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Document 62008FJ0012

Arrêt du Tribunal de la fonction publique (première chambre) du 9 juin 2009.
Thierry Nardin contre Parlement européen.
Fonction publique - Fonctionnaires - Rémunération - Indemnité de dépaysement - Refus d’octroi - Condition prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut - Demande d’annulation - Illégalité de la procédure de recrutement - Caractère inopérant - Demande indemnitaire.
Affaire F-12/08.

Recueil de jurisprudence - Fonction publique 2009 I-A-1-00173; II-A-1-00975

ECLI identifier: ECLI:EU:F:2009:57




ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(première chambre)

9 juin 2009


Affaire F‑12/08


Thierry Nardin

contre

Parlement européen

« Fonction publique – Fonctionnaires – Rémunération – Indemnité de dépaysement – Refus d’octroi – Condition prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut – Demande d’annulation – Illégalité de la procédure de recrutement – Caractère inopérant – Demande indemnitaire »

Objet : Recours, introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA, par lequel M. Nardin demande, en substance, d’une part, l’annulation de la décision du Parlement, du 2 avril 2007, fixant ses « droits d’entrée en fonctions » et lui refusant le bénéfice de l’indemnité de dépaysement, et, d’autre part, la condamnation du Parlement au paiement de l’indemnité de dépaysement à compter du mois d’avril 2007 ainsi qu’au paiement de la somme de 10 000 euros, en réparation du préjudice moral prétendument subi.

Décision : Le recours est rejeté. Le requérant et le Parlement supportent leurs propres dépens. La Commission des Communautés européennes, partie intervenante au soutien des conclusions du Parlement, supporte ses propres dépens.


Sommaire


1.      Fonctionnaires – Rémunération – Indemnité de dépaysement – Objet – Conditions d’octroi – Absence de résidence habituelle ou d’activité professionnelle principale au lieu d’affectation antérieurement à l’entrée en fonctions – Notion

[Statut des fonctionnaires, annexe VII, art. 4, § 1, sous a)]

2.      Fonctionnaires – Recours – Moyens – Moyen tiré de l’irrégularité de la procédure de recrutement de l’intéressé


1.      La raison d’être de l’indemnité de dépaysement, prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut, est de compenser les charges et désavantages particuliers résultant de l’exercice permanent de fonctions dans un pays avec lequel le fonctionnaire n’a pas établi de liens durables avant son entrée en fonctions. Lorsque, pour conclure à l’existence de tels liens, il est exigé que l’intéressé ait, de façon habituelle, travaillé dans le pays de son affectation communautaire future pendant la totalité d’une période déterminée, cela signifie que des prestations professionnelles effectuées dans d’autres pays et entraînant des absences sporadiques et de brève durée durant cette période ne suffisent pas pour faire perdre à l’exercice de l’activité professionnelle principale du fonctionnaire dans l’État d’affectation son caractère habituel.

(voir points 32 et 33)

Référence à :

Cour : 9 octobre 1984, Witte/Parlement, 188/83, Rec. p. 3465, point 11

Tribunal de première instance : 14 décembre 1995, Diamantaras/Commission, T‑72/94, RecFP p. I‑A‑285 et II‑865, point 51, et la jurisprudence citée


2.      Un fonctionnaire ne peut invoquer l’illégalité de la procédure de son recrutement par une institution communautaire pour conclure à l’annulation de la décision de cette institution fixant ses droits d’entrée en fonctions et lui refusant le bénéfice de l’indemnité de dépaysement, étant donné qu’il n’existe pas de lien causal suffisant entre la procédure de recrutement de l’intéressé et la décision litigieuse. Des illégalités entachant la procédure de recrutement permettraient éventuellement de soutenir des conclusions en annulation d’une décision de recrutement ; en revanche, la question de la légalité d’une décision fixant les droits du fonctionnaire lors de son entrée en fonctions est distincte de la légalité de la procédure de recrutement de l’intéressé par cette institution.

(voir point 39)





ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(première chambre)

9 juin 2009 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Rémunération – Indemnité de dépaysement – Refus d’octroi – Condition prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut – Demande d’annulation – Illégalité de la procédure de recrutement – Caractère inopérant – Demande indemnitaire »

Dans l’affaire F‑12/08,

ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,

Thierry Nardin, fonctionnaire du Parlement européen, demeurant à Luxembourg (Luxembourg), représenté par Me V. Wiot, avocat,

partie requérante,

contre

Parlement européen, représenté par Mmes R. Ignătescu et S. Seyr, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenu par

Commission des Communautés européennes, représentée par M. J. Currall et Mme K. Herrmann, en qualité d’agents,

partie intervenante,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de MM. S. Gervasoni, président, H. Kreppel et H. Tagaras (rapporteur), juges,

greffier : M. R. Schiano, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 18 novembre 2008,

rend le présent

Arrêt

1        Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 5 février 2008 par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le 6 février suivant), M. Nardin demande, en substance, d’une part, l’annulation de la décision du Parlement européen, du 2 avril 2007, fixant ses « droits d’entrée en fonctions » et lui refusant le bénéfice de l’indemnité de dépaysement, et d’autre part, la condamnation du Parlement au paiement de l’indemnité de dépaysement à compter du mois d’avril 2007 ainsi qu’au paiement de la somme de 10 000 euros, en réparation du préjudice moral prétendument subi.

