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Document 62014CC0061

Conclusions de l'avocat général M. N. Jääskinen, présentées le 7 mai 2015.
Orizzonte Salute - Studio Infermieristico Associato contre Azienda Pubblica di Servizi alla persona San Valentino - Città di Levico Terme e.a.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le Tribunale regionale di giustizia amministrativa di Trento.
Renvoi préjudiciel – Directive 89/665/CEE – Marchés publics – Législation nationale – Frais d’accès à la justice administrative dans le domaine des marchés publics – Droit à un recours effectif – Frais dissuasifs – Contrôle juridictionnel des actes administratifs – Principes d’effectivité et d’équivalence – Effet utile.
Affaire C-61/14.

Court reports – general ; Court reports – general

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2015:307

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NIILO JÄÄSKINEN

présentées le 7 mai 2015 ( 1 )

Affaire C‑61/14

Orizzonte Salute – Studio Infermieristico Associato

contre

Azienda Pubblica di Servizi alla persona San Valentino – Città di Levico Terme,

Ministero della Giustizia,

Ministero dell’Economia e delle Finanze,

Presidenza del Consiglio dei Ministri et

Segretario Generale del Tribunale Regionale di Giustizia Amministrativa di Trento (TRGA)

[demande de décision préjudicielle formée par le Tribunale regionale di giustizia amministrativa di Trento (Italie)]

«Marchés publics — Directive 89/665/CEE — Législation prévoyant des frais élevés d’accès à la justice dans le domaine des marchés publics — Frais de justice cumulatifs pour l’introduction de nouvelles demandes étayées par des moyens complémentaires, dans le cadre d’un recours juridictionnel concernant une seule procédure de passation de marché — Droit à un recours effectif au sens de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne — Frais dissuasifs — Accès à un tribunal — Principes d’effectivité et d’équivalence»

I – Introduction

1.

Au XIXe siècle, le juge Sir James Matthew aurait dit qu’«en Angleterre, la justice est ouverte à tous, comme l’hôtel Ritz». La présente affaire offre à la Cour l’occasion d’examiner si cela s’applique aux procédures juridictionnelles relatives à l’attribution de marchés publics en Italie, qui sont régies par le droit des marchés publics de l’Union.

2.

Selon le droit italien, les frais de justice applicables dans les procédures de recours juridictionnel relatives aux marchés publics sont considérablement plus élevés que ceux généralement applicables dans les procédures administratives. En outre, ces frais sont perçus de manière cumulative pour chaque nouvelle étape de la procédure qui constitue, en droit italien, un moyen nouveau ou une demande fondée sur des moyens complémentaires.

3.

Cela soulève la question de savoir si les dispositions italiennes en cause sont compatibles avec les objectifs de la directive 89/665/CEE du Conseil, du 21 décembre 1989, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives à l’application des procédures de recours en matière de passation des marchés publics de fournitures et de travaux ( 2 ). Cette directive doit être interprétée à la lumière des principes d’effectivité et d’équivalence, ainsi que de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la «Charte») et de sa garantie de l’accès à la justice.

II – Le cadre juridique

A – Le droit de l’Union

4.

Le troisième considérant de la directive 89/665 dispose:

«considérant que l’ouverture des marchés publics à la concurrence communautaire nécessite un accroissement substantiel des garanties de transparence et de non‑discrimination et qu’il importe, pour qu’elle soit suivie d’effets concrets, qu’il existe des moyens de recours efficaces et rapides en cas de violation du droit communautaire en matière de marché public ou des règles nationales transposant ce droit».

5.

L’article 1er de la directive 89/665, intitulé «Champ d’application et accessibilité des procédures de recours», dispose:

«1.   La présente directive s’applique aux marchés visés par la directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services [ ( 3 )], sauf si ces marchés sont exclus en application des articles 10 à 18 de ladite directive.

Les marchés au sens de la présente directive incluent les marchés publics, les accords-cadres, les concessions de travaux publics et les systèmes d’acquisition dynamiques.

Les États membres prennent, en ce qui concerne les procédures de passation des marchés publics relevant du champ d’application de la directive 2004/18/CE, les mesures nécessaires pour garantir que les décisions prises par les pouvoirs adjudicateurs peuvent faire l’objet de recours efficaces et, en particulier, aussi rapides que possible, dans les conditions énoncées aux articles 2 à 2 septies de la présente directive, au motif que ces décisions ont violé le droit communautaire en matière de marchés publics ou les règles nationales transposant ce droit.

2.   Les États membres veillent à ce qu’il n’y ait, entre les entreprises susceptibles de faire valoir un préjudice dans le cadre d’une procédure d’attribution de marché, aucune discrimination du fait de la distinction opérée par la présente directive entre les règles nationales transposant le droit communautaire et les autres règles nationales.

3.   Les États membres s’assurent que les procédures de recours sont accessibles, selon des modalités que les États membres peuvent déterminer, au moins à toute personne ayant ou ayant eu un intérêt à obtenir un marché déterminé et ayant été ou risquant d’être lésée par une violation alléguée.

[…]».

6.

L’article 2 de la directive 89/665, intitulé «Exigences en matière de procédures de recours», dispose:

«1.   Les États membres veillent à ce que les mesures prises aux fins des recours visés à l’article 1er prévoient les pouvoirs permettant:

a)

de prendre, dans les délais les plus brefs et par voie de référé, des mesures provisoires ayant pour but de corriger la violation alléguée ou d’empêcher qu’il soit encore porté atteinte aux intérêts concernés, y compris des mesures destinées à suspendre ou à faire suspendre la procédure de passation de marché public en cause ou l’exécution de toute décision prise par le pouvoir adjudicateur;

b)

d’annuler ou de faire annuler les décisions illégales, y compris de supprimer les spécifications techniques, économiques ou financières discriminatoires figurant dans les documents de l’appel à la concurrence, dans les cahiers des charges ou dans tout autre document se rapportant à la procédure de passation du marché en cause;

c)

d’accorder des dommages et intérêts aux personnes lésées par une violation.

