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Document 62005CJ0068

    Arrêt de la Cour (première chambre) du 26 octobre 2006.
    Koninklijke Coöperatie Cosun UA contre Commission des Communautés européennes.
    Pourvoi - Agriculture - Organisation commune des marchés - Sucre - Articles 26 du règlement (CEE) nº 1785/81 et 3 du règlement (CEE) nº 2670/81 - Montant dû pour le sucre C écoulé sur le marché intérieur - Demande de remise - Clause d'équité prévue par l'article 13 du règlement (CEE) nº 1430/79 - Notion de "droits à l'importation ou à l'exportation" - Principes d'égalité et de sécurité juridique - Équité
    Affaire C-68/05 P.

    Recueil de jurisprudence 2006 I-10367

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2006:674

    Affaire C-68/05 P

    Koninklijke Coöperatie Cosun UA

    contre

    Commission des Communautés européennes

    «Pourvoi — Agriculture — Organisation commune des marchés — Sucre — Articles 26 du règlement (CEE) nº 1785/81 et 3 du règlement (CEE) nº 2670/81 — Montant dû pour le sucre C écoulé sur le marché intérieur — Demande de remise — Clause d'équité prévue par l'article 13 du règlement (CEE) nº 1430/79 — Notion de "droits à l'importation ou à l'exportation" — Principes d'égalité et de sécurité juridique — Équité»

    Conclusions de l'avocat général Mme C. Stix-Hackl, présentées le 16 mai 2006 

    Arrêt de la Cour (première chambre) du 26 octobre 2006 

    Sommaire de l'arrêt

    1.     Ressources propres des Communautés européennes — Remboursement ou remise des droits à l'importation

    (Règlement du Conseil nº 1430/79, art. 1er, § 2, a) et b), et 13; règlement de la Commission nº 2670/81, art. 3)

    2.     Pourvoi — Moyens — Moyen présenté pour la première fois dans le cadre du pourvoi

    1.     L'article 13 du règlement nº 1430/79, relatif au remboursement ou à la remise des droits à l'importation ou à l'exportation, selon lequel il peut être procédé au remboursement ou à la remise des droits à l'importation dans des situations particulières qui résultent de circonstances n'impliquant ni manoeuvre ni négligence manifeste de la part de l'intéressé, ne saurait servir de fondement à une remise ou à un remboursement d'un montant dû, au titre de l'article 3 du règlement nº 2670/81 établissant les modalités d'application pour la production hors quota dans le secteur du sucre, pour le sucre C écoulé sur le marché intérieur.

    En effet, d'une part, un tel montant n'est pas perçu en raison du franchissement des frontières extérieures de la Communauté par une quantité de sucre C, mais, au contraire, parce que ladite quantité n'a pas été exportée hors de la Communauté ou parce que son exportation n'a pas respecté les conditions et délais fixés par le règlement nº 2670/81. Le fait générateur de la perception d'un tel montant est donc l'absence de preuve, à la date déterminée à cet effet, de l'exportation d'une quantité de sucre C dans le délai requis. Dès lors, un tel montant ne correspond à aucune des trois catégories énumérées à l'article 1er, paragraphe 2, sous a) et b), du règlement nº 1430/79.

    D'autre part, rien n'indique que le législateur communautaire ait souhaité assimiler le producteur de sucre C écoulé sur le marché intérieur à l'importateur de sucre.

    Premièrement, les prélèvements à l'importation de sucre en provenance des pays tiers et le montant dû au titre de l'article 3 du règlement nº 2670/81 pour le sucre C écoulé sur le marché intérieur ne poursuivent pas les mêmes objectifs.

    Deuxièmement, il ne résulte pas du troisième considérant du règlement nº 2645/70, relatif aux dispositions applicables à la quantité de sucre produite au-delà du quota maximum, ainsi que du troisième considérant du règlement nº 2670/81 qui l'a remplacé - formulés en substance dans les mêmes termes - que le législateur communautaire ait souhaité que l'importateur de sucre en provenance des pays tiers et le producteur de sucre C écoulé sur le marché intérieur soient placés dans la même situation. En effet, il ressort clairement de ces considérants ainsi que de l'article 3 du règlement nº 2670/81 que la référence au sucre importé des pays tiers est limitée au mode de calcul du montant prévu audit article.

    Troisièmement, aucune volonté du législateur communautaire d'accorder au sucre C écoulé sur le marché intérieur le statut de produit importé des pays tiers et d'assimiler le producteur de sucre C à l'importateur de sucre ne peut être déduite du libellé de l'article 26 du règlement nº 1785/81, portant organisation commune des marchés dans le secteur du sucre, cet article se bornant à énoncer l'interdiction d'écoulement du sucre C sur le marché intérieur.

    Enfin, quatrièmement, la circonstance que tant les droits à l'importation que le montant dû au titre de l'article 3 du règlement nº 2670/81 font partie des ressources propres de la Communauté n'est pas de nature à démontrer que les importateurs de sucre en provenance des pays tiers et les producteurs de sucre C sont dans une situation comparable. En effet, les ressources propres de la Communauté sont composées de recettes de natures très différentes soumises à des régimes également différents.

    (cf. points 39, 41, 43, 63-65, 101-102)

    2.     Permettre à une partie de soulever pour la première fois devant la Cour un moyen qu'elle n'a pas soulevé devant le Tribunal reviendrait à lui permettre de saisir la Cour, dont la compétence en matière de pourvoi est limitée, d'un litige plus étendu que celui dont a eu à connaître le Tribunal. Dans le cadre d'un pourvoi, la compétence de la Cour est donc limitée à l'appréciation de la solution légale qui a été donnée aux moyens débattus devant les premiers juges.

    Est dès lors irrecevable un moyen faisant grief au Tribunal d'avoir violé le principe d'égalité de traitement entre la partie requérante et une catégorie donnée d'opérateurs économiques dès lors que cette partie, tout en soulevant en première instance un moyen tiré d'une violation du principe d'égalité, contestait uniquement la différence de traitement qu'elle aurait subie par rapport à une autre catégorie d'opérateurs économiques.

