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Document 62008CO0517
Order of the Court (Second Chamber) of 15 April 2010. # Makhteshim-Agan Holding BV and Others v European Commission. # Appeal - Directive 91/414/EEC - Non-inclusion of endosulfan in Annex I to that directive - Withdrawal of marketing authorisations - Appeal manifestly unfounded. # Case C-517/08 P.
Ordonnance de la Cour (deuxième chambre) du 15 avril 2010.
Makhteshim-Agan Holding BV et autres contre Commission européenne.
Pourvoi - Directive 91/414/CEE - Non-inscription de l’endosulfan à l’annexe I de ladite directive - Retrait des autorisations de mise sur le marché - Pourvoi manifestement non fondé.
Affaire C-517/08 P.
Ordonnance de la Cour (deuxième chambre) du 15 avril 2010.
Makhteshim-Agan Holding BV et autres contre Commission européenne.
Pourvoi - Directive 91/414/CEE - Non-inscription de l’endosulfan à l’annexe I de ladite directive - Retrait des autorisations de mise sur le marché - Pourvoi manifestement non fondé.
Affaire C-517/08 P.
Recueil de jurisprudence 2010 I-00045*
ECLI identifier: ECLI:EU:C:2010:190
ORDONNANCE DE LA COUR (deuxième chambre)
15 avril 2010 (*)
«Pourvoi – Directive 91/414/CEE – Non-inscription de l’endosulfan à l’annexe I de ladite directive – Retrait des autorisations de mise sur le marché – Pourvoi manifestement non fondé»
Dans l’affaire C‑517/08 P,
ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice, introduit le 19 novembre 2008,
Makhteshim-Agan Holding BV, établie à Amsterdam (Pays-Bas),
Alfa Agricultural Supplies SA, établie à Athènes (Grèce),
Aragonesas Agro SA, établie à Madrid (Espagne),
représentées par Mes C. Mereu et K. Van Maldegem, avocats,
parties requérantes,
les autres parties à la procédure étant:
Commission européenne, représentée par MM. L. Parpala et N. B. Rasmussen, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,
partie défenderesse en première instance,
Bayer CropScience AG, établie à Monheim am Rhein (Allemagne),
partie demanderesse en première instance,
European Crop Protection Association (ECPA), établie à Bruxelles (Belgique), représentée par Me D. Waelbroeck, avocat,
Royaume d’Espagne,
parties intervenantes en première instance,
LA COUR (deuxième chambre),
composée de M. J. N. Cunha Rodrigues, président de chambre, Mme P. Lindh (rapporteur), MM. A Rosas, U. Lõhmus et A. Arabadjiev, juges,
avocat général: Mme V. Trstenjak,
greffier: M. R. Grass,
l’avocat général entendu,
rend la présente
Ordonnance
1 Par leur pourvoi, Makhteshim-Agan Holding BV, Alfa Agricultural Supplies SA et Aragonesas Agro SA (ci-après les «requérantes au pourvoi») demandent l’annulation de l’arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 9 septembre 2008, Bayer CropScience e.a./Commission (T‑75/06, Rec. p. II‑2081, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a rejeté leur recours tendant à l’annulation de la décision 2005/864/CE de la Commission, du 2 décembre 2005, concernant la non-inscription de l’endosulfan à l’annexe I de la directive 91/414/CEE du Conseil et le retrait des autorisations accordées aux produits phytopharmaceutiques contenant cette substance active (JO L 317, p. 25, ci-après la «décision litigieuse»).
Le cadre juridique
La directive 91/414/CEE
2 La directive 91/414/CEE du Conseil, du 15 juillet 1991, concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques (JO L 230, p. 1, et rectificatif JO 1992, L 170, p. 40), telle que modifiée par le règlement (CE) n° 806/2003 du Conseil, du 14 avril 2003 (JO L 122, p. 1, ci-après la «directive 91/414»), établit le régime communautaire applicable à l’autorisation et au retrait de l’autorisation de mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques. Cette directive exige des États membres qu’ils n’autorisent ces produits que si la substance active qu’ils contiennent est inscrite à son annexe I.
3 L’article 2 de la directive 91/414, intitulé «Définitions», énonce:
«Aux fins de la présente directive, on entend par:
[...]
2. ‘Résidus de produits phytopharmaceutiques’
Une ou plusieurs substances présentes dans ou sur des végétaux ou produits d’origine végétale, des produits comestibles d’origine animale, ou ailleurs dans l’environnement, et constituant le reliquat de l’emploi d’un produit phytopharmaceutique, y compris leurs métabolites et produits issus de la dégradation ou de la réaction.
[...]»
4 L’article 5, paragraphe 1, de cette directive est libellé ainsi:
«Compte tenu de l’état des connaissances scientifiques et techniques, une substance active est inscrite à l’annexe I pour une période initiale ne pouvant excéder dix ans, s’il est permis d’escompter que les produits phytopharmaceutiques contenant cette substance active rempliront les conditions suivantes:
a) leurs résidus consécutifs à une application conforme aux bonnes pratiques phytosanitaires n’ont pas d’effets nocifs sur la santé humaine ou animale ou sur les eaux souterraines ou d’influence inacceptable sur l’environnement et, dans la mesure où ils sont significatifs du point de vue toxicologique ou environnemental, peuvent être mesurés par des méthodes d’usage courant;
b) leur utilisation consécutive à une application conforme aux bonnes pratiques phytosanitaires n’a pas d’effet nocif sur la santé humaine ou animale ou d’influence inacceptable sur l’environnement, conformément à l’article 4 paragraphe 1 [sous] b) iv) et v).»
5 L’article 8, paragraphe 2, de la directive 91/414 prévoit également que, après l’adoption de cette dernière, la Commission des Communautés européennes engage un programme de travail pour l’examen graduel des substances actives qui ne figurent pas à l’annexe I de cette directive pendant une période de douze ans. Ce programme peut imposer aux parties intéressées de fournir à la Commission et aux États membres toutes les données nécessaires dans un certain délai.
6 L’article 19 de la directive 91/414 précise que la Commission est assistée par le comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale (ci-après le «comité»).
