Choose the experimental features you want to try

This document is an excerpt from the EUR-Lex website

Document 62009CJ0159

Arrêt de la Cour (quatrième chambre) du 18 novembre 2010.
Lidl SNC contre Vierzon Distribution SA.
Demande de décision préjudicielle: Tribunal de commerce de Bourges - France.
Directives 84/450/CEE et 97/55/CE - Conditions de licéité de la publicité comparative - Comparaison de prix portant sur une sélection de produits alimentaires commercialisés par deux chaînes de magasins concurrentes - Biens répondant aux mêmes besoins ou ayant le même objectif - Publicité trompeuse - Comparaison portant sur une caractéristique vérifiable.
Affaire C-159/09.

Recueil de jurisprudence 2010 I-11761

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2010:696

Affaire C-159/09

Lidl SNC

contre

Vierzon Distribution SA

(demande de décision préjudicielle, introduite par

le tribunal de commerce de Bourges)

«Directives 84/450/CEE et 97/55/CE — Conditions de licéité de la publicité comparative — Comparaison de prix portant sur une sélection de produits alimentaires commercialisés par deux chaînes de magasins concurrentes — Biens répondant aux mêmes besoins ou ayant le même objectif — Publicité trompeuse — Comparaison portant sur une caractéristique vérifiable»

Sommaire de l'arrêt

1.        Rapprochement des législations — Publicité trompeuse et publicité comparative — Directive 84/450 — Publicité comparative — Conditions de licéité

(Directive du Conseil 84/450, art. 3 bis, § 1, b))

2.        Rapprochement des législations — Publicité trompeuse et publicité comparative — Directive 84/450 — Publicité comparative — Conditions de licéité

(Directive du Conseil 84/450, art. 3 bis, § 1, a))

3.        Rapprochement des législations — Publicité trompeuse et publicité comparative — Directive 84/450 — Publicité comparative — Conditions de licéité

(Directive du Conseil 84/450, art. 3 bis, § 1, c))

1.        L’article 3 bis, paragraphe 1, sous b), de la directive 84/450 en matière de publicité trompeuse et de publicité comparative, telle que modifiée par la directive 97/55, doit être interprété en ce sens que la seule circonstance que les produits alimentaires diffèrent quant à leur comestibilité et quant au plaisir qu’ils procurent au consommateur, en fonction des conditions et du lieu de leur fabrication, de leurs ingrédients et de l’identité de leur fabricant, n’est pas de nature à exclure que la comparaison de tels produits puisse satisfaire à l’exigence édictée par ladite disposition et voulant que ceux-ci répondent aux mêmes besoins ou aient le même objectif, c’est-à-dire qu’ils présentent entre eux un degré d’interchangeabilité suffisant.

En effet, une interprétation de l’article 3 bis, paragraphe 1, sous b), de la directive 84/450, dans le sens d'une interdiction des publicités comparatives portant sur des produits alimentaires à moins que ceux-ci ne soient identiques, ne résulte aucunement du libellé de ladite disposition et impliquerait, au moyen d’une interprétation extensive de la condition de licéité de la publicité comparative, une limitation considérable de la portée de celle-ci. Ainsi, décider que sauf à être identiques deux produits alimentaires ne peuvent être tenus pour comparables au sens de l’article 3 bis, paragraphe 1, sous b), de la directive 84/450 reviendrait à exclure toute possibilité effective de publicité comparative en ce qui concerne une catégorie particulièrement importante de biens de consommation, et ce quel que soit l’angle de comparaison retenu. Le résultat auquel aboutirait une telle interdiction irait dès lors à l’encontre de la jurisprudence constante de la Cour selon laquelle les conditions exigées de la publicité comparative doivent être interprétées dans le sens le plus favorable à celle-ci.

Quant aux appréciations concrètes portant sur l’existence d’un degré d’interchangeabilité suffisant entre les produits alimentaires faisant l’objet de la comparaison, elles relèvent de la compétence de la juridiction nationale.

(cf. points 34-40 et disp.)

2.        L’article 3 bis, paragraphe 1, sous a), de la directive 84/450 en matière de publicité trompeuse et de publicité comparative, telle que modifiée par la directive 97/55, doit être interprété en ce sens qu’une publicité portant sur une comparaison des prix de produits alimentaires commercialisés par deux chaînes de magasins concurrentes peut revêtir un caractère trompeur, notamment :

- s’il est constaté, eu égard à toutes les circonstances pertinentes du cas d’espèce, et notamment aux indications ou aux omissions dont s’accompagne cette publicité, que la décision d’achat d’un nombre significatif de consommateurs auxquels elle s’adresse est susceptible d’être prise dans la croyance erronée que la sélection de produits opérée par l’annonceur est représentative du niveau général des prix de ce dernier par rapport à celui pratiqué par son concurrent, et que, dès lors, ces consommateurs réaliseront des économies de l’ordre vanté par ladite publicité en effectuant régulièrement leurs achats de biens de consommation courante auprès de l’annonceur plutôt qu’auprès dudit concurrent, ou encore dans la croyance erronée que tous les produits de l’annonceur sont moins chers que ceux de son concurrent, ou

- s’il est constaté que, aux fins d’une comparaison effectuée sous l’angle exclusif du prix, ont été sélectionnés des produits alimentaires qui présentent pourtant des différences de nature à conditionner de manière sensible le choix du consommateur moyen, sans que lesdites différences ressortent de la publicité concernée.

