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Document 62002TO0397

    Ordonnance du Tribunal de première instance (troisième chambre) du 13 décembre 2005.
    Arla Foods AMBA et autres contre Commission des Communautés européennes.
    Règlement (CE) nº 1829/2002 - Enregistrement d'une appellation d'origine - 'feta' - Recours en annulation - Qualité pour agir - Irrecevabilité.
    Affaire T-397/02.

    Recueil de jurisprudence 2005 II-05365

    ECLI identifier: ECLI:EU:T:2005:446

    Affaire T-397/02

    Arla Foods AMBA e.a.

    contre

    Commission des Communautés européennes

    « Règlement (CE) nº 1829/2002 — Enregistrement d’une appellation d’origine — ‘feta’ — Recours en annulation — Qualité pour agir — Irrecevabilité »

    Ordonnance du Tribunal (troisième chambre) du 13 décembre 2005 

    Sommaire de l’ordonnance

    Recours en annulation — Personnes physiques ou morales — Actes les concernant directement et individuellement — Règlement relatif à l’enregistrement des indications géographiques et des appellations d’origine — Recours d’entreprises produisant le fromage « Feta » dans un État membre autre que celui d’origine de ce fromage — Réglementation du premier État visant l’usage de la dénomination — Entreprises produisant une part importante du fromage « feta » dans l’Union européenne — Absence d’incidence — Irrecevabilité du recours

    (Art. 230, al. 4, CE ; règlement du Conseil nº 2081/1992 ; règlement de la Commission nº 1829/2002)

    Est irrecevable le recours en annulation dirigé par des producteurs danois de fromage feta contre le règlement nº 1829/2002, modifiant l’annexe du règlement nº 1107/96 relatif à l’enregistrement des indications géographiques et des appellations d’origine au titre de la procédure prévue à l’article 17 du règlement nº 2081/92, en ce qu’il porte enregistrement de la dénomination « feta » en tant qu’appellation protégée sous les rubriques « Fromages » et « Grèce ».

    En effet, le règlement attaqué constitue une mesure de portée générale au sens de l’article 249, deuxième alinéa, CE. Il s’applique à des situations déterminées objectivement et produit ses effets juridiques à l’égard de catégories de personnes envisagées de manière abstraite.

    En outre, les requérants ne sont concernés par ledit règlement qu’en leur qualité d’opérateurs économiques fabriquant ou commercialisant du fromage, et notamment ceux ayant également commercialisé leurs produits en tant que « feta » ou « dansk Feta », ne remplissant pas les conditions d’utilisation de l’appellation d’origine protégée « feta » et sont donc affectés de la même manière que toutes les autres entreprises dont les produits ne sont pas davantage conformes aux exigences des dispositions communautaires en cause.

    À cet égard, les requérants ne sauraient se prévaloir de la réglementation danoise, qui exige que la feta produite dans cet État soit revêtue d’étiquettes indiquant clairement « feta danoise », pour prétendre qu’ils se trouvent dans une situation spécifique justifiant qu’ils se voient reconnaître un droit de recours contre le règlement attaqué à la différence de tous les autres producteurs de feta dans la Communauté. En effet, d’une part, cette réglementation ne leur confère aucun droit spécifique. D’autre part, à supposer même que les requérants possèdent un droit particulier reconnu par le droit national, ils ne seraient pas individuellement concernés dès lors que la dénomination « dansk Feta » ne constitue pas une appellation d’origine ou indication géographique protégée conformément au règlement nº 2081/92. Or, à la différence de la situation prévalant en matière de marques, où il y a coexistence d’un système de protection organisé au niveau national et communautaire, lesdites appellations d’origine ou indications géographiques ne peuvent bénéficier d’une protection dans tout État membre que dans la mesure où elles sont enregistrées au niveau communautaire conformément au règlement de base.

    En outre, à supposer même que ladite législation nationale puisse être considérée comme instituant un label de qualité, cette seule circonstance ne saurait suffire à individualiser les requérants par rapport à tout producteur de feta répondant aux obligations posées par la législation en cause.

    Enfin, la situation des requérants ne saurait non plus être individualisée du fait qu’ils produisent une part importante du fromage feta dans l’Union européenne, puisque le fait qu’une entreprise détienne une grande part du marché en cause ne suffit pas, en soi, à la caractériser par rapport à tout autre opérateur économique concerné par le règlement attaqué. De même, le fait qu’un requérant se trouve, au moment de l’adoption d’un règlement portant enregistrement d’une appellation d’origine, dans une situation telle qu’il doit procéder à des adaptations de sa structure de production afin de remplir les conditions prévues par celui-ci ne suffit pas pour qu’il soit concerné individuellement d’une manière analogue à celle dont le destinataire d’un acte le serait.

