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Document 62003CJ0547
Judgment of the Court (Second Chamber) of 19 January 2006. # Asian Institute of Technology (AIT) v Commission of the European Communities. # Appeal - Asia-Invest Programme - Public call for proposals - Contract - Article 111 of the Rules of Procedure of the Court of First Instance - Manifest inadmissibility - No legal interest in bringing proceedings - Article 64 of the Rules of Procedure of the Court of First Instance - Measures of organisation of procedure - Request for production of documents - Parties requested to make written submissions on certain aspects of the proceedings. # Case C-547/03 P.
Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 19 janvier 2006.
Asian Institute of Technology (AIT) contre Commission des Communautés européennes.
Pourvoi - Programme Asia-Invest - Appel à propositions - Contrat - Article 111 du règlement de procédure du Tribunal - Irrecevabilité manifeste - Défaut d'intérêt à agir - Article 64 du règlement de procédure du Tribunal - Mesures d'organisation de la procédure - Demande de production de documents - Invitation des parties à se prononcer par écrit sur certains aspects du litige.
Affaire C-547/03 P.
Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 19 janvier 2006.
Asian Institute of Technology (AIT) contre Commission des Communautés européennes.
Pourvoi - Programme Asia-Invest - Appel à propositions - Contrat - Article 111 du règlement de procédure du Tribunal - Irrecevabilité manifeste - Défaut d'intérêt à agir - Article 64 du règlement de procédure du Tribunal - Mesures d'organisation de la procédure - Demande de production de documents - Invitation des parties à se prononcer par écrit sur certains aspects du litige.
Affaire C-547/03 P.
Recueil de jurisprudence 2006 I-00845
ECLI identifier: ECLI:EU:C:2006:46
Affaire C-547/03 P
Asian Institute of Technology (AIT)
contre
Commission des Communautés européennes
«Pourvoi — Programme Asia-Invest — Appel à propositions — Contrat — Article 111 du règlement de procédure du Tribunal — Irrecevabilité manifeste — Défaut d'intérêt à agir — Article 64 du règlement de procédure du Tribunal — Mesures d'organisation de la procédure — Demande de production de documents — Invitation des parties à se prononcer par écrit sur certains aspects du litige»
Conclusions de l'avocat général Mme C. Stix-Hackl, présentées le 13 septembre 2005
Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 19 janvier 2006
Sommaire de l'arrêt
Procédure — Décision prise par voie d'ordonnance motivée — Recours à des mesures d'organisation de la procédure
(Règlement de procédure du Tribunal, art. 64 et 111)
Dès lors que les mesures d'organisation de la procédure prévues à l'article 64 du règlement de procédure du Tribunal visent à assurer, aux termes dudit article, dans les meilleures conditions, la mise en état des affaires, le déroulement des procédures et le règlement des litiges, le recours à de telles mesures n'est pas, en soi, susceptible de faire obstacle à l'adoption d'une ordonnance motivée sur le fondement de l'article 111 du même règlement.
(cf. point 30)
ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)
19 janvier 2006 (*)
«Pourvoi – Programme Asia-Invest – Appel à propositions – Contrat –Article 111 du règlement de procédure du Tribunal – Irrecevabilité manifeste – Défaut d’intérêt à agir – Article 64 du règlement de procédure du Tribunal – Mesures d’organisation de la procédure – Demande de production de documents – Invitation des parties à se prononcer par écrit sur certains aspects du litige»
Dans l’affaire C-547/03 P,
ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice, introduit le 22 décembre 2003,
Asian Institute of Technology (AIT), établi à Pathumthani (Thaïlande), représenté par Me H. Teissier du Cros, avocat, ayant élu domicile à Luxembourg,
partie requérante,
l’autre partie à la procédure étant:
Commission des Communautés européennes, représentée par M.