(cf. point 56 et disp.)

3.        L’article 3 bis, paragraphe 1, sous c), de la directive 84/450 en matière de publicité trompeuse et de publicité comparative, telle que modifiée par la directive 97/55, doit être interprété en ce sens que la condition de vérifiabilité qu’énonce ladite disposition exige, s’agissant d’une publicité qui compare les prix de deux assortiments de biens, que les biens en question puissent être précisément identifiés sur la base des informations contenues dans ladite publicité.

Une telle identification est de nature à permettre, conformément à l’objectif de protection des consommateurs poursuivi par la directive 84/450, que le destinataire d’un tel message soit en mesure de s’assurer de ce qu’il a été correctement informé dans la perspective des achats de consommation courante qu’il est amené à effectuer.

C’est à la juridiction nationale qu’il appartient de vérifier si la description des produits comparés est suffisamment précise pour permettre au consommateur d’identifier les produits faisant l’objet de la comparaison aux fins de vérifier l’exactitude des prix dont fait état la publicité.

(cf. points 61-62, 64 et disp.)







ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

18 novembre 2010 (*)

«Directives 84/450/CEE et 97/55/CE – Conditions de licéité de la publicité comparative – Comparaison de prix portant sur une sélection de produits alimentaires commercialisés par deux chaînes de magasins concurrentes – Biens répondant aux mêmes besoins ou ayant le même objectif – Publicité trompeuse – Comparaison portant sur une caractéristique vérifiable»

Dans l’affaire C‑159/09,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par le tribunal de commerce de Bourges (France), par décision du 17 mars 2009, parvenue à la Cour le 8 mai 2009, dans la procédure

Lidl SNC

contre

Vierzon Distribution SA,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. J.-C. Bonichot, président de chambre, MM. K. Schiemann (rapporteur), L. Bay Larsen, Mmes C. Toader et A. Prechal, juges,

avocat général: M. P. Mengozzi,

greffier: Mme R. Şereş, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 1er juillet 2010,

considérant les observations présentées:

–        pour Lidl SNC, par Me B. Braun, avocat,

–        pour Vierzon Distribution SA, par Mes G. Schank et F. Reye, avocats,

–        pour le gouvernement français, par MM. G. de Bergues et S. Menez ainsi que par Mme R. Loosli-Surrans, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement tchèque, par MM. M. Smolek et D. Hadroušek, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement autrichien, par Mme C. Pesendorfer, en qualité d’agent,

–        pour la Commission européenne, par MM. M. Van Hoof et W. Wils, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 7 septembre 2010,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 3 bis de la directive 84/450/CEE du Conseil, du 10 septembre 1984, en matière de publicité trompeuse et de publicité comparative (JO L 250, p. 17), telle que modifiée par la directive 97/55/CE du Parlement européen et du Conseil, du 6 octobre 1997 (JO L 290, p. 18, ci-après la «directive 84/450»).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Lidl SNC (ci-après «Lidl») à Vierzon Distribution SA (ci-après «Vierzon Distribution») au sujet d’une publicité diffusée par voie de presse pour le compte de cette dernière société.

 Le cadre juridique

 La réglementation de l’Union

3        L’article 1er de la directive 84/450 dispose:

«La présente directive a pour objet de protéger les consommateurs, les personnes qui exercent une activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ainsi que les intérêts du public en général contre la publicité trompeuse et ses conséquences déloyales et d’établir les conditions dans lesquelles la publicité comparative est considérée comme licite.»

4        Aux termes de l’article 2, point 2, de cette directive, la publicité trompeuse s’entend de:

«toute publicité qui, d’une manière quelconque, y compris sa présentation, induit en erreur ou est susceptible d’induire en erreur les personnes auxquelles elle s’adresse ou qu’elle touche et qui, en raison de son caractère trompeur, est susceptible d’affecter leur comportement économique ou qui, pour ces raisons, porte préjudice ou est susceptible de porter préjudice à un concurrent».

5        L’article 2, point 2 bis, de ladite directive définit la publicité comparative comme étant:

«toute publicité qui, explicitement ou implicitement, identifie un concurrent ou des biens ou services offerts par un concurrent».

6        L’article 3 de la même directive énonce:

«Pour déterminer si une publicité est trompeuse, il est tenu compte de tous ses éléments et notamment de ses indications concernant:

a)      les caractéristiques des biens ou services, telles que leur disponibilité, leur nature, leur exécution, leur composition, le mode et la date de fabrication ou de prestation, leur caractère approprié, leurs utilisations, leur quantité, leurs spécifications, leur origine géographique ou commerciale ou les résultats qui peuvent être attendus de leur utilisation, ou les résultats et les caractéristiques essentiels des tests ou contrôles effectués sur les biens ou les services;

b)      le prix ou son mode d’établissement et les conditions de fourniture des biens ou de prestation des services;

c)      la nature, les qualités et les droits de l’annonceur, tels que son identité et son patrimoine, ses qualifications et ses droits de propriété industrielle, commerciale ou intellectuelle ou les prix qu’il a reçus ou ses distinctions.»

