Selon nous, il convient d’interpréter l’article 8, paragraphe 3, de la directive «accès» en ce sens que, «sauf» dans le cadre de certaines dispositions, notamment de l’article 28 de la directive «service universel», les ARN n’imposent pas des obligations tarifaires comparables à celles visées à l’article 13 de la directive «accès» aux opérateurs non puissants sur le marché donné. Autrement dit, l’article 28 de la directive «service universel» permet l’imposition d’obligations tarifaires comparables à celles visées à l’article 13 de la directive «accès», et ce à l’encontre d’opérateurs non puissants sur ce même marché.

48.

Notre analyse est corroborée par les lignes directrices de la Commission, lesquelles prévoient, à leur point 111, que, «[e]n vertu du [NCR], [les] obligations [prévues aux articles 9 à 13 de la directive ‘accès’ et à l’article 17 de la directive ‘service universel’] doivent uniquement être imposées aux entreprises qui ont été désignées comme puissantes sur un marché pertinent, sauf dans certains cas déterminés décrits à la section 4.3» ( 20 ) .

49.

Cette section 4.3 des lignes directrices de la Commission renvoie aux cas visés à l’article 8, paragraphe 3, de la directive «accès». Parmi ces cas figure, comme nous l’avons déjà indiqué, l’article 28 de la directive «service universel».

50.

Il résulte de ce qui précède que l’obligation tarifaire telle que celle en cause au principal est susceptible de constituer une «mesure» pouvant être adoptée à l’encontre d’un ensemble d’opérateurs non puissants sur le marché concerné, en application de l’article 28 de la directive «service universel».

51.

Une telle conclusion reflète, selon nous, la volonté du législateur de l’Union de garantir les droits et les intérêts des utilisateurs finals en toute hypothèse, y compris dans les cas où, malgré l’existence d’une concurrence effective sur le marché donné, la garantie des droits que les utilisateurs tirent d’un marché intégré et concurrentiel en matière de communications électroniques ne saurait être assurée ( 21 ) .

52.

L’article 28 de la directive «service universel», en s’inscrivant dans le chapitre IV de celle‑ci, intitulé «Intérêts et droits des utilisateurs finals», poursuit, à l’évidence, l’objectif de garantir les droits et les intérêts que les utilisateurs finals tirent de l’existence d’un marché intégré et concurrentiel en matière de communications électroniques. Ainsi, cet article 28 constitue, selon nous, une base juridique adéquate afin d’adopter une obligation tarifaire telle que celle en cause au principal.

53.

Encore faut‑il qu’il s’agisse d’une mesure «nécessaire» pour garantir les droits que les utilisateurs finals tirent dudit article 28, à savoir un accès aux numéros non géographiques et aux services proposés au moyen de ces numéros. Selon nous, le caractère nécessaire de la mesure nationale implique également qu’aucune autre mesure moins contraignante pour les opérateurs concernés n’aurait pu garantir ces droits.

54.

À ce titre, nous notons qu’il ressort des observations écrites du gouvernement néerlandais que l’adoption de la mesure nationale tarifaire visait à mettre fin à une série de pratiques commerciales contraires à l’objectif de l’article 28 de la directive «service universel» ( 22 ) . En raison desdites pratiques, les tarifs pour les utilisateurs finals étaient élevés et non transparents et un certain nombre de numéros non géographiques ne pouvaient plus être appelés pour de larges groupes d’utilisateurs finals. Dans les faits, l’accès aux numéros non géographiques était limité et l’accès à certains services, par conséquent, était entravé.

55.

De même, l’ACM a conclu que la facturation de tarifs élevés constituait une entrave à l’accès aux numéros et aux services garanti par l’article 28 de la directive «service universel».

56.

KPN, quant à elle, reconnaît que les tarifs puissent être fixés à un niveau si élevé qu’ils rendent de facto un accès aux numéros non géographiques impossible. Toutefois, selon elle, cela n’était pas le cas aux Pays‑Bas.

57.

Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, nous sommes d’avis que l’article 28 de la directive «service universel» permet l’adoption d’une obligation tarifaire telle que celle en cause au principal, dans la mesure où cette obligation tarifaire est «nécessaire» pour garantir l’accès aux numéros non géographiques et aux services utilisant ces numéros. Une telle appréciation constituant une question de fait, nous estimons qu’il incombera au juge national de mener cet examen in concreto.

58.

Enfin, contrairement à la Commission, nous estimons que le fait que la mesure nationale tarifaire vise à réglementer une relation au niveau du marché de gros n’a aucune incidence sur la possibilité d’appliquer l’article 28 de la directive «service universel» dans le cas où cette relation serait de facto susceptible d’entraver l’accès des utilisateurs finals aux services utilisant des numéros non géographiques garanti par ledit article 28.

59.

À ce titre, nous constatons qu’il ressort des observations écrites du gouvernement néerlandais ainsi que des précisions apportées par ce gouvernement lors de l’audience que les tarifs élevés pratiqués par les fournisseurs de réseaux et de services de communications électroniques entre eux se répercutaient, in fine, sur l’utilisateur final.

60.

En effet, selon ledit gouvernement, lors de l’appel de numéros non géographiques, une chaîne de fournisseurs, qui collaborent pour réaliser la conversation téléphonique, intervient. Dans cette chaîne, chaque fournisseur, y compris le fournisseur de service de transit d’appels, répercuterait le tarif facturé pour son service fourni sur un autre fournisseur. Ces tarifs élevés d’un ou de plusieurs fournisseurs dans la chaîne seraient ensuite répercutés sur l’utilisateur final.