    (cf. points 53, 55-56, 61, 63, 67, 69, 71, 76)




    ORDONNANCE DU TRIBUNAL (troisième chambre)

    13 décembre 2005 (*)

    « Règlement (CE) n° 1829/2002 – Enregistrement d’une appellation d’origine – ‘feta’ – Recours en annulation – Qualité pour agir – Irrecevabilité »

    Dans l’affaire T-397/02,

    Arla Foods AMBA, établie à Viby (Danemark),

    Løgismose A/S, établie à Broby (Danemark),

    Nordex Food A/S, établie à Dronninglund (Danemark),

    Sinai Landmejeri, établie à Broby,

    Andelsmejeriet Sædager, établie à Hobro (Danemark),

    Søvind Mejeri, établie à Horsens (Danemark),

    Steensgaard Herregårdsmejeri, établie à Millinge (Danemark),

    Mejeriet Grambogård I/S, établie à Tommerup (Danemark),

    Kirkeby Cheese Export, établie à Svendborg (Danemark),

    représentées par Me G. Lett, avocat,

    parties requérantes,

    soutenues par

    Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, représenté par Mme P. Ormond, en qualité d’agent, ayant élu domicile à Luxembourg,

    contre

    Commission des Communautés européennes, représentée par MM. H. Støvlbæk, J. Iglesias Buhigues et Mme A.‑M. Rouchaud-Joët, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

    partie défenderesse,

    soutenue par

    République hellénique, représentée par MM. V. Kontolaimos, I. Chalkias et Mme M. Tassopoulou, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

    et par

    Syndesmos Ellinikon Viomichanion Galaktokomikon Proïonton (SEV‑GAP), établie à Athènes (Grèce), représentée par M. N. Korogiannakis, avocat,

    parties intervenantes,

    ayant pour objet une demande d’annulation du règlement (CE) n° 1829/2002 de la Commission, du 14 octobre 2002, modifiant l’annexe du règlement (CE) n° 1107/96 en ce qui concerne la dénomination feta (JO L 277, p. 10),

    LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
    DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),

    composé de MM. M. Jaeger, président, J. Azizi et Mme E. Cremona, juges,

    greffier : M. E. Coulon,

    rend la présente

    Ordonnance

     Cadre juridique

    1       Le règlement (CEE) n° 2081/92 du Conseil, du 14 juillet 1992, relatif à la protection des indications géographiques et des appellations d’origine des produits agricoles et des denrées alimentaires (JO L 208, p. 1, ci‑après le « règlement de base »), établit, selon son article 1er, les règles relatives à la protection communautaire des appellations d’origine et des indications géographiques dont peuvent bénéficier certains produits agricoles et certaines denrées alimentaires.

    2       Selon l’article 2, paragraphe 2, sous a), du règlement de base, une « appellation d’origine » est « le nom d’une région, d’un lieu déterminé ou, dans des cas exceptionnels, d’un pays, qui sert à désigner un produit agricole ou une denrée alimentaire :

    –       originaire de cette région, de ce lieu déterminé ou de ce pays

    et

    –       dont la qualité ou les caractères sont dus essentiellement ou exclusivement au milieu géographique comprenant les facteurs naturels et humains, et dont la production, la transformation et l’élaboration ont lieu dans l’aire géographique délimitée ».

    3       L’article 2, paragraphe 3, du règlement de base prévoit :

    « Sont également considérées comme des appellations d’origine, certaines dénominations traditionnelles, géographiques ou non, désignant un produit agricole ou une denrée alimentaire originaire d’une région ou d’un lieu déterminé et qui remplit les conditions visées au paragraphe 2[, sous a),] deuxième tiret. »

    4       Aux termes de l’article 3 du règlement de base, les dénominations devenues génériques ne peuvent être enregistrées. Aux fins dudit règlement, on entend par « dénomination devenue générique » le nom d’un produit agricole ou d’une denrée alimentaire qui, bien que se rapportant au lieu ou à la région où ce produit agricole ou cette denrée alimentaire a été initialement produit ou commercialisé, est devenu le nom commun d’un produit agricole ou d’une denrée alimentaire.

    5       Pour déterminer si un nom est devenu générique, il est tenu compte de tous les facteurs, notamment :

    –       de la situation existant dans l’État membre où le nom a son origine et dans les zones de consommation ;

    –       de la situation existant dans d’autres États membres ;

    –       des législations nationales ou communautaires pertinentes.

    6       L’enregistrement comme appellation d’origine protégée de la dénomination d’un produit agricole ou d’une denrée alimentaire doit, à cet effet, remplir les conditions posées par le règlement de base et, en particulier, être conforme à un cahier des charges défini à l’article 4, paragraphe 1, dudit règlement. Cet enregistrement confère à ladite dénomination une protection communautaire.

    7       Les articles 5 à 7 du règlement de base établissent une procédure d’enregistrement d’une dénomination, dite « procédure normale », qui permet à tout groupement, défini comme une organisation de producteurs et/ou de transformateurs concernés par le même produit agricole ou par la même denrée alimentaire, ou sous certaines conditions, à toute personne physique ou morale d’introduire une demande d’enregistrement auprès de l’État membre dans lequel est située l’aire géographique concernée. L’État membre vérifie que la demande est justifiée et la transmet à la Commission. Celle-ci, si elle estime que la dénomination réunit les conditions pour être protégée, publie au Journal officiel des Communautés européennes les informations spécifiques qui sont détaillées à l’article 6, paragraphe 2, du règlement de base.

    8       L’article 7 du règlement de base, dispose :

    « 1. Dans un délai de six mois à compter de la date de publication au Journal officiel des Communautés européennes, prévue à l’article 6, paragraphe 2, tout État membre peut se déclarer opposé à l’enregistrement.

    2. Les autorités compétentes des États membres veillent à ce que toute personne pouvant justifier d’un intérêt économique légitime soit autorisée à consulter la demande. En outre, conformément à la situation existant dans les États membres, ceux-ci peuvent prévoir que d’autres parties ayant un intérêt légitime peuvent y avoir accès.