7        L’article 3 bis, paragraphe 1, de la directive 84/450 prévoit:

«Pour autant que la comparaison est concernée, la publicité comparative est licite dès lors que les conditions suivantes sont satisfaites:

a)      elle n’est pas trompeuse au sens de l’article 2 point 2, de l’article 3 et de l’article 7 paragraphe 1;

b)      elle compare des biens ou services répondant aux mêmes besoins ou ayant le même objectif;

c)      elle compare objectivement une ou plusieurs caractéristiques essentielles, pertinentes, vérifiables et représentatives de ces biens et services, dont le prix peut faire partie;

[...]»

 La réglementation nationale

8        L’article L. 121‑8 du code de la consommation dispose:

«Toute publicité qui met en comparaison des biens ou services en identifiant implicitement ou explicitement, un concurrent ou des biens ou services offerts par un concurrent n’est licite que si:

1°      elle n’est pas trompeuse ou de nature à induire en erreur;

2°      elle porte sur des biens ou services répondant aux mêmes besoins ou ayant le même objectif;

3°      elle compare objectivement une ou plusieurs caractéristiques essentielles, pertinentes, vérifiables et représentatives de ces biens ou services, dont le prix peut faire partie.

[...]»

 Le litige au principal et la question préjudicielle

9        Lidl exploite, sur le territoire français, une chaîne de supermarchés à caractère alimentaire et, notamment, un magasin situé à proximité de celui de Vierzon Distribution qui commercialise, pour sa part, des produits de consommation courante sous l’enseigne Leclerc.

10      Le 23 septembre 2006, Vierzon Distribution a fait paraître dans un journal local une publicité (ci‑après la «publicité litigieuse») reproduisant des tickets de caisse énumérant, au moyen de désignations génériques accompagnées, le cas échéant, d’indications de poids ou de volume, 34 produits, pour la plupart de nature alimentaire, achetés, respectivement, dans le magasin appartenant à Vierzon Distribution et dans celui exploité par Lidl, et laissant apparaître un coût total de 46,30 euros, s’agissant de Vierzon Distribution, et de 51,40 euros, s’agissant de Lidl.

11      Ladite publicité comportait également les slogans «n’est pas E. Leclerc qui veut! prix bas: preuve à l’appui E. Leclerc reste le moins cher» et «en anglais on dit ‘hard discount’; en français, on dit ‘E. Leclerc’».

12      Le 16 mars 2007, Lidl a saisi le tribunal de commerce de Bourges d’un recours visant à obtenir la condamnation de Vierzon Distribution au paiement de dommages et intérêts pour concurrence déloyale ainsi qu’à la publication par voie de presse et d’affichage dans son magasin d’extraits du jugement à intervenir.

13      À l’appui dudit recours, Lidl allègue notamment une violation de l’article L. 121‑8 du code de la consommation. Elle fait valoir que la publicité litigieuse induit en erreur, voire trompe, les consommateurs, tant du fait de sa présentation qu’en raison de ce que Vierzon Distribution aurait sélectionné uniquement les produits qui l’avantageaient après avoir, au besoin, aligné ses prix sur ceux de son concurrent. En outre, lesdits produits ne seraient pas comparables, leurs différences qualitatives et quantitatives impliquant, en effet, qu’ils ne répondent pas aux mêmes besoins. Lidl ajoute que la seule reproduction, dans la publicité litigieuse, de tickets de caisse laissant apparaître la liste des produits comparés ne permet pas aux consommateurs d’appréhender les caractéristiques propres de ceux-ci ni, dès lors, de comprendre les raisons des écarts de prix allégués dans ladite publicité.

14      Vierzon Distribution conteste ces allégations en faisant notamment valoir qu’une comparaison peut porter sur deux biens non identiques pour autant que ceux-ci répondent aux mêmes besoins ou ont le même objectif et présentent, à cet égard, un degré d’interchangeabilité suffisant, ce qui serait le cas en l’occurrence. Quant aux différences existant entre les produits en cause, elles ressortiraient suffisamment des tickets de caisse susmentionnés, si bien que les consommateurs n’auraient pas été induits en erreur. Le fait que Vierzon Distribution aurait sélectionné elle-même les produits faisant l’objet de la comparaison ne serait pas illicite et la circonstance que les achats auraient été effectués le même jour exclurait, par ailleurs, qu’une manipulation des prix ait pu avoir lieu.

15      C’est dans ces conditions que le tribunal de commerce de Bourges a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

«L’article 3 bis de la directive [84/450] doit‑il être interprété en ce sens qu’il ne serait pas licite de procéder à une publicité comparative par les prix de produits répondant au même besoin ou ayant un même objectif, c’est‑à‑dire présentant entre eux un degré d’interchangeabilité suffisant, au seul motif que, s’agissant de produits alimentaires, la comestibilité de chacun de ces produits, en tout cas le plaisir qu’on a à les consommer, varie du tout au tout selon les conditions et les lieux de leur fabrication, selon les ingrédients mis en œuvre, selon l’expérience du fabricant?»

 Sur la question préjudicielle

16      Il y a lieu de rappeler que l’article 3 bis de la directive 84/450 sur lequel porte la question préjudicielle énumère, à son paragraphe 1, sous a) à h), diverses conditions cumulatives auxquelles une publicité comparative doit satisfaire afin de pouvoir être qualifiée de licite (voir, notamment, arrêt du 18 juin 2009, L’Oréal e.a., C‑487/07, Rec. p. I-5185, point 67).