    (cf. points 95-97)




    ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

    26 octobre 2006 (*)

    «Pourvoi – Agriculture – Organisation commune des marchés – Sucre – Articles 26 du règlement (CEE) n° 1785/81 et 3 du règlement (CEE) n° 2670/81 – Montant dû pour le sucre C écoulé sur le marché intérieur – Demande de remise – Clause d’équité prévue par l’article 13 du règlement (CEE) n° 1430/79 – Notion de ‘droits à l’importation ou à l’exportation’ – Principes d’égalité et de sécurité juridique – Équité»

    Dans l’affaire C-68/05 P,

    ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice, introduit le 11 février 2005,

    Koninklijke Coöperatie Cosun UA, établie à Breda (Pays-Bas), représentée par Mes M. M. Slotboom et N. J. Helder, advocaten,

    partie requérante,

    l’autre partie à la procédure étant:

    Commission des Communautés européennes, représentée par M. X. Lewis, en qualité d’agent, assisté de Me F. Tuytschaever, advocaat, ayant élu domicile à Luxembourg,

    partie défenderesse en première instance,

    LA COUR (première chambre),

    composée de M. P. Jann, président de chambre, MM. J. N. Cunha Rodrigues et M. Ilešič (rapporteur), juges,

    avocat général: Mme C. Stix-Hackl,

    greffier: Mme M. M. Ferreira, administrateur principal,

    vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 23 mars 2006,

    ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 16 mai 2006,

    rend le présent

    Arrêt

    1       Par son pourvoi, Koninklijke Coöperatie Cosun UA (ci-après «Cosun») demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 7 décembre 2004, Koninklijke Coöperatie Cosun/Commission (T‑240/02, Rec. p. II‑4237, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision REM 19/01 – également identifiée sous le numéro C (2002) 1580 def. – de la Commission des Communautés européennes, du 2 mai 2002 (ci-après la «décision litigieuse»).

     Le cadre juridique

     L’organisation commune des marchés dans le secteur du sucre

    2       Le règlement (CEE) nº 1785/81 du Conseil, du 30 juin 1981, portant organisation commune des marchés dans le secteur du sucre (JO L 177, p. 4), tel que modifié par le règlement (CEE) n° 305/91 du Conseil, du 4 février 1991 (JO L 37, p. 1, ci-après le «règlement de base»), vise, dans le cadre de l’organisation commune des marchés dans le secteur du sucre (ci-après l’«OCM du sucre»), à maintenir les garanties nécessaires en ce qui concerne l’emploi et le niveau de vie des producteurs de produits de base comme des fabricants de sucre de la Communauté européenne et à assurer la sécurité de l’approvisionnement en sucre de l’ensemble des consommateurs à des prix raisonnables, en stabilisant le marché du sucre.

    3       À ces fins, il réglemente la production, l’importation et l’exportation de sucre. Il prévoit en particulier un régime de quotas de production qui constitue, selon son quinzième considérant, un moyen de garantir aux producteurs les prix communautaires et l’écoulement de leur production.

    4       Dans le cadre de ce régime de quotas, l’article 24 du règlement de base fixe, pour chaque campagne de commercialisation (soit du 1er juillet d’une année au 30 juin de l’année suivante), des quantités de base pour le «sucre A» et le «sucre B», qu’il incombe à chaque État membre de répartir entre les producteurs de sucre établis sur son territoire. Il est ainsi alloué aux entreprises productrices de sucre un quota A et un quota B pour chaque campagne de commercialisation. Toute quantité de sucre produite en sus des quotas A et B est dénommée «sucre C».

    5       Le sucre C n’est éligible ni au régime de soutien des prix ni à celui des restitutions à l’exportation. En outre, le sucre C ne peut être écoulé sur le marché intérieur et doit, par conséquent, être écoulé en dehors de la Communauté pour être vendu sur le marché mondial. L’article 26 du règlement de base dispose à cet égard ce qui suit:

    «1.      [...] le sucre C qui n’est pas reporté en vertu de l’article 27 [...] ne peu[t] être écoul[é] sur le marché intérieur de la Communauté et doi[t] être export[é] en l’état avant le 1er janvier suivant la fin de la campagne de commercialisation en cause.

    [...]

    3.      Les modalités d’application du présent article sont arrêtées selon la procédure prévue à l’article 41.

    Ces modalités prévoient notamment la perception d’un montant sur le sucre C [...] vis[é] au paragraphe 1 dont l’exportation en l’état dans le délai requis n’a pas été prouvée à une date à déterminer.»

    6       Adopté sur le fondement de l’article 26, paragraphe 3, du règlement de base, le règlement (CEE) n° 2670/81 de la Commission, du 14 septembre 1981, établissant les modalités d’application pour la production hors quota dans le secteur du sucre (JO L 262, p. 14), tel que modifié par le règlement (CEE) n° 3559/91 de la Commission, du 6 décembre 1991 (JO L 336, p. 26, ci-après le «règlement n° 2670/81»), précise les conditions dans lesquelles l’exportation du sucre C est considérée comme effectuée.

    7       L’article 1er, paragraphe 1, du règlement n° 2670/81 dispose:

    «L’exportation visée à l’article 26 paragraphe 1 du règlement (CEE) n° 1785/81 est considérée comme effectuée si:

    a)      le sucre C [...] est exporté à partir de l’État membre sur le territoire duquel il a été produit;

    b)      la déclaration d’exportation en cause est acceptée par l’État membre visé au point a) avant le 1er janvier suivant la fin de la campagne de commercialisation au cours de laquelle le sucre C [...] a été produit;

    c)      le sucre C [...] a quitté le territoire douanier de la Communauté au plus tard dans un délai de soixante jours à compter du 1er janvier visé au point b);

    d)      le produit a été exporté sans restitution ni prélèvement [...] à partir de l’État membre visé au point a).

    Sauf cas de force majeure, si l’ensemble des conditions prévues au premier alinéa ne sont pas remplies, la quantité de sucre C [...] en cause est considérée comme écoulée sur le marché intérieur.

    En cas de force majeure, l’organisme compétent de l’État membre sur le territoire duquel le sucre C [...] a été produit arrête les mesures nécessaires en raison des circonstances invoquées par l’intéressé.»

    8       Aux termes du troisième considérant du règlement n° 2670/81, «lors de la fixation du montant à percevoir en cas d’écoulement sur le marché intérieur, il est indispensable de placer le sucre C […] non exporté dans des conditions comparables à celles du sucre […] importé des pays tiers» et, «à cette fin, il y a lieu de fixer ce montant en tenant compte, d’une part, du niveau du prélèvement à l’importation pour le sucre […] le plus élevé applicable au cours d’une période comprenant la campagne de commercialisation pendant laquelle le sucre […] considéré a été produit et les six mois suivant cette campagne et, d’autre part, d’un montant forfaitaire fixé sur la base des frais d’écoulement subis par un sucre importé des pays tiers».

