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Document 62005TJ0041
Judgment of the General Court (Fourth Chamber) of 12 October 2011.#Alliance One International, Inc. v European Commission.#Competition - Agreements, decisions and concerted practices - Spanish market for the purchase and first processing of raw tobacco - Decision finding an infringement of Article 81 EC - Price-fixing and market-sharing - Fines - Attributability of the unlawful conduct - Maximum limit of 10% of turnover - Deterrent effect - Attenuating circumstances.#Case T-41/05.
Arrêt du Tribunal (quatrième chambre) du 12 octobre 2011.
Alliance One International, Inc. contre Commission européenne.
Concurrence - Ententes - Marché espagnol de l’achat et de la première transformation de tabac brut - Décision constatant une infraction à l’article 81 CE - Fixation des prix et répartition du marché - Amendes - Imputabilité du comportement infractionnel - Limite maximale de 10 % du chiffre d’affaires - Effet dissuasif - Circonstances atténuantes.
Affaire T-41/05.
Arrêt du Tribunal (quatrième chambre) du 12 octobre 2011.
Alliance One International, Inc. contre Commission européenne.
Concurrence - Ententes - Marché espagnol de l’achat et de la première transformation de tabac brut - Décision constatant une infraction à l’article 81 CE - Fixation des prix et répartition du marché - Amendes - Imputabilité du comportement infractionnel - Limite maximale de 10 % du chiffre d’affaires - Effet dissuasif - Circonstances atténuantes.
Affaire T-41/05.
Recueil de jurisprudence 2011 II-07101
ECLI identifier: ECLI:EU:T:2011:586
Affaire T-41/05
Alliance One International, Inc.
contre
Commission européenne
« Concurrence — Ententes — Marché espagnol de l’achat et de la première transformation de tabac brut — Décision constatant une infraction à l’article 81 CE — Fixation des prix et répartition du marché — Amendes — Imputabilité du comportement infractionnel — Limite maximale de 10 % du chiffre d’affaires — Effet dissuasif — Circonstances atténuantes »
Sommaire de l'arrêt
1. Concurrence — Règles communautaires — Infractions — Imputation — Société mère et filiales — Unité économique — Critères d'appréciation — Présomption d'une influence déterminante exercée par la société mère sur les filiales détenues à 100 % par celle-ci
(Art. 81 CE)
2. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Montant maximal — Calcul — Chiffre d'affaires à prendre en considération
(Règlements du Conseil nº 17, art. 15, § 2, et nº 1/2003, art. 23, § 2)
3. Concurrence — Règles communautaires — Infractions — Imputation — Société mère et filiales — Unité économique — Critères d'appréciation — Respect par la Commission du principe d'égalité de traitement
(Art. 81 CE)
4. Concurrence — Règles communautaires — Infractions — Imputation — Société mère et filiales — Unité économique — Critères d'appréciation — Autonomie de la filiale
(Art. 81 CE)
5. Recours en annulation — Moyens — Défaut ou insuffisance de motivation
(Art. 230 CE et 253 CE)
6. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Critères — Circonstances atténuantes
(Règlements du Conseil nº 17, art. 15, § 2, et nº 1/2003, art. 23, § 2; communication de la Commission 98/C 9/03, point 3, 3e tiret)
7. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Critères — Caractère dissuasif de l'amende
(Règlements du Conseil nº 17, art. 15, § 2, et nº 1/2003, art. 23, § 2; communication de la Commission 98/C 9/03)
1. En matière de concurrence, le comportement d’une filiale peut être imputé à la société mère, notamment lorsque, bien qu’ayant une personnalité juridique distincte, cette filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l’essentiel les instructions qui lui sont données par la société mère, eu égard en particulier aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent ces deux entités juridiques.
En effet, dans une telle situation, la société mère et sa filiale font partie d’une même unité économique et, partant, forment une seule entreprise. Ce n’est donc pas une relation d’instigation relative à l’infraction entre la société mère et sa filiale ni, à plus forte raison, une implication de la première dans ladite infraction, mais le fait qu’elles constituent une seule entreprise au sens de l’article 81 CE qui permet à la Commission d’adresser une décision imposant des amendes à la société mère.
La Commission ne saurait se contenter de constater que la société mère est en mesure d’exercer une influence déterminante sur le comportement de sa filiale, mais doit également vérifier si cette influence a effectivement été exercée.
Dans le cas particulier où une société mère détient 100 % du capital de sa filiale ayant commis une infraction aux règles de la concurrence, d’une part, cette société mère peut exercer une influence déterminante sur le comportement de cette filiale et, d’autre part, il existe une présomption simple selon laquelle ladite société mère exerce effectivement une influence déterminante sur le comportement de sa filiale.
Dans ces conditions, il suffit que la Commission prouve que la totalité du capital d’une filiale est détenue par sa société mère pour présumer que cette dernière exerce une influence déterminante sur la politique commerciale de cette filiale. La Commission sera en mesure, par la suite, de considérer la société mère comme solidairement responsable pour le paiement de l’amende infligée à sa filiale, à moins que cette société mère, à laquelle il incombe de renverser cette présomption, n’apporte des éléments de preuve suffisants de nature à démontrer que sa filiale se comporte de façon autonome sur le marché.
La présomption tirée de la détention de la totalité du capital est susceptible de s’appliquer non seulement dans les cas de figure où il existe une relation directe entre la société mère et sa filiale, mais également dans des cas où cette relation est indirecte, par filiale interposée.
(cf. points 92-96, 98)
2. Selon l’article 23, paragraphe 2, du règlement nº 1/2003, la Commission peut, par voie de décision, infliger aux entreprises ayant commis une infraction à l’article 81, paragraphe 1, CE des amendes qui ne peuvent dépasser 10 % du chiffre d’affaires réalisé au cours de l’exercice social précédent par chacune des entreprises ayant participé à l’infraction. La même indication figurait à l’article 15, paragraphe 2, du règlement nº 17.
Le chiffre d’affaires mentionné dans ces dispositions se rapporte au chiffre d’affaires global de l’entreprise concernée, à savoir l’entreprise qui s’est vu imputer l’infraction et qui, de ce fait, a été déclarée responsable.
Quant à la notion d’« exercice social précédent » figurant à l’article 23, paragraphe 2, du règlement nº 1/2003, elle doit s’entendre comme visant l’exercice social qui précède l’adoption de la décision de la Commission, sauf dans les situations particulières où le chiffre d’affaires de ce dernier exercice social ne donne aucune indication utile sur la situation économique réelle de l’entreprise concernée et le niveau approprié de l’amende à infliger à celle-ci.
Ainsi, lorsque la Commission conclut à l’existence d’une entité économique unique entre une société mère et sa filiale et, partant, tient cette société mère pour solidairement responsable de l’infraction ainsi que du paiement de l’amende et la fait figurer parmi les destinataires de sa décision, la Commission peut également se fonder sur le chiffre d’affaires consolidé réalisé par la société mère au cours de l'année précédant celle de l’adoption de sa décision, pour calculer le plafond de 10 % prévu par l’article 23, paragraphe 2, du règlement nº 1/2003.
(cf. points 99-101, 165-166)
3. Lorsque, dans une affaire mettant en cause une infraction aux règles de la concurrence de l'Union impliquant plusieurs entreprises différentes, la Commission adopte, à l'intérieur du cadre fixé par la jurisprudence, une certaine méthode pour déterminer s’il y a lieu de retenir tant la responsabilité des filiales ayant matériellement commis cette infraction que celle de leurs sociétés mères, elle doit, sauf circonstances particulières, se fonder à cet effet sur les mêmes critères dans le cas de toutes ces entreprises. La Commission est, en effet, tenue de respecter le principe d’égalité de traitement, qui requiert que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié.
(cf. point 123)
4. En matière de concurrence, l’autonomie d’une filiale par rapport à sa société mère ne doit pas être appréciée exclusivement au regard de son activité dans le domaine des produits concernés par l’infraction. Afin d’établir si une filiale détermine de façon autonome son comportement sur le marché, il convient de prendre en compte l’ensemble des éléments pertinents relatifs aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent la filiale à la société mère, lesquels peuvent varier selon les cas et ne sauraient donc faire l’objet d’une énumération exhaustive.
Ainsi, le fait que la société mère n’a jamais mis en place de mécanisme de contrôle des activités de sa filiale dans le domaine concerné par l'infraction ne saurait suffire à établir que cette dernière a agi de manière autonome sur le marché. Il en va de même pour ce qui est de l'absence d’ordre ou d’instruction de la société mère à la filiale en ce qui concerne sa politique d’achat ou les réunions avec les autres membres de l'entente.
(cf. points 158, 160)
5. Dans le cadre d’un recours en annulation, le moyen tiré d’un défaut ou d’une insuffisance de motivation d’un acte constitue un moyen d’ordre public qui peut, voire doit, être soulevé d’office par le juge de l’Union et qui, par conséquent, peut être invoqué par les parties à tout stade de la procédure.
(cf. point 170)
6. Dans le cadre d'une infraction aux règles de la concurrence de l'Union, la cessation de l'infraction dès les premières interventions de la Commission ne peut logiquement être une circonstance atténuante que s’il existe des raisons de supposer que les entreprises en cause ont été incitées à arrêter leurs comportements anticoncurrentiels par les interventions en question, le cas où l’infraction a déjà pris fin avant la date des premières interventions de la Commission n’étant pas couvert par le point 3, troisième tiret, des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 15, paragraphe 2, du règlement nº 17, et de l'article 65, paragraphe 5, du traité CECA.
Même si la Commission considère que l’infraction a cessé le jour même où elle a effectué ses premières vérifications, elle est pleinement fondée à ne pas retenir une telle cessation comme circonstance atténuante. En effet, une réduction de l’amende en raison de la cessation d’une infraction dès les premières interventions de la Commission ne saurait être automatique, mais dépend d’une évaluation des circonstances du cas d’espèce par cette dernière, dans le cadre de son pouvoir d’appréciation. À cet égard, l’application du point 3, troisième tiret, des lignes directrices en faveur d’une entreprise sera particulièrement adéquate dans une situation où le caractère anticoncurrentiel du comportement en cause n’est pas manifeste. Inversement, son application sera moins adaptée, en principe, dans une situation où celui-ci est clairement anticoncurrentiel, à le supposer établi.
(cf. points 192, 194)
7. Dans le cadre d'une infraction aux règles de la concurrence de l'Union, dès lors qu'une société mère et sa filiale forment ensemble une seule et même entreprise au cours de l'année précédant celle de l’adoption de la décision de la Commission infligeant une amende, la Commission peut appliquer un coefficient multiplicateur aux fins de dissuasion qui se fonde sur la taille et les ressources globales de l’entreprise concernée au cours de cette année.
En effet, la prise en considération de la taille et des ressources globales de l’entreprise concernée afin d’assurer un effet dissuasif à l’amende s’explique par l’impact recherché sur ladite entreprise, la sanction ne devant pas être négligeable au regard, notamment, de la capacité financière de celle-ci. Afin de pouvoir mesurer le caractère dissuasif d’une amende à l’égard d’une entreprise déclarée responsable d’une infraction, il ne saurait, dès lors, être tenu compte de la situation telle qu’elle existait au début de l’infraction. Une telle prise en compte risquerait soit d’aboutir à une amende d’un montant trop bas pour être suffisamment dissuasive, dans l’hypothèse où le chiffre d’affaires de l’entreprise concernée aurait augmenté entre-temps, soit d’aboutir à une amende d’un montant plus élevé qu’il ne le faudrait pour être dissuasive, dans l’hypothèse où le chiffre d’affaires de l’entreprise concernée aurait diminué entre-temps.
(cf. points 210-211)
ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)
12 octobre 2011 (*)
« Concurrence – Ententes – Marché espagnol de l’achat et de la première transformation de tabac brut – Décision constatant une infraction à l’article 81 CE – Fixation des prix et répartition du marché – Amendes – Imputabilité du comportement infractionnel – Limite maximale de 10 % du chiffre d’affaires – Effet dissuasif – Circonstances atténuantes »
Dans l’affaire T‑41/05,
Alliance One International, Inc., anciennement Dimon Inc., établie à Danville, Virginie (États-Unis), représentée initialement par Mes L. Bergkamp, H. Cogels, J. Dhont, M. Marañon Hermoso et A. Emch, puis par Mes M. Odriozola Alén, J. Folguera Crespo, P. Vidal Martínez, M. Barrantes Diaz et A. João Vide, avocats,
partie requérante,
contre
Commission européenne, représentée initialement par MM. É. Gippini Fournier et F. Amato, puis par MM. Gippini Fournier, N. Khan et J. Bourke, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
ayant pour objet une demande d’annulation partielle de la décision C (2004) 4030 final de la Commission, du 20 octobre 2004, relative à une procédure d’application de l’article 81, paragraphe 1, [CE] (affaire COMP/C.38.238/B.2 − Tabac brut – Espagne), et, subsidiairement, une demande de réduction du montant de l’amende infligée à la requérante dans cette décision,
LE TRIBUNAL (quatrième chambre),
composé de M. O. Czúcz, président, Mme I. Labucka et M. K. O’Higgins (rapporteur), juges,
greffier : Mme C. Kantza, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 17 juin 2009,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1. Requérante et procédure administrative
1 La requérante, Dimon Inc., devenue Alliance One International, Inc., est une société américaine établie en Virginie (États-Unis). Elle est la société mère d’un groupe comprenant une centaine de sociétés actives dans le secteur du tabac (ci-après le « groupe Dimon »). Elle a pour activité principale la fourniture de tabac transformé à des fabricants de cigarettes. À cette fin, elle s’approvisionne en tabac transformé auprès, notamment, d’Agroexpansión, SA.
2 Agroexpansión est l’une des quatre entreprises de première transformation de tabac brut en Espagne (ci-après les « transformateurs »).
3 Les trois autres transformateurs sont les suivants : Compañia española de tabaco en rama, SA (ci-après « Cetarsa »), Tabacos Españoles, SL (ci-après « Taes ») et World Wide Tobacco España, SA (ci-après « WWTE »).
4 À l’origine, Agroexpansión était une entreprise familiale. Elle a été créée en 1988 par M. B., qui en a été le directeur général jusqu’à la fin de l’année 2004. De 1994 à 1997, son capital était détenu à parts égales par l’épouse de M. B. et par une société espagnole, WW Marpetrol, SA.
5 Le 18 novembre 1997, Intabex Netherlands BV (ci-après « Intabex ») a acquis la totalité des actions d’Agroexpansión. Intabex faisait alors partie du groupe de sociétés Intabex, lequel avait été acquis par la requérante en avril 1997.
6 Les 3 et 4 octobre 2001, la Commission des Communautés européennes, disposant d’informations selon lesquelles les transformateurs et les producteurs espagnols de tabac brut auraient commis des infractions à l’article 81 CE, a effectué des vérifications, au titre de l’article 14 du règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d’application des articles [81 CE] et [82 CE] (JO 1962, 13, p. 204), dans les locaux de trois des transformateurs, à savoir Agroexpansión, Cetarsa et WWTE, ainsi que de l’Asociación Nacional de Empresas Transformadoras de Tabaco (ci-après l’« Anetab »).
7 La Commission a également procédé à des vérifications dans les locaux de la Maison des métiers du tabac et de la Fédération européenne des transformateurs de tabac, le 3 octobre 2001, ainsi que de la Federación nacional de cultivadores de tabaco (ci-après la « FNCT »), le 5 octobre 2001.
8 Par lettre du 16 janvier 2002, les transformateurs et l’Anetab, invoquant la communication de la Commission concernant la non-imposition d’amendes ou la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 1996, C 207, p. 4, ci-après la « communication sur la coopération »), ont fait connaître à cette dernière leur volonté de coopérer.
9 Par lettre du 21 janvier 2002, ils ont fourni certaines informations à la Commission.
10 Agroexpansión, Cetarsa et WWTE, par lettres du 15 février 2002, et Taes, par lettre du 18 février 2002, ont fourni certaines informations supplémentaires à la Commission.