7 L’article 1er du règlement (CE) n° 2076/2002 de la Commission, du 20 novembre 2002, prolongeant la période visée à l’article 8, paragraphe 2, de la directive 91/414 et concernant la non-inclusion de certaines substances actives à l’annexe I de cette directive, ainsi que le retrait des autorisations relatives à des produits phytopharmaceutiques contenant ces substances (JO L 319, p. 3), tel que modifié par le règlement (CE) n° 1335/2005 de la Commission, du 12 août 2005 (JO L 211, p. 6), a prorogé la période de douze ans susvisée jusqu’au 31 décembre 2006, pour les substances actives qui étaient évaluées dans le cadre du règlement (CEE) n° 3600/92 de la Commission, du 11 décembre 1991, établissant les modalités de mise en œuvre de la première phase du programme de travail visé à l’article 8, paragraphe 2, de la directive 91/414 (JO L 366, p. 10), tel que modifié par le règlement (CE) n° 2266/2000 de la Commission, du 12 octobre 2000 (JO L 259, p. 27, ci-après le «règlement n° 3600/92»).
8 Enfin, l’article 6 de la directive 91/414 prévoit une possibilité d’inscription d’une substance active à l’annexe I de cette directive.
Le règlement n° 3600/92
9 Le règlement n° 3600/92 organise la procédure d’évaluation de plusieurs substances en vue de leur inscription éventuelle à l’annexe I de la directive 91/414. Parmi les substances énumérées à l’annexe I du règlement n° 3600/92 figure l’endosulfan.
10 Ce règlement prévoit, notamment, que pour chaque substance, un État membre sera désigné comme rapporteur par voie de règlement.
11 Le règlement (CE) n° 933/94 de la Commission, du 27 avril 1994, établissant la liste de substances actives des produits phytopharmaceutiques et désignant les États membres rapporteurs pour l’application du règlement n° 3600/92 (JO L 107, p. 8), tel que modifié par le règlement (CE) n° 2230/95 de la Commission, du 21 septembre 1995 (JO L 225, p. 1, ci-après le «règlement n° 933/94»), a établi la liste des substances actives à évaluer dans le cadre du règlement n° 3600/92, a désigné un État membre rapporteur pour chacune de ces substances et a fixé la date limite pour la soumission, audit État membre, des dossiers visés à l’article 6 de ce dernier règlement.
12 En ce qui concerne l’endosulfan, cette date a été fixée au 31 octobre 1995 à l’article 2, paragraphe 2, du règlement n° 933/94. Il ressort, en outre, de l’annexe I de ce règlement que le Royaume d’Espagne a été désigné comme rapporteur pour cette substance.
13 L’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 3600/92 précise que, après avoir reçu le dossier sommaire établi par les producteurs de la substance active dont l’inscription à l’annexe I de la directive 91/414 est demandée ainsi que le rapport d’évaluation établi par l’État membre rapporteur, la Commission confie au comité la mission d’examiner lesdits dossier et rapport.
14 L’article 7, paragraphe 3 bis, sous d), de ce règlement prévoit que, à l’issue de l’examen par le comité, la Commission peut saisir ce dernier d’un projet de décision visant à reporter l’inscription de la substance active à l’annexe I de la directive 91/414 jusqu’à la communication des résultats d’essais supplémentaires ou d’informations supplémentaires.
15 Il ressort de l’article 8, paragraphe 3, du même règlement que, au vu des résultats des essais supplémentaires ou des informations supplémentaires, la Commission peut saisir le comité d’un projet de décision concernant l’inscription ou la non-inscription de la substance active à l’annexe I de la même directive.
Les faits à l’origine du litige et la décision litigieuse
16 AgrEvo GmbH (devenue Bayer CropScience AG), Makhteshim-Agan Holding BV, Alfa Georgika Efodia AEVE et Aragonesas Agro SA sont des sociétés ayant, notamment, pour activité la production et la commercialisation d’endosulfan et de produits phytopharmaceutiques à base de cette substance, laquelle est utilisée pour la fabrication de pesticides. Ces sociétés ont désiré obtenir l’inscription de l’endosulfan à l’annexe I de la directive 91/414 dans le cadre de la procédure prévue à l’article 8, paragraphe 2, de cette directive. Elles ont notifié leur demande à cette fin au cours du mois de juillet 1993.
17 Avant la date limite du 31 octobre 1995 fixée à l’article 2, paragraphe 2, du règlement n° 933/94, seules AgrEvo GmbH et Makhteshim-Agan International Coordination Center avaient déposé des dossiers concernant l’endosulfan conformément à l’article 6 du règlement n° 3600/92. Ces deux sociétés ont regroupé leurs efforts au sein d’un groupe de travail dénommé «groupe de travail endosulfan» (ci-après le «groupe de travail»).
18 Au cours du mois de février 2000, l’État membre rapporteur a adressé à la Commission un projet de rapport d’évaluation aux termes duquel il concluait que la décision relative à l’inscription de l’endosulfan à l’annexe I de la directive 91/414 devait être reportée dans l’attente de la réception et de l’examen d’informations supplémentaires. Ce projet de rapport a été communiqué au groupe de travail et aux États membres.
19 Estimant que certaines informations supplémentaires étaient nécessaires pour l’examen de l’endosulfan et en application de l’article 7, paragraphe 3 bis, sous d), du règlement n° 3600/92, la Commission a, le 21 novembre 2001, adopté la décision 2001/810/CE, concernant la décision relative à l’inscription éventuelle de certaines substances actives à l’annexe I de la directive 91/414 (JO L 305, p. 32). Aux termes de cette décision, la date limite pour la présentation de nouvelles données concernant l’endosulfan était reportée au 25 mai 2002 et celle pour la soumission d’études déterminées à long terme, au 31 mai 2003.
20 Au cours du mois de mai 2002, le groupe de travail a fourni de nouvelles données. Au mois de juillet de la même année, il a engagé avec l’État membre rapporteur des discussions concernant la possibilité de notifier des études portant sur une formulation différente de l’endosulfan. Le produit était initialement présenté sous forme de poudre mouillable (WP) ou de concentré émulsionnable (EC). Le nouveau produit se présentait sous forme de suspensions de capsules (CS). Le 17 juillet 2002, lors d’une réunion de travail, les représentants de cet État membre ont déclaré qu’ils ne pouvaient accepter ce nouveau dossier. La Commission n’a pas non plus donné son accord.
21 Au cours du mois de mai 2003, le groupe de travail a déposé les études déterminées à long terme en y ajoutant de nouvelles données, à savoir un nouveau dossier relatif à la «formulation CS» (ci-après le «dossier CS»).
22 Le 17 mai 2004, s’est tenue une réunion tripartite à laquelle ont participé la Commission, l’État membre rapporteur et le groupe de travail (ci-après la «réunion tripartite»). Lors de cette réunion, la Commission a indiqué qu’elle envisageait de proposer au comité de ne pas inscrire l’endosulfan à l’annexe I de la directive 91/414. Elle a invité le groupe de travail à faire part de ses commentaires avant le 21 juin 2004 tout en précisant qu’aucune étude nouvelle ne pourrait être acceptée, l’échéance du 31 mai 2003 étant dépassée.