    9       L’article 3 du règlement n° 2670/81 prévoit:

    «1.      Pour les quantités qui, au sens de l’article 1er paragraphe 1, ont été écoulées sur le marché intérieur, l’État membre concerné perçoit un montant qui est égal à la somme:

    a)      en ce qui concerne le sucre C, par 100 kilogrammes du sucre en cause:

    –       du prélèvement à l’importation le plus élevé, applicable par 100 kilogrammes de sucre blanc ou brut selon le cas, au cours de la période comprenant la campagne de commercialisation pendant laquelle le sucre en cause a été produit et les six mois suivant cette campagne,

    et

    –       de 1 [euro];

    [...]

    4.      Pour les quantités de sucre C [...] qui, avant leur exportation, ont été détruites ou avariées sans avoir pu être récupérées, dans des circonstances reconnues par l’organisme compétent de l’État membre concerné comme cas de force majeure, le montant correspondant visé au paragraphe 1 n’est pas perçu.»

     La réglementation douanière

    10     L’article 13, paragraphe 1, du règlement (CEE) n° 1430/79 du Conseil, du 2 juillet 1979, relatif au remboursement ou à la remise des droits à l’importation ou à l’exportation (JO L 175, p. 1), tel que modifié par le règlement (CEE) n° 3069/86 du Conseil, du 7 octobre 1986 (JO L 286, p. 1, ci-après le «règlement n° 1430/79»), dispose:

    «Il peut être procédé au remboursement ou à la remise des droits à l’importation dans des situations particulières […] qui résultent de circonstances n’impliquant ni manœuvre ni négligence manifeste de la part de l’intéressé.

    Les situations dans lesquelles il peut être fait application du premier alinéa, ainsi que les modalités de procédure à suivre à cette fin, sont définies selon la procédure prévue [pour l’adoption des mesures d’application]. Le remboursement ou la remise peuvent être subordonnés à des conditions particulières.»

    11     L’article 14 du règlement n° 1430/79 précise que les dispositions de l’article 13 s’appliquent, mutatis mutandis, en matière de remboursement ou de remise des droits à l’exportation.

    12     Aux termes de l’article 1er, paragraphe 2, sous a), du règlement nº 1430/79, on entend par «droits à l’importation» «tant les droits de douane et taxes d’effet équivalent que les prélèvements agricoles et autres impositions à l’importation prévues dans le cadre de la politique agricole commune ou dans celui des régimes spécifiques applicables, au titre de l’article 235 du traité, à certaines marchandises résultant de la transformation de produits agricoles».

    13     Conformément à l’article 1er, paragraphe 2, sous b), du même règlement, on entend par «droits à l’exportation» «les prélèvements agricoles et autres impositions à l’exportation prévues dans le cadre de la politique agricole commune ou dans celui des régimes spécifiques applicables, au titre de l’article 235 du traité, à certaines marchandises résultant de la transformation de produits agricoles».

    14     L’article 4 du règlement (CEE) n° 3799/86 de la Commission, du 12 décembre 1986, fixant les dispositions d’application des articles 4 bis, 6 bis, 11 bis et 13 du règlement n° 1430/79 (JO L 352, p. 19), énumère des situations particulières qui résultent de circonstances n’impliquant ni manœuvre ni négligence manifeste de la part de l’intéressé au sens de l’article 13, paragraphe 1, du règlement n° 1430/79. D’autres faits peuvent également être considérés comme constitutifs de telles situations particulières à l’issue d’une appréciation au cas par cas, dans le cadre d’une procédure nécessitant l’intervention de la Commission.

     Les antécédents du litige

    15     Cosun, qui est une coopérative établie aux Pays-Bas, a produit du sucre C au cours des campagnes de commercialisation 1991/1992 et 1992/1993. Pendant l’année 1993, elle a vendu un certain nombre de lots de sucre C à différents cocontractants en vue de leur exportation vers, respectivement, la Croatie, la Slovénie et le Maroc.

    16     Ces opérations ont donné lieu à des fraudes commises, à l’insu de Cosun, par ses cocontractants, caractérisées notamment par l’estampillage non conforme des documents T5, destinés à prouver que les lots de sucre C avaient bien quitté le territoire de la Communauté.

    17     Une enquête sur les agissements desdits cocontractants avait été ouverte par les autorités néerlandaises compétentes, qui avaient averti le Hoofdproductschap Akkerbouwproducten (ci-après le «HPA»), l’instance compétente aux Pays-Bas pour l’application des dispositions en matière d’organisations communes des marchés. En revanche, dans un premier temps, Cosun n’a pas été informée de cette enquête.

    18     Par décision du 25 avril 1994, modifiée par décision du 13 juin 1994, le HPA a, en application de l’article 3 du règlement n° 2670/81, réclamé à Cosun un montant de 6 250 856,78 NLG (2 836 515,14 euros) du fait qu’elle n’avait pas prouvé que certains lots de sucre C avaient quitté le territoire de la Communauté.

    19     Le HPA ayant rejeté la réclamation introduite par Cosun, celle-ci a, à la fois, formé un recours contre cette décision de rejet devant le College van Beroep voor het bedrijfsleven (Pays-Bas) et présenté au HPA, sur le fondement de l’article 13 du règlement n° 1430/79, une demande de remise du montant réclamé.

    20     Concernant, en premier lieu, le recours formé devant le College van Beroep voor het bedrijfsleven, cette juridiction a, par décision du 9 juin 2004, saisi la Cour d’un renvoi préjudiciel portant notamment sur la validité du règlement de base et du règlement n° 2670/81. Par arrêt de ce jour, Koninklijke Coöperatie Cosun (C‑248/04, non encore publié au Recueil), la Cour a répondu que l’examen de la question posée à cet égard n’a révélé aucun élément de nature à affecter la validité de ces règlements.

    21     Concernant, en second lieu, la demande de remise du montant réclamé, les autorités néerlandaises l’ont transmise à la Commission, qui était compétente pour l’examiner, en l’accompagnant d’un avis positif. La Commission ayant, par la décision litigieuse, déclaré ladite demande irrecevable, Cosun a introduit un recours en annulation devant le Tribunal.

     L’arrêt attaqué

    22     Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le recours de la requérante.