11 Par la suite, la Commission a envoyé plusieurs demandes de renseignements aux transformateurs, à l’Anetab et à la FNCT sur le fondement de l’article 11 du règlement n° 17. Elle a également demandé des renseignements au ministère de l’Agriculture, de la Pêche et de l’Alimentation espagnol à propos de la réglementation espagnole en matière de produits agricoles.
12 Le 11 décembre 2003, la Commission a engagé la procédure à l’origine de la présente affaire et a adopté une communication des griefs qu’elle a adressée à 20 entreprises ou associations, dont les transformateurs, la requérante, Intabex, l’Anetab, la FNCT et Deltafina SpA. Deltafina est une société italienne qui a pour activités principales la première transformation de tabac brut en Italie et la commercialisation de tabac transformé. Elle appartient au même groupe de sociétés que Taes, à savoir celui à la tête duquel se trouve une société américaine, Universal Corp.
13 Les entreprises et associations en cause ont eu accès au dossier d’instruction de la Commission sous la forme d’une copie sur CD-ROM, qui leur a été envoyée, et ont transmis des observations écrites en réponse aux griefs soulevés par cette dernière.
14 Une audition s’est tenue le 29 mars 2004.
15 Après avoir consulté le comité consultatif en matière d’ententes et de positions dominantes, et au vu du rapport final du conseiller-auditeur, la Commission a adopté, le 20 octobre 2004, la décision C (2004) 4030 final, relative à une procédure d’application de l’article 81, paragraphe 1, [CE] (affaire COMP/C.38.238/B.2 − Tabac brut – Espagne) (ci-après la « décision attaquée »), dont un résumé est publié au Journal officiel de l’Union européenne du 19 avril 2007 (JO L 102, p. 14).
2. Décision attaquée
16 La décision attaquée concerne deux ententes horizontales conclues et mises en œuvre sur le marché espagnol du tabac brut.
17 La première entente, qui impliquait les transformateurs et Deltafina, avait pour objet de fixer, chaque année, pendant la période 1996/2001, le prix moyen de livraison (maximal) de chaque variété de tabac brut, toutes qualités confondues, ainsi que de répartir les quantités de chaque variété de tabac brut que chacun des transformateurs pouvait acheter auprès des producteurs (voir, notamment, considérants 74 à 76 et 276 de la décision attaquée). De 1999 à 2001, les transformateurs et Deltafina étaient également convenus des fourchettes de prix par grade qualitatif de chaque variété de tabac brut figurant dans les tableaux annexés aux « contrats de culture » ainsi que des « conditions complémentaires », à savoir le prix minimal moyen par producteur et le prix minimal moyen par groupement de producteurs (voir, notamment, considérants 77 à 83 et 276 de la décision attaquée).
18 Il sera fait référence ci-après à l’entente décrite au point 17 ci-dessus par les termes « entente des transformateurs ».
19 La seconde entente identifiée dans la décision attaquée impliquait les trois syndicats agricoles espagnols, à savoir l’Asociación agraria de jóvenes agricultores (ci-après l’« ASAJA »), l’Unión de pequeños agricultores (ci-après l’« UPA ») et la Coordinadora de organizaciones de agricultores y ganaderos (ci-après la « COAG »), ainsi que la Confederación de cooperativas agrarias de España (ci-après la « CCAE »). Cette entente avait pour objet de fixer chaque année, pendant la période 1996/2001, les fourchettes de prix par grade qualitatif de chaque variété de tabac brut figurant dans les tableaux annexés aux « contrats de culture » ainsi que les « conditions complémentaires » (voir, notamment, considérants 77 à 83 et 277 de la décision attaquée).
20 Il sera fait référence ci-après à l’entente décrite au point 19 ci-dessus par les termes « entente des représentants des producteurs ».
21 Dans la décision attaquée, la Commission a considéré que chacune de ces ententes constituait une infraction unique et continue à l’article 81, paragraphe 1, CE (voir, notamment, considérants 275 à 277 de la décision attaquée).
22 À l’article 1er de la décision attaquée, elle a imputé la responsabilité de l’entente des transformateurs à ces derniers, à Deltafina, à la requérante et aux sociétés mères de WWTE, à savoir Standard Commercial Corp. (ci-après « SCC »), Standard Commercial Tobacco Co., Inc. (ci-après « SCTC ») et Trans-Continental Leaf Tobacco Corp. Ltd (ci-après « TCLT »), et celle de l’entente des représentants des producteurs à l’ASAJA, à l’UPA, à la COAG et à la CCAE (ci-après, prises ensemble, les « représentants des producteurs »).
23 À l’article 2 de la décision attaquée, la Commission a ordonné à ces entreprises et aux représentants des producteurs de mettre immédiatement fin, s’ils ne l’avaient pas déjà fait, aux infractions visées à l’article 1er et de s’abstenir désormais de toute pratique restrictive ayant un objet ou un effet identique ou équivalent.
24 À l’article 3 de la décision attaquée, la Commission a infligé des amendes auxdites entreprises ainsi qu’aux représentants des producteurs, en tenant la requérante pour solidairement responsable du paiement de l’amende infligée à Agroexpansión et SCC, SCTC et TCLT du paiement de celle infligée à WWTE (voir points 61 et 62 ci-après).
3. Destinataires de la décision attaquée
25 Le point 2.4 de la décision attaquée est consacré à la question des destinataires (considérants 357 à 400 de la décision attaquée).
26 Tout d’abord, la Commission y a exposé qu’il était établi que les transformateurs et Deltafina avaient participé directement à l’entente des transformateurs et les représentants des producteurs à l’entente des représentants des producteurs, de sorte que chacune de ces entreprises et associations « [était] appelée à assumer la responsabilité de l’infraction et [était] par conséquent destinataire de la [décision attaquée] » (considérants 357 et 358 de la décision attaquée). Aux considérants 359 à 369 de cette décision, elle a apprécié, plus particulièrement, le rôle de Deltafina dans l’entente des transformateurs.
27 Ensuite, la Commission a examiné la question de l’imputabilité du comportement infractionnel d’une filiale à sa société mère, relevant que, en l’espèce, celle-ci se posait dans trois cas, en l’occurrence ceux d’Agroexpansión, de WWTE et de Taes (considérants 370 à 400 de la décision attaquée).
28 À cet égard, en premier lieu, la Commission a rappelé les principes applicables, selon elle, en la matière (considérants 371 à 374 de la décision attaquée).
29 Plus particulièrement, elle a exposé ce qui suit :
– pour déterminer si une société mère doit être considérée comme responsable du comportement illicite de sa filiale, il est nécessaire d’établir que cette dernière « ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l’essentiel les instructions qui lui sont imparties par la société mère » (arrêt de la Cour du 14 juillet 1972, Imperial Chemical Industries/Commission, 48/69, Rec. p. 619, points 132 et 133) ;
– selon une jurisprudence constante, lorsque la société mère détient la totalité du capital de sa filiale, il peut légitimement être supposé qu’elle exerce effectivement une influence déterminante sur le comportement de celle-ci (arrêts de la Cour du 25 octobre 1983, AEG-Telefunken/Commission, 107/82, Rec. p. 3151, point 50, et du 16 novembre 2000, Stora Kopparbergs Bergslags/Commission, C‑286/98 P, Rec. p. I‑9925, point 29 ; arrêt du Tribunal du 20 avril 1999, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, dit « PVC II », T‑305/94 à T‑307/94, T‑313/94 à T‑316/94, T‑318/94, T‑325/94, T‑328/94, T‑329/94 et T‑335/94, Rec. p. II‑931, points 961 et 984) ;
– cette supposition peut être confirmée par des « facteurs particuliers propres à certaines affaires » ;
– dans le cas des filiales qui ne sont pas contrôlées à 100 %, une société mère peut, selon la Cour, influencer la politique de sa filiale lorsqu’elle détient, au moment où l’infraction est commise, la majorité du capital de celle-ci (arrêt Imperial Chemical Industries/Commission, précité, point 136) ou lorsqu’elle est « constamment » informée des pratiques de ladite filiale et qu’elle détermine directement son comportement (arrêt AEG-Telefunken/Commission, précité, point 52) ;
– selon une jurisprudence constante, la notion d’entreprise, placée dans le contexte du droit de la concurrence, doit être comprise comme désignant une unité économique du point de vue de l’objet de l’accord en cause, même si, du point de vue juridique, cette unité économique est constituée de plusieurs personnes, physiques ou morales (arrêt du Tribunal du 20 mars 2002, HFB e.a./Commission, T‑9/99, Rec. p. II‑1487, point 66, renvoyant à l’arrêt de la Cour du 12 juillet 1984, Hydrotherm Gerätebau, 170/83, Rec. p. 2999, point 11).
30 En second lieu, avant d’examiner plus en détail le cas d’Agroexpansión ainsi que celui de WWTE, la Commission a indiqué, au considérant 375 de la décision attaquée, ce qui suit :
« En l’espèce, trois des quatre transformateurs espagnols de tabac brut sont contrôlés (à 100 % ou à 90 %) par des multinationales américaines. Il existe par ailleurs d’autres éléments factuels qui confirment la présomption selon laquelle le comportement d’Agroexpansión et de WWTE doit être imputé à leur[s] société[s] mère[s] respective[s]. Dans ce cas, les deux sociétés – la société mère et sa filiale – doivent être considérées comme solidairement responsables des infractions constatées dans la […] décision [attaquée]. »
31 Au considérant 376 de la décision attaquée, la Commission a ajouté ce qui suit :
« [En revanche], après l’envoi de la communication des griefs et l’audition des parties, il est apparu que les preuves du dossier ne pouvaient pas justifier une conclusion similaire au sujet des participations d’Universal […] et d’Universal Leaf [Tobacco Co. Inc.] dans Taes et Deltafina. En fait, [à part] le lien soci[al] entre les sociétés mères et leurs filiales, le dossier ne contient aucune indication de participation matérielle d’Universal […] et d’Universal Leaf dans les faits examinés dans la [décision attaquée]. Il ne conviendrait donc pas d’en faire les destinataires d’une décision dans cette affaire. La même conclusion s’appliquerait a fortiori à Intabex, puisque sa participation de 100 % dans Agroexpansión était purement financière. »
32 Aux considérants 377 à 386 de la décision attaquée, la Commission a examiné le cas d’Agroexpansión et du groupe Dimon.
33 La Commission a notamment relevé que, depuis le second semestre de l’année 1997, Agroexpansión était entièrement contrôlée par la requérante, et ce par l’intermédiaire de la filiale à 100 % de cette dernière, Intabex (considérant 377 de la décision attaquée). Elle en a déduit qu’il était légitime de présumer que, à tout le moins depuis ce moment, la requérante exerçait une influence déterminante sur le comportement d’Agroexpansión (considérant 378, première phrase, de la décision attaquée). La Commission a ajouté que d’autres éléments de son dossier – décrits au considérant 379 de la décision attaquée – confirmaient la « présomption [selon laquelle la requérante] était en mesure d’exercer une influence déterminante » (considérant 378, seconde phrase, de la décision attaquée). Au considérant 380 de la décision attaquée, elle a indiqué qu’il ressortait de ce qui précède que « [la requérante] était informée des pratiques de sa filiale qui font l’objet de la présente décision ainsi que du contexte dans lequel elles se déroulaient et que dans la mesure où, depuis 1997, [la requérante détenait] la totalité du capital de sa filiale, elle était en mesure d’exercer effectivement une influence sur le comportement de sa filiale ». Au considérant 382 de cette décision, elle a précisé que « [l]es éléments de fait qu’Agroexpansión a portés à l’attention de [la requérante] dans sa correspondance auraient dû provoquer une réaction immédiate de sa part, soit prenant la distance qu’il fallait par rapport à toute infraction possible aux règles de concurrence, soit exigeant que la direction d’Agroexpansión mette fin à tout comportement potentiellement anticoncurrentiel », avant de constater que « [la requérante] n’[avait] finalement rien fait de ce genre ».
34 Par ailleurs, au considérant 381 de la décision attaquée, la Commission a considéré comme non fondés les arguments que la requérante avait fait valoir dans sa réponse à la communication des griefs afin de démontrer qu’Agroexpansión se comportait de façon autonome sur le marché.
35 Enfin, la Commission a rejeté l’allégation de la requérante selon laquelle elle avait violé le principe de non-discrimination en tenant celle-ci pour responsable du comportement infractionnel de sa filiale, alors qu’elle n’en avait pas fait de même s’agissant de la société mère de Cetarsa, à savoir Sociedad estatal de participaciones industriales (ci-après « Sepi »). La Commission a justifié cette différence de traitement par le fait que, contrairement à ce que la requérante avait affirmé, « [son] dossier […] ne [contenait] pas de communication directe entre Cetarsa et Sepi sur l’objet de la présente affaire », que « la participation de Sepi dans Cetarsa [paraissait] essentiellement financière, analogue au lien entre Intabex et Agroexpansión », que « Cetarsa (contrairement à Agroexpansión) [regroupait] toute l’activité de transformation du tabac du groupe Sepi et, pour la même raison, [était] manifestement gérée séparément » et, enfin, que « Cetarsa n’[était] pas [une] filiale à 100 % de Sepi » (considérant 384 de la décision attaquée).
36 La Commission a conclu de ces différents éléments que la requérante « [devait] être tenue conjointement responsable, avec Agroexpansión, du comportement de cette dernière établi par la [décision attaquée] pour la période allant du second semestre de 1997 au 10 août 2001 » (considérant 386 de la décision attaquée).
37 Aux considérants 387 à 400 de la décision attaquée, la Commission a examiné le cas de WWTE. Elle a constaté que, pendant la période s’étendant de 1995 jusqu’à mai 1998, cette dernière était conjointement contrôlée par SCC (à travers SCTC et TCLT) et par le président de WWTE et sa famille, et a énoncé une série d’éléments qui établiraient que, pendant cette même période, SCC « et/ou ses filiales » avaient exercé une influence effective sur le comportement de WWTE en Espagne (considérant 391 de la décision attaquée). S’agissant de la période s’étendant de mai 1998 jusqu’à la date de la décision attaquée, la Commission a invoqué une série d’éléments qui démontreraient que SCC, soit directement soit à travers SCTC et TCLT, avait le contrôle exclusif de WWTE et exerçait une influence déterminante sur la politique commerciale de cette dernière. Elle a ajouté que « [l]es arguments avancés par SCC dans sa réponse à la communication des griefs ne [justifiaient] pas de conclusion différente à ce propos » (considérant 399 de la décision attaquée). Eu égard à ces différents éléments, la Commission a conclu que, depuis 1996 au moins, « SCC et/ou ses filiales SCTC et TCLT » exerçaient une influence déterminante sur la politique commerciale de WWTE et qu’elles devaient donc être tenues pour solidairement responsables des pratiques reprochées à cette dernière et figurer parmi les destinataires de la décision attaquée (considérant 400 de la décision attaquée).
4. Détermination du montant des amendes
38 Aux considérants 404 à 458 de la décision attaquée, la Commission a examiné la question des amendes à infliger aux destinataires de celle-ci.
39 Les montants des amendes ont été déterminés par la Commission en fonction de la gravité et de la durée des infractions en cause, soit les deux critères explicitement mentionnés à l’article 23, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 [CE] et 82 [CE] (JO 2003, L 1, p. 1), et à l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17, qui était, aux termes de la décision attaquée, applicable au moment de ces infractions (considérants 404 et 405 de la décision attaquée).
40 Aux fins de fixer le montant de l’amende infligée à chacun des destinataires, la Commission a fait application de la méthode définie dans les lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 et de l’article 65, paragraphe 5, [CA] (JO 1998, C 9, p. 3, ci-après les « lignes directrices »), même si elle ne s’y est pas explicitement référée. Dans la décision attaquée, la Commission a également apprécié si, et dans quelle mesure, les destinataires satisfaisaient aux exigences fixées par la communication sur la coopération.
Montant de départ des amendes
41 Tout d’abord, au considérant 414 de la décision attaquée, la Commission a qualifié les infractions de « très graves », après avoir examiné, aux considérants 408 à 413 de cette décision, leur nature propre, leur impact concret sur le marché, l’étendue du marché géographique en cause et la taille du marché du produit en cause.