23 Par courrier du 25 juin 2004 adressé à la Commission, les représentants du groupe de travail ont contesté la façon dont l’évaluation de l’endosulfan avait été menée. Ils ont sollicité également l’autorisation de produire certaines explications techniques et ont présenté des arguments supplémentaires et de nouvelles études.
24 Par courrier du 12 juillet 2004, la Commission a demandé à l’État membre rapporteur de ne pas prendre en compte les nouvelles études produites par le groupe de travail. Une copie de ce courrier a été transmise audit groupe.
25 Le 2 décembre 2005, la Commission a adopté la décision litigieuse, laquelle a été notifiée sous le numéro C(2005) 4611. La Commission a relevé, notamment au huitième considérant de celle-ci, les éléments suivants:
«Plusieurs sujets de préoccupation ont été identifiés lors de l’évaluation de [l’endosulfan], notamment en ce qui concerne son devenir et son comportement dans l’environnement étant donné que les voies de dégradation de la substance active ne sont pas claires et que des métabolites inconnus ont été découverts lors des études de la dégradation dans le sol, de la dégradation dans l’eau/les sédiments et du mésocosme. [...] En outre, l’étude de l’exposition des opérateurs à l’intérieur à l’aide des informations existantes n’a pas été jugée suffisante. Par ailleurs, l’endosulfan est volatil, son principal métabolite est persistant et il a été découvert dans les résultats de surveillance dans des régions où la substance n’était pas utilisée. En conséquence, ces questions n’étant pas résolues, il ressort des évaluations effectuées que les informations fournies ne sont pas suffisantes pour démontrer que, dans les conditions d’utilisation envisagées, les produits phytopharmaceutiques contenant de l’endosulfan satisfont d’une manière générale aux exigences fixées à l’article 5, paragraphe 1, [sous] a) et b), de la directive 91/414[...]»
Le recours devant le Tribunal et l’arrêt attaqué
26 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 27 février 2006, Bayer CropScience AG, Makhteshim-Agan Holding BV, Alfa Georgika Efodia AEVE et Aragonesas Agro SA (ci-après les «requérantes») ont introduit un recours visant à l’annulation de la décision litigieuse. European Crop Protection Association (ECPA) est intervenue au soutien de leurs prétentions. Le Royaume d’Espagne est intervenu au soutien des conclusions de la Commission.
27 Les requérantes ont présenté trois moyens d’annulation. Le premier moyen était tiré de vices de procédure, du caractère inéquitable de la procédure d’évaluation et de la violation du principe de protection de la confiance légitime. Le deuxième moyen était tiré, d’une part, de la violation de l’article 95, paragraphe 3, CE et, d’autre part, de la violation de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414. Le troisième moyen était tiré de la violation de certains principes généraux du droit de l’Union dont le principe d’égalité de traitement (huitième branche).
28 Sans soulever formellement d’exception d’irrecevabilité, la Commission, soutenue par le Royaume d’Espagne, a émis des doutes quant à l’intérêt à agir des requérantes et a contesté la qualité pour agir de certaines d’entre elles.
29 S’agissant de la qualité pour agir, la Commission a soutenu que si Bayer CropScience AG était individuellement concernée par la décision litigieuse en raison du fait qu’elle avait participé à la procédure administrative, tel n’était pas le cas des trois autres requérantes qui ne pouvaient donc être considérées comme individuellement concernées par ladite décision.
30 Sur ce point, le Tribunal a répondu que, dans la mesure où Bayer CropScience AG avait qualité pour agir, il n’y avait pas lieu d’examiner la qualité pour agir des autres requérantes.
31 Sur le fond, le Tribunal a rejeté le recours.
32 Il a d’abord répondu au premier moyen et à la seconde branche du deuxième moyen, tirée de la violation de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414. Il a ensuite répondu au deuxième moyen pris en sa première branche et, enfin, au troisième moyen.
33 Dans le cadre de sa réponse au premier moyen et à la seconde branche du deuxième moyen, le Tribunal a d’abord examiné la question de savoir si la Commission était en droit, le 12 juillet 2004, de refuser d’examiner certaines données ou études dont elle estimait qu’elles avaient été produites hors délai. Au point 74 de l’arrêt attaqué, il a considéré que cette question de l’applicabilité des délais procéduraux devait être examinée en premier lieu, car elle concernait le cadre général d’appréciation du cas d’espèce.
34 Afin de répondre à cette question, le Tribunal a, au point 80 de l’arrêt attaqué, examiné les circonstances dans lesquelles il aurait pu exister une obligation pour la Commission d’accorder une prolongation des délais pour présenter des études ou des données. Au point 88 de cet arrêt, il a rappelé que, dans l’arrêt du 18 juillet 2007, Industrias Químicas del Vallés/Commission (C‑326/05 P, Rec. p. I‑6557), la Cour a considéré que la Commission avait commis une erreur manifeste d’appréciation en refusant d’accorder à une société une prorogation du délai imparti pour la présentation d’un dossier initial complet, car l’impossibilité pour cette société de respecter les délais était due, au moins en partie, au comportement contradictoire des autorités compétentes.
35 Le Tribunal a, au point 89 de l’arrêt attaqué, déduit de cette jurisprudence que la prolongation des délais est possible si la partie concernée s’est trouvée dans une situation de force majeure qui l’a empêchée de respecter les délais procéduraux, cette circonstance pouvant exister si l’impossibilité de respecter ces délais était due, au moins en partie, au comportement contradictoire des autorités compétentes.
36 Le Tribunal a donc entrepris de rechercher si les requérantes avaient été placées, en raison du comportement contradictoire des évaluateurs, dans une situation de force majeure qui les avait empêchées de respecter les délais légaux. Pour ce faire, il a procédé à l’examen de sept problématiques pour lesquelles il a recherché si les autorités avaient eu un comportement contradictoire qui avait privé les requérantes de la possibilité de fournir des informations avant l’expiration des délais légaux.
37 Au point 206 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré que cet examen n’avait pas permis d’identifier l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation de la part de la Commission, non plus que celle d’une violation des droits de la défense ou du principe de confiance légitime. Il a conclu que les requérantes ne s’étaient pas trouvées dans une situation de force majeure les ayant empêchées de respecter les délais procéduraux. En conséquence, il a rejeté le premier moyen et la seconde branche du deuxième moyen.