    23     Par son premier moyen, la requérante alléguait que le montant qui lui est réclamé en application de l’article 3 du règlement n° 2670/81 constitue un droit à l’importation ou à l’exportation au sens des articles 1er, paragraphe 2, sous a) et b), et 13 du règlement n° 1430/79, de sorte que sa demande de remise fondée sur ce dernier article aurait dû être déclarée recevable.

    24     Aux points 36 à 38 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que le montant réclamé ne correspond «formellement» à aucune des trois catégories de droit à l’importation ou à l’exportation énumérées à l’article 1er, paragraphe 2, sous a) et b), du règlement n° 1430/79, car il ne constitue ni un droit de douane ni une taxe équivalente à un droit de douane, et n’est pas «strictement» une imposition agricole à l’importation ou à l’exportation.

    25     La requérante ayant soutenu qu’un tel montant doit être considéré comme un droit à l’importation ou à l’exportation, car il poursuivrait les mêmes objectifs qu’un droit de douane, serait fixé sur la base du prélèvement à l’importation de sucre en provenance des pays tiers et servirait à placer le sucre hors quotas non exporté dans des conditions comparables à celles du sucre importé des pays tiers, le Tribunal a écarté ces arguments aux points 40 à 46 de l’arrêt attaqué.

    26     Il a considéré, en substance, qu’un montant dû au titre de l’article 3 du règlement n° 2670/81 ne poursuit pas strictement les mêmes objectifs que les prélèvements à l’importation ou les restitutions à l’exportation prévus dans le cadre de l’OCM du sucre et que la prise en considération du prélèvement à l’importation de sucre en provenance des pays tiers lors de la fixation d’un tel montant ne sert qu’à fournir une base de calcul, mais ne vise nullement à placer le sucre importé des pays tiers et le sucre C écoulé sur le marché intérieur dans des situations comparables.

    27     Le Tribunal a conclu, au point 47 de l’arrêt attaqué, que le montant réclamé à la requérante ne constitue pas un droit à l’importation ou à l’exportation au sens de l’article 13 du règlement n° 1430/79 et que la Commission n’a donc pas violé cette disposition en déclarant irrecevable la demande de remise.

    28     Par son second moyen, la requérante alléguait, à titre principal, que, même si le montant qui lui est réclamé ne constitue pas un droit à l’importation ou à l’exportation au sens du règlement n° 1430/79, la Commission aurait néanmoins dû examiner la demande de remise dans le cadre de l’article 13 de ce règlement, lequel constituerait une clause générale d’équité, et que, en se limitant à rejeter la demande comme irrecevable, la Commission avait violé les principes d’équité et d’égalité. À titre subsidiaire, la requérante soutenait que, dans le cas où l’article 13 du règlement n° 1430/79 ne s’appliquerait pas, la Commission aurait dû examiner la demande de remise en dehors du cadre de ce règlement et que, en se limitant à déclarer que la demande était irrecevable, elle avait violé les principes d’équité, d’égalité et de sécurité juridique.

    29     Aux points 57 et 58 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a écarté l’argument tiré de l’équité. Après avoir jugé que l’équité ne permet pas de déroger à l’application des dispositions communautaires hors les cas prévus par la réglementation ou dans l’hypothèse où la réglementation elle-même serait déclarée invalide, et rappelé qu’un montant dû au titre de l’article 3 du règlement n° 2670/81 n’entre pas dans le champ d’application de l’article 13 du règlement nº 1430/79, il a constaté que la réglementation de l’OCM du sucre prévoit qu’un tel montant n’est pas perçu dans des situations ayant été reconnues par les autorités nationales comme constitutives d’un cas de force majeure et a conclu que l’équité ne saurait justifier d’étendre les possibilités de dérogation à la perception du montant en cause hors ces cas de force majeure.

    30     Aux points 59 et 61 du même arrêt, le Tribunal a écarté l’argument tiré d’une violation du principe d’égalité. Il a estimé, en substance, que le producteur de sucre C et l’opérateur économique assujetti à des droits à l’importation ou à l’exportation ne se trouvent pas, en tout état de cause, dans des situations comparables.

    31     Enfin, aux points 62 et 63 dudit arrêt, le Tribunal a écarté l’argument tiré de la violation du principe de sécurité juridique, en considérant, en substance, que ce principe est respecté en l’occurrence, car les obligations du redevable du montant prévu à l’article 3 du règlement nº 2670/81 découlent d’une situation juridique clairement définie, permettant à l’opérateur économique de connaître lesdites obligations inhérentes à son activité.

     Le pourvoi

    32     Dans son pourvoi, au soutien duquel elle invoque quatre moyens, la requérante conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

    –       annuler l’arrêt attaqué;

    –       à titre principal, annuler la décision litigieuse et, à titre subsidiaire, renvoyer l’affaire devant le Tribunal;

    –       condamner la Commission aux dépens exposés tant en première instance qu’au stade du pourvoi.

    33     La Commission demande à la Cour:

    –       à titre principal, de déclarer les deuxième et quatrième moyens irrecevables et de rejeter le pourvoi comme mal fondé pour le surplus;

    –       à titre subsidiaire, de rejeter le pourvoi comme étant mal fondé dans son intégralité;

    –       de condamner la requérante aux dépens.

     Sur le premier moyen

     Argumentation des parties

    34     Par son premier moyen, la requérante fait valoir que, en considérant, aux points 36 à 38 de l’arrêt attaqué, qu’un montant dû au titre de l’article 3 du règlement n° 2670/81 n’est pas «formellement» une imposition agricole à l’importation ou à l’exportation au sens de l’article 1er, paragraphe 2, sous a) et b), du règlement n° 1430/79, le Tribunal a commis une erreur de droit.

    35     La requérante déduit de l’affirmation, au point 38 de l’arrêt attaqué, que le montant qui lui est réclamé «n’est pas strictement une imposition agricole ‘à l’importation ou à l’exportation’» la preuve que le Tribunal s’est livré à une interprétation stricte de la notion d’«imposition agricole». Or, selon elle, une interprétation moins stricte était possible et aurait été souhaitable étant donné que ledit montant lui est réclamé en raison de la non-exportation de lots de sucre C.

    36     La requérante ajoute que le Tribunal a manqué à son obligation de motivation en n’indiquant pas pourquoi une interprétation moins stricte ne convenait pas.

    37     La Commission répond que le Tribunal a, à juste titre, jugé de façon motivée qu’un montant dû au titre de l’article 3 du règlement n° 2670/81 ne peut être formellement considéré comme une imposition agricole à l’importation ou à l’exportation au sens de l’article 1er, paragraphe 2, sous a) et b), du règlement n° 1430/79. Elle conteste que le Tribunal ait retenu une interprétation stricte de la notion d’«imposition agricole à l’importation ou à l’exportation».

