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Document 62013CJ0015

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 8 mai 2014.
Technische Universität Hamburg-Harburg et Hochschul-Informations-System GmbH contre Datenlotsen Informationssysteme GmbH.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le Hanseatisches Oberlandesgericht Hamburg.
Marchés publics de fournitures – Directive 2004/18/CE – Attribution du marché sans engagement d’une procédure d’appel d’offres –Attribution dite ‘in house’ – Attributaire juridiquement distinct du pouvoir adjudicateur – Condition de ‘contrôle analogue’ – Pouvoir adjudicateur et attributaire n’ayant pas entre eux un rapport de contrôle – Tierce autorité publique exerçant un contrôle partiel sur le pouvoir adjudicateur et un contrôle sur l’attributaire qui pourrait être qualifié d’‘analogue’ – ‘Opération interne horizontale.
Affaire C-15/13.

Court reports – general

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2014:303

ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

8 mai 2014 ( *1 )

«Marchés publics de fournitures — Directive 2004/18/CE — Attribution du marché sans engagement d’une procédure d’appel d’offres — Attribution dite ‘in house’ — Attributaire juridiquement distinct du pouvoir adjudicateur — Condition de ‘contrôle analogue’ — Pouvoir adjudicateur et attributaire n’ayant pas entre eux un rapport de contrôle — Tierce autorité publique exerçant un contrôle partiel sur le pouvoir adjudicateur et un contrôle sur l’attributaire qui pourrait être qualifié d’‘analogue’ — ‘Opération interne horizontale’»

Dans l’affaire C‑15/13,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Hanseatisches Oberlandesgericht Hamburg (Allemagne), par décision du 6 novembre 2012, parvenue à la Cour le 10 janvier 2013, dans la procédure

Technische Universität Hamburg-Harburg,

Hochschul-Informations-System GmbH

contre

Datenlotsen Informationssysteme GmbH,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. T. von Danwitz, président de chambre, MM. E. Juhász (rapporteur), A. Rosas, D. Šváby et C. Vajda, juges,

avocat général: M. P. Mengozzi,

greffier: Mme M. Ferreira, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 21 novembre 2013,

considérant les observations présentées:

pour la Technische Universität Hamburg‑Harburg, par Mes T. Noelle et I. Argyriadou, Rechtsanwälte,

pour Hochschul‑Informations‑System GmbH, par Mes K. Willenbruch et M. Kober, Rechtsanwälte,

pour Datenlotsen Informationssysteme GmbH, par Me S. Görgens, Rechtsanwalt,

pour le gouvernement tchèque, par M. M. Smolek, en qualité d’agent,

pour le gouvernement espagnol, par Mme M. J. García‑Valdecasas Dorrego, en qualité d’agent,

pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. S. Varone, avvocato dello Stato,

pour le gouvernement hongrois, par M. M. Fehér ainsi que par Mmes K. Szíjjártó et K. Molnár, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par MM. A. Tokár et M. Noll‑Ehlers, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 23 janvier 2014,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 1er, paragraphe 2, sous a), de la directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services (JO L 134, p. 114).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Technische Universität Hamburg‑Harburg (université polytechnique de Hambourg, ci-après l’«université») et Hochschul‑Informations‑System GmbH (ci-après «HIS») à Datenlotsen Informationssysteme GmbH, au sujet de la régularité de la passation d’un marché attribué directement par l’université à HIS sans application des procédures d’adjudication prévues par la directive 2004/18.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

La directive 2004/18 établit le cadre réglementaire applicable aux marchés passés par les pouvoirs adjudicateurs.

4

L’article 1er de cette directive, intitulé «Définitions», prévoit à son paragraphe 2, sous a):

«Les ‘marchés publics’ sont des contrats à titre onéreux conclus par écrit entre un ou plusieurs opérateurs économiques et un ou plusieurs pouvoirs adjudicateurs et ayant pour objet l’exécution de travaux, la fourniture de produits ou la prestation de services au sens de la présente directive.»

5

Cet article 1er dispose à son paragraphe 8:

«Les termes ‘entrepreneur’, ‘fournisseur’ et ‘prestataire de services’ désignent toute personne physique ou morale ou entité publique ou groupement de ces personnes et/ou organismes qui offre, respectivement, la réalisation de travaux et/ou d’ouvrages, des produits ou des services sur le marché.

Le terme ‘opérateur économique’ couvre à la fois les notions d’entrepreneur, fournisseur et prestataire de services. Il est utilisé uniquement dans un souci de simplification du texte.

[...]»