38 Le Tribunal, après avoir considéré que les arguments tirés de la violation de l’article 95 CE se confondaient avec ceux développés dans le cadre du premier moyen et de la seconde branche du deuxième moyen, a rejeté le deuxième moyen pris en sa première branche. De même, le Tribunal a considéré qu’il n’avait été porté atteinte ni au principe de proportionnalité, ni à celui de protection de la confiance légitime et de sécurité juridique, ni à l’interdiction d’agir ultra vires, ni à l’obligation de procéder à une évaluation diligente et impartiale, ni à l’interdiction de détournement de pouvoirs, ni aux droits de la défense, ni au principe de l’excellence et de l’indépendance des avis scientifiques, ni au principe de l’égalité de traitement, ni au principe de la primauté de la règle générale sur la règle spéciale, ni au principe de l’estoppel, et a rejeté le troisième moyen.
Les conclusions des parties
39 Les requérantes au pourvoi demandent à la Cour:
– d’annuler l’arrêt attaqué;
– d’annuler la décision litigieuse ou,
– subsidiairement, de renvoyer l’affaire devant le Tribunal, et
– de condamner la Commission aux dépens, y compris ceux de première instance.
40 La Commission demande à la Cour de rejeter le pourvoi et de condamner les requérantes au pourvoi aux dépens.
41 European Crop Protection Association (ECPA) est intervenue sans indiquer qu’elle soutenait le pourvoi.
Sur le pourvoi
42 En vertu de l’article 119 de son règlement de procédure, lorsqu’un pourvoi est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, la Cour peut, à tout moment, rejeter totalement ou partiellement ce pourvoi par voie d’ordonnance motivée, et cela sans ouvrir la procédure orale.
Sur la qualité pour agir des requérantes au pourvoi
43 La Commission conteste la qualité pour agir des requérantes au pourvoi. Elle soutient que celles-ci n’ont pas participé au groupe de travail et qu’elles ne sont pas plus concernées par la décision litigieuse que ne le sont les autres producteurs d’endosulfan. La Commission fait également remarquer que la troisième société requérante devant le Tribunal était Alfa Georgika Efodia AEVE alors que la seconde requérante au pourvoi est Alfa Agricultural Supplies SA.
44 La Commission considère que, dans la mesure où, d’une part, le Tribunal ne s’est pas prononcé sur la question de la recevabilité de l’action des trois requérantes au pourvoi et, d’autre part, que Bayer CropScience AG n’a pas formé de pourvoi, tout examen de la requête en vue de l’annulation de l’arrêt attaqué doit être précédé de l’examen de ses moyens relatifs à la qualité pour agir des requérantes au pourvoi. À ce titre, elle rappelle que, conformément à une jurisprudence constante, l’irrecevabilité constitue un moyen d’ordre public qui peut, et même doit, être soulevé d’office par le juge communautaire.
45 La Commission soutient que les requérantes au pourvoi n’ont jamais eu qualité pour agir en première instance et qu’elles ne peuvent donc contester la décision litigieuse par des moyens détournés.
46 En ce qui concerne l’identité supposée entre Makhteshim-Agan Holding BV et Makhteshim-Agan International Coordination Center, la Commission remarque que ce n’est que dans le cadre du pourvoi qu’une déclaration du conseil juridique du groupe Makhteshim a été produite.
47 Les requérantes au pourvoi soutiennent que, en matière de pourvoi et s’agissant de la recevabilité, la Cour n’est compétente que pour examiner la question de savoir si le pourvoi a été formé dans les délais et s’il est limité aux questions de droit. Or, l’examen de la qualité pour agir des requérantes au pourvoi obligerait la Cour à procéder à une appréciation des faits pour laquelle elle n’est pas compétente. Elles estiment qu’ayant eu la qualité de parties au litige devant le Tribunal, elles sont habilitées à former un pourvoi.
48 Dans l’hypothèse où la Cour s’estimerait compétente pour se prononcer sur la qualité pour agir des requérantes au pourvoi, ces dernières renvoient à leurs écritures devant le Tribunal. Elles précisent que Makhteshim-Agan Holding BV et Makhteshim-Agan International Coordination Center n’ont pas de personnalité juridique distincte, la seconde étant simplement une agence de la première.
49 Enfin, elles font valoir que c’est Alfa Agricultural Supplies SA qui était l’une des requérantes et qui est l’une des requérantes au pourvoi.
50 Il est constant que le Tribunal a rejeté comme non fondé le recours formé par Makhteshim-Agan Holding BV, Alfa Georgika Efodia AEVE et Aragonesas Agro SA, sans avoir statué sur la qualité de ces parties pour demander l’annulation de la décision litigieuse.
51 Lesdites parties ont ainsi succombé en leurs conclusions devant le Tribunal au sens de l’article 56, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice.
52 Il ne fait aucun doute que Makhteshim-Agan Holding BV et Aragonesas Agro SA sont les mêmes parties que celles qui ont été déboutées de leur recours devant le Tribunal. S’agissant d’Alfa Agricultural Supplies SA, deuxième requérante au pourvoi, il ressort de la requête en annulation déposée devant le Tribunal ainsi que des mémoires présentés devant cette juridiction que cette société était la troisième requérante devant le Tribunal.
53 Dès lors, il résulte de l’article 56, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice que Makhteshim-Agan Holding BV, Alfa Agricultural Supplies SA et Aragonesas Agro SA peuvent former devant la Cour un pourvoi contre l’arrêt attaqué.
54 S’agissant de la recevabilité du recours en annulation formé devant le Tribunal, la Cour, saisie d’un pourvoi au titre de l’article 56 de son statut, peut se prononcer, au besoin d’office, sur le moyen d’ordre public tiré de la méconnaissance des conditions de recevabilité posées à l’article 230 CE (voir arrêts du 29 avril 2004, Italie/Commission, C‑298/00 P, Rec. p. I‑4087, point 35, ainsi que du 23 avril 2009, Sahlstedt e.a./Commission, C‑362/06 P, non encore publié au Recueil, point 22).
55 Il ressort du cinquième considérant de la décision litigieuse que Makhteshim-Agan Holding BV était l’auteur d’une notification visant à obtenir l’inscription de l’endosulfan à l’annexe I de la directive 91/414. Elle est donc recevable à demander l’annulation de cette décision.