P.-J. Kuijper et Mme B. Schöfer, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,
partie défenderesse en première instance,
LA COUR (deuxième chambre),
composée de M. C. W. A. Timmermans, président de chambre, M. J. Makarczyk, Mme R. Silva de Lapuerta, MM. P. Kūris et G. Arestis (rapporteur), juges,
avocat général: Mme C. Stix-Hackl,
greffier: Mme K. Sztranc, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 26 mai 2005,
ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 13 septembre 2005,
rend le présent
Arrêt
1 Par son pourvoi, l’Asian Institute of Technology (ci-après l’«AIT») demande l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 15 octobre 2003, AIT/Commission (T-288/02, non publiée au Recueil, ci-après l’«ordonnance attaquée»), par laquelle celui-ci a rejeté, comme manifestement irrecevable, son recours tendant à l’annulation de la décision de la Commission, du 22 février 2002, portant conclusion d’un contrat de recherche dans le cadre du programme «Asia-Invest» avec le Center for Energy-Environment Research and Development (ci-après la «décision litigieuse»).
Le cadre juridique
2 Le titre II du règlement de procédure du Tribunal prévoit un chapitre 3 intitulé «Des mesures d’organisation de la procédure et des mesures d’instruction». À la section I de ce chapitre, intitulée «Des mesures d’organisation de la procédure», figure l’article 64 qui dispose à ses paragraphes 1 à 4:
«§ 1 Les mesures d’organisation de la procédure visent à assurer, dans les meilleures conditions, la mise en état des affaires, le déroulement des procédures et le règlement des litiges. Elles sont décidées par le Tribunal, l’avocat général entendu.
§ 2 Les mesures d’organisation de la procédure ont, en particulier, pour objet:
a) d’assurer le bon déroulement de la procédure écrite ou orale et de faciliter l’administration des preuves;
b) de déterminer les points sur lesquels les parties doivent compléter leur argumentation ou qui nécessitent une instruction;
c) de préciser la portée des conclusions ainsi que des moyens et arguments des parties et de clarifier les points litigieux entre elles;
d) de faciliter le règlement amiable des litiges.
§ 3 Les mesures d’organisation de la procédure peuvent notamment consister à:
a) poser des questions aux parties;
b) inviter les parties à se prononcer par écrit ou oralement sur certains aspects du litige;
c) demander des informations ou renseignements aux parties ou à des tiers;
d) demander la production de documents ou de toute pièce relative à l’affaire;
e) convoquer les agents des parties ou les parties en personne à des réunions.
§ 4 Chaque partie peut, à tout stade de la procédure, proposer l’adoption ou la modification de mesures d’organisation de la procédure. Dans ce cas, les autres parties sont entendues avant que ces mesures ne soient ordonnées.
Lorsque les circonstances de la procédure l’exigent, le Tribunal informe les parties des mesures envisagées et leur donne l’occasion de présenter oralement ou par écrit leurs observations.»
3 Le titre III dudit règlement de procédure prévoit un chapitre 2, intitulé «Des incidents de procédure». Ce chapitre comprend notamment les articles 111, 113 et 114, qui disposent:
«Article 111
Lorsque le Tribunal est manifestement incompétent pour connaître d’un recours ou lorsque celui-ci est manifestement irrecevable ou manifestement dépourvu de tout fondement en droit, le Tribunal, l’avocat général entendu, peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée.
Article 113
Le Tribunal peut à tout moment, d’office, examiner les fins de non-recevoir d’ordre public, ou constater, les parties entendues, que le recours est devenu sans objet et qu’il n’y a plus lieu de statuer; la décision est prise dans les conditions prévues à l’article 114, paragraphes 3 et 4.
Article 114
[…]
§ 3 Sauf décision contraire du Tribunal, la suite de la procédure sur la demande est orale.
§ 4 Le Tribunal, l’avocat général entendu, statue sur la demande ou la joint au fond. Il renvoie l’affaire à la Cour si celle-ci relève de la compétence de cette dernière.
Si le Tribunal rejette la demande ou la joint au fond, le président fixe de nouveaux délais pour la poursuite de l’instance.»
Les faits à l’origine du litige
4 L’AIT est un organisme d’enseignement technologique et de recherche sans but lucratif établi en Thaïlande.
5 Ainsi qu’il ressort de l’ordonnance attaquée, l’AIT comportait jusqu’en 2001 un service sans personnalité juridique dénommé «Center for Energy-Environment Research and Development» (ci-après le «CEERD»), dont le directeur était, jusqu’au 31 décembre 2001, M. Lefèvre.