42 Ensuite, la Commission a estimé, au considérant 415 de la décision attaquée, qu’il convenait de « tenir compte du poids spécifique de chaque entreprise et donc de l’incidence réelle de son comportement illicite sur la concurrence afin que l’effet dissuasif de l’amende infligée à chaque entreprise soit proportionné à sa contribution au comportement illégal à sanctionner ».
43 La Commission a distingué l’entente des transformateurs (considérants 416 à 424 de la décision attaquée) de celle des représentants des producteurs (considérants 425 à 431 de la décision attaquée).
44 S’agissant de l’entente des transformateurs, en premier lieu, la Commission a estimé que « les amendes [devaient] être échelonnées eu égard à la contribution au comportement illégal et à la position sur le marché occupée par chaque partie en cause » (considérant 416 de la décision attaquée).
45 À cet égard, la Commission a déclaré que « c’[était] Deltafina qui [devait] recevoir le montant de départ de l’amende le plus élevé en raison de sa position de premier plan sur le marché en tant qu’acheteur principal du tabac transformé espagnol » (considérant 417 de la décision attaquée).
46 En ce qui concerne les transformateurs, la Commission a jugé que la « contribution » de ceux-ci aux pratiques illégales « [pouvait] être considérée en gros comme similaire » (considérant 418 de la décision attaquée). Elle a estimé qu’il convenait, toutefois, de tenir compte de leurs tailles différentes et de leurs parts de marché respectives et, sur cette base, les a répartis en trois catégories.
47 Ainsi, la Commission a placé Cetarsa dans une première catégorie, qualifiée de « particulière », au motif qu’elle était « de loin le premier transformateur espagnol » et devait, de ce fait, se voir imposer le montant de départ le plus élevé (considérant 419 de la décision attaquée). Elle a placé Agroexpansión et WWTE dans une deuxième catégorie en indiquant qu’elles avaient chacune une part de marché de 15 % environ et devaient se voir imposer le même montant de départ (considérant 420 de la décision attaquée). Enfin, Taes a été placée dans une troisième catégorie au motif qu’elle n’avait qu’une part de marché de 1,6 % et devait, dès lors, se voir imposer le montant de départ le plus bas (considérant 421 de la décision attaquée).
48 En second lieu, afin d’assurer à l’amende un effet suffisamment dissuasif, la Commission a considéré qu’il y avait lieu d’appliquer un coefficient multiplicateur de 1,5 – soit une majoration de 50 % – au montant de départ déterminé pour WWTE et un coefficient multiplicateur de 2 – soit une majoration de 100 % – au montant de départ déterminé pour Agroexpansión (considérant 423 de la décision attaquée). Elle estimait, en effet, qu’il y avait lieu de tenir compte du fait que, malgré leur part de marché relativement limitée sur le marché de l’achat de tabac brut espagnol, ces deux transformateurs appartenaient à des multinationales disposant d’une force économique et financière considérable et que, « en outre », ils avaient agi « sous l’influence décisive de leurs maisons mères respectives » (considérant 422 de la décision attaquée).
49 Eu égard à ces différents éléments, la Commission a fixé comme suit le montant de départ des amendes pour les transformateurs et Deltafina au considérant 424 de la décision attaquée :
– Deltafina : 8 000 000 euros ;
– Cetarsa : 8 000 000 euros ;
– Agroexpansión : 1 800 000 euros x 2 = 3 600 000 euros ;
– WWTE : 1 800 000 euros x 1,5 = 2 700 000 euros ;
– Taes : 200 000 euros.
50 S’agissant de l’entente des représentants des producteurs, la Commission a considéré qu’il n’y avait lieu d’infliger à chacun de ceux-ci qu’une amende symbolique de 1 000 euros (considérants 425 et 430 de la décision attaquée). Elle a justifié sa position par le fait que « le cadre réglementaire entourant la négociation collective des contrats types pouvait entraîner un degré considérable d’incertitude quant à la légalité du comportement des représentants des producteurs et des transformateurs dans le contexte bien précis de la négociation collective des accords types » (considérant 428 de la décision attaquée), et ce en se fondant sur certains éléments mentionnés au considérant 427 de la décision attaquée. Elle a également relevé que « l’existence et les résultats des négociations sur les contrats types étaient généralement dans le domaine public et […] aucune autorité n’a[vait] jamais mis en cause leur compatibilité avec soit le droit communautaire, soit le droit espagnol avant l’ouverture de la présente procédure » (considérant 429 de la décision attaquée).
Montant de base des amendes
51 Aux considérants 432 et 433 de la décision attaquée, la Commission a examiné la question de la durée de l’infraction reprochée aux transformateurs et à Deltafina. Elle a fixé cette durée à cinq ans et quatre mois, ce qui correspondait à une infraction de longue durée. Par conséquent, elle a majoré de 50 % le montant de départ de l’amende infligée à chacun des transformateurs et à Deltafina.
52 Partant, les montants de base des amendes se sont établis comme suit :
– Deltafina : 12 000 000 euros ;
– Cetarsa : 12 000 000 euros ;
– Agroexpansión : 5 400 000 euros ;
– WWTE : 4 050 000 euros ;
– Taes : 300 000 euros ;
– l’ASAJA : 1 000 euros ;
– l’UPA : 1 000 euros ;
– la COAG : 1 000 euros ;
– la CCAE : 1 000 euros (considérant 434 de la décision attaquée).
Circonstances aggravantes et atténuantes
53 Le montant de base de l’amende infligée à Deltafina a été majoré de 50 % au titre des circonstances aggravantes au motif que cette entreprise avait joué un rôle de meneur dans le cadre de l’entente des transformateurs (considérants 435 et 436 de la décision attaquée).
54 Au titre des circonstances atténuantes, la Commission a relevé, au considérant 437 de la décision attaquée, que « [l]es mêmes facteurs exposés aux considérants 427 à 429 [de la décision attaquée pouvaient] s’appliquer au comportement des transformateurs en ce qui concerne uniquement leurs négociations publiques et la conclusion de contrats types (notamment les négociations sur les fourchettes de prix et les conditions complémentaires) avec les représentants des producteurs ».
55 Au considérant 438 de la décision attaquée, la Commission a ajouté que, s’agissant des accords « secrets » relatifs au prix moyen de livraison (maximal) et à la répartition des quantités de chaque variété de tabac brut conclus par les transformateurs, les pratiques de ces derniers étaient « allées nettement au-delà de ce que prévoyaient le cadre juridique applicable, les négociations publiques et les accords avec les représentants des producteurs ». Elle a toutefois reconnu que « les négociations publiques entre les représentants des producteurs et les transformateurs [avaient] déterminé, tout au moins dans une certaine mesure, le cadre matériel (en particulier en ce qui concerne les occasions de se concerter et d’adopter une position commune) dans lequel les transformateurs [avaient] pu développer, outre la position commune qu’ils adopteraient dans le contexte des négociations publiques, leur stratégie secrète sur les prix moyens de livraison (maximaux) et les quantités ».
56 Eu égard aux éléments mentionnés aux points 54 et 55 ci-dessus, la Commission a décidé de réduire à concurrence de 40 % les montants de base des amendes infligées aux transformateurs et à Deltafina (considérant 438 de la décision attaquée). Le montant de base de l’amende infligée à Agroexpansión a, ainsi, été porté à 3 240 000 euros (considérant 439 de la décision attaquée).
Limite maximale de l’amende prévue à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003
57 Aux considérants 440 à 447 de la décision attaquée, la Commission a examiné s’il y avait lieu d’adapter les montants de base ainsi calculés pour les différents destinataires afin qu’ils n’excèdent pas la limite de 10 % du chiffre d’affaires prévue par l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003.
58 Au considérant 441 de la décision attaquée, la Commission a exposé que, lorsque les sociétés en cause appartiennent à un groupe, qu’il est établi que les sociétés mères de ces sociétés ont exercé une influence déterminante sur ces dernières et que, par conséquent, ces sociétés mères sont solidairement responsables du paiement des amendes infligées à leur filiale, c’est le chiffre d’affaires mondial du groupe qui doit être pris en considération pour déterminer la limite maximale susvisée.
59 Après avoir rappelé, au considérant 442 de la décision attaquée, que la requérante était solidairement responsable du paiement de l’amende imposée à Agroexpansión, la Commission a estimé, au considérant 446 de cette décision, que le montant de ladite amende ne devait pas être adapté, le chiffre d’affaires consolidé de la requérante s’élevant à 1 271 700 000 dollars des États-Unis (USD) en 2003. Le montant de l’amende d’Agroexpansión, avant application de la communication sur la coopération, est, ainsi, resté fixé à 3 240 000 euros (considérant 447 de la décision attaquée).
Application de la communication sur la coopération et montant final des amendes
60 Aux considérants 448 à 456 de la décision attaquée, la Commission s’est prononcée sur l’application de la communication sur la coopération dans le cas des transformateurs et de Deltafina. Elle a accordé une réduction d’amende de 20 % à Agroexpansión conformément au point D, paragraphe 2, premier tiret, de cette communication (considérant 454 de la décision attaquée).
61 Conformément à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, la Commission a fixé les montants des amendes comme suit :
– Deltafina : 11 880 000 euros ;
– Cetarsa : 3 631 500 euros ;
– Agroexpansión : 2 592 000 euros ;
– WWTE : 1 822 500 euros ;
– Taes : 108 000 euros ;
– l’ASAJA : 1 000 euros ;
– l’UPA : 1 000 euros ;
– la COAG : 1 000 euros ;
– la CCAE : 1 000 euros (considérant 458 de la décision attaquée).
62 La requérante a été déclarée solidairement responsable du paiement de l’amende infligée à Agroexpansión et SCC, SCTC et TCLT du paiement de celle infligée à WWTE (considérant 458 et article 3 de la décision attaquée).
Procédure et conclusions des parties
63 Le 21 janvier 2005, SCC, SCTC et TCLT ont introduit un recours visant à l’annulation de la décision attaquée (affaire T‑24/05) et WWTE un recours visant à la réduction de l’amende qui lui a été infligée par cette décision (affaire T‑37/05).
64 Le 22 janvier 2005, Agroexpansión a également introduit un recours visant à la réduction de l’amende qui lui a été infligée par la décision attaquée (affaire T‑38/05).
65 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 28 janvier 2005, la requérante a introduit le présent recours.
66 Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 1er août 2005, la requérante a demandé la jonction de la présente affaire avec les affaires T‑24/05, T‑37/05 et T‑38/05.
67 La Commission a indiqué au Tribunal, par lettre déposée au greffe du Tribunal le 7 septembre 2005, qu’elle considérait que la jonction des quatre affaires ne permettrait pas d’améliorer sensiblement l’efficacité de la procédure et qu’elle lui laissait le soin de décider s’il convenait ou non de faire droit à la demande de jonction.
68 Le Tribunal n’a pas donné suite à cette demande de jonction.
69 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 de son règlement de procédure, a invité la Commission à répondre à certaines questions. La Commission a déféré à cette demande dans le délai imparti.
70 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience qui s’est tenue le 17 juin 2009.
71 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler les articles 1er, 3 et 5 de la décision attaquée dans la mesure où ils la concernent ;
– à titre subsidiaire, réduire le montant de l’amende que la Commission a infligée à Agroexpansión et, à titre solidaire, à elle-même ;
– condamner la Commission aux dépens.
72 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours à l’exception du troisième moyen, lequel doit être partiellement accueilli ;
– condamner la requérante à supporter ses propres dépens ainsi qu’une partie des siens ou, à titre subsidiaire, condamner chaque partie à supporter ses propres dépens.
En droit
73 Dans la requête, la requérante invoque, à l’appui du recours, quatre moyens, tirés :
– le premier, de la violation de l’article 81, paragraphe 1, CE, de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 et du principe de proportionnalité ;
– le deuxième, de la violation des principes de proportionnalité et de responsabilité personnelle ;
– le troisième, de la violation des principes de proportionnalité et de responsabilité personnelle ainsi que de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 ;
– le quatrième, de la violation du principe de protection de la confiance légitime.
74 Lors de l’audience, la requérante a invoqué un moyen supplémentaire, tiré de la violation de l’obligation de motivation.
75 Les premier, deuxième et cinquième moyens sont invoqués, en substance, au soutien des conclusions tendant à l’annulation partielle de la décision attaquée. Les troisième et quatrième moyens sont invoqués au soutien des conclusions tendant à la réformation de cette décision.
76 Le cinquième moyen sera examiné après le premier, et le troisième moyen après le quatrième.
1. Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 81, paragraphe 1, CE, de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 et du principe de proportionnalité
Arguments des parties
77 La requérante prétend que la Commission a commis une erreur manifeste en considérant qu’elle exerçait une influence déterminante sur Agroexpansión pendant la période infractionnelle et en la tenant, de ce fait, pour solidairement responsable de l’infraction. Partant, selon la requérante, la Commission n’était pas en droit, d’une part, de lui adresser la décision attaquée et, d’autre part, de se fonder sur son chiffre d’affaires global pour l’application du plafond de 10 % du chiffre d’affaires prévu par l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003.
78 Au soutien de ses allégations, en premier lieu, la requérante soutient qu’il ressort de la jurisprudence et de la pratique décisionnelle de la Commission que le seul fait qu’une société mère détienne la totalité du capital de sa filiale ne suffit pas pour lui imputer la responsabilité du comportement infractionnel de cette dernière. Il devrait, en outre, être clairement démontré que ladite société mère a participé directement aux pratiques illégales en cause, est responsable de la mise en œuvre de celles-ci, a assisté à des réunions de l’entente ou était directement impliquée dans l’infraction, par exemple en ayant donné instruction à sa filiale de commettre celle-ci. La requérante invoque, en particulier, les points 28 et 29 de l’arrêt Stora Kopparbergs Bergslags/Commission, point 29 supra.
79 En deuxième lieu, la requérante fait valoir que les éléments invoqués par la Commission au considérant 379 de la décision attaquée ne démontrent pas qu’elle exerçait une influence déterminante sur le comportement d’Agroexpansión. Elle réfute, plus particulièrement, l’allégation de la Commission selon laquelle elle était informée des pratiques illégales en cause.
80 À cet égard, premièrement, la requérante conteste avoir reçu les « rapports d’activités » et « rapports de terrain » mentionnés à ce considérant. Elle indique que, si ces rapports étaient systématiquement traduits en anglais, c’était afin de faciliter l’exercice de ses fonctions par l’un des membres du conseil d’administration d’Agroexpansión, M. T., qui ne parlait pas l’espagnol. Elle conteste que ce dernier ait été nommé membre de ce conseil d’administration afin d’y représenter les intérêts du groupe Dimon et précise qu’il a d’ailleurs été temporairement déchargé de toutes ses responsabilités au sein de ce groupe à la suite d’une action qu’elle avait intentée contre les anciens actionnaires d’Intabex.
81 Deuxièmement, la requérante réfute l’allégation, figurant au même considérant, selon laquelle il existe de nombreux exemples de courriers émanant d’Agroexpansión l’informant des pratiques illicites en cause. S’agissant, plus particulièrement, de la télécopie du 14 décembre 1998 de M. B., le directeur général d’Agroexpansión, elle aurait été adressée non à la requérante, mais à M. D., un « employé du département financier de Dimon International, Inc. », et contiendrait seulement des informations relatives à un contrat de vente de tabac transformé conclu entre Agroexpansión et Deltafina. En ce qui concerne le courrier électronique de M. B. à M. S. du 30 octobre 2000, il aurait pour objet principal d’informer ce dernier d’un risque de grève de la part des producteurs de tabac. En outre, selon la requérante, M. S. était employé non par elle-même, mais par Dimon International Services, était chargé de la coordination des ventes de tabac transformé en Europe et n’était pas membre du conseil d’administration ou dirigeant de l’une quelconque des sociétés appartenant au groupe Dimon. Les mêmes considérations vaudraient pour ce qui est du courrier électronique adressé par M. B. à M. S. le 9 mai 2001.
82 Troisièmement, en ce qui concerne les autres courriers mentionnés au considérant 379 de la décision attaquée, la requérante soutient qu’aucun de ceux-ci ne se référait directement ou indirectement aux pratiques illicites en cause ou à la politique d’achat de tabac brut espagnol d’Agroexpansión.