61.

Ces éléments communiqués par le gouvernement néerlandais, sur lesquels la Commission s’est également appuyée lors de l’audience, démontrent l’existence d’une incidence des pratiques, exercées par les fournisseurs entre eux au niveau du marché de gros, sur les utilisateurs finals situés au niveau du marché de détail. Or, selon le gouvernement néerlandais, ce sont ces pratiques qui avaient restreint l’accès aux numéros non géographiques et aux services utilisant ces numéros.

62.

Ainsi, nous estimons, à l’instar du gouvernement néerlandais, que de telles pratiques, exercées par les fournisseurs de réseaux et de services de communications électroniques au niveau du marché de gros, sont susceptibles d’entraver l’accès des utilisateurs finals aux services utilisant des numéros non géographiques garanti par l’article 28 de la directive «service universel».

63.

Au vu de tous ces éléments, nous considérons que l’article 28 de la directive «service universel» doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à l’adoption d’une obligation tarifaire telle que celle en cause au principal sans qu’il soit apparu d’une analyse du marché qu’un opérateur dispose d’une puissance significative sur ce marché, pourvu que l’obligation tarifaire soit nécessaire afin de garantir l’accès des utilisateurs finals aux services utilisant les numéros non géographiques, ce qu’il appartiendra au juge national de vérifier.

2. Sur les situations d’accès transfrontalier et la nature des entraves

64.

Dans le cadre de sa première question, la juridiction de renvoi demande également si l’article 28 de la directive «service universel» doit être interprété en ce sens qu’une obligation tarifaire peut seulement être adoptée en cas d’«entrave technique» à un «accès transfrontalier» aux services utilisant des numéros non géographiques.

65.

Concernant, en premier lieu, la question de l’accès transfrontalier, il ressort de la décision de renvoi que la juridiction de renvoi estime que le considérant 46 de la directive 2009/136 suggère que l’article 28 de la directive «service universel» ne viserait qu’à l’adoption de toutes les mesures nécessaires aux fins de garantir le trafic téléphonique «transfrontalier» entre les États membres.

66.

Selon nous, le libellé et la genèse de l’article 28 de la directive «service universel» démontrent que celui‑ci doit être interprété en ce sens qu’il vise désormais, de manière générale, le marché unique européen en matière de communications électroniques, sans que son application soit restreinte aux situations d’accès transfrontalier.

67.

Nous constatons, tout d’abord, que la dimension transfrontalière ressortait clairement de l’article 28 de la directive «service universel» dans sa version initiale.

68.

En effet, cet article 28 prévoyait que «[l]es États membres veillent à ce que les utilisateurs finals des autres États membres soient en mesure d’accéder aux numéros non géographiques sur leur territoire, lorsque cela est techniquement et économiquement réalisable» ( 23 ) .

69.

À la suite de la modification par la directive 2009/136, l’article 28, paragraphe 1, de la directive «service universel» dispose, désormais, que les États membres veillent à ce que, lorsque cela est techniquement et économiquement possible, les autorités nationales compétentes prennent toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que les utilisateurs finals puissent avoir accès aux services utilisant des numéros non géographiques dans l’Union, et utiliser ces services.

70.

Ainsi, la restriction «des autres États membres» ne figure plus à cette disposition, laquelle prévoit, dorénavant, un accès pour tous les utilisateurs finals aux numéros et aux services «dans [l’Union]».

71.

Dans la mesure où les utilisateurs finals, et non plus les utilisateurs finals des autres États membres, doivent avoir accès aux services utilisant des numéros non géographiques dans l’Union, un tel accès devrait, selon nous, être garanti par les autorités nationales compétentes à l’égard de tous les utilisateurs finals, peu important où ces derniers se trouvent d’un point de vue géographique. Par conséquent, l’accès devrait aussi être garanti aux utilisateurs finals établis dans l’État membre de l’opérateur du réseau et/ou du service de communications électroniques.

72.

Cette modification s’inscrit, selon nous, dans l’objectif d’achever le marché unique européen en matière de communications électroniques. En effet, conformément au considérant 38 de la directive «service universel», «[l]’accès par les utilisateurs finals à toutes les ressources de numérotation existantes dans la Communauté est une condition essentielle en vue d’un marché unique. Cet accès devrait porter sur l’appel gratuit, le taux majoré et d’autres numéros non géographiques».

73.

Par ailleurs, nous estimons qu’il serait paradoxal de considérer que l’article 28 de la directive «service universel» garantisse à un utilisateur final un accès aux services utilisant des numéros non géographiques dans d’autres États membres, mais qu’il ne garantisse pas un tel accès aux numéros non géographiques et aux services proposés dans son propre État membre.

74.

S’agissant, en second lieu, de la question relative à la nature de l’entrave, nous considérons qu’il ne ressort nullement du libellé de l’article 28 de la directive «service universel» que seules des entraves techniques permettraient l’adoption par les autorités nationales compétentes d’une mesure nécessaire.

75.

Selon nous, toute entrave à l’accès aux numéros non géographiques et aux services utilisant ces numéros, laquelle empêcherait les utilisateurs finals de bénéficier des droits qu’ils tireraient de l’article 28 de la directive «service universel», serait susceptible de fonder l’adoption d’une obligation tarifaire nécessaire, sauf dans les cas où l’entrave serait justifiée par des raisons objectives.