 Cadre juridique

2        L’article 4, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut ») prévoit, dans la version de cette disposition applicable au cas d’espèce :

« L’indemnité de dépaysement égale à 16 % du montant total du traitement de base ainsi que de l’allocation de foyer et de l’allocation pour enfant à charge versées au fonctionnaire, est accordée :

a)      au fonctionnaire :

–        qui n’a pas et n’a jamais eu la nationalité de l’État sur le territoire duquel est situé le lieu de son affectation

et

–        qui n’a pas, de façon habituelle, pendant la période de cinq années expirant six mois avant son entrée en fonctions, habité ou exercé son activité professionnelle principale sur le territoire européen dudit État. Pour l’application de cette disposition, les situations résultant de services effectués pour un autre État ou une organisation internationale ne sont pas à prendre en considération ;

[…]

L’indemnité de dépaysement ne peut être inférieure à 466,17 euros par mois.[…] »

 Faits à l’origine du litige

3        Le requérant a participé au concours général EPSO/AST/5/05 organisé par l’Office de sélection du personnel des Communautés européennes (EPSO), pour la constitution d’une réserve d’assistants (grade B*3) dans le secteur des bâtiments, réserve destinée à pourvoir des postes vacants au sein des institutions européennes. Selon le Parlement, ce concours avait été organisé à sa demande.

4        Par courrier du 3 mai 2006, le requérant a été informé que son nom avait été inscrit dans le deuxième groupe de mérite sur la liste de réserve.

5        Par courriel du 9 juin 2006, l’EPSO a indiqué au requérant que son nom avait été « réservé » par le Parlement et que, « [à] ce moment », seule cette institution pouvait lui offrir un poste.

6        Lors d’un entretien, en date du 21 août 2006, le Parlement a proposé au requérant un poste à Strasbourg (France), que celui-ci a refusé en raison du fait que, résidant au Luxembourg, il souhaitait y rester. Le Parlement a ensuite informé le requérant, par courriel du 28 août 2006, qu’il « n’était pas impossible » que, dans les prochains mois, un poste correspondant à son profil soit disponible à Luxembourg.

7        Au début du mois de novembre 2006, le requérant aurait été contacté téléphoniquement par M. S., chef de l’unité « Affaires immobilières et sécurité » au sein de la direction générale des infrastructures de la Cour de justice des Communautés européennes, afin de passer un entretien en vue d’un éventuel recrutement par cette institution. Suite à divers entretiens qui auraient été menés à la Cour de justice, le requérant a confirmé à M. S., par courriel du 1er décembre 2006, accepter le poste proposé par la Cour de justice.

8        Après avoir indiqué au requérant, par courriel du 5 décembre 2006, l’engagement de la procédure en vue de son recrutement à la Cour de justice dans les meilleurs délais, M. S. a contacté le même jour le requérant pour l’informer que ladite procédure de recrutement avait été bloquée par le Parlement. Le requérant a alors adressé au Parlement un courriel lui demandant, d’une part, de libérer son inscription de la liste de réserve, et d’autre part, de faire le nécessaire afin d’autoriser son recrutement par la Cour de justice.

9        Par courriel du 6 décembre 2006 adressé au requérant, le Parlement a admis avoir refusé de le « laisser » à la Cour de justice en raison de son profil intéressant et a ajouté que « en janvier, des postes seront libérés sur le budget 2007 » pour le Parlement au Luxembourg, priant ainsi le requérant de patienter jusqu’au début de l’année 2007.

10      Par courriel du 31 janvier 2007, le Parlement a contacté le requérant pour un poste correspondant à son profil qui pourrait être disponible prochainement à Luxembourg. Par courrier du 15 février 2007, le Parlement a adressé au requérant une proposition de poste d’assistant à la direction générale des infrastructures et de l’interprétation, à l’unité « Gestion immobilière trois lieux », à Luxembourg ; dans ce courrier, le Parlement a précisé au requérant qu’il pourrait prendre ses fonctions le plus rapidement possible et dans un délai maximum de trois mois.

11      Par courriel du 22 février 2007 adressé au Parlement, le requérant a demandé s’il pouvait entrer en fonctions au sein de cette institution à partir du 26 mars 2007, dans la mesure où il pensait pouvoir se libérer auprès de son employeur pour cette date. En réponse, le Parlement lui a indiqué qu’il engageait son personnel le 1er et/ou le 16 de chaque mois et lui proposait donc de prendre ses fonctions « le 1er avril, date effective le 2 avril (lundi) ». Par courriel du 25 février 2007, le requérant a confirmé son accord pour son engagement dès le lundi 2 avril 2007.

12      Par décision du 7 mars 2007, le requérant a été nommé fonctionnaire stagiaire au Parlement, avec effet au 1er avril 2007.

13      La décision du 2 avril 2007 fixant les droits à l’entrée en fonctions du requérant a fait apparaître qu’il n’avait pas droit à l’indemnité de dépaysement (ci-après la « décision litigieuse »).

14      Le 19 juin 2007, le requérant a introduit une réclamation contre la décision litigieuse. Dans sa réclamation, le requérant a précisé qu’il n’était arrivé au Luxembourg, ainsi que cela ressortait de son certificat de résidence, que le 8 octobre 2001 et que, dès lors, il n’avait pas habité au Luxembourg pendant la totalité de la période de cinq années allant du 1er octobre 2001 au 30 septembre 2006 (ci-après la « période de référence ») et devait donc, conformément à l’article 4, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut, bénéficier de l’indemnité de dépaysement ; il a également fait valoir qu’il n’aurait pas perdu le droit à l’indemnité de dépaysement s’il avait été recruté un jour avant le 1er avril 2007 ou si le Parlement avait autorisé son recrutement par la Cour de justice au mois de janvier 2007.