17      En l’occurrence, la Cour considère que, aux fins de prendre en compte les doutes exprimés par la juridiction de renvoi et de fournir à cette dernière des éléments d’interprétation qui peuvent être utiles au jugement de l’affaire dont elle est saisie, il convient, comme l’ont suggéré tant les gouvernements français, autrichien et tchèque que la Commission européenne et, enfin, M. l’avocat général au point 40 de ses conclusions, de se référer respectivement aux conditions de licéité de la publicité comparative énoncées audit article 3 bis, paragraphe 1, sous a) à c).

18      Aussi convient-il de considérer que, par sa question, la juridiction de renvoi demande en substance si l’article 3 bis, paragraphe 1, sous a) à c), de la directive 84/450 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une pratique publicitaire telle que celle décrite dans la décision de renvoi qui procède à une comparaison, sous l’angle du prix, d’un panier de produits alimentaires commercialisés par deux chaînes de magasins concurrentes, notamment eu égard aux différences que présentent les produits alimentaires ainsi comparés en ce qui concerne leurs mode et lieu de fabrication, leurs ingrédients et l’identité de leur fabricant, de telles différences impliquant en particulier que ces produits diffèrent sur les plans de leur comestibilité et du plaisir que procure leur consommation.

19      Eu égard à la formulation de la question préjudicielle et à l’accent mis par celle-ci sur la condition énoncée à l’article 3 bis, paragraphe 1, sous b), de la directive 84/450, la Cour considère opportun de se pencher d’abord sur ladite disposition et d’examiner, ensuite, cet article 3 bis, paragraphe 1, sous a), et, enfin, ledit article 3 bis, paragraphe 1, sous c).

20      Auparavant, il importe toutefois de rappeler qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour que les diverses conditions de licéité de la publicité comparative qu’énumère ledit article 3 bis, paragraphe 1, visent une mise en balance des différents intérêts susceptibles d’être touchés par l’autorisation de la publicité comparative. Ainsi, il ressort d’une lecture combinée des deuxième, septième et neuvième considérants de la directive 97/55 que cet article 3 bis a pour objectif de stimuler la concurrence entre les fournisseurs de biens et de services, dans l’intérêt des consommateurs, en permettant aux concurrents de mettre en évidence de manière objective les avantages des différents produits comparables et en interdisant, dans le même temps, des pratiques pouvant entraîner une distorsion de concurrence, porter préjudice aux concurrents et avoir une incidence négative sur le choix des consommateurs (arrêt L’Oréal e.a., précité, point 68).

21      Il en résulte que les conditions énumérées audit article 3 bis, paragraphe 1, doivent être interprétées dans le sens le plus favorable, afin de permettre les publicités comparant objectivement les caractéristiques de biens ou de services, tout en assurant que la publicité comparative ne soit pas utilisée de manière anticoncurrentielle et déloyale ou de manière à porter atteinte aux intérêts des consommateurs (arrêt L’Oréal e.a., précité, point 69 et jurisprudence citée).

22      Il y a lieu, de même, de rappeler que la directive 84/450 a procédé à une harmonisation exhaustive des conditions de licéité de la publicité comparative dans les États membres et qu’une telle harmonisation implique, par nature, que la licéité de la publicité comparative dans toute l’Union doit être appréciée uniquement à la lumière des critères établis par le législateur de l’Union (voir arrêt du 8 avril 2003, Pippig Augenoptik, C-44/01, Rec. p. I-3095, point 44).

23      Enfin, s’agissant, comme dans l’affaire au principal, d’une comparaison portant sur les prix, il convient de rappeler que la confrontation des offres concurrentes, notamment en ce qui concerne les prix, relève de la nature même de la publicité comparative (arrêt du 19 septembre 2006, Lidl Belgium, C‑356/04, Rec. p. I‑8501, point 57 et jurisprudence citée).

24      Le huitième considérant de la directive 97/55 souligne en outre, à cet égard, que la comparaison du seul prix des biens et des services devrait être possible si cette comparaison respecte certaines conditions, en particulier si elle n’est pas trompeuse.

 Sur l’article 3 bis, paragraphe 1, sous b), de la directive 84/450

25      L’article 3 bis, paragraphe 1, sous b), de la directive 84/450 subordonne la licéité de la publicité comparative à la condition que celle-ci compare des biens ou des services répondant aux mêmes besoins ou ayant le même objectif. La Cour a déjà jugé que ladite condition implique que les biens faisant l’objet de la comparaison présentent un degré d’interchangeabilité suffisant pour le consommateur (arrêts Lidl Belgium, précité, point 26, et du 19 avril 2007, De Landtsheer Emmanuel, C‑381/05, Rec. p. I‑3115, point 44).

26      Ainsi que l’ont souligné le gouvernement français et la Commission, la formulation même de la question préjudicielle suggère que, tout en considérant, pour sa part, que les produits qui font l’objet de la publicité litigieuse présentent entre eux un degré d’interchangeabilité suffisant pour satisfaire à ladite condition, la juridiction de renvoi souhaite néanmoins s’assurer que la nature alimentaire desdits produits ne s’oppose pas à une telle appréciation. Ladite juridiction demande, plus précisément, si la circonstance que les produits d’une telle nature présenteraient d’inévitables variations quant à leur comestibilité ou quant au plaisir que procure leur consommation, eu égard aux différences qui les caractérisent sur les plans de leurs mode et lieu de fabrication, de leurs ingrédients et de l’identité de leur fabricant, ne devrait pas conduire à exclure toute comparabilité entre eux, d’éventuelles comparaisons ne demeurant par voie de conséquence envisageables qu’en présence de produits alimentaires identiques.