83 En troisième lieu, la requérante affirme qu’Agroexpansión a toujours agi en tant qu’entité économique autonome sur le marché de l’achat de tabac brut en Espagne, en déterminant elle-même sa propre politique commerciale.
84 Au soutien de cette affirmation, la requérante, après avoir rappelé qu’Agroexpansión disposait d’une « direction locale », invoque les éléments suivants :
– le 18 novembre 1997, lorsqu’elle a acquis, par l’intermédiaire d’Intabex, 100 % des actions d’Agroexpansión, il a été décidé de maintenir à leur poste les dirigeants de celle-ci, en particulier son actionnaire fondateur et directeur général (jusqu’en décembre 2004), M. B. ;
– conformément à un « contrat de direction » conclu à la même date entre Agroexpansión et M. B. (ci-après le « contrat de direction »), seul ce dernier pouvait conclure les contrats d’achat de tabac brut et définir et mettre en œuvre la politique d’achat de tabac brut de cette société ;
– les décisions prises par M. B. en matière d’achat de tabac brut n’étaient pas subordonnées à une approbation préalable ou à une ratification postérieure du conseil d’administration d’Agroexpansión ;
– M. B. est le seul membre du conseil d’administration d’Agroexpansión à avoir participé aux réunions avec les autres transformateurs ou avec les producteurs de tabac brut ;
– aucun des quatre membres du conseil d’administration d’Agroexpansión n’était simultanément membre du conseil d’administration ou des organes de direction de la requérante ;
– elle n’a donné aucun ordre ou aucune instruction à Agroexpansión en rapport avec les réunions susvisées ou avec la politique d’achat de cette dernière ;
– elle n’a jamais mis en place le moindre mécanisme de contrôle des activités d’achat d’Agroexpansión.
85 La Commission conclut au rejet du premier moyen.
86 En premier lieu, la Commission affirme qu’il ressort de la jurisprudence et de sa pratique décisionnelle que, lorsqu’une société mère détient la totalité des actions de sa filiale, il peut être présumé qu’elle exerce effectivement une influence déterminante sur le comportement commercial de cette filiale et, partant, elle peut être tenue pour responsable de l’infraction commise par cette dernière. La Commission ne serait donc pas obligée de fournir des éléments de preuve supplémentaires. La Commission précise que la société mère peut renverser cette présomption en apportant des éléments de preuve suffisants de nature à démontrer que sa filiale se comporte en réalité de façon autonome sur le marché.
87 En deuxième lieu, la Commission conteste que la requérante ait effectué une telle démonstration en l’espèce. Elle estime que le fait qu’Agroexpansión dispose d’une direction locale propre n’est pas suffisant, en soi, pour établir qu’elle agissait de manière autonome et relève que le contrat de direction prévoit que M. B. est soumis aux « systèmes » et aux « procédures » imposés par le conseil d’administration de cette société.
88 En troisième lieu, la Commission soutient que son dossier contient des éléments confirmant que la requérante exerçait effectivement une influence déterminante sur le comportement d’Agroexpansión. Elle fait notamment valoir que M. T. avait été nommé membre du conseil d’administration de cette dernière afin d’y représenter les intérêts du groupe Dimon et qu’il n’est pas plausible, eu égard à l’importance de ses fonctions au sein de ce groupe, qu’il n’ait jamais informé la requérante des « rapports d’activités » et « rapports de terrain » mentionnés au considérant 379 de la décision attaquée. La Commission ajoute que, outre ces rapports, il ressort de différents courriers énoncés à ce considérant que la requérante était tenue informée par Agroexpansión des pratiques illégales en cause. Enfin, d’autres documents mentionnés au même considérant montreraient clairement que la requérante exerçait une influence déterminante sur certaines activités commerciales essentielles d’Agroexpansión, telles que la négociation et l’exécution de contrats avec Cetarsa et Deltafina, et qu’elle était informée par sa filiale des conditions d’achat et du cadre juridique en vigueur dans le secteur du tabac brut en Espagne.
Appréciation du Tribunal
89 Il convient de rappeler que le droit de la concurrence vise les activités des entreprises (arrêt de la Cour du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, Rec. p. I‑123, point 59) et que la notion d’entreprise comprend toute entité exerçant une activité économique, indépendamment du statut juridique de cette entité et de son mode de financement (arrêt de la Cour du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, Rec. p. I‑5425, point 112).
90 La jurisprudence a également précisé que la notion d’entreprise, placée dans ce contexte, doit être comprise comme désignant une unité économique, même si, du point de vue juridique, cette unité économique est constituée de plusieurs personnes physiques ou morales (arrêts de la Cour du 14 décembre 2006, Confederación Española de Empresarios de Estaciones de Servicio, C‑217/05, Rec. p. I‑11987, point 40, et du Tribunal du 15 septembre 2005, DaimlerChrysler/Commission, T‑325/01, Rec. p. II‑3319, point 85).
91 Lorsqu’une telle entité économique enfreint les règles de la concurrence, il lui incombe, selon le principe de la responsabilité personnelle, de répondre de cette infraction (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 8 juillet 1999, Commission/Anic Partecipazioni, C‑49/92 P, Rec. p. I‑4125, point 145 ; du 16 novembre 2000, Cascades/Commission, C‑279/98 P, Rec. p. I‑9693, point 78, et du 11 décembre 2007, ETI e.a., C‑280/06, Rec. p. I‑10893, point 39).
92 S’agissant de la question de savoir dans quelles circonstances une personne juridique qui n’est pas l’auteur de l’infraction peut néanmoins être sanctionnée, il résulte d’une jurisprudence constante que le comportement d’une filiale peut être imputé à la société mère notamment lorsque, bien qu’ayant une personnalité juridique distincte, cette filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l’essentiel les instructions qui lui sont données par la société mère (arrêts de la Cour Imperial Chemical Industries/Commission, point 29 supra, points 132 et 133 ; du 14 juillet 1972, Geigy/Commission, 52/69, Rec. p. 787, point 44, et du 21 février 1973, Europemballage et Continental Can/Commission, 6/72, Rec. p. 215, point 15), eu égard en particulier aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent ces deux entités juridiques (voir, par analogie, arrêts Dansk Rørindustri e.a./Commission, point 89 supra, point 117, et ETI e.a., point 91 supra, point 49).
93 En effet, dans une telle situation, la société mère et sa filiale font partie d’une même unité économique et, partant, forment une seule entreprise, au sens de la jurisprudence mentionnée aux points 89 et 90 ci-dessus. Ce n’est donc pas une relation d’instigation relative à l’infraction entre la société mère et sa filiale ni, à plus forte raison, une implication de la première dans ladite infraction, mais le fait qu’elles constituent une seule entreprise au sens de l’article 81 CE qui permet à la Commission d’adresser une décision imposant des amendes à la société mère (arrêt du Tribunal du 12 décembre 2007, Akzo Nobel e.a./Commission, T‑112/05, Rec. p. II‑5049, point 58).
94 Il ressort également de la jurisprudence que la Commission ne saurait se contenter de constater que la société mère est en mesure d’exercer une influence déterminante sur le comportement de sa filiale, mais doit également vérifier si cette influence a effectivement été exercée (voir, en ce sens, arrêts Imperial Chemical Industries/Commission, point 29 supra, point 137, et AEG-Telefunken/Commission, point 29 supra, point 50).
95 Dans le cas particulier où une société mère détient 100 % du capital de sa filiale ayant commis une infraction aux règles de la concurrence, d’une part, cette société mère peut exercer une influence déterminante sur le comportement de cette filiale (voir, en ce sens, arrêt Imperial Chemical Industries/Commission, point 29 supra, points 136 et 137) et, d’autre part, il existe une présomption simple selon laquelle ladite société mère exerce effectivement une influence déterminante sur le comportement de sa filiale (voir, en ce sens, arrêt AEG-Telefunken/Commission, point 29 supra, point 50, et arrêt PVC II, point 29 supra, points 961 et 984).
96 Dans ces conditions, il suffit que la Commission prouve que la totalité du capital d’une filiale est détenue par sa société mère pour présumer que cette dernière exerce une influence déterminante sur la politique commerciale de cette filiale. La Commission sera en mesure, par la suite, de considérer la société mère comme solidairement responsable pour le paiement de l’amende infligée à sa filiale, à moins que cette société mère, à laquelle il incombe de renverser cette présomption, n’apporte des éléments de preuve suffisants de nature à démontrer que sa filiale se comporte de façon autonome sur le marché (voir, en ce sens, arrêt Stora Kopparbergs Bergslags/Commission, point 29 supra, point 29).
97 S’il est vrai que la Cour a évoqué aux points 28 et 29 de l’arrêt Stora Kopparbergs Bergslags/Commission, point 29 supra, hormis la détention de 100 % du capital de la filiale, d’autres circonstances, telles que l’absence de contestation de l’influence exercée par la société mère sur la politique commerciale de sa filiale et la représentation commune des deux sociétés durant la procédure administrative, il n’en demeure pas moins que de telles circonstances n’ont été relevées par la Cour que dans le but d’exposer l’ensemble des éléments sur lesquels le Tribunal avait fondé son raisonnement et non pour subordonner la mise en œuvre de la présomption mentionnée au point 95 ci-dessus à la production d’indices supplémentaires relatifs à l’exercice effectif d’une influence de la société mère (arrêt du Tribunal du 8 octobre 2008, Schunk et Schunk Kohlenstoff-Technik/Commission, T‑69/04, Rec. p. II‑2567, point 57).
98 Enfin, il convient de préciser que la présomption tirée de la détention de la totalité du capital est susceptible de s’appliquer non seulement dans les cas de figure où il existe une relation directe entre la société mère et sa filiale, mais également dans des cas, comme celui de l’espèce, où cette relation est indirecte, par filiale interposée.
99 Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que, selon l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, la Commission peut, par voie de décision, infliger aux entreprises ayant commis une infraction à l’article 81, paragraphe 1, CE des amendes qui ne peuvent dépasser 10 % du chiffre d’affaires réalisé au cours de l’exercice social précédent par chacune des entreprises ayant participé à l’infraction. La même indication figurait à l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17.
100 Le chiffre d’affaires mentionné dans ces dispositions se rapporte, selon une jurisprudence constante, relative à l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17, au chiffre d’affaires global de l’entreprise concernée (arrêt de la Cour du 7 juin 1983, Musique Diffusion française e.a./Commission, 100/80 à 103/80, Rec. p. 1825, point 119 ; arrêts du Tribunal du 29 avril 2004, Tokai Carbon e.a./Commission, T‑236/01, T‑239/01, T‑244/01 à T‑246/01, T‑251/01 et T‑252/01, Rec. p. II‑1181, point 367, et du 8 juillet 2004, JFE Engineering e.a./Commission, T‑67/00, T‑68/00, T‑71/00 et T‑78/00, Rec. p. II‑2501, point 533), à savoir l’entreprise qui s’est vu imputer l’infraction et qui, de ce fait, a été déclarée responsable (arrêts du Tribunal du 20 mars 2002, ABB Asea Brown Boveri/Commission, T‑31/99, Rec. p. II‑1881, point 181, et du 4 juillet 2006, Hoek Loos/Commission, T‑304/02, Rec. p. II‑1887, point 116).
101 Quant à la notion d’« exercice social précédent » figurant à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, elle doit s’entendre comme visant l’exercice social qui précède l’adoption de la décision de la Commission, sauf dans les situations particulières où le chiffre d’affaires de ce dernier exercice social ne donne aucune indication utile sur la situation économique réelle de l’entreprise concernée et le niveau approprié de l’amende à infliger à celle-ci (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 7 juin 2007, Britannia Alloys & Chemicals/Commission, C‑76/06 P, Rec. p. I‑4405, points 25, 29 et 30), ce qui n’est pas le cas en l’espèce.
102 Il s’ensuit que la question qui se pose dans le cadre du présent moyen est de savoir si la Commission était fondée à considérer que, en l’espèce, l’entreprise concernée était constituée par Agroexpansión et la société se trouvant à la tête du groupe auquel elle appartient, à savoir la requérante. En cas de réponse affirmative à cette question, il y aura lieu de conclure, eu égard aux principes rappelés aux points 99 à 101 ci-dessus, que c’est à bon droit que, aux considérants 442 et 446 de la décision attaquée, la Commission a tenu compte du chiffre d’affaires consolidé réalisé par la requérante en 2003 pour l’application de la limite susvisée de 10 % du chiffre d’affaires.
103 Aux fins de l’examen de ladite question, il convient, tout d’abord, de déterminer quels sont les critères que la Commission a utilisés, dans la décision attaquée, pour imputer à une société mère la responsabilité de l’infraction commise par sa filiale, ainsi que leur conformité aux principes posés en la matière par la jurisprudence, et, ensuite, de vérifier si la Commission a correctement appliqué ces critères pour conclure à l’existence d’une entité économique unique entre Agroexpansión et la requérante.
Sur les critères utilisés par la Commission, dans la décision attaquée, pour imputer à une société mère la responsabilité de l’infraction commise par sa filiale
104 Il ressort de la décision attaquée que, pour imputer à une société mère la responsabilité de l’infraction commise par sa filiale et, par suite, la faire figurer, avec celle-ci, parmi les destinataires de cette décision et la déclarer solidairement responsable du paiement de l’amende infligée à ladite filiale, la Commission a suivi le raisonnement suivant.
105 La Commission est partie de la prémisse selon laquelle une telle imputation est possible lorsque la société mère et sa filiale font partie d’une même unité économique et, par voie de conséquence, constituent une seule entreprise au sens de l’article 81 CE (voir considérant 374 de la décision attaquée).
106 L’élément central sur lequel la Commission s’est fondée pour établir que la société mère et sa filiale se trouvent dans un tel cas de figure est l’absence d’autonomie de cette dernière en ce qui concerne son comportement sur le marché (voir considérant 371 de la décision attaquée), cette absence d’autonomie étant le corollaire de l’exercice d’une « influence déterminante » de la société mère sur le comportement de sa filiale (voir considérants 18, 372, 373, 378, 380, 381, 383, 391, 392, 397, 399, 400, 422 et 441 de la décision attaquée).
107 À cet égard, la Commission a estimé qu’elle ne pouvait se contenter de constater que la société mère avait la possibilité d’exercer une influence déterminante sur le comportement de sa filiale, mais qu’il lui incombait de démontrer que cette influence avait effectivement été exercée (voir, notamment, considérants 18, 376, 384, 391, 392, 397, 399 et 400 de la décision attaquée).
108 Ainsi, notamment, il ressort du considérant 384 de la décision attaquée que, si la Commission a estimé qu’il n’y avait pas lieu d’imputer à Sepi la responsabilité de l’infraction commise par Cetarsa, dont elle détenait pourtant près de 80 % du capital, c’est au motif qu’elle ne disposait dans son dossier d’aucun élément permettant d’établir que cette dernière ne déterminait pas de façon autonome son comportement sur le marché.
109 De même, il ressort du considérant 18 de la décision attaquée que la raison pour laquelle la Commission n’a pas tenu Universal ni sa filiale à 100 %, Universal Leaf, pour responsables du comportement infractionnel de la filiale à 90 % de celle-ci, Taes, est qu’elle ne disposait pas de preuves suffisantes de ce qu’elles exerçaient effectivement une influence déterminante sur cette dernière.
110 Ce sont les mêmes principes que la Commission a entendu appliquer dans le cas des sociétés mères de WWTE, s’agissant de la période antérieure à mai 1998. Ainsi, dans un premier temps, elle s’est attachée à démontrer que ces sociétés mères exerçaient un contrôle conjoint sur WWTE avec le président de celle-ci et deux membres de sa famille, laissant ainsi entendre qu’elles étaient en mesure d’exercer une influence déterminante sur le comportement de cette société (voir considérants 388 à 391 de la décision attaquée). Dans un second temps, la Commission, se fondant sur une série d’éléments énoncés au considérant 391 de la décision attaquée, s’est efforcée d’établir que lesdites sociétés mères exerçaient effectivement une telle influence sur le comportement de WWTE (voir considérants 391, 392 et 400 de la décision attaquée).