15      Par décision du 31 octobre 2007, la réclamation du requérant a été rejetée au motif qu’il résultait de l’analyse de son dossier qu’il avait habité de façon ininterrompue au Luxembourg pendant la période de référence et exercé une activité professionnelle dans ce pays durant cette période.

 Conclusions des parties et procédure

16      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        dire la requête recevable ;

–        au besoin et avant tout autre progrès en cause, donner acte au requérant qu’il offre de rapporter la preuve de certains faits par l’audition des témoins suivants :

–        M. S., chef de l’unité « Affaires immobilières et sécurité » au sein de la direction générale des infrastructures de la Cour de justice,

–        M. V., chef de la section « Travaux neufs » au sein de la direction générale des infrastructures de la Cour de justice,

–        M. G., chef de la section « Facility Management » au sein de la direction générale des infrastructures de la Cour de justice,

–        dire ces offres de preuve précises, pertinentes et concluantes ;

–        ordonner tous devoirs d’enquête en la matière ;

–        donner acte au requérant qu’il se réserve le droit de fournir une liste complémentaire de témoins ;

–        quant au fond, dire la requête bien fondée ;

–        en conséquence :

–        annuler la décision litigieuse ;

–        condamner la partie défenderesse à payer au requérant l’indemnité de dépaysement correspondant à une somme mensuelle de 16 % du montant total du traitement de base, ainsi que de l’allocation de foyer et de l’allocation pour enfant à charge versés au requérant par mois à compter du mois d’avril 2007 et pour tous les mois suivants jusqu’à solde ;

–        assortir la condamnation d’intérêts moratoires de 8 % par an à compter des dates d’échéances respectives et jusqu’à solde ;

–        condamner la partie défenderesse à payer au requérant la somme de 10 000 euros, ou toute autre somme, même supérieure, à arbitrer par le Tribunal, en réparation du préjudice moral subi ;

–        en tout état de cause, condamner la partie défenderesse aux frais et dépens de la présente procédure ;

–        réserver tous autres droits au requérant.

17      La partie défenderesse conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter comme non fondée la demande en annulation ;

–        rejeter comme irrecevable et, en tout cas, non fondée la demande en indemnité ;

–        statuer sur les dépens comme de droit.

18      Par courrier déposé au greffe du Tribunal le 27 mai 2008 par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le même jour), la Commission des Communautés européennes a demandé à intervenir dans la présente affaire au soutien des conclusions de la partie défenderesse, afin de défendre la légalité de la procédure de recrutement du requérant en l’espèce, et, plus généralement, le système par lequel une institution se « réserve » un lauréat d’un concours général. Les observations des parties principales sur cette demande ont été déposées au greffe du Tribunal respectivement les 4 et 11 juin 2008.

19      Par ordonnance du président de la première chambre du Tribunal du 12 juin 2008, la Commission a été admise à intervenir. Le mémoire en intervention de la Commission a été déposé au greffe du Tribunal le 16 juillet 2008. Dans ce mémoire, la partie intervenante a confirmé son soutien aux conclusions de la partie défenderesse et a conclu, elle aussi, au rejet du recours. Les parties principales ont répondu par écrit à ce mémoire par courriers parvenus au greffe dans le délai imparti.

20      Lors de l’audience du 18 novembre 2008, le représentant de la partie défenderesse a versé au dossier, avec l’autorisation du requérant, un document correspondant à des courriels échangés entre le requérant et les services de la partie défenderesse. Le président a en outre suspendu l’audience et a invité les parties principales à une réunion informelle afin d’entamer une tentative de règlement amiable, laquelle a échoué.

21      Par courrier parvenu au greffe du Tribunal en date du 5 décembre 2008 par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le 8 décembre suivant), le requérant a déposé des documents supplémentaires, destinés à être versés au dossier dans le cadre de la procédure juridictionnelle et visant à démontrer qu’il satisfaisait aux conditions posées à l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut, en ce qui concerne en particulier l’exercice de l’activité professionnelle principale. Sous réserve de la recevabilité de ces documents, le Tribunal a, par courriers du 19 janvier 2009, invité la partie défenderesse et la partie intervenante à émettre des observations sur lesdits documents, lesquelles observations sont parvenues au greffe du Tribunal en date du 26 janvier 2009 ; invité, par courrier du 4 février 2009, à commenter lesdites observations, le requérant a pris position par courrier parvenu au greffe du Tribunal le 11 février 2009 par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le 13 février suivant). Alors que la partie défenderesse, à laquelle la partie intervenante s’est ralliée, a soutenu que le dépôt des documents en question à ce stade de la procédure méconnaissait l’article 42 du règlement de procédure, le requérant a défendu la recevabilité des documents en se fondant, d’abord, sur le fait que ces documents venaient répondre à certains points qui avaient été contestés lors des débats et lors de la réunion informelle, ensuite, sur le fait que de tels documents n’avaient pas pour objet de modifier l’objet du litige ou d’introduire de nouveaux moyens, mais de satisfaire à son obligation d’apporter la preuve du bien-fondé de sa demande.