     Appréciation de la Cour

    38     D’une part, il convient de relever que la requérante ne conteste pas l’analyse du Tribunal selon laquelle un montant dû au titre de l’article 3 du règlement n° 2670/81 ne constitue pas un droit de douane à l’importation ou à l’exportation ou une taxe d’effet équivalent.

    39     D’autre part, le Tribunal a relevé à juste titre, au point 38 de l’arrêt attaqué, que les prélèvements agricoles à l’importation ou à l’exportation et les autres impositions à l’importation ou à l’exportation visés à l’article 1er, paragraphe 2, sous a) et b), du règlement nº 1430/79 sont perçus en raison du franchissement des frontières extérieures de la Communauté par des produits agricoles ou par certaines marchandises résultant de la transformation de produits agricoles.

    40     Ce faisant, le Tribunal ne s’est nullement livré à une interprétation stricte de la notion d’«impositions agricoles à l’importation ou à l’exportation», mais a justement identifié le fait générateur de ces impositions.

    41     Or, force est de constater qu’un montant dû au titre de l’article 3 du règlement n° 2670/81 n’est pas perçu en raison du franchissement des frontières extérieures de la Communauté par une quantité de sucre C, mais, au contraire, parce que ladite quantité n’a pas été exportée hors de la Communauté ou parce que son exportation n’a pas respecté les conditions et délais fixés par le règlement n° 2670/81. Comme le Tribunal l’a justement relevé au point 37 de l’arrêt attaqué, le fait générateur de la perception d’un tel montant est donc l’absence de preuve, à la date déterminée à cet effet, de l’exportation d’une quantité de sucre C dans le délai requis.

    42     Il apparaît ainsi que, nonobstant l’utilisation du mot «formellement» au point 36 de l’arrêt attaqué, le Tribunal ne s’est pas limité à une appréciation formelle, mais a analysé la nature des impositions agricoles, d’une part, et d’un montant dû au titre de l’article 3 du règlement n° 2670/81, d’autre part.

    43     Dès lors, le Tribunal n’a ni commis une erreur de droit ni manqué à son obligation de motivation en jugeant, audit point de l’arrêt attaqué, que le montant réclamé à la requérante ne correspond à aucune des trois catégories énumérées à l’article 1er, paragraphe 2, sous a) et b), du règlement n° 1430/79.

    44     Le premier moyen doit être écarté comme étant non fondé.

     Sur le deuxième moyen

     Argumentation des parties

    45     Par son deuxième moyen, la requérante soutient que, à supposer même qu’un montant dû au titre de l’article 3 du règlement n° 2670/81 ne relève pas «formellement» de la notion de «droits à l’importation ou à l’exportation» au sens de l’article 1er, paragraphe 2, sous a) et b), du règlement n° 1430/79, le Tribunal a commis une erreur de droit en écartant, aux points 40 à 46 de l’arrêt attaqué, ses arguments, déjà résumés au point 25 du présent arrêt, selon lesquels un tel montant doit néanmoins être traité comme un droit à l’importation au sens de l’article 13 de ce dernier règlement.

    46     En premier lieu, c’est à tort que le Tribunal aurait omis de constater qu’un montant dû au titre de l’article 3 du règlement n° 2670/81, qui vise, conformément au dixième considérant du règlement de base, à rétablir les rapports de marché qui ont été perturbés par la non-exportation de sucre C, poursuit les mêmes objectifs de protection du marché intérieur, de stabilisation des marchés et de sécurité des approvisionnements que les droits de douane, et que, partant, ils doivent être traités de la même manière.

    47     En second lieu, il ressortirait du troisième considérant du règlement (CEE) n° 2645/70 de la Commission, du 28 décembre 1970, relatif aux dispositions applicables à la quantité de sucre produite au-delà du quota maximum (JO L 283, p. 48), ainsi que du troisième considérant du règlement n° 2670/81, qui l’a remplacé, que le législateur communautaire a jugé «indispensable» de placer le sucre C non exporté «dans des conditions comparables» à celles du sucre importé des pays tiers et, à cette fin, de fixer le montant dû pour le sucre C écoulé sur le marché intérieur au niveau du prélèvement à l’importation de sucre le plus élevé fixé au cours d’une période comprenant la campagne sucrière pendant laquelle le sucre considéré a été produit et les six mois suivant cette campagne, augmenté d’un montant forfaitaire fixé sur la base des frais d’écoulement subis par un sucre importé des pays tiers.

    48     La requérante en déduit que, contrairement à ce qu’a jugé le Tribunal aux points 45 et 46 de l’arrêt attaqué, la prise en considération du prélèvement à l’importation de sucre en provenance des pays tiers ne sert pas seulement à fixer le montant dû en application de l’article 3 du règlement n° 2670/81, mais traduit également la volonté du législateur communautaire de placer les producteurs de sucre C dans des conditions comparables à celles applicables aux importateurs de sucre en provenance des pays tiers. Or, pour que ces conditions soient comparables, la réglementation communautaire en matière douanière, notamment l’article 13 du règlement n° 1430/79, devrait s’appliquer à la fixation de ce montant.

    49     À titre principal, la Commission conclut à l’irrecevabilité du deuxième moyen du pourvoi, au motif qu’il n’est qu’une répétition des arguments déjà exposés devant le Tribunal et que celui-ci a écartés.

    50     À titre subsidiaire, la Commission demande à la Cour de rejeter ce moyen comme étant mal fondé.

    51     En premier lieu, elle constate que le Tribunal a indiqué, aux points 44 et 45 de l’arrêt attaqué, la finalité spécifique d’un montant dû au titre de l’article 3 du règlement n° 2670/81. Un tel montant aurait principalement «un caractère dissuasif, ayant pour objectif d’assurer le respect de l’interdiction d’écoulement de sucre C sur le marché intérieur». C’est donc à bon droit que le Tribunal aurait constaté que cette finalité est différente des objectifs poursuivis par les prélèvements à l’importation et les restitutions à l’exportation dans le cadre de l’OCM du sucre, que le Tribunal a définis aux points 42 et 43 dudit arrêt.

    52     En second lieu, le Tribunal aurait légitimement considéré, aux points 44 à 46 de l’arrêt attaqué, que le mode de calcul du montant dû en application de l’article 3 du règlement n° 2670/81 n’en fait pas un droit de douane.

    53     À l’appui de son analyse contraire, la requérante se bornerait à invoquer un considérant dépourvu de force contraignante, dont, de surcroît, elle méconnaîtrait le libellé, duquel il ressortirait que la référence au prélèvement à l’importation de sucre en provenance des pays tiers ne constitue que la base de calcul dudit montant.

     Appréciation de la Cour

    54     En vertu des articles 225 CE, 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice et 112, paragraphe 1, premier alinéa, sous c), du règlement de procédure de la Cour, un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande. Ne répond pas à cette exigence le pourvoi qui, sans même comporter une argumentation visant spécifiquement à identifier l’erreur de droit dont serait entaché l’arrêt attaqué, se limite à répéter ou à reproduire textuellement les moyens et les arguments qui ont déjà été présentés devant le Tribunal (voir, notamment, arrêts du 4 juillet 2000, Bergaderm et Goupil/Commission, C‑352/98 P, Rec. p. I‑5291, points 34 et 35, ainsi que du 7 juillet 2005, Le Pen/Parlement, C‑208/03 P, Rec. p. I‑6051, point 39).

    55     En revanche, dès lors qu’un requérant conteste l’interprétation ou l’application du droit communautaire faite par le Tribunal, les points de droit examinés en première instance peuvent être de nouveau discutés au cours de la procédure de pourvoi. En effet, si un requérant ne pouvait fonder de la sorte son pourvoi sur des moyens et arguments déjà utilisés devant le Tribunal, ladite procédure serait privée d’une partie de son sens (voir, notamment, arrêts du 6 mars 2003, Interporc/Commission, C‑41/00 P, Rec. p. I‑2125, point 17, et Le Pen/Parlement, précité, point 40).

    56     Or, le deuxième moyen du pourvoi vise précisément à mettre en cause l’interprétation du règlement n° 1430/79 retenue par le Tribunal pour écarter le premier moyen de première instance. Ce moyen du pourvoi doit donc être jugé recevable.

    57     La requérante fait valoir, en substance, que le législateur communautaire ayant souhaité placer le producteur de sucre C dans les mêmes conditions que l’importateur de sucre en provenance des pays tiers, cela implique que le premier jouisse du même régime que le second, y compris la possibilité de remise ou de remboursement pour des raisons d’équité en vertu de l’article 13 du règlement n° 1430/79.

    58     À cet égard, il y a lieu de relever, en premier lieu, que l’OCM du sucre est fondée, pour l’essentiel, sur un régime des prix (prévoyant notamment la fixation de prix indicatif et d’intervention), un régime des échanges avec les pays tiers (comportant notamment la perception d’un prélèvement à l’importation en provenance desdits pays) et un régime des quotas (consistant en l’attribution de quotas de production et la fixation des modalités d’écoulement du sucre produit hors quotas).

    59     Les mesures ainsi instaurées ont toutes pour finalité ultime de stabiliser le marché communautaire du sucre et, partant, d’assurer le maintien des garanties nécessaires en ce qui concerne l’emploi et le niveau de vie des producteurs communautaires ainsi que la sécurité de l’approvisionnement en sucre de l’ensemble des consommateurs.

    60     Néanmoins, leurs objectifs immédiats diffèrent sensiblement. Ainsi, il résulte du cinquième considérant du règlement de base que le régime des échanges avec les pays tiers vise à éviter que les fluctuations des prix du sucre sur le marché mondial ne se répercutent sur les prix pratiqués à l’intérieur de la Communauté.

    61     Tel n’est pas, à l’évidence, l’objectif du régime des quotas. À cet égard, il y a lieu de souligner que, contrairement à ce que soutient la requérante, cet objectif n’est pas énoncé au dixième considérant du règlement de base, lequel vise à justifier la nécessité des mesures prévues à l’article 22 dudit règlement.

    62     Comme le Tribunal l’a justement relevé aux points 43 et 44 de l’arrêt attaqué, aux termes du quinzième considérant du règlement de base, les quotas de production sont un moyen de garantir aux producteurs les prix communautaires et l’écoulement de leur production. De surcroît, s’agissant plus spécifiquement du montant dû au titre de l’article 3 du règlement n° 2670/81, cette disposition a principalement un caractère dissuasif, visant à assurer le respect de l’interdiction d’écoulement du sucre C – produit hors quotas – sur le marché intérieur.

    63     Dès lors, le Tribunal a constaté à juste titre, aux points 41 à 44 de l’arrêt attaqué, que les prélèvements à l’importation de sucre en provenance des pays tiers et le montant dû au titre de l’article 3 du règlement n° 2670/81 pour le sucre C écoulé sur le marché intérieur ne poursuivent pas les mêmes objectifs.

    64     En second lieu, il ne résulte pas du troisième considérant du règlement n° 2645/70 ainsi que du troisième considérant du règlement n° 2670/81 – formulés en substance dans les mêmes termes – que le législateur communautaire ait souhaité que l’importateur de sucre en provenance des pays tiers et le producteur de sucre C écoulé sur le marché intérieur soient placés dans la même situation.

    65     En effet, il ressort clairement de ces considérants ainsi que de l’article 3 du règlement n° 2670/81 que la référence au sucre importé des pays tiers est limitée au mode de calcul du montant prévu audit article. De fait, cette disposition n’atteindrait pas son objectif immédiat, qui est d’assurer le respect de l’interdiction d’écoulement du sucre C sur le marché intérieur, s’il était économiquement plus intéressant d’acquérir du sucre C sur le marché intérieur que d’importer du sucre en provenance des pays tiers. En revanche, il n’est fait, dans lesdits considérants et article, aucune allusion à la situation respective des importateurs de sucre et des producteurs de sucre C.

    66     Quant à la circonstance que le prélèvement à l’importation de sucre en provenance des pays tiers sert de base de calcul au montant perçu en application de l’article 3 du règlement n° 2670/81, elle ne saurait justifier leur assimilation, un tel mode de calcul trouvant sa justification dans le souci d’assurer audit montant son caractère dissuasif, ainsi qu’il a été souligné au point précédent du présent arrêt.

    67     Dès lors, il ne découle ni de l’objectif poursuivi par le montant dû au titre de l’article 3 du règlement n° 2670/81, ni du mode de calcul et des modalités de perception de ce montant, tels que fixés au troisième considérant des règlements n° 2645/70 et n° 2670/81 et audit article 3, que le législateur communautaire ait souhaité assimiler le producteur de sucre C écoulé sur le marché intérieur à l’importateur de sucre.

    68     Dans ces conditions, le Tribunal n’a commis aucune erreur de droit en jugeant que la requérante était irrecevable à demander, sur le fondement de l’article 13 du règlement n° 1430/79, la remise du montant qui lui a été réclamé. Il convient donc d’écarter le deuxième moyen.

     Sur le troisième moyen

     Argumentation des parties

    69     Par la première branche du troisième moyen, la requérante allègue que, dans le cadre de l’examen du deuxième moyen de première instance, le Tribunal est sorti du cadre du litige tel que défini par la requête.

    70     Elle explique que, par ce moyen de première instance, elle faisait uniquement valoir que la Commission avait violé les principes d’égalité et d’équité en déclarant, dans la décision litigieuse, que la demande de remise était irrecevable dans le cadre du règlement n° 1430/79. En revanche, elle n’aurait pas demandé au Tribunal d’examiner la validité du règlement n° 2670/81.

    71     Or, le Tribunal aurait, aux points 58 à 62 de l’arrêt attaqué, procédé implicitement au contrôle de la validité dudit règlement au regard des principes généraux du droit. Ce faisant, il serait sorti du cadre du litige, tel que défini par les écritures de la requérante, et aurait ainsi violé le principe fondamental de procédure en vertu duquel c’est la requête qui délimite l’étendue du litige.

    72     Par la seconde branche du troisième moyen du pourvoi, la requérante allègue que le Tribunal a refusé d’examiner le troisième moyen de première instance, par lequel elle soutenait que, à supposer que l’article 13 du règlement n° 1430/79 ne s’applique pas, la Commission serait alors tenue d’examiner la demande de remise en dehors du cadre dudit règlement en vertu des principes d’équité, d’égalité et de sécurité juridique.

    73     S’agissant de la première branche du troisième moyen du pourvoi, la Commission fait valoir qu’il ne ressort nullement des points 58 à 62 de l’arrêt attaqué que le Tribunal aurait examiné la validité du règlement n° 2670/81.

    74     S’agissant de la seconde branche dudit moyen, la Commission souligne que les griefs que la requérante qualifie de «deuxième» et «troisième» moyens de première instance ont été examinés conjointement par le Tribunal, aux points 57 à 62 de l’arrêt attaqué, au titre du second moyen de première instance.

     Appréciation de la Cour

    75     Le troisième moyen du pourvoi repose sur une lecture erronée de l’arrêt attaqué.

    76     S’agissant de la seconde branche de ce moyen, il suffit de constater que les griefs que la requérante qualifie de deuxième et troisième moyens de première instance ont été considérés par le Tribunal comme deux branches du même moyen – qu’il a qualifié de second moyen de première instance – soulevées, la première, à titre principal, la seconde, à titre subsidiaire, et que le Tribunal a examiné conjointement ces deux branches aux points 56 à 63 de l’arrêt attaqué.

    77     Dès lors, le Tribunal a répondu aux griefs que la requérante qualifie de troisième moyen de première instance.

    78     S’agissant de la première branche du troisième moyen du pourvoi, il y a lieu de souligner que, par la seconde branche, subsidiaire, du second moyen de première instance, résumée au point 53 de l’arrêt attaqué, la requérante faisait valoir que, dans l’hypothèse où l’article 13 du règlement n° 1430/79 ne serait pas applicable, la Commission serait alors tenue, en vertu des principes d’équité, d’égalité et de sécurité juridique, d’examiner la demande de remise en dehors du cadre dudit règlement. Par cette branche, la requérante a notamment soutenu que l’article 3 du règlement n° 2670/81 devait être interprété et appliqué dans le respect des principes généraux du droit.

    79     Afin de répondre à cet argument, le Tribunal, après avoir jugé que, hormis en cas de force majeure, le règlement n° 2670/81 ne prévoit pas la possibilité de remise ou de remboursement d’un montant prévu à son article 3, a à juste titre examiné si le défaut d’une telle possibilité constitue une violation des principes d’égalité et de sécurité juridique ainsi que d’un prétendu principe d’équité, invoqués par la requérante.

    80     Ce faisant, il a exactement répondu aux arguments de la requérante, sans sortir du cadre du litige dont il était saisi.

    81     Il convient donc d’écarter le troisième moyen du pourvoi comme non fondé.

     Sur le quatrième moyen

     Argumentation des parties

    82     Par son quatrième moyen, la requérante fait valoir, à titre très subsidiaire, dans l’hypothèse où les autres moyens du pourvoi seraient écartés, que le Tribunal a commis une erreur de droit en rejetant son moyen de première instance fondé sur les principes d’équité, d’égalité et de sécurité juridique.

    83     En premier lieu, l’affirmation du Tribunal, au point 60 de l’arrêt attaqué, selon laquelle le producteur de sucre C et l’opérateur économique assujetti à des droits à l’importation ou à l’exportation ne se trouvent pas dans des situations comparables serait erronée.

    84     En effet, d’une part, il résulterait du troisième considérant du règlement n° 2670/81 ainsi que des articles 26 du règlement de base et 3 du règlement n° 2670/81 que le sucre C dont l’exportation n’a pas pu être prouvée dans les délais impartis obtient le statut de produit importé des pays tiers. D’autre part, tant les droits à l’importation de marchandises provenant de ces pays que le montant dû au titre de l’article 3 du règlement n° 2670/81 constituent des ressources propres de la Communauté qui naissent des importations en provenance desdits pays.

    85     En deuxième lieu, la situation de la requérante serait largement comparable à celle de De Haan Beheer BV, en cause dans l’arrêt du 7 septembre 1999, De Haan (C‑61/98, Rec. p. I‑5003), dans lequel la Cour a jugé qu’une entreprise dans la situation de De Haan Beheer BV peut se prévaloir de l’article 13 du règlement n° 1430/79 pour obtenir une remise de droits de douane.

    86     Si le Tribunal avait, comme il aurait dû le faire, recherché si la différence de traitement réservé, d’une part, à une entreprise comme De Haan Beheer BV et, d’autre part, à la requérante viole l’équité, est discriminatoire et contrevient au principe de sécurité juridique, il aurait dû constater que tel est le cas.

    87     En troisième lieu, le Tribunal aurait, à tort, ignoré la différence de traitement entre la requérante et les autres producteurs de sucre C. Ces derniers peuvent, en vertu des articles 26 et 27 du règlement de base, choisir soit d’exporter le sucre C, soit de le reporter en tout ou en partie sur une autre campagne. En revanche, en raison du silence des autorités néerlandaises, la requérante n’aurait plus été en mesure d’effectuer ce choix lorsqu’elle a été informée des fraudes commises.

    88     S’agissant de ce dernier argument, la requérante fait valoir qu’elle avait déjà invoqué la violation du principe d’égalité devant le Tribunal. Partant, ledit argument ne constituerait pas un moyen nouveau irrecevable, mais serait un argument nouveau valablement développé dans le cadre d’un moyen déjà soulevé.

    89     À titre principal, la Commission conclut à l’irrecevabilité du quatrième moyen.

    90     En ce qui concerne l’argument tiré de la différence de traitement entre la requérante et les autres producteurs de sucre C, il s’agirait d’un grief nouveau sur lequel le Tribunal n’a pas pu se prononcer et qui serait donc irrecevable en vertu des dispositions combinées des articles 118 et 42, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour.

    91     Pour le surplus, le quatrième moyen se bornerait à reproduire les mêmes arguments que ceux exposés en première instance et ne satisferait donc pas aux exigences de motivation découlant des articles 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice et 112, paragraphe 1, premier alinéa, sous c), du règlement de procédure de la Cour.

    92     À titre subsidiaire, la Commission conclut au rejet de ce moyen comme étant non fondé.

    93     Le Tribunal aurait jugé à juste titre, respectivement aux points 44 à 46 et aux points 60 et 61 de l’arrêt attaqué, que le sucre C non exporté et le sucre importé des pays tiers, d’une part, et qu’un producteur de sucre C et un opérateur économique assujetti à des droits à l’importation ou à l’exportation, d’autre part, ne sont pas comparables sur le plan de leur traitement en droit communautaire. C’est pourquoi il n’aurait pas examiné plus avant l’argument de la requérante fondé sur l’arrêt De Haan, précité.

    94     Les arguments invoqués par la requérante ne seraient pas de nature à prouver que le Tribunal a violé le droit communautaire en considérant que les principes d’égalité et de sécurité juridique ainsi qu’un prétendu principe d’équité ne s’opposaient pas à ce que la Commission déclare irrecevable la demande de remise de droits.

     Appréciation de la Cour

    –       Sur la recevabilité

    95     En tant qu’il fait grief au Tribunal d’avoir violé le principe d’égalité en ignorant la différence de traitement entre la requérante et les autres producteurs de sucre C, le quatrième moyen doit être déclaré irrecevable.

    96     En effet, selon une jurisprudence constante, permettre à une partie de soulever pour la première fois devant la Cour un moyen qu’elle n’a pas soulevé devant le Tribunal reviendrait à lui permettre de saisir la Cour, dont la compétence en matière de pourvoi est limitée, d’un litige plus étendu que celui dont a eu à connaître le Tribunal. Dans le cadre d’un pourvoi, la compétence de la Cour est donc limitée à l’appréciation de la solution légale qui a été donnée aux moyens débattus devant les premiers juges (voir, notamment, arrêt du 11 novembre 2004, Ramondín e.a./Commission, C‑186/02 P et C‑188/02 P, Rec. p. I‑10653, point 60).

    97     Or, si la requérante a fait valoir en première instance que la décision litigieuse viole le principe d’égalité, elle contestait uniquement la différence de traitement qu’elle aurait subie par rapport aux importateurs de sucre en provenance des pays tiers, dont elle soutenait qu’ils étaient placés dans la même situation qu’elle.

    98     Dès lors, le Tribunal n’avait pas à rechercher si l’impossibilité d’accorder une remise ou un remboursement du montant réclamé à la requérante constitue une discrimination par rapport aux autres producteurs de sucre C.

    99     Pour le surplus, le quatrième moyen du pourvoi, qui vise, en substance, à mettre en cause l’interprétation du principe d’égalité retenue par le Tribunal pour écarter le second moyen de première instance, doit être déclaré recevable pour les motifs exposés aux points 54 et 55 du présent arrêt.

    –       Sur le bien-fondé

    100   En premier lieu, le Tribunal n’a commis aucune erreur de droit en constatant, au point 60 de l’arrêt attaqué, que le producteur de sucre C et l’opérateur économique assujetti à des droits à l’importation ou à l’exportation ne se trouvent pas dans des situations comparables.

    101   L’argument de la requérante tiré du troisième considérant et de l’article 3 du règlement n° 2670/81 a déjà été rejeté dans le cadre de l’examen du deuxième moyen du pourvoi. S’agissant de l’article 26 du règlement de base, aucune volonté du législateur communautaire d’accorder au sucre C écoulé sur le marché intérieur le statut de produit importé des pays tiers et d’assimiler le producteur de sucre C à l’importateur de sucre ne peut être déduite de son libellé, cet article se bornant à énoncer l’interdiction d’écoulement du sucre C sur le marché intérieur.

    102   Quant à l’argument tiré de ce que tant les droits à l’importation que le montant dû au titre de l’article 3 du règlement n° 2670/81 font partie des ressources propres de la Communauté, il n’est pas de nature à démontrer que les importateurs de sucre en provenance des pays tiers et les producteurs de sucre C sont dans une situation comparable. En effet, les ressources propres de la Communauté sont composées de recettes de natures très différentes soumises à des régimes également différents (voir, par exemple, les recettes de la taxe sur la valeur ajoutée).

    103   En second lieu, dès lors que le Tribunal a constaté que, en tout état de cause, un producteur de sucre C – telle la requérante – et un opérateur économique assujetti à des droits à l’importation ou à l’exportation – telle De Haan Beheer BV en cause dans l’arrêt De Haan, précité – ne se trouvent pas dans des situations comparables, il a écarté à suffisance de droit l’argument de la requérante tiré de cet arrêt.

    104   Le quatrième moyen du pourvoi doit donc être écarté comme étant en partie irrecevable et en partie non fondé.

    105   La requérante ayant succombé en tous ses moyens, il convient de rejeter le pourvoi.

     Sur les dépens

    106   Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en application de l’article 118 du même règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la requérante et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

    Par ces motifs, la Cour (première chambre) déclare et arrête:

    1)      Le pourvoi est rejeté.

    2)      Koninklijke Coöperatie Cosun UA est condamnée aux dépens.

    Signatures


    * Langue de procédure: le néerlandais.

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