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Document 62008CJ0473

Arrêt de la Cour (troisième chambre) du 28 janvier 2010.
Ingenieurbüro Eulitz GbR Thomas und Marion Eulitz contre Finanzamt Dresden I.
Demande de décision préjudicielle: Sächsisches Finanzgericht - Allemagne.
Sixième directive TVA - Article 13, A, paragraphe 1, sous j) - Exonération - Leçons données, à titre personnel, par des enseignants et portant sur l’enseignement scolaire ou universitaire - Prestations fournies par un enseignant indépendant dans le cadre de cours de formation professionnelle continue organisés par un institut tiers.
Affaire C-473/08.

Recueil de jurisprudence 2010 I-00907

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2010:47

ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

28 janvier 2010 ( *1 )

«Sixième directive TVA — Article 13, A, paragraphe 1, sous j) — Exonération — Leçons données, à titre personnel, par des enseignants et portant sur l’enseignement scolaire ou universitaire — Prestations fournies par un enseignant indépendant dans le cadre de cours de formation professionnelle continue organisés par un institut tiers»

Dans l’affaire C-473/08,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par le Sächsisches Finanzgericht (Allemagne), par décision du 13 octobre 2008, parvenue à la Cour le , dans la procédure

Ingenieurbüro Eulitz GbR Thomas und Marion Eulitz

contre

Finanzamt Dresden I,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. J. N. Cunha Rodrigues, président de la deuxième chambre, faisant fonction de président de la troisième chambre, MM. A. Rosas, U. Lõhmus, A. Ó Caoimh (rapporteur) et A. Arabadjiev, juges,

avocat général: Mme E. Sharpston,

greffier: M. R. Grass,

considérant les observations présentées:

pour le Finanzamt Dresden I, par Mme P. Zimmermann-Hübner,

pour le gouvernement allemand, par MM. M. Lumma et C. Blaschke, en qualité d’agents,

pour le gouvernement grec, par M. G. Kanellopoulos ainsi que Mmes S. Trekli et M. Tassopoulou, en qualité d’agents,

pour la Commission des Communautés européennes, par M. D. Triantafyllou, en qualité d’agent,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires — Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1, ci-après la «sixième directive»).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Ingenieurbüro Eulitz GbR Thomas und Marion Eulitz (ci-après «Eulitz GbR») au Finanzamt Dresden I (ci-après le «Finanzamt»), au sujet du refus de ce dernier d’exonérer de la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après la «TVA») les activités exercées par l’associé d’Eulitz GbR, M. Thomas Eulitz, dans le cadre de cours de formation professionnelle continue organisés par un institut tiers.

Cadre juridique

La réglementation communautaire

3

L’article 2, point 1, de la sixième directive soumet à la TVA «les livraisons de biens et les prestations de services, effectuées à titre onéreux à l’intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel».

4

Aux termes de l’article 4, paragraphe 1, de cette directive, est considéré comme assujetti quiconque accomplit, d’une façon indépendante et quel qu’en soit le lieu, une des activités économiques mentionnées au paragraphe 2 de ce même article, quels que soient les buts ou les résultats de cette activité.

5

Il est précisé à l’article 4, paragraphe 4, premier alinéa, de ladite directive que «[les] terme[s] ‘d’une façon indépendante’ utilisé[s] au paragraphe 1 exclu[en]t de la taxation les salariés et autres personnes dans la mesure où ils sont liés à leur employeur par un contrat de louage de travail ou par tout autre rapport juridique créant des liens de subordination en ce qui concerne les conditions de travail et de rémunération et la responsabilité de l’employeur».

6

L’article 13, A, paragraphe 1, de la sixième directive dispose:

«Sans préjudice d’autres dispositions communautaires, les États membres exonèrent, dans les conditions qu’ils fixent en vue d’assurer l’application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels:

[…]

i)

l’éducation de l’enfance ou de la jeunesse, l’enseignement scolaire ou universitaire, la formation ou le recyclage professionnel, ainsi que les prestations de services et les livraisons de biens qui leur sont étroitement liées, effectués par des organismes de droit public de même objet ou par d’autres organismes reconnus comme ayant des fins comparables par l’État membre concerné;

j)

les leçons données, à titre personnel, par des enseignants et portant sur l’enseignement scolaire ou universitaire;