27      À cet égard, il importe de souligner, à titre liminaire, que, à la différence notamment de l’article 3 bis, paragraphe 1, sous c), de la directive 84/450, l’article 3 bis, paragraphe 1, sous b), de celle-ci ne traite aucunement, ni dès lors ne préjuge, l’angle sous lequel la comparaison peut licitement intervenir, ou, en d’autres termes, les caractéristiques des biens ou services concernés sur lesquelles peut porter la publicité comparative. Il s’ensuit que, contrairement à ce qui a notamment été suggéré par les gouvernements tchèque et autrichien, l’angle sous lequel opère la comparaison, en l’occurrence le prix, ne saurait exercer une influence sur la question de savoir si deux biens répondent aux mêmes besoins ou ont le même objectif au sens dudit article 3 bis, paragraphe 1, sous b).

28      Par ailleurs, il convient de rappeler, premièrement, que les arrêts précités Lidl Belgium et De Landtsheer Emmanuel, dans lesquels la Cour a précisé, ainsi qu’il a été rappelé au point 25 du présent arrêt, que la condition édictée à l’article 3 bis, paragraphe 1, sous b), de la directive 84/450 subordonne la licéité de la publicité comparative à la condition que les biens comparés présentent un degré d’interchangeabilité suffisant pour le consommateur, ont précisément été rendus à propos d’affaires mettant en cause des publicités portant sur des produits de nature alimentaire.

29      Il y a lieu de relever, deuxièmement, que le neuvième considérant de la directive 97/55 souligne que, pour éviter que la publicité comparative ne soit utilisée de manière anticoncurrentielle et déloyale, il convient de ne permettre que les comparaisons entre des biens et services «concurrents», répondant aux mêmes besoins ou ayant le même objectif.

30      La Cour a notamment précisé que la raison pour laquelle l’article 3 bis, paragraphe 1, sous b), de la directive 84/450 pose comme condition de la licéité de la publicité comparative que celle-ci compare des biens ou des services répondant aux mêmes besoins ou ayant le même objectif tient notamment dans la circonstance que, aux termes de l’article 2, point 2 bis, de ladite directive, l’élément spécifique de la notion de publicité comparative est constitué par l’identification d’un «concurrent» de l’annonceur ou des biens et des services qu’il offre, et que la qualité d’«entreprises concurrentes» repose, elle-même, par définition, sur le caractère substituable des biens ou des services que ces entreprises offrent sur le marché (voir arrêt De Landtsheer Emmanuel, précité, points 27 à 29).

31      Ainsi que l’a souligné la Cour, ces deux dispositions de la directive 84/450 présentent ainsi une évidente proximité, de sorte que les critères permettant d’apprécier le degré de substitution sont similaires, mutatis mutandis, dans le cadre de l’application de chacune de celles-ci (voir, en ce sens, arrêt De Landtsheer Emmanuel, précité, points 46 et 48).

32      À cet égard, le fait que des produits sont, dans une certaine mesure, de nature à satisfaire des besoins identiques permet de conclure à un certain degré de substitution entre eux (arrêt De Landtsheer Emmanuel, précité, point 30 et jurisprudence citée).

33      Afin de conclure à une possibilité effective de substitution conformément à l’article 3 bis, paragraphe 1, sous b), de la directive 84/450, une appréciation individuelle et concrète des produits qui font spécifiquement l’objet de la comparaison dans le message publicitaire est nécessaire (arrêt De Landtsheer Emmanuel, précité, point 47). Une telle appréciation concrète du degré de substitution relève de la compétence des juridictions nationales.

34      Troisièmement, il y a lieu de relever que d’autres considérations s’opposent à une interprétation de l’article 3 bis, paragraphe 1, sous b), de la directive 84/450 qui aurait en substance pour effet d’interdire les publicités comparatives portant sur des produits alimentaires à moins que ceux-ci ne soient identiques.

35      D’une part, une telle interdiction ne résulte aucunement du libellé de ladite disposition.

36      D’autre part, ladite interdiction impliquerait, au moyen d’une interprétation extensive de cette condition de licéité de la publicité comparative, une limitation considérable de la portée de celle-ci (voir, par analogie, arrêt De Landtsheer Emmanuel, précité, points 70 et 71).

37      En effet, ainsi que l’ont notamment souligné le gouvernement tchèque et la Commission, décider que sauf à être identiques deux produits alimentaires ne peuvent être tenus pour comparables au sens de l’article 3 bis, paragraphe 1, sous b), de la directive 84/450 reviendrait à exclure toute possibilité effective de publicité comparative en ce qui concerne une catégorie particulièrement importante de biens de consommation, et ce quel que soit l’angle de comparaison retenu.

38      Or, le résultat auquel aboutirait ainsi une telle interdiction irait à l’encontre de la jurisprudence constante de la Cour selon laquelle les conditions exigées de la publicité comparative doivent être interprétées dans le sens le plus favorable à celle-ci (voir arrêt De Landtsheer Emmanuel, précité, point 63).