 Sur les conclusions en annulation

 Arguments des parties

22      Le requérant fait d’abord état d’illégalités affectant la procédure de recrutement, pour conclure par la suite que ces illégalités, constitutives de fautes de la partie défenderesse, ont eu une incidence sur la décision litigieuse.

23      L’argumentation visant à démontrer les illégalités ayant affecté – selon le requérant – la procédure de recrutement consiste essentiellement à contester la mise en œuvre, par la partie défenderesse, du système par lequel une institution se « réserve » un lauréat d’un concours général. Le requérant soulève plusieurs griefs tirés, premièrement, d’une violation du principe de bonne administration, sur le fondement des articles 41 et 51 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, proclamée à Nice le 7 décembre 2000, et de la jurisprudence communautaire, deuxièmement, de l’existence d’un détournement de pouvoir, troisièmement, d’une violation du principe de confiance légitime, quatrièmement, d’une violation du principe d’égalité de traitement, cinquièmement, d’une violation du principe de liberté professionnelle, en s’appuyant sur l’article 15 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, sur l’article 1er, paragraphe 2, de la charte sociale européenne, signée à Turin le 18 octobre 1961, ainsi que sur le point 4 de la charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs, adoptée lors de la réunion du Conseil européen à Strasbourg le 9 décembre 1989.

24      En réponse à cette argumentation, et en se fondant sur le principe de concordance entre la réclamation et la requête, la partie défenderesse soulève l’irrecevabilité du grief tiré de l’illégalité affectant la procédure de recrutement, en ce que le requérant n’aurait pas invoqué celui-ci dans sa réclamation. À titre subsidiaire, la partie défenderesse conclut que le grief tiré de l’illégalité affectant la procédure de recrutement doit être rejeté comme non fondé.

25      S’agissant de l’incidence des fautes prétendument commises par la partie défenderesse lors de la procédure de son recrutement, fautes qui seraient en relation causale directe avec la décision litigieuse, le requérant développe une argumentation en deux branches. D’une part, rappelant les conditions d’octroi de l’indemnité de dépaysement prévues à l’article 4, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut, il prétend remplir la condition négative posée à cet article et liée à la résidence habituelle. D’autre part, le requérant estime que la faute de la partie défenderesse consistant à empêcher son recrutement par la Cour de justice a eu une incidence certaine sur la mise en œuvre, à son égard, des conditions d’octroi de l’indemnité de dépaysement, dès lors que cette faute a conduit à décaler la période de référence ; or, le requérant aurait pu être recruté par la Cour de justice dès le mois de janvier 2007 ou, en toute hypothèse, avant le 1er avril 2007, auquel cas la période de référence aurait débuté à une date antérieure à celle du 1er octobre 2001 et il aurait alors rempli les conditions d’octroi de l’indemnité de dépaysement.

26      En réponse à l’argumentation exposée au point précédent, la partie défenderesse estime que le requérant ne remplit pas les conditions prévues à l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut. En effet, la partie défenderesse observe que le requérant a commencé à travailler pour une société au Luxembourg le 1er octobre 2001 et que, par voie de conséquence, pendant la période de référence, il a exercé son activité professionnelle principale au Luxembourg. De plus, la partie défenderesse mentionne que le requérant ne saurait exprimer sa certitude quant à un recrutement au sein de la Cour de justice dès le mois de janvier 2007 puisqu’il n’a jamais reçu une offre officielle de recrutement émanant de cette institution. Partant, vu que le requérant ne remplissait pas les conditions prévues à l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut et que la décision litigieuse a été prise en pleine conformité avec ces règles, la partie défenderesse conclut que ce moyen doit être rejeté comme non fondé.

27      Dans son mémoire, la partie intervenante se joint, tout d’abord, aux arguments développés par la partie défenderesse sur l’irrecevabilité du grief tiré de l’illégalité affectant la procédure de recrutement, mais soulève une question supplémentaire de recevabilité de ce grief tenant au fait que le requérant met en doute la légalité de la procédure de recrutement, et notamment du système par lequel une institution se « réserve » un lauréat d’un concours général, alors même qu’il était informé, dès le 9 juin 2006, que la partie défenderesse l’avait « réservé » ; dès lors, le requérant aurait dû contester ce système de recrutement à compter de cette date et ne serait plus recevable à le faire dans le cadre d’une contestation concernant au demeurant le refus de l’indemnité de dépaysement. De plus, la partie intervenante se rallie aux arguments de la partie défenderesse sur le fond, en ajoutant cependant certaines considérations tenant au système de « réservation », lequel aurait été mis en place par toutes les institutions communautaires, sur la base d’un accord interinstitutionnel de 2004, annexé au mémoire en intervention et intitulé « Accord des [s]ecrétaires généraux du Parlement européen, du Conseil [de l’Union européenne], de la Commission, du [g]reffier de la Cour de justice, des [s]ecrétaires généraux de la Cour des comptes [des Communautés européennes], du Comité économique et social [européen], du Comité des régions [de l’Union européenne] et du représentant du médiateur [européen] concernant les principes communs d’une politique de sélection et de recrutement harmonisée et les principes d’exploitation des listes [de réserve] ».