[…]»

La réglementation nationale

7

À l’époque des faits au principal, l’article 4 de la loi relative à la taxe sur le chiffre d’affaires (Umsatzsteuergesetz, ci-après l’«UStG»), intitulé «Exonération de livraisons et autre prestations», prévoyait, à son point 21, qu’étaient exonérées de la TVA:

«a)

les prestations poursuivant directement un objectif scolaire ou éducatif qui sont fournies par des écoles privées et d’autres établissements de formation générale ou professionnelle,

aa)

s’ils sont agréés par l’État en vertu de l’article 7, paragraphe 4, de la loi fondamentale [(Grundgesetz)] ou autorisés en vertu du droit du Land, ou

bb)

si l’autorité compétente du Land atteste qu’ils préparent régulièrement à une profession ou à un examen que fait passer une personne morale de droit public,

b)

les prestations d’enseignement poursuivant directement un objectif scolaire ou éducatif qui sont fournies par des enseignants indépendants

aa)

dans des établissements d’enseignement supérieur au sens des articles 1er et 70 de la loi-cadre relative aux établissements d’enseignement supérieur [(Hochschulrahmengesetz)] et dans des écoles publiques de formation générale ou professionnelle, ou

bb)

dans des écoles privées et autres établissements de formation générale ou professionnelle, dans la mesure où ils remplissent les conditions indiquées sous a)».

8

En vertu de l’article 4, point 22, sous a), de l’UStG, étaient exonérés les conférences, cours et autres activités, à caractère scientifique ou éducatif, organisés par des personnes morales de droit public, des écoles supérieures d’administration et d’économie, des universités populaires ou des établissements poursuivant des objectifs d’utilité publique ou appartenant à une organisation professionnelle, si la majeure partie des recettes servait à couvrir les charges.

Le litige au principal et les questions préjudicielles

9

Eulitz GbR, société de droit civil, exploite un bureau d’études à Dresde (Allemagne).

10

L’associé d’Eulitz GbR, M. Eulitz, est ingénieur diplômé en protection contre l’incendie. Pendant la période en cause au principal, couvrant les années 2001 à 2005, il a donné des cours à l’Europäisches Institut für postgraduale Bildung an der Technischen Universität Dresden (EIPOS e.V.) (ci-après l’«EIPOS»), association de droit privé, et fait passer des examens dans le cadre de commissions d’examen.

11

Outre ses activités en tant qu’enseignant et examinateur, M. Eulitz a été chargé, au sein de cette association, de la direction d’ensemble de certains cycles de formation, sur le plan de l’organisation et du contenu. Il devait donc convenir avec les autres enseignants des horaires et du contenu de leurs cours, et était l’interlocuteur principal des participants concernant ces formations dans leur ensemble.

12

M. Eulitz a exercé ses activités dans divers cycles de formation, tous relatifs à la prévention des incendies. Pour être admis à tous ces cycles de formation, les participants devaient déjà être titulaires, au minimum, d’un diplôme d’architecte ou d’ingénieur, délivré par une université ou un établissement d’enseignement supérieur, ou justifier d’une expérience professionnelle de deux ans au moins dans le domaine de la planification en matière de protection contre l’incendie ou, le cas échéant, dans le domaine de la construction. Les participants qui obtenaient le diplôme à l’issue de la formation d’expert étaient, sur demande, nommés experts en protection préventive contre l’incendie par l’Industrie- und Handelskammer (chambre de commerce et d’industrie).

13

Le Finanzamt a soumis à la TVA les recettes d’Eulitz GbR résultant de cette activité de M. Eulitz, considérant que celle-ci ne bénéficie pas d’une exonération en vertu de l’article 4, point 21 ou 22, de l’UStG.

14

Après le rejet de la réclamation qu’elle avait introduite contre cette décision, Eulitz GbR a formé le recours au principal, qui vise à obtenir l’exonération des recettes concernées, perçues, selon elle, en contrepartie de prestations fournies par M. Eulitz en tant qu’enseignant à titre personnel, pour son propre compte et sous sa propre responsabilité.