    3. Toute personne physique ou morale légitimement concernée peut s’opposer à l’enregistrement envisagé par l’envoi d’une déclaration dûment motivée à l’autorité compétente de l’État membre dans lequel elle réside ou est établie. L’autorité compétente adopte les mesures nécessaires pour prendre en considération ces remarques ou cette opposition dans les délais requis.

    […] »

    9       Si aucun État membre ne notifie à la Commission de déclaration d’opposition à l’enregistrement prévu, la dénomination est inscrite dans un registre tenu par la Commission, intitulé « Registre des appellations d’origine protégées et des indications géographiques protégées ».

    10     Si les États membres intéressés ne parviennent pas, en cas d’opposition recevable, à trouver un accord entre eux, conformément à l’article 7, paragraphe 5, du règlement de base, la Commission arrête une décision en application de la procédure de l’article 15 de ce même règlement (procédure du comité de réglementation). L’article 7, paragraphe 5, sous b), du règlement de base dispose que la Commission tient compte, aux fins de sa décision, « des usages loyalement et traditionnellement pratiqués et des risques effectifs de confusion ».

    11     L’article 17 du règlement de base instaure une procédure d’enregistrement, dite « procédure simplifiée », qui diffère de la procédure normale. Selon cette procédure, les États membres communiquent à la Commission quelles sont, parmi leurs dénominations légalement protégées ou consacrées par l’usage, celles qu’ils désirent faire enregistrer en vertu du règlement de base. La procédure visée à l’article 15 du règlement de base s’applique mutatis mutandis. L’article 17, paragraphe 2, deuxième phrase, de ce règlement précise que la procédure d’opposition prévue à l’article 7 n’est pas applicable dans le cadre de la procédure simplifiée.

     Faits à l’origine du litige

    12     Par lettre du 21 janvier 1994, le gouvernement hellénique a demandé à la Commission l’enregistrement de la dénomination « feta » en tant qu’appellation d’origine protégée, conformément à l’article 17 du règlement de base.

    13     Le 19 janvier 1996, la Commission a présenté au comité de réglementation institué par l’article 15 du règlement de base une proposition de règlement comportant une liste des dénominations susceptibles d’être enregistrées comme indications géographiques ou appellations d’origine protégées, conformément à l’article 17 du règlement de base. Dans cette liste figurait le terme « feta ». Le comité de réglementation ne s’étant pas prononcé sur cette proposition dans le délai qui lui était imparti, la Commission l’a soumise au Conseil, conformément à l’article 15, quatrième alinéa, du règlement de base, le 6 mars 1996. Le Conseil n’a pas statué dans le délai de trois mois prévu à l’article 15, cinquième alinéa, du règlement de base.

    14     En conséquence, conformément à l’article 15, cinquième alinéa, du règlement de base, la Commission a arrêté, le 12 juin 1996, le règlement (CE) n° 1107/96 relatif à l’enregistrement des indications géographiques et des appellations d’origine au titre de la procédure prévue à l’article 17 du règlement [de base] (JO L 148, p. 1). Conformément à l’article 1er du règlement n° 1107/96, la dénomination « feta », figurant à l’annexe dudit règlement, dans la partie A, sous la rubrique « Fromages » et sous le nom de pays « Grèce », a été enregistrée comme appellation d’origine protégée.

    15     Par arrêt du 16 mars 1999, Danemark e.a./Commission (C‑289/96, C‑293/96 et C‑299/96, Rec. p. I‑1541), la Cour a annulé le règlement n° 1107/96 pour autant qu’il procède à l’enregistrement de la dénomination « feta » en tant qu’appellation d’origine protégée. La Cour a retenu dans son arrêt que la Commission, lorsqu’elle avait examiné la question de savoir si « feta » constituait une dénomination générique, n’avait pas dûment tenu compte de l’ensemble des facteurs que l’article 3, paragraphe l, troisième alinéa, du règlement de base l’obligeait à prendre en considération.

    16     À la suite de cet arrêt, la Commission a adopté, le 25 mai 1999, le règlement (CE) n° 1070/1999 modifiant l’annexe du règlement n° 1107/96 (JO L 130, p. 18) supprimant la dénomination « feta » du registre des appellations d’origine protégées et des indications géographiques protégées ainsi que de l’annexe du règlement n° 1107/96.

    17     Après avoir postérieurement réexaminé la demande d’enregistrement du gouvernement hellénique, la Commission a soumis un projet de règlement au comité de réglementation, conformément à l’article 15, deuxième alinéa, du règlement de base, proposant d’enregistrer la dénomination « feta » sur le fondement de l’article 17 du règlement de base, en tant qu’appellation d’origine protégée, au registre des appellations d’origine protégées et des indications géographiques protégées. Le comité n’ayant pas pris position sur ce projet dans le délai qui lui était imparti, la Commission l’a soumis au Conseil, conformément à l’article 15, quatrième alinéa, du règlement de base.