76.

Le considérant 46 de la directive 2009/136 corrobore notre analyse.

77.

En effet, en vertu de ce considérant 46, «[l]’accès transfrontalier aux ressources de numérotation et aux services associés ne devrait pas être entravé , sauf dans des cas objectivement justifiés, par exemple pour lutter contre la fraude ou les abus [...], lorsque le numéro est défini comme ayant une portée exclusivement nationale [...] ou lorsque cela est techniquement ou économiquement irréalisable» ( 24 ) .

78.

Il ressort de la décision de renvoi qu’il était techniquement possible d’appeler les numéros non géographiques et qu’aucune des autres justifications objectives n’avaient été invoquées. Faute d’une justification objective de l’entrave tarifaire, cette dernière devrait alors être considérée comme illicite conformément à l’article 28 de la directive «service universel».

79.

Par conséquent, nous estimons que l’article 28 de la directive «service universel» doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à l’adoption d’une obligation tarifaire telle que celle en cause au principal sans qu’il soit apparu d’une analyse du marché qu’un opérateur dispose d’une puissance significative sur ce marché et alors que l’entrave à l’accès aux numéros non géographiques est d’une nature autre que technique, pourvu que l’obligation tarifaire soit nécessaire afin de garantir l’accès des utilisateurs finals aux services utilisant ces numéros, ce qu’il appartiendra au juge national de vérifier.

B – Sur la deuxième question relative aux entraves à effet limité et au contrôle de proportionnalité des mesures nécessaires par le juge national

80.

La deuxième question se compose de deux parties.

81.

Premièrement, la juridiction de renvoi demande à la Cour si l’article 28 de la directive «service universel» doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à l’adoption d’une mesure tarifaire telle que celle en cause au principal dans le cas où l’influence des tarifs plus élevés appliqués sur le volume d’appels de numéros non géographiques ne serait que limitée.

82.

Deuxièmement, la juridiction de renvoi s’interroge sur la marge d’appréciation dont disposerait le juge national pour vérifier si une mesure tarifaire nécessaire selon l’article 28 de la directive «service universel» constitue une charge excessive pour le fournisseur compte tenu des objectifs à atteindre avec cette mesure.

83.

Concernant la première partie de cette deuxième question, nous constatons, à l’instar du gouvernement néerlandais, que l’article 28 de la directive «service universel» ne prévoit pas d’exception pour des entraves de minimis.

84.

Bien au contraire et comme nous avons déjà pu le constater, l’accès aux services utilisant des numéros non géographiques ne devrait pas, en principe, être entravé en vertu de l’article 28 de la directive «service universel» ( 25 ) .

85.

Rappelons, également, que cet accès par les utilisateurs finals à toutes les ressources de numérotation existant dans l’Union est une condition essentielle en vue d’un marché unique et devrait porter sur l’appel gratuit, le taux majoré et d’autres numéros non géographiques ( 26 ) .

86.

Selon nous, il ressort de ce qui précède que toute entrave, y compris une entrave limitée à l’accès aux services utilisant des numéros non géographiques, va à l’encontre des objectifs poursuivis par le législateur de l’Union, à savoir la réalisation d’un marché unique européen et, par voie de conséquence, la garantie des droits que les utilisateurs finals en tirent, et devrait donc être considérée comme prohibée. Nous estimons que toute interprétation contraire porterait atteinte à l’effet utile de l’article 28 de la directive «service universel».

87.

S’agissant de la seconde partie de la deuxième question, nous considérons, à l’instar de KPN et du gouvernement néerlandais, que le juge national dispose de la compétence pour apprécier si l’application d’une obligation tarifaire implique, dans une situation concrète, une charge excessive pour l’opérateur concerné. En effet, selon nous, cet examen fait partie intégrante du contrôle de proportionnalité d’une telle obligation, effectué par le juge national.

88.

Le juge national devrait alors analyser si les objectifs poursuivis par la mesure tarifaire des autorités nationales compétentes sont conformes à celui énoncé à l’article 28 de la directive «service universel», à savoir l’accès aux services utilisant des numéros non géographiques et l’utilisation de ces services.

89.

Si ces objectifs sont conformes à celui énoncé dans la réglementation de l’Union, il appartiendra, ensuite, au juge national de réaliser un contrôle de l’adéquation, de la nécessité et de la proportionnalité stricto sensu de la mesure. En premier lieu, le juge national appréciera si cette mesure adoptée est objectivement appropriée pour atteindre les objectifs poursuivis. En deuxième lieu, il déterminera s’il existe, afin d’atteindre ces objectifs, des moyens moins contraignants pour l’opérateur concerné. En troisième lieu, la proportionnalité, au sens strict du terme, suppose la réalisation d’une mise en balance des intérêts en présence ( 27 ) .

90.

C’est dans le cadre de ce contrôle de proportionnalité que le juge national devrait alors déterminer si les autorités nationales compétentes ont mis en balance de manière appropriée le poids de la mesure tarifaire, pour l’opérateur concerné, au regard des avantages qui en découlent pour les utilisateurs finals afin d’apprécier si cette mesure doit être considérée comme une charge excessive pour l’opérateur concerné ( 28 ) .

91.