15

Le Finanzamt estime, en revanche, qu’une exonération en vertu de l’article 13, A, paragraphe 1, sous i) ou j), de la sixième directive est exclue. En effet, d’une part, Eulitz GbR ne serait ni un organisme de droit public chargé de l’éducation de l’enfance ou de la jeunesse, de l’enseignement scolaire ou universitaire, de formation ou de recyclage professionnel, ni un autre organisme reconnu comme ayant des fins comparables par l’État membre concerné. D’autre part, les prestations litigieuses ne pourraient pas être considérées comme un enseignement scolaire ou universitaire dispensé par un enseignant agissant à titre personnel. En particulier, M. Eulitz aurait agi comme enseignant dans le cadre des cours de formation proposés par l’EIPOS et, donc, sous la responsabilité et pour le compte de cet institut.

16

Le Sächsisches Finanzgericht (tribunal des finances du Land de Saxe) indique notamment qu’Eulitz GbR est un entrepreneur indépendant au sens de l’article 2, paragraphe 1, de l’UStG, mais que, en vertu du droit interne allemand, elle n’a pas droit à l’exonération de la TVA en ce qui concerne les prestations litigieuses. En particulier, ce serait non pas Eulitz GbR, mais l’EIPOS, qui aurait fourni ces prestations aux participants aux cycles de formation. En outre, ni l’EIPOS ni Eulitz GbR ne disposerait d’une attestation prévue à l’article 4, point 21, sous b), bb), de l’UStG, indiquant qu’ils préparent régulièrement à une profession ou à un examen que fait passer une personne morale de droit public. Cette dernière circonstance exclut, selon la juridiction de renvoi, l’application dans l’affaire au principal de l’exonération prévue à l’article 13, A, paragraphe 1, sous i), de la sixième directive, car Eulitz GbR ne serait pas un «organisme reconnu» par l’État membre concerné, au sens de cette disposition. S’agissant du point j) du même paragraphe, la juridiction de renvoi émet des doutes quant à la qualité de M. Eulitz d’enseignant agissant «à titre personnel».

17

Dans ces conditions, s’interrogeant sur l’applicabilité dans la cause au principal de l’exonération prévue à l’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de cette directive, le Sächsisches Finanzgericht a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)

Les prestations fournies en tant qu’enseignant et examinateur par un ingénieur diplômé, dans un institut de formation ayant le statut d’association de droit privé, dans le cadre de cycles de formation sanctionnés par un examen, destinés à des participants déjà titulaires, au minimum, d’un diplôme d’architecte ou d’ingénieur délivré par un établissement d’enseignement supérieur ou disposant d’une formation équivalente, constituent-elles un «enseignement scolaire ou universitaire» au sens de l’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de la directive 77/388[…]?

2)

a)

Une personne, qui remplit par ailleurs les conditions en tant qu’enseignant «à titre personnel» au sens de [cette] disposition […], est-elle exclue de cette catégorie lorsque:

elle perçoit (en totalité ou en partie) la rémunération pour ses cours si aucun participant ne s’est inscrit au cours de formation concerné, mais qu’elle a déjà fourni des prestations de préparation, ou

elle est chargée d’assurer les prestations en question, en tant qu’enseignant et examinateur, de manière répétée et continue sur une longue période, ou

outre son activité d’enseignement à proprement parler, elle a acquis une position éminente, sur le plan du contenu et/ou de l’organisation, par rapport aux autres chargés de cours du cycle de formation en question?

b)

Y a-t-il lieu de considérer qu’elle est exclue de [ladite catégorie] dès lors qu’elle présente une seule de ces caractéristiques ou seulement quand elle en présente deux, ou bien [lorsqu’elle les présente] toutes les trois?»

Sur les questions préjudicielles

18

Par ses deux questions, la juridiction de renvoi vise, en substance, à déterminer si des activités telles que celles exercées par l’associé de la requérante au principal relèvent, dans les circonstances telles que celles au principal, de la notion de «leçons données, à titre personnel, par des enseignants et portant sur l’enseignement scolaire ou universitaire», au sens de l’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de la sixième directive.

19

À titre liminaire, il convient d’observer, à l’instar de la Commission des Communautés européennes, qu’il apparaît que, selon le droit allemand, les activités en cause au principal n’étaient pas exercées par Eulitz GbR en tant que personne de droit autonome, mais par l’associé de celle-ci, M. Eulitz. C’est dans ces conditions que la juridiction de renvoi s’intéresse aux activités dudit associé, ces dernières pouvant être assimilées aux activités de cette société en tant que telle.