6

L’article 1er, paragraphe 9, de la directive 2004/18 définit de manière détaillée les entités qui sont considérées comme des pouvoirs adjudicateurs et qui doivent, lors de la conclusion d’un contrat à titre onéreux avec un opérateur économique, engager une procédure de passation de marché selon les règles de cette directive.

7

L’article 7 de la directive 2004/18, intitulé «Montant des seuils des marchés publics», fixe les seuils des valeurs estimées à partir desquels l’attribution d’un marché doit être effectuée conformément aux règles de cette directive. Ces seuils sont modifiés à des intervalles réguliers par règlements de la Commission et adaptés aux circonstances économiques. À la date des faits au principal, le seuil concernant les marchés de fournitures passés par des pouvoirs adjudicateurs autres que des autorités gouvernementales centrales était fixé à 193 000 euros par le règlement (CE) no 1177/2009 de la Commission, du 30 novembre 2009 (JO L 314, p. 64).

L’attribution d’un marché public sans application des procédures établies par la directive 2004/18 – Attribution dite «in house»

8

Les conditions d’une telle attribution ont été établies et développées par la jurisprudence de la Cour, laquelle a considéré que l’appel à la concurrence par l’engagement d’une procédure conformément à la directive 2004/18 n’est pas obligatoire dans l’hypothèse où, à la fois, le pouvoir adjudicateur exerce sur une personne, juridiquement distincte de lui, un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services et où cette personne réalise l’essentiel de son activité avec le ou les pouvoirs adjudicateurs qui la détiennent (voir, en ce sens, arrêt Teckal, C‑107/98, EU:C:1999:562, point 50).

Le litige au principal et les questions préjudicielles

9

L’université est un établissement public d’enseignement supérieur du Bundesland Freie und Hansestadt Hamburg (État fédéré de la ville libre et hanséatique de Hambourg (ci‑après la «ville de Hambourg»). Elle constitue un organisme de droit public au sens de l’article 1er, paragraphe 9, de la directive 2004/18 et, par conséquent, un pouvoir adjudicateur. En vue de l’acquisition d’un système de gestion informatique de l’enseignement supérieur, l’université a procédé à un exercice d’évaluation, dans le cadre duquel elle a comparé les systèmes informatiques de Datenlotsen Informationssysteme GmbH et de HIS. À l’issue de cet examen, l’université a opté pour l’acquisition du système provenant de cette dernière société et a conclu avec celle‑ci, le 7 avril 2011, un marché de fournitures par attribution directe, sans application des procédures d’adjudication prévues par la directive 2004/18. La valeur estimée de ce marché s’élevait à 840 000 euros.

10

Il ressort du dossier mis à la disposition de la Cour que HIS est une société à responsabilité limitée de droit privé, dont le capital est détenu à raison d’un tiers par la République fédérale d’Allemagne et de deux tiers par les seize Länder allemands, la part de la ville de Hambourg correspondant à 4,16 % de ce capital. Conformément à l’article 2 des statuts de cette société, l’objet social de celle-ci consiste à assister les établissements publics d’enseignement supérieur et les administrations compétentes dans leurs efforts pour accomplir de manière rationnelle et efficace leur mission d’enseignement supérieur. Les systèmes informatiques de HIS sont utilisés dans plus de 220 établissements publics et religieux d’enseignement supérieur en Allemagne.

11

Conformément à l’article 12, paragraphe 1, des statuts de HIS, le conseil de surveillance de cette société est composé de dix membres, dont sept sont nommés sur proposition de la conférence des ministres des Länder, deux sur proposition de la conférence des recteurs des établissements d’enseignement supérieur, association regroupant les universités et les établissements d’enseignement supérieur allemands publics ou reconnus par l’État, et un sur proposition des autorités fédérales. Aux termes de l’article 15, paragraphe 1, de ses statuts, HIS dispose d’un comité consultatif (Kuratorium), dont 19 des 37 membres sont issus de la conférence des ministres des Länder. En ce qui concerne le volume des activités de HIS, 5,14 % du chiffre d’affaires de cette société correspondent à des activités exercées pour le compte d’entités autres que des établissements publics d’enseignement supérieur.

12

L’attribution directe du marché par l’université à HIS est, selon ces parties contractantes, justifiée par la considération que, bien que, entre ces deux entités, il n’y ait pas de rapport de contrôle, la condition de «contrôle analogue» dégagée par la jurisprudence précitée de la Cour est remplie en raison du fait que celles‑ci se trouvent toutes les deux sous le contrôle de la ville de Hambourg.