[…]».

B – Le droit italien

7.

L’article 13, paragraphe 1, du décret du président de la République no 115, tel que modifié en dernier lieu par la loi no 228 du 24 décembre 2012 (ci-après le «décret no 115/2002») ( 4 ), a introduit un régime de frais de justice constitué par une contribution unifiée. Conformément à l’article 13, paragraphe 6 bis, dans le cadre des procédures administratives, le montant de la contribution unifiée dépend de la matière. S’agissant des recours introduits devant les juridictions administratives, le montant de la contribution unifiée s’élève généralement à 650 euros. Pour les matières particulières, des montants différents sont fixés ( 5 ). Dans le domaine des marchés publics, depuis le 1er janvier 2013, la contribution unifiée s’échelonne de 2000 à 6000 euros, en fonction de la valeur du marché ( 6 ). En vertu de l’article 13, paragraphe 6 bis 1, la contribution unifiée est due non seulement lors de l’inscription au rôle de la requête introductive d’instance, mais également pour les moyens procéduraux et les recours fondés sur des moyens nouveaux introduisant de nouvelles demandes.

8.

Concernant la détermination de la valeur du litige dans les affaires relatives aux marchés publics, en vertu de l’article 14, paragraphe 3 ter, du décret no 115/2002, celle-ci est égale à la valeur de base du marché, telle que définie par le pouvoir adjudicateur dans le cahier de charges.

III – Les faits de l’affaire au principal, la question préjudicielle et la procédure devant la Cour

9.

La requérante, Orizzonte Salute – Studio Infermieristico Associato (ci-après «Orizzonte Salute»), est une association qui fournit des services de soins infirmiers pour des entités publiques et privées. Elle a saisi le Tribunale regionale di giustizia amministrativa di Trento (Italie) d’un recours (ci-après le «recours initial»), complété par trois recours ultérieurs fondés sur des moyens nouveaux, contestant certaines mesures adoptées du 21 décembre 2012 au 23 mai 2013 par la défenderesse, l’Azienda Pubblica di servizi alla persona San Valentino – Città di Levico Terme (ci-après l’«APSP»).

10.

Les mesures contestées concernaient la prorogation d’un marché de services de soins infirmiers au bénéfice d’une autre association et l’appel d’offres ultérieurement publié par l’Azienda Pubblica di servizi alla persona San Valentino – Città di Levico Terme, qui n’invitait à présenter des offres que de certaines associations accréditées auprès du collège infermieri professionali assistenti sanitari vigilatrici d’infanzia (infirmiers professionnels, auxiliaires de santé et puéricultrices, IPASVI), dont Orizzonte Salute n’était pas membre.

11.

Orizzonte Salute a initialement payé une contribution unifiée de 650 euros pour l’introduction d’un recours administratif ordinaire. Toutefois, le 5 juin 2013, la juridiction de renvoi lui a demandé de compléter le paiement jusqu’à la concurrence d’une contribution unifiée de 2000 euros, étant donné que son recours initial relevait de la matière des marchés publics.

12.

Par un nouveau recours introduit le 2 juillet 2013, qui est le quatrième recours complémentaire fondé sur des moyens nouveaux, Orizzonte Salute a contesté cette décision. Pour des raisons d’économie de procédure, la juridiction de renvoi a décidé de statuer d’abord sur cette demande.

13.

La juridiction de renvoi a des doutes sur la compatibilité du régime de frais de justice appliqué par l’État membre avec plusieurs dispositions et principes du droit de l’Union. Par conséquent, elle a saisi la Cour de la question préjudicielle suivante:

«Les principes fixés par la directive 89/665/CEE du Conseil, du 21 décembre 1989, telle que modifiée et complétée, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives à l’application des procédures de recours en matière de passation des marchés publics de fournitures et de travaux, dans sa version modifiée par la directive 92/50/CEE du Conseil, du 18 juin 1992, s’opposent-ils à une réglementation nationale, telle que celle énoncée par les articles 13, paragraphes 1 bis, 1 quater et 6 bis, et 14, paragraphe 3 ter, du [décret no 115/2002] (tel que progressivement modifié par les interventions législatives successives), qui impose un montant élevé au titre de la contribution unifiée pour accéder à la justice administrative en matière de passation de marchés publics?»

14.

Orizzonte Salute, la Camera amministrativa romana, l’Associazione dei consumatori cittadini europei, le Coordinamento delle associazioni per la tutela dell’ambiente e dei diritti degli utenti e consomatori (Codacons), l’Associazione dei giovani amministrativisti (AGAmm), l’Ordine degli Avvocati di Roma et la Società Italiana degli Avvocati Amministrativisti (SIAA) ont présenté des observations écrites ( 7 ), de même que les gouvernements italien, grec, autrichien et polonais, ainsi que la Commission européenne. Parmi les États membres qui ont déposé des observations écrites, seule la République italienne a participé à l’audience qui s’est tenue le 11 février 2015. Toutes les autres parties susmentionnées ont participé à l’audience, y compris la Commission, ainsi que Medical Systems SpA, qui a présenté des observations uniquement orales.

IV – Recevabilité

15.

