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Document 62002CJ0300

Arrêt de la Cour (première chambre) du 24 février 2005.
République hellénique contre Commission des Communautés européennes.
FEOGA - Cultures arables - Règlement (CEE) nº 729/70 - Article 5, paragraphe 2, sous c) - Discordances entre les déclarations annuelles des dépenses et les dépenses éligibles - Délai de 24 mois - Retenue du montant de l'aide aux agriculteurs.
Affaire C-300/02.

Recueil de jurisprudence 2005 I-01341

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2005:103

Arrêt de la Cour

Affaire C-300/02

République hellénique

contre

Commission des Communautés européennes

«FEOGA – Cultures arables – Règlement (CEE) nº 729/70 – Article 5, paragraphe 2, sous c) – Discordances entre les déclarations annuelles des dépenses et les dépenses éligibles – Délai de 24 mois – Retenue du montant de l’aide aux agriculteurs»

Arrêt de la Cour (première chambre) du 24 février 2005. 

Sommaire de l’arrêt

1.     Agriculture – FEOGA – Apurement des comptes – Refus de prise en charge de dépenses découlant d’irrégularités dans l’application de la réglementation communautaire – Contestation par l’État membre concerné – Charge de la preuve – Répartition entre la Commission et l’État membre

(Règlement du Conseil nº 729/70)

2.     Agriculture – FEOGA – Apurement des comptes – Règlement nº 729/70 – Limitation du refus de financement – Délai de vingt-quatre mois – Point de départ – Communication par la Commission des résultats des vérifications – Conditions

(Règlement du Conseil nº 729/70, art. 5, § 2, c); règlement de la Commission nº 1663/95, art. 8, § 1, al. 1)

3.     Agriculture – FEOGA – Apurement des comptes – Élaboration des décisions – Évaluation des dépenses à exclure du financement communautaire – Notion d’évaluation

(Règlement de la Commission nº 1663/95, art. 8, § 1)

4.     Agriculture – Politique agricole commune – Soutien aux producteurs de certaines cultures arables – Paiements visant à compenser les pertes de revenu résultant de la réforme de la politique agricole commune – Obligation de verser les montants en cause intégralement aux bénéficiaires – Retenues pratiquées par les associations de coopératives agricoles pour couvrir leurs frais de fonctionnement – Interdiction

(Règlement du Conseil nº 1765/92, art. 15, § 3)

En matière de financement de la politique agricole commune par le FEOGA, il appartient à la Commission, lorsqu’elle entend refuser la prise en charge d’une dépense déclarée par un État membre, de prouver l’existence d’une violation des règles de l’organisation commune des marchés agricoles. Par conséquent, la Commission est obligée de justifier sa décision constatant l’absence ou les défaillances des contrôles mis en oeuvre par l’État membre concerné. Toutefois, elle est tenue non pas de démontrer d’une façon exhaustive l’insuffisance des contrôles effectués par les administrations nationales ou l’irrégularité des chiffres transmis par celles-ci, mais de présenter un élément de preuve du doute sérieux et raisonnable qu’elle éprouve à l’égard de ces contrôles ou de ces chiffres. L’État membre concerné, pour sa part, ne saurait infirmer les constatations de la Commission sans étayer ses propres allégations par des éléments établissant l’existence d’un système fiable et opérationnel de contrôle. Dès lors qu’il ne parvient pas à démontrer que les constatations de la Commission sont inexactes, celles-ci constituent des éléments susceptibles de faire naître des doutes sérieux quant à la mise en place d’un ensemble adéquat et efficace