    18     Le Conseil n’ayant pas statué sur le projet dans le délai prévu à l’article 15, cinquième alinéa, du règlement de base, la Commission a arrêté, le 14 octobre 2002, le règlement (CE) n° 1829/2002 modifiant l’annexe du règlement n° 1107/96 en ce qui concerne la dénomination « feta » (JO L 277, p. 10, ci-après le « règlement attaqué »). En vertu de ce règlement, la dénomination « feta » a de nouveau été enregistrée en tant qu’appellation protégée et elle a été ajoutée à l’annexe du règlement n° 1107/96, dans la partie A, sous les rubriques « Fromages » et « Grèce ».

     Procédure

    19     Par requête déposée au greffe du Tribunal le 19 décembre 2002, les requérantes ont introduit le présent recours.

    20     Par lettre du 5 février 2003, la Commission a demandé la suspension de l’affaire jusqu’au prononcé de l’arrêt dans les affaires C-465/02 et C‑466/02.

    21     Par lettre du 26 février 2003, les requérantes ont fait savoir qu’elles s’opposaient à la demande de suspension.

    22     Par décision du 19 mars 2003, le Tribunal a rejeté la demande de suspension.

    23     Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 5 juin 2003, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 114 du règlement de procédure du Tribunal.

    24     Le 20 août 2003, les requérantes ont déposé leurs observations écrites sur cette exception.

    25     Par actes déposés au greffe du Tribunal respectivement les 16 avril et 9 mai 2003, la République hellénique et Syndesmos Ellinikon Viomichanion Galaktokomikon Proïonton (SEV-GAP) (Association des industries grecques de produits laitiers) ont demandé à intervenir au soutien des conclusions de la Commission.

    26     Par acte déposé au greffe du Tribunal le 2 mai 2003, le Royaume-Uni de Grande‑Bretagne et d’Irlande du Nord a demandé à intervenir au soutien des conclusions des requérantes.

    27     Par ordonnance du 8 septembre 2003, la République hellénique et le Royaume-Uni de Grande‑Bretagne et d’Irlande du Nord ont été admis à intervenir.

    28     Le 21 octobre 2003, la République hellénique a déposé son mémoire en intervention au soutien des conclusions de la Commission.

    29     Par ordonnance du 23 mars 2004, SEV-GAP a été admise à intervenir.

    30     Le 10 mai 2004, SEV-GAP a déposé son mémoire en intervention au soutien des conclusions de la Commission.

    31     Le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord n’a pas déposé de mémoire en intervention dans le délai prévu.

     Conclusions des parties

    32     Dans leur requête, les parties requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

    –       annuler le règlement attaqué ;

    –       condamner la Commission aux dépens.

    33     Dans son exception d’irrecevabilité, la Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

    –       rejeter le recours comme irrecevable ;

    –       condamner les requérantes aux dépens.

    34     Dans leurs observations sur l’exception d’irrecevabilité, les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal  rejeter l’exception d’irrecevabilité.

    35     Dans leurs mémoires en intervention, la République hellénique et SEV-GAP concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

    –       rejeter le recours comme irrecevable ;

    –       condamner les parties requérantes aux dépens.

     En droit

    36     Par le présent recours, les requérantes demandent l’annulation du règlement attaqué.

    37     La Commission ainsi que la République hellénique et SEV-GAP intervenues à son soutien estiment que le recours est irrecevable au motif que les requérantes n’ont pas qualité pour agir au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE. La République hellénique soutient, en outre, que le recours a été introduit tardivement.

    38     En vertu de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure, si une partie le demande, le Tribunal peut statuer sur l’irrecevabilité sans engager le débat au fond. Conformément au paragraphe 3 du même article, la suite de la procédure est orale, sauf décision contraire du Tribunal. En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par l’examen des pièces du dossier pour statuer sur l’exception soulevée par la Commission sans ouvrir la procédure orale.

     Sur la fin de non-recevoir, soulevée par la République hellénique, tirée du caractère tardif du recours

    39     La République hellénique soutient que le recours est irrecevable au motif qu’il a été introduit hors délai. Le règlement attaqué ayant été publié le 15 octobre 2002 et le recours n’ayant été introduit que le 19 décembre 2002, le délai de deux mois prévu à l’article 230, cinquième alinéa, CE, n’aurait pas été respecté.

    40     Force est de constater que cette fin de non-recevoir est manifestement non fondée. En effet, le délai de recours ne commence à courir, conformément à l’article 102, paragraphe 1, du règlement de procédure, qu’à la fin du quatorzième jour suivant la publication de l’acte en cause. À cela s’ajoute le délai de distance prévu à l’article 102, paragraphe 2, du règlement de procédure, soit dix jours supplémentaires. Partant, le présent recours a été introduit dans les délais.

     Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité pour agir des requérantes

     Arguments des parties

    41     La Commission, la République hellénique et SEV-GAP soutiennent que le recours vise un règlement ayant une portée générale, au sens de l’article 249, deuxième alinéa, CE, et que les requérantes ne sont pas individuellement concernées par le règlement attaqué.

    42     Les requérantes estiment que le recours est recevable. Elles font valoir que le fait que le règlement attaqué se présente sous la forme d’un règlement de portée générale n’exclut pas qu’elles soient individuellement et directement concernées par celui-ci. Elles présentent, à cet égard, cinq arguments.