Je note d’emblée qu’aussi bien la juridiction de renvoi qu’Orizzonte Salute ont attiré l’attention de la Cour sur les frais perçus en vertu du droit italien en lien avec des procédures d’appel d’offres qui vont au-delà des faits de la présente affaire, tels que, par exemple, la contribution unifiée majorée en cas de pourvoi. Le gouvernement autrichien considère que la question préjudicielle n’est recevable que dans la mesure où elle concerne le quatrième recours introduit par Orizzonte Salute, dirigé contre la perception d’une contribution unifiée de 2000 euros. Pour le reste, le gouvernement autrichien considère que cette question est hypothétique.

16.

En outre, je relève que la question soumise par la juridiction nationale est large et d’ordre général. Comme il est indiqué dans les observations écrites de la Commission, la juridiction de renvoi n’explique pas pourquoi une réponse à cette question est nécessaire pour le règlement du litige.

17.

La fonction confiée à la Cour n’est pas de formuler des opinions consultatives sur des questions générales ou hypothétiques ( 8 ). Le renvoi préjudiciel doit être nécessaire à la solution effective d’un contentieux ( 9 ). La présente procédure a non pas la nature d’un recours direct formé par la Commission contre l’Italie, par lequel elle demanderait, in abstracto, si le régime juridique en vigueur de perception de frais de justice dans les affaires de marchés publics est conforme au droit de l’Union, mais celle d’une procédure préjudicielle inextricablement liée aux questions juridiques pertinentes pour l’affaire au principal.

18.

Cela étant, à ce stade, la procédure au principal concerne essentiellement une question limitée, à savoir le quatrième recours complémentaire formé par Orizzonte Salute, qui introduit un moyen nouveau contestant la légalité du montant des frais de justice perçus pour le recours initial. À l’égard de cette question juridique, que la juridiction de renvoi a décidé d’examiner en premier, la question préjudicielle n’est pas hypothétique. En outre, étant donné que la mesure contestée est la cinquième taxe de procédure perçue dans l’affaire au principal, à mon avis, la question des frais cumulatifs nécessite également une réponse de la part de la Cour. Si la Cour jugeait que le système italien est incompatible avec le droit de l’Union, il appartient à la juridiction nationale d’en tirer les conclusions appropriées en ce qui concerne les frais de justice perçus pour le recours initial. Ainsi, dans ce cadre, la question préjudicielle est recevable.

V – Analyse

A – Remarque liminaire – la manière de résoudre le problème examiné

19.

L’article 2, paragraphe 1, de la directive 89/665 oblige les États membres à conférer des pouvoirs judiciaires aux fins de la protection effective des entreprises intéressées dans le contexte des marchés publics. Premièrement, il doit être possible de recourir à des mesures provisoires permettant de contester rapidement les violations alléguées et d’éviter tout préjudice supplémentaire [voir ci-après, sous a)]. Deuxièmement, les États membres sont tenus de conférer des pouvoirs d’annulation de toute décision illégale se rapportant à la procédure de passation du marché [voir ci-après, sous b)]. Troisièmement, une justice de réparation doit être prévue, sous la forme de l’octroi de dommages et intérêts, aux personnes lésées par une violation [voir ci-après, sous c)]. Sur le plan factuel, l’affaire au principal relève du deuxième cas de figure, étant donné qu’Orizzonte Salute conteste la prorogation d’un marché existant de services de soins infirmiers au bénéfice d’une autre association et l’appel d’offres ultérieur, qui n’invitait à présenter des offres que de certaines associations accréditées auprès d’une organisation dont Orizzonte Salute n’était pas membre.

20.

Je rappelle que la directive 89/665 a pour objet de garantir l’existence, dans tous les États membres, de moyens de recours efficaces en cas de violation du droit de l’Union en matière de marchés publics ou des règles nationales transposant ce droit, afin de garantir l’application effective des directives portant coordination des procédures de passation des marchés publics ( 10 ). Les États membres sont tenus de prendre les mesures nécessaires pour garantir que les décisions prises par les pouvoirs adjudicateurs peuvent faire l’objet de recours efficaces et, en particulier, aussi rapides que possible ( 11 ). Enfin, les modalités procédurales mises en place par les États membres qui régissent les recours en justice destinés à assurer la sauvegarde des droits conférés par le droit de l’Union aux candidats et soumissionnaires lésés par des décisions des pouvoirs adjudicateurs ne doivent pas porter atteinte à l’effet utile de la directive 89/665 ( 12 ).

21.

Les actes législatifs de l’Union dans le domaine des marchés publics visent à favoriser l’accès aux marchés publics dans des conditions de non-discrimination et de transparence. La directive 89/665 garantit que les recours en justice ouverts aux particuliers pour la mise en œuvre de ces dispositions de droit de l’Union sont à la fois disponibles et utiles. Ainsi, le législateur de l’Union a envisagé la protection juridictionnelle effective des opérateurs économiques concernés comme un moyen de promouvoir l’effet utile du régime des marchés publics de l’Union européenne et, partant, les objectifs du marché intérieur.

22.

Par conséquent, j’estime que répondre à la question préjudicielle revient à examiner le champ d’application du droit à une protection juridictionnelle effective, tel que garanti par la directive 89/665 et par l’article 47 de la Charte. À la lumière des arguments invoqués dans le cadre de l’affaire au principal, il convient également d’examiner la pertinence des limitations apportées à l’autonomie procédurale des États membres par les principes d’effectivité et d’équivalence pour la question de la compatibilité des frais de justice italiens concernés avec le droit de l’Union.

23.