 Appréciation du Tribunal

28      En premier lieu, il convient de rappeler que le bénéfice de l’indemnité de dépaysement n’est accordé qu’aux fonctionnaires et agents qui remplissent les deux conditions négatives cumulatives, prévues à l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut. Conformément à la seconde condition négative énoncée dans cette disposition, pour que l’indemnité de dépaysement soit octroyée, il faut que le fonctionnaire n’ait, de façon habituelle, ni habité, ni exercé son activité professionnelle principale pendant la période de cinq années expirant six mois avant son entrée en fonctions dans le pays du lieu d’affectation. Ces deux sous-conditions sont également cumulatives, de sorte que, comme le juge communautaire l’a d’ailleurs relevé à plusieurs reprises, dans le cas où l’une d’entre elles n’est pas remplie, l’indemnité de dépaysement ne peut être octroyée (voir arrêt du Tribunal de première instance du 13 avril 2000, Reichert/Parlement, T‑18/98, RecFP p. I‑A‑73 et II‑309, points 18 et 19).

29      Or, le Tribunal constate d’emblée que le requérant ne remplit pas la seconde des deux sous-conditions susmentionnées.

30      En effet, le requérant admet lui-même dans sa requête que, « [e]n ce qui concerne la condition liée à l’activité professionnelle, comme le relève [la partie défenderesse], [il] est effectivement entré au service de la société ‘Est Études’ à Bettembourg [(Luxembourg)] en date du 1er octobre 2001 ». En particulier, il ressort clairement des annexes du mémoire en défense que le requérant a exercé son activité professionnelle principale au Luxembourg pour la société susmentionnée, du 1er octobre 2001 au 31 mai 2002, et a ensuite travaillé pour la société « Secolux », située à Capellen (Luxembourg), à compter du 1er juin 2002 et jusqu’à son entrée en fonctions au Parlement. En conséquence, et bien que le requérant annexe à sa requête un certificat de résidence de la ville de Luxembourg attestant qu’il n’a effectivement installé sa résidence au Luxembourg qu’en date du 8 octobre 2001, ce afin de démontrer qu’il remplit la sous-condition négative relative à la résidence, il n’en reste pas moins qu’il ne remplit pas la sous-condition négative liée à l’exercice de l’activité professionnelle principale.

31      Cette constatation n’est nullement tenue en échec par les documents supplémentaires que le requérant a transmis au Tribunal après l’audience (voir point 21 du présent arrêt) afin d’apporter des précisions quant à ses activités durant la période de référence, concernant notamment ses prestations professionnelles en dehors du Luxembourg. En effet, ces documents sont irrecevables sur le fondement de l’article 42 du règlement de procédure, dès lors qu’ils ont été transmis au Tribunal après la fin de l’audience et sans que le requérant ait justifié le retard dans leur présentation ; force est, en particulier, de constater que ces documents concernent des périodes bien antérieures à l’introduction du recours et que rien n’empêchait le requérant, qui ne pouvait ignorer l’importance des questions auxquelles ils se rattachaient (tenant au respect des conditions posées à l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut), de se les procurer et de les transmettre au Tribunal en temps utile, lors de la procédure écrite. Il convient dans ce contexte de rappeler que, si l’exigence d’une procédure équitable peut conduire le Tribunal, dans certaines circonstances, à admettre le dépôt d’offres de preuve postérieurement à la duplique, il a été jugé que cette exigence ne trouve à s’appliquer à pareille espèce que si l’auteur de l’offre ne pouvait, avant la clôture de la procédure écrite, disposer des preuves en question ou si les productions tardives de son adversaire justifient que le dossier soit complété de façon à assurer le respect du principe du contradictoire (arrêt du Tribunal de première instance du 21 avril 2004, M/Cour de justice, T‑172/01, Rec. p. II‑1075, point 44) ; or, à supposer qu’une telle jurisprudence puisse s’appliquer par analogie à la question de l’admission d’offres de preuve postérieurement à l’audience, comme cela est le cas en l’espèce, le Tribunal relève cependant, d’une part, que le requérant n’a pas établi, et encore moins prouvé, qu’il lui était impossible de disposer des preuves en question avant l’audience, d’autre part, que non seulement ces preuves ne visaient pas à répondre à des productions tardives du Parlement relatives au lieu où le requérant avait exercé pendant la période de référence, et de façon habituelle, son activité professionnelle principale, mais également que certains passages de la requête (par exemple, ceux des points 106 à 109) ne pouvaient être interprétés qu’en ce sens que le requérant avait accepté, au moment du dépôt de sa requête, que ce lieu était situé à Luxembourg, l’opportunité de contester cela ne lui étant apparue que lors de l’audience et de la réunion informelle qui s’en est suivie.

32      En toute hypothèse, ce qui résulte des documents transmis après la fin de l’audience ne permet pas de contredire la constatation du Tribunal faite au point 30 du présent arrêt. En effet, il y a lieu de rappeler que la raison d’être de l’indemnité de dépaysement, prévue par l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut, est de compenser les charges et désavantages particuliers résultant de l’exercice permanent de fonctions dans un pays avec lequel le fonctionnaire n’a pas établi de liens durables avant son entrée en fonctions. Si, pour conclure à l’existence de tels liens (avec comme conséquence le refus de l’octroi de l’indemnité de dépaysement), il est exigé que l’intéressé ait, de façon habituelle, résidé ou travaillé dans le pays de son affectation communautaire future pendant la totalité d’une période déterminée (quinquennale, expirant six mois avant son affectation), il a été jugé, toutefois, que des absences sporadiques et de brève durée du pays d’affectation durant cette période ne sauraient suffire pour faire perdre à la résidence du fonctionnaire dans l’État d’affectation son caractère habituel (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 9 octobre 1984, Witte/Parlement, affaire 188/83, Rec. p. 3465, point 11 ; arrêt du Tribunal de première instance du 14 décembre 1995, Diamantaras/Commission, T‑72/94, RecFP p. I‑A‑285 et II‑865, point 51, et la jurisprudence citée).