Par conséquent, nous pensons que l’article 28 de la directive «service universel» doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à l’adoption d’une mesure tarifaire telle que celle en cause au principal dans le cas où l’influence des tarifs plus élevés appliqués sur le volume d’appels de numéros non géographiques ne serait que limitée. Il appartiendra au juge national d’apprécier, dans le cadre du contrôle de proportionnalité de la mesure nécessaire selon l’article 28 de la directive «service universel», si l’imposition d’une mesure tarifaire telle que celle en cause au principal implique une charge excessive pour l’opérateur concerné.

C – Sur la troisième question relative à l’interprétation des termes «autorités nationales compétentes» visés à l’article 28 de la directive «service universel»

92.

Par sa troisième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, à la Cour si l’article 28 de la directive «service universel» doit être interprété en ce sens que les mesures nécessaires visées à cet article 28 peuvent être édictées par une autorité autre que l’ARN exerçant la compétence visée à l’article 13, paragraphe 1, de la directive «accès».

93.

Dans ses observations écrites, KPN soutient que, sur la base du NCR, et plus précisément de l’article 13 de la directive «accès», seule une ARN serait compétente pour imposer une mesure tarifaire telle que celle en cause au principal. Or, selon KPN, le gouvernement néerlandais ne saurait être considéré comme une ARN, car, d’une part, cette fonction ne lui aurait jamais été assignée et, d’autre part, il ne remplirait pas les conditions requises en matière d’indépendance mentionnées au considérant 11 de la directive‑cadre ( 29 ) et ne disposerait pas non plus de la compétence discrétionnaire qu’une ARN a, en vertu de l’article 13 de la directive «accès», pour adopter une réglementation au terme d’une analyse du marché.

94.

Contrairement à KPN, les gouvernements néerlandais et italien ainsi que la Commission proposent de répondre que l’article 28 de la directive «service universel» autorise l’adoption des mesures nécessaires, visées par celui‑ci, par une autorité autre que l’ARN.

95.

Avant de procéder à l’analyse de cette troisième question, deux remarques préalables nous semblent utiles.

96.

Premièrement, il ressort de la décision de renvoi que le gouvernement néerlandais, en tant qu’organe législatif, avait adopté la mesure nationale tarifaire, puis, l’ACM, en tant qu’ARN, avait procédé à son application en délivrant une injonction à KPN.

97.

Ainsi, au regard de cette situation, nous comprenons que la juridiction de renvoi souhaite, en substance, savoir si l’article 28 de la directive «service universel» doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à ce qu’une mesure tarifaire telle que celle en cause au principal soit adoptée par le gouvernement néerlandais, considéré comme autorité «autre» que l’ARN.

98.

Deuxièmement, comme nous l’avons précisé lors de l’examen de la première question, nous sommes d’avis que, sous certaines conditions, une obligation tarifaire comparable à celle pouvant être imposée par une ARN sur le fondement de l’article 13 de la directive «accès» peut être imposée dans le cadre de l’article 28 de la directive «service universel».

99.

À ce titre, nous rappelons que les tâches de réglementation incombant aux ARN sur la base de l’article 13 de la directive «accès» sont soumises à la condition de l’existence d’un ou de plusieurs opérateurs disposant d’une puissance significative sur le marché concerné. L’intervention des ARN est effectivement rendue nécessaire afin de garantir que ce ou ces opérateurs ne puissent utiliser leur puissance de marché pour restreindre ou fausser la concurrence sur le marché pertinent ni faire jouer cette puissance sur des marchés adjacents. Ainsi, il s’agit d’une réglementation ex ante adoptée par une ARN à l’encontre d’un ou de plusieurs opérateurs puissants sur le marché concerné.

100.

Or, les obligations tarifaires pouvant être adoptées par les autorités nationales compétentes dans le cadre de l’article 28 de la directive «service universel» ne sont pas conditionnées par une analyse du marché faisant apparaître qu’un ou plusieurs opérateurs disposent d’une puissance significative sur le marché concerné. Elles doivent être nécessaires pour garantir les droits que les utilisateurs finals tirent du marché unique européen, et notamment le droit d’accès des utilisateurs finals aux services utilisant des numéros non géographiques. Il s’agit d’obligations tarifaires adoptées par les autorités nationales compétentes à l’encontre d’un ensemble d’opérateurs non puissants sur le marché.

101.

Ainsi, bien qu’elles puissent être imposées sur le fondement des articles 13 de la directive «accès» ainsi que 17 et 28 de la directive «service universel», les obligations tarifaires comparables visent à atteindre des objectifs différents et sont édictées à l’encontre de catégories différentes d’opérateurs ( 30 ) .

102.

C’est au vu de ces éléments que nous allons procéder à l’analyse de la troisième question.

103.

Afin d’apporter une réponse utile à cette troisième question, une interprétation des termes «autorités nationales compétentes», tels que visés à l’article 28 de la directive «service universel», s’impose. Convient‑il d’interpréter ces termes comme visant les ARN à l’exclusion de toute autre autorité nationale?

104.

Nous constatons, tout d’abord, que lesdits termes n’ont pas été définis par le NCR, contrairement aux ARN, définies à l’article 2, sous g), de la directive‑cadre. En vertu de cette dernière disposition, constituent une ARN l’organisme ou les organismes chargés par un État membre d’une quelconque des tâches de réglementation assignées dans la directive‑cadre et dans les directives particulières. Nous notons que cette définition est applicable aux fins des directives particulières, notamment de la directive «service universel» ( 31 ) .

105.