La jurisprudence de la Cour concernant la directive 89/665 n’offre pas de réponse claire sur la question de savoir si les frais de justice en cause sont compatibles avec les dispositions du droit de l’Union relatives aux recours en matière de marchés publics ( 13 ). Toutefois, il ne fait aucun doute que la perception de frais de justice dans le cadre des procédures nationales qui relèvent du champ d’application de la directive 89/665 revient à mettre en œuvre le droit de l’Union au sens de l’article 51 de la Charte ( 14 ).

24.

Dans ces conditions, j’examinerai maintenant les frais de justice sous l’angle de leur conformité avec le droit fondamental à un recours effectif consacré à l’article 47 de la Charte, ainsi qu’avec la jurisprudence de la Cour concernant les principes d’effectivité et d’équivalence. Comme je l’ai dit à une autre occasion, ces deux principes doivent être considérés comme étant rattachés au cadre de l’article 47 de la Charte ( 15 ). Je commencerai par le principe d’équivalence, avant d’aborder les éléments pertinents de la jurisprudence de la Cour en matière d’«effectivité».

B – Le principe d’équivalence

25.

Le respect du principe d’équivalence suppose que la règle nationale en cause s’applique indifféremment aux recours fondés sur la violation du droit de l’Union et à ceux fondés sur la méconnaissance du droit interne ayant un objet et une cause semblables ( 16 ).

26.

Dans le domaine des marchés publics, le champ d’application de ce principe est restreint, parce qu’il n’y a pas de situations vraiment comparables en droit national et en droit de l’Union. La directive 2004/18 s’applique à tous les marchés publics lorsque le seuil est atteint, sauf aux marchés faisant l’objet d’une exception. Ainsi, l’applicabilité des règles nationales est réservée aux attributions de marchés en deçà du seuil et aux situations exceptées du champ d’application de la directive. Cela reflète, à mon sens, une appréciation du législateur de l’Union selon laquelle ces situations ne sont pas comparables à celles relevant du champ d’application de la directive 2004/18.

27.

En tout état de cause, les frais de justice en question semblent s’appliquer à des litiges en matière de marchés publics qui se situent à la fois dans le champ d’application de la directive 2004/18 et en dehors de celui-ci. Par conséquent, il semblerait qu’il n’y a aucun phénomène de discrimination entre les situations relevant du droit de l’Union et celles relevant du droit national ( 17 ).

28.

En outre, étant donné que le droit des marchés publics représente un mélange complexe de relations juridiques entre le pouvoir adjudicateur et différents acteurs publics et privés, je ne suis pas d’accord que les procédures juridictionnelles visant à contester les décisions prises dans le cadre de l’attribution d’un marché public puissent être considérées comme étant comparables aux procédures ordinaires de droit public devant les juridictions administratives, ainsi que l’ont affirmé Orizzonte Salute et plusieurs autres personnes ( 18 ).

29.

La Commission allègue, dans ses observations écrites, qu’il pourrait y avoir un problème d’équivalence en ce qui concerne le seuil sur l’échelle applicable en vertu du droit italien à partir duquel les frais de justice augmentent de 2000 à 4000 euros. Cela se produit lorsque la valeur du marché est supérieure à 200000 euros. Selon la Commission, le seuil en question correspond «en substance» au seuil établi à l’article 7 de la directive 2004/18, ce qui impliquerait, sous réserve d’un contrôle de la juridiction de renvoi, que les recours formés à l’encontre de violations de ladite directive, ou de la règle nationale de transposition de celle-ci, seraient soumis à des modalités procédurales différentes et moins favorables que les procédures purement nationales.

30.

Je ne suis pas d’accord avec cette affirmation. Il est vrai que le seuil de 200000 euros fixé à l’article 2 du règlement no 1251/2011 de la Commission coïncidait avec le seuil national pour des frais de justice majorés. Toutefois, l’applicabilité des frais de justice d’un montant égal ou supérieur à 4000 euros n’est pas limitée aux cas relevant du champ d’application de la directive 2004/18, et il y a manifestement beaucoup de situations relevant du droit national (des marchés exemptés) dans lesquelles ces frais de justice majorés s’appliquent. De façon plus générale, la solution adoptée par le législateur italien consistant à augmenter de deux points l’échelle applicable dans la détermination des frais de justice en question est un moyen raisonnable d’atténuer l’effet régressif de cette échelle.

31.

En outre, à mon sens, dans le contexte du principe d’équivalence, le droit de l’Union ne s’oppose pas à ce que le droit italien prévoie des frais de justice différents ou des bases différentes pour le calcul de ceux-ci dans différentes formes de procédures judiciaires. Le principe d’équivalence exige un traitement égal entre actions comparables fondées sur le droit national, d’une part, et sur le droit de l’Union, d’autre part, et non une équivalence entre différentes formes de procédures régies par le droit national ( 19 ).

32.

Pour ces raisons, les dispositions nationales en question ne peuvent pas être contestées sur le plan de leur compatibilité avec le principe d’équivalence.

C – Les frais litigieux regardés à la lumière du principe d’effectivité et du droit d’accès à un tribunal

1. Identification du critère pertinent

33.

Je note tout d’abord que les règles juridiques applicables au droit fondamental à un recours effectif au sens de l’article 47 de la Charte, ou au droit au «contrôle juridictionnel», qui trouvent leurs origines dans les articles 6 et 13 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la «CEDH») ( 20 ), sont différentes de celles applicables lorsqu’il s’agit de déterminer si une sanction ou une règle de procédure d’un État membre n’est pas conforme au principe d’effectivité, en ce sens que la règle en question rend les droits prévus par le droit de l’Union pratiquement impossibles ou excessivement difficiles à mettre en œuvre. Ces dernières, n’étant pas créées dans le cadre des droits fondamentaux de l’Union, ont été mises en place en fonction des limites posées par le droit de l’Union à l’autonomie procédurale des États membres.