6 Le programme «Asia-Invest» fait partie d’une série d’initiatives de la Communauté européenne conçues pour promouvoir des échanges et une entente réciproques entre l’Union européenne et l’Asie en soutenant la coopération commerciale. Dans le cadre de ce programme, la Commission des Communautés européennes a publié, le 10 avril 200l, l’appel à propositions n° EUROPEAID/112441/C/G (JO C 109, p. 9).
7 À la suite de cette publication, le Center for Energy-Environment Research and Development – Foundation for International Human Resource Development (ci-après le «CEERD-FIHRD») a déposé, le 19 novembre 2001, une proposition signée par M. Lefèvre en sa qualité de directeur de cet organisme.
8 Après évaluation des dossiers déposés, la Commission a décidé de retenir, entre autres, cette proposition et a adopté la décision litigieuse. Le contrat n° ASI/B7-301/95/108-174 conclu avec le CEERD a été signé le 27 février 2002 par M. Lefèvre se présentant comme le directeur de cet organisme. Ledit contrat prévoyait le paiement d’une avance de 27 481,88 euros, laquelle a été versée sur un compte ouvert au nom de la Foundation for International Human Resource Development (ci-après la «FIHRD») auprès de la Thai Farmers Bank.
9 Par lettre du 17 juillet 2002, le conseil de l’AIT a demandé à EuropeAid, l’Office de coopération de la Commission (ci-après «EuropeAid»), des renseignements sur un projet intitulé «Facilitating the Dissemination of European Clean Technologies in Thailand». Dans cette lettre, ledit conseil a indiqué que le CEERD était «un simple service de l’AIT dépourvu de la personnalité morale […] n’ayant aucune qualité pour contracter sous ce nom usurpé, surtout par l’entremise de M. Lefèvre qui n’[était] plus directeur de cet organisme depuis longtemps».
10 En réponse à ladite lettre, M. Muller, directeur d’EuropeAid, a adressé le 21 juillet 2002 au conseil de l’AIT un courrier l’informant qu’un contrat avait été signé le 22 février 2002, pour la Commission, par lui-même et par M. Eich, d’une part, et le 27 février 2002 par M. Lefèvre, directeur du CEERD, d’autre part. Il était précisé dans ce courrier qu’une somme de 27 481,88 euros avait déjà été payée à titre d’avance dans le cadre de ce contrat et que, sa durée d’exécution étant de quinze mois, le projet serait mené à son terme le 28 mai 2003.
11 Dans cette même lettre, la Commission a également indiqué qu’elle avait déjà signé le 4 juillet 2000 un contrat analogue, d’une durée de 17 mois, avec M. Lefèvre, directeur du CEERD et que la subvention prévue par ce contrat, d’un montant de 42 227,50 euros, avait été versée en totalité.
La procédure devant le Tribunal et l’ordonnance attaquée
12 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 23 septembre 2002, l’AIT a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse. Cette affaire a été enregistrée sous le numéro T-288/02.
13 Le même jour, l’AIT a introduit un recours en annulation de la décision de la Commission, du 4 juillet 2000, portant conclusion du contrat de recherche mentionné au point 11 du présent arrêt. Cette affaire a été enregistrée sous le numéro T-287/02.
14 Le 20 décembre 2002, la Commission a déposé des mémoires en défense dans les affaires AIT/Commission ayant donné lieu à l’ordonnance du Tribunal du 25 juin 2003 (T-287/02, Rec. p. II-2179) et à l’ordonnance attaquée (T-288/02, non publiée au Recueil), en demandant, notamment, la jonction de ces affaires. Le greffe du Tribunal a imparti à l’AIT un délai pour présenter ses observations sur cette demande de jonction. L’AIT s’est opposé à la jonction desdites affaires.
15 Dans son mémoire en défense présenté dans le cadre de l’affaire T-288/02, la Commission a excipé de l’irrecevabilité du recours. En annexe à ce mémoire figuraient également les premières pages de la proposition du CEERD-FIHRD signée par M. Lefèvre, en sa qualité de directeur du CEERD-FIHRD, le 19 novembre 2001, ainsi que le contrat du 27 février 2002 conclu entre la Commission et le CEERD.