Il ressort de ladite définition qu’une ARN est une autorité nationale compétente. Néanmoins, nous sommes d’avis que les autorités nationales compétentes visées à l’article 28 de la directive «service universel» ne sauraient être limitées aux seules ARN, et ce pour plusieurs raisons.

106.

En premier lieu, nous constatons que le législateur de l’Union semble avoir choisi de manière déterminée les termes «autorités nationales compétentes» en lieu et place de ceux d’«ARN». En effet, c’est seulement au cours de la procédure législative, aboutissant à la modification du cadre réglementaire en 2009, que ces termes ont été adoptés.

107.

Ainsi, tant la proposition de directive de la Commission ( 32 ) que la position arrêtée par le Parlement européen en première lecture ( 33 ) visaient encore les «ARN». Le fait que le texte final attribue une compétence expresse aux «autorités nationales compétentes» témoigne a priori d’une démarche volontaire de la part du législateur de l’Union non pas de viser uniquement les ARN, mais d’opter pour une notion plus large.

108.

En deuxième lieu, il ressort du libellé de l’article 28 de la directive «service universel» que ces termes ne sauraient être limités aux seules ARN. En effet, cet article 28 n’attribue aucune compétence particulière et n’impose aucune obligation spécifique aux ARN, contrairement à d’autres dispositions de ladite directive. Il impose des obligations aux États membres, en tant que tels, et aux «autorités nationales compétentes».

109.

En troisième lieu, nous observons que la Cour a déjà eu l’occasion de se prononcer sur la question de savoir si une autorité nationale autre qu’une ARN pouvait intervenir en tant qu’ARN ou à côté de cette dernière afin d’exécuter des tâches qui ont été expressément attribuées par le NCR à l’ARN.

110.

Ainsi, dans son arrêt Base e.a. ( 34 ) , la Cour a considéré que «la [directive ‘service universel’] ne s’oppose pas en principe, par elle‑même, à ce que le législateur national intervienne en qualité d’[ARN] au sens de la directive‑cadre pour autant que, dans l’exercice de cette fonction, il réponde aux conditions de compétence, d’indépendance, d’impartialité et de transparence prévues par lesdites directives et que les décisions qu’il prend dans le cadre de cette fonction puissent faire l’objet de recours effectifs auprès d’un organisme indépendant des parties intéressées» ( 35 ) .

111.

De même, la Cour a jugé que la directive‑cadre ne s’oppose pas à ce qu’un État membre attribue à des organismes distincts, en l’occurrence l’ARN et des autorités ministérielles, les fonctions que cette directive confie aux ARN, pourvu que l’État membre assure l’indépendance fonctionnelle de ces autorités réglementaires par rapport aux opérateurs de réseaux et de services de communications électroniques et publie d’une manière accessible les tâches à accomplir par lesdites autorités réglementaires et les notifient sans délai à la Commission ( 36 ) .

112.

Enfin, nous constatons que la Cour, dans son arrêt Commission/Allemagne ( 37 ) , a indiqué que, pour qu’elle soit conforme aux directives, l’intervention de l’organe législatif ne saurait limiter ni éliminer des fonctions qui ont été expressément attribuées à l’ARN par les directives ( 38 ) . Le législateur national ne saurait exclure les ARN de la définition et de l’analyse de nouveaux marchés, car il priverait alors ces organismes des facultés qui leur sont expressément conférées par les directives ( 39 ) . Ainsi, et cela ressort également d’une jurisprudence plus récente, une réglementation nationale ne saurait empiéter sur les compétences que les ARN tirent directement des dispositions du NCR ( 40 ) .

113.

Pour l’affaire qui nous occupe au principal, deux enseignements peuvent être tirés, selon nous, de ces solutions jurisprudentielles.

114.

Premièrement, nous constatons que la Cour n’exclut pas que, sous certaines conditions, une autorité autre que l’ARN, à savoir un organe législatif ou une autorité ministérielle, puisse intervenir en tant qu’ARN ou à côté de cette dernière, conformément au NCR.

115.

Dans la mesure où de telles autorités nationales, agissant en tant qu’ARN, sont susceptibles d’effectuer, dans le respect des conditions susmentionnées, des tâches qui ont été attribuées par le NCR à une ARN, nous sommes d’avis que, a fortiori, ces autorités nationales devraient pouvoir intervenir dans le cas où le NCR attribue la fonction réglementaire expressément à des «autorités nationales compétentes».

116.

Deuxièmement, nous considérons, toutefois, que, si les autorités nationales compétentes visées à l’article 28 de la directive «service universel» imposaient une obligation tarifaire comparable à celle pouvant être adoptée par les ARN, conformément aux articles 13, paragraphe 1, de la directive «accès» et 17, paragraphe 1, de la directive «service universel», et malgré le fait qu’une telle obligation vise des objectifs différents, ces autorités nationales compétentes devraient respecter les mêmes exigences que celles attribuées aux ARN par le NCR, notamment l’exigence d’une indépendance fonctionnelle par rapport aux opérateurs ( 41 ) . De même, les décisions prises par ces autorités nationales compétentes devraient pouvoir faire l’objet de recours effectifs auprès d’un organisme indépendant des parties intéressées ( 42 ) .

117.

Il s’ensuit que, si les États membres jouissent, en la matière, d’une autonomie institutionnelle dans l’organisation et la structuration de leurs autorités nationales compétentes au sens de l’article 28 de la directive «service universel», cette autonomie ne peut être exercée que dans le respect des objectifs et des obligations fixés par le NCR ( 43 ) .