34.

Toutefois, en l’espèce, ces deux approches convergent en grande partie, parce que le but même de la directive 89/665 est de garantir l’accès à la justice aux entreprises en cas de violation des règles de fond ou de procédure du droit de l’Union en matière de marchés publics. En d’autres termes, l’effet utile de cet acte législatif coïncide en grande partie avec le strict respect des conditions posées par l’article 47 de la Charte dans ce domaine.

35.

Le principe d’effectivité, au sens de l’interdiction faite aux États membres de mettre en place des règles de procédure rendant les droits issus du droit de l’Union pratiquement impossibles ou excessivement difficiles à mettre en œuvre ( 21 ), n’implique aucun critère formel de proportionnalité. Toutefois, lorsque la question se pose de savoir si la disposition procédurale nationale ou le recours en question remplit les conditions, le cas «doit être analysé en tenant compte de la place de cette disposition dans l’ensemble de la procédure, de son déroulement et de ses particularités, devant les diverses instances nationales. Dans cette perspective, il y a lieu de prendre en considération, s’il échet, les principes qui sont à la base du système juridictionnel national, tels que la protection des droits de la défense, le principe de la sécurité juridique et le bon déroulement de la procédure» ( 22 ).

36.

Le droit au «contrôle juridictionnel» et l’accès à la justice en vertu de l’article 47 de la Charte ne sont pas appréciés de cette manière. Ils sont évalués selon le critère classique de la limitation, qui implique une analyse portant sur le fait de savoir si les mesures qui les restreignent sont prévues par la loi et si elles respectent les exigences du principe de proportionnalité, en vertu desquelles elles doivent poursuivre un but légitime, être nécessaires, être de nature à atteindre ce but et se limiter à ce qui est nécessaire pour atteindre ce but légitime ( 23 ). C’est ce que reflète à présent l’article 52, paragraphe 1, de la Charte.

37.

Il est bien établi que, selon toutes les circonstances, les frais de justice peuvent constituer une limitation de l’accès à un tribunal, tel que garanti par l’article 47 de la Charte. Ainsi, de même que les restrictions auxquelles est soumise la disponibilité de l’aide juridictionnelle pour assurer la mise en œuvre des droits établis par l’Union ( 24 ), le problème en l’espèce est mieux évalué au regard du critère, décrit ci‑dessus, qui est pertinent pour le droit au «contrôle juridictionnel», plutôt que par rapport à celui applicable aux recours et aux règles de procédure afin de déterminer s’ils vont au-delà des limites de l’autonomie procédurale de l’État membre. C’est donc ce critère que j’appliquerai maintenant à la situation de l’affaire au principal.

2. Application au présent litige

a) Sur le montant de la contribution unifiée dans les procédures administratives en matière de marchés publics

38.

La question à analyser est celle de savoir si les frais de justice en cause constituent une entrave au droit d’accès à un tribunal ( 25 ). Comme il est indiqué dans les observations écrites de la Commission, la Cour européenne des droits de l’homme (ci-après la «Cour EDH») a examiné cette question dans sa jurisprudence, notamment dans l’affaire Stankov c. Bulgarie ( 26 ). Dans cet arrêt, elle a jugé que l’obligation de payer des frais afférents aux affaires civiles ne saurait, en elle-même, passer pour une restriction au droit d’accès à un tribunal incompatible en soi avec l’article 6, § 1, de la CEDH ( 27 ). Toutefois, le montant des frais, apprécié à la lumière des circonstances particulières d’une affaire donnée, est un facteur à prendre en compte pour déterminer si l’intéressé a bénéficié de son droit d’accès ( 28 ).

39.

En premier lieu, j’examinerai le point soulevé par la juridiction de renvoi, selon lequel la contribution unifiée est fixée en fonction de la valeur du litige, en termes de valeur théorique du marché à attribuer, et non en fonction du bénéfice réel que l’entreprise participant à l’appel d’offres est en droit d’attendre. Selon la juridiction nationale, ce bénéfice correspondrait à 10 % de la valeur du marché et serait conforme aux règles applicables aux frais de justice dans les affaires civiles italiennes.

40.

Cet argument me paraît dépourvu de pertinence. En effet, d’un point de vue mathématique, il est indifférent qu’une contribution unifiée soit calculée en utilisant comme point de départ une marge bénéficiaire de 10 % de la valeur du marché, et non la valeur du marché en tant que telle, si le résultat est le même. En revanche, un système dans lequel le bénéfice attendu serait calculé de façon individuelle pour chaque appel d’offres et/ou chaque entreprise participant à celui-ci, ayant pour résultat des frais de justice variables, serait compliqué et imprévisible.

41.

En deuxième lieu, même si le niveau de la contribution unifiée semble être relativement élevé, ce constat doit être mis en balance avec le simple fait que les marchés publics ne relèvent pas de la politique sociale. L’on peut s’attendre à ce que les entreprises qui participent à des appels d’offres régis par la directive 2004/18 aient suffisamment de moyens économiques et financiers pour exécuter un marché d’une valeur de 200000 euros ou plus. Dans cette perspective, des frais de justice de 2000, 4000 ou 6000 euros, selon le cas, ne peuvent pas constituer une entrave à l’accès au tribunal, même en prenant en considération les frais d’avocat nécessaires. L’on ne saurait non plus y voir une restriction indue de la concurrence au détriment des entreprises de taille plus réduite.

42.