111 Par ailleurs, la Commission a relevé que, dans le cas particulier où une société mère détenait la totalité du capital de sa filiale, il pouvait, selon la jurisprudence, être présumé que la première exerçait effectivement une influence déterminante sur le comportement de la seconde (voir considérant 372 de la décision attaquée).
112 Toutefois, en l’espèce, pour imputer aux sociétés mères se trouvant dans un tel cas de figure la responsabilité de l’infraction commise par leur filiale, la Commission a choisi de ne pas se contenter d’avoir recours à cette présomption, mais de se fonder également sur des éléments de fait visant à établir que ces sociétés mères exerçaient effectivement une influence déterminante sur leur filiale et, partant, à corroborer ladite présomption (voir, notamment, considérants 372, 375, 376 et 378 de la décision attaquée).
113 Ainsi, il ressort expressément du considérant 18 de la décision attaquée que, si la Commission n’a pas tenu les sociétés mères faîtière et intermédiaire de Deltafina, à savoir Universal et Universal Leaf, pour responsables du comportement infractionnel de leur filiale, en dépit du fait qu’elles la contrôlaient à 100 %, c’est au motif qu’elle ne disposait pas de preuves suffisantes de ce qu’elles exerçaient effectivement une influence déterminante sur ladite filiale. C’est également dans ce sens qu’il convient de comprendre le considérant 376 de la décision attaquée, même s’il est rédigé en des termes quelque peu ambigus. Plus particulièrement, s’il est vrai que la Commission déclare, dans ce considérant, que son dossier ne contient « aucune indication de participation matérielle d’Universal [...] et d’Universal Leaf dans les faits examinés dans la [décision attaquée] », toutefois, lue en parallèle avec le considérant 18 de cette décision et replacée dans le contexte de celle-ci, cette déclaration ne saurait être interprétée comme signifiant que la raison pour laquelle elle n’a pas retenu la responsabilité de ces deux sociétés mères – ou d’une quelconque autre société mère – est leur absence d’implication dans l’infraction.
114 De même, il ressort tout aussi expressément du considérant 18 de la décision attaquée que le motif pour lequel la Commission n’a pas tenu Intabex pour responsable du comportement infractionnel d’Agroexpansión, alors même qu’elle contrôlait celle-ci à 100 %, est l’absence de preuves suffisantes quant à l’exercice effectif, par la première, d’une influence déterminante sur la seconde, sa participation dans celle-ci étant de nature purement financière (voir également considérant 376 de la décision attaquée).
115 En revanche, c’est précisément le fait que, s’agissant de la période postérieure à mai 1998, il existait prétendument de telles preuves en ce qui concerne les sociétés mères de WWTE, venant s’ajouter à la détention par les premières de la totalité – ou, pendant quelques mois seulement, la quasi-totalité – du capital de la seconde, qui a conduit la Commission à imputer à ces sociétés mères la responsabilité de l’infraction (voir, notamment, considérants 375, 393, 396 et 398 de la décision attaquée).
116 C’est la même méthode que la Commission a entendu appliquer dans le cas de la requérante. Ainsi, pour déclarer cette dernière responsable du comportement infractionnel d’Agroexpansión à partir du second semestre de l’année 1997, elle ne s’est pas contentée de se fonder sur la présomption découlant du fait que, depuis lors, elle détenait la totalité du capital d’Agroexpansión (voir considérants 375, 377 et 378 de la décision attaquée), mais a également tenu compte de certains éléments supplémentaires qui démontreraient qu’elle exerçait effectivement une influence déterminante sur le comportement de cette même société (voir considérants 375 et 378 à 380 de la décision attaquée).
117 Cela peut être déduit, notamment, de la seconde phrase du considérant 378 de la décision attaquée, même s’il y est indiqué que lesdits éléments supplémentaires confirment que la requérante était « en mesure » d’exercer une telle influence (voir point 33 ci-dessus). Il est vrai que, ainsi que la Commission le reconnaît elle-même dans sa réponse à une question écrite du Tribunal, cette phrase aurait pu être « formulée plus clairement ». Toutefois, lue en parallèle avec les considérants 372 et 377 de la décision attaquée ainsi qu’avec la première phrase du considérant 378 de cette décision, elle ne peut être comprise que dans le sens décrit au point 116 ci-dessus.
118 Enfin, la Commission a examiné si les arguments présentés par les filiales concernées (et/ou par leurs sociétés mères) dans leur réponse à la communication des griefs dans le but d’établir qu’elles se comportaient de façon autonome sur le marché pouvaient prospérer (voir, notamment, considérants 381 et 399 de la décision attaquée). Ainsi, s’agissant de ceux invoqués par la requérante, elle les a rejetés comme non concluants, en relevant, en particulier, que « l’existence d’une direction locale de sa filiale espagnole n’[excluait] pas la possibilité pour [la requérante] d’exercer une influence déterminante sur la même filiale » (considérant 381 de la décision attaquée).
119 Il doit être précisé que la Commission a retenu la méthode exposée aux points 105 à 107, 111 et 112 ci-dessus non seulement pour les sociétés mères faîtières, mais aussi pour les sociétés mères intermédiaires, ainsi que le démontre – s’agissant de ces dernières – le cas d’Universal Leaf, d’Intabex, de SCTC et de TCLT.
120 Il convient d’ajouter que cette méthode – sans préjudice de la question de savoir si elle a été correctement appliquée dans le cas de la requérante, question qui sera examinée ci-après – est totalement conforme aux principes posés en la matière par la jurisprudence, tels que rappelés aux points 89 à 98 ci-dessus.
121 Certes, s’agissant du cas particulier où une société mère détient la totalité du capital de sa filiale ayant commis une infraction aux règles de la concurrence, la Commission ne s’est pas fondée exclusivement sur la présomption consacrée par la jurisprudence (voir points 95 et 96 ci-dessus) pour démontrer que la première exerçait effectivement une influence déterminante sur la politique commerciale de la seconde, mais a également tenu compte d’autres éléments de fait visant à confirmer cet exercice.
122 Toutefois, en procédant de la sorte, la Commission n’a fait qu’augmenter le niveau de preuve requis pour qu’elle considère comme établi que la condition relative à l’exercice effectif d’une influence déterminante était remplie, tout en respectant pleinement la notion fondamentale d’unité économique qui sous-tend toute la jurisprudence relative à l’imputabilité de la responsabilité des infractions aux personnes juridiques constituant une même entreprise.
123 Il importe de préciser que, lorsque, dans une affaire mettant en cause une infraction impliquant plusieurs entreprises différentes, la Commission adopte, à l’intérieur du cadre fixé par la jurisprudence, une certaine méthode pour déterminer s’il y a lieu de retenir tant la responsabilité des filiales ayant matériellement commis cette infraction que celle de leurs sociétés mères, elle doit, sauf circonstances particulières, se fonder à cet effet sur les mêmes critères dans le cas de toutes ces entreprises. La Commission est, en effet, tenue de respecter le principe d’égalité de traitement, qui, selon une jurisprudence constante, requiert que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (arrêts de la Cour du 13 décembre 1984, Sermide, 106/83, Rec. p. 4209, point 28, et du Tribunal du 14 mai 1998, BPB de Eendracht/Commission, T‑311/94, Rec. p. II‑1129, point 309). Force est de constater que la Commission partage d’ailleurs ce point de vue lorsque, au considérant 384 de la décision attaquée, elle indique que, « si les circonstances précises qui peuvent [l’] amener […] à considérer une société mère comme responsable du comportement de sa filiale peuvent varier d’un cas à l’autre, il ne saurait s’agir pour autant d’une violation du principe de non-discrimination aussi longtemps que les principes de responsabilité sont appliqués d’une manière cohérente ».
Sur l’existence d’une entité économique unique entre la requérante et Agroexpansión
124 Il y a lieu d’examiner si la Commission a correctement appliqué les critères exposés aux points 105 à 107, 111 et 112 ci-dessus pour conclure à l’existence d’une entité économique unique entre la requérante et Agroexpansión à compter du second semestre de l’année 1997 et, partant, tenir la première pour solidairement responsable de l’infraction ainsi que du paiement de l’amende et la faire figurer parmi les destinataires de la décision attaquée.
125 Il est constant que, au cours de la période s’étendant du 18 novembre 1997 jusqu’à la date d’adoption de la décision attaquée, la requérante détenait, par l’intermédiaire d’Intabex, la totalité du capital d’Agroexpansión. Il ne saurait donc être contesté que, tout au long de cette période, la requérante était en mesure d’exercer une influence déterminante sur le comportement de cette dernière (voir point 95 ci-dessus).
126 Il convient, dès lors, de vérifier si, pour ce qui est de la même période, la condition relative à l’exercice effectif d’une influence déterminante par la requérante était également remplie, ainsi que le prétend la Commission.
127 À cet égard, il doit être rappelé que, dans la décision attaquée, s’agissant des filiales contrôlées à 100 % par leurs sociétés mères, la Commission a choisi de ne pas se contenter de se fonder sur la présomption visée aux points 95, 96 et 111 ci-dessus pour imputer à ces dernières la responsabilité de l’infraction commise par lesdites filiales, mais de tenir compte également d’éléments supplémentaires démontrant l’exercice effectif d’une influence déterminante (voir points 112 à 117 ci-dessus).
128 Il y a donc lieu d’examiner si les éléments retenus par la Commission dans la décision attaquée, venant s’ajouter à la détention par la requérante de la totalité du capital d’Agroexpansión, établissent à suffisance de droit que, pendant la période considérée, la première exerçait effectivement une influence déterminante sur le comportement de la seconde. Ces éléments sont énoncés au considérant 379 de la décision attaquée ainsi qu’aux notes en bas de page nos 303 à 305 de cette décision. Il s’agit, en substance, de différents rapports et courriers émanant d’Agroexpansión et destinés, selon la Commission, à la requérante.
129 Dans l’affirmative, il conviendra de vérifier si les allégations de la requérante, telles que reproduites aux points 83 et 84 ci-dessus, permettent d’infirmer cette conclusion.
– Sur les « rapports d’activités » et les « rapports de terrain »
130 La Commission invoque une série de « rapports d’activités » et de « rapports de terrain » rédigés par Agroexpansión, en relevant notamment qu’ils faisaient souvent état des pratiques illégales en cause. Ces rapports, qui sont au nombre de quatorze et couvrent une période s’étendant de décembre 1998 à mai 2001, sont énumérés à la note en bas de page n° 303 de la décision attaquée.
131 Tout d’abord, il convient de relever que lesdits rapports contiennent des informations détaillées non seulement sur divers aspects des activités commerciales d’Agroexpansión, tels que le déroulement des campagnes d’achat de tabac brut (quantités achetées, prix d’achat, etc.), les quantités de tabac brut transformées et les contrats conclus avec Cetarsa pour le battage d’une partie de son tabac, sur les développements réglementaires dans le secteur du tabac et sur les réunions intervenues au sein de l’Anetab ainsi qu’avec les syndicats agricoles et groupements de producteurs, mais aussi – comme il est souligné au considérant 379 de la décision attaquée – sur les pratiques illégales en cause.
132 Ensuite, il y a lieu de constater qu’il ressort du dossier que les rapports en cause étaient préparés par M. B. et étaient adressés aux membres du conseil d’administration d’Agroexpansión.
133 S’agissant de ce dernier point, il doit être relevé que, le jour même où elle a acquis la totalité des actions d’Agroexpansión, la requérante – agissant par l’intermédiaire de sa filiale à 100 %, Intabex, qui ne détenait qu’une participation de nature purement financière dans Agroexpansión – a remplacé trois des quatre membres de ce conseil d’administration, en y désignant notamment deux personnes (MM. G. et T.) qui exerçaient alors déjà des fonctions au sein d’autres sociétés du groupe Dimon. Ainsi, à cette époque, M. G. était également directeur exécutif de Compañia de Filipinas, SA, une filiale d’Intabex ayant son siège en Espagne et active dans la production de tabac noir, et M. T. était également employé par Dimon International Services et membre du conseil d’administration de cette société (jusqu’en août 1998).
134 Dans ce contexte, il convient, en particulier, de souligner l’importance des fonctions assumées par M. T. au sein du groupe Dimon. En effet, en plus d’avoir été membre du conseil d’administration d’Agroexpansión pendant toute la période ayant suivi l’acquisition de cette dernière par la requérante et membre du conseil d’administration de Dimon International Services jusqu’en août 1998, M. T. a siégé au sein du conseil d’administration de deux autres sociétés du groupe Dimon, à savoir Intabex Holding Worldwide, SA (de 1998 à 1999) et LRH Travel Ltd (jusqu’en novembre 2000). En outre, ainsi que la requérante l’a indiqué dans sa réponse à la communication des griefs, il était chargé de « contribuer à l’intégration du groupe Intabex dans le groupe Dimon ». À cela s’ajoute le fait que, comme il sera expliqué plus en détail au point 152 ci-après, il ressort de plusieurs courriers figurant dans le dossier qu’Agroexpansión consultait M. T. à propos de questions relatives à ses activités commerciales ou sollicitait son accord préalablement à l’adoption de certaines décisions importantes. Eu égard à ces éléments, la Commission était fondée à considérer que M. T. agissait au nom de la société se trouvant à la tête du groupe Dimon, à savoir la requérante, et jouait le rôle d’intermédiaire entre celle-ci et Agroexpansión. Le fait que M. T. aurait eu un différend avec la requérante, qui aurait conduit cette dernière à mettre un terme, en août 1998, à ses fonctions de membre du conseil d’administration de Dimon International Services, n’est pas de nature à remettre en cause cette conclusion. En effet, après cette date, M. T. a continué non seulement à être employé par cette société, mais aussi à être membre du conseil d’administration d’Agroexpansión, d’Intabex Holding Worldwide et de LRH Travel.
135 Les éléments exposés aux points 132 à 134 ci-dessus démontrent que la requérante, par l’intermédiaire des membres qu’elle avait désignés au sein du conseil d’administration d’Agroexpansión et, en particulier, M. T., entendait superviser les activités de celle-ci et faire en sorte qu’elles se développent conformément à la politique commerciale du groupe Dimon. Dès lors, même si, formellement, les « rapports d’activités » et « rapports de terrain » en cause étaient transmis auxdits membres et non directement à la requérante elle-même, la Commission était fondée à estimer, au considérant 380 de la décision attaquée, que cette société était informée du contenu de ces rapports et, singulièrement, des pratiques illégales en cause. Cette constatation est corroborée par le fait, relevé au considérant 379 de la décision attaquée, que lesdits rapports étaient systématiquement traduits de l’espagnol vers l’anglais, qui est la langue de travail de la requérante.
136 Enfin, il doit être relevé qu’il est constant que la requérante, qui était incontestablement en mesure d’exercer une influence déterminante sur le comportement d’Agroexpansión (voir points 95 et 125 ci-dessus), n’a jamais manifesté son opposition aux pratiques illégales dont elle avait ainsi connaissance ni pris à l’égard de sa filiale aucune mesure destinée à empêcher la poursuite de sa participation à l’infraction, et ce en dépit du risque de poursuites ou d’actions en réparation de tiers auquel elle s’exposait en se comportant de la sorte (voir également considérant 382 de la décision attaquée). La Commission pouvait légitimement en déduire que la requérante approuvait tacitement ladite participation et considérer qu’une telle manière d’agir constituait un indice supplémentaire de l’exercice d’une influence déterminante sur le comportement de sa filiale.
– Sur les courriers échangés entre Agroexpansión et la requérante
137 La Commission se fonde également sur un certain nombre de courriers qui auraient été échangés entre Agroexpansión et la requérante, en relevant que certains d’entre eux faisaient état des pratiques illégales en cause, que d’autres portaient sur les contrats de transformation de tabac ou de vente de tabac transformé que la requérante avait conclus avec Cetarsa et Deltafina et que d’autres encore concernaient, de manière plus générale, les conditions d’achat du tabac brut et le cadre réglementaire applicables en Espagne.