Sur la première question

20

Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de la sixième directive doit être interprété en ce sens que des prestations en tant qu’enseignant et examinateur fournies par un ingénieur diplômé dans un institut de formation ayant le statut d’association de droit privé, dans le cadre de cycles de formation sanctionnés par un examen, destinés à des participants déjà titulaires, au minimum, d’un diplôme d’architecte ou d’ingénieur délivré par un établissement d’enseignement supérieur, ou disposant d’une formation équivalente, peuvent relever de la notion d’«enseignement scolaire ou universitaire» au sens de cette disposition.

21

Or, les termes utilisés dans la version allemande de l’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de la sixième directive, à savoir «von Privatlehrern erteilten Schul- und Hochschulunterricht» (littéralement: enseignement scolaire ou universitaire dispensé par des enseignants privés), se distinguent des termes utilisés dans toutes les autres versions linguistiques dans lesquelles la sixième directive a été initialement adoptée, dans la mesure où, dans ces autres versions, l’exonération énoncée à cette disposition ne vise pas directement «l’enseignement scolaire ou universitaire», mais une notion connexe, exprimée en français par les termes «leçons […] portant sur» un tel enseignement.

22

À cet égard, il y a lieu de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, la nécessité d’une application et, dès lors, d’une interprétation uniformes d’un acte communautaire exclut que celui-ci soit considéré isolément dans une de ses versions, mais exige qu’il soit interprété en fonction tant de la volonté réelle de son auteur que du but poursuivi par ce dernier, à la lumière, notamment, des versions établies dans toutes les langues (voir, notamment, arrêts du 12 novembre 1969, Stauder, 29/69, Rec. p. 419, point 3, ainsi que du , Zurita García et Choque Cabrera, C-261/08 et C-348/08, Rec. p. I-10143, point 54).

23

Il convient dès lors de comprendre la première question comme visant, en substance, à savoir si l’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de la sixième directive doit être interprété en ce sens que des activités telles que celles en cause au principal peuvent constituer des «leçons […] portant sur l’enseignement scolaire ou universitaire» au sens de cette disposition.

24

Il y a lieu, ensuite, de rappeler que la sixième directive assigne un champ d’application très large à la TVA, englobant toutes les activités économiques de producteur, de commerçant ou de prestataire de services. L’article 13 de cette directive exonère toutefois certaines activités de la TVA (voir arrêt du 16 octobre 2008, Canterbury Hockey Club et Canterbury Ladies Hockey Club, C-253/07, Rec. p. I-7821, point 15).

25

Selon la jurisprudence de la Cour, les exonérations visées à l’article 13 de la sixième directive constituent des notions autonomes du droit communautaire ayant pour objet d’éviter des divergences dans l’application du régime de la TVA d’un État membre à l’autre (voir, notamment, arrêts du 25 février 1999, CPP, C-349/96, Rec. p. I-973, point 15; du , Horizon College, C-434/05, Rec. p. I-4793, point 15, et du , Swiss Re Germany Holding, C-242/08, Rec. p. I-10099, point 33).

26

Il ressort en outre d’une jurisprudence constante que les exonérations figurant à l’article 13, A, de la sixième directive ne visent pas à exonérer de la TVA toutes activités d’intérêt général, mais uniquement celles qui y sont énumérées et décrites de manière très détaillée (voir en ce sens, notamment, arrêts du 11 juillet 1985, Commission/Allemagne, 107/84, Rec. p. 2655, point 17; du , D’Ambrumenil et Dispute Resolution Services, C-307/01, Rec. p. I-13989, point 54; du , Haderer, C-445/05, Rec. p. I-4841, point 16 et jurisprudence citée, ainsi que Canterbury Hockey Club et Canterbury Ladies Hockey Club, précité, point 18).