En troisième lieu, le fait, considéré par la Commission comme pertinent dans ses observations écrites, que la procédure puisse commencer même si les frais de justice ne sont pas payés ( 29 ) est à mon sens sans importance. En effet, la législation italienne part manifestement du principe selon lequel le requérant paye les frais de justice lorsqu’ils deviennent exigibles. Le fait que les frais de justice sont remboursés si le requérant obtient gain de cause me semble également dépourvu de pertinence. Pour que le droit d’accès à un tribunal soit respecté, il doit y avoir une possibilité de contester les décisions prises dans le cadre des appels d’offres, même s’il n’est pas absolument certain qu’il sera fait droit à l’action. Des frais de justice excessifs peuvent donc représenter un obstacle au droit d’accès à un tribunal prévu à l’article 47 de la Charte, même s’ils peuvent être récupérés ultérieurement.

43.

Pour ces raisons, j’estime que le montant de 2000 euros qu’Orizzonte Salute a dû payer à titre de contribution unifiée pour le recours initial n’est pas préoccupant ( 30 ). Certes, les frais de justice en question sont plus élevés que les frais perçus par la République italienne dans d’autres types de litiges administratifs ou dans les procédures civiles. Toutefois, la contribution unifiée (à savoir, sans aucune majoration) n’excède jamais 2 % de la valeur des marchés relevant du champ d’application de la directive 2004/18 et, par conséquent, de la directive 89/665. Cela est loin de constituer un obstacle à l’accès au tribunal.

44.

Par conséquent, à mon avis, l’élément déterminant en l’espèce est le cumul de frais de justice dans le cadre de procédures concernant le même appel d’offres, et non le montant de ces frais en tant que tel.

b) Sur les frais de justice cumulatifs

45.

Ayant conclu que le montant de la contribution unifiée applicable dans le cadre des affaires administratives italiennes relatives aux appels d’offres relevant du champ d’application des directives 2004/18 et 89/665 ne constitue pas en lui‑même une restriction au droit d’accès à un tribunal, il convient à présent de déterminer s’il existe une autre raison de douter de la conformité de cette contribution avec l’article 47 de la Charte, compte tenu plus particulièrement du caractère cumulatif des frais perçus. Dans l’affirmative, il conviendra de déterminer si la restriction constatée est prévue par la loi et si elle est proportionnée au but légitime poursuivi ( 31 ).

46.

Je constate tout d’abord que les frais de justice, y compris ceux cumulatifs, sont clairement prévus par la loi. Quant au caractère légitime du but poursuivi, la Cour EDH a jugé que «[l]es règles générales applicables aux frais de justice poursuivent des objectifs – tels que celui d’assurer le financement du système judiciaire ou de décourager les actions frivoles – pouvant passer pour compatibles avec une bonne administration de la justice» ( 32 ).

47.

Dans le système italien des juridictions administratives, les procédures concernant les marchés publics semblent bénéficier d’un régime spécial, en ce sens qu’elles sont traitées plus rapidement que d’autres actions, et les frais de justice augmentés contribuent au financement de ces juridictions, ce qui leur permet de fonctionner avec célérité. Cela est conforme aussi bien aux exigences de la directive 89/665 qu’à la jurisprudence de la Cour EDH.

48.

Toutefois, lors de l’audience, Orizzonte Salute a souligné qu’une entreprise qui est exclue d’un appel d’offres dès le début de la procédure doit, en vertu du droit italien, contester aussi bien la décision concernant la sélection du participant à l’appel d’offres que l’attribution du marché elle-même. En outre, les appels d’offres italiens comportent souvent d’autres décisions du pouvoir adjudicateur concernant, par exemple, l’accès aux cahiers de charges, qui doivent être contestées séparément au cours de la procédure devant les juridictions administratives italiennes. En droit italien, tout cela équivaut à des recours fondés sur des moyens nouveaux qui donnent lieu à la perception de frais de justice supplémentaires du même montant que ceux perçus pour le recours initial.

49.

Orizzonte Salute allègue qu’elle a été tenue de payer 2000 euros pour le recours initial et trois fois 2000 euros pour les recours complémentaires, en plus des 2000 euros dus pour le quatrième recours complémentaire qui fait l’objet de la présente demande de décision préjudicielle. Aucun de ces chiffres n’a été contesté par le gouvernement italien ou par les parties défenderesses au principal.

50.

Le système italien en question peut rendre les recours en justice futiles d’un point de vue économique, même s’il poursuit le but légitime de couvrir les coûts de l’administration de la justice et de décourager les actions frivoles. Par exemple, des frais de justice cumulatifs de 20000 euros ( 33 ), lorsqu’ils s’ajoutent aux frais d’avocat, peuvent rendre économiquement non viable la contestation de marchés proches du seuil d’applicabilité des directives en question ( 34 ). En ce sens, les frais en question peuvent dissuader des entreprises qui autrement pourraient introduire des recours juridictionnels dans le domaine des marchés publics.

51.

J’estime que cela peut être contraire au droit fondamental au «contrôle juridictionnel» garanti à l’article 47 de la Charte. Comme la Cour EDH l’a jugé, les règles de procédure doivent répondre à un objectif de sécurité juridique et de bonne administration de la justice. Elles ne doivent pas «former une sorte d’obstacle qui empêche le justiciable de voir son affaire jugée sur le fond par un tribunal compétent» [traduction libre] ( 35 ).

52.

À mon avis, l’article 2, paragraphe 1, sous b), de la directive 89/665 fait référence à la «procédure de passation du marché» en tant qu’unité de base de la protection juridictionnelle. En effet, une entreprise qui souhaite participer à une procédure de passation de marché vise à obtenir le marché pour elle-même. À cet égard, il importe peu de savoir si elle a échoué au début de la procédure de passation, à savoir lors de la sélection des participants, ou à la fin, en d’autres termes, lorsque le marché est attribué à un autre participant, ou bien quelque part entre ces deux moments.