    43     Premièrement, les requérantes soutiennent qu’elles sont individuellement concernées dans la mesure où elles possèdent un droit particulier à utiliser la dénomination « feta » ou « dansk Feta ». Elles estiment ainsi que le règlement attaqué porte atteinte, d’une part, à leur droit historiquement établi d’utiliser la dénomination « feta » et, d’autre part, à leur droit, en tant que producteur danois, d’utiliser la dénomination légalement protégée « dansk Feta », dans la mesure où ce règlement confère aux producteurs grecs le droit exclusif d’utiliser la dénomination « feta ». Elles font valoir qu’elles produisent du fromage feta sous l’appellation « dansk Feta » conformément à la législation danoise qui réserve le droit d’utiliser cette dénomination aux producteurs danois de feta. Elles avancent, en outre, que l’appellation « dansk Feta » aurait le caractère d’un « label de qualité » permettant d’indiquer qu’un produit satisfait à certains critères, déterminés par la loi, concernant l’origine, la composition, la méthode de production ou la qualité du produit.

    44     À l’appui de leur argumentation, les requérantes se réfèrent à l’arrêt de la Cour du 18 mai 1994, Codorníu/Conseil (C‑309/89, Rec. p. I‑1853), ainsi qu’aux ordonnances du Tribunal du 26 mars 1999, Biscuiterie-confiserie LOR et Confiserie du Tech/Commission (T‑114/96, Rec. p. II‑913), et du 30 janvier 2001, La Conqueste/Commission (T‑215/00, Rec. p. II‑181).

    45     À cet égard, elles prétendent bénéficier, au sens de cette jurisprudence, d’un droit spécifique similaire acquis à l’échelon national, dans la mesure où elles ont eu, au Danemark, le droit protégé d’utiliser la dénomination « dansk Feta », qui conférerait une protection analogue à celle accordée par le règlement n° 2081/92. Ce droit, utilisé de manière systématique, serait, selon les requérantes, particulier aux producteurs danois à qui l’enregistrement de la dénomination « feta » porterait préjudice en les empêchant d’utiliser une dénomination largement acceptée parmi les consommateurs.

    46     Deuxièmement, les requérantes estiment que leur situation serait individualisée dans la mesure où elles représentent la plus importante production de fromage feta dans l’Union européenne. Arla Foods AMBA serait ainsi le plus grand producteur individuel de fromage feta dans la Communauté, avec une production de 15 609 tonnes en 2001. En outre, la production totale des requérantes aurait représenté en moyenne, pour la période 1988-1995, 39 % de la production totale de fromage feta dans l’Union européenne et 13 % pour l’année 2001.

    47     Troisièmement, les requérantes soutiennent que leur situation serait individualisée du fait des conséquences, du point de vue de la concurrence, de l’enregistrement de la dénomination « feta » au seul bénéfice des producteurs grecs. Elles affirment, à cet égard, que, à la suite de cet enregistrement en tant qu’appellation d’origine grecque, leur position sur le marché sera affectée, et ce d’autant plus que les producteurs grecs, qui seuls ont le droit d’utiliser la dénomination « feta », sont les plus grands concurrents des requérantes sur le marché européen.

    48     Quatrièmement, les requérantes estiment que, lorsque la Commission a l’obligation de tenir compte des conséquences, pour certains particuliers, de l’acte qu’elle envisage d’adopter, ces particuliers peuvent être individualisés. Elles considèrent, en l’espèce, que la Commission se trouve dans une telle situation, notamment au regard de l’article 3 du règlement de base, duquel il ressortirait que la Commission aurait l’obligation de tenir compte des produits existant et légalement commercialisés dans d’autres États membres aux fins d’une opposition à l’enregistrement d’une appellation d’origine. Elles invoquent à l’appui de leur argumentation l’arrêt du Tribunal du 3 mai 2002, Jégo-Quéré/Commission (T‑177/01, Rec. p. II‑2365).

    49     Cinquièmement, les requérantes font valoir qu’elles sont individuellement concernées eu égard au principe de la protection juridictionnelle effective. Elles affirment qu’elles n’ont pu obtenir une réponse à une question préjudicielle adressée à la Cour dans l’affaire Canadane Cheese Trading AMBA (C-317/95, Rec. p. I-4681), en raison de son retrait par la juridiction de renvoi. Elles soutiennent, en outre, que, pendant la période transitoire, elles ne peuvent agir devant les juridictions nationales, car ce n’est qu’à l’expiration de cette période transitoire que la commercialisation de fromage sous l’appellation « dansk Feta » engendrerait pour elles des conséquences juridiques. Elles soutiennent, enfin, que la notion d’intérêt individuel doit être appliquée de façon identique aux producteurs grecs et danois. Considérant que si la demande grecque d’enregistrement de la dénomination « feta » avait été rejetée, les producteurs grecs auraient été recevables à contester cette décision, il devrait, en l’espèce, en être de même pour les requérantes au regard de la décision négative à leur égard.

     Appréciation du Tribunal

    50     L’article 230, quatrième alinéa, CE, dispose que toute personne, physique ou morale, peut former un recours contre les décisions qui, bien que prises sous l’apparence d’un règlement, la concernent directement et individuellement.

    51     Selon une jurisprudence constante, le critère de distinction entre un règlement et une décision doit être recherché dans la portée générale ou non de l’acte en question (ordonnances de la Cour du 23 novembre 1995, Asocarne/Conseil, C‑10/95 P, Rec. p. I‑4149, point 28, et du 24 avril 1996, CNPAAP/Conseil, C‑87/95 P, Rec. p. I‑2003, point 33). Un acte a une portée générale s’il s’applique à des situations déterminées objectivement et s’il produit ses effets juridiques à l’égard de catégories de personnes envisagées de manière abstraite (voir arrêt du Tribunal du 10 juillet 1996, Weber/Commission, T‑482/93, Rec. p. II‑609, point 55, et la jurisprudence citée).