13

Datenlotsen Informationssysteme GmbH a déposé un recours contre la décision d’attribution directe de ce marché devant la Vergabekammer de la ville de Hambourg, instance compétente en premier ressort en matière de marchés publics, laquelle a fait droit au recours. Cette instance a considéré que les conditions requises par la jurisprudence de la Cour pour une attribution «in house» n’étaient pas remplies en l’occurrence. Concrètement, il ne serait pas satisfait à la condition de «contrôle analogue», étant donné que l’université, en tant que pouvoir adjudicateur, ne serait pas en mesure d’exercer sur HIS un contrôle analogue à celui qu’elle exerce sur ses propres services. Certes, l’université serait une personne morale de droit public émanant de la ville de Hambourg et cette dernière détiendrait 4,16 % du capital de HIS. Toutefois, l’université et la ville de Hambourg seraient des personnes morales distinctes.

14

De même, la considération que la ville de Hambourg contrôlerait aussi bien l’université que HIS ne suffirait pas non plus pour qu’il soit satisfait à ladite condition, une telle forme de «contrôle indirect» ne trouvant aucune justification dans la jurisprudence de la Cour. La Vergabekammer fait en outre observer que l’université dispose d’une autonomie et que le contrôle de légalité et d’opportunité exercé sur elle par la ville de Hambourg quant à la gestion des crédits alloués n’équivaut pas au pouvoir de direction dont doit disposer un pouvoir adjudicateur. Il ne saurait non plus être question de contrôle exercé sur HIS par la ville de Hambourg, étant donné que celle‑ci ne disposerait pas de représentant permanent au conseil de surveillance de cette société.

15

HIS et l’université ont attaqué cette décision de la Vergabekammer devant la juridiction de renvoi.

16

Cette juridiction fait observer que la question, âprement débattue par la doctrine au niveau national, de savoir si une passation de marché s’inscrivant dans une relation entre trois personnes, qualifiée d’«opération interne horizontale», relève de la jurisprudence issue de l’arrêt Teckal (EU:C:1999:562), n’a pas fait jusqu’à présent l’objet de la jurisprudence de la Cour. Elle estime que l’esprit et la finalité de l’exonération relative aux attributions «in house», initiée par ledit arrêt, pourraient permettre que des opérations internes horizontales telles que celle en cause au principal puissent relever de cette exonération. Elle signale toutefois que, en l’occurrence, il ne peut pas être question de coopération intercommunale au sens de la jurisprudence de la Cour (arrêts Commission/Allemagne, C‑480/06, EU:C:2009:357, ainsi que Ordine degli Ingegneri della Provincia di Lecce e.a., C‑159/11, EU:C:2012:817), car tant l’université que HIS ne constituent pas des autorités publiques et HIS n’est pas directement chargée d’exécuter une mission de service public.

17

La juridiction de renvoi relève que, conformément aux statuts des établissements publics d’enseignement supérieur, ces derniers disposent d’une large autonomie dans les domaines de la recherche et de l’enseignement et que l’exercice de ces compétences autonomes n’est soumis qu’au simple contrôle de légalité. Toutefois, le contrat en cause au principal relèverait du domaine de la gestion des crédits alloués à l’université, dans lequel les autorités compétentes disposeraient d’un pouvoir de contrôle allant jusqu’à la possibilité d’annuler ou de modifier les décisions prises en matière d’acquisitions.

18

La juridiction de renvoi estime ainsi que, dans le domaine des achats et des fournitures des établissements publics d’enseignement supérieur, la condition de «contrôle analogue» est remplie. Elle se demande toutefois si cette condition n’exige pas que le contrôle porte sur l’ensemble des domaines d’activité de l’entité subordonnée, de sorte que la limitation du champ d’application de ce contrôle aux marchés de fournitures ne permettrait pas de considérer qu’il est satisfait à ladite condition. En ce sens plaiderait la jurisprudence de la Cour selon laquelle le pouvoir adjudicateur doit avoir la possibilité d’exercer une influence déterminante tant sur les objectifs stratégiques que sur les décisions importantes de l’entité subordonnée.

19

En ce qui concerne le contrôle exercé par la ville de Hambourg sur HIS, la juridiction de renvoi relève que le fait que la ville de Hambourg ne détient que 4,16 % du capital de cette société et ne dispose pas d’un représentant permanent au sein du conseil de surveillance de celle-ci pourrait plaider à l’encontre de l’existence d’un contrôle analogue à celui qu’elle exerce sur ses propres services. En ce qui concerne la seconde condition, imposée par la jurisprudence de la Cour, relative à la «réalisation de l’essentiel» de l’activité de l’attributaire, la juridiction de renvoi estime que cette condition est en l’occurrence remplie, étant donné que l’activité de HIS est consacrée très majoritairement aux établissements publics d’enseignement supérieur et que les autres activités de cette société ont un caractère accessoire.