118.

Dans le cadre de l’affaire au principal, il appartiendra, par conséquent, à la juridiction de renvoi d’apprécier in concreto si le gouvernement néerlandais, ayant agi en tant qu’autorité nationale compétente conformément à l’article 28 de la directive «service universel», répond aux exigences de compétence, d’indépendance, d’impartialité et de transparence prévues par le NCR.

119.

À ce titre, nous relevons que, lors de l’audience, le gouvernement néerlandais a précisé que, au moment des faits du litige en cause au principal, le Royaume des Pays‑Bas avait procédé à la privatisation de KPN. Si cette information tend à démontrer que le gouvernement néerlandais peut être considéré comme juridiquement et fonctionnellement indépendant de cette société, elle est, à notre sens, insuffisante pour nous permettre de conclure au respect, par cette autorité nationale compétente, des exigences susmentionnées. Il reviendra à la juridiction de renvoi, au vu de l’ensemble des éléments dont elle dispose dans le cadre de cette affaire, de procéder à une telle appréciation.

120.

Par ailleurs, pour compléter notre analyse, nous estimons qu’il appartiendra également à la juridiction de renvoi de vérifier si l’ACM, en tant qu’ARN garantissant l’application de la mesure nationale tarifaire adoptée par le gouvernement néerlandais, a, quant à elle, respecté les exigences susmentionnées telles que visées par le NCR. Un tel examen implique, cette fois‑ci, de déterminer, notamment, si l’ARN a été à l’abri de toute intervention extérieure ou pression politique susceptible de compromettre son impartialité dans l’appréciation des questions qui lui sont soumises ( 44 ) .

121.

Au vu de tous ces éléments, nous sommes d’avis que le gouvernement néerlandais pouvait adopter une mesure tarifaire telle que celle en cause au principal, pourvu que cette intervention vise à garantir l’objectif poursuivi par l’article 28 de la directive «service universel» et que les exigences en matière de compétence, d’indépendance, d’impartialité et de transparence aient été respectées, ce qu’il reviendra au juge national d’apprécier.

122.

Par conséquent, il convient d’interpréter l’article 28 de la directive «service universel» en ce sens qu’une mesure tarifaire telle que celle en cause au principal peut être adoptée par une autorité autre que l’ARN exerçant la compétence visée à l’article 13, paragraphe 1, de la directive «accès», pourvu que les exigences en matière de compétence, d’indépendance, d’impartialité et de transparence soient respectées, ce qu’il incombera au juge national de vérifier.

IV – Conclusion

123.

Eu égard aux considérations qui précèdent, nous proposons à la Cour de répondre au College van Beroep voor het Bedrijfsleven comme suit:

1)

L’article 28 de la directive 2002/22/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques (directive «service universel»), telle que modifiée par la directive 2009/136/CE du Parlement européen et du Conseil, du 25 novembre 2009, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à l’adoption d’une obligation tarifaire telle que celle en cause au principal sans qu’il soit apparu d’une analyse du marché qu’un opérateur dispose d’une puissance significative sur ce marché et alors que l’entrave à l’accès aux numéros non géographiques est d’une nature autre que technique, pourvu que l’obligation tarifaire soit nécessaire afin de garantir l’accès des utilisateurs finals aux services utilisant ces numéros, ce qu’il appartiendra au juge national de vérifier.

2)

a) L’article 28 de la directive 2002/22, telle que modifiée par la directive 2009/136, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à l’adoption d’une mesure tarifaire telle que celle en cause au principal dans le cas où l’influence des tarifs plus élevés appliqués sur le volume d’appels de numéros non géographiques ne serait que limitée.

b)

Il appartiendra au juge national d’apprécier, dans le cadre du contrôle de proportionnalité de la mesure nécessaire selon l’article 28 de la directive 2002/22, telle que modifiée par la directive 2009/136, si l’imposition d’une mesure tarifaire telle que celle en cause au principal implique une charge excessive pour l’opérateur concerné.

3)

L’article 28 de la directive 2002/22, telle que modifiée par la directive 2009/136, doit être interprété en ce sens qu’une mesure tarifaire telle que celle en cause au principal peut être adoptée par une autorité autre que l’autorité réglementaire nationale exerçant la compétence visée à l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2002/19/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à l’accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées, ainsi qu’à leur interconnexion (directive «accès»), telle que modifiée par la directive 2009/140/CE du Parlement européen et du Conseil, du 25 novembre 2009, pourvu que les exigences en matière de compétence, d’indépendance, d’impartialité et de transparence soient respectées, ce qu’il incombera au juge national de vérifier.


( 1 ) – Langue originale: le français.

( 2 ) – Le NCR est composé de la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive «cadre») (JO L 108, p. 33), telle que modifiée par la directive 2009/140/CE du Parlement européen et du Conseil, du 25 novembre 2009 (JO L 337, p. 37, ci‑après la «directive‑cadre»), ainsi que de quatre directives particulières qui l’accompagnent, à savoir la directive 2002/19/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à l’accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées, ainsi qu’à leur interconnexion (directive «accès») (JO L 108, p. 7), telle que modifiée par la directive 2009/140 (ci‑après la «directive ‘accès’»); la directive 2002/20/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à l’autorisation de réseaux et de services de communications électroniques (directive «autorisation») (JO L 108, p. 21), telle que modifiée par la directive 2009/140 (ci‑après la «directive ‘autorisation’»); la directive 2002/22/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques (directive «service universel») (JO L 108, p. 51), telle que modifiée par la directive 2009/136/CE du Parlement européen et du Conseil, du 25 novembre 2009 (JO L 337, p. 11, ci‑après la «directive ‘service universel’»), et la directive 2002/58/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 juillet 2002, concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques (directive vie privée et communications électroniques) (JO L 201, p. 37), telle que modifiée par la directive 2009/136 (ci‑après la «directive 2002/58»).