    52     En l’espèce, le règlement attaqué assure à la dénomination « feta » la protection des appellations d’origine prévue par le règlement de base. Cette protection consiste dans le fait de réserver l’utilisation de la dénomination « feta » aux fabricants originaires de l’aire géographique décrite, dont les produits respectent les exigences géographiques et qualitatives imposées à la fabrication de feta dans le cahier des charges. Le règlement attaqué reconnaît à toutes les entreprises dont les produits satisfont aux exigences géographiques et qualitatives prescrites le droit de les commercialiser sous la dénomination susvisée et refuse ce droit à toutes celles dont les produits ne remplissent pas ces conditions, lesquelles sont identiques pour toutes les entreprises. Le règlement attaqué s’applique aussi bien à tous les fabricants – présents et à venir –de feta légalement autorisés à employer cette dénomination qu’à tous ceux qui auront l’interdiction de l’utiliser au terme de la période transitoire. Il ne vise pas uniquement les producteurs des États membres, mais produit également ses effets juridiques à l’égard d’un nombre inconnu de fabricants de pays tiers souhaitant importer du fromage feta dans la Communauté, aujourd’hui ou à l’avenir (ordonnance du Tribunal du 6 juillet 2004, Alpenhain-Camembert-Werk e.a./Commission, T‑370/02, non encore publiée au Recueil, point 54).

    53     Dès lors, le règlement attaqué constitue une mesure de portée générale au sens de l’article 249, deuxième alinéa, CE. Il s’applique à des situations déterminées objectivement et produit ses effets juridiques à l’égard de catégories de personnes envisagées de manière abstraite (ordonnance Alpenhain-Camembert-Werk e.a./Commission, point 52 supra, point 55). Cette portée générale résulte au demeurant de l’objet de la réglementation en cause, à savoir protéger, erga omnes et dans l’ensemble de la Communauté européenne, des indications géographiques et des appellations d’origine valablement enregistrées.

    54     Toutefois, il n’est pas exclu qu’une disposition qui a, par sa nature et sa portée, un caractère d’acte de portée générale puisse concerner individuellement une personne physique ou morale. Tel est le cas, lorsque l’acte en cause atteint celle-ci en raison de certaines qualités qui lui sont particulières ou d’une situation de fait qui la caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, l’individualise d’une manière analogue à celle dont le destinataire d’une décision le serait (arrêts de la Cour du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission, 25/62, Rec. p. 197, 223, et Codorníu/Conseil, point 44 supra, points 19 et 20 ; ordonnance Alpenhain-Camembert-Werk e.a./Commission, point 52 supra, point 56).

    55     En l’espèce, aucun argument avancé par les requérantes ne permet de déceler la moindre qualité qui leur serait particulière ou une situation de fait qui les caractériserait et, de ce fait, les individualiserait par rapport aux autres opérateurs économiques concernés. Au contraire, les entreprises requérantes ne sont concernées par le règlement attaqué qu’en leur qualité d’opérateurs économiques fabriquant ou commercialisant du fromage ne remplissant pas les conditions d’utilisation de l’appellation d’origine protégée « feta ». Les requérantes sont donc affectées de la même manière que toutes les autres entreprises dont les produits ne sont pas davantage conformes aux exigences des dispositions communautaires en cause.

    56     S’agissant, en premier lieu, de l’argument selon lequel les requérantes seraient individuellement concernées dans la mesure où elles possèdent un droit particulier à utiliser la dénomination « feta » ou « dansk Feta », il convient de noter, tout d’abord, qu’il est constant que cette prétendue dénomination « dansk Feta » ne constitue pas une appellation d’origine ou indication géographique protégée conformément au règlement de base. Or, à la différence de la situation prévalant en matière de marques, où il y a coexistence d’un système de protection organisé au niveau national et communautaire, lesdites appellations d’origine ou indications géographiques ne peuvent bénéficier d’une protection dans tout État membre que dans la mesure où elles sont enregistrées au niveau communautaire conformément au règlement de base. Il y a lieu d’observer, en outre, que les requérantes n’ont pas non plus allégué que le Royaume de Danemark aurait communiqué à la Commission, au titre de l’article 17 du règlement de base, la dénomination « dansk Feta » comme étant une dénomination légalement protégée au Danemark. Il s’ensuit que la réglementation danoise ne saurait conférer aux requérantes un droit spécifique analogue au droit de marque détenu par la requérante dans l’affaire Codorníu/Conseil, point 44 supra.

    57     Force est de considérer, ensuite, que les requérantes ne démontrent pas que l’usage de la dénomination « feta » ou « dansk Feta » dont elles se prévalent résulte d’un droit spécifique analogue, qu’elles auraient acquis à l’échelon national ou communautaire avant l’adoption du règlement attaqué et auquel celui-ci aurait porté atteinte, au sens de l’arrêt Codorníu/Conseil et de l’ordonnance La Conqueste/Commission, point 4446 supra.