Sur le fond
56 Les requérantes au pourvoi rappellent qu’il ressort du huitième considérant de la décision litigieuse que l’inscription de l’endosulfan à l’annexe I de la directive 91/414 a été refusée au motif que la Commission a identifié plusieurs sujets de préoccupation. Parmi ces sujets, cette décision mentionne la découverte d’un métabolite inconnu (ci-après le «métabolite de métabolite») lors des études de la dégradation de la substance dans le sol et dans l’eau, l’insuffisance de l’étude de l’exposition des opérateurs à l’intérieur et la découverte de la présence du métabolite de l’endosulfan dans des régions où cette substance n’avait pas été utilisée.
57 Ces requérantes considèrent que c’est à juste titre que le Tribunal a estimé que la question essentielle à résoudre était celle de savoir si les requérantes s’étaient trouvées dans une situation de force majeure qui les avait empêchées de respecter les délais procéduraux et si cet empêchement était dû au comportement contradictoire des autorités compétentes.
58 Les requérantes au pourvoi affirment toutefois que le Tribunal aurait commis plusieurs erreurs dans l’interprétation du cadre juridique pertinent qui était applicable à leur situation et aurait conclu, à tort, que les autorités compétentes ne les avaient pas placées dans une situation de force majeure qui les avait empêchées de respecter les délais procéduraux. Ces erreurs auraient été commises en particulier en ce qui concerne la question du métabolite de métabolite, celle de l’exposition de l’opérateur et celle de la classification de l’endosulfan en qualité de polluant organique persistant (ci-après «POP») et de substance persistante bioaccumulable et toxique (ci-après «PBT»). De plus, le Tribunal aurait commis une erreur de droit en jugeant que les droits procéduraux dont les requérantes bénéficiaient, notamment le principe de l’égalité de traitement, n’avaient pas été violés.
Sur le premier moyen, relatif à la question du métabolite de métabolite
59 Les requérantes au pourvoi reprochent au Tribunal d’avoir décidé qu’elles n’avaient pas été empêchées de résoudre la problématique du métabolite de métabolite dans les délais légaux en raison du comportement des autorités compétentes. Elles invoquent quatre griefs, à savoir qu’elles n’ont pas été informées en temps utile de cette problématique, que les lignes directrices ont été appliquées rétroactivement sans qu’elles aient eu le droit d’être entendues, que le seuil de 10 % a été appliqué à tort et qu’elles avaient identifié une utilisation sûre pour l’endosulfan.
– Sur le premier grief
60 Les requérantes au pourvoi reprochent au Tribunal d’avoir dénaturé les éléments de preuve qui lui étaient soumis en considérant qu’elles avaient été informées du problème posé par l’existence du métabolite de métabolite à un stade précoce de la procédure. Or, le Tribunal aurait confondu la question des métabolites, qui concerne le métabolite de l’endosulfan ou sulfate d’endosulfan, et celle des métabolites de métabolites, c’est à dire le métabolite du sulfate d’endosulfan, et aurait confondu les aspects relatifs aux taux de dégradation des métabolites et ceux relatifs aux voies de dégradation. Selon les requérantes au pourvoi, si le métabolite de métabolite a bien été identifié au cours du mois de mai 2002, d’une part, ce n’est qu’au mois de janvier 2004 que les évaluateurs ont manifesté pour la première fois leur préoccupation concernant ce métabolite de métabolite et, d’autre part, avant cette date, les requérantes ignoraient que cette question était importante.
61 La Commission fait valoir que les requérantes au pourvoi ne démontrent pas en quoi le Tribunal aurait commis une erreur d’interprétation, d’une part, entre la question du métabolite et celle du métabolite de métabolite et, d’autre part, entre les taux et les voies de dégradation. Selon elle, le Tribunal a eu raison de considérer que les requérantes étaient informées de la nécessité d’examiner les voies de dégradation de l’endosulfan depuis le début de l’année 2000 au plus tard. Par ailleurs, ces questions auraient été largement débattues devant le Tribunal.
62 Il convient de rappeler qu’il ressort des articles 225 CE et 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice que le pourvoi est limité aux questions de droit. Le Tribunal est, dès lors, seul compétent pour constater et apprécier les faits pertinents ainsi que les éléments de preuve. La constatation de ces faits et l’appréciation de ces éléments ne constituent donc pas, sous réserve de leur dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi (voir arrêts du 1er juin 1994, Commission/Brazzelli Lualdi e.a., C‑136/92 P, Rec. p. I‑1981, points 48 et 49, ainsi que du 18 juillet 2006, Rossi/OHMI, C‑214/05 P, Rec. p. I‑7057, point 26 et jurisprudence citée).
63 C’est sans dénaturer les éléments de preuve qui lui étaient soumis que, aux points 113 et suivants de l’arrêt attaqué, le Tribunal a relevé qu’il ressortait du dossier que différents commentaires et demandes de données formulées avant l’année 2004 faisaient référence à la préoccupation des évaluateurs de comprendre le chemin de dégradation de l’endosulfan et de ses métabolites ainsi que la vitesse de dégradation. Le Tribunal s’est fondé notamment sur le projet de rapport d’évaluation du mois de décembre 1999 et sur le procès-verbal d’une réunion du 25 août 2001 qui faisait état de la question de la pertinence du point de vue de la toxicité d’autres métabolites que le métabolite de l’endosulfan.
64 Il apparaît que, en soutenant que le Tribunal aurait confondu, d’une part, la question des métabolites et celle des métabolites de métabolites et, d’autre part, les aspects relatifs aux taux de dégradation des métabolites et ceux relatifs aux voies de dégradation, les requérantes au pourvoi se bornent en réalité à contester l’appréciation des faits à laquelle s’est livré le Tribunal pour considérer que les requérantes avaient été informées à un stade précoce de la procédure de la question des métabolites de métabolite de l’endosulfan et de la nécessité de clarifier les voies de décomposition de cette substance et qu’elles avaient eu l’opportunité de présenter des solutions dans les délais. Il en résulte que le présent grief est irrecevable.
– Sur le deuxième grief
65 Les requérantes au pourvoi reprochent au Tribunal de s’être contredit. En effet, il aurait considéré que les projets de lignes directrices sur la pertinence des métabolites en eau de surface préparés par la Commission n’avaient pu entraîner une autolimitation du pouvoir d’appréciation de celle-ci et que la légalité de la décision devait s’apprécier non pas au regard de ces projets, mais au regard des dispositions de la directive 91/414. Par ailleurs, il aurait affirmé, en se contredisant, que les requérantes auraient pu présenter, dès le mois de novembre 2001, des études concernant des critères figurant dans ces projets de lignes directrices. En tout état de cause, les requérantes se seraient trouvées dans une situation incertaine concernant la question des métabolites de métabolites.