16 Par requête en référé déposée au greffe du Tribunal le 23 mai 2003, l’AIT a introduit une demande de sursis à l’exécution
de la décision litigieuse. Par ordonnance du 9 juillet 2003, AIT/Commission
(T-288/02 R, Rec. p. II-2885), le président du Tribunal a rejeté cette demande et a réservé les dépens de l’instance. L’AIT
a introduit un pourvoi contre cette ordonnance, que le président de la Cour, statuant en référé, a rejeté par ordonnance du
30 septembre 2003, AIT/Commission [C-348/03 P(R), non publiée au Recueil].
17 Dans le cadre de l’affaire à l’origine de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a, en vertu de l’article 64 de son règlement de procédure, demandé à la Commission, le 30 juin 2003, de lui communiquer l’appel à propositions n° EUROPEAID/112441/C/G, mentionné au point 6 du présent arrêt, les textes relatifs au cadre réglementaire concernant l’octroi des subventions prévues par le programme «Asia-Invest» et la proposition complète du CEERD-FIHRD du 19 novembre 2001.
18 La Commission ayant déféré à cette demande le 22 juillet 2003, le Tribunal a, en vertu de l’article 64 de son règlement de procédure, invité l’AIT à prendre position sur les documents produits par cette institution communautaire et à présenter ses observations sur l’exception d’irrecevabilité invoquée par la Commission dans son mémoire en défense.
19 Le 11 septembre 2003, l’AIT a déféré à cette demande. Dans le cadre de ses observations, celui-ci a, notamment, indiqué qu’il avait engagé, le 2 septembre 2003, une procédure pour contrefaçon à l’encontre de M. Lefèvre devant le tribunal de grande instance de Paris.
20 Par l’ordonnance du 25 juin 2003, AIT/Commission, précitée, le Tribunal a, en vertu des articles 113 et 114 de son règlement de procédure, rejeté comme irrecevable le recours introduit par l’AIT dans l’affaire correspondante.
21 Par l’ordonnance attaquée, le Tribunal a, en vertu de l’article 111 de son règlement de procédure, rejeté le recours dirigé contre la décision litigieuse, comme manifestement irrecevable.
22 L’appréciation du Tribunal à cet égard est la suivante:
«27 Il ressort d’une jurisprudence constante que peuvent seuls être attaqués par une personne physique ou morale, en vertu de l’article 230, quatrième alinéa, CE, les actes produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter ses intérêts en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique (arrêt de la Cour du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60/81, Rec. p. 2639, point 9; arrêts du Tribunal du 18 mai 1994, BEUC et NCC/Commission, T-37/92, Rec. II-285, point 27, et du 18 décembre 1997, ATM/Commission, T-178/94, Rec. II-2529, point 53).
28 Il ressort des écritures de la Commission ainsi que des documents communiqués au Tribunal, et notamment du contrat du 27 février 2002 et de la proposition du 19 novembre 2001 introduite par le [CEERD-FIHRD], que la Commission a adopté la décision attaquée en pleine connaissance de cause, c’est-à-dire en sachant pertinemment que l’autre partie contractante était une entité distincte de l’AIT et que le CEERD et son directeur n’étaient plus associés à l’AIT. Ainsi que la Commission le relève dans son mémoire en défense, la proposition du 19 novembre 2001, et notamment la partie II «The Applicant», fait explicitement état du transfert du CEERD de l’AIT à la FIHRD ainsi que du fait que M. T. Lefèvre n’était plus employé auprès de l’AIT. De plus, les documents en question avaient informé la Commission, avant la conclusion du contrat, de toute une série de nouvelles coordonnées pour le CEERD ainsi que pour la FIHRD.
29 Il découle de ce qui précède que la décision de la Commission portant conclusion du contrat du 27 février 2002 n’était entachée d’aucune erreur quant à l’identité distincte de la partie contractante, ni d’une tromperie quant à l’existence d’une connexité entre cette dernière et le requérant. La Commission savait que le contrat avait été sollicité par M. Lefèvre pour le compte du [CEERD-FIHRD], une entité nouvelle et distincte, et elle a conclu le contrat en connaissance de ce fait.