27

Les termes employés pour désigner les exonérations figurant à l’article 13 de la sixième directive sont d’interprétation stricte, étant donné qu’elles constituent des dérogations au principe général selon lequel la TVA est perçue sur chaque prestation de services effectuée à titre onéreux par un assujetti. Toutefois, l’interprétation de ces termes doit être conforme aux objectifs poursuivis par lesdites exonérations et respecter les exigences du principe de neutralité fiscale inhérent au système commun de TVA. Ainsi, cette règle d’interprétation stricte ne signifie pas que les termes utilisés pour définir les exonérations visées audit article 13 doivent être interprétés d’une manière qui priverait celles-ci de leurs effets (voir arrêts Horizon College, précité, point 16; Haderer, précité, point 18 et jurisprudence citée, ainsi que du 19 novembre 2009, Don Bosco Onroerend Goed, C-461/08, Rec. p. I-11079, point 25 et jurisprudence citée).

28

L’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de la sixième directive ne comporte aucune définition de la notion de «leçons […] portant sur l’enseignement scolaire ou universitaire» aux fins de cette disposition.

29

S’agissant des termes «enseignement scolaire ou universitaire» contenus dans cette notion, la Cour, tout en se gardant explicitement d’en fournir une définition précise, a relevé au point 26 de l’arrêt Haderer, précité, que ces termes ne se limitent pas aux seuls enseignements qui conduisent à des examens en vue de l’obtention d’une qualification ou qui permettent d’acquérir une formation en vue de l’exercice d’une activité professionnelle, mais comprennent d’autres activités dans lesquelles l’instruction est donnée dans des écoles ou des universités en vue de développer les connaissances et les aptitudes des élèves ou des étudiants, pourvu que ces activités ne revêtent pas un caractère purement récréatif.

30

En ce qui concerne en particulier le terme «enseignement», il convient de rappeler que la Cour a jugé, en substance, que si la transmission de connaissances et de compétences entre un enseignant et des étudiants est un élément particulièrement important de l’activité d’enseignement visée à l’article 13, A, paragraphe 1, sous i), de la sixième directive, il demeure que cette activité est constituée par un ensemble d’éléments qui incluent concomitamment ceux relatifs aux relations s’établissant entre enseignants et étudiants ainsi que ceux formant le cadre organisationnel de l’établissement dans lequel l’instruction est fournie (voir, en ce sens, arrêt Horizon College, précité, points 18 à 20).

31

Le même terme doit être entendu de manière analogue dans le cadre de l’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de la sixième directive.

32

Toutefois, ainsi qu’il a été exposé au point 21 du présent arrêt, l’exonération énoncée à cette dernière disposition ne vise cependant pas directement «l’enseignement scolaire ou universitaire», mais, dans les versions linguistiques autres que l’allemand, une notion connexe, exprimée en français par les termes «leçons […] portant sur» un tel enseignement. Le terme «leçons» doit être compris dans ce contexte comme englobant, pour l’essentiel, la transmission de connaissances et de compétences entre un enseignant et des élèves ou des étudiants.

33

Il s’ensuit que, si les prestations fournies en tant qu’enseignant dans le cadre d’un institut de formation ne constituent pas nécessairement, en dehors de tout autre élément, un «enseignement scolaire ou universitaire» au sens de l’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de la sixième directive, de telles prestations peuvent, en revanche, relever de la notion de «leçons données […] par des enseignants et portant sur l’enseignement scolaire ou universitaire» au sens de cette même disposition, dans la mesure où elles comprennent, pour l’essentiel, la transmission de connaissances et de compétences entre un enseignant et des élèves ou des étudiants dans le cadre d’une formation en vue de l’exercice d’une activité professionnelle.

34

Sur ce point, ainsi que le soutient le gouvernement allemand, il est indifférent pour l’interprétation de l’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de la sixième directive que la formulation de l’exonération prévue par cette disposition soit moins large — tant dans sa version allemande que dans d’autres versions linguistiques — que celle de l’exonération prévue au point i) dudit paragraphe, notamment en ce que, à la différence de ce dernier point, ledit point j) ne mentionne pas explicitement, outre l’enseignement scolaire ou universitaire, la formation.

35

Comme la juridiction de renvoi le suggère elle-même, il ne convient pas de faire une distinction, aux fins de la TVA, entre l’enseignement dispensé à des élèves ou à des étudiants qui suivent une première formation scolaire ou universitaire et celui dispensé à des personnes déjà titulaires d’un diplôme scolaire ou universitaire qui, sur la base de ce diplôme, poursuivent leur formation professionnelle. Il en va de même en ce qui concerne les leçons portant sur cet enseignement.