66 La Commission estime que c’est à bon droit que le Tribunal a considéré que les projets de lignes directrices ne pouvaient entraîner une autolimitation de son pouvoir d’appréciation. L’invocation d’une contradiction constituerait une dénaturation des constatations effectuées par le Tribunal.
67 Il ressort du point 119 de l’arrêt attaqué que le Tribunal a affirmé que les projets de lignes directrices ne sauraient entraîner une autolimitation du pouvoir de la Commission et que la légalité de la décision litigieuse devait s’apprécier non pas au regard desdites lignes directrices, mais au regard des dispositions de la directive 91/414. Aux points 121 et 122 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a ajouté, sans se contredire, que les deux problématiques pour lesquelles les requérantes se plaignaient de ce que les projets de lignes directrices leur avaient été opposés tardivement figuraient déjà à l’annexe II de cette directive. Il en résulte que ce grief est manifestement non fondé.
– Sur le troisième grief
68 Les requérantes au pourvoi reprochent au Tribunal d’avoir mal interprété les dispositions légales en considérant que la directive 91/414 autorisait les évaluateurs à examiner le comportement des produits dérivés des métabolites d’une substance active alors, selon elles, que ladite directive ne permet de fixer un seuil de 10 % que pour les métabolites de la substance et non pour les métabolites de métabolites.
69 La Commission fait valoir que les requérantes au pourvoi ne fondent leurs allégations sur aucune analyse juridique des dispositions pertinentes et procèdent par affirmation. En outre, le Tribunal a affirmé à juste titre que c’est la directive 91/414 même qui autorise les évaluateurs à examiner le comportement des produits dérivés des métabolites.
70 Au point 127 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a relevé, d’une part, que l’article 5, paragraphe 1, sous a), de la directive 91/414 prévoit qu’une substance est inscrite à l’annexe I de cette directive à condition que les résidus des produits phytopharmaceutiques contenant cette substance consécutifs à une application conformes aux bonnes pratiques phytosanitaires «n’ont pas d’effet nocifs sur la santé humaine ou animale ou sur les eaux souterraines ou d’influence inacceptable sur l’environnement et, dans la mesure où ils sont significatifs du point de vue toxicologique ou environnemental, peuvent être mesurés par des méthodes d’usage courant». D’autre part, l’article 2, paragraphe 2, de ladite directive définit les termes «résidus de produits phytopharmaceutiques» comme «une ou plusieurs substances présentes dans ou sur des végétaux ou produits d’origine végétale, des produits comestibles d’origine animale, ou ailleurs dans l’environnement, et constituant le reliquat de l’emploi d’un produit phytopharmaceutique, y compris leurs métabolites et produits issus de la dégradation ou de la réaction».
71 Il apparaît que, eu égard à ces définitions, le Tribunal a décidé à juste titre, d’une part, que la notion de «métabolite et de produit issus de la dégradation ou de la réaction» doit s’entendre des produits de dégradation des substances actives au sens large et comprend à la fois les métabolites et les métabolites de métabolites et, d’autre part, que les évaluateurs n’avaient, en conséquence, commis aucune erreur en voulant clarifier le chemin de dégradation du métabolite de métabolite de l’endosuflan et en lui appliquant le seuil de 10 %. Il s’ensuit que ce grief est manifestement non fondé.
– Sur le quatrième grief
72 Les requérantes au pourvoi font grief au Tribunal d’avoir rejeté leurs arguments relatifs aux solutions qu’elles avaient proposées pour répondre aux préoccupations concernant les métabolites de métabolites et qui ont été rejetées comme tardives par la Commission. Ces solutions consistaient en une nouvelle formulation (dossier CS), un taux réduit d’application [bonnes pratiques agricoles révisées (ci-après les «BPA révisées»)] et une utilisation limitée aux serres.
73 S’agissant du dossier CS, le Tribunal aurait dénaturé les éléments de preuve qui lui étaient soumis en considérant que les requérantes n’avaient apporté aucune explication permettant de comprendre les raisons pour lesquelles elles n’avaient pas présenté ce dossier avant la date d’échéance. Par ailleurs, le Tribunal aurait commis une erreur de droit en considérant que les assurances émanant de l’État membre rapporteur n’avaient pas pu faire naître une confiance légitime.
74 S’agissant des BPA révisées, les requérantes au pourvoi soutiennent qu’elles ont été présentées pour répondre à la préoccupation concernant le métabolite de métabolite. Or, les requérantes ne pouvaient pas présenter les BPA révisées avant que n’apparaisse cette problématique. Par conséquent, en décidant que les BPA révisées auraient dû être présentées plus tôt, le Tribunal aurait commis une erreur de droit en ne reconnaissant pas l’erreur manifeste d’appréciation commise par les évaluateurs qui ont refusé de prendre en compte les BPA révisées.
75 S’agissant de l’utilisation en serre, les requérantes au pourvoi reprochent au Tribunal d’avoir considéré que cette méthode avait été présentée tardivement alors qu’elle ne l’avait été que pour répondre à la problématique du métabolite de métabolite. Le Tribunal aurait également commis une erreur de droit en considérant qu’une serre n’est pas un espace clos, contrairement aux termes précis de l’annexe II de la directive 91/414. Cette considération aurait conduit le Tribunal à décider que, même si la solution que constituerait l’utilisation en serre avait été examinée, cet examen n’aurait pas abouti à une décision différente.
76 La Commission fait valoir que le Tribunal a décidé à juste titre que les nouvelles solutions avaient été présentées tardivement sans son accord et que, ayant pour objet de répondre au problème posé par l’existence du métabolite de métabolite qui avait été signalé aux requérantes dès l’année 1999, leur présentation au cours de l’année 2004 était tardive.
77 Selon une jurisprudence constante, les griefs dirigés contre des motifs surabondants d’une décision du Tribunal ne sauraient entraîner l’annulation de cette décision et sont donc inopérants (arrêt du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, Rec. p. I‑5425, point 148, ainsi que ordonnance du 23 février 2006, Piau/Commission, C‑171/05 P, point 86).
78 Les requérantes au pourvoi affirment aux points 33, 43 et 48 du pourvoi que la nouvelle formulation (dossier CS), le taux réduit d’application (les BPA révisées) et l’utilisation limitée aux serres sont des solutions que les requérantes avaient présentées dans le but de résoudre le problème posé par l’existence du métabolite de métabolite et que ces solutions ont été rejetées par la Commission au motif qu’elles avaient été présentées hors délai alors que ce problème avait été exprimé par les évaluateurs à un stade avancé de la procédure, ce qui n’avait pas permis aux requérantes de présenter lesdites solutions dans les délais.