30 Il s’ensuit que la décision attaquée est adressée au [CEERD-FIHRD], et non au requérant, et que le contrat du 27 février 2002 n’impose à ce dernier aucune obligation ni lui confère aucun droit. La décision de la Commission portant conclusion de ce contrat ne concerne donc nullement le requérant et son annulation n’est pas susceptible d’affecter sa position juridique ni de ne lui apporter aucun bénéfice.
31 Eu égard à ce qui précède, le requérant ne saurait prétendre que la décision attaquée a produit des effets juridiques obligatoires de nature à affecter ses intérêts en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique.
32 Pour autant que le requérant se considère lésé par le prétendu comportement déloyal de M. Lefèvre ainsi que par la prétendue ‘usurpation’ du CEERD, il demeure à même de faire valoir ses droits devant les juridictions nationales compétentes. L’annulation de la décision attaquée ne pourrait compenser le préjudice prétendument subi en raison de l’usurpation alléguée.»
Les conclusions des parties et la procédure devant la Cour
23 Par son pourvoi, l’AIT conclut à ce qu’il plaise à la Cour:
– annuler l’ordonnance attaquée;
– renvoyer l’affaire au Tribunal;
– ou à défaut évoquer et ouvrir la procédure orale;
– annuler la décision litigieuse.
24 La Commission conclut à ce qu’il plaise à la Cour:
– rejeter le pourvoi;
– condamner l’AIT aux dépens.
25 Par lettre déposée au greffe de la Cour le 12 mars 2004, l’AIT a demandé, conformément à l’article 117 du règlement de procédure de la Cour, l’autorisation de déposer un mémoire en réplique. Par décision du 23 mars 2004, le président de la Cour a rejeté cette demande.
Sur le pourvoi
26 À l’appui de ses conclusions tendant à l’annulation de l’ordonnance attaquée, l’AIT invoque trois moyens. Les premier et deuxième moyens sont tirés, respectivement, d’une application erronée de l’article 111 du règlement de procédure du Tribunal et d’une violation de l’article 230, quatrième alinéa, CE. Par son troisième moyen, l’AIT se prévaut d’une violation de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, proclamée à Nice le 7 décembre 2000 (JO C 364, p. 1, ci-après la «charte des droits fondamentaux»).
Sur le premier moyen
27 Dans le cadre du présent moyen, l’AIT fait valoir, en premier lieu, que le Tribunal a fait une application erronée de l’article 111 de son règlement de procédure dès lors que, comme en l’espèce, avant de statuer en vertu de cet article, il avait déjà décidé des mesures d’organisation de la procédure conformément aux dispositions de l’article 64 du même règlement.
28 Il convient de relever, d’une part, que l’article 111 du règlement de procédure permet au Tribunal de rejeter par voie d’ordonnance motivée un recours, sans poursuivre la procédure, lorsque ce recours n’est pas susceptible de prospérer, pour les motifs énoncés dans cette disposition.
29 Il y a lieu d’indiquer, d’autre part, que, conformément à l’article 64, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, les mesures décidées en vertu de cet article visent à assurer, dans les meilleures conditions, la mise en état des affaires, le déroulement des procédures et le règlement des litiges.
30 Il s’ensuit que, dès lors que les mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure du Tribunal visent à assurer, aux termes dudit article, dans les meilleures conditions, la mise en état des affaires, le déroulement des procédures et le règlement des litiges, le recours à de telles mesures n’est pas, en soi, susceptible de faire obstacle à l’adoption d’une ordonnance sur le fondement de l’article 111 du même règlement.
31 À cet égard, l’AIT soutient, en particulier, que l’application faite, en l’espèce, de cet article 111 est erronée au motif que le recours qu’il avait présenté n’était pas manifestement irrecevable au sens de cet article. En effet, l’irrecevabilité retenue par le Tribunal se serait révélée à la suite des mesures d’organisation de la procédure, qui ont été décidées un an après le dépôt de la requête, et à la suite d’un premier échange de mémoires.