39      Eu égard à tout ce qui précède, il convient d’apporter à la juridiction de renvoi un premier élément de réponse selon lequel l’article 3 bis, paragraphe 1, sous b), de la directive 84/450 doit être interprété en ce sens que la seule circonstance que les produits alimentaires diffèrent quant à leur comestibilité et quant au plaisir qu’ils procurent au consommateur, en fonction des conditions et du lieu de leur fabrication, de leurs ingrédients et de l’identité de leur fabricant, n’est pas de nature à exclure que la comparaison de tels produits puisse satisfaire à l’exigence édictée par ladite disposition et voulant que ceux-ci répondent aux mêmes besoins ou aient le même objectif, c’est-à-dire qu’ils présentent entre eux un degré d’interchangeabilité suffisant.

40      Quant aux appréciations concrètes portant sur l’existence d’un tel degré d’interchangeabilité suffisant entre les produits alimentaires faisant l’objet de la comparaison en cause au principal, elles relèvent, ainsi qu’il ressort du point 33 du présent arrêt, de la compétence de la juridiction de renvoi, cette dernière n’ayant du reste donné à la Cour aucune indication quant à l’identité et aux caractéristiques concrètes desdits produits, ni, a fortiori, saisi celle-ci de questions d’interprétation qui seraient liées à de telles données concrètes.

 Sur l’article 3 bis, paragraphe 1, sous a), de la directive 84/450

41      L’article 3 bis, paragraphe 1, sous a), de la directive 84/450 subordonne la licéité d’une publicité comparative à la condition que celle-ci ne soit pas trompeuse.

42      S’agissant, plus précisément, d’une comparaison portant, comme dans l’affaire au principal, sur les prix, il a été rappelé au point 24 du présent arrêt que le huitième considérant de la directive 97/55 souligne que la comparaison du seul prix des biens et des services devrait être possible si cette comparaison respecte certaines conditions, en particulier si elle n’est pas trompeuse.

43      Par ailleurs, il découle du deuxième considérant de la directive 97/55 que l’harmonisation des conditions de licéité de la publicité comparative à laquelle procède cette directive doit notamment contribuer à «mettre en évidence de manière objective» les «avantages» des différents produits comparables.

44      L’article 2, point 2, de la directive 84/450 définit la publicité trompeuse comme étant toute publicité qui, d’une manière quelconque, y compris sa présentation, induit en erreur ou est susceptible d’induire en erreur les personnes auxquelles elle s’adresse ou qu’elle touche et qui, en raison de son caractère trompeur, est susceptible d’affecter leur comportement économique ou qui, pour ces raisons, porte préjudice ou est susceptible de porter préjudice à un concurrent.

45      Ainsi qu’il ressort de la description qui en a été donnée aux points 10 et 11 du présent arrêt, la publicité litigieuse procède d’une sélection d’un nombre limité de produits, pour la plupart de nature alimentaire, commercialisés par deux magasins concurrents. Lesdits produits sont identifiés au moyen de dénominations génériques accompagnées, le cas échéant, d’indications de poids ou de volume, qui figurent sur des tickets de caisse provenant de chacun de ces deux magasins et laissant apparaître, outre le prix individuel de chacun des produits concernés, le montant total acquitté pour acquérir l’assortiment formé par ceux-ci. Ladite publicité comporte par ailleurs des slogans de caractère général vantant le caractère prétendument meilleur marché du magasin de l’annonceur, dont le ticket de caisse ainsi reproduit laisse apparaître un coût total moins élevé que celui de son concurrent.

46      C’est à la juridiction de renvoi qu’il appartient de vérifier, au vu des circonstances du cas d’espèce, si, compte tenu des consommateurs auxquels elle s’adresse, une telle publicité peut avoir un tel caractère trompeur (voir arrêt Lidl Belgium, précité, point 77 et jurisprudence citée).

47      À cet égard, ladite juridiction doit, d’une part, prendre en considération la perception du consommateur moyen des produits ou services faisant l’objet de la publicité en cause, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. S’agissant d’une publicité telle que la publicité litigieuse, il est constant que celle-ci s’adresse non pas à un public spécialisé, mais au consommateur final qui effectue ses achats de consommation courante dans une chaîne de grands magasins (voir arrêt Lidl Belgium, précité, point 78 et jurisprudence citée).

48      Pour procéder à l’appréciation requise, la juridiction nationale doit, d’autre part, tenir compte de tous les éléments pertinents de l’affaire, en ayant égard, ainsi qu’il résulte de l’article 3 de la directive 84/450, aux indications contenues dans la publicité litigieuse et, plus généralement, à tous les éléments de celle-ci (voir arrêt Lidl Belgium, précité, point 79 et jurisprudence citée).

49      La Cour a de même jugé qu’une omission pouvait conférer un caractère trompeur à une publicité, en particulier lorsque, compte tenu des consommateurs auxquels elle s’adresse, une telle publicité a pour objet de cacher une circonstance qui, si elle avait été connue, aurait été de nature à faire renoncer un nombre significatif de consommateurs à leur décision d’achat (arrêt Lidl Belgium, précité, point 80 et jurisprudence citée).