138 S’agissant des courriers relevant de la première des catégories mentionnées au point 137 ci-dessus, la Commission, au considérant 379 de la décision attaquée, renvoie, à titre d’exemple, aux considérants 168 et 179 et aux notes en bas de page nos 217 et 229 de cette décision.
139 À cet égard, tout d’abord, force est de constater que ces courriers font effectivement référence aux pratiques illégales en cause.
140 Ainsi, contrairement à ce que prétend la requérante, la télécopie envoyée par M. B. à M. D. (auprès de Dimon International, une filiale du groupe Dimon établie aux États-Unis) le 14 décembre 1998, mentionnée au considérant 168 de la décision attaquée, n’avait pas exclusivement pour objet un contrat de vente de tabac transformé qu’Agroexpansión avait conclu avec Deltafina, mais concernait également lesdites pratiques. Cela ressort clairement du troisième alinéa de cette télécopie, dans lequel M. B. indique ce qui suit :
« Dès que j’aurai reçu les prix des quatre sociétés, je vous en informerai. Toutefois, je peux d’ores et déjà vous dire que les problèmes qui semblaient si graves lorsque vous nous avez rendu visite en Espagne ont disparu, car toutes les sociétés se sont fixées autour du prix convenu de 87 [pesetas espagnoles (ESP)] (à 2 ou 3 ESP près) [par kg], ces prix étant les prix officiels, même si nous supposons que Cetarsa a effectué d’autres paiements aux producteurs comme nous. »
141 Il convient de relever que, contrairement à ce que laisse entendre la requérante, M. D. n’était pas simplement un employé du département financier de Dimon International, mais était notamment également membre du conseil d’administration de la requérante.
142 Le considérant 179 de la décision attaquée se réfère à un rapport de M. B. portant la date du 5 mai 1998, qui était destiné à M. T. et dont une copie avait été envoyée la veille par télécopie par M. B. aux deux autres membres du conseil d’administration d’Agroexpansión. Il y a lieu de constater que, dans ce rapport, qui décrit le déroulement de la campagne d’achat de tabac de l’année 1998, il est notamment indiqué qu’« Agroexpansión a contribué de manière importante à ce que les entreprises parviennent à certains accords afin d’éviter la guerre des prix de l’année [précédente] », que « les prix ont été négociés avec les syndicats et les [groupements de producteurs de tabac] », que, « pour la première fois, […] la guerre entre les entreprises [a été évitée] et chacune a pu acheter les quantités qu’elle voulait » et que « les négociations avec [ces groupements] ont été difficiles mais toutes les entreprises ont maintenu leur point de vue avec sérieux et esprit de collaboration ». Il est également exposé, dans ledit rapport, qu’Agroexpansión et WWTE se sont engagées à acheter les mêmes quantités de tabac que l’année précédente et que les transformateurs sont convenus de payer aux groupements de producteurs des avances de 35 ESP/kg pour la variété Virginia et de 45 ESP/kg pour les variétés Burley. Enfin, il y est fait état de l’« opportunité d’autres accords dans le futur entre les transformateurs ». Eu égard à ces éléments, il ne saurait être contesté que le rapport du 5 mai 1998 faisait référence aux pratiques illégales en cause.
143 Il en va de même en ce qui concerne le courrier électronique de M. B. à M. S. du 30 octobre 2000, auquel renvoie la note en bas de page n° 217 de la décision attaquée. En effet, dans ce courrier, M. B. commence par rappeler que, lors d’une réunion organisée dans le cadre de l’Anetab, les transformateurs avaient discuté d’une augmentation des prix demandée par les groupements et syndicats de producteurs et étaient unanimement convenus de ne pas l’accepter. Il expose ensuite que, lors d’une réunion qui s’est tenue avec ces groupements et syndicats, les transformateurs ont maintenu leur position et ont clairement indiqué à ces derniers qu’ils rejetaient la demande d’augmentation de 20 % qu’ils avaient présentée.
144 S’agissant du courrier électronique de M. B. à M. S. du 9 mai 2001 mentionné à la note en bas de page n° 229 de la décision attaquée, il y est indiqué que les transformateurs se sont réunis au siège de l’Anetab « pour préparer les discussions avec les producteurs sur les prix » et ainsi clairement fait référence au fait que les premiers s’entendaient sur les prix d’achat du tabac brut.
145 Ensuite, comme dans le cas des « rapports d’activités » et des « rapports de terrain » précités, il y a lieu de considérer que la Commission était fondée à estimer, au considérant 380 de la décision attaquée, que la requérante était informée du contenu des documents mentionnés aux points 140 à 144 ci-dessus et, partant, des pratiques illégales en cause, même si, formellement, ils ne lui étaient pas adressés.
146 Ainsi, s’agissant du rapport portant la date du 5 mai 1998 que M. B. avait envoyé à M. T. (voir point 142 ci-dessus), il a déjà été expliqué au point 134 ci-dessus que ce dernier agissait au nom de la requérante et jouait le rôle d’intermédiaire entre celle-ci et Agroexpansión. En ce qui concerne la télécopie du 14 décembre 1998 (voir point 140 ci-dessus), qui avait été envoyée à M. D. auprès de Dimon International, il suffit de rappeler que ce dernier était notamment membre du conseil d’administration de la requérante.
147 S’agissant des courriers électroniques des 30 octobre 2000 et 9 mai 2001 (voir points 143 et 144 ci-dessus), ils avaient été envoyés à M. S. Contrairement à ce que laisse entendre la requérante, ce dernier n’était pas un simple employé de Dimon International Services, mais occupait une position de premier plan au sein du groupe Dimon, de sorte que, comme dans le cas de M. T., la Commission était en droit de considérer qu’il agissait au nom de la société se trouvant à la tête de ce groupe, en l’occurrence la requérante. Ainsi, Agroexpansión a indiqué, dans sa réponse à la communication des griefs, que la requérante a jointe à la requête, que, depuis 2000, M. S. « occupait un poste de coordination des opérations en Europe ». De même, Agroexpansión, dans sa réponse du 18 mars 2002 à une demande de renseignements de la Commission, que cette dernière a communiquée au Tribunal à la suite d’une question écrite qui lui avait été posée dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure (voir point 69 ci-dessus), a précisé que M. S. exerçait les fonctions de « directeur régional du groupe Dimon en Europe ». En outre, dans le rapport financier annuel relatif à l’année fiscale close au 30 juin 2001 qu’elle a présenté à la US Securities Exchange Commission (commission des opérations de bourse américaine), la requérante a indiqué que M. S. occupait en son sein, depuis mars 1999, le poste de « Senior Vice President-Regional Director Europe ».
148 Certaines indications contenues dans le courrier électronique du 9 mai 2001 et dans la réponse que M. S. y a donnée confirment encore l’importance de son rôle au sein du groupe Dimon. Ainsi, dans ce courrier, M. B. fait également part à M. S. d’une réunion qu’il a eue avec le président de Deltafina, en marge de celle qui s’était tenue au siège de l’Anetab, en vue de discuter de deux questions qu’il qualifie de « très importantes » et lui indique que ce dernier lui téléphonerait le plus rapidement possible pour trouver un accord à ce sujet. Par courrier électronique du même jour, M. S. a répondu à M. B. qu’il venait de parler avec le président de Deltafina et qu’ils étaient convenus de se rencontrer très bientôt. Il a également indiqué à M. B. qu’il était d’accord avec les propositions que celui-ci avait faites au sujet des questions susvisées.
149 Enfin, la Commission pouvait légitimement déduire de l’absence de toute réaction de la requérante face à la participation d’Agroexpansión à l’infraction, alors qu’elle en était ainsi informée, qu’elle approuvait tacitement le comportement illégal de sa filiale et considérer que cela constituait un indice supplémentaire de l’exercice d’une influence déterminante sur le comportement de celle-ci (voir point 136 ci-dessus).
150 En ce qui concerne les courriers relevant de la deuxième des catégories mentionnées au point 137 ci-dessus, ceux-ci sont identifiés à la note en bas de page n° 304 de la décision attaquée. Il s’agit pour l’essentiel de télécopies ou de courriers électroniques échangés entre M. B., d’une part, et MM. T. ou S., d’autre part. Pour les motifs déjà exposés aux points 134, 147 et 148 ci-dessus, ces derniers doivent être considérés comme agissant au nom de la requérante.
151 Certains de ces courriers concernent un contrat datant de septembre 1998 et renégocié en 2001 par lequel certaines opérations de transformation du tabac d’Agroexpansión ont été sous-traitées par Cetarsa. Il ressort clairement desdits courriers que ce contrat a été conclu par M. B. au nom et pour le compte de la requérante et que cette dernière, par l’intermédiaire de MM. T. et S., a effectivement exercé une influence déterminante sur les négociations dudit contrat.
152 Ainsi, dans une télécopie du 9 septembre 1998 à M. T., M. B., après avoir indiqué qu’il avait récemment eu plusieurs réunions avec Cetarsa afin de tenter de régler les « questions pendantes de [la requérante] », requérait expressément l’accord de M. T. sur certaines des conditions contractuelles mentionnées dans le compte rendu de l’une de ces réunions joint à cette télécopie. Il doit être souligné que, dans ledit compte rendu, M. B. est expressément identifié comme représentant de la requérante. Dans le même sens, il y a lieu de relever que, dans une télécopie du 14 septembre 1998, M. B. informe M. T. que, « conformément à [ses] indications », il a de nouveau rencontré Cetarsa et que des modifications ont été apportées au contrat à signer avec cette dernière, à propos desquelles il demande l’accord de M. T. Dans une télécopie du 15 septembre 1998, M. B. indique à M. T. qu’il a communiqué à Cetarsa la proposition de modification que ce dernier lui avait transmise la veille et que ce transformateur avait fait une contre-proposition. M. B. invite M. T. à lui faire savoir s’il faut accepter celle-ci. Enfin, il convient de noter que, dans la version finale du contrat conclu avec Cetarsa, que M. B. a envoyée à M. T. par télécopie du 18 septembre 1998, la requérante est expressément identifiée comme étant l’une des deux parties au contrat et M. B. comme étant son représentant.
153 De même, il y a lieu de relever que, dans un courrier électronique du 3 avril 2001, M. B. a informé M. S. du déroulement de la renégociation du contrat mentionné au point 152 ci-dessus, en exprimant la crainte que Cetarsa exige de la requérante les mêmes conditions que celles dont elle était convenue avec M. M., le président de Deltafina, dans le cadre d’un contrat conclu en parallèle avec ce dernier au nom d’Universal et en invitant, dès lors, M. S. à prendre contact avec M. M. Il ressort d’un courrier électronique du lendemain de M. S à M. B. que le premier a effectivement essayé de joindre M. M.
154 Enfin, il doit être noté que, dans un courrier électronique du 7 mars 2001, M. B. rend compte à M. S. d’une rencontre que, « comme convenu à Camberley » (qui est le siège de Dimon International Services au Royaume-Uni), il a eue la veille avec un représentant de Cetarsa et au cours de laquelle ils ont notamment discuté de certains aspects du contrat en cours de renégociation avec cette dernière.
155 D’autres des courriers relevant de la deuxième des catégories mentionnées au point 137 ci-dessus concernent un contrat par lequel Deltafina achète une grande partie du tabac transformé d’Agroexpansión. Ainsi, dans une télécopie du 14 septembre 1998, M. T. demande à M. B. de lui donner des précisions sur certains prix et autres conditions convenus dans le cadre de ce contrat. Par télécopie du même jour, M. B. a fourni ces précisions à M. T. De même, dans la télécopie du 14 décembre 1998 mentionnée au point 140 ci-dessus, M. B., en plus de faire référence aux pratiques illégales en cause, répond à une question que M. D. – qui était notamment membre du conseil d’administration de la requérante – lui avait posée à propos de l’exécution de ce contrat. Enfin, le courrier électronique du 9 mai 2001 mentionné aux points 144 et 147 ci-dessus établit non seulement que la requérante était informée desdites pratiques, mais en plus qu’elle exerçait une influence sur les relations commerciales entre Agroexpansión et Deltafina.
156 Enfin, s’agissant du troisième type de courriers mentionnés au point 137 ci-dessus, ceux-ci sont détaillés dans la note en bas de page n° 305 de la décision attaquée.
157 Il s’agit de courriers électroniques adressés par M. B. à M. S. qui, comme la Commission l’indique au considérant 379 de la décision attaquée, concernent, plus généralement, les conditions d’achat du tabac brut et le cadre réglementaire applicables en Espagne. Ces courriers sont pertinents en ce qu’ils démontrent que la requérante, par l’intermédiaire de M. S., suivait de près la situation sur le marché espagnol.
158 S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel les courriers examinés aux points 150 à 157 ci-dessus n’ont aucun rapport avec les achats de tabac brut, il est dénué de pertinence. En effet, l’autonomie d’une filiale par rapport à sa société mère ne doit pas être appréciée exclusivement au regard de son activité dans le domaine des produits concernés par l’infraction. Ainsi qu’il a déjà été relevé au point 92 ci-dessus, afin d’établir si une filiale détermine de façon autonome son comportement sur le marché, il convient de prendre en compte l’ensemble des éléments pertinents relatifs aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent la filiale à la société mère, lesquels peuvent varier selon les cas et ne sauraient donc faire l’objet d’une énumération exhaustive.
– Sur les arguments invoqués par la requérante afin de démontrer qu’Agroexpansión agissait de manière autonome sur le marché
159 Tout d’abord, il convient de relever que la requérante fonde une grande partie de son raisonnement sur la thèse selon laquelle l’influence déterminante que doit exercer une société mère afin de se voir imputer la responsabilité de l’infraction commise par sa filiale doit concerner des activités qui sont directement liées à ladite infraction, en l’occurrence l’achat de tabac brut. Or, pour les motifs exposés aux points 92 et 158 ci-dessus, cette thèse ne saurait être accueillie.
160 Ainsi, l’allégation de la requérante selon laquelle elle n’a jamais mis en place de mécanisme de contrôle des activités d’achat de tabac brut d’Agroexpansión ne saurait suffire à établir que cette dernière agissait de manière autonome sur le marché. Il en va de même pour ce qui est de son allégation selon laquelle elle n’a jamais donné d’ordre ou d’instruction à Agroexpansión en ce qui concerne sa politique d’achat ou les réunions avec les autres transformateurs ou avec les producteurs. Ces allégations sont d’autant moins concluantes que, ainsi qu’il ressort des documents examinés aux points 150 à 155 ci-dessus, la requérante, par le biais de MM. T. ou S., intervenait activement dans d’autres aspects de la politique commerciale d’Agroexpansión, à savoir la sous-traitance de certaines opérations de transformation du tabac brut et la vente de tabac transformé.
161 Ensuite, s’agissant de la circonstance selon laquelle M. B. et les autres dirigeants d’Agroexpansión ont été maintenus à leur poste lorsque cette dernière a été acquise par Intabex, elle ne démontre pas en soi qu’Agroexpansión agissait de manière autonome sur le marché. En effet, ce fait résultait non d’une décision autonome de cette dernière, mais d’un choix délibéré de la requérante elle-même, ainsi qu’elle l’a indiqué dans sa réponse à la communication des griefs, en justifiant ce choix par son inexpérience dans le domaine de l’achat de tabac brut en Espagne et par l’obstacle de la langue.