79 Or, il résulte du point 64 de la présente ordonnance que le Tribunal, après avoir constaté et apprécié les faits, a considéré que les requérantes avaient été informées à un stade précoce de la procédure du problème posé par l’existence des métabolites de métabolite de l’endosulfan et de la nécessité de clarifier les voies de décomposition de cette substance et qu’elles avaient eu l’opportunité de présenter des solutions dans les délais.
80 Il en résulte que ces griefs sont dirigés contre des motifs surabondants de l’arrêt attaqué et, partant, même à les supposer fondés, ils ne sont pas de nature à entraîner l’annulation de cet arrêt qui se trouve justifié par d’autres motifs. En conséquence, il y a lieu d’écarter ces griefs comme inopérants (voir arrêt du 19 avril 2007, OHMI/Celltech, C‑273/05 P, Rec. p. I‑2883, points 56 et 57).
Sur le deuxième moyen, relatif à l’exposition de l’opérateur
81 Les requérantes au pourvoi soutiennent que la question de l’exposition de l’opérateur, qui avait été considérée comme réglée, est réapparue après la réunion tripartite puis a été prise en compte comme un motif déterminant de non-inscription de l’endosulfan à l’annexe I de la directive 91/414.
82 Ces requérantes reprochent, en premier lieu, au Tribunal, d’une part, d’avoir considéré que la réapparition tardive de cette problématique n’avait pas violé la confiance légitime dont les requérantes étaient en droit de se prévaloir et ne constituait pas un cas de force majeure et, d’autre part, d’avoir conclu que la Commission n’avait pas violé les droits de la défense et le droit des requérantes à être entendues en les privant de la possibilité de soumettre d’autres données. En effet, selon les requérantes au pourvoi, le Tribunal s’est mépris sur le rôle de l’État membre rapporteur.
83 Les requérantes au pourvoi reprochent, en deuxième lieu, au Tribunal d’avoir omis de répondre à la question de savoir si les requérantes auraient dû être autorisées à soumettre des études après la réunion tripartite.
84 En troisième lieu, les mêmes requérantes soutiennent que le Tribunal a commis une erreur de droit en considérant que la question de l’exposition de l’opérateur à l’extérieur n’était que secondaire par rapport à la problématique du métabolite de métabolite alors que la question de l’exposition de l’opérateur concernait l’utilisation à l’intérieur de l’endosulfan. Or, si la question de l’exposition de l’opérateur à l’intérieur avait été résolue, l’endosulfan aurait pu être inscrit à l’annexe I de la directive 91/414 pour cette utilisation.
85 Enfin, les requérantes au pourvoi font valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit en ne constatant pas que les autorités compétentes avaient commis une erreur manifeste d’appréciation en refusant de proroger les délais procéduraux et en n’acceptant pas les BPA révisées et l’utilisation en serre de l’endosulfan qui auraient réglé la question de l’exposition de l’opérateur.
86 La Commission fait valoir que l’attitude de l’État membre rapporteur n’avait pas pu faire naître une confiance légitime dont les requérantes pourraient se prévaloir. Elle rappelle, à cet égard, que l’avis de cet État membre n’était pas contraignant. Elle ajoute que la question des métabolites de métabolites était pertinente pour l’utilisation de l’endosulfan tant à l’intérieur qu’à l’extérieur, contrairement à ce qu’affirment les requérantes au pourvoi.
87 Au point 161 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a relevé, d’une part, qu’il ressortait du procès-verbal de la réunion tripartite que, même s’il y était fait état de l’identification, par l’État membre rapporteur, d’une utilisation sûre de l’endosulfan, des données supplémentaires concernant les travailleurs en serre et les passants devaient néanmoins être fournies et, d’autre part, que les requérantes avaient alors soumis de nouveaux calculs qui avaient finalement été jugés insuffisants. Le Tribunal en a justement déduit, au point 164 du même arrêt, que la position prise par l’État membre rapporteur n’avait pas pu faire naître chez les requérantes la certitude que la question de l’exposition de l’opérateur était réglée dans la mesure où la position finale sur cette question était réservée jusqu’à la réception de données supplémentaires.
88 Par ailleurs, le Tribunal a, au point 165 de l’arrêt attaqué, estimé qu’il ressortait des faits qu’il avait constatés, d’une part, que les requérantes avaient pu, à plusieurs occasions, soumettre des études et qu’elles avaient pu présenter des arguments après la réunion tripartite et, d’autre part, qu’un désaccord sur le fond concernant l’élimination du risque pour l’opérateur était apparu entre la Commission et les requérantes. Au vu de ces constatations, le Tribunal a pu en déduire que ce désaccord ne pouvait être assimilé à une violation du droit d’être entendu et que les requérantes avaient été en mesure de régler, dans les délais, la question de l’exposition de l’opérateur, y compris par les BPA révisées et par l’utilisation en serre.
89 Enfin, le troisième grief des requérantes au pourvoi, en ce qu’il concerne la question de la date d’apparition du métabolite de métabolite, est dirigé contre un motif surabondant de l’arrêt attaqué, ainsi qu’il a été dit au point 79 de la présente ordonnance. Il convient donc d’écarter ce grief comme étant inopérant.
90 Il résulte de ces considérations que le présent moyen est manifestement non fondé et doit être rejeté.
Sur le troisième moyen, relatif à la classification de l’endosulfan en tant que POP ou PBT
91 Les requérantes au pourvoi soutiennent, en premier lieu, que le Tribunal a considéré que la classification de l’endosulfan en tant que POP ou PBT n’était pas incompatible avec l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414 en omettant d’examiner les arguments des requérantes selon lesquelles cette classification était insuffisante pour empêcher l’inscription de cette substance à l’annexe I de cette directive. Le Tribunal aurait conclu à tort que la Commission pouvait valablement tenir compte des critères relatifs aux POP et aux PBT dans son évaluation au titre de ladite directive. Le Tribunal n’aurait pas examiné leurs arguments relatifs aux différences existant entre les notions de danger et de risque.
92 Les requérantes au pourvoi affirment que, même en supposant que la Commission ait pu valablement tenir compte des critères relatifs aux POP et aux PBT dans son évaluation, les requérantes avaient présenté un document traitant de ce problème, que les autorités auraient rejeté au motif qu’il avait été présenté hors délai. Le Tribunal aurait omis de répondre à ces arguments.