32 Il convient de rappeler, ainsi qu’il ressort des points 30 et 31 de l’ordonnance attaquée, que le recours présenté devant le Tribunal a été rejeté comme manifestement irrecevable au motif que l’AIT ne justifiait pas d’un intérêt à agir. Ce motif d’irrecevabilité figurait déjà dans le mémoire en défense de la Commission. De surcroît, les documents sur lesquels le Tribunal a fondé son raisonnement, à savoir la proposition du CEERD-FIHRD du 19 novembre 2001 et le contrat du 27 février 2002, figuraient pour la plupart parmi les pièces de procédure annexées au mémoire en défense de la Commission.
33 Il s’ensuit que l’allégation de l’AIT, selon laquelle, en l’absence de production de certains documents auxquels l’ordonnance attaquée se réfère expressément et pour la fourniture desquels le Tribunal avait imparti un délai à la Commission, le recours n’aurait pas été déclaré irrecevable, est, en tout état de cause, dépourvue de tout fondement et, partant, doit être écartée.
34 En second lieu, l’AIT fait valoir que l’adoption de l’ordonnance attaquée sur le fondement de l’article 111 du règlement de procédure du Tribunal, après un premier échange de mémoires, porterait atteinte à ses droits procéduraux dès lors qu’il n’a pas eu l’occasion d’être entendu. À ce titre, il soutient que l’irrecevabilité invoquée en l’espèce relevait du champ d’application de l’article 113 du même règlement, qui lui conférait davantage de droits, notamment le droit à une procédure orale.
35 À cet égard, il y a lieu de constater que l’application de ce dernier article ne garantit pas le déroulement d’une phase orale, le Tribunal pouvant, en application de l’article 114, paragraphe 3, de son règlement de procédure auquel renvoie l’article 113 du même règlement, statuer au terme d’une procédure uniquement écrite.
36 Si, enfin, par ses allégations, l’AIT se prévaut en substance de la violation de ses droits procéduraux dès lors qu’il n’a pas eu l’occasion d’être entendu, il convient, en tout état de cause, de rappeler que le Tribunal a invité l’AIT à présenter ses observations sur les fins de non-recevoir soulevées par la Commission dans son mémoire en défense et que l’AIT a répondu à cette invitation.
37 Par conséquent, il convient d’écarter également les arguments invoqués en second lieu par l’AIT au soutien du présent moyen.
38 Il résulte de ce qui précède que le Tribunal n’a commis aucune erreur de droit dans l’application de l’article 111 de son règlement de procédure et, partant, il y a lieu d’écarter le premier moyen.
Sur le deuxième moyen
39 L’AIT fait valoir que, en appliquant l’arrêt de la Cour du 11 novembre 1981, IBM/Commission (60/81, Rec. p. 2639), le Tribunal a violé l’article 230, quatrième alinéa, CE. Selon l’AIT, la recevabilité de son recours devrait être examinée à la lumière de l’arrêt de la Cour du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission (25/62, Rec. p. 197). À cet égard, l’AIT considère que les conditions énoncées par cette jurisprudence sont réunies en l’espèce. En effet, se fondant sur l’arrêt du 18 mai 1994, Codorniu/Conseil (C-309/89, Rec. p. I-1853), il soutient qu’il est porté atteinte par la décision litigieuse, notamment, à son droit d’utiliser le nom ainsi que le logo du CEERD qui apparaissent dans plusieurs pièces du dossier, cette atteinte caractérisant sa situation par rapport à celle de tout autre opérateur économique.
40 Force est de constater que, dans le cadre du présent moyen, l’AIT n’a avancé aucune argumentation susceptible de démontrer que la constatation du Tribunal qui figure au point 31 de l’ordonnance attaquée, selon laquelle la décision litigieuse n’a pas produit des effets juridiques obligatoires de nature à affecter ses intérêts en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique, est erronée.