50      À ces divers égards, une publicité telle que la publicité litigieuse pourrait, d’abord, revêtir un caractère trompeur, ainsi qu’il découle de la jurisprudence, si la juridiction de renvoi devait constater, eu égard à toutes les circonstances pertinentes du cas d’espèce, et notamment aux indications ou aux omissions dont s’accompagne cette publicité, que la décision d’achat d’un nombre significatif de consommateurs auxquels elle s’adresse est susceptible d’être prise dans la croyance erronée que la sélection de produits opérée par l’annonceur est représentative du niveau général des prix de ce dernier par rapport à celui pratiqué par son concurrent, et que, dès lors, ces consommateurs réaliseront des économies de l’ordre vanté par ladite publicité en effectuant régulièrement leurs achats de biens de consommation courante auprès de l’annonceur plutôt qu’auprès dudit concurrent, ou encore dans la croyance erronée que tous les produits de l’annonceur sont moins chers que ceux de son concurrent (voir, en ce sens, arrêt Lidl Belgium, précité, points 83 et 84).

51      Une publicité telle que la publicité litigieuse pourrait également s’avérer trompeuse s’il devait être constaté par la juridiction de renvoi que, aux fins de la comparaison par les prix à laquelle procède ladite publicité, ont été sélectionnés des produits alimentaires qui présentent en réalité des différences objectives de nature à conditionner de manière sensible le choix de l’acheteur.

52      En effet, à défaut de faire apparaître lesdites différences, une telle publicité, dès lors qu’elle est effectuée sous l’angle exclusif du prix, est susceptible d’être perçue par le consommateur moyen comme comportant implicitement l’affirmation de l’existence d’une équivalence entre celles des autres caractéristiques desdits produits qui sont également de nature à exercer une influence sensible sur le choix dudit consommateur.

53      À cet égard, la Cour a notamment déjà jugé, au sujet d’une comparaison portant sur les prix pratiqués entre deux magasins concurrents, que, dans les cas où la marque des produits peut conditionner d’une façon sensible le choix de l’acheteur et où la comparaison concerne des produits concurrents dont les marques respectives présentent une importante différence en termes de notoriété, le fait d’omettre la marque la plus renommée va à l’encontre de l’article 3 bis, paragraphe 1, sous a), de la directive 84/450 (arrêt Pippig Augenoptik, précité, point 53).

54      Il peut, le cas échéant, en aller de même en ce qui concerne d’autres caractéristiques des produits comparés, telles que leur composition ou leurs mode et lieu de fabrication auxquels se réfère la question préjudicielle, lorsqu’il apparaît que de telles caractéristiques sont, à l’instar du prix lui-même, par nature susceptibles de conditionner d’une façon sensible le choix de l’acheteur.

55      En pareils cas, le fait de ne pas informer le consommateur sur les différences existant ainsi entre des produits faisant l’objet d’une comparaison sous l’angle du seul prix est de nature à induire celui-ci en erreur quant aux raisons permettant d’expliquer l’écart de prix vanté et quant à l’avantage financier réellement susceptible d’être obtenu par ce consommateur en faisant ses achats auprès de l’annonceur plutôt qu’auprès d’un concurrent déterminé, et à affecter, dans une mesure correspondante, le comportement économique dudit consommateur. En effet, ce dernier peut alors être conduit à croire qu’il obtiendra effectivement un avantage financier s’expliquant par le caractère compétitif de l’offre de l’annonceur et non par l’existence de différences objectives entre les produits comparés.

56      Eu égard à tout ce qui précède, il convient d’apporter à la juridiction de renvoi un deuxième élément de réponse selon lequel l’article 3 bis, paragraphe 1, sous a), de la directive 84/450 doit être interprété en ce sens qu’une publicité telle que celle en cause au principal peut revêtir un caractère trompeur, notamment:

–        s’il est constaté, eu égard à toutes les circonstances pertinentes du cas d’espèce, et notamment aux indications ou aux omissions dont s’accompagne cette publicité, que la décision d’achat d’un nombre significatif de consommateurs auxquels elle s’adresse est susceptible d’être prise dans la croyance erronée que la sélection de produits opérée par l’annonceur est représentative du niveau général des prix de ce dernier par rapport à celui pratiqué par son concurrent, et que, dès lors, ces consommateurs réaliseront des économies de l’ordre vanté par ladite publicité en effectuant régulièrement leurs achats de biens de consommation courante auprès de l’annonceur plutôt qu’auprès dudit concurrent, ou encore dans la croyance erronée que tous les produits de l’annonceur sont moins chers que ceux de son concurrent, ou

–        s’il est constaté que, aux fins d’une comparaison effectuée sous l’angle exclusif du prix, ont été sélectionnés des produits alimentaires qui présentent pourtant des différences de nature à conditionner de manière sensible le choix du consommateur moyen, sans que lesdites différences ressortent de la publicité concernée.

 Sur l’article 3 bis, paragraphe 1, sous c), de la directive 84/450

57      L’article 3 bis, paragraphe 1, sous c), de la directive 84/450 subordonne la licéité d’une publicité comparative à la condition que celle-ci compare objectivement une ou plusieurs caractéristiques essentielles, pertinentes, vérifiables et représentatives de ces biens et services, dont le prix peut faire partie.