36

Au demeurant, ainsi que la Commission le fait valoir, une telle distinction peut se révéler malaisée en fonction des matières enseignées. Or, s’il est vrai que les termes employés pour désigner l’exonération visée à l’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de la sixième directive sont d’interprétation stricte, retenir une interprétation particulièrement étroite de la notion d’«enseignement scolaire ou universitaire» risquerait d’engendrer des divergences dans l’application du régime de la TVA d’un État membre à l’autre, en raison du fait que les régimes d’enseignement respectifs des États membres sont organisés selon des modalités différentes. De telles divergences seraient incompatibles avec les exigences de la jurisprudence rappelée au point 25 du présent arrêt (voir arrêt Haderer, précité, point 24).

37

Dans cette optique, en ce qui concerne les activités de M. Eulitz autres que celle d’enseignant à proprement parler, telles que celle d’examinateur ainsi que les autres activités mentionnées au point 11 du présent arrêt, il convient de relever que de telles activités peuvent être considérées comme relevant de la notion de «leçons», au sens de l’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de la sixième directive, uniquement en tant qu’elles peuvent être considérées comme étant poursuivies, pour l’essentiel, dans le cadre de la transmission de connaissances et de compétences entre un enseignant et des élèves ou des étudiants. Il appartient, pour autant que de besoin, à la juridiction de renvoi de vérifier si tel est le cas en ce qui concerne certaines des activités en cause au principal.

38

Dès lors, il y a lieu de répondre à la première question posée que l’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de la sixième directive doit être interprété en ce sens que des prestations en tant qu’enseignant fournies par un ingénieur diplômé dans un institut de formation ayant le statut d’association de droit privé, dans le cadre de cycles de formation sanctionnés par un examen, destinés à des participants déjà titulaires, au minimum, d’un diplôme d’architecte ou d’ingénieur délivré par un établissement d’enseignement supérieur, ou disposant d’une formation équivalente, peuvent constituer des «leçons […] portant sur l’enseignement scolaire ou universitaire» au sens de cette disposition. Peuvent également constituer de telles leçons des activités autres que celle d’enseignant proprement dite, pourvu que ces activités soient exercées, pour l’essentiel, dans le cadre de la transmission de connaissances et de compétences entre un enseignant et des élèves ou des étudiants portant sur l’enseignement scolaire ou universitaire. Pour autant que de besoin, il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si toutes les activités en cause au principal constituent des «leçons» portant sur l’«enseignement scolaire ou universitaire» au sens de ladite disposition.

Sur la seconde question

39

Par sa seconde question, la juridiction de renvoi vise essentiellement à déterminer si, dans des circonstances telles que celles de la cause au principal, une personne telle que M. Eulitz, qui est associé de la requérante au principal, peut être considérée comme ayant donné des leçons «à titre personnel», au sens de l’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de la sixième directive.

40

Il ressort du libellé de cette question que la juridiction de renvoi estime a priori possible que, dans le litige au principal, Eulitz GbR, au travers de M. Eulitz, soit considérée comme donnant des leçons «à titre personnel» au sens de l’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de la sixième directive, sous l’unique réserve de l’incidence à accorder, le cas échéant, aux circonstances énumérées dans cette même question.

41

Ainsi qu’il ressort du libellé de l’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de la sixième directive, pour pouvoir bénéficier de l’exonération prévue à cette disposition, les leçons doivent non seulement porter sur l’enseignement scolaire ou universitaire, mais en outre être «données, à titre personnel, par des enseignants» (voir arrêt Haderer, précité, point 28).

42

À cet égard, il convient de rappeler que les règles d’interprétation des exonérations énoncées à l’article 13 de la sixième directive exposées au point 27 du présent arrêt s’appliquent aux conditions spécifiques qui sont exigées pour bénéficier de ces exonérations, et en particulier à celles qui concernent la qualité ou l’identité de l’opérateur économique effectuant des prestations couvertes par une exonération (voir, en ce sens, arrêts du 7 septembre 1999, Gregg, C-216/97, Rec. p. I-4947, points 16 à 20; du , Kingscrest Associates et Montecello, C-498/03, Rec. p. I-4427, point 23, ainsi que Haderer, précité, point 19).