( 3 ) – La directive «service universel» se compose de trois piliers très différents, à savoir un chapitre II relatif à l’organisation du service universel, un chapitre III concernant les obligations qui peuvent être imposées aux opérateurs puissants sur les marchés de détail, et un chapitre IV portant sur la protection renforcée des utilisateurs finals, en réglementant les intérêts et les droits de ceux‑ci.

( 4 ) – En vertu de l’article 2, sous h), de la directive‑cadre, un «utilisateur» est «une personne physique ou morale qui utilise ou demande un service de communications électroniques accessibles au public». L’«utilisateur final» est défini à l’article 2, sous n), de cette même directive comme «un utilisateur qui ne fournit pas de réseaux de communication publics ou de services de communications électroniques accessibles au public».

( 5 ) – Conformément à l’article 2, sous d), de la directive «service universel», un «numéro géographique» est «un numéro du plan national de numérotation téléphonique dont une partie de la structure numérique a une signification géographique utilisée pour acheminer les appels vers le lieu physique du point de terminaison du réseau».

( 6 ) – Il ressort des observations écrites de KPN qu’une mesure générale d’administration est une décision adoptée par le gouvernement comportant une mesure générale obligatoire ne nécessitant pas l’approbation du Parlement. En principe, une mesure générale d’administration doit être fondée sur une compétence octroyée dans un domaine particulier. Tel est le cas de la mesure générale d’administration en cause dans l’affaire au principal.

( 7 ) – Les services de transit d’appels consistent, pour un opérateur, à transporter, sur son réseau, un appel qui n’est ni émis ni terminé sur ce réseau.

( 8 ) Nous rappelons qu’il ressort de la décision de renvoi que cette entrave consiste en l’application de tarifs plus élevés pour le service de transit d’appels vers des numéros non géographiques que pour le service de transit d’appels vers des numéros géographiques.

( 9 ) Voir arrêts Sturgeon e.a. (C‑402/07 et C‑432/07, EU:C:2009:716, point 41 et jurisprudence citée) ainsi que T‑Mobile Austria (C‑282/13, EU:C:2015:24, point 32 et jurisprudence citée).

( 10 ) – Conformément à l’article 14, paragraphe 2, premier alinéa, de la directive‑cadre, «[u]ne entreprise est considérée comme disposant d’une puissance significative sur le marché si, individuellement ou conjointement avec d’autres, elle se trouve dans une position équivalente à une position dominante, c’est‑à‑dire qu’elle est en mesure de se comporter, dans une mesure appréciable, de manière indépendante de ses concurrents, de ses clients et, en fin de compte, des consommateurs».

( 11 ) – En application de l’article 13, paragraphe 1, de la directive «accès», «[l]es [ARN] peuvent [...] imposer des obligations liées à la récupération des coûts et au contrôle des prix, y compris des obligations concernant l’orientation des prix en fonction des coûts et des obligations concernant les systèmes de comptabilisation des coûts, pour la fourniture de types particuliers d’interconnexion et/ou d’accès».

( 12 ) Voir considérant 27 de la directive‑cadre.

( 13 ) – Voir article 13 de la directive «accès».

( 14 ) Voir, également, observations adressées par la Commission le 30 octobre 2008 à l’Onafhankelijke Post en Telecommunicatie Autoriteit (OPTA) conformément à l’article 7, paragraphe 3, de la directive‑cadre en réponse à son projet de décision concernant le marché des services de transit sur le réseau téléphonique public aux Pays‑Bas (affaire NL/2008/0800). Ces observations sont disponibles à l’adresse Internet https://circabc.europa.eu/sd/a/df6e1540‑38c6‑4595‑a101‑265a5cc500a7/NL‑2008‑0800%20Acte_en%20CORR.pdf.

( 15 ) – Voir arrêt du 1 er février 2012 (ECLI:NL:CBB:2012:BV2285).

( 16 ) Recommandation 2007/879/CE de la Commission, du 17 décembre 2007, concernant les marchés pertinents de produits et de services dans le secteur des communications électroniques susceptibles d’être soumis à une réglementation ex ante conformément à la directive 2002/21 (JO L 344, p. 65).

( 17 ) – Conformément au point 17 des lignes directrices de la Commission sur l’analyse du marché et l’évaluation de la puissance sur le marché en application du cadre réglementaire communautaire pour les réseaux et les services de communications électroniques (JO 2002, C 165, p. 6, ci‑après les «lignes directrices de la Commission»), «[l]es obligations réglementaires ne devraient être imposées qu’aux marchés des communications électroniques dont les caractéristiques pourraient justifier l’application de mesures sectorielles et sur lesquels les ARN compétentes ont recensé un ou plusieurs opérateurs puissants» (voir, également, article 15, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive‑cadre).