162 Par ailleurs, pour ce qui est du contrat de direction, s’il est vrai qu’il confère des pouvoirs étendus à M. B. en ce qui concerne la gestion d’Agroexpansión et, singulièrement, les achats de tabac brut, il n’en reste pas moins qu’il prévoit expressément, en son article 1er, paragraphe 1, que ce dernier est tenu d’agir dans le respect, notamment, des « méthodes et procédures qui lui sont imposées par le conseil d’administration [d’Agroexpansión] ». En outre, l’article 1er, paragraphe 2, du contrat de direction oblige M. B. à « informer régulièrement et de façon détaillée [ce conseil d’administration] du développement des activités de la société et [à] préparer et présenter aux dates et dans le format qui lui sont indiqués les rapports que [ledit] conseil d’administration pourrait demander ». Il est donc clair que, dans l’exercice de ses fonctions, en ce compris celles relatives aux achats de tabac brut, M. B. restait soumis au contrôle du conseil d’administration d’Agroexpansión ainsi qu’aux directives que celui-ci pouvait lui adresser. Interrogée à ce sujet par le Tribunal lors de l’audience, la requérante a d’ailleurs expressément admis que, comme cela était le cas pour n’importe quelle autre société en Espagne, le conseil d’administration d’Agroexpansión avait le pouvoir de rejeter, de modifier ou d’annuler les décisions de son directeur général. Le fait, à le supposer établi, que, dans la pratique, ce conseil d’administration n’ait jamais procédé de la sorte ni élaboré de « méthodes » ou de « procédures » telles que celles visées ci-dessus ne change rien au fait que, contrairement à ce que laisse entendre la requérante, M. B. ne jouissait pas d’une totale liberté d’action en ce qui concerne la gestion de la société ni même la politique d’achat de tabac brut de celle-ci. Il convient d’ajouter que l’attribution de pouvoirs opérée en faveur de M. B. dans le contrat de direction n’avait rien d’exceptionnel et ne distinguait en rien Agroexpansión d’autres sociétés de droit espagnol, contrairement à ce que la requérante veut faire croire. Il est, en effet, assez habituel que le conseil d’administration d’une société ne s’occupe pas des activités courantes de celle-ci.
163 Eu égard à la constatation opérée au point 135 ci-dessus, selon laquelle la requérante, par l’intermédiaire des membres qu’elle avait désignés au sein du conseil d’administration d’Agroexpansión et, en particulier, M. T., supervisait les activités de celle-ci, les arguments fondés sur le contrat de direction et les pouvoirs attribués à M. B. ne sauraient convaincre. Dans le même sens, en ce qui concerne, plus généralement, le fait qu’Agroexpansión dispose de sa propre direction locale, il convient de considérer, à l’instar de la Commission, qu’il ne prouve pas, en soi, qu’elle définit son comportement sur le marché de manière autonome par rapport à sa société mère. Ainsi, en l’espèce, si, certes, Agroexpansión se trouvait dans une telle situation, il n’en reste pas moins qu’elle agissait sous la supervision de la requérante et que cette dernière jouait même un rôle actif dans certains aspects de sa politique commerciale (voir, notamment, points 150 à 155 ci-dessus).
164 Enfin, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel aucun des quatre membres du conseil d’administration d’Agroexpansión n’était simultanément membre de son propre conseil d’administration ou de ses propres organes de direction, il convient de relever que, bien que le chevauchement de dirigeants entre une société mère et sa filiale constitue un indice de l’exercice effectif d’une influence déterminante, il ne saurait être déduit de l’absence d’un tel chevauchement que ladite filiale agit de façon autonome sur le marché. Il convient d’ajouter que, comme il a déjà été exposé au point 133 ci-dessus, deux des quatre membres du conseil d’administration d’Agroexpansión qui avaient été désignés par la requérante lorsqu’elle a acquis cette dernière par l’intermédiaire d’Intabex exerçaient alors déjà des fonctions importantes au sein d’autres sociétés du groupe Dimon.
165 Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que c’est à bon droit que la Commission a conclu à l’existence d’une entité économique unique entre Agroexpansión et la requérante à compter du 18 novembre 1997 et, partant, a tenu cette dernière pour solidairement responsable de l’infraction ainsi que du paiement de l’amende et l’a fait figurer parmi les destinataires de la décision attaquée.
166 Eu égard aux principes rappelés aux points 99 à 101 ci-dessus, il y a lieu de conclure que c’est donc à bon droit également que la Commission s’est fondée sur le chiffre d’affaires consolidé réalisé par la requérante en 2003, année précédant celle de l’adoption de la décision attaquée, pour calculer le plafond de 10 % prévu par l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003.
167 Le premier moyen doit donc être rejeté comme non fondé.
2. Sur le cinquième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation
Arguments des parties
168 Lors de l’audience, la requérante a invoqué un nouveau moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation. Au soutien de ce moyen, tout d’abord, elle fait valoir qu’il n’apparaît pas de la décision attaquée que les éléments mentionnés au considérant 379 de celle-ci étaient destinés à corroborer la présomption d’exercice effectif d’une influence déterminante découlant de sa détention de la totalité du capital d’Agroexpansión. Ces éléments concerneraient, en réalité, la possibilité d’exercer une telle influence. Ensuite, il ne ressortirait pas non plus de la décision attaquée que la Commission considérait que les rapports et courriers qui étaient transmis à M. T. étaient destinés à la requérante. Enfin, dans ses écritures, en vue d’établir ce dernier fait, la Commission se serait fondée sur un document non repris dans la décision attaquée, à savoir une télécopie de M. B à M. T du 29 avril 1998.
169 La Commission fait valoir que le cinquième moyen doit être rejeté comme irrecevable au motif qu’il est nouveau et, en tout état de cause, comme non fondé.
Appréciation du Tribunal
170 Force est de constater que ce n’est que lors de l’audience que la requérante a, pour la première fois, soulevé un moyen tiré de la violation de l’obligation de motivation. Toutefois, cette circonstance n’emporte pas la conséquence que le Tribunal ne peut l’examiner en l’espèce. En effet, dans le cadre d’un recours en annulation, le moyen tiré d’un défaut ou d’une insuffisance de motivation d’un acte constitue un moyen d’ordre public qui peut, voire doit, être soulevé d’office par le juge de l’Union et qui, par conséquent, peut être invoqué par les parties à tout stade de la procédure (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 13 décembre 2001, Krupp Thyssen Stainless et Acciai speciali Terni/Commission, T‑45/98 et T‑47/98, Rec. p. II‑3757, point 125).
171 Selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l’article 253 CE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 253 CE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt de la Cour du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, Rec. p. I‑1719, point 63, et la jurisprudence citée, et arrêt Hoek Loos/Commission, point 100 supra, point 58).
172 Il est également de jurisprudence constante que, lorsqu’une décision d’application de l’article 81 CE concerne une pluralité de destinataires et pose un problème d’imputabilité de l’infraction, elle doit comporter une motivation suffisante à l’égard de chacun des destinataires, particulièrement de ceux d’entre eux qui, aux termes de cette décision, doivent supporter la charge de cette infraction (arrêts du Tribunal du 28 avril 1994, AWS Benelux/Commission, T‑38/92, Rec. p. II‑211, point 26, et du 27 septembre 2006, Akzo Nobel/Commission, T‑330/01, Rec. p. II‑3389, point 93).
173 Dans le cas d’espèce, il ressort du résumé de la partie de la décision attaquée relative à ses destinataires figurant aux points 27 à 37 ci-dessus ainsi que des constatations opérées aux points 104 à 119 ci-dessus que, dans ladite décision, la Commission a fourni une motivation suffisante des raisons pour lesquelles elle avait décidé d’imputer à la requérante la responsabilité de l’infraction commise par Agroexpansión. La Commission a ainsi exposé, en référence à la jurisprudence de la Cour et du Tribunal, les principes qu’elle entendait appliquer pour définir lesdits destinataires. En ce qui concerne plus spécifiquement la requérante, tout d’abord, elle a relevé que, depuis le second semestre de l’année 1997, celle-ci détenait la totalité du capital d’Agroexpansión. Ensuite, elle a considéré qu’il était établi que la requérante exerçait effectivement une influence déterminante sur le comportement d’Agroexpansión, se fondant à cet égard non seulement sur la présomption découlant de la détention de la totalité du capital de la filiale, mais aussi sur certains éléments supplémentaires corroborant cet exercice effectif. Enfin, la Commission a considéré qu’aucun des arguments invoqués par la requérante dans sa réponse à la communication des griefs ne permettait de conduire à une conclusion contraire.
174 Certes, la seconde phrase du considérant 378 de la décision attaquée peut prêter à confusion, indiquant que les éléments supplémentaires décrits au considérant suivant confirment « la présomption selon laquelle [la requérante] était en mesure d’exercer une influence déterminante ». Toutefois, ainsi qu’il a déjà été exposé au point 117 ci-dessus, il ressort clairement d’une lecture combinée des considérants 372 et 377 ainsi que de la première phrase du considérant 378 de la décision attaquée que, en réalité, ces éléments étaient destinés à corroborer la présomption selon laquelle une société mère exerce effectivement une influence déterminante sur le comportement de sa filiale lorsqu’elle détient la totalité du capital de celle-ci. La requérante est d’autant moins fondée à prétendre qu’elle ne pouvait comprendre en ce sens la décision attaquée que, dans la requête, elle conteste expressément que lesdits éléments confirment qu’elle exerçait une influence déterminante sur Agroexpansión. La présomption établie par la jurisprudence, visée au considérant 372 de la décision attaquée et rappelée aux points 95 et 96 ci-dessus, a manifestement pour objet non la possibilité d’exercer une telle influence, mais l’exercice effectif de celle-ci.
175 Par ailleurs, la requérante ne saurait davantage sérieusement prétendre qu’elle ne pouvait comprendre, avant d’avoir pris connaissance des écritures de la Commission, que celle-ci estimait que M. T. devait être considéré comme agissant en tant qu’intermédiaire pour elle. En effet, d’une part, la plupart des documents expressément identifiés aux notes en bas de page nos 303 et 304 de la décision attaquée et que la Commission décrit, dans cette décision, comme ayant été envoyés à la requérante étaient adressés à M. T. D’autre part, tant dans sa réponse à la communication des griefs que dans la requête, la requérante a présenté des observations détaillées sur le rôle et les fonctions de M. T. au sein du groupe Dimon, en insistant notamment sur le fait qu’il n’avait jamais été membre de son conseil d’administration, de ses organes de direction ou de son personnel.
176 Enfin, s’agissant de la télécopie du 29 avril 1998 de M. B à M. T, il suffit de relever qu’elle n’a pas été utilisée par le Tribunal en tant qu’élément de preuve pour valider la conclusion de la Commission selon laquelle la requérante exerçait effectivement une influence déterminante sur le comportement d’Agroexpansión, cette circonstance étant démontrée à suffisance de droit par les éléments de preuve mentionnés au considérant 379 de la décision attaquée (voir points 128 et 130 à 158 ci-dessus).
177 Il s’ensuit que le cinquième moyen doit être rejeté comme non fondé.
3. Sur le deuxième moyen, tiré de la violation des principes de proportionnalité et de responsabilité personnelle
Arguments des parties
178 Dans le cadre du deuxième moyen, invoqué à titre subsidiaire par rapport au premier, la requérante fait valoir que la Commission a violé les principes de proportionnalité et de responsabilité personnelle en la tenant pour responsable de l’infraction commise par Agroexpansión sans avoir démontré qu’elle avait directement pris part à celle-ci, par exemple en ayant donné des instructions spécifiques à cette filiale ou en ayant supervisé sa participation à l’entente. Elle affirme que le fait qu’une société mère ait reçu des « informations isolées » à propos de pratiques restrictives auxquelles s’est livrée sa filiale ne saurait suffire pour lui imputer la responsabilité du comportement infractionnel de cette dernière. Il conviendrait, à tout le moins, de démontrer qu’elle était tenue informée « périodiquement et régulièrement » ou « en détail » de cette infraction.
179 Renvoyant aux arguments qu’elle a développés dans le cadre du premier moyen, la requérante répète qu’elle n’avait pas connaissance de communications qui lui auraient été adressées par Agroexpansión et contenant des informations à propos de la politique d’achat de cette dernière ou des preuves matérielles des pratiques illégales en cause.
180 La Commission considère que le deuxième moyen doit être rejeté pour les mêmes raisons que le premier dès lors qu’il constitue, en substance, une répétition de celui-ci.
Appréciation du Tribunal
181 Tout d’abord, il convient de rejeter l’argument de la requérante tiré de ce que la Commission n’a pas démontré qu’elle avait directement pris part à l’infraction, par exemple en ayant donné instruction à sa filiale de commettre celle-ci ou en ayant supervisé la participation de ladite filiale à l’entente. En effet, ainsi qu’il a déjà été indiqué au point 93 ci-dessus, ce n’est pas une relation d’instigation relative à l’infraction entre la société mère et sa filiale ni, à plus forte raison, une implication de la première dans ladite infraction, mais le fait qu’elles constituent une seule entreprise au sens de l’article 81 CE qui permet à la Commission d’adresser une décision imposant des amendes à la société mère.
182 Ensuite, il y a lieu de rappeler que, pour imputer à la requérante la responsabilité de l’infraction commise par Agroexpansión, la Commission s’est fondée non seulement sur la présomption d’exercice effectif d’une influence déterminante découlant de la détention de la totalité du capital de la filiale, mais aussi sur certains éléments supplémentaires démontrant un tel exercice effectif par la requérante. Ces éléments sont constitués par différents rapports et courriers émanant d’Agroexpansión et établissant que la requérante, par l’intermédiaire de MM. T., S. ou D., non seulement était informée des pratiques illégales en cause, mais aussi – ce qu’elle omet de mentionner dans le cadre du présent moyen – intervenait dans certaines relations commerciales entre sa filiale et Deltafina ou Cetarsa et suivait de près la situation sur le marché espagnol (voir points 130 à 158 ci-dessus).
183 Enfin, il ne saurait être sérieusement prétendu que seules des « informations isolées » sur les pratiques illégales en cause ont été communiquées à la requérante. En effet, il est fait référence à ces pratiques dans les rapports d’activités d’Agroexpansión de février, mars, avril et octobre 1999, et de janvier, mai, septembre et novembre 2000, dans le rapport de terrain d’Agroexpansión de mai 2001, dans la télécopie du 14 décembre 1998 de M. B. à M. D. (voir point 140 ci-dessus), dans le rapport du 5 mai 1998 de M. B. (voir point 142 ci-dessus) et dans les courriers électroniques du 30 octobre 2000 et du 9 mai 2001 de M. B. à M. S. (voir points 143 et 144 ci-dessus).
184 Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le deuxième moyen comme non fondé. Partant, il convient de rejeter les conclusions tendant à l’annulation partielle de la décision attaquée.
4. Sur le quatrième moyen, tiré de la violation du principe de protection de la confiance légitime
Arguments des parties
185 La requérante prétend qu’Agroexpansión a cessé de participer à l’infraction dès les premières interventions de la Commission et reproche à cette dernière d’avoir porté atteinte à sa confiance légitime en omettant de retenir, conformément au point 3 des lignes directrices ainsi qu’à sa pratique décisionnelle, cette circonstance atténuante lors de la détermination du montant de l’amende.
186 Selon la requérante, la Commission ne saurait s’abstenir de retenir pareille circonstance atténuante que lorsqu’il y a eu violation délibérée des règles de la concurrence.
187 Par ailleurs, dans la réplique, elle souligne avoir mis fin à l’infraction, non pas avant la date des premières interventions de la Commission, mais le jour même de celles-ci, à savoir le 3 octobre 2001.
188 La Commission conteste les arguments de la requérante.
189 Dans la duplique, se référant à l’affirmation de la requérante selon laquelle il n’a été mis fin à l’infraction que le 3 octobre 2001 (voir point 187 ci-dessus), la Commission demande au Tribunal d’appliquer une majoration supplémentaire de 5 %, au titre de la durée de l’infraction, au montant de départ de l’amende. La participation de la requérante à l’infraction aurait, en effet, dans cette hypothèse, été d’une durée supérieure à cinq ans et six mois.
Appréciation du Tribunal
190 Il y a lieu de rappeler que la Commission doit, en principe, se conformer aux termes de ses propres lignes directrices en fixant le montant des amendes. Toutefois, il n’est pas indiqué dans les lignes directrices que la Commission doit toujours prendre en compte séparément chacune des circonstances atténuantes énumérées au point 3 de ces lignes directrices et elle n’est pas obligée d’accorder une réduction supplémentaire à ce titre de manière automatique, le caractère adéquat d’une éventuelle réduction de l’amende au titre des circonstances atténuantes devant être apprécié d’un point de vue global en tenant compte de l’ensemble des circonstances pertinentes. En effet, l’adoption des lignes directrices n’a pas privé de pertinence la jurisprudence antérieure selon laquelle la Commission dispose d’un pouvoir d’appréciation lui permettant de prendre ou de ne pas prendre en considération certains éléments lorsqu’elle fixe le montant des amendes qu’elle entend infliger, en fonction notamment des circonstances de l’espèce. Ainsi, en l’absence d’indication de nature impérative dans les lignes directrices en ce qui concerne les circonstances atténuantes qui peuvent être prises en compte, il convient de considérer que la Commission a conservé une certaine marge pour apprécier de manière globale l’importance d’une éventuelle réduction du montant des amendes au titre des circonstances atténuantes (voir arrêt du Tribunal du 14 décembre 2006, Raiffeisen Zentralbank Österreich e.a./Commission, T‑259/02 à T‑264/02 et T‑271/02, Rec. p. II‑5169, point 473, et la jurisprudence citée).