53.

Il relève de l’autonomie juridictionnelle d’un État membre de déterminer de quelle manière le droit national dans le domaine des procédures administratives conçoit les recours contre une procédure de passation de marché déterminée, par exemple, si les recours juridictionnels relatifs aux dernières étapes d’une procédure de passation de marché sont conçus comme des développements du recours initial contestant la décision relative à la sélection des participants ou s’ils doivent être considérés comme de nouvelles demandes fondées sur des moyens nouveaux. Toutefois, les règles de procédure doivent être au service de la sécurité juridique et de la bonne administration de la justice.

54.

Par conséquent, la perception de frais de justice multiples et cumulatifs dans le cadre de procédures juridictionnelles peut être incompatible avec l’article 47 de la Charte, au moins si ces frais cumulatifs ont un effet dissuasif et s’ils sont disproportionnés par rapport aux frais initiaux, étant donné que l’article 2, paragraphe 1, sous b), de la directive 89/665 n’envisage qu’une seule cause et un seul objet de l’action, qui consistent à corriger une irrégularité dans la procédure de passation de marché au détriment de l’entreprise.

55.

Il appartient à la juridiction de renvoi de se livrer à l’exercice décrit au point 36 des présentes conclusions, à la lumière de la jurisprudence pertinente de la Cour (y compris de l’arrêt qui sera rendu dans la présente affaire) ( 36 ), afin de déterminer si la restriction apportée par les frais de justice cumulatifs au droit au «contrôle juridictionnel», prévu à l’article 47 de la Charte, est justifiée au regard du critère de proportionnalité énoncé à l’article 52, paragraphe 1, de la Charte ( 37 ).

VI – Conclusion

56.

Pour ces raisons, je propose de répondre comme suit à la question préjudicielle posée par le Tribunale regionale di giustizia amministrativa di Trento:

La directive 89/665/CEE du Conseil, du 21 décembre 1989, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives à l’application des procédures de recours en matière de passation des marchés publics de fournitures et de travaux, telle que modifiée, interprétée à la lumière de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, ainsi que des principes d’équivalence et d’effectivité, ne s’oppose pas à des dispositions de droit national qui établissent un barème de contributions unifiées applicable uniquement dans les procédures administratives relatives aux marchés publics, à condition que le montant des frais de justice ne constitue pas un obstacle à l’accès à un tribunal ou qu’il ne rende pas excessivement difficile l’exercice du droit au contrôle juridictionnel en matière de marchés publics. La perception de frais de justice multiples et cumulatifs dans le cadre d’une procédure juridictionnelle dans laquelle une entreprise conteste la légalité d’une seule procédure de passation de marché, au sens de l’article 2, paragraphe 1, sous b), de la directive 89/665, n’est pas compatible avec la directive 89/665, interprétée à la lumière de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, sauf si cela peut être justifié au titre de l’article 52, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi d’apprécier.


( 1 ) Langue originale: l’anglais.

( 2 ) JO L 395, p. 33, telle que modifiée par la directive 2007/66/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 décembre 2007 (JO L 335, p. 31, ci-après la «directive 89/665»).

( 3 ) JO L 134, p. 114, telle que modifiée par le règlement (UE) no 1251/2011 de la Commission, du 30 novembre 2011 (JO L 319, p. 43, ci-après la «directive 2004/18»).

( 4 ) Supplément ordinaire à la GURI no 302, du 29 décembre 2012.

( 5 ) Par exemple, la contribution est réduite à 300 euros pour les recours concernant la résidence ou la citoyenneté et à 325 euros pour ceux en matière de service public.

( 6 ) La contribution unifiée est de 2000 euros lorsque la valeur du marché est égale ou inférieure à 200000 euros; de 4000 euros lorsque ladite valeur est comprise entre 200000 et 1000000 d’euros; et de 6000 euros lorsqu’elle est supérieure à 1000000 d’euros.

( 7 ) Je constate que le président de la Cour a accepté les observations écrites de toutes ces organisations avant la procédure orale. Cela étant, malgré les arguments avancés par le gouvernement italien, je n’ai pas l’intention de me livrer à une analyse portant sur le fait de savoir si ces observations sont recevables.

( 8 ) Arrêt Kamberaj (C‑571/10, EU:C:2012:233, point 41).

( 9 ) Voir notamment arrêts Pohotovosť (C‑470/12, EU:C:2014:101, point 29) et García Blanco (C‑225/02, EU:C:2005:34, point 28).

( 10 ) Arrêt Universale-Bau e.a. (C‑470/99, EU:C:2002:746, point 71).

( 11 ) Voir article 1er, paragraphe 1, troisième alinéa, de la directive 89/665.

( 12 ) Arrêt Universale-Bau e.a. (C‑470/99, EU:C:2002:746, point 72).

( 13 ) Voir, en revanche, arrêt Edwards et Pallikaropoulos (C‑260/11, EU:C:2013:221), relatif à une situation dans laquelle des dispositions de l’Union dans le domaine du droit de l’environnement exigeaient de manière spécifique que les procédures juridictionnelles ne soient pas d’un «coût prohibitif».

( 14 ) Arrêt DEB (C‑279/09, EU:C:2010:811).

( 15 ) Voir mes conclusions présentées dans l’affaire Liivimaa Lihaveis (C‑562/12, EU:C:2014:155) ainsi que les conclusions de l’avocat général Bot présentées dans l’affaire Agrokonsulting-04 (C‑93/12, EU:C:2013:172). Voir, pour un exemple récent de la prise en compte par la Cour des principes d’effectivité et d’équivalence dans le contexte des recours visant à faire respecter les règles de l’Union en matière de marchés publics, arrêt eVigilo (C‑538/13, EU:C:2015:166).