33      Il n’y a pas de raison pour qu’il en aille différemment concernant la condition liée à l’exercice de l’activité professionnelle principale, prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut. Ainsi, des prestations professionnelles effectuées dans d’autres pays et entraînant des absences sporadiques et de brève durée ne sauraient suffire pour faire perdre à l’exercice de l’activité professionnelle principale du fonctionnaire dans l’État d’affectation son caractère habituel.

34      En outre, rien ne permet de supposer qu’il en irait autrement dans le cas d’absences – sporadiques, de brève durée et pour motifs professionnels – qui coïncideraient avec le début ou la fin de la période quinquennale prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut.

35      Dès lors, la circonstance que, durant la période pendant laquelle il était au service de la société « Est Études », située à Bettembourg, le requérant aurait exercé des activités professionnelles à l’étranger, ce pour la première fois pendant une période de quelques jours (à savoir du 1er au 5 octobre 2001) qui coïnciderait avec le début de la période de référence, ne saurait amener le Tribunal à revenir sur la constatation formulée au point 30 in fine du présent arrêt, ce d’autant que le requérant n’apporte pas de preuves suffisantes quant aux activités en question et à ses absences du Luxembourg découlant desdites activités. En particulier, et s’agissant spécifiquement de la période susmentionnée du 1er au 5 octobre 2001, le requérant soumet l’attestation d’une personne qui déclare être l’ancien directeur de la société « Est Études » et qui certifie que le requérant « a commencé ses activités au sein du bureau d’études de la société ‘Est Études’ à L[a] V[arenne] S[aint] H[ilaire] [(France)] (94210) du 1er au 5 octobre 2001 dans le cadre d’un projet industriel » ; or, outre le fait que, dans la requête, il n’est fait nullement mention des activités relatées dans l’attestation et que, ainsi qu’indiqué aux points 30 et 31 du présent arrêt, le requérant semble admettre que le refus de l’indemnité de dépaysement pourrait être fondé sur la sous-condition de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut relative à l’activité professionnelle, une telle attestation, qui intervient plus de huit ans après les faits sur lesquels elle porte et provient d’une personne ayant déjà, et depuis une date non précisée, quitté la société « Est Études », ne permet pas d’établir le degré d’implication du requérant dans le projet industriel dont il est fait mention ni sa présence physique à La Varenne Saint Hilaire, sa fiche de salaire du mois d’octobre 2001 (qu’il annexe aux fins de démontrer le congé pris de huit heures, afin d’accomplir – selon lui – les démarches administratives requises pour son installation au Luxembourg) ne faisant d’ailleurs pas mention d’un quelconque remboursement de frais de mission. Il en va à plus forte raison de même des allégations du requérant relatives à une mission qu’il aurait effectuée du 22 janvier 2002 au 21 mars suivant en Normandie (France), le seul document présenté à l’appui de ces allégations étant une attestation du directeur de l’agence « Forest Wheeler France », datée du 21 novembre 2008, et certifiant uniquement que le requérant « a participé à l’exécution » d’un certain projet au cours de la période susmentionnée.

36      Par ailleurs, la position du Tribunal ne saurait être remise en cause par les circonstances spécifiques de l’espèce, desquelles il ressort que le non-respect de la sous-condition de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut résulte de quelques jours seulement d’activité professionnelle principale au Luxembourg durant la période de référence de cinq années. Le Tribunal ne saurait retenir une autre interprétation, éventuellement plus souple, des dispositions pertinentes dans le cas d’espèce, les dispositions ouvrant droit à des prestations financières, comme c’est le cas de l’espèce, devant être interprétées strictement (voir arrêt du Tribunal de première instance du 15 juillet 2004, Valenzuela Marzo/Commission, T‑384/02, RecFP p. I‑A‑235 et II‑1035, point 104, et la jurisprudence citée ; arrêt du Tribunal du 2 décembre 2008, Baniel-Kubinova e.a./Parlement, F‑131/07, RecFP p. I‑A‑1‑0000 et II‑A‑1‑0000, point 32).

37      Dès lors que le requérant ne remplissait pas les deux conditions négatives cumulatives autorisant l’octroi de l’indemnité de dépaysement prévues à l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut, et notamment, les deux sous-conditions que comporte la seconde des deux conditions susmentionnées, il s’ensuit que la décision litigieuse est justifiée.

38      En second lieu, et s’agissant des prétendues illégalités dont serait affectée la procédure de recrutement, le Tribunal relève d’emblée le caractère inopérant d’une telle argumentation, développée aux fins de l’annulation de la décision litigieuse.