191 Aux termes du point 3, troisième tiret, des lignes directrices, la « cessation des infractions dès les premières interventions de la Commission (notamment vérifications) » compte parmi les circonstances atténuantes.
192 Toutefois, selon une jurisprudence bien établie, cette cessation ne peut logiquement être une circonstance atténuante que s’il existe des raisons de supposer que les entreprises en cause ont été incitées à arrêter leurs comportements anticoncurrentiels par les interventions en question, le cas où l’infraction a déjà pris fin avant la date des premières interventions de la Commission n’étant pas couvert par cette disposition des lignes directrices (arrêt du Tribunal du 8 juillet 2004, Dalmine/Commission, T‑50/00, Rec. p. II‑2395, points 328 et 329, confirmé sur pourvoi par arrêt de la Cour du 25 janvier 2007, Dalmine/Commission, C‑407/04 P, Rec. p. I‑829, point 158).
193 Or, en l’espèce, l’infraction a cessé le 10 août 2001, soit avant la date des premières vérifications opérées par la Commission, en l’occurrence le 3 octobre 2001. En effet, ainsi qu’il ressort du considérant 432 de la décision attaquée, bien que les transformateurs aient déclaré que leur entente avait cessé d’exister à cette dernière date, la Commission a retenu la première comme date de fin de l’infraction au motif que la « dernière preuve » dont elle disposait était une réunion du 10 août 2001, mentionnée au considérant 260 de la décision attaquée. Ladite cessation ne saurait, dès lors, constituer une circonstance atténuante aux fins de la fixation du montant de l’amende.
194 Il y a lieu d’ajouter que, même si la Commission avait considéré que l’infraction avait cessé le jour même où elle avait effectué ses premières vérifications, elle aurait été pleinement fondée à ne pas retenir la circonstance alléguée par la requérante. En effet, une réduction de l’amende en raison de la cessation d’une infraction dès les premières interventions de la Commission ne saurait être automatique, mais dépend d’une évaluation des circonstances du cas d’espèce par cette dernière, dans le cadre de son pouvoir d’appréciation. À cet égard, l’application du point 3, troisième tiret, des lignes directrices en faveur d’une entreprise sera particulièrement adéquate dans une situation où le caractère anticoncurrentiel du comportement en cause n’est pas manifeste. Inversement, son application sera moins adaptée, en principe, dans une situation où celui-ci est clairement anticoncurrentiel, à le supposer établi (arrêts du Tribunal du 11 mars 1999, Aristrain/Commission, T‑156/94, Rec. p. II‑645, point 138, et du 8 juillet 2004, Mannesmannröhren-Werke/Commission, T‑44/00, Rec. p. II‑2223, point 281).
195 Or, en l’espèce, le caractère anticoncurrentiel du comportement d’Agroexpansión ne faisait pas de doute. En effet, l’entente des transformateurs, ayant pour objet la fixation des prix et la répartition du marché (voir considérants 278 à 317 de la décision attaquée), correspond à un type d’infraction classique et particulièrement grave (voir considérants 409 à 411 de la décision attaquée) au droit de la concurrence et à un comportement dont l’illégalité a été affirmée par la Commission à maintes reprises depuis ses premières interventions en la matière. Le fait que cette entente comportait un volet secret confirme en outre qu’Agroexpansión avait pleinement conscience du caractère illicite de son comportement.
196 Il s’ensuit que le quatrième moyen doit être rejeté comme non fondé.
197 S’agissant de la demande de la Commission tendant à ce que soit appliquée une majoration supplémentaire de 5 %, au titre de la durée de l’infraction, au montant de départ de l’amende déterminé pour Agroexpansión, le Tribunal estime qu’il n’y a pas lieu de l’accueillir. En effet, en faisant valoir que l’infraction avait cessé le 3 octobre 2001, et non le 10 août 2001, la requérante n’entendait pas tant contester l’appréciation de la durée de l’infraction effectuée par la Commission que répondre à un argument formulé par cette dernière dans le mémoire en défense et selon lequel la prise en compte de la seconde date en tant que date de fin de l’infraction avait déjà eu un effet favorable sur la situation de la requérante.
5. Sur le troisième moyen, tiré de la violation des principes de proportionnalité et de responsabilité personnelle ainsi que de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003
Arguments des parties
198 Dans le cadre du troisième moyen, invoqué à titre subsidiaire par rapport au premier, la requérante, renvoyant au considérant 386 de la décision attaquée, fait valoir qu’elle n’aurait pas dû être tenue pour responsable de l’infraction commise par Agroexpansión pour la période antérieure au 18 novembre 1997 et que l’amende doit donc être réduite en conséquence.
199 La requérante estime que, s’agissant de ladite période, l’amende aurait dû être calculée sans appliquer de coefficient multiplicateur à des fins de dissuasion au montant de départ de l’amende, puisque, à cette époque, Agroexpansión ne faisait pas partie d’une multinationale.
200 S’agissant de la période s’étendant du 18 novembre 1997 au 10 août 2001, elle fait valoir que l’amende doit être calculée en déduisant du montant imposé à Agroexpansión par l’article 3 de la décision attaquée le montant exclusivement attribuable à cette dernière pour la période antérieure au 18 novembre 1997.
201 La Commission reconnaît que le montant de l’amende que la requérante est tenue de payer à titre solidaire avec Agroexpansión devrait être inférieur au montant total de l’amende infligée à cette dernière. Elle rejette, toutefois, l’argument de la requérante selon lequel le montant de l’amende devrait être calculé en excluant l’application du coefficient multiplicateur à des fins de dissuasion pour la période antérieure au 18 novembre 1997. Elle estime que la requérante devrait être déclarée solidairement responsable, avec Agroexpansión, du paiement de l’amende à concurrence d’un montant de 2 332 800 euros, tandis que cette dernière devrait rester responsable du paiement du montant total de l’amende, à savoir 2 592 000 euros (dont 259 200 euros à titre exclusif). La Commission aboutit au montant de 2 332 800 euros en tenant compte du fait que la requérante ne peut être tenue pour responsable de l’infraction que pour une durée de trois ans et neuf mois environ et en ne majorant donc le montant de départ de l’amende, s’agissant de la requérante, que de 35 %.
Appréciation du Tribunal
202 Il convient de constater que, ainsi qu’il est constant et qu’il ressort du considérant 386 de la décision attaquée, la requérante ne pouvait être tenue pour responsable de l’infraction commise par Agroexpansión pour la période antérieure au 18 novembre 1997, puisque ce n’est qu’à partir de cette dernière date qu’elle a formé avec celle-ci une unité économique et donc une entreprise au sens de l’article 81 CE. La solidarité pour le paiement de l’amende ne pouvant couvrir que la période infractionnelle durant laquelle la société mère et sa filiale constituaient une telle entreprise, la Commission n’était pas fondée à imposer à la requérante de payer solidairement, avec Agroexpansión, la totalité du montant infligé à cette dernière, soit 2 592 000 euros, à savoir un montant se rapportant à l’ensemble de la période infractionnelle. Partant, le troisième moyen doit être accueilli.
6. Sur la détermination du montant final de l’amende
203 Il y a donc lieu de réformer la décision attaquée dans la mesure où celle-ci tient la requérante pour solidairement responsable, avec Agroexpansión, du paiement du montant total de l’amende déterminée pour cette dernière.
204 Dans l’exercice de sa compétence de pleine juridiction, le Tribunal estime opportun de calculer la part de ce montant que la requérante doit payer solidairement avec Agroexpansión en suivant le raisonnement proposé par la Commission dans ses écritures, à savoir en retenant la méthode et les critères qu’elle a appliqués, dans la décision attaquée, pour fixer le montant des amendes à infliger aux destinataires de celle-ci (voir points 38 à 61 ci-dessus).
205 Ainsi, en premier lieu, il convient de se fonder sur le même montant de départ que celui utilisé pour Agroexpansión, à savoir 3 600 000 euros.
206 En effet, premièrement, le fait que la requérante ne peut être tenue pour responsable de l’infraction pour la période antérieure au 18 novembre 1997 est sans incidence sur la qualification de « très grave » de cette infraction (considérants 408 à 414 de la décision attaquée).
207 Deuxièmement, ce fait est également sans incidence sur la prise en compte du « poids spécifique » de chaque entreprise et de l’impact de son comportement illicite sur la concurrence (considérant 415 de la décision attaquée).
208 En effet, d’une part, il n’affecte en rien la constatation selon laquelle la « contribution » des transformateurs aux pratiques illégales en cause était globalement similaire (considérant 418 de la décision attaquée).
209 D’autre part, il n’est pas de nature à remettre en cause le bien-fondé de la répartition des transformateurs en trois catégories et du placement d’Agroexpansión dans la deuxième de celles-ci (prévoyant un montant de départ de 1 800 000 euros), puisque ces opérations ont été effectuées en tenant compte de la part de chacun des transformateurs sur le marché de l’achat de tabac brut espagnol en 2001, dernière année de l’infraction (considérants 419 à 421 de la décision attaquée).
210 Troisièmement, s’agissant du coefficient multiplicateur aux fins de dissuasion de 2 dont le montant de départ de l’amende d’Agroexpansión a été affecté, son application reste justifiée dans le cadre du présent calcul dès lors qu’il se fonde sur la taille et les ressources globales de l’entreprise concernée en 2003, année précédant celle de l’adoption de la décision attaquée (considérants 422 et 423 de la décision attaquée). Ainsi qu’il a été démontré ci-dessus lors de l’examen du premier moyen, en 2003, Agroexpansión et la requérante formaient ensemble une seule et même entité économique et, donc, une telle entreprise.
211 À cet égard, il doit être relevé que la prise en considération de la taille et des ressources globales de l’entreprise concernée afin d’assurer un effet dissuasif à l’amende s’explique par l’impact recherché sur ladite entreprise, la sanction ne devant pas être négligeable au regard, notamment, de la capacité financière de celle-ci. Afin de pouvoir mesurer le caractère dissuasif d’une amende à l’égard d’une entreprise déclarée responsable d’une infraction, il ne saurait, dès lors, être tenu compte de la situation telle qu’elle existait au début de l’infraction. Une telle prise en compte risquerait soit d’aboutir à une amende d’un montant trop bas pour être suffisamment dissuasive, dans l’hypothèse où le chiffre d’affaires de l’entreprise concernée aurait augmenté entre-temps, soit d’aboutir à une amende d’un montant plus élevé qu’il ne le faudrait pour être dissuasive, dans l’hypothèse où le chiffre d’affaires de l’entreprise concernée aurait diminué entre-temps.
212 En deuxième lieu, en revanche, la requérante ne pouvant être tenue pour responsable de l’infraction que pour la durée de trois ans et neuf mois environ de la période comprise entre le 18 novembre 1997 et le 10 août 2001, le montant de départ de 3 600 000 euros doit être majoré de 35 %, et non de 50 % comme dans le cas d’Agroexpansión, au titre de la durée de l’infraction. Partant, aux fins de la détermination du montant de l’amende au paiement duquel la requérante est tenue solidairement avec Agroexpansión, il doit être tenu compte d’un montant de base de 4 860 000 euros.
213 En troisième lieu, le fait que la requérante ne peut être tenue pour responsable de l’infraction pour la période antérieure au 18 novembre 1997 est sans incidence sur la réduction de 40 % du montant de base au titre des circonstances atténuantes (considérants 437 à 439 de la décision attaquée). Le montant de base à prendre en considération doit donc être porté à 2 916 000 euros. Eu égard au chiffre d’affaires de l’entreprise concernée en 2003, ce montant ne doit pas être adapté afin de respecter la limite de 10 % du chiffre d’affaires prévue par l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003.
214 En quatrième lieu, s’agissant de l’application de la communication sur la coopération, il doit être relevé que, dans son arrêt rendu ce jour dans l’affaire T‑38/05, Agroexpansión/Commission (non encore publié au Recueil), le Tribunal a considéré qu’il convenait d’accorder à Agroexpansión, au titre de sa coopération, une réduction supplémentaire de 5 % s’ajoutant à celle de 20 % déjà octroyée dans la décision attaquée. En l’espèce, il y a donc lieu d’appliquer également une réduction de 25 % au montant susvisé de 2 916 000 euros.
215 Il résulte de l’ensemble des considérations qui précédent qu’il y a lieu de fixer à 2 187 000 euros la part du montant de l’amende infligée à Agroexpansion au paiement de laquelle la requérante est tenue solidairement avec cette dernière.
216 Le recours doit être rejeté pour le surplus.
Sur les dépens
217 Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En application du paragraphe 3, premier alinéa, de la même disposition, le Tribunal peut répartir les dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs.
218 En l’espèce, le recours ayant été partiellement accueilli, il sera fait une juste appréciation des circonstances de la cause en décidant que la requérante supportera neuf dixièmes de ses propres dépens et neuf dixièmes des dépens exposés par la Commission, cette dernière supportant un dixième de ses propres dépens et un dixième des dépens exposés par la requérante.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (quatrième chambre)
déclare et arrête :
1) La part du montant de l’amende infligée à Agroexpansión, SA à l’article 3 de la décision C (2004) 4030 final de la Commission, du 20 octobre 2004, relative à une procédure d’application de l’article 81, paragraphe 1, [CE] (affaire COMP/C.38.238/B.2 − Tabac brut – Espagne), au paiement de laquelle Alliance One International, Inc. est tenue solidairement avec Agroexpansión, est fixée à 2 187 000 euros.
2) Le recours est rejeté pour le surplus.
3) Alliance One International supportera neuf dixièmes de ses propres dépens et neuf dixièmes des dépens exposés par la Commission européenne, cette dernière supportant un dixième de ses propres dépens et un dixième des dépens exposés par Alliance One International.
Czúcz |
Labucka |
O’Higgins |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 octobre 2011.
Signatures
Table des matières
Antécédents du litige
1. Requérante et procédure administrative
2. Décision attaquée
3. Destinataires de la décision attaquée
4. Détermination du montant des amendes
Montant de départ des amendes
Montant de base des amendes
Circonstances aggravantes et atténuantes
Limite maximale de l’amende prévue à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003
Application de la communication sur la coopération et montant final des amendes
Procédure et conclusions des parties
En droit
1. Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 81, paragraphe 1, CE, de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 et du principe de proportionnalité
Arguments des parties
Appréciation du Tribunal
Sur les critères utilisés par la Commission, dans la décision attaquée, pour imputer à une société mère la responsabilité de l’infraction commise par sa filiale
Sur l’existence d’une entité économique unique entre la requérante et Agroexpansión
– Sur les « rapports d’activités » et les « rapports de terrain »
– Sur les courriers échangés entre Agroexpansión et la requérante
– Sur les arguments invoqués par la requérante afin de démontrer qu’Agroexpansión agissait de manière autonome sur le marché
2. Sur le cinquième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation
Arguments des parties
Appréciation du Tribunal
3. Sur le deuxième moyen, tiré de la violation des principes de proportionnalité et de responsabilité personnelle
Arguments des parties
Appréciation du Tribunal
4. Sur le quatrième moyen, tiré de la violation du principe de protection de la confiance légitime
Arguments des parties
Appréciation du Tribunal
5. Sur le troisième moyen, tiré de la violation des principes de proportionnalité et de responsabilité personnelle ainsi que de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003
Arguments des parties
Appréciation du Tribunal
6. Sur la détermination du montant final de l’amende
Sur les dépens
* Langue de procédure : l’anglais.