( 16 ) Arrêt Surgicare (C‑662/13, EU:C:2015:89, point 30).

( 17 ) Voir notamment arrêt Érsekcsanádi Mezőgazdasági (C‑56/13, EU:C:2014:352, point 64).

( 18 ) Voir, pour des exemples récents de litiges dans lesquels les actions fondées sur le droit de l’Union et celles fondées sur le droit national de l’État membre n’ont pas été considérées comme étant «comparables», arrêts Agrokonsulting-04 (C‑93/12, EU:C:2013:432, notamment points 40 à 42) ainsi que Baczó et Vizsnyiczai (C‑567/13, EU:C:2015:88, point 47).

( 19 ) Voir, par analogie, points 50 et 51 de mes conclusions présentées dans l’affaire Târșia (C‑69/14, EU:C:2015:269).

( 20 ) Voir arrêt Johnston (222/84, EU:C:1986:206, point 18). Voir également les explications afférentes à l’article 47 de la Charte.

( 21 ) Arrêt San Giorgio (199/82, EU:C:1983:318).

( 22 ) Arrêt van Schijndel et van Veen (C‑430/93 et C‑431/93, EU:C:1995:441, point 19).

( 23 ) Arrêt DEB (C‑279/09, EU:C:2010:811). Je rappelle que, dans cette affaire, la juridiction de renvoi a formulé sa question préjudicielle en termes de principe d’effectivité, mais que la Cour a répondu sur le fondement de l’article 47 de la Charte. Je rappelle également que, au point 47 de mes conclusions présentées dans l’affaire Donau Chemie e.a. (C‑536/11, EU:C:2013:67), j’ai relevé qu’«il y a lieu de tenir dûment compte de l’article 19, paragraphe 1, TUE et de la manière dont il fournit une garantie supplémentaire au principe d’effectivité. En vertu de l’article 19, paragraphe 1, TUE, les États membres établissent les voies de recours ‘nécessaires pour assurer une protection juridictionnelle effective dans les domaines couverts par le droit de l’Union’. En d’autres termes, à la lumière de cette disposition du traité, la norme de la protection juridictionnelle effective pour les droits tirés du droit de [l’Union] semble être plus exigeante que la formule classique qui se réfère à l’impossibilité pratique ou à la difficulté excessive. Selon moi, cela signifie que les voies de recours nationales doivent être accessibles, rapides et d’un rapport coût/efficacité raisonnable».

( 24 ) Arrêt DEB (C‑279/09, EU:C:2010:811).

( 25 ) Je remarque que, si j’analysais cette question par rapport aux restrictions à l’autonomie procédurale de l’État membre, j’examinerais si les frais de justice en question rendent l’application de la réglementation pertinente de l’Union pratiquement impossible ou excessivement difficile.

( 26 ) Cour EDH, arrêt Stankov c. Bulgarie, no 68490/01, 12 juillet 2007.

( 27 ) Ibidem (§ 52).

( 28 ) Ibidem (§ 52 et jurisprudence citée).

( 29 ) À comparer, toutefois, avec l’arrêt Stankov c. Bulgarie (cité à la note 26, § 53).

( 30 ) Dans l’arrêt Stankov c. Bulgarie (cité à la note 26, § 58), la Cour EDH, jugeant que les frais de justice violaient le droit d’accès à un tribunal, a noté que «l’application des règles relatives aux frais de justice par les juridictions bulgares a eu en l’espèce pour effet de priver le requérant de la quasi-totalité de l’indemnité que l’État avait été condamné à lui verser au titre de sa détention provisoire illégale».

( 31 ) Si la juridiction nationale considérait qu’une disposition nationale porte atteinte au principe d’effectivité, elle serait tenue d’examiner si la disposition en question rend le droit de l’Union pratiquement impossible ou excessivement difficile à mettre en œuvre, ainsi que d’appliquer le critère de l’arrêt van Schijndel et van Veen (C‑430/93 et C‑431/93, EU:C:1995:441), tel que décrit au point 35 des présentes conclusions.

( 32 ) Cour EDH, arrêt Stankov c. Bulgarie (cité à la note 26, § 57).

( 33 ) Des frais de justice de 20000 euros seraient applicables si la valeur du marché contesté dans le cadre du recours initial d’Orizzonte Salute était, par exemple, de 250000 euros et si la partie concernée faisait le même nombre de recours qu’Orizzonte Salute. Dans ces circonstances, des frais de justice de 4000 euros seraient perçus cinq fois, même si la contribution unifiée pour les marchés ayant une valeur comprise entre 200000 et 1000000 d’euros est de 4000 euros.

( 34 ) Voir extrait de l’arrêt Stankov c. Bulgarie (cité à la note 26) reproduit à la note 30 des présentes conclusions, concernant un recours juridique qui n’était pas économiquement viable.

( 35 ) Cour EDH, arrêt Omerović c. Croatie, no 22980/09, § 39, 5 décembre 2013.

( 36 ) Voir notamment arrêts DEB (C‑279/09, EU:C:2010:811) ainsi qu’Alassini e.a. (C‑317/08 à C‑320/08, EU:C:2010:146).

( 37 ) Je note, toutefois, que la Cour a jugé que, «[p]our apprécier la proportionnalité, le juge national peut […] tenir compte de l’importance des frais de procédure devant être avancés et du caractère insurmontable ou non de l’obstacle qu’ils constituent éventuellement pour l’accès à la justice» (arrêt DEB, C‑279/09, EU:C:2010:811, point 61).

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