39      Le Tribunal considère en particulier que le requérant ne pourrait invoquer l’illégalité de sa procédure de recrutement au Parlement pour conclure à l’annulation de la décision de cette institution fixant ses droits d’entrée en fonctions et lui refusant le bénéfice de l’indemnité de dépaysement. En effet, il n’existe pas de lien causal suffisant entre la procédure de recrutement de l’intéressé et la décision litigieuse. Tout au plus, l’argumentation du requérant tenant aux prétendues illégalités dont serait affectée la procédure de recrutement permettrait-elle éventuellement de soutenir des conclusions en annulation d’une décision de recrutement, ce qui, de toute évidence, n’est pas le cas en l’espèce. En revanche, la question de la légalité d’une décision fixant les droits d’entrée en fonctions d’un fonctionnaire est distincte de la légalité de la procédure de recrutement de l’intéressé par cette institution.

40      Il en résulte que l’argumentation du requérant ne saurait prospérer et que les conclusions en annulation de la décision litigieuse doivent être rejetées.

41      En toute hypothèse, et à titre surabondant, le Tribunal, à la lecture des faits de l’espèce et des pièces du dossier, considère que la partie défenderesse n’a pas commis d’illégalités ou de fautes lors de la procédure de recrutement. La partie défenderesse a respecté les règles en vigueur et, non seulement elle a fait au requérant une première proposition de recrutement dès le 21 août 2006 (à savoir, à peine deux mois et demi après son inscription sur la liste de réserve des lauréats du concours EPSO/AST/5/05), proposition que le requérant a rejetée, mais, de plus, l’indication qu’elle lui a donnée par la suite, à savoir qu’un poste approprié pourrait être disponible au Luxembourg dans les prochains mois, s’est avérée fondée, le requérant ayant été précisément recruté après une proposition qui lui a été faite au début de l’année 2007 ; par ailleurs, la partie défenderesse a obtenu l’accord exprès du requérant sur la date exacte de son entrée en fonctions, à savoir le 1er avril 2007. S’agissant, en outre, de l’argumentation du requérant portant sur la mise en œuvre par la partie défenderesse du système de « réservation », le Tribunal estime qu’un tel système comporte et garantit un juste équilibre entre les intérêts des lauréats d’un concours et ceux de leurs futurs employeurs, eu égard, en particulier, à la durée limitée de la « réservation » et aux besoins toujours plus accrus des institutions communautaires en personnel spécialisé ; en toute hypothèse, le Tribunal observe que ce nouveau système place les lauréats dans une situation plus favorable que l’ancien système, ces derniers pouvant, à l’issue de la période temporaire de « réservation » par une institution, être recrutés par toute autre institution, ce qui n’était pas possible antérieurement.

42      Toujours à titre surabondant, et s’agissant de l’éventuel recrutement du requérant par la Cour de justice, le Tribunal considère que, à supposer même que ce recrutement ait abouti, rien ne permet d’affirmer que la procédure de recrutement aurait été menée de telle manière que l’entrée en fonctions du requérant dans cette institution serait intervenue avant le 1er avril 2007.

 Sur les conclusions en indemnité

 Arguments des parties

43      Le requérant, se fondant sur l’article 41, paragraphe 3, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, fait valoir que, compte tenu de la nature du préjudice subi en raison de la « faute » commise par la partie défenderesse (à savoir celle consistant à avoir empêché son recrutement par la Cour de justice), la réparation qui correspondrait au mieux à ses intérêts serait de lui accorder l’indemnité de dépaysement à compter du 1er avril 2007 ; par ailleurs, le requérant réclame l’indemnisation de son préjudice moral et sollicite à ce titre la condamnation de la partie défenderesse au paiement de la somme de 10 000 euros, en ce qu’il aurait pu commencer sa carrière au sein des institutions communautaires dès le mois de janvier 2007.

44      En réponse, la partie défenderesse observe, d’une part, que, à supposer que le requérant fonde son recours en indemnité sur le caractère illégal de la décision litigieuse, il ne saurait, au vu de la légalité de cette décision, prétendre au paiement de l’indemnité de dépaysement pour des « dommages prétendument subis par cette décision » ni soutenir avoir subi un quelconque préjudice moral qui devrait être réparé. D’autre part, si le recours en indemnité se fonde sur un quelconque comportement illégal de la partie défenderesse, cette dernière estime que, en l’absence de l’introduction d’une demande, suivie de l’introduction d’une réclamation, il y a de rejeter la demande en réparation comme irrecevable en raison de l’irrégularité de la procédure précontentieuse. À supposer que le Tribunal déclare cependant le « recours en dommages-intérêts » recevable, ce recours devrait être rejeté en tout état de cause comme non fondé.

45      La partie intervenante, quant à elle, n’a pas émis d’observations sur les conclusions indemnitaires.

 Appréciation du Tribunal

46      Le Tribunal constate que, par ses conclusions en indemnité, le requérant cherche en réalité à obtenir le paiement de l’indemnité de dépaysement, qui lui a été refusé par la décision litigieuse. Or, les conclusions en annulation de cette décision ayant été rejetées, il y a lieu de rejeter également la demande indemnitaire. Dès lors, la demande de condamnation aux intérêts moratoires sur ces montants doit également être rejetée.

47      S’agissant de la demande en réparation du préjudice moral prétendument subi, il y a lieu de distinguer deux hypothèses.