    58     Le fait que les requérantes commercialisent, depuis longtemps, leurs produits sous la dénomination « feta » ou « dansk Feta » ne leur confère pas un droit spécifique au sens de la jurisprudence précitée. La situation des requérantes ne se distingue pas, de ce fait, de celle des autres producteurs ayant également commercialisé leurs produits en tant que « feta » ou « dansk Feta » et qui ne sont plus autorisés à employer cette dénomination désormais protégée par son enregistrement en tant qu’appellation d’origine (voir, en ce sens, ordonnance Alpenhain-Camembert-Werk e.a./Commission, point 52 supra, point 66).

    59     L’existence de la législation danoise relative à la dénomination « dansk Feta » ne saurait remettre en cause cette conclusion.

    60     D’une part, cette réglementation n’est pas de nature à individualiser la situation des requérantes dès lors qu’elle s’applique à tous les opérateurs produisant des fromages répondant aux critères déterminés par la législation danoise.

    61     D’autre part, cette réglementation ne confère aucun droit spécifique aux requérantes. En effet, ainsi qu’il ressort du dossier et, de l’arrêt Danemark e.a./Commission, point 15 supra (point 63), aux termes duquel, « selon le gouvernement danois, depuis 1963, il existerait dans cet État des normes exigeant que la feta y produite soit revêtue d’étiquettes indiquant clairement ‘feta danoise’ », la réglementation danoise, invoquée par les requérantes, se borne à imposer une obligation d’indication de l’origine du fromage en cause.

    62     La réglementation en cause ne constitue donc pas une mesure conférant un droit spécifique aux requérantes mais, au contraire, leur impose l’obligation d’adjoindre sur leur produit la précision « dansk » pour être autorisées à produire et à commercialiser au Danemark du fromage feta.

    63     Les requérantes ne sauraient, dès lors, se prévaloir de la réglementation danoise pour prétendre qu’elles se trouvent dans une situation spécifique justifiant qu’elles se voient reconnaître un droit de recours contre le règlement attaqué à la différence de tous les autres producteurs de feta dans la Communauté, notamment en France ou en Allemagne, lesquels pouvaient librement produire et commercialiser du fromage feta sans être tenus pour ce faire d’ajouter une mention précisant l’origine géographique de leur produit.

    64     Les requérantes soutiennent également que la réglementation danoise doit être considérée comme instaurant un label de qualité.

    65     Il y a lieu d’observer, à cet égard, d’abord, que, ainsi qu’il ressort du dossier, cette réglementation danoise n’a pas été adoptée pour protéger ou mettre en valeur d’éventuelles qualités particulières dont serait pourvue la feta danoise, mais répond à la nécessité d’assurer une information honnête et correcte du consommateur en évitant le risque de confusion avec la feta grecque. La réglementation danoise prévoit d’ailleurs également l’adjonction de l’adjectif « danois » pour toute une série d’autres fromages produits au Danemark et qui trouvent leur origine historique dans d’autres États membres ou pays tiers (grana, munster, gouda, etc.).

    66     Force est de constater, ensuite, que les requérantes n’ont ni exposé les motifs de nature à établir que ladite législation puisse être considérée comme instaurant un label de qualité, ni été en mesure de justifier de la compatibilité d’un tel label de qualité avec les articles 28 CE et 30 CE. Il ressort en effet de la jurisprudence que le droit à une dénomination de qualité ne saurait – sauf les règles applicables en matière d’appellations d’origine et d’indications de provenance – dépendre que des caractéristiques objectives intrinsèques dont résulte la qualité du produit par rapport au même produit de qualité inférieure, mais non de la localisation géographique de tel ou tel stade de sa production et que ces dénominations de qualité ne doivent pas être liées à une localisation nationale du processus de production des produits en cause, mais uniquement à la présence des caractéristiques objectives intrinsèques qui donnent aux produits la qualité légalement exigée (voir, en sens, arrêts de la Cour du 12 octobre 1978, Eggers, 13/78, Rec. p. 1935, points 24 et 25 ; du 5 novembre 2002, Commission/Allemagne, C‑325/00, Rec. p. I‑9977, et du 6 mars 2003, Commission/France, C‑6/02, Rec. p. I‑2389).

    67     En tout état de cause, à supposer même que ladite législation danoise puisse être considérée comme instituant un label de qualité, cette seule circonstance ne saurait suffire à individualiser les requérantes par rapport à tout producteur de feta répondant aux obligations posées par la législation danoise.

    68     Il convient, par ailleurs, de préciser que l’absence de droit spécifique conféré aux requérantes est confirmée par le fait que leur situation est explicitement régie de manière abstraite et générale par l’article 13, paragraphe 2, du règlement de base, lequel prévoit une période transitoire assurant à tous les fabricants sans distinction, dans le respect de certaines conditions, une période d’adaptation suffisamment longue pour éviter tout préjudice (voir, en ce sens, ordonnance Alpenhain-Camembert-Werk e.a./Commission, point 52 54supra, point 66). Le fait que les requérantes soient concernées par ce régime transitoire ne saurait donc suffire à les individualiser.

    69     S’agissant, en deuxième lieu, de l’affirmation selon laquelle la situation des requérantes serait individualisée dans la mesure où elles produisent une part importante du fromage feta dans l’Union européenne, il suffit de rappeler que le fait qu’une entreprise détienne une grande part du marché en cause ne suffit pas, en soi, à la caractériser par rapport à tout autre opérateur économique concerné par le règlement attaqué (ordonnances du Tribunal du 9 novembre 1999, CSR Pampryl/Commission, T‑114/99, Rec. p. II‑3331, point 46, et Alpenhain-Camembert-Werk e.a./Commission, point 52 supra, point 58).