20

Eu égard à ces considérations, le Hanseatisches Oberlandesgericht Hamburg a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)

Faut‑il considérer comme constituant également un ‘marché public’, au sens de l’article 1er, paragraphe 2, sous a), de la directive 2004/18 [...], un marché dans le cadre duquel, certes, l’entité adjudicatrice n’exerce pas sur l’adjudicataire un contrôle analogue à celui qu’elle exerce sur ses propres services, mais tant l’entité adjudicatrice que l’adjudicataire sont contrôlés par le même organisme, lequel constitue pour sa part un pouvoir adjudicateur au sens de la directive 2004/18 et l’entité adjudicatrice et l’adjudicataire exercent l’essentiel de leur activité pour leur organisme commun (opération interne horizontale)?

En cas de réponse affirmative à la première question:

2)

Le contrôle analogue à celui que l’entité adjudicatrice exerce sur ses propres services doit‑il s’étendre à l’ensemble de l’activité de l’adjudicataire ou suffit-il d’un contrôle limité au domaine des achats?»

Sur les questions préjudicielles

21

Par ses questions, qu’il convient d’examiner conjointement, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 1er, paragraphe 2, sous a), de la directive 2004/18 doit être interprété en ce sens qu’un contrat ayant pour objet la fourniture de produits conclu entre, d’une part, une université qui est un pouvoir adjudicateur et qui est contrôlée dans le domaine de ses acquisitions de produits et de services par un État fédéré allemand et, d’autre part, une entreprise de droit privé détenue par l’État fédéral et des États fédérés allemands, y compris ledit État fédéré, constitue un marché public au sens de cette disposition.

22

Conformément à la jurisprudence de la Cour, l’objectif principal des règles du droit de l’Union en matière de marchés publics est l’ouverture à la concurrence non faussée dans tous les États membres dans les domaines d’exécution de travaux, de fourniture de produits et de prestation de services, ce qui implique l’obligation pour tout pouvoir adjudicateur d’appliquer les règles pertinentes du droit de l’Union lorsque les conditions prévues par celui-ci sont remplies (voir, en ce sens, arrêt Stadt Halle et RPL Lochau, C‑26/03, EU:C:2005:5, point 44).

23

Par conséquent, toute exception à l’application de cette obligation est d’interprétation stricte (voir arrêt Stadt Halle et RPL Lochau, EU:C:2005:5, point 46).

24

La Cour a conclu que, en vue de l’application des procédures de passation des marchés publics prévues par la directive 2004/18, il suffit, en principe, conformément à l’article 1er, paragraphe 2, sous a), de cette directive, qu’un contrat à titre onéreux ait été conclu entre, d’une part, un pouvoir adjudicateur et, d’autre part, une personne juridiquement distincte de ce dernier (voir, en ce sens, arrêt Teckal, EU:C:1999:562, point 50).

25

L’exception à l’application de ce principe, reconnue par la Cour, concernant les attributions de marchés dites «in house», est justifiée par la considération qu’une autorité publique, qui est un pouvoir adjudicateur, a la possibilité d’accomplir les tâches d’intérêt public qui lui incombent par ses propres moyens, administratifs, techniques et autres, sans être obligée de faire appel à des entités externes n’appartenant pas à ses services, et que cette exception peut être étendue aux situations dans lesquelles le cocontractant est une entité juridiquement distincte du pouvoir adjudicateur, lorsque ce dernier exerce sur l’attributaire un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services et que cette entité réalise l’essentiel de son activité avec le ou les pouvoirs adjudicateurs qui la détiennent (voir, en ce sens, arrêts Teckal, EU:C:1999:562, point 50, ainsi que Stadt Halle et RPL Lochau, EU:C:2005:5, points 48 et 49). Dans de tels cas, il peut être considéré que le pouvoir adjudicateur a recours à ses propres moyens.

26

La Cour a davantage explicité la notion de «contrôle analogue», en relevant qu’il doit s’agir de la possibilité pour le pouvoir adjudicateur d’exercer une influence déterminante tant sur les objectifs stratégiques que sur les décisions importantes de l’entité attributaire et que le contrôle exercé par le pouvoir adjudicateur doit être effectif, structurel et fonctionnel (voir, en ce sens, arrêt Econord, C‑182/11 et C‑183/11, EU:C:2012:758, point 27 ainsi que jurisprudence citée).