43

Dans l’affaire au principal, il apparaît constant que M. Eulitz a agi, au moins pour l’essentiel, en tant qu’enseignant. En tout état de cause, ce point n’a été contesté ni par le Finanzamt ni par les autres intéressés ayant présenté des observations en vertu de l’article 23 du statut de la Cour de justice.

44

La question se pose toutefois dans l’affaire au principal de savoir si les activités exercées par M. Eulitz l’ont été «à titre personnel», au sens de l’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de la sixième directive.

45

À cet égard, la Commission, s’appuyant sur le point 33 de l’arrêt Haderer, précité, fait valoir que, dès lors que M. Eulitz apparaît comme ayant le statut d’indépendant sur le plan du droit civil et du droit fiscal allemands, ses activités sont exercées à titre privé et, donc, «à titre personnel» au sens de ladite disposition.

46

Certes, il ressort de la décision de renvoi que, pendant la période en cause au principal, les autorités fiscales allemandes ont estimé qu’Eulitz GbR, par l’intermédiaire de M. Eulitz, remplissait les critères posés à l’article 4 de la sixième directive pour être considérée comme assujettie à la TVA, en particulier celui relatif à l’accomplissement «de façon indépendante» d’une des activités économiques mentionnées au paragraphe 2 de cet article.

47

Toutefois, l’absence, entre l’EIPOS et M. Eulitz, associé de la requérante au principal, de lien de subordination analogue à ceux mentionnés à l’article 4, paragraphe 4, premier alinéa, de la sixième directive aux fins de l’exercice des activités en cause au principal ne saurait suffire, en elle-même, pour pouvoir considérer que les activités dudit associé étaient exercées «à titre personnel», au sens de l’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de la sixième directive.

48

En effet, ainsi que le souligne le gouvernement allemand, le simple fait d’accomplir «de façon indépendante» une activité économique et de remplir les autres critères posés à l’article 4 de la sixième directive pour pouvoir être considéré comme assujetti à la TVA ne saurait, sans plus, conduire à la conclusion qu’un enseignant qui n’est pas lié par un contrat de travail ou un lien de subordination analogue à celui résultant d’un tel contrat exerce ses activités économiques «à titre personnel» au sens de l’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de cette directive. Si tel était le cas, la notion d’enseignant «à titre personnel» n’aurait pas de signification autonome, puisque tous les enseignants qui satisfont aux conditions posées à l’article 4 de ladite directive pour être considérés comme assujettis seraient automatiquement des enseignants «à titre personnel» au sens de l’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de la même directive.

49

Il se peut que l’argumentation de la Commission qui est exposée au point 45 du présent arrêt trouve son origine, d’une part, dans la formulation des dispositions pertinentes du droit interne allemand et, d’autre part, dans le fait que les termes utilisés dans la version allemande de l’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de la sixième directive sont éventuellement susceptibles, ainsi qu’il ressort du point 21 du présent arrêt, d’être lus comme visant tout cours donné par un enseignant qui ne fait pas partie du personnel employé par un établissement d’enseignement.

50

Toutefois, il convient de relever à ce propos que, d’une part, le fait de soumettre à la TVA ou d’en exonérer une opération déterminée ne saurait dépendre de sa qualification en droit national (voir en ce sens, notamment, arrêts précités Kingscrest Associates et Montecello, point 25 et jurisprudence citée, ainsi que Haderer, point 25). D’autre part, ainsi qu’il résulte du point 22 du présent arrêt, la nécessité d’une interprétation uniforme des directives communautaires exclut que, en cas de doute, le texte d’une disposition soit considéré isolément, mais exige au contraire qu’il soit interprété et appliqué à la lumière des versions établies dans les autres langues officielles (voir également arrêts Kingscrest Associates et Montecello, précité, point 26 et jurisprudence citée, ainsi que du 10 septembre 2009, Eschig, C-199/08, Rec. p. I-8295, point 54).