58      Le cinquième considérant de la directive 97/55 souligne à cet égard que la publicité comparative, quand elle compare des caractéristiques essentielles, pertinentes, vérifiables et représentatives et qu’elle n’est pas trompeuse, peut être un moyen légitime d’informer les consommateurs de leur intérêt (arrêt De Landtsheer Emmanuel, précité, point 62).

59      Eu égard aux éléments dont elle dispose et aux débats qui se sont tenus devant elle, la Cour n’entend, en l’occurrence, se prononcer qu’au sujet de l’exigence de vérifiabilité.

60      À ce propos, il y a lieu de rappeler que, dans son arrêt Lidl Belgium, précité, qui concernait une publicité comparative effectuée sous l’angle des prix, la Cour a jugé que la vérifiabilité des prix des biens composant deux assortiments de produits présuppose nécessairement que les biens dont les prix ont ainsi été comparés puissent être individuellement et concrètement identifiés sur la base des informations contenues dans le message publicitaire. Toute vérifiabilité des prix de biens est en effet nécessairement subordonnée à la possibilité d’identifier lesdits biens (voir, en ce sens, arrêt Lidl Belgium, précité, point 61).

61      Or, une telle identification est de nature à permettre, conformément à l’objectif de protection des consommateurs poursuivi par la directive 84/450, que le destinataire d’un tel message soit en mesure de s’assurer de ce qu’il a été correctement informé dans la perspective des achats de consommation courante qu’il est amené à effectuer (arrêt Lidl Belgium, précité, point 72).

62      C’est à la juridiction de renvoi qu’il appartient, en l’occurrence, de vérifier si la description des produits comparés, telle qu’elle ressort de la publicité litigieuse, est suffisamment précise pour permettre au consommateur d’identifier les produits faisant l’objet de la comparaison aux fins de vérifier l’exactitude des prix dont fait état ladite publicité.

63      Ainsi que l’a relevé la Commission lors de l’audience, tel pourrait, notamment, ne pas être le cas s’il devait s’avérer que les magasins visés dans la publicité litigieuse commercialisent plusieurs produits alimentaires susceptibles de répondre à la désignation mentionnée sur les tickets de caisse que reproduit cette publicité, de sorte que l’identification précise des biens ainsi comparés ne soit pas possible.

64      Eu égard à ce qui précède, il convient d’apporter à la juridiction de renvoi un troisième élément de réponse selon lequel l’article 3 bis, paragraphe 1, sous c), de la directive 84/450 doit être interprété en ce sens que la condition de vérifiabilité qu’énonce ladite disposition exige, s’agissant d’une publicité telle que celle en cause au principal qui compare les prix de deux assortiments de biens, que les biens en question puissent être précisément identifiés sur la base des informations contenues dans ladite publicité.

 Sur les dépens

65      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) dit pour droit:

L’article 3 bis, paragraphe 1, sous b), de la directive 84/450/CEE du Conseil, du 10 septembre 1984, en matière de publicité trompeuse et de publicité comparative, telle que modifiée par la directive 97/55/CE du Parlement européen et du Conseil, du 6 octobre 1997, doit être interprété en ce sens que la seule circonstance que les produits alimentaires diffèrent quant à leur comestibilité et quant au plaisir qu’ils procurent au consommateur, en fonction des conditions et du lieu de leur fabrication, de leurs ingrédients et de l’identité de leur fabricant, n’est pas de nature à exclure que la comparaison de tels produits puisse satisfaire à l’exigence édictée par ladite disposition et voulant que ceux-ci répondent aux mêmes besoins ou aient le même objectif, c’est-à-dire qu’ils présentent entre eux un degré d’interchangeabilité suffisant.

L’article 3 bis, paragraphe 1, sous a), de la directive 84/450, telle que modifiée par la directive 97/55, doit être interprété en ce sens qu’une publicité telle que celle en cause au principal peut revêtir un caractère trompeur, notamment:

–        s’il est constaté, eu égard à toutes les circonstances pertinentes du cas d’espèce, et notamment aux indications ou aux omissions dont s’accompagne cette publicité, que la décision d’achat d’un nombre significatif de consommateurs auxquels elle s’adresse est susceptible d’être prise dans la croyance erronée que la sélection de produits opérée par l’annonceur est représentative du niveau général des prix de ce dernier par rapport à celui pratiqué par son concurrent, et que, dès lors, ces consommateurs réaliseront des économies de l’ordre vanté par ladite publicité en effectuant régulièrement leurs achats de biens de consommation courante auprès de l’annonceur plutôt qu’auprès dudit concurrent, ou encore dans la croyance erronée que tous les produits de l’annonceur sont moins chers que ceux de son concurrent, ou

–        s’il est constaté que, aux fins d’une comparaison effectuée sous l’angle exclusif du prix, ont été sélectionnés des produits alimentaires qui présentent pourtant des différences de nature à conditionner de manière sensible le choix du consommateur moyen, sans que lesdites différences ressortent de la publicité concernée.

L’article 3 bis, paragraphe 1, sous c), de la directive 84/450, telle que modifiée par la directive 97/55, doit être interprété en ce sens que la condition de vérifiabilité qu’énonce ladite disposition exige, s’agissant d’une publicité telle que celle en cause au principal qui compare les prix de deux assortiments de biens, que les biens en question puissent être précisément identifiés sur la base des informations contenues dans ladite publicité.

Signatures


* Langue de procédure: le français.

Top