( 18 ) – Nous rappelons que cet article 17 concerne les services de détail alors que les services de transit d’appels vers des numéros non géographiques en cause au principal interviennent sur le marché de gros, ce qui rend, en l’occurrence, ledit article 17 inapplicable.

( 19 ) En vertu de l’article 17, paragraphe 2, de la directive «service universel», «[l]es obligations [...] peuvent inclure l’exigence que les entreprises visées ne pratiquent pas de prix excessifs [ou] n’interdisent pas l’accès au marché». En outre, ce même paragraphe 2 prévoit que «[l]es [ARN] peuvent appliquer à ces entreprises des mesures d’encadrement des tarifs de détail, des mesures visant à maîtriser certains tarifs ou des mesures visant à moduler les tarifs en fonction des coûts ou des prix sur des marchés comparables, afin de protéger les intérêts des utilisateurs finals tout en favorisant une concurrence réelle».

( 20 ) – Italique ajouté par nos soins.

( 21 ) – Voir, p. 86 du document de travail des services de la Commission, disponible en langue anglaise [SEC(2007) 1472], propos introductifs du titre IV, intitulé «Connecting with citizens».

( 22 ) Ce gouvernement mentionne comme étant des pratiques commerciales non désirables, notamment, les appels à partir de téléphones mobiles vers des numéros 0900 qui se voyaient appliquer une majoration standard de 25 à 35 centimes d’euro par minute sur le tarif de transport (transit); les opérateurs de téléphonie mobile qui pratiquaient aussi un tarif de 25 centimes d’euro par minute pour les appels de numéros 0800, bien que ces services de renseignement eux‑mêmes soient offerts gratuitement, ce qui avait pour conséquence que certains fournisseurs de services liés à ces numéros 0800 faisaient en sorte que de tels numéros ne puissent plus être appelés à partir des réseaux mobiles, ou encore, pour les numéros 14 (services à caractère social), 088 (numéros d’entreprise) et 116 (services harmonisés européens à caractère social), le fait que, en règle générale, l’utilisateur final attribue les tarifs de trafic dérogatoires pour ces numéros non géographiques à la partie liée au numéro est utilisé par les fournisseurs pour facturer des majorations élevées sur les tarifs du trafic.

( 23 ) – Italique ajouté par nos soins.

( 24 ) – Italique ajouté par nos soins.

( 25 ) – Voir considérant 46 de la directive 2009/136.

( 26 ) – Voir considérant 38 de la directive «service universel».

( 27 ) – Voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général Cruz Villalón dans l’affaire TDC (C‑556/12, EU:C:2014:17, points 41 et 42).

( 28 ) – Ibidem (points 43 et 44).

( 29 ) – Ce considérant 11 prévoit que, «[c]onformément au principe de la séparation des fonctions de réglementation et d’exploitation, les États membres devraient garantir l’indépendance de la ou des [ARN], afin d’assurer l’impartialité de leurs décisions. Cette exigence d’indépendance ne porte pas atteinte à l’autonomie institutionnelle ni aux obligations constitutionnelles des États membres».

( 30 ) – Le considérant 5 de la directive «service universel» rappelle cette distinction entre deux catégories d’opérateurs. En effet, il prévoit que, «[d]ans un marché concurrentiel, certaines obligations devraient s’imposer à l’ensemble des entreprises fournissant des services téléphoniques accessibles au public en positions déterminées, tandis que d’autres ne devraient s’imposer qu’aux entreprises puissantes sur le marché ou qui ont été désignées comme opérateurs de service universel».

( 31 ) – L’article 2, premier alinéa, de la directive «service universel» dispose que, «aux fins de la présente directive, les définitions figurant à l’article 2 de la [directive‑cadre] sont applicables».

( 32 ) – Voir p. 32 de la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2002/22, la directive 2002/58 et le règlement (CE) no 2006/2004 relatif à la coopération en matière de protection des consommateurs [COM(2007) 698 final].

( 33 ) – Voir p. 46 de la position du Parlement européen arrêtée en première lecture le 24 septembre 2008 en vue de l’adoption de la directive 2008/.../CE du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2002/22, la directive 2002/58 et le règlement (CE) no 2006/2004 relatif à la coopération en matière de protection des consommateurs [document P6_TC1‑COD(2007) 248, JO 2010, C 8E, p. 360].

( 34 ) – C‑389/08, EU:C:2010:584.

( 35 ) – Point 30.

( 36 ) – Voir arrêt Comisión del Mercado de las Telecomunicaciones (C‑82/07, EU:C:2008:143, points 24 à 26).

( 37 ) – C‑424/07, EU:C:2009:749.

( 38 ) – Voir conclusions de l’avocat général Cruz Villalón dans l’affaire Base e.a. (C‑389/08, EU:C:2010:360, point 46).

( 39 ) Ibidem (point 41). Voir, également, arrêt Commission/Allemagne (C‑424/07, EU:C:2009:749, points 74 à 78).

( 40 ) – Voir arrêt Deutsche Telekom (C‑543/09, EU:C:2011:279, point 43 et jurisprudence citée).

( 41 ) – Voir considérant 11 et article 3, paragraphe 2, de la directive‑cadre.

( 42 ) – Voir article 4, paragraphe 1, de la directive‑cadre.

( 43 ) – Voir, en ce sens, arrêt Base e.a. (C‑389/08, EU:C:2010:584, point 26 et jurisprudence citée).

( 44 ) Voir considérant 13 de la directive 2009/140 et, également en ce sens, article 3 bis de la directive‑cadre.

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