41 D’une part, l’AIT n’a pas réfuté les constatations du Tribunal, qui figurent respectivement aux points 28 et 30 de l’ordonnance attaquée, selon lesquelles la Commission avait adopté la décision litigieuse en sachant pertinemment que son cocontractant était une partie distincte de l’AIT et que ladite décision était adressée au CEERD, et non à lui-même. De surcroît, l’AIT ne conteste pas davantage que, lors de la signature du contrat litigieux, le CEERD et son directeur n’étaient plus associés à l’AIT.
42 D’autre part, l’AIT ne réfute par aucun argument la constatation qui figure au point 30 de l’ordonnance attaquée, selon laquelle la décision litigieuse ne lui imposait aucune obligation et ne lui conférait aucun droit.
43 Quant à l’allégation selon laquelle le nom et le logo du CEERD, qui figurent dans diverses pièces du dossier produit devant le Tribunal, ont été usurpés par M. Lefèvre, il convient de considérer que cet élément ne justifie pas l’intérêt à agir de l’AIT devant le Tribunal contre la décision litigieuse.
44 Par ailleurs, ainsi que le Tribunal l’a jugé à bon droit au point 32 de l’ordonnance attaquée, si l’AIT se considérait lésé par le prétendu comportement déloyal de M. Lefèvre, il lui appartenait de faire valoir ses droits devant les juridictions nationales compétentes.
45 À cet égard, ainsi qu’il résulte des observations présentées par l’AIT à la suite de la communication qui lui a été faite des documents déposés par la Commission dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure devant le Tribunal, cet organisme a indiqué avoir cité M. Lefèvre pour contrefaçon devant le tribunal de grande instance de Paris le 2 septembre 2003.
46 Il résulte des considérations qui précèdent qu’il convient également d’écarter le deuxième moyen.
Sur le troisième moyen
47 À titre subsidiaire, l’AIT soutient que le rejet de son recours comme irrecevable au regard de l’article 230 CE violerait son droit à un recours juridictionnel effectif, tel que celui-ci serait garanti par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux. À ce titre, l’AIT soutient que le recours devant les juridictions nationales, contrairement à ce qui est énoncé au point 32 de l’ordonnance attaquée, ne remplit pas les conditions exigées par la jurisprudence pour qu’un recours soit considéré comme effectif. En effet, si la Cour, dans son arrêt du 25 juillet 2002, Unión de Pequeños Agricultores/Conseil (C-50/00 P, Rec. p. I-6677), s’est refusée à suivre les conclusions de l’avocat général, les motifs qu’elle a retenus ne seraient pas valables en ce qui concerne une personne morale non établie dans un État membre de l’Union, telle que l’AIT.
48 Le présent moyen doit être écarté. En effet, il y a lieu de relever que, après avoir constaté au point 31 de l’ordonnance attaquée que l’AIT ne saurait prétendre que la décision litigieuse a produit des effets juridiques obligatoires de nature à affecter ses intérêts en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique, le Tribunal a constaté au point 32 de la même ordonnance que, pour autant que l’AIT se considère lésé par le prétendu comportement illégal de M. Lefèvre ainsi que par la prétendue «usurpation» du logo «CEERD», il demeure à même de faire valoir ses droits devant les juridictions nationales compétentes.
49 À cet égard, il convient de rappeler qu’il est constant que l’AIT a cité M. Lefèvre pour contrefaçon devant le tribunal de grande instance de Paris le 2 septembre 2003.
50 Il s’ensuit que, en l’espèce, l’AIT ne peut, en tout état de cause, se prévaloir d’une violation de son droit à une protection juridictionnelle effective.
51 Il résulte des considérations qui précèdent qu’il y a également lieu d’écarter le troisième moyen comme étant non fondé et, partant, de rejeter les conclusions tendant à l’annulation de l’ordonnance attaquée.
52 Les autres conclusions du pourvoi ayant été présentées dans l’hypothèse où la Cour annulerait l’ordonnance attaquée, il y a lieu de rejeter le pourvoi dans son ensemble.
Sur les dépens
53 En vertu de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure rendu applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 118 de ce règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de l’AIT et celui-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de le condamner aux dépens.
Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) déclare et arrête:
1) Le pourvoi est rejeté.
2) L’Asian Institute of Technology (AIT) est condamné aux dépens.
Signatures
* Langue de procédure: le français.