    70     S’agissant, en troisième lieu, de l’argument relatif à la prise en compte, aux fins de l’individualisation de la situation des requérantes, des conséquences, du point de vue de la concurrence, de l’enregistrement de la dénomination « feta » au bénéfice des producteurs grecs, il y a lieu de rappeler que, en tout état de cause, le fait qu’un acte de portée générale puisse avoir des effets concrets différents pour les divers sujets de droit auxquels il s’applique n’est pas de nature à les caractériser par rapport à tous les autres opérateurs concernés, dès lors que, comme en l’espèce, l’application de cet acte s’effectue en vertu d’une situation objectivement déterminée (arrêt du Tribunal du 22 février 2000, ACAV e.a./Conseil, T‑138/98, Rec. p. II‑341, point 66, et ordonnance La Conqueste/Commission, point 44 supra, point 37).

    71     Par ailleurs, la Cour a expressément confirmé que le fait qu’une requérante se trouve, au moment de l’adoption d’un règlement portant enregistrement d’une appellation d’origine, dans une situation telle qu’elle doit procéder à des adaptations de sa structure de production afin de remplir les conditions prévues par celui-ci ne suffit pas pour qu’elle soit concernée individuellement d’une manière analogue à celle dont le destinataire d’un acte le serait (ordonnance La Conqueste/Commission, point 44 supra, point 35).

    72     S’agissant, en quatrième lieu, de l’argumentation des requérantes relative à la prétendue obligation pour la Commission de tenir compte de la situation des requérantes lors de l’adoption du règlement, il ne saurait être déduit de la seule constatation que la Commission a l’obligation de se renseigner sur les répercussions négatives que l’acte en cause risque d’avoir sur certaines entreprises que celles-ci sont individuellement concernées au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 10 avril 2003, Commission/Nederlandse Antillen, C‑142/00 P, Rec. p. I‑3483, points 75).

    73     S’agissant, en cinquième et dernier lieu, de l’argument des requérantes tiré de l’exigence d’une protection juridictionnelle effective, il convient de noter, tout d’abord, qu’un recours direct en annulation devant le juge communautaire ne saurait être ouvert même s’il pouvait être démontré, après un examen concret par ce dernier des règles procédurales nationales, que celles-ci n’autorisent pas le particulier à introduire un recours lui permettant de mettre en cause la validité de l’acte communautaire contesté (ordonnance de la Cour du 12 décembre 2003, Bactria/Commission, C‑258/02 P, Rec. p. I‑15105, point 58).

    74     En outre, la Cour a clairement établi, s’agissant de la condition de l’intérêt individuel exigée par l’article 230, quatrième alinéa, CE, que, s’il est vrai que cette dernière doit être interprétée à la lumière du principe d’une protection juridictionnelle effective en tenant compte des diverses circonstances qui sont de nature à individualiser un requérant, une telle interprétation ne saurait aboutir à écarter la condition en cause, qui est expressément prévue par le traité, sans excéder les compétences attribuées par celui-ci aux juridictions communautaires. Il s’ensuit que, à défaut de remplir cette condition, aucune personne physique ou morale n’est, en tout état de cause, recevable à introduire un recours en annulation contre un règlement (arrêts de la Cour du 25 juillet 2002, Unión de Pequeños Agricultores/Conseil, C‑50/00 P, Rec. p. I‑6677, points 36, 37 et 39, et du 1er avril 2004, Commission/Jégo-Quéré, C‑263/02 P, Rec. p. I‑3425, point 33).

    75     Il ressort de l’ensemble des considérations qui précèdent que les producteurs danois de fromage feta ne peuvent être considérés comme individuellement concernés par le règlement attaqué au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE.

    76     Il résulte de ce qui précède que le règlement attaqué constituant une mesure de portée générale et les requérantes n’étant pas atteintes en raison de certaines circonstances qui leur sont particulières ou d’une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et de ce fait les individualise, le recours est irrecevable.

     Sur les dépens

    77     Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, la partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Les requérantes ayant succombé, il y a lieu, au vu des conclusions de la Commission, de les condamner à supporter leurs propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission.

    78     Aux termes de l’article 87, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure, les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs dépens. En l’espèce, il y a lieu de condamner la République hellénique et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord à supporter leurs propres dépens.

    79     Aux termes de l’article 87, paragraphe 4, troisième alinéa, du règlement de procédure, les parties intervenantes autres que les États membres et les institutions peuvent être condamnées à supporter leurs propres dépens. En l’espèce, il y a lieu de décider que SEV-GAP supportera ses dépens.

    Par ces motifs,

    LE TRIBUNAL (troisième chambre)

    ordonne :

    1)      Le recours est rejeté comme irrecevable.

    2)      Les parties requérantes supporteront leurs propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission.

    3)      La République hellénique, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord et Syndesmos Ellinikon Viomichanion Galaktokomikon Proïonton (SEV-GAP) supporteront leurs propres dépens.

    Fait à Luxembourg, le 13 décembre 2005.



    Le greffier

     

           Le président

    E. Coulon

     

           M. Jaeger


    * Langue de procédure : le danois.

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