93 Enfin, les requérantes au pourvoi reprochent au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit en considérant que les autorités compétentes n’avaient pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en refusant d’examiner les utilisations sûres de l’endosulfan, telles que l’utilisation en serre, au motif qu’elles auraient été présentées hors délai. Or, ces utilisations sûres auraient résolu le problème lié à la classification de cette substance en tant que POP ou PBT.
94 La Commission affirme que la décision litigieuse repose sur la seule directive 91/414. En outre, les requérantes au pourvoi n’expliqueraient pas en quoi une telle classification exclurait que l’endosulfan ait des effets nocifs au sens de l’article 5, paragraphe 1, de cette directive.
95 Il apparaît que, contrairement aux énonciations du moyen, le Tribunal n’a pas conclu que la Commission pouvait valablement tenir compte des POP ou PBT dans son évaluation de l’endosulfan au titre de la directive 91/414. Au contraire, après avoir relevé au point 183 de l’arrêt attaqué que la classification de l’endosulfan en tant que POP ou PBT, laquelle relève d’une autre directive, avait été prise en compte au cours de la procédure d’évaluation et que la Commission ne pouvait affirmer qu’elle avait adopté la décision litigieuse indépendamment de cette classification, le Tribunal a constaté que, même en présence de cette prise en compte, le huitième considérant de cette décision, en ce qu’il se référait au fait que l’endosulfan était volatil et que son principal métabolite avait été découvert dans les résultats de surveillance dans les régions où la substance n’était pas utilisée, n’était pas incompatible avec les critères énoncés à l’article 5, paragraphe 1, sous a), de la directive 91/414 et a décidé à, juste titre, que la classification de l’endosulfan en tant que POP ou PBT n’excluait pas que cette substance ait des effets nocifs au sens de cette disposition.
96 Par ailleurs, en décidant, au point 186 de l’arrêt attaqué, que les arguments des requérantes concernant la différence entre le risque et le danger étaient inopérants, le Tribunal a nécessairement répondu à ces arguments.
97 Enfin, s’agissant du troisième grief, il convient de constater qu’il est identique à celui déjà exposé au point 78 de la présente ordonnance, et qu’il concerne les solutions que les requérantes avaient présentées dans le but de résoudre le problème posé par l’existence du métabolite de métabolite et qui ont été rejetées par la Commission au motif qu’elles avaient été présentées hors délai alors que, selon ces requérantes, ce problème avait été soulevé par les évaluateurs à un stade avancé de la procédure, ce qui ne leur avait pas permis de présenter ces solutions dans les délais. Il y a donc lieu de déclarer ce grief inopérant pour les motifs exposés aux points 79 et 80 de la présente ordonnance.
98 Il résulte de ces considérations que le présent moyen est en partie inopérant et en partie manifestement non fondé et doit être rejeté.
Sur le quatrième moyen, tiré de la méconnaissance du principe d’égalité de traitement
99 Les requérantes au pourvoi reprochent au Tribunal d’avoir rejeté les arguments des requérantes selon lesquels l’endosulfan aurait fait l’objet d’un traitement moins favorable que celui réservé à d’autres substances.
100 Les requérantes au pourvoi soutiennent, tout d’abord, que le Tribunal, au point 235 de l’arrêt attaqué, a considéré comme irrecevables leurs arguments en raison de leur caractère abstrait alors qu’elles avaient fourni des exemples concrets.
101 Ensuite, le Tribunal aurait commis une erreur de droit en concluant que le principe d’égalité de traitement ne s’appliquait pas dès lors que la Commission disposait d’un large pouvoir d’appréciation ou que les procédures en cause étaient complexes. Or, ce principe se serait appliqué en l’espèce, puisque les autres substances actives citées dans la requête étaient soumises au même cadre juridique et à la même procédure d’évaluation.
102 Enfin, le Tribunal aurait retenu à tort que l’inscription sous conditions du fénamirol à l’annexe I de la directive 91/414 était équivalente à la période de retrait progressif de l’endosulfan alors que ces deux mesures ne seraient pas équivalentes.
103 Sur ces points, la Commission considère que le Tribunal a décidé à juste titre que les requérantes n’avaient pas établi que les différences dans les processus d’évaluation d’autres substances n’étaient pas objectivement justifiées.
104 Il apparaît que, aux points 237 et 242 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré que, compte tenu de la spécificité de chaque procédure d’examen qui rend extrêmement difficile les comparaisons et de la marge d’appréciation de la Commission dans ce domaine, les requérantes, qui se limitaient à énumérer d’autres substances pour lesquelles une autre solution avait été donnée, sans expliquer en quoi elles auraient dû être traitées de la même façon que l’endosulfan, n’avaient pas établi que les différences de traitement dans le déroulement des procédures d’évaluation soumises à comparaison n’étaient pas objectivement justifiées. Par ailleurs, au point 240 de l’arrêt attaqué, le Tribunal s’est borné à décrire le sort finalement réservé, respectivement, au fénarimol et à l’endosulfan.
105 Par conséquent, contrairement aux énonciations du moyen invoqué, le Tribunal n’a ni conclu que le principe d’égalité de traitement ne s’appliquait pas dès lors que la Commission dispose d’un large pouvoir d’appréciation ni affirmé que l’inscription sous conditions d’une substance à l’annexe I de la directive 91/414 était équivalente à une période de retrait progressif d’une autre substance. Il s’ensuit que ledit moyen manque en fait.
106 Au vu de l’ensemble de ces considérations, il y a lieu de rejeter le pourvoi sans qu’il soit besoin de statuer sur la qualité pour agir d’Alfa Agricultural Supplies SA et d’Aragonesas Agro SA.
Sur les dépens
107 Aux termes de l’article 69, paragraphes 2 et 4, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 118 du même règlement, d’une part, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens et, d’autre part, la Cour peut décider qu’une partie intervenante supportera ses propres dépens. La Commission ayant conclu à la condamnation des requérantes au pourvoi et celles-ci ayant succombé en leurs moyens, il y a lieu de les condamner aux dépens. Par ailleurs, European Crop Protection Association (ECPA) supportera ses propres dépens.
Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) ordonne:
1) Le pourvoi est rejeté.
2) Makhteshim-Agan Holding BV, Alfa Agricultural Supplies SA et Aragonesas Agro SA sont condamnées aux dépens.
3) European Crop Protection Association (ECPA) supporte ses propres dépens.
Signatures
* Langue de procédure: l’anglais.