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Document 62004CC0523

    Conclusions de l'avocat général Mengozzi présentées le 16 novembre 2006.
    Commission des Communautés européennes contre Royaume des Pays-Bas.
    Manquement d'État - Conclusion par un État membre d'un accord bilatéral relatif au transport aérien avec les États-Unis d'Amérique - Droit d'établissement - Droit dérivé régissant le marché intérieur du transport aérien - Compétence externe de la Communauté.
    Affaire C-523/04.

    Recueil de jurisprudence 2007 I-03267

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2006:717

    Conclusions de l'avocat général

    Conclusions de l'avocat général

    I – Introduction

    1. Le 5 novembre 2002, saisie par la Commission des Communautés européennes en vertu de l’article 169 du traité CE (devenu article 226 CE), la Cour a rendu huit arrêts à l’encontre, respectivement, de la République d’Autriche (2), du Royaume de Belgique (3), du Royaume de Danemark (4), de la République de Finlande (5), de la République fédérale d’Allemagne (6), du Grand‑Duché de Luxembourg (7), du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord (8) et du Royaume de Suède (9), dans lesquels elle a constaté que, en négociant, en appliquant et/ou en maintenant en vigueur certains engagements internationaux avec les États-Unis d’Amérique en matière de transport aérien, lesdits États membres avaient manqué aux obligations qui leur incombent en vertu des articles 5 du traité CE (devenu article 10 CE) et 52 du traité CE (devenu, après modification, article 43 CE), ainsi que des règlements (CEE) n° 2409/92 du Conseil, du 23 juillet 1992, sur les tarifs des passagers et de fret des services aériens (10), et n° 2299/89 du Conseil, du 24 juillet 1989, instaurant un code de conduite pour l’utilisation de systèmes informatisés de réservation (11), tel que modifié par le règlement (CEE) 3089/93 du Conseil, du 29 octobre 1993 (12) (ci‑après les «arrêts du 5 novembre 2002») (13) .

    2. Par le recours formé en l’espèce, la Commission souhaite obtenir de la Cour une décision similaire en ce qui concerne le Royaume des Pays-Bas.

    II – Le cadre juridique de référence

    3. Les griefs que la Commission formule à l’encontre du Royaume des Pays‑Bas se limitent aux violations qui ont été constatées par la Cour dans lesdits arrêts du 5 novembre 2002.

    4. Outre la violation des articles 5 et 52 du traité CE, la Commission reproche au Royaume des Pays-Bas d’avoir manqué aux obligations qui incombent à cet État membre en vertu de certains règlements du Conseil qui ont été adoptés dans le secteur du transport aérien. Il convient d’évoquer brièvement le contexte normatif dans lequel ces actes s’insèrent.

    5. En vue de mettre progressivement en place le marché intérieur du transport aérien, le Conseil de l’Union européenne a adopté en 1987, en 1990 et en 1992, sur le fondement de l’article 84, paragraphe 2, du traité CE (devenu article 80, paragraphe 2, CE) (14), trois «paquets» de réglementations tendant à assurer, d’une part, la libre prestation des services de transport aérien et, d’autre part, l’application dans ce secteur des règles communautaires en matière de concurrence.

    6. Adopté dans le cadre du «troisième paquet», qui était destiné à réaliser une libéralisation complète des transports aériens intracommunautaires (15), le règlement n° 2409/92 définit les critères et les procédures applicables en vue de la fixation des tarifs aériens des passagers et de fret pratiqués par les transporteurs aériens sur les seules liaisons intracommunautaires (article 1 er , paragraphe 1).

    7. Aux termes de son article 1 er , paragraphe 2, sous a), le règlement n° 2409/92 n’est pas applicable aux tarifs aériens des passagers et de fret pratiqués par les transporteurs aériens autres que les transporteurs aériens communautaires, sans préjudice de la disposition prévue au paragraphe 3 de ce même article, laquelle précise que «seuls les transporteurs aériens communautaires sont habilités à introduire de nouveaux produits ou des tarifs inférieurs à ceux existants pour des produits identiques». Comme nous le verrons plus en détail, dans les arrêts du 5 novembre 2002, la Cour a jugé, sur la base d’une lecture combinée de ces dispositions, que le règlement n° 2409/92 a, de manière indirecte mais certaine, interdit aux transporteurs aériens de pays tiers qui opèrent dans la Communauté d’introduire de nouveaux produits ou des tarifs inférieurs à ceux existant pour des produits identiques et que, en procédant de la sorte, le législateur communautaire a limité la liberté tarifaire de ces transporteurs, lorsqu’ils assurent des liaisons intracommunautaires en vertu des droits de cinquième liberté dont ils disposent. Partant, selon la Cour, la Communauté a, dans la mesure couverte par l’article 1 er , paragraphe 3, du règlement n° 2409/92, acquis la compétence exclusive de contracter avec les pays tiers les engagements se rapportant à cette limitation de la liberté tarifaire des transporteurs non communautaires (16) .

    8. En vertu de son article 12, le règlement n° 2409/92 est entré en vigueur le 1 er janvier 1993.

    9. Outre les actes figurant dans lesdits «paquets» de réglementations, le législateur communautaire a adopté plusieurs règlements visant à régler certains aspects spécifiques dans le secteur du transport aérien.

    10. En particulier, le règlement n° 2299/89 instaure un code de conduite pour l’utilisation de systèmes informatisés de réservation. Conformément à son article 1 er , il s’applique aux systèmes informatisés de réservation (ci-après les «SIR»), contenant des produits de transport aérien, lorsqu’ils sont proposés et/ou utilisés sur le territoire de la Communauté, indépendamment du statut ou de la nationalité du vendeur de système, de la source de l’information utilisée ou de l’implantation de l’unité centrale de traitement des données, et de la localisation géographique des aéroports entre lesquels est effectué le transport aérien.

    11. Dans les arrêts du 5 novembre 2002, comme nous le verrons par la suite, la Cour a jugé que, en vertu de ses articles 1 er et 7, ce règlement s’applique, sous réserve de réciprocité, également aux ressortissants de pays tiers lorsqu’ils proposent ou utilisent un SIR sur le territoire de la Communauté et que, par l’effet de ce règlement, la Communauté a donc acquis la compétence exclusive de contracter avec les pays tiers les obligations relatives aux SIR proposés ou utilisés sur son territoire (17) .

    III – Les antécédents et le cadre factuel du recours

    A – L’accord bilatéral entre le Royaume des Pays-Bas et les États‑Unis d’Amérique

    12. Les relations entre le Royaume des Pays-Bas et les États-Unis d’Amérique en matière de transport aérien sont régies par un accord bilatéral paraphé le 3 avril 1957 (ci-après l’«accord de 1957»). Cet accord a été par la suite modifié et complété d’abord par un échange de lettres du 25 novembre 1969 puis par trois protocoles distincts en 1978, en 1987 et en 1991.

    13. Il résulte du dossier que, en 1992, les États-Unis d’Amérique ont pris l’initiative de proposer à différents États européens de conclure avec eux un accord bilatéral dit «de ciel ouvert». Un accord de ce type devait, d’une part, faciliter les alliances entre les transporteurs américains et européens et, d’autre part, respecter plusieurs critères définis par le gouvernement américain tels que le libre accès à toutes les routes, l’octroi des droits illimités de route et de trafic, la fixation des prix selon un système dit «de double désapprobation» pour les liaisons aériennes entre les parties à l’accord et la possibilité de partage de codes.

    14. Le 14 octobre 1992, le Royaume des Pays-Bas et les États-Unis d’Amérique ont procédé à un échange de notes relatif aux consultations qui se sont déroulées à Washington du 1 er au 4 septembre 1992 (ci-après l’«échange de notes de 1992»), au cours desquelles un consensus a été trouvé sur les modifications à apporter au texte de l’accord de 1957 et au protocole de 1978.

    15. Au cours des années 1993 et 1994, les États-Unis d’Amérique ont accentué leurs efforts pour conclure des accords bilatéraux en matière de transport aérien, selon la politique dite «de ciel ouvert», avec le plus grand nombre possible d’États européens.

    16. Dans une lettre du 17 novembre 1994, adressée aux États membres, la Commission a attiré l’attention de ces derniers sur les effets négatifs qu’entraîneraient ces accords bilatéraux pour la Communauté et a pris position en déclarant que ce type d’accord serait de nature à affecter la réglementation interne de la Communauté. Elle a ajouté que la négociation de tels accords ne pourrait être conduite efficacement et de façon juridiquement valable qu’au niveau communautaire.

    B – Les arrêts de la Cour du 5 novembre 2002

    17. Nous rappellerons brièvement les principes qui ont été établis par la Cour dans les arrêts du 5 novembre 2002, puisqu’il s’agit du précédent jurisprudentiel sur lequel la Commission se fonde pour étayer son recours.

    18. Par huit recours distincts, tous présentés le 18 décembre 1998, la Commission assignait devant la Cour de justice le Royaume-Uni de Grande‑Bretagne et d’Irlande du Nord, le Royaume de Danemark, le Royaume de Suède, la République de Finlande, le Royaume de Belgique, le Grand-Duché de Luxembourg, la République d’Autriche et la République fédérale d’Allemagne. Ces recours tendaient à faire constater, en application de l’article 169 du traité CE, divers manquements au droit communautaire résultant de la conclusion, par ces États, d’accords bilatéraux avec les États-Unis d’Amérique en matière de transport aérien. La Commission reprochait notamment aux États membres défendeurs, à l’exception du Royaume-Uni:

    – d’avoir conclu avec les États-Unis d’Amérique, entre 1995 et 1996, des accords particulièrement libéraux en matière de transport aérien (les accords dits «de ciel ouvert») en violation des principes de répartition des compétences externes entre la Communautés et les États membres,

    – à titre subsidiaire, d’avoir violé, selon le cas, l’article 234, deuxième alinéa, du traité CE (devenu, après modification, article 307, deuxième alinéa, CE) ou l’article 5 du traité CE, en ne mettant pas tout en œuvre pour rendre pleinement compatibles avec le droit communautaire les accords conclus avec les États‑Unis d’Amérique avant l’entrée en vigueur du traité CE ou avant l’adoption de la réglementation communautaire en matière de transport aérien, notamment celle que l’on appelle le troisième «paquet» de réglementations.

    19. À l’ensemble des États membres défendeurs la Commission reprochait aussi d’avoir violé l’article 52 du traité CE, en insérant ou en maintenant dans les accords bilatéraux avec les États-Unis d’Amérique une clause dite «de nationalité» qui permettait en pratique à chacune des parties de refuser les droits prévus par lesdits accords à des transporteurs aériens désignés par l’autre État contractant, mais qui ne sont pas détenus ou contrôlés par des ressortissants dudit État.

    20. On observera que le Royaume des Pays-Bas est intervenu dans l’ensemble de ces huit affaires.

    21. Sur le premier grief soulevé par la Commission à l’encontre de sept des huit États membres défendeurs, relatif à la violation de la compétence externe de la Communauté, la Cour a relevé en premier lieu que, si l’article 80, paragraphe 2, CE peut être utilisé comme fondement juridique par le Conseil pour reconnaître à la Communauté le pouvoir de conclure un accord international en matière de transport aérien dans un cas déterminé, il ne saurait en revanche établir à lui seul une compétence communautaire externe dans ce domaine (18) .

    22. La Cour a rappelé, en second lieu, qu’elle avait jugé, dans son avis 1/76 (19), que la compétence pour engager la Communauté vis‑à‑vis des pays tiers peut découler de manière implicite des dispositions du traité établissant la compétence interne, pour autant que la participation de la Communauté à l’accord international est nécessaire à la réalisation d’un des objectifs de la Communauté, et que, dans son avis 1/94 (20), elle avait par la suite précisé que cette hypothèse se réalise lorsque la compétence interne ne peut être utilement exercée qu’en même temps que la compétence externe, la conclusion de l’accord international étant ainsi nécessaire pour réaliser des objectifs du traité qui ne peuvent pas être atteints par l’établissement des règles autonomes. La Cour a cependant exclu qu’une telle hypothèse puisse se vérifier dans les cas d’espèce (21) .

    23. La Cour a examiné, en troisième lieu, la possibilité de reconnaître une compétence de la Communauté pour conclure des accords avec des pays tiers dans le secteur de la navigation aérienne en application des principes que la Cour a établis dans l’arrêt AETR (22) .

    24. Comme on le sait, dans cet arrêt, la Cour a jugé que chaque fois que, pour la mise en œuvre d’une politique commune prévue par le traité, la Communauté a pris des dispositions instaurant, sous quelque forme que ce soit, des règles communes, les États membres ne sont plus en droit, qu’ils agissent individuellement ou même collectivement, de contracter avec les pays tiers des obligations affectant ces règles ou altérant leur portée et que, au fur et à mesure de l’instauration de ces règles communes, la Communauté seule est en mesure d’assumer et d’exécuter, avec effet pour l’ensemble du domaine d’application de l’ordre juridique communautaire, les engagements contractés à l’égard des pays tiers (23) . Or, selon la Cour, ces principes devaient trouver également à s’appliquer dans les cas d’espèce, puisque, si les États membres avaient été libres de contracter des engagements internationaux affectant les règles communes adoptées sur le fondement de l’article 80, paragraphe 2, CE, cela aurait compromis la réalisation de l’objectif poursuivi par ces règles et aurait donc empêché la Communauté de remplir sa tâche dans la défense de l’intérêt commun (24) .

    25. La Cour a ensuite apprécié si les règles communes adoptées en matière de transport aérien et invoquées par la Commission étaient susceptibles d’être affectées par les engagements internationaux contractés par les États membres défendeurs. Au terme de cet examen, elle a conclu que cette interférence n’existait qu’en ce qui concerne les dispositions des règlements n° 2409/92 et n° 2299/89, et que, depuis l’entrée en vigueur de ces actes, les États membres ne pouvaient plus contracter ou maintenir en vigueur, malgré la renégociation des accords litigieux, des engagements internationaux concernant, d’une part, les tarifs pratiqués par des transporteurs de pays tiers sur des liaisons intracommunautaires et, d’autre part, les SIR proposés ou utilisés sur leurs territoires respectifs (25) .