48      À supposer que le requérant rattache cette demande à la décision litigieuse, ses conclusions doivent être rejetées, conformément à une jurisprudence constante, si elles présentent un lien étroit avec les conclusions en annulation, elles-mêmes rejetées comme non fondées ou comme irrecevables (arrêts du Tribunal de première instance du 10 juin 2004, Liakoura/Conseil, T‑330/03, RecFP p. I‑A‑191 et II‑859, point 69, et du 13 juillet 2005, Scano/Commission, T‑5/04, RecFP p. I‑A‑205 et II‑931, point 77 ; arrêt du Tribunal du 15 décembre 2008, Skareby/Commission, F‑34/07, RecFP p. I‑A‑1‑0000 et II‑A‑1‑0000, point 101, faisant l’objet d’un pourvoi pendant devant le Tribunal de première instance, affaire T‑91/09 P). En l’espèce, les conclusions en annulation rejetées présentent effectivement le lien étroit requis par la jurisprudence avec les conclusions en indemnité ; il s’ensuit que ces dernières, à les supposer rattachées à la décision litigieuse, doivent également être rejetées.

49      En outre, à supposer que le requérant fonde cette demande indemnitaire sur le comportement prétendument fautif de l’institution, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les articles 90 et 91 du statut subordonnent la recevabilité d’un recours, y compris d’un recours indemnitaire, à la condition du déroulement régulier de la procédure administrative préalable prévue par ces articles (arrêt de la Cour du 27 juin 1989, Giordani/Commission, 200/87, Rec. p. 1877, point 22 ; arrêt du Tribunal du 21 février 2008, Skoulidi/Commission, F‑4/07, RecFP p. I‑A‑1‑0000 et II‑A‑1‑0000, point 54). Conformément à la jurisprudence, la procédure précontentieuse diffère selon que le dommage dont la réparation est demandée résulte d’un acte décisionnel faisant grief, au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut, ou d’un comportement de l’administration dépourvu de caractère décisionnel ; dans le second cas, la procédure administrative doit débuter par l’introduction d’une demande au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut visant à obtenir un dédommagement, et se poursuivre, le cas échéant, par une réclamation dirigée contre la décision de rejet de la demande (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal de première instance du 6 juillet 1995, Ojha/Commission, T‑36/93, RecFP p. I‑A‑161 et II‑497, point 117 ; du 28 juin 1996, Y/Cour de justice, T‑500/93, RecFP p. I‑A‑335 et II‑977, point 64, et du 6 novembre 1997, Liao/Conseil, T‑15/96, RecFP p. I‑A‑329 et II‑897, point 57 ; arrêts du Tribunal du 2 mai 2007, Giraudy/Commission, F‑23/05, RecFP p. I‑A‑1‑0000 et II‑A‑1‑0000, point 69, et Skoulidi/Commission, précité, point 56). Or, dans la présente affaire, et eu égard à l’hypothèse visée au point précédent, le Tribunal observe que le requérant non seulement n’a pas entamé la procédure précontentieuse par une demande au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, mais n’a même pas sollicité une indemnisation dans sa réclamation, de telles prétentions indemnitaires ayant été formulées pour la première fois dans sa requête. En conséquence, et vu la jurisprudence exposée ci-dessus, les conclusions indemnitaires, à les supposer fondées sur le comportement prétendument fautif de l’institution, doivent être déclarées irrecevables en raison de l’irrégularité de la procédure précontentieuse.

 Sur les autres conclusions

50      Au vu du raisonnement par lequel le Tribunal a été amené à rejeter les conclusions en annulation de la décision litigieuse, doivent être également rejetées les conclusions visant à ce que le Tribunal « donne acte au requérant qu’il offre de rapporter la preuve de certains faits par l’audition de certains témoins, dise ces offres de preuve précises, pertinentes et concluantes, ordonne tous devoirs d’enquête en la matière et donne acte au requérant qu’il se réserve le droit de fournir une liste complémentaire de témoins ».

51      Il s’ensuit que le recours doit être rejeté dans son intégralité.

 Sur les dépens

52      Aux termes de l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre relatif aux dépens, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

53      Il résulte des motifs énoncés dans le présent arrêt que le requérant est la partie qui succombe.

54      La partie défenderesse a, dans ses conclusions, demandé qu’il soit statué sur les dépens comme de droit. Cette conclusion ne saurait être considérée comme une demande tendant à la condamnation aux dépens de la partie requérante (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 9 juin 1992, Lestelle/Commission, C‑30/91 P, Rec. p. I‑3755, point 38, et du 29 avril 2004, Parlement/Ripa di Meana e.a., C‑470/00 P, Rec. p. I‑4167, point 86 ; ordonnance du Tribunal du 10 juillet 2008, Maniscalco/Commission, F‑141/07, RecFP p. I‑A‑1‑0000 et II‑A‑1‑0000, point 33 ; arrêt du Tribunal du 9 décembre 2008, Efstathopoulos/Parlement, F‑144/07, RecFP p. I‑A‑1‑0000 et II‑A‑1‑0000, point 48). Il y a donc lieu de faire supporter à chacune des parties ses propres dépens.

55      En application de l’article 89, paragraphe 4, du règlement de procédure, la Commission, partie intervenante, supporte ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      M. Nardin, partie requérante, et le Parlement européen, partie défenderesse, supportent leurs propres dépens.

3)      La Commission des Communautés européennes, partie intervenante, supporte ses propres dépens.

Gervasoni

Kreppel

Tagaras

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 juin 2009.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

       S. Gervasoni


* Langue de procédure : le français.

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