51

Or, il ressort de plusieurs versions linguistiques, autres que la version allemande, de l’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de la sixième directive que l’interprétation de cette disposition évoquée au point 49 du présent arrêt ne trouve pas de véritable appui dans le libellé de celle-ci [voir notamment, outre la version française, les versions anglaise («tuition given privately by teachers and covering school or university education»), italienne («le lezioni impartite da insegnanti a titolo personale e relative all’insegnamento scolastico o universitario»), polonaise («nauczanie prywatne przez nauczycieli, obejmujące edukację szkolna i uniwersytecką»), portugaise («As lições dadas, a título pessoal, por docentes, relativas ao ensino escolar ou universitário»), finnoise («opettajan koulu- tai yliopisto-opetuksen tueksi antamat yksityisoppitunnit») et suédoise («Undervisning som ges privat av lärare och omfattar skolundervisning eller universitetsutbildning»)].

52

En tout état de cause, sans qu’il soit besoin d’examiner les trois circonstances énumérées dans la seconde question préjudicielle, il y a lieu de rappeler qu’il résulte de la décision de renvoi que M. Eulitz a agi comme enseignant dans le cadre de cours de formation proposés par un organisme tiers, l’EIPOS. Selon les propres constations de la juridiction de renvoi, c’est cet organisme — et non pas M. Eulitz — qui était en charge de l’institut de formation dans le cadre duquel ce dernier a donné des leçons et qui a fourni des prestations de formation aux participants auxdits cours.

53

Ainsi que les gouvernements allemand et grec le font valoir, cette circonstance, par elle-même, est de nature à exclure la possibilité que M. Eulitz — et donc Eulitz GbR — puisse être considéré comme ayant donné des leçons «à titre personnel» au sens de l’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de la sixième directive. Les éléments énumérés dans la deuxième question préjudicielle, qu’ils soient pris ensemble ou individuellement, ne sont pas susceptibles de conduire à une conclusion différente.

54

Les indications fournies par la Cour dans l’arrêt Haderer, précité, vont d’ailleurs en ce sens. En effet, aux points 33 à 35 dudit arrêt, la Cour a indiqué, en substance, que, compte tenu de toutes les circonstances de l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, il apparaissait, ce qu’il appartenait au juge national de vérifier, que M. Haderer s’était mis, en qualité d’enseignant, à la disposition d’une entité tierce, laquelle l’avait rémunéré en tant que prestataire de services au profit du système éducationnel administré par cette entité, de sorte qu’il ne pouvait être considéré qu’une personne dans la position de M. Haderer avait agi «à titre personnel».

55

Dès lors, il y lieu de répondre à la seconde question posée que l’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de la sixième directive doit être interprété en ce sens que, dans des circonstances telles que celles de la cause au principal, une personne telle que M. Eulitz, qui est associé de la requérante au principal, qui fournit des prestations en tant qu’enseignant dans le cadre des cours de formation proposés par un organisme tiers, ne peut pas être considérée comme ayant donné des leçons «à titre personnel», au sens de cette disposition.

Sur les dépens

56

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) dit pour droit:

 

1)

L’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires — Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme, doit être interprété en ce sens que des prestations en tant qu’enseignant fournies par un ingénieur diplômé dans un institut de formation ayant le statut d’association de droit privé, dans le cadre de cycles de formation sanctionnés par un examen, destinés à des participants déjà titulaires, au minimum, d’un diplôme d’architecte ou d’ingénieur délivré par un établissement d’enseignement supérieur, ou disposant d’une formation équivalente, peuvent constituer des «leçons […] portant sur l’enseignement scolaire ou universitaire» au sens de cette disposition. Peuvent également constituer de telles leçons des activités autres que celle d’enseignant proprement dite, pourvu que ces activités soient exercées, pour l’essentiel, dans le cadre de la transmission de connaissances et de compétences entre un enseignant et des élèves ou des étudiants portant sur l’enseignement scolaire ou universitaire. Pour autant que de besoin, il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si toutes les activités en cause au principal constituent des «leçons» portant sur l’«enseignement scolaire ou universitaire» au sens de ladite disposition.

 

2)

L’article 13, A, paragraphe 1, sous j), de cette directive doit être interprété en ce sens que, dans des circonstances telles que celles de la cause au principal, une personne telle que M. Eulitz, qui est associé de la requérante au principal, qui fournit des prestations en tant qu’enseignant dans le cadre des cours de formation proposés par un organisme tiers, ne peut pas être considérée comme ayant donné des leçons «à titre personnel», au sens de cette disposition.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure: l’allemand.

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