27

En outre, la Cour a reconnu que, sous certaines conditions, le «contrôle analogue» peut être exercé conjointement par plusieurs autorités publiques détenant en commun l’entité attributaire (voir, en ce sens, arrêt Econord, EU:C:2012:758, points 28 à 31 ainsi que jurisprudence citée).

28

Dans l’affaire au principal, il est constant qu’il n’existe aucun rapport de contrôle entre l’université, pouvoir adjudicateur, et HIS, entité attributaire. En effet, l’université ne détient aucune participation dans le capital de cette entité et n’a aucun représentant légal dans les organes de direction de celle-ci.

29

Par conséquent, la raison qui justifie la reconnaissance de l’exception en ce qui concerne les attributions dites «in house», à savoir l’existence d’un lien interne particulier entre le pouvoir adjudicateur et l’entité attributaire, est absente dans une situation telle que celle de l’affaire au principal.

30

Dès lors, une telle situation ne saurait être couverte par ladite exception, sauf à étendre les limites de l’application de celle‑ci, clairement circonscrites par la jurisprudence de la Cour, d’une manière susceptible de réduire significativement la portée du principe énoncé au point 24 du présent arrêt.

31

Au demeurant, il convient de relever que, en tout état de cause, sur la base des éléments du dossier mis à la disposition de la Cour et à la lumière de la jurisprudence ci‑dessus exposée, la ville de Hambourg n’est pas en mesure d’exercer sur l’université un «contrôle analogue».

32

En effet, il y a lieu de constater que le contrôle exercé par la ville de Hambourg sur l’université ne s’étend qu’à une partie de l’activité de cette dernière, à savoir uniquement en matière d’acquisitions, mais non aux domaines de l’enseignement et de la recherche, dans lesquels l’université dispose d’une large autonomie. Reconnaître l’existence d’un «contrôle analogue» dans une telle situation de contrôle partiel irait à l’encontre de la jurisprudence citée au point 26 du présent arrêt.

33

Dans ces circonstances, il n’y a pas lieu d’examiner si l’exception concernant les attributions «in house» peut trouver à s’appliquer aux opérations dites «internes horizontales», à savoir une situation dans laquelle le même ou les mêmes pouvoir(s) adjudicateur(s) exerce(nt) un «contrôle analogue» sur deux opérateurs économiques distincts dont l’un attribue un marché à l’autre.

34

En ce qui concerne l’applicabilité, dans l’affaire au principal, de la jurisprudence relative à la coopération entre collectivités territoriales découlant des arrêts Commission/Allemagne (EU:C:2009:357), ainsi que Ordine degli Ingegneri della Provincia di Lecce e.a. (EU:C:2012:817), il convient de constater, à l’instar de la juridiction de renvoi, pour les raisons énoncées au point 16 du présent arrêt, que les conditions pour l’application de l’exception prévue par cette jurisprudence ne sont pas remplies.

35

En effet, la coopération instituée entre l’université et HIS n’est pas destinée à l’accomplissement d’une mission de service public commune au sens de la jurisprudence (voir arrêt Ordine degli Ingegneri della Provincia di Lecce e.a., EU:C:2012:817, points 34 et 37).

36

Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre aux questions préjudicielles que l’article 1er, paragraphe 2, sous a), de la directive 2004/18 doit être interprété en ce sens qu’un contrat ayant pour objet la fourniture de produits conclu entre, d’une part, une université qui est un pouvoir adjudicateur et qui est contrôlée dans le domaine de ses acquisitions de produits et de services par un État fédéré allemand et, d’autre part, une entreprise de droit privé détenue par l’État fédéral et des États fédérés allemands, parmi lesquels figure ledit État fédéré, constitue un marché public au sens de cette disposition et doit, dès lors, être soumis aux règles de passation de marchés publics prévues par cette directive.

Sur les dépens

37

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle‑ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) dit pour droit:

 

L’article 1er, paragraphe 2, sous a), de la directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services, doit être interprété en ce sens qu’un contrat ayant pour objet la fourniture de produits conclu entre, d’une part, une université qui est un pouvoir adjudicateur et qui est contrôlée dans le domaine de ses acquisitions de produits et de services par un État fédéré allemand et, d’autre part, une entreprise de droit privé détenue par l’État fédéral et des États fédérés allemands, parmi lesquels figure ledit État fédéré, constitue un marché public au sens de cette disposition et doit, dès lors, être soumis aux règles de passation de marchés publics prévues par cette directive.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure: l’allemand.

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