    26. Par conséquent, la Cour a constaté que, en contractant ou en maintenant en vigueur de tels engagements avec les États-Unis d’Amérique, le Royaume de Danemark, le Royaume de Suède, la République de Finlande, le Royaume de Belgique, le Grand-Duché de Luxembourg, la République d’Autriche et la République fédérale d’Allemagne avaient violé la compétence externe de la Communauté.

    27. Quant au deuxième grief que la Commission avait formulé à l’encontre de l’ensemble des États membres défendeurs, relatif à la violation alléguée des dispositions en matière de droit d’établissement, la Cour a jugé que les clauses insérées dans les accords litigieux reconnaissant aux États-Unis d’Amérique le droit de révoquer, de suspendre ou de limiter les droits de trafic dans les cas où les transporteurs aériens désignés par chaque État membre défendeur n’étaient pas détenus par cet État membre ou par des ressortissants de ce dernier, étaient contraires à l’article 52 du traité CE, en ce qu’elles empêchaient les compagnies aériennes communautaires établies dans ces États membres, dont la propriété et le contrôle effectif appartenaient soit à un État membre autre que l’État membre d’établissement, soit à ses ressortissants, de bénéficier du traitement national dans l’État membre d’accueil (26) .

    28. Par conséquent, la Cour a constaté que, en insérant de telles clauses dans les accords litigieux, les huit États membres défendeurs avaient manqué aux obligations qui leur incombaient en vertu de l’article 52 du traité CE.

    C – Les initiatives de la Commission et du Conseil à la suite des arrêts de la Cour du 5 novembre 2002

    29. Le 19 novembre 2002, la Commission a présenté une communication concernant les conséquences des arrêts de la Cour du 5 novembre 2002 pour la politique européenne en matière de transport aérien (27) . Dans cette communication, la Commission a dressé l’état des lieux des relations extérieures de la Communauté en matière de transport aérien, a fait valoir les conclusions qu’il fallait, à son avis, tirer desdits arrêts et a présenté les orientations et principes essentiels de la politique extérieure de la Communauté dans le domaine en cause. En particulier, au point 38 de cette communication, la Commission s’exprimait en ces termes:

    «Dans la mesure où d’autres accords bilatéraux sur des services aériens couvrent les mêmes questions que les accords ‘ciel ouvert’ en cause, ils doivent eux aussi être considérés comme non conformes au droit communautaire. Cela s’applique non seulement aux autres accords avec les États-Unis qui n’ont pas encore été examinés par la Cour, mais aussi à tous les accords bilatéraux relatifs à des services aériens qui contiennent une clause de nationalité similaire, ou qui ont violé la compétence exclusive externe de la Communauté.»

    30. Il résulte du dossier que, parallèlement à la communication du 19 novembre 2002, la Commission a envoyé à tous les États membres une lettre les invitant à faire jouer les clauses de dénonciation prévues dans leurs accords avec les États‑Unis d’Amérique. Cette lettre a été adressée au Royaume des Pays-Bas le 25 novembre 2002. La Commission a réitéré l’invitation à dénoncer l’accord entre le Royaume des Pays-Bas et les États-Unis d’Amérique dans deux lettres ultérieures qui ont été adressées au gouvernement néerlandais le 30 juillet 2004 et le 10 mars 2005.

    31. Le 26 février 2003, la Commission a adopté une nouvelle communication concernant les relations entre la Communauté et les pays tiers dans le domaine de l’aviation (28), dans laquelle elle confirmait la nécessité de «mettre les relations entre les États membres et les États‑Unis en conformité avec le droit communautaire».

    32. Afin de donner suite aux arrêts du 5 novembre 2002, le Conseil a dégagé, lors de sa session des 5 et 6 juin 2003, un accord sur un ensemble de mesures relatives à la politique extérieure de l’aviation de la Communauté. Cet ensemble comportait:

    – une décision du Conseil autorisant la Commission à entamer des négociations avec les États-Unis d’Amérique dans le domaine du transport aérien (29) ;

    – une décision du Conseil autorisant la Commission à ouvrir des négociations avec des pays tiers en matière de propriété et de contrôle des transporteurs aériens et sur d’autres questions relevant de la compétence exclusive de la Communauté;

    – une «approche générale» arrêtée sur une proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant la négociation et la mise en œuvre d’accords relatifs à des services aériens entre les États membres et les pays tiers.

    33. Cette dernière mesure a été suivie par l’adoption du règlement (CE) n° 847/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, concernant la négociation et la mise en œuvre d’accords relatifs à des services aériens entre les États membres et les pays tiers (30) . Parmi les objectifs poursuivis par ce règlement, le seizième considérant mentionne notamment «la coordination des négociations menées avec les pays tiers en vue de conclure des accords relatifs à des services aériens, la nécessité de garantir une approche harmonisée à l’égard de la mise en œuvre et de l’application de ces accords et la vérification de leur compatibilité avec le droit communautaire». À cet effet, le règlement instaure une procédure de coopération entre les États membres et la Commission, à mettre en œuvre, conformément à l’article 1 er , paragraphe 1, chaque fois qu’un État membre décide d’entamer des négociations avec un pays tiers concernant un nouvel accord ou la modification d’un accord de services aériens existant, de ses annexes ou de tout autre arrangement bilatéral ou multilatéral connexe dont l’objet relève en partie de la compétence de la Communauté. Il convient de relever que les deuxième et troisième considérants de ce règlement rappellent les principes que la Cour a établis dans les arrêts du 5 novembre 2002, alors que le cinquième considérant indique que «la procédure de coopération entre les États membres et la Commission établie par le présent règlement ne devrait pas affecter la répartition des compétences entre la Communauté et les États membres, conformément au droit communautaire tel qu’interprété par la Cour de justice».

    IV – La procédure précontentieuse

    34. Le 19 janvier 1999, la Commission a adressé au gouvernement néerlandais une lettre de mise en demeure dans laquelle elle reprochait au Royaume des Pays‑Bas la violation de la compétence exclusive de la Communauté en vertu des principes établis par la Cour dans l’avis 1/76, la violation de l’article 5 du traité CE lu en combinaison avec les dispositions de droit dérivé prévues par les règlements n° 2407/92, n° 2408/92, n° 2409/92 et n° 2299/89 ainsi que la violation de l’article 52 du traité CE. Ces violations découlaient, selon la Commission, de la conclusion et de l’application ultérieure d’un accord «de ciel ouvert» avec les États-Unis d’Amérique.

    35. Le 1 er juin 1999, le Royaume des Pays-Bas a répondu à la lettre de mise en demeure en émettant des doutes quant à la légalité de la décision prise par la Commission d’ouvrir une procédure d’infraction pour des faits remontant à plus de six ans et à propos desquels aucune objection n’avait été formulée pendant ce temps, alors qu’une procédure en manquement avait été engagée en 1995 à l’encontre de huit autres États membres pour des faits similaires. Le Royaume des Pays-Bas contestait aussi l’analyse de la Commission concernant la portée des modifications apportées au protocole de 1992, l’existence d’une compétence exclusive de la Communauté dans le domaine du transport aérien, la prétendue violation de l’article 5 du traité CE, puisque les modifications litigieuses avaient été convenues avant l’entrée en vigueur des actes normatifs faisant partie du troisième «paquet», ainsi que la violation alléguée de l’article 52 du traité CE.

    36. N’étant pas satisfaite des réponses obtenues, la Commission a émis, le 24 octobre 2000, un avis motivé dans lequel elle maintenait les griefs adressés au gouvernement néerlandais dans la lettre du 19 janvier 1999. Le Royaume des Pays-Bas a transmis ses observations sur l’avis motivé le 23 février 2001, en maintenant à son tour la position prise dans la lettre du 1 er juin 1999.

    V – La procédure et les conclusions des parties

    37. Le 20 janvier 2004, la Commission a introduit le recours faisant l’objet du présent litige.

    38. Par ordonnance du président de la Cour du 6 juin 2005, la République française a été admise à intervenir à l’appui des conclusions du Royaume des Pays-Bas.

    39. La Commission demande à la Cour de constater que, en contractant ou en maintenant en vigueur, malgré la révision de l’accord de transport aérien du 3 avril 1957 entre le Royaume des Pays-Bas et les États-Unis d’Amérique, des engagements internationaux

    – concernant les tarifs pratiqués par les transporteurs aériens désignés par les États-Unis sur des liaisons intracommunautaires et les systèmes informatisés de réservation proposés ou utilisés sur le territoire néerlandais, et

    – reconnaissant aux États-Unis le droit de révoquer, de suspendre ou de limiter les droits de trafic dans les cas où les transporteurs aériens désignés par le Royaume des Pays-Bas ne sont pas détenus par ce dernier ou par des ressortissants néerlandais,

    le Royaume des Pays-Bas a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 5 et 52 du traité CE, ainsi que des règlements n° 2409/92 et n° 2299/89.

    40. Le Royaume des Pays-Bas demande à la Cour, à titre principal, de rejeter le recours comme étant irrecevable et, à titre subsidiaire, de le rejeter comme étant non fondé.

    41. La République française conclut à ce qu’il plaise à la Cour rejeter le recours.

    VI – Analyse juridique

    A – Sur la recevabilité

    1. Argumentation des parties

    42. Le Royaume des Pays-Bas relève que plus de six ans se sont écoulés entre la négociation des engagements en question et l’ouverture de la procédure au titre de l’article 226 CE par l’envoi de la lettre de mise en demeure, et plus de quatre ans entre l’adoption de l’avis motivé et l’introduction du recours en l’espèce. Il fait en outre observer que, alors que la Commission a engagé dès 1995 une procédure d’infraction contre huit autres États membres, aucune mesure n’a été prise à l’encontre du Royaume des Pays-Bas jusqu’en janvier 1999, date à laquelle la lettre de mise en demeure lui a été adressée. En agissant ainsi, la Commission aurait mis le Royaume des Pays-Bas «dans une position à ce point défavorable qu’elle a perdu son droit de déférer le Royaume des Pays-Bas à la Cour» afin de faire constater les manquements allégués en l’espèce.

    43. L’État membre défendeur fait valoir, en premier lieu, que l’inaction prolongée de la Commission, en même temps que la circonstance qu’une procédure d’infraction avait été ouverte à l’encontre de huit autres États membres pour des accords qu’ils avaient contractés, a créé dans le chef des autorités néerlandaises une confiance légitime dans la régularité de la position du Royaume des Pays-Bas, leur laissant entendre que la Commission jugeait cette position différente de celle desdits États. Cette conviction aurait été encore renforcée par la circonstance que, après le prononcé des arrêts de la Cour du 5 novembre 2002, la Commission a attendu plus de deux ans avant de former un recours contre le Royaume des Pays-Bas.

    44. Il invoque aussi la confiance légitime des opérateurs concernés et, à ce propos, il relève que les engagements litigieux permettent aux transporteurs néerlandais d’accéder aux liaisons américaines, un accès qui ne serait cependant plus garanti au cas où le Royaume des Pays-Bas serait tenu, à la suite de l’arrêt de la Cour, de modifier ces engagements. À l’argument de la Commission selon lequel cet accès resterait en tout état de cause assuré en vertu du principe de courtoisie, le Royaume des Pays-Bas oppose l’insuffisance de ce principe pour assurer la nécessaire stabilité du trafic aérien entre les deux pays.

    45. Le gouvernement néerlandais souligne par ailleurs que les engagements en cause conditionnent l’octroi par les autorités américaines de l’immunité anti-trust aux transporteurs néerlandais et que cette immunité a constitué l’une des conditions préalables pour la réalisation de l’alliance entre KLM et Northwest Airlines, qui a été approuvée par la Commission durant la procédure précontentieuse.

    46. Le Royaume des Pays-Bas fait valoir, en second lieu, que le pouvoir d’appréciation qui est reconnu à la Commission en vertu des articles 211 CE et 226 CE ne saurait autoriser celle-ci à agir en violation non seulement du principe de coopération loyale énoncé à l’article 10 CE, tel qu’interprété par la Cour dans l’ordonnance Zwartveld e.a. (31), mais également des principes de bonne administration et de sécurité juridique. En vertu de ces principes, la Commission serait tenue au respect d’un délai raisonnable.

    47. En troisième lieu, le gouvernement néerlandais soutient que l’irrecevabilité du recours se justifie en outre au regard de la circonstance que la Commission n’a pas du tout pris en compte les évolutions qui sont intervenues après que les arrêts de la Cour du 5 novembre 2002 ont été rendus et, notamment, l’attribution à la Commission, par décision prise lors de la session susmentionnée du Conseil des 5 et 6 juin 2003 (32), des mandats de négocier des accords internationaux en matière de transport aérien avec des pays tiers et avec les États-Unis d’Amérique, l’adoption du règlement n° 847/2004 et, plus généralement, la définition des objectifs communautaires dans le domaine de la navigation aérienne, à la poursuite desquels le Royaume des Pays-Bas aurait du reste activement participé.

    48. Le gouvernement néerlandais souligne enfin qu’un éventuel arrêt de la Cour qui constaterait les manquements allégués par la Communauté mettrait le Royaume des Pays-Bas dans une situation impossible, en l’obligeant à négocier avec les États-Unis d’Amérique une révision de l’accord bilatéral, en violation ainsi de la compétence exclusive de la Communauté et au risque de compromettre les objectifs des négociations en cours au niveau communautaire. En réponse à l’argument de la Commission selon lequel, pour se conformer à un éventuel arrêt de la Cour faisant droit au recours, il suffirait de dénoncer l’accord, le gouvernement néerlandais souligne que le recours à cette mesure créerait, en l’absence d’un accord au niveau communautaire, un vide juridique intolérable et préjudiciable pour les opérateurs nationaux concernés.

    49. La Commission fait valoir, en premier lieu, que selon une jurisprudence constante de la Cour, elle n’est pas tenue, dans le cadre d’une procédure en application de l’article 226 CE, de respecter des délais déterminés et que la durée éventuellement excessive de la procédure précontentieuse ne peut entraîner l’irrecevabilité du recours qu’en présence d’une violation des droits de la défense de l’État membre. Or, en l’espèce, la Commission estime que le Royaume des Pays-Bas n’a fait valoir aucun argument susceptible de prouver que la durée de cette procédure a eu une incidence sur l’exercice des droits de la défense.

    50. En second lieu, et à titre purement informatif, la Commission relève, dans son mémoire en réplique, que la raison pour laquelle, en 1995, elle a agi contre huit autres États membres mais pas contre le Royaume des Pays-Bas tient au fait qu’à l’époque elle considérait comme un obstacle la circonstance que, à la différence des huit autres cas, l’accord litigieux avait été conclu par le Royaume des Pays-Bas avant l’entrée en vigueur des actes faisant partie du «troisième paquet», quoique postérieurement à leur adoption. Cette institution ne se serait décidée à agir contre le Royaume des Pays-Bas qu’après le prononcé, le 18 décembre 1997, de l’arrêt de la Cour dans l’affaire Inter‑Environnement Wallonie (33) . La Commission indique par ailleurs qu’elle a découvert seulement dans le cadre de l’élaboration de la réplique que le Parlement néerlandais avait ratifié l’accord le 26 avril 1993, c’est-à-dire après l’entrée en vigueur du «troisième paquet».

    51. En troisième lieu, la Commission fait valoir que le fait d’avoir engagé la procédure précontentieuse plus tard que contre les huit autres États membres n’a nullement défavorisé le Royaume des Pays-Bas qui au contraire a pu disposer d’un délai plus important pour se conformer aux arrêts du 5 novembre 2002. Se référant au temps écoulé entre l’avis motivé et l’introduction du recours en l’espèce, la Commission note qu’elle a attendu que soient rendus lesdits arrêts et qu’elle a exposé sa position à la suite de leur prononcé déjà dans sa communication du 19 novembre 2002 puis, ultérieurement, dans les lettres adressées au gouvernement néerlandais le 25 novembre 2002, le 30 juillet 2004 et le 10 mars 2005. En outre, dans ces lettres, la Commission aurait invité le Royaume des Pays-Bas à se conformer aux arrêts du 5 novembre 2002 en dénonçant l’accord litigieux, ce qui excluait la possibilité d’une renégociation de cet accord. Or, en cas de dénonciation, l’accord en question continuerait encore à s’appliquer pendant deux ans et même si aucun accord n’était conclu au niveau communautaire à l’expiration de ce délai, le trafic aérien avec les États‑Unis d’Amérique continuerait à être assuré sur la base du principe de courtoisie.

    2. Appréciation

    52. Le gouvernement néerlandais s’oppose à la recevabilité du recours en invoquant la violation des principes de la confiance légitime et de la sécurité juridique, violation qui découlerait du retard avec lequel la Commission s’est décidée à agir à l’encontre du Royaume des Pays‑Bas en exerçant les compétences qui lui sont reconnues en vertu de l’article 226 CE. En outre, en agissant de manière intempestive, la Commission aurait violé l’article 5 du traité qui, selon l’interprétation que la Cour en a donné dans l’ordonnance Zwartveld e.a., précitée, impose aux institutions communautaires de conformer leur action aux exigences d’une coopération loyale avec les États membres.

    53. Le Royaume des Pays-Bas reproche également à la Commission la durée excessive de la procédure précontentieuse. Selon cet État membre, la Commission, dans l’exercice des pouvoirs qui lui sont conférés par l’article 226 CE, est tenue d’agir dans un délai raisonnable. Cette obligation constituerait non seulement une règle de bonne administration, mais également le corollaire du principe de sécurité juridique.

    54. Disons d’emblée que les arguments du gouvernement néerlandais ne sont pas inédits. En effet, comme nous le verrons par la suite, dès les premiers arrêts rendus dans le cadre d’un recours en manquement, la Cour a été amenée à examiner des moyens avancés par les États membres défendeurs à l’appui de l’irrecevabilité du recours et visant à faire valoir, d’une part, le caractère tardif de l’intervention de la Commission et, d’autre part, la durée excessive de la procédure précontentieuse.

    55. Toutefois, le présent cas d’espèce se caractérise par des aspects qui présentent une certaine spécificité, comme, notamment, la circonstance que la Commission a agi à l’encontre de huit autres États membres pour des manquements similaires, tout en différant au contraire l’action contre le Royaume des Pays-Bas, l’intervention des décisions y afférentes de la Cour constatant lesdits manquements, les évolutions intervenues à la suite de ces arrêts, le caractère politiquement sensible des procédures engagées et menées à terme par la Commission et, enfin, l’importance des intérêts économiques en jeu. D’ailleurs, en l’espèce, l’inertie de la Commission a été considérablement plus longue que dans d’autres cas d’espèce déjà examinés par la Cour.

    56. Nous croyons dès lors utile, dans le cadre des présentes conclusions, de mener une réflexion plus approfondie sur la question centrale que le gouvernement néerlandais a soulevée dans le cadre de ses moyens d’irrecevabilité, c’est-à-dire celle de savoir s’il y a lieu d’affirmer dans le cadre des procédures d’infraction en l’application de l’article 226 CE l’existence d’une obligation pour la Commission d’agir dans un délai raisonnable.

    a) Aperçu de la jurisprudence communautaire en matière de respect du délai raisonnable

    57. Notons tout d’abord qu’il existe une jurisprudence communautaire abondante dans laquelle il est fait application de la notion de délai raisonnable.

    58. Aux fins de la présente analyse, il suffira de relever que le respect d’un délai raisonnable a été analysé par le juge communautaire avant tout comme un critère permettant de déterminer la violation éventuelle de certains principes généraux du droit communautaire tels que, notamment, le principe de protection de la confiance légitime, le principe de sécurité juridique, le principe de protection des droits de la défense et le droit à un procès équitable, ainsi que comme un critère permettant d’apprécier la conformité de l’action des institutions et des organes communautaires à la règle de bonne administration. Le Tribunal de première instance, à partir de l’arrêt SCK et FNK/Commission (34), et la Cour, dans le récent arrêt Technische Unie/Commission (35), ont jugé que le respect par la Commission d’un délai raisonnable dans les procédures administratives en matière de politique de la concurrence constitue un principe général du droit communautaire.

    59. Indépendamment de sa qualification, à savoir principe général du droit communautaire ou simple composante de principes auxquels cette qualification est donnée, le respect d’un délai raisonnable s’impose à l’administration communautaire comme une règle à l’aune de laquelle s’apprécie la légalité de son action (36) .

    60. Il convient également de préciser que cette règle fournit non seulement un paramètre permettant de déterminer la légalité de la durée d’une procédure administrative, mais impose plus généralement aux institutions une limite temporelle à l’exercice des pouvoirs dont elles sont investies. En ce sens, sans faire toutefois expressément référence à la notion de délai raisonnable, la Cour a précisé à plusieurs reprises, comme nous le verrons plus en détail, que le principe de la sécurité juridique s’oppose à ce qu’une institution puisse prolonger indéfiniment l’exercice de ses pouvoirs.

    61. Cela dit, abordons à présent le point de savoir si le respect de cette règle s’impose à la Commission également lors de l’exercice des compétences dont elle dispose en vertu de l’article 226 CE.

    b) Sur l’existence d’une obligation pour la Commission de respecter un délai raisonnable dans le cadre des procédures prévues à l’article 226 CE

    62. En examinant ce point, on ne saurait omettre la nature de la procédure d’infraction. L’élément distinctif de cette procédure semble résider essentiellement dans le caractère discrétionnaire des pouvoirs conférés à la Commission.

    63. Selon une jurisprudence constante de la Cour, il appartient en effet à la Commission d’apprécier l’opportunité d’engager une procédure en constatation de manquement, et en raison de quel agissement ou omission imputable à l’État membre concerné cette procédure doit être introduite (37) . Une fois la procédure engagée, et si l’État membre en cause ne se conforme pas, dans le délai imparti, à la position exprimée par la Commission dans l’avis motivé, il appartient également à la Commission d’apprécier l’opportunité de saisir la Cour en vue de faire constater le manquement présumé. Le pouvoir d’appréciation discrétionnaire dont la Commission dispose exclut du reste, selon une jurisprudence bien établie, le droit pour les particuliers d’exiger de cette institution d’engager une procédure en application de l’article 226 CE (38) . En considération de ce pouvoir discrétionnaire, la Cour, saisie en vertu de l’article 226 CE, s’est constamment abstenue d’apprécier l’opportunité de l’action, quand cette opportunité était contestée par l’État membre défendeur (39) .

    64. En statuant sur des griefs que les États membres défendeurs tiraient du caractère tardif de l’action de la Commission ou de la durée excessive de la procédure précontentieuse, la Cour a reconnu à cette institution un pouvoir d’appréciation discrétionnaire également en ce qui concerne la détermination des délais dans lesquels il y a lieu d’exercer les prérogatives dont la Commission dispose en vertu de l’article 226 CE.

    65. Dès les années 70, la jurisprudence de la Cour a mis l’accent sur la marge discrétionnaire dont la Commission dispose pour apprécier quand il y a lieu d’intervenir à l’endroit d’un État membre réputé défaillant. Dans l’arrêt Commission/France (40), ayant pour objet un recours introduit par la Commission contre la République française en vertu de l’article 141 du traité CEEA, une disposition de même teneur que l’article 226 CE, la Cour, statuant sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par le gouvernement français, lequel reprochait à la Commission d’avoir agi tardivement alors qu’elle avait depuis longtemps connaissance du comportement incriminé, a dit que le recours en application de l’article 141 du traité CEEA «n’est pas enfermé dans un délai préétabli, cette procédure comportant, en raison de sa nature et de son but, le pouvoir pour la Commission d’apprécier les moyens et les délais les plus appropriés en vue de mettre fin aux manquements éventuels».

    66. Ce principe est confirmé dans des arrêts ultérieurs en ce qui concerne l’article 226 CE. En particulier, dans l’arrêt Commission/Belgique (41), la Commission reprochait au Royaume de Belgique un manquement aux obligations découlant de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1, ci-après la «sixième directive»). Conformément à l’article 27, paragraphe 5, de cette directive, l’État membre défendeur avait notifié les dispositions litigieuses à la Commission en 1977. La Commission avait fait part de ses objections quant à la compatibilité de ces dispositions avec la sixième directive pour la première fois en 1979 et avait ouvert en 1981 la procédure d’infraction en application de l’article 226 CE. Devant la Cour, le gouvernement belge a excipé de l’irrecevabilité du recours en faisant valoir que la réaction tardive de la Commission avait créé une situation d’insécurité juridique préjudiciable à ses intérêts et que, en l’absence d’un délai prévu à l’article 27, paragraphe 5, de la sixième directive pour soulever des objections à l’endroit de la législation dûment notifiée d’un État membre, la Commission était tenue de respecter un délai raisonnable. Le gouvernement défendeur invitait notamment la Cour à appliquer en l’espèce le principe énoncé dans l’arrêt Lorenz (42) par rapport à la procédure prévue à l’article 93, paragraphe 3, du traité CE (devenu article 88, paragraphe 3, CE). La Cour, après avoir exclu la pertinence de la jurisprudence Lorenz, en ce qu’elle concernait une «procédure qui en partie déroge expressément à celle prévue à l’article [226 CE]», a déclaré que cet article trouve application «sans que la Commission soit tenue au respect d’un délai déterminé» (43) .

    67. Dans l’arrêt Commission/Pays-Bas (44), le gouvernement néerlandais reprochait à la Commission une série de retards dans la procédure précontentieuse. En particulier, ce gouvernement observait que les premiers griefs formulés par la Commission au sujet des faits litigieux remontaient à 1984, alors que le recours devant la Cour n’avait été formé que cinq ans plus tard. La négligence de la Commission avait entraîné, selon le gouvernement néerlandais, une violation des droits de la défense et avait impliqué des conséquences financières inacceptables. Rappelant l’arrêt Commission/Belgique évoqué au point précédent, la Cour a confirmé que «les règles de l’article [226 CE] […] doivent trouver application sans que la Commission soit tenue au respect d’un délai déterminé» (45) .

    68. Cela dit, il convient de se demander si le caractère discrétionnaire des pouvoirs qui sont conférés à la Commission par l’article 226 CE, d’une part, et l’absence de délais préétablis dans lesquels cette institution est tenue d’agir, d’autre part, font réellement obstacle à l’affirmation de l’existence, dans le chef de la Commission, d’une obligation de respecter un délai raisonnable également dans l’exercice des compétences dont celle-ci dispose en vertu de cet article.

    69. En ce qui concerne, en premier lieu, le caractère discrétionnaire des pouvoirs de la Commission, disons tout d’abord que la reconnaissance dans le chef de cette institution d’une marge d’appréciation plus ou moins importante, dans le cadre de procédures autres que la procédure en manquement, n’a pas empêché le juge communautaire de considérer que la Commission était en tout état de cause tenue d’agir dans un délai raisonnable en vertu d’une règle de bonne administration (46) ou d’affirmer l’interdiction pour la Commission de retarder indéfiniment l’exercice de ses pouvoirs en violation du principe de sécurité juridique (47) .

    70. Certes, la procédure d’infraction prévue à l’article 226 CE revêt incontestablement un caractère particulier. Elle tend à la constatation objective du manquement d’un État membre en vue de sa cessation et non pas à l’adoption de mesures ayant la nature d’une sanction (48) . En outre, précisément en fonction des buts qu’elle poursuit et des considérations notamment d’ordre politique qui sont susceptibles d’entrer en jeu à chaque stade de son déroulement, il s’agit d’un instrument auquel il convient de laisser une certaine souplesse.

    71. Nous estimons cependant que ces considérations et la large marge d’appréciation qui est accordée à la Commission dans le cadre de la procédure en question ne s’opposent pas à ce que les modalités d’exercice des compétences que cette institution détient en vertu de cet article puissent faire l’objet d’un contrôle, notamment, en s’en tenant au problème soulevé en l’espèce, au regard des limites temporelles de son intervention (49) .

    72. En second lieu, même la circonstance que l’article 226 CE n’enferme pas le déroulement des différentes étapes de la procédure dans des délais préétablis ne nous semble pas faire obstacle à l’affirmation d’une obligation de principe pour la Commission d’agir en respectant un délai raisonnable dans l’exercice des pouvoirs dont elle dispose en vertu de cet article.

    73. À cet égard, il convient d’abord de relever que la reconnaissance de l’existence d’une telle obligation ne préjuge pas la question, qui sera analysée par la suite, des conséquences qui découlent d’une violation éventuelle de cette obligation. À ce stade, il suffit de souligner que le non-respect d’un délai raisonnable ne produit pas nécessairement les mêmes conséquences que la violation d’un délai de prescription ou de forclusion.

    74. En outre, il convient de noter que, bien que l’article 226 CE ne prévoie expressément aucun délai pour le déroulement de la procédure d’infraction, la jurisprudence a affirmé que la Commission doit s’en tenir à des critères raisonnables en fixant à l’État membre concerné les délais pour répondre à la lettre de mise en demeure ou pour se conformer à l’avis motivé et est tenue de laisser, le cas échéant, à cet État un délai raisonnable pour préparer sa défense (50) . Ces obligations sont clairement justifiées, d’une part, par l’objectif que la procédure en manquement vise à atteindre, à savoir la cessation de l’infraction constatée, et, d’autre part, par l’exigence de permettre l’exercice effectif des droits de la défense par l’État membre concerné. Dans le même souci de protection des droits de la défense, la Cour, comme nous le verrons, s’est réservé le pouvoir de censurer la durée excessive de la procédure précontentieuse.

    75. Enfin, il convient de préciser que, s’il est vrai que le juge communautaire a, en principe, exclu la possibilité d’introduire des délais de prescription par voie jurisprudentielle en partant de la considération que «pour remplir sa fonction, un délai de prescription doit être fixé d’avance» et que «la fixation de ce délai et de ses modalités d’application relèvent de la compétence du législateur communautaire» (51), l’absence d’une prescription légale n’a cependant pas empêché la Cour et le Tribunal de fonder sur le principe de sécurité juridique l’obligation pour la Commission d’agir dans un délai raisonnable ou de ne pas retarder indéfiniment l’exercice de ses pouvoirs (52) .

    76. Eu égard aux considérations qui précèdent, nous estimons que les caractéristiques particulières de la procédure prévue à l’article 226 CE ne s’opposent pas à ce que soit affirmée une obligation pour la Commission, également dans le cadre de cette procédure, de conformer son action au principe du respect d’un délai raisonnable.

    77. Par ailleurs, il y a lieu de relever que l’exigence d’exercer un contrôle même limité sur les modalités d’exercice du pouvoir d’appréciation dont la Commission jouit dans le cadre des procédures d’infraction, notamment au regard de la détermination de limites temporelles à l’exercice de ce pouvoir, transparaît, tout en s’accompagnant de la confirmation de la marge discrétionnaire de la Commission, au travers de la jurisprudence de la Cour évoquée aux points 65 à 67 ci-dessus.

    78. Ainsi, par exemple, dans l’arrêt rendu dans l’arrêt Commission/France, précité au point 65, en réponse à l’argument du gouvernement français défendeur qui reprochait à la Commission d’avoir engagé tardivement la procédure prévue à l’article 141 du traité CEEA alors qu’elle avait connaissance depuis 1965 du manquement allégué, la Cour, après avoir précisé que la Commission n’était pas tenue en vertu de cet article d’agir dans un délai préétabli, a cependant observé que l’infraction en cause n’avait été pleinement révélée qu’en 1968, c’est-à-dire à une époque plus récente, et que, dès 1969, la Commission avait entrepris quelques démarches préliminaires à l’ouverture formelle de la procédure (53) .

    79. La possibilité d’un contrôle portant sur l’exercice du pouvoir d’appréciation de la Commission a été expressément reconnue par l’avocat général Roemer (54), qui, dans ses conclusions rendues dans l’affaire susmentionnée, a relevé que, dans le cas d’espèce, plusieurs considérations avaient amené la Commission à s’abstenir d’engager la procédure d’infraction plus tôt et a conclu que, à la lumière de ces considérations, il fallait admettre que la Commission avait «exercé ses attributions d’une manière correcte» et écarter la thèse selon laquelle «un retard illicite» aurait été apporté dans la mise en œuvre de la procédure (55) .

    80. L’exigence de justifier dans le cas concret, et au-delà des affirmations de principe, les délais de l’action de la Commission transparaît de façon plus explicite au travers des arrêts Commission/Belgique, précité au point 66, et Commission/Pays-Bas, précité au point 67.

    81. Dans la première affaire, après avoir rejeté l’argument du gouvernement belge, selon lequel la Commission était tenue en l’espèce de respecter un délai raisonnable, la Cour, confirmant la latitude de la Commission pour décider quand il y a lieu d’ouvrir la procédure en application de l’article 226 CE, a observé que, «faisant usage du pouvoir d’appréciation que l’article [226 CE] lui accorde, [la Commission avait] estimé devoir retarder l’examen de la compatibilité des mesures litigieuses belges jusqu’après le moment où la directive serait en vigueur dans tous les États membres» et que, en agissant de la sorte, «elle n’a pas fait de ce pouvoir d’appréciation un usage contraire au traité».

    82. Dans le second arrêt, la Cour a précisé que, dans la mesure où «[la Commission] avait décidé d’attendre l’arrêt de la Cour du 15 janvier 1987, Krohn […], ainsi que les réactions du gouvernement néerlandais à cet arrêt, avant de déposer le présent recours», elle n’avait pas «exercé de manière contraire au traité le pouvoir d’appréciation qu’elle détient en vertu de l’article [226 CE]» (56) .

    83. Enfin, il convient de souligner que, s’agissant notamment de la durée de la procédure précontentieuse, la Cour a dit que le caractère excessif de cette durée est susceptible de constituer un vice rendant un recours en manquement irrecevable, en précisant toutefois qu’«une telle conclusion ne s’impose que dans les cas où le comportement de la Commission a rendu difficile la réfutation de ses arguments, violant ainsi les droits de la défense» (57) .

    84. À ce stade, il y a lieu de préciser, bien que cela ressorte déjà de l’ensemble des considérations qui précèdent, que le respect d’un délai raisonnable s’impose non seulement comme un paramètre de légalité de la durée de la phase précontentieuse de la procédure prévue à l’article 226 CE, mais également comme un obstacle à l’exercice tardif des pouvoirs dont la Commission jouit en vertu de cette disposition. En d’autres termes, l’obligation qui incombe à la Commission de respecter un délai raisonnable implique, d’une part, que cette institution ne peut pas retarder indéfiniment, à partir du moment où elle a eu connaissance du manquement présumé, l’exercice des pouvoirs qui lui sont conférés par l’article 226 CE et, d’autre part, qu’une fois ouverte la procédure précontentieuse au titre de cette disposition, elle doit en conformer la durée à des critères raisonnables.

    85. Il est clair que l’appréciation concrète du caractère raisonnable du délai variera selon que cette appréciation est faite par rapport à la période antérieure à l’ouverture de la procédure par l’envoi de la lettre de mise en demeure ou par rapport à la durée de cette procédure.

    86. Dans la première hypothèse, il faut tenir compte du fait que la Commission procède normalement à des contacts informels avec l’État membre intéressé afin d’obtenir les informations nécessaires pour clarifier la situation factuelle et juridique et se faire une première idée sur l’existence effective et la portée de l’infraction au droit communautaire ainsi que sur les actions à entreprendre afin d’obtenir la cessation du manquement, y compris, le cas échéant, l’ouverture d’une procédure formelle au titre de l’article 226 CE. Dans cette première phase, pour laquelle il y a lieu de considérer l’importante marge d’appréciation qui est laissée à la Commission dans l’exercice des pouvoirs qu’elle détient en vertu des articles 211 CE et 226 CE, la Commission doit disposer d’un laps de temps suffisant pour examiner la possibilité de parvenir à un arrangement à l’amiable et mener, en vue de cette solution, les négociations qui s’imposent avec l’État membre intéressé. En outre, la Commission doit être mise en mesure d’agir suivant un ordre de priorités qui tienne compte de la nature et de la gravité des infractions ainsi que de l’importance des effets qui s’y rattachent. Au regard de ces objectifs, l’application de critères souples se justifie dans le cadre de l’appréciation du caractère raisonnable de la durée de cette période.

    87. Lors de l’ouverture de la procédure, par l’envoi de la lettre de mise en demeure, la Commission dispose au contraire de toutes les informations nécessaires pour apprécier le comportement de l’État membre concerné. La décision d’adresser à l’État membre intéressé une lettre de mise en demeure suppose que la Commission a qualifié ce comportement de manquement et juge opportun, afin d’obtenir la cessation de ce manquement, de recourir à l’instrument prévu par l’article 226 CE. Les critères sur la base desquels il y a lieu d’apprécier le caractère raisonnable du délai dans lequel sont adoptés les différents actes dont se compose la procédure, jusqu’à, le cas échéant, la décision de saisir la Cour, doivent par conséquent être plus stricts.

    88. Une fois établie l’obligation de la Commission de respecter également dans le cadre des procédures d’infraction un délai raisonnable, compris aussi bien comme limite à l’exercice tardif des pouvoirs dont la Commission dispose dans ce domaine que comme critère servant à apprécier la légalité de la durée de la procédure, il convient de s’interroger sur les conséquences qui découlent d’une violation éventuelle de cette obligation.

    c) Sur les conséquences du non-respect d’un délai raisonnable dans le cadre des procédures en application de l’article 226 CE

    89. Étant donné que l’article 226 CE prévoit un instrument en vue de la constatation judiciaire d’une infraction actuelle au droit communautaire, nous estimons qu’il y a lieu d’exclure, en principe, que le retard injustifié de la Commission dans la mise en œuvre de la procédure à partir du moment où elle a eu connaissance du manquement présumé ou la durée excessive de cette procédure une fois qu’elle a été engagée, puisse avoir pour effet la forclusion du pouvoir pour la Commission de saisir la Cour aux fins de cette constatation (58) .

    90. Toutefois, un tel effet ne peut pas être a priori exclu lorsque l’intervention tardive de la Commission ou la durée excessive de la procédure a affecté de façon irrémédiable l’exercice des droits de la défense de l’État membre intéressé. Cette conclusion nous semble découler logiquement de la constatation d’une interférence possible entre les délais d’intervention de la Commission et l’exercice des droits de la défense et de la jurisprudence qui, en se fondant sur ce constat, admet l’irrecevabilité du recours en application de l’article 226 CE dans l’hypothèse où la durée excessive de la procédure a affecté l’exercice des droits de la défense de l’État membre mis en cause (59) . Lorsque l’ouverture d’une nouvelle procédure ne permet pas de remédier à ce vice, la Commission perd en fait le droit de saisir la Cour pour obtenir la constatation de manquement.

    91. L’exclusion, en principe, de l’extinction des pouvoirs de la Commission en raison de l’intervention tardive de celle-ci ou de la durée excessive de la procédure se justifie a fortiori si l’on considère que la procédure contentieuse au titre de l’article 226 CE consiste en un recours en simple constatation.

    92. Il convient cependant de rappeler que, si la Cour n’a pas compétence dans le cadre de ce recours pour ordonner à l’État membre défaillant de mettre fin à l’infraction, cet État est cependant tenu de donner suite à l’arrêt de la Cour en prenant toutes les mesures nécessaires à la cessation du manquement et au rétablissement d’une situation qui soit conforme aux règles de droit communautaire enfreintes.

    93. Or, il ne saurait être exclu que, dans des cas particuliers, l’écoulement du temps conjointement avec l’inertie de la Commission puisse avoir pour effet de limiter le pouvoir de celle-ci d’obtenir de l’État membre intéressé l’adoption des mesures nécessaires à la cessation du manquement, tout en laissant, en principe, intacte la faculté de saisir la Cour afin d’obtenir la constatation de ce manquement.

    94. Un tel cas de figure s’est présenté dans l’arrêt Commission/Irlande (60) . La Commission avait engagé à l’encontre de l’Irlande deux procédures d’infraction distinctes ayant pour objet, d’une part, la violation des dispositions de la sixième directive en matière de taxe sur la valeur ajoutée, pour avoir omis d’assujettir à cette taxe les péages perçus pour l’utilisation de ponts et de routes et, d’autre part, la violation des obligations découlant de la réglementation relative au système des ressources propres de la Communauté, pour ne pas avoir mis à la disposition de la Commission, au titre des ressources propres provenant de la taxe sur la valeur ajoutée, les montants correspondants à la taxe qui aurait dû être prélevée sur lesdits péages, augmentés des intérêts de retard.

    95. Après avoir constaté que le non-assujettissement à la taxe des péages en cause constituait une violation des dispositions en matière de taxe sur la valeur ajoutée, la Cour s’est interrogée quant aux conséquences de l’inaction prolongée de la Commission (plus de sept ans s’étaient écoulés entre la notification de l’avis motivé et l’introduction du recours) sur l’étendue de l’obligation de l’Irlande de verser a posteriori des montants au titre de la réglementation relative aux ressources propres de la Communauté. Au point 71 de l’arrêt, la Cour a jugé que «malgré l’absence d’un délai de prescription relatif au recouvrement de la TVA tant dans la sixième directive […] que dans la réglementation relative aux ressources propres des Communautés, l’exigence fondamentale de sécurité juridique peut néanmoins s’opposer à ce que la Commission puisse, dans le cadre d’une procédure en manquement tendant au versement a posteriori des ressources propres, retarder indéfiniment la décision d’engager la phase contentieuse de celle-ci». Appliquant par analogie l’article 9, paragraphe 2, du règlement (CEE, Euratom) n° 1553/89 du Conseil du 29 mai 1989, concernant le régime uniforme définitif de perception des ressources propres provenant de la taxe sur la valeur ajoutée (JO L 155, p. 9), qui excluait la possibilité de rectifier au-delà de quatre exercices budgétaires les relevés transmis par les États membres indiquant le montant des ressources propres provenant de la taxe sur la valeur ajoutée, la Cour a exclu que la Commission puisse être fondée à exiger le versement a posteriori des montants dus par l’Irlande au titre des exercices budgétaires antérieurs à 1994.

    96. Si la violation éventuelle d’un délai raisonnable ne saurait, en principe, avoir pour effet de priver la Commission de la faculté de poursuivre le manquement d’un État membre et de saisir, à cette fin, la Cour, cette dernière a jugé (61), en ce qui concerne notamment la durée de la procédure précontentieuse, que le caractère excessif de cette durée est susceptible de constituer un vice de procédure pouvant entraîner l’irrecevabilité du recours (62) . La Cour n’a cependant admis cette possibilité que dans les cas où la durée excessive de la procédure a affecté les droits de la défense de l’État membre défendeur.

    97. Or, il semblerait que l’on puisse se demander si, même indépendamment de la violation éventuelle des droits de la défense de l’État membre intéressé, l’irrecevabilité du recours ne devrait pas être admise, dans des hypothèses particulières, lorsque la Commission, après expiration du délai imparti à l’État membre pour se conformer à l’avis motivé, ne saisit pas la Cour dans un délai raisonnable, à apprécier en tenant compte de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce et des justifications avancées par la Commission ainsi que de la large marge d’appréciation dont jouit la Commission dans l’exercice des pouvoirs qui lui sont conférés en vertu des articles 211 CE et 226 CE.

    98. Bien que cette solution puisse apparaître comme un excès de formalisme, elle répondrait à l’exigence d’assu rer une utilité à l’éventuel arrêt qui constaterait un manquement, en évitant que la Cour, qui est tenue, selon une jurisprudence constante, d’examiner la situation existant au terme du délai fixé dans l’avis motivé (63), ne statue au regard d’un contexte juridique et factuel qui, en ayant changé avec le temps, n’est plus actuel.

    99. À cet égard, il convient de rappeler que l’objectif de la procédure précontentieuse consiste non seulement à donner à l’État membre concerné l’occasion de se défendre en répliquant aux griefs formulés à son encontre par la Commission, mais également, ainsi que la Cour l’a jugé à maintes reprises, à circonscrire l’objet du futur litige devant le juge communautaire. La régularité de la procédure précontentieuse constitue dès lors, pour reprendre les termes mêmes de la Cour, «une garantie essentielle voulue par le traité non seulement pour la protection des droits de l’État membre en cause, mais également pour assurer que la procédure contentieuse éventuelle aura pour objet un litige clairement défini» (64) .

    100. Lorsque, dans le laps de temps écoulé entre l’expiration du délai fixé dans l’avis motivé et l’introduction du recours, le contexte juridique et factuel du litige, tel que circonscrit dans l’avis motivé, a connu des changements, rendant en substance inutile un arrêt de la Cour qui ne tiendrait pas compte de ces modifications, on peut se demander si la Cour, prenant acte de l’évolution des circonstances et d’une éventuelle inertie injustifiée de la Commission qui s’est prolongée au-delà d’un délai raisonnable, ne pourrait pas rejeter le recours comme irrecevable.

    101. Dans ce cas, il incomberait à la Commission d’émettre un nouvel avis motivé, ce qui lui permettrait de saisir à nouveau la Cour. Cette obligation peut apparaître idoine au regard de l’objectif consistant à garantir l’engagement correct de la phase juridictionnelle de la procédure prévue à l’article 226 CE et à assurer l’actualité et l’utilité de l’arrêt éventuel de la Cour constatant le manquement.

    102. À cet égard, nous signalons que la Cour s’est déjà montrée favorable à la solution proposée. Dans l’arrêt du 9 décembre 2004, Commission/France, précité à la note 64 ci-dessus, la Commission avait assigné la République française dans le cadre d’un recours formé en application de l’article 226 CE deux ans et six mois après expiration du délai fixé dans l’avis motivé. Dans l’intervalle, la République française avait adopté un certain nombre de «mesures […] substantielles dans le domaine en cause» (65) . Le débat entre les parties devant la Cour s’était en substance concentré sur la portée de ces mesures et sur leur caractère adéquat pour mettre en œuvre la directive dont la transposition insuffisante était reprochée au gouvernement français. Après avoir précisé que, selon une jurisprudence constante, cette discussion ne pouvait manifestement pas être prise en compte dans le cadre de la procédure contentieuse, la Cour a indiqué que «quand les dispositions nationales pertinentes ont fondamentalement changé entre l’expiration du délai fixé pour le respect de l’avis motivé et l’introduction du recours en manquement, cette évolution peut priver l’arrêt à prononcer par la Cour d’une part importante de son utilité. Dans une telle situation, il pourrait être préférable que la Commission ne forme pas un recours mais émette un nouvel avis motivé précisant les griefs qu’elle entend retenir au vu des circonstances modifiées» (66) . La Cour a cependant jugé que les circonstances de l’espèce n’étaient pas de nature à justifier le rejet du recours comme irrecevable (67) .

    103. Du reste, il convient de relever que la charge de saisir la Cour, dans un délai raisonnable à compter de la date d’expiration du délai fixé à l’État membre pour se conformer à l’avis motivé, sous peine d’irrecevabilité du recours, charge qui s’imposerait à la Commission lorsqu’elle estime opportun d’engager la phase juridictionnelle de la procédure, n’affecterait nullement la substance du pouvoir d’appréciation dont dispose la Commission en vertu de l’article 226 CE, mais constituerait seulement une condition pour un exercice correct de ce pouvoir.

    104. Dans de tels cas, la Commission serait tenue, si elle l’estime opportun, d’engager une nouvelle procédure ou à tout le moins d’émettre un nouvel avis motivé. Au moment de décider s’il y a lieu de recommencer la procédure précontentieuse, la Commission devra apprécier à nouveau l’opportunité d’agir et éventuellement reformuler les griefs précédemment invoqués à l’endroit de l’État membre intéressé afin de tenir compte de l’évolution des circonstances.

    105. Abordons à présent les moyens qui ont été soulevés en l’espèce par le gouvernement néerlandais.

    d) Sur le grief tiré d’une action prétendument tardive de la Commission

    106. En ce qui concerne en premier lieu le grief relatif au caractère tardif de l’action de la Commission, il découle des considérations exposées plus haut que, quand bien même ledit grief serait fondé, il ne serait pas susceptible, dans les circonstances de l’espèce, d’affecter le pouvoir de la Commission de saisir la Cour afin d’obtenir la constatation du manquement allégué, comme le soutient au contraire le gouvernement néerlandais.

    107. En l’espèce, le fait de priver la Commission de la possibilité d’agir en vue d’obtenir la constatation du manquement allégué du Royaume des Pays-Bas aux obligations qui lui incombent en vertu de la répartition des compétences entre la Communauté et les États membres quant à la conclusion et à l’application d’accords internationaux en matière de transport aérien, telle que définie par la Cour dans les arrêts du 5 novembre 2002, permettrait au seul Royaume des Pays‑Bas de maintenir en vigueur des engagements internationaux en violation de cette répartition, en procurant sans justification à cet État membre une situation privilégiée par rapport aux autres États membres au détriment de l’application uniforme des principes établis par la Cour dans lesdits arrêts.

    108. Comme nous l’avons déjà relevé, un effet d’extinction des pouvoirs de la Commission pourrait exister au cas où il serait constaté que le retard, par hypothèse injustifié, avec lequel la Commission a engagé la procédure au titre de l’article 226 CE a affecté de façon irrémédiable les droits de la défense de l’État membre défendeur dans cette procédure. Toutefois, en l’espèce, le Royaume des Pays-Bas n’a pas expressément invoqué une violation des droits de la défense et, à supposer même que ce moyen puisse se déduire des arguments développés par cet État, la preuve d’une telle violation n’a pas été apportée.

    109. Quant au point de savoir si la constatation éventuelle d’un retard injustifié, imputable à la Commission, dans la mise en œuvre de la procédure prévue à l’article 226 CE serait susceptible, au cas où il serait fait droit au recours, d’avoir une incidence sur la portée de l’obligation qui résulterait pour le Royaume des Pays-Bas de la nécessité de se conformer à l’arrêt de la Cour constatant un manquement (68), il convient tout d’abord de relever que cette obligation consisterait à supprimer pour l’avenir les engagements internationaux litigieux. Or, eu égard à la nature de cette obligation, on ne saurait considérer que le temps écoulé a eu pour effet de modifier la portée de celle-ci.

    110. Le Royaume des Pays-Bas fait en outre valoir que, étant donné la compétence externe de la Communauté en matière de transport aérien qui a été reconnue par la Cour dans les arrêts du 5 novembre 2002, et au regard des évolutions législatives intervenues à la suite de ces arrêts, il ne serait plus habilité à entamer des négociation avec les États-Unis d’Amérique afin de modifier les clauses de l’accord litigieux que la Cour pourrait juger illicites. De l’avis de cet État membre, il s’ensuit que le retard avec lequel la Commission a agi à son endroit le met dans l’impossibilité de se conformer à un éventuel arrêt faisant droit au recours.

    111. Cet argument ne nous paraît pas pouvoir être retenu. En effet, ainsi que la Commission l’a souligné, l’accord litigieux prévoit la possibilité pour les parties de déclencher un mécanisme de dénonciation de l’accord. Le Royaume des Pays‑Bas dispose par conséquent, contrairement à ce qu’il soutient, d’un instrument juridique qui lui permettrait, le cas échéant, de se conformer à un arrêt de la Cour en sa défaveur.

    112. Quant à l’argument du Royaume des Pays-Bas, soutenu à cet égard par le gouvernement français partie intervenante, selon lequel la dénonciation de l’accord litigieux créerait, dans les relations avec les États-Unis en matière de transport aérien, un vide juridique qui serait préjudiciable aux opérateurs nationaux concernés, il suffit de relever que, à la suite des arrêts de la Cour du 5 novembre 2002, les transporteurs aériens des États membres à l’encontre desquels la Commission a agi neuf ans auparavant, ont été également exposés aux mêmes conséquences négatives. De ce point de vue, il nous semble que l’écoulement du temps a joué en faveur des transporteurs aériens néerlandais plutôt qu’à leur détriment.

    113. À titre incident, il convient de noter que les arguments développés à cet égard tant par le Royaume des Pays-Bas que par le gouvernement français tendent en définitive à soulever la question, qui est cruciale du point de vue des intérêts des transporteurs communautaires concernés, des mesures que les États membres qui se sont rendus responsables des manquements au droit communautaire constatés par la Cour dans les arrêts du 5 novembre 2002, ainsi que le Royaume des Pays-Bas au cas où il succomberait en l’espèce, sont tenus de prendre pour mettre en œuvre les principes énoncés dans ces arrêts. À ce propos, on comprend aisément que la solution proposée par la Commission dans les lettres du 25 novembre 2002, du 30 juillet 2004 et du 10 mars 2005, qui indique comme seule voie la dénonciation des accords contenant les clauses illicites – une renégociation de ces clauses au niveau national étant à exclure en raison de la compétence externe exclusive de la Communauté –, se heurte à l’opposition unanime des États membres intéressés. En effet, le vide juridique que le recours à une telle solution engendrerait, et qui en réalité, contrairement à ce que soutient la Commission, ne pourrait pas être comblé, fût-ce provisoirement, par l’application du principe de courtoisie, risque d’avoir des répercussions économiques importantes pour les transporteurs communautaires concernés tant en termes de perte de droits de trafic sur les liaisons au départ et à destination des États-Unis d’Amérique ou en termes d’incertitude quant au maintien dans le temps de ces droits, que dans la mesure où ce vide, comme le soulignent les gouvernements néerlandais et français, mettrait en péril les alliances existant entre compagnies communautaires et américaines (alliances KLM/Northwest et Skyteam).

    114. Toutefois, comme nous l’avons déjà évoqué (69), il n’appartient pas à la Cour, lorsqu’elle statue sur un recours en application de l’article 226 CE, de définir les modalités selon lesquelles l’État membre intéressé doit se conformer à l’arrêt qui le déclare défaillant (70), bien que la Cour puisse préciser la portée de cette obligation (71) . Il s’ensuit que, en l’occurrence (72), étant donné que l’État membre défendeur, s’il était fait droit au recours, ne serait pas dans l’impossibilité matérielle ou juridique de se conformer à l’arrêt de la Cour, il incombe à cet État et à la Commission, en vertu du principe de coopération loyale et réciproque, qui préside aux rapports entre les institutions communautaires et les États membres, de s’employer à trouver une solution aux problèmes que soulèverait l’exécution d’un arrêt éventuel faisant droit au présent recours (73) .

    e) Sur le grief tiré de la durée prétendument excessive de la procédure d’infraction

    115. S’agissant de la durée de la procédure, le Royaume des Pays-Bas fait grief du retard imputable à la Commission uniquement en ce qui concerne le délai écoulé entre l’adoption de l’avis motivé et l’introduction du recours.

    116. L’avis motivé ayant été émis au mois d’octobre 2000 et le recours introduit au mois de décembre 2004, la période à prendre en considération aux fins de la présente analyse est égale à quatre ans environ.

    117. Il ressort de la jurisprudence que le caractère raisonnable de la durée de la procédure administrative s’apprécie en fonction des circonstances propres de chaque affaire et, notamment, du contexte de celle-ci, des différentes étapes procédurales que la Commission a suivies, du comportement des parties au cours de la procédure, de la complexité ainsi que de l’enjeu de l’affaire pour les différentes parties intéressées (74) .

    118. En l’occurrence, nous ne pensons pas que l’on puisse reprocher à la Commission d’avoir attendu la décision de la Cour sur les recours introduits en 1998, qui avaient, en substance, le même objet que le recours formé dans la présente affaire.

    119. Toutefois, la Commission a encore attendu deux autres années après le prononcé des arrêts du 5 novembre 2002 avant d’introduire le recours en l’espèce. Il convient dès lors d’apprécier si ce délai peut être qualifié d’excessif, compte tenu de toutes les circonstances pertinentes du cas d’espèce.

    120. À cet égard, il y a lieu tout d’abord de constater que les recours introduits par la Commission en 1998, dont l’issue était loin d’être certaine, comme le prouve du reste la circonstance qu’ils n’ont été que partiellement accueillis par la Cour, soulevaient pour la première fois la question de la répartition des compétences externes entre la Communauté et les États membres en matière de transport aérien. Par ailleurs, ainsi que nous l’avons déjà évoqué plus haut, les arrêts du 5 novembre 2002 posaient la question délicate des mesures à prendre afin de combler l’éventuel vide juridique qu’aurait engendré la suppression des engagements internationaux pris par les États membres intéressés en violation de la compétence externe exclusive de la Communauté.

    121. Ainsi, après que lesdits arrêts ont été rendus, un débat s’est instauré au sein du Conseil au sujet des modalités permettant d’assurer une application correcte des principes énoncés par la Cour, débat qui, comme nous l’avons indiqué, a abouti à l’adoption, lors de la session du Conseil des 5 et 6 juin 2003, d’un «paquet» de réglementations visant, entre autres, à donner à la Commission un mandat pour négocier avec les États-Unis d’Amérique un accord international en matière de transport aérien.

    122. Il convient en outre de rappeler que, deux semaines après le prononcé des arrêts du 5 novembre 2002, la Commission a adopté la communication susmentionnée du 19 novembre 2002, dans laquelle elle prenait position sur les conséquences à tirer de ces arrêts pour les accords qui n’y étaient pas directement visés et que, le 25 novembre 2002, elle a envoyé au Royaume des Pays-Bas une lettre dans laquelle elle invitait cet État membre à dénoncer l’accord litigieux.

    123. Dans ces conditions, nous estimons qu’il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir attendu, avant d’introduire le recours faisant l’objet du présent litige, l’issue du débat politique qui s’est instauré à la suite du prononcé des arrêts du 5 novembre 2002 ni d’avoir accordé au Royaume des Pays-Bas le temps nécessaire pour se conformer à ces arrêts, en particulier si l’on considère que, selon la Commission, cela aurait nécessairement impliqué la dénonciation des engagements contractés par cet État membre avec les États-Unis d’Amérique, mesure qui, ainsi que le gouvernement néerlandais l’a du reste lui-même souligné, aurait eu des répercussions considérables sur les relations entre les deux pays dans le secteur du transport aérien, et plus particulièrement sur les intérêts des transporteurs aériens néerlandais.

    124. Il résulte des développements qui précèdent qu’on ne saurait faire grief à la Commission d’avoir agi en-dehors d’un délai raisonnable du fait qu’elle a attendu quatre ans après l’adoption de l’avis motivé avant d’introduire le recours faisant l’objet du présent litige.

    125. Le moyen soulevé en ce sens par le Royaume des Pays-Bas doit donc, à notre avis, être rejeté comme non fondé.

    3. Conclusions sur la recevabilité

    126. À la lumière des considérations qui précèdent, nous estimons que l’exception d’irrecevabilité que le gouvernement néerlandais a soulevée contre le recours doit être rejetée et que le recours doit être déclaré recevable.

    B – Sur le fond

    1. Sur la violation de la compétence externe exclusive de la Communauté

    127. Comme indiqué au point 25 ci-dessus, dans les arrêts du 5 novembre 2002, la Cour a jugé que, en vertu de l’article 1 er , paragraphe 3, du règlement n° 2409/92 et des articles 1 er et 7 du règlement n° 2299/89, la Communauté a acquis la compétence exclusive pour prendre vis-à-vis de pays tiers des engagements internationaux concernant, d’une part, la liberté tarifaire des transporteurs non communautaires sur des liaisons intracommunautaires et, d’autre part, les SIR proposés ou utilisés sur le territoire de la Communauté.

    128. Selon la Cour, depuis l’entrée en vigueur de ces actes, les États membres ne pouvaient plus contracter ou maintenir en vigueur, malgré la renégociation des accords litigieux, de tels engagements internationaux.

    129. En l’espèce, la Commission demande à la Cour de constater que les engagements internationaux contractés par le Royaume des Pays‑Bas vis-à-vis des États-Unis concernant les tarifs pratiqués par les transporteurs américains sur des liaisons intracommunautaires ainsi que les SIR proposés ou utilisés sur le territoire de cet État membre ont été pris en violation de la compétence externe exclusive de la Communauté.

    130. Il convient dès lors d’examiner si, en procédant à l’échange de notes de 1992 avec les États-Unis d’Amérique, le Royaume des Pays‑Bas a violé la compétence exclusive de la Communauté en matière de liberté tarifaire des transporteurs aériens de pays tiers sur des liaisons intracommunautaires et de SIR proposés ou utilisés sur le territoire communautaire, qui a été reconnue par les arrêts du 5 novembre 2002.

    a) Sur la question relative à l’existence d’un nouvel accord

    131. La Commission soutient que les modifications qui ont été apportées par l’échange de notes de 1992 au texte de l’accord de 1957 ont radicalement changé la nature de celui-ci, en le transformant en un accord de type «ciel ouvert». En d’autres termes, selon la Commission, l’échange de notes de 1992 aurait donné naissance à un nouvel accord remplaçant celui de 1957.

    132. Le gouvernement néerlandais rétorque que, dès avant les modifications introduites par l’échange de notes de 1992, l’accord de 1957 contenait plusieurs éléments essentiels d’un accord de type «ciel ouvert» et que les amendements de 1992 constituaient l’ultime étape du processus de libéralisation du transport aérien entre les deux pays qui avait déjà été amorcé par les modifications apportées en 1978 et en 1991 à l’accord de 1957. En particulier, l’échange de notes de 1992 visait à assurer aux transporteurs néerlandais le plein accès au marché américain, en supprimant ainsi le déséquilibre qui avait été créé en faveur des transporteurs américains par les précédentes modifications apportées à l’accord de 1957. Selon le gouvernement néerlandais, cet accord serait encore en vigueur et couvert par l’article 307, premier alinéa, CE, aux termes duquel «les droits et obligations résultant de conventions conclues antérieurement au 1 er janvier 1958 ou, pour les États adhérents, antérieurement à la date de leur adhésion, entre un ou plusieurs États membres, d’une part, et un ou plusieurs États tiers, d’autre part, ne sont pas affectés par les dispositions du […] traité».

    133. Malgré le peu d’indications fournies à cet égard par les parties, il nous semble ressortir de manière suffisamment claire du dossier que les dispositions relatives aux SIR ont été introduites en 1991 (75) et n’ont pas été modifiées par la suite dans l’échange de notes de 1992.

    134. De même, les dispositions en matière tarifaire, qui consacrent la liberté tarifaire des transporteurs des deux parties contractantes et instituent un système de double désapprobation, ont été négociées en 1991 (76), alors qu’aucune disposition à cet égard n’apparaît dans l’échange de notes de 1992.

    135. Du reste, au point 29 de la requête, la Commission reconnaît elle‑même que les négociations de 1992, tout en modifiant radicalement l’accord de 1957, tel qu’amendé précédemment, ont laissé inchangées les dispositions en matière tarifaire et celles relatives aux SIR (77) .

    136. Dans ces conditions – étant donné qu’il ne semble pas que l’on puisse partager la thèse de la Commission selon laquelle les modifications apportées à l’accord de 1957 par les négociations qui se sont déroulées en 1992 auraient donné naissance à un nouvel accord, puisque cette thèse va à l’encontre de la volonté exprimée par les parties contractantes, dont il résulte qu’elles ont voulu non pas remplacer l’accord précédent, mais seulement en modifier certaines dispositions, fussent-elles importantes – on pourrait se demander si, au-delà du moyen de défense fondé sur l’article 307 CE, il existe concrètement une violation de la compétence exclusive de la Communauté comme la Commission le prétend en ce qui concerne les clauses en matière tarifaire, dans la mesure où cette compétence, qui est fondée sur les dispositions du règlement n° 2409/92, est postérieure à l’insertion desdites clauses dans les accords litigieux, qui remonte à 1991, comme nous l’avons vu plus haut.

    137. Néanmoins, nous ne pensons pas qu’il faille approfondir ce point, étant donné que l’approche suivie par la Cour dans les arrêts du 5 novembre 2002 permet de contourner l’obstacle constitué par le fait que quelques-uns des engagements internationaux litigieux ont été pris à une date antérieure à la naissance de la compétence externe de la Communauté qui est réputée violée.

    138. À cet égard, il importe de rappeler que dans lesdits arrêts la Cour a estimé que l’examen au fond de la demande présentée à titre principal par la Commission n’exigeait pas de prendre position sur le point, débattu entre les parties, visant à savoir si les modifications avaient eu pour effet de transformer les accords préexistants en nouveaux accords.

    139. En effet, selon la Cour, les modifications litigieuses avaient eu pour effet de libéraliser totalement le transport aérien entre les États‑Unis d’Amérique et l’État membre intéressé, en assurant le libre accès à toutes les routes entre tous points situés dans ces deux États, sans limitation de capacité et de fréquence, sans restriction quant aux points intermédiaires et aux points situés avant ou au-delà («behind, between and beyond rights»), et avec toutes les combinaisons souhaitées d’appareils («change of gauge»).

    140. Il en résultait que les modifications en cause avaient créé le cadre d’une coopération plus poussée entre les États-Unis d’Amérique et les États membres concernés dont découlaient de nouveaux et importants engagements internationaux pour ces derniers.

    141. En outre, la Cour a considéré que ces modifications témoignaient d’une renégociation des accords préexistants dans leur ensemble. Selon la Cour, il en résultait que, si certaines dispositions de ces accords n’avaient pas été formellement amendées ou n’avaient subi que des modifications rédactionnelles marginales, les engagements découlant de ces dispositions devaient cependant être réputés confirmés lors de cette renégociation. Renvoyant aux arrêts du 4 juillet 2000, Commission/Portugal (78), la Cour a précisé que, «dans une telle situation, les États membres sont empêchés non seulement de contracter de nouveaux engagements internationaux, mais également de maintenir en vigueur de tels engagements s’ils méconnaissent le droit communautaire» (79) .

    142. Enfin, la Cour a estimé que les modifications litigieuses, apportées aux accords préexistants considérées dans leur ensemble, affectaient la portée des dispositions qui n’avaient pas été formellement amendées ou ne l’avaient été que d’une manière limitée.

    143. La Cour est parvenue à la conclusion que l’ensemble des accords internationaux mis en cause dans la demande qui avait été introduite à titre principal par la Commission devaient être appréciés au regard des dispositions du droit communautaire que la Commission avait invoquées à l’appui de cette demande (80) .

    144. Nous ne pensons pas que le dossier de l’espèce comprenne des éléments qui ne permettent pas de suivre en l’espèce l’approche que nous venons de décrire, puisque les éléments mentionnés au point 139 ci-dessus se retrouvent également réunis en l’occurence.

    145. Il convient enfin de relever que cette approche rend inopérant l’argument du gouvernement néerlandais fondé sur l’article 307, premier alinéa, CE (81) .

    b) Sur la circonstance que l’échange de notes de 1992 a précédé l’entrée en vigueur du règlement n° 2409/92

    146. Par rapport aux cas d’espèce examinés par la Cour dans les affaires qui ont donné lieu aux arrêts du 5 novembre 2002, un autre problème se pose encore en l’espèce.

    147. En effet, tant les négociations entre le Royaume des Pays-Bas et les États‑Unis d’Amérique qui se sont déroulées à Washington du 1 er au 4 septembre 1992 que l’échange de notes du 14 octobre 1992 qui a formalisé les résultats de ces négociations sont intervenus avant l’entrée en vigueur, le 1 er janvier 1993, du règlement n° 2409/92, mais après l’adoption de ce règlement le 23 juillet 1992.

    148. Se fondant sur cette donnée, le gouvernement néerlandais, soutenu par le gouvernement français intervenant au litige, considère qu’on ne peut lui reprocher aucune violation de la compétence externe de la Communauté, dans la mesure où cette compétence n’existerait que depuis l’entrée en vigueur de la réglementation communautaire interne qui, en l’occurrence, serait postérieure à la date à laquelle les engagements internationaux litigieux ont été pris.

    149. La Commission réplique en renvoyant à l’arrêt Inter‑Environnement Wallonie, évoqué au point 50 ci-dessus, dans lequel la Cour a précisé que, si les États membres ne sont pas tenus d’adopter les mesures prescrites par une directive communautaire avant l’expiration du délai de transposition, il résulte de l’application combinée des articles 10, second alinéa, CE et 249, troisième alinéa, CE que, pendant ce délai, ils doivent s’abstenir de prendre des dispositions de nature à compromettre sérieusement le résultat prescrit par cette directive (82) . Selon la Commission, le principe que la Cour a énoncé dans l’arrêt Inter-Environnement Wallonie est applicable mutatis mutandis au cas d’espèce, dans lequel l’accord litigieux a été négocié et conclu après l’adoption du règlement n° 2409/92 et pendant le délai prévu pour l’entrée en vigueur de ce règlement.

    150. Nous estimons qu’il n’est pas nécessaire, en l’espèce, de se prononcer sur le bien-fondé de l’argumentation avancée par la Commission ni, partant, sur sa recevabilité, qui est contestée tant par le gouvernement défendeur que par le gouvernement partie intervenante. Il ne nous semble pas non plus utile, aux fins de la solution du présent litige, d’examiner de manière plus générale la question de savoir si un État membre peut, sans enfreindre le principe de coopération loyale énoncé à l’article 10 CE, conclure des accords internationaux en violation d’une compétence externe exclusive de la Communauté acquise du fait de l’adoption de la réglementation commune interne, bien que cette réglementation, qui n’est pas encore entrée en vigueur, ne lie pas formellement les États membres.

    151. En effet, dans le mémoire en réplique, la Commission, sans être contredite sur ce point par le gouvernement néerlandais, observe que l’échange de notes du 14 octobre 1992 a été ratifié par le Parlement néerlandais le 26 avril 1993, c’est‑à‑dire après l’entrée en vigueur du règlement n° 2409/92 le 1 er janvier 1993.

    152. Le gouvernement néerlandais rétorque à cet égard que la date de ratification de l’échange de notes est dénuée de pertinence en l’espèce, puisque cet échange de notes était déjà appliqué depuis le 14 octobre 1992.

    153. Il convient de rappeler que, lorsqu’un accord international, fût-il en forme simplifiée, comme dans le cas d’un échange de notes, expressément prévu à l’article 13 de la convention de Vienne sur le droit des traités (83), est soumis par une ou plusieurs parties à ratification, le moment de la formation du lien définitif est constitué par la notification réciproque (ou effectuée par les seuls États contractants qui doivent y procéder) de la ratification réalisée (ou par l’échange des instruments de ratification). Or, puisque la rencontre des volontés définitives des parties contractantes marque le point de départ de la validité de l’accord, c’est‑à-dire de son entrée en vigueur, lorsque la ratification préalable de l’accord est requise pour l’une ou plusieurs parties contractantes, l’entrée en vigueur de cet accord est en conséquence subordonnée à la notification aux autres parties de la ratification accomplie.

    154. En vertu de l’article 25 de la convention de Vienne, les parties contractantes ont cependant la possibilité de prévoir l’application à titre provisoire de l’accord. En particulier, cet article dispose qu’«un traité ou une partie d’un traité s’applique à titre provisoire en attendant son entrée en vigueur: a) si le traité lui-même en dispose ainsi, ou b) si les États ayant participé à la négociation en étaient ainsi convenus d’une autre manière».

    155. Or, il résulte du dossier que l’accord litigieux a été appliqué provisoirement à partir de l’échange de notes du 14 octobre 1992, en attendant que le Royaume des Pays-Bas accomplisse les formalités nécessaires pour la ratification de cet accord. Le dernier alinéa de la note envoyée le 14 octobre 1992 par le ministre des Affaires étrangères néerlandais à l’ambassade des États-Unis d’Amérique à La Haye, dont le texte est reproduit dans l’extrait du Tractatenblad que le gouvernement défendeur a joint en annexe au mémoire en duplique, est rédigé en ces termes:

    «I propose that if the foregoing proposal is acceptable to the Government of the United States of America, […] this note and your note in reply indicating such acceptance shall constitute an agreement between our two governments, which shall enter into force upon an exchange of diplomatic notes following completion of all necessary internal procedures of the Government of the Kingdom of the Netherlands. Pending entry into force, the terms of this agreement shall be applied provisionally from the date of your note in reply.»

    156. À son tour, le dernier alinéa de la note de réponse qui a été envoyée le 14 octobre 1992 par l’ambassade des États-Unis d’Amérique à La Haye au ministre des Affaires étrangères néerlandais est rédigé comme suit:

    «I have the honour to inform Your Excellency, on behalf of the Government of the United States of America, that it accepts the above proposal of the Government of the Kingdom of the Netherlands ant to confirm that Your Excellency’s note and this reply shall constitute an agreement between our two governments, the terms of which shall enter into force upon a subsequent exchange of notes following the completion of all necessary internal procedures of the Government of the Kingdom of the Netherlands.»

    157. Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que le parachèvement de l’accord litigieux, c’est-à-dire la rencontre des volontés définitives des deux parties contractantes, ayant pour conséquence l’entrée en vigueur de cet accord, n’est intervenu que par un échange de notes diplomatiques postérieur à la ratification, le 26 avril 1993, de l’accord par le Parlement néerlandais et, partant, à une date nécessairement ultérieure par rapport à l’entrée en vigueur, le 1 er janvier 1993, du règlement n° 2409/92.

    158. Il s’ensuit que, à la date où le Royaume des Pays-Bas a définitivement contracté les engagements internationaux litigieux, découlant de l’échange de notes du 14 octobre 1992, les dispositions du règlement n° 2409/92 qui, ainsi que les arrêts du 5 novembre 2002 l’ont confirmé, ont fait naître la compétence externe exclusive de la Communauté en matière de liberté tarifaire des transporteurs aériens de pays tiers sur des liaisons intracommunautaires, étaient déjà en vigueur.

    159. L’argument du gouvernement néerlandais selon lequel la compétence externe exclusive de la Communauté découlant de l’adoption du règlement n° 2409/92 ne pourrait pas être invoquée en l’espèce pour faire valoir l’illégalité des engagements internationaux litigieux est dès lors dénué de fondement, car il procède d’une interprétation erronée des faits.

    160. Enfin, nous croyons utile de préciser que l’analyse proposée, tout en se fondant sur un éléme nt que la Commission a fait valoir exclusivement dans le mémoire en réplique, ne part pas de considérations qui modifient l’objet du litige, tel que défini dans la requête introductive d’instance, et ne se fonde pas non plus sur de nouveaux griefs invoqués tardivement en méconnaissance des dispositions de l’article 42, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour. En effet, dans ses conclusions formulées dans la requête, la Commission demande à la Cour de constater que, en contractant ou en maintenant en vigueur les engagements litigieux, le Royaume des Pays‑Bas a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de certaines dispositions du droit communautaire. L’importance qui est attribuée dans le cadre de l’analyse exposée plus haut à la date de ratification des engagements en cause sert uniquement à déterminer le moment où ces engagements doivent être réputés lier définitivement l’État membre défendeur.

    161. Sur la base de l’ensemble des considérations qui précèdent, nous estimons que rien ne s’oppose à ce que soit constatée, en l’espèce, l’existence des manquements reprochés à l’État membre défendeur en ce qui concerne les dispositions des règlements n° 2409/92 et n° 2299/89, eu égard à ce que la Cour a déjà énoncé dans les arrêts du 5 novembre 2002.

    2. Sur la violation de l’article 52 du traité CE

    162. Comme nous l’avons évoqué aux points 27 et 28 ci-dessus, dans les arrêts du 5 novembre 2002, la Cour a constaté que, en contractant des engagements internationaux avec les États-Unis d’Amérique visant à reconnaître à ceux-ci le droit de révoquer, de suspendre ou de limiter les droits de trafic dans les cas où les transporteurs aériens désignés par les États membres défendeurs n’étaient pas détenus par ces États membres ou par des ressortissants de ces derniers, lesdits États membres avaient manqué aux obligations qui leur incombent en vertu de l’article 52 du traité CE.

    163. À cet égard, dans les arrêts susmentionnés, la Cour a d’abord précisé que l’article 52 du traité CE s’applique en matière de transport aérien et a en particulier vocation à s’appliquer aux compagnies aériennes établies dans un État membre qui fournissent des services de transport aérien entre un État membre et un pays tiers.

    164. La Cour a poursuivi en rappelant que, aux termes de cet article, la liberté d’établissement comporte l’accès aux activités non salariées et leur exercice, ainsi que la constitution et la gestion d’entreprises, et notamment de sociétés au sens de l’article 58, second alinéa, du traité CE (devenu article 48, second alinéa, CE), dans les conditions définies par la législation de l’État membre d’établissement pour ses propres ressortissants, et que, ainsi, les articles 52 et 58 du traité CE assurent le bénéfice du traitement national dans l’État membre d’accueil aux ressortissants communautaires ayant exercé la liberté d’établissement ainsi qu’aux sociétés qui y sont assimilées.

    165. La Cour a ensuite observé que les clauses relatives à la propriété et au contrôle des compagnies aériennes insérées dans les accords litigieux – permettant notamment aux États-Unis d’Amérique de révoquer, de suspendre ou de limiter les licences d’exploitation ou les autorisations techniques d’une compagnie aérienne désignée par les États membres intéressés, dont une part substantielle de la propriété et le contrôle effectif n’appartiennent pas à ces États membres ou à des ressortissants de ces derniers – étaient susceptibles d’affecter les compagnies aériennes établies sur le territoire desdits États membres dont une part substantielle de la propriété et le contrôle effectif appartiennent à un État membre autre que l’État membre d’établissement ou à ses ressortissants. Ces compagnies aériennes pouvaient donc être exclues du bénéfice de l’accord de transport aérien liant les États membres défendeurs aux États-Unis d’Amérique, ce bénéfice étant en revanche acquis aux compagnies aériennes des États membres défendeurs.

    166. Par conséquent, la Cour a jugé les clauses susmentionnées contraires à l’article 52 du traité CE, puisqu’elles permettaient une discrimination entre les compagnies aériennes de l’État membre partie à l’accord et celles des autres États membres en empêchant ces dernières, lorsqu’elles sont établies sur le territoire de l’État membre partie à l’accord, de bénéficier du traitement national dans l’État membre d’accueil (84) .

    167. En l’espèce, la Commission demande à la Cour de constater l’existence de la même infraction en ce qui concerne le Royaume des Pays-Bas.

    168. Il résulte du dossier que la clause relative à la propriété et au contrôle des compagnies aériennes, insérée dans l’accord bilatéral entre le Royaume des Pays‑Bas et les États-Unis d’Amérique, a été modifiée par l’échange de notes de 1992. La Commission soutient que cette clause a été substantiellement réécrite alors que le gouvernement néerlandais fait valoir que les modifications ont été d’ordre purement rédactionnel.

    169. À cet égard, il suffit de rappeler le raisonnement, exposé aux points 138 à 143 ci-dessus, que la Cour a suivi dans les arrêts du 5 novembre 2002, selon lequel, du fait de la renégociation des accords préexistants, les clauses non modifiées ou n’ayant subi que des modifications marginales doivent être considérées comme confirmées.

    170. Sur ce point, nous rejoignons en particulier les conclusions de l’avocat général Tizzano présentées dans les affaires qui ont donné lieu aux arrêts du 5 novembre 2002, conclusions dans lesquelles il soulignait que si, d’un point de vue formel, les clauses sur la propriété et sur le contrôle n’avaient pas été amendées par les accords litigieux, leur contenu et leur portée avaient néanmoins été profondément modifiés par ces accords, ceux-ci ayant nécessairement eu une incidence, à la suite de la libéralisation complète des liaisons de cinquième liberté, sur le champ d’application des clauses en question (85) .

    171. Eu égard à ce que la Cour a déjà constaté dans les arrêts du 5 novembre 2002, il y a lieu de conclure, à notre avis, à l’existence de la violation de l’article 52 du traité CE qui est invoquée par la Commission.

    C – Sur les dépens

    172. Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le Royaume des Pays-Bas ayant succombé en ses moyens selon les conclusions auxquelles nous sommes parvenu et la Commission ayant conclu à la condamnation du Royaume des Pays‑Bas, nous estimons qu’il y a lieu de le condamner aux dépens.

    173. En vertu du paragraphe 4 de ce même article, la République française qui est intervenue au litige supportera ses propres dépens.

    VII – Conclusions

    174. Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, nous proposons à la Cour de statuer comme suit:

    «1) En contractant ou en maintenant en vigueur, malgré la renégociation de l’accord de transport aérien du 3 avril 1957 entre le Royaume des Pays-Bas et les États-Unis d’Amérique, des engagements internationaux avec les États-Unis d’Amérique

    – concernant les tarifs aériens pratiqués par les transporteurs désignés par les États-Unis d’Amérique sur des liaisons intracommunautaires,

    – concernant les systèmes informatisés de réservation proposés ou utilisés sur le territoire néerlandais et

    – reconnaissant aux États-Unis d’Amérique le droit d’interdire ou de révoquer l’exercice de droits de trafic dans les cas où les transporteurs aériens désignés par le Royaume des Pays-Bas ne sont pas détenus par ce dernier ou par des ressortissants néerlandais,

    le Royaume des Pays-Bas a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 5 du traité CE (devenu article 10 CE) et 52 du traité CE (devenu, après modification, article 43 CE), ainsi que des règlements (CEE) n° 2409/92 du Conseil, du 23 juillet 1992, sur les tarifs des passagers et de fret des services aériens, et n° 2299/89 du Conseil, du 24 juillet 1989, instaurant un code de conduite pour l’utilisation des systèmes informatisés de réservation, tel que modifié par le règlement (CEE) n° 3089/93 du Conseil, du 29 octobre 1993.

    2) Le Royaume des Pays-Bas est condamné aux dépens.

    3) La République française supportera ses propres dépens.»

    (1) .

    (2)  – Arrêt Commission/Autriche (C-475/98, Rec. p. I-9797).

    (3)  – Arrêt Commission/Belgique (C-471/98, Rec. p. I-9681).

    (4)  – Arrêt Commission/Danemark (C-467/98, Rec. p. I-9519).

    (5)  – Arrêt Commission/Finlande (C-469/98, Rec. p. I-9627).

    (6)  – Arrêt Commission/Allemagne (C-476/98, Rec. p. I-9855).

    (7)  – Arrêt Commission/Luxembourg (C-472/98, Rec. p. I-9741).

    (8)  – Arrêt Commission/Royaume-Uni (C-466/98, Rec. p. I-9427).

    (9)  – Arrêt Commission/Suède (C-468/98, Rec. p. I-9575).

    (10)  – JO L 240, p. 15.

    (11)  – JO L 220, p. 1.

    (12)  – JO L 83, p. 35.

    (13)  – Dans l’affaire Commission/Royaume-Uni (C-466/98), le recours était limité à la violation de l’article 52 du traité CE.

    (14)  – Comme on le sait, l’article 80, paragraphe 1, CE prévoit que les dispositions du titre V du traité, relatif aux transports, ne s’appliquent qu’aux transports par chemin de fer, par route et par voie navigable. La navigation maritime et aérienne fait au contraire l’objet d’une réglementation spéciale. Aux termes de l’article 80, paragraphe 2, le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, pourra décider si, dans quelle mesure et par quelle procédure des dispositions appropriées pourront être prises dans ces secteurs.

    (15)  – Outre le règlement n° 2409/92, le troisième ensemble de mesures comprenait le règlement (CEE) n° 2407/92 du Conseil, du 23 juillet 1992, concernant les licences des transporteurs aériens (JO L 240, p. 1), et le règlement (CEE) n° 2408/92 du Conseil, du 23 juillet 1992, concernant l’accès des transporteurs aériens communautaires aux liaisons aériennes intracommunautaires (JO L 240, p. 8).

    (16)  – Voir, par exemple, arrêt Commission/Allemagne, précité, point 124.

    (17)  – Voir, par exemple, arrêt Commission/Allemagne, précité, points 128 et 129.

    (18)  – Voir, par exemple, arrêt Commission/Allemagne, précité, point 81.

    (19)  – Avis du 26 avril 1977 (Rec. p. 741, points 3 et 4).

    (20)  – Avis du 15 novembre 1994 (Rec. p. I-5267, point 89).

    (21)  – Voir, par exemple, arrêt Commission/Allemagne, précité, points 82 et 83.

    (22)  – Arrêt du 31 mars 1971, Commission/Conseil, dit «AETR» (22/70, Rec. p. 263).

    (23)  – Ibidem, points 16 à 18 et 22.

    (24)  – Voir, par exemple, arrêt Commission/Allemagne, précité, points 105 et 106.

    (25)  – Voir, par exemple, arrêt Commission/Allemagne, précité, points 114 à 137. S’agissant du règlement (CEE) n° 95/93, du Conseil, du 18 janvier 1993, fixant des règles communes en ce qui concerne l’attribution des créneaux horaires dans les aéroports de la Communauté (JO L 14, p. 1), lequel s’applique, sous réserve de réciprocité, aux transporteurs aériens de pays tiers, la Cour a considéré que, si la Communauté dispose, depuis l’entrée en vigueur de ce règlement, d’une compétence exclusive pour conclure avec des pays tiers des accords portant sur ce domaine, en l’espèce, la Commission n’avait cependant pas identifié les engagements internationaux contractés par les États membres concernés qui seraient susceptibles d’affecter ce règlement.

    (26)  – Voir, par exemple, arrêt Commission/Allemagne, précité, points 147 à 156.

    (27)  – COM (2002) 649 final.

    (28)  – COM (2003) 94 final.

    (29)  – Conformément au mandat qu’elle avait reçu du Conseil, la Commission a engagé en 2003 les négociations en vue de la conclusion entre la Communauté européenne et ses membres, d’une part, et les États-Unis d’Amérique, d’autre part, d’un accord dans le domaine des transports aériens. Le texte de l’accord a été finalisé par la Commission le 18 novembre 2005 et discuté au cours des sessions du Conseil du 5 décembre 2005, du 27 mars et du 6 juin 2006. Tout en exprimant la satisfaction unanime pour les résultats des négociations menées par la Commission en novembre 2005, le Conseil subordonne la conclusion de l’accord à la réforme par les États‑Unis d’Amérique des règles en matière de contrôle des compagnies aériennes américaines par des ressortissants étrangers (voir http://ec.europa.eu/transport/air_portal/international/pillars/global_partners/us_en.htm).

    (30)  – JO L 157, p. 7.

    (31)  – Ordonnance du 13 juillet 1990 (C-2/88 Imm., Rec. p. I-3365, point 17).

    (32)  – Voir point 32 ci-dessus.

    (33)  – Arrêt du 18 décembre 1997 (C-129/96, Rec. p. I-7411).

    (34)  – Arrêt du 22 octobre 1997 (T-213/95 et T-18/96, Rec. p. II-1739, point 56).

    (35)  – Arrêt du 21 septembre 2006 (C-113/04 P, Rec. p. I-8831, point 40).

    (36)  – En vertu de l’article 41, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, proclamée à Nice le 7 décembre 2000 (JO C 364, p. 1), l’obligation pour les institutions et organes de l’Union d’agir dans un délai raisonnable constitue une composante du droit à une bonne administration.

    (37)  – Voir, par exemple, arrêt du 11 août 1995, Commission/Allemagne (C-431/92, Rec. p. I-2189, point 22).

    (38)  – Voir arrêts du 1 er mars 1966, Lütticke/Commission (48/65, Rec. p. 27), et du 14 février 1989, Star Fruit Company/Commission (247/87, Rec. p. 291, points 11 et 12).

    (39)  – Voir, par exemple, arrêt du 9 juillet 1970, Commission/France (26/69, Rec. p. 565, point 10).

    (40)  – Arrêt du 14 décembre 1971 (7/71, Rec. p. 1003).

    (41)  – Arrêt du 10 avril 1984 (324/82, Rec. p. 1861).

    (42)  – Arrêt du 11 décembre 1973 (120/73, Rec. p. 1481).

    (43)  – Arrêt Commission/Belgique, précité à la note 41, point 12.

    (44)  – Arrêt du 16 mai 1991, Commission/Pays-Bas, Rec. p. I-2461.

    (45)  – Ibidem, point 15.

    (46)  – Voir, entre autres, arrêts du 18 mars 1997, Guérin automobiles/Commission (C‑282/95 P, Rec. p. I-1503, point 37), du 9 septembre 1999, UPS Europe/Commission (T-127/98, Rec. p. II‑2633, point 37) concernant l’examen de plaintes pour violation des règles de concurrence, et du 3 juin 1999, TF1/Commission (T-17/96, Rec. p. II-3757) concernant l’examen de plaintes pour violation des règles en matière d’aides d’État.

    (47)  – Voir, entre autres, arrêts du 14 juillet 1972, Geigy/Commission (52/69, Rec. p. 787, point 21), du 24 septembre 2002, Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission (C‑74/00 P et C-75/00 P, Rec. p. I-7869, points 140 et 141), et du 22 octobre 1997, SCK et FNK/Commission, précité, point 55.

    (48)  – D’autres considérations pourraient éventuellement être faites à propos de la procédure prévue à l’article 228 CE, mais cela sortirait du cadre du présent litige.

    (49)  – À cet égard, nous pouvons d’ailleurs rappeler que l’on n’a pas manqué de mettre en évidence que les compétences attribuées à la Commission en vertu de l’article 226 CE se situent dans une relation instrumentale par rapport au rôle fondamental de gardienne du traité que lui attribue l’article 211 CE et que, partant, même en présence d’une marge d’appréciation de la Commission quant au moment et aux conditions de l’accomplissement des différentes phases de la procédure, on ne saurait exclure qu’il existe en principe pour la Commission une obligation de poursuite. En ce sens, voir les conclusions de l’avocat général Trabucchi dans l’affaire Geddo (arrêt du 12 juillet 1973, 2/73, Rec. p. 865), et, plus récemment, celles de l’avocat général Alber présentées dans les affaires Commission/Grèce (arrêt du 12 septembre 2000, C‑260/98, Rec. p. I-6537, point 72), et Commission/Irlande (arrêt du 12 septembre 2000, C‑358/97, Rec. p. I-6301, point 82).

    Du reste, au fil des ans, l’adoption par la Commission de procédures internes d’instruction des cas d’infraction a permis d’assurer une plus grande transparence de son fonctionnement. En 2001, sous la pression du Médiateur européen, la Commission s’est engagée à publier de manière consolidée ses règles internes de procédure applicables aux relations avec le plaignant dans le cadre de l’action en manquement. Ces règles f igurent dans la communication de la Commission au Parlement européen et au Médiateur européen relative aux relations avec le plaignant en matière d’infractions au droit communautaire (JO 2002, C 166, p. 3). Il existe donc la tendance à une dépolitisation progressive de la procédure d’infraction et à sa formalisation à tout le moins lorsque la plainte d’un particulier est à l’origine de l’action de la Commission. Il convient enfin de relever que le Médiateur européen a exercé à plusieurs reprises un contrôle sur la pertinence des raisons invoquées par la Commission lors du classement sans suite d’une plainte; (voir, par exemple, décision 995/98/OV).

    (50) – Arrêts du 2 février 1988, Commission/Belgique (293/85, Rec. p. 305, point 14), du 2 juillet 1996, Commission/Luxembourg (C-473/93, Rec. p. I-3207, point 20), du 28 octobre 1999, Commission/Autriche (C-328/96, Rec. p. I-7479, points 34 et 51), et du 13 décembre 2001, Commission/France (C-1/00, Rec. p. I-9989, points 64 et 65).

    (51)  – Voir arrêts précités, Geigy/Commission, point 21, ainsi que Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, point 139.

    (52)  – Voir, par exemple, arrêts précités, Lorenz, point 4, Geigy/Commission, point 21, ainsi que Falck et Acciairie di Bolzano/Commission, point 140, et arrêts du Tribunal du 13 mars 1990, Costacurta/Commission (T-34/89 et T‑67/89, Rec. p. II-93, point 48), et du 10 février 1994, White/Commission (T‑107/92, Rec. FP p. I-A-41, point 46).

    (53)  – Points 7 et 8 de l’arrêt.

    (54)  – La procédure d’infraction visée à l’article 141 du traité CEEA étant définie comme une «ultima ratio» dont la Commission dispose afin de faire cesser le comportement d’un État membre qu’elle tient pour contraire au droit communautaire, l’avocat général Roemer a observé que la nécessité de préserver l’efficacité de cette procédure, ainsi que la considération que le recours à cette procédure met nécessairement en jeu le prestige de l’État membre intéressé, nonobstant le caractère objectif de la constatation d’infraction, militent en faveur de l’exclusion de tout automatisme et de la reconnaissance dans le chef de la Commission d’un pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne tant l’opportunité d’agir à l’encontre de l’État par le biais de la procédure d’infraction que le moment où cette action doit être engagée.

    (55)  – L’avocat général Roemer évoque, notamment, la volonté de privilégier dans un premier temps un arrangement à l’amiable, les effets initialement limités de l’infraction, l’exigence de ne pas aggraver par l’ouverture de la procédure la crise que la Communauté traversait en 1965 et, enfin, la circonstance que de nouvelles dispositions étaient en train d’être adoptées dans le domaine en question.

    (56)  – Point 15 de l’arrêt.

    (57)  – Voir arrêts du 12 mai 2005, Commission/Belgique (C-287/03, Rec. p. I-3761, point 14), et du 8 décembre 2005, Commission/Luxembourg (C-33/04, Rec. p. I-10629, point 76). En termes analogues, voir arrêt du 21 janvier 1999, Commission/Belgique (C-207/97, Rec. p. I-275, point 25).

    (58)  – On pourrait parvenir à une conclusion différente en ce qui concerne la procédure prévue à l’article 228 CE.

    (59)  – Voir point 83 ci-dessus.

    (60)  – Arrêt du 12 septembre 2000 (C-358/97, Rec. p. I-6301).

    (61)  – Voir point 83 ci-dessus.

    (62)  – Donc en laissant ouverte la possibilité de réintroduire un nouveau recours au cas où ce vice pourrait être réparé.

    (63)  – Comme on le sait, selon une jurisprudence constante, en statuant dans le cadre d’un recours formé en l’application de l’article 226 CE, la Cour ne saurait prendre en considération les évolutions intervenues entre l’avis motivé et l’introduction du recours, mais doit se borner à examiner la situation telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé.

    (64)  – Voir ordonnance du 11 juillet 1995, Commission/Espagne (C-266/94, Rec. p. I‑1975, point 17), et arrêts du 10 avril 2003, Commission/Portugal (C‑392/99, Rec. p. I-3373, point 133), et du 9 décembre 2004, Commission/France (C-177/03, Rec. p. I-1167, point 20).

    (65)  – Point 18 de l’arrêt.

    (66)  – Point 21 de l’arrêt.

    (67)  – Point 22 de l’arrêt.

    (68)  – Voir les considérations exposées en ce qui concerne l’arrêt Commission/Irlande, précité au point 94 ci-dessus.

    (69)  – Voir point 92 ci-dessus.

    (70)  – Les éventuelles divergences de vues entre la Commission et l’État membre intéressé quant aux mesures nécessaires à une transposition correcte de l’arrêt de la Cour pourront éventuellement être prises en compte dans le cadre d’un recours en application de l’article 228 CE.

    (71)  – Voir arrêt Commission/Irlande, précité au point 94 ci-dessus.

    (72)  – Le présent cas d’espèce se différencie de ceux ayant fait l’objet des arrêts de la Cour du 14 septembre 1999, Commission/Belgique (C-170/98, Rec. p. I-5493), et du 4 juillet 2000, Commission/Portugal (C-62/98, Rec. p. I-5171), dans lesquels la Commission faisait grief dans ses requêtes de l’absence de dénonciation de l’accord en question, en saisissant dès lors la Cour de la question de l’existence pour les États membres défendeurs d’une obligation en ce sens.

    (73)  – Pour le cas où la Cour déciderait de prendre position sur ce point, il nous semble en tout état de cause raisonnable de considérer que lorsque, comme en l’occurrence, s’il était fait droit au recours, l’incompatibilité avec les dispositions du droit communautaire ne concerne que certaines des clauses d’un accord international, la dénonciation de cet accord ne doit être réputée indispensable que s’il n’est pas possible de parvenir à la suppression ou à la modification des clauses en question. En l’espèce, la Commission devrait dès lors autoriser l’État membre défendeur à renégocier les clauses litigieuses afin de les rendre compatibles avec les dispositions communautaires pertinentes et la dénonciation de l’ensemble de l’accord ne pourrait être exigée que si un tel résultat n’était pas possible.

    (74)  – Voir arrêt SCK et FNK/Commission, précité au point 58 ci-dessus, point 57, et par analogie, à propos de la durée de la procédure juridictionnelle, arrêt du 17 décembre 1998, Baustahlgewebe/Commission (C-185/95 P, Rec. p. I-8417, point 29).

    (75)  – Voir annexe C au mémorandum de consultations du 15 novembre 1991, joint en annexe à la requête.

    (76)  – Voir annexe D au mémorandum de consultations du 15 novembre 1991.

    (77)  – De ce point de vue, la présente espèce est assimilable, à maints égards, à celle que la Cour a examinée dans l’arrêt du 5 novembre 2002, Commission/Belgique, précité. Dans ce cas également, l’accord initial de 1946 entre le Royaume de Belgique et les États‑Unis d’Amérique avait été modifié à plusieurs reprises en vue de mettre en œuvre une libéralisation progressive du trafic aérien entre les deux pays. Dans cette optique, un nouvel accord avait été conclu en 1980. En particulier, pour ce qui nous occupe ici, les dispositions en matière de liberté tarifaire des transporteurs américains sur des liaisons intracommunautaires et de SIR avaient été introduites avant les accords de 1994 contestés par la Commission. Voir points 23 à 27 de l’arrêt rendu dans l’affaire C-471/98.

    (78)  – C-62/98, Rec. p. I-5171, et C-84/98, Rec. p. I-5215.

    (79)  – Arrêt Commission/Belgique, C-471/98, précité, point 50.

    (80)  – Voir arrêt Commission/Belgique, C-471/98, précité, points 44 à 53.

    (81)  – À cet égard, on observera d’ailleurs que la protection accordée par l’article 307, premier alinéa, CE aux accords internationaux conclus par les États membres avant l’entrée en vigueur du traité ne s’étend pas aux modifications de ces accords qui ont été conclues postérieurement à l’entrée en vigueur du traité. En ce sens, voir arrêt, Commission/Allemagne, C-476/98, précité, point 69.

    (82)  – Point 45 de l’arrêt.

    (83)  – Adoptée le 23 mai 1969.

    (84)  – Voir, par exemple, arrêt Commission/Allemagne, C-476/98, précité, points 144 à 156.

    (85)  – Voir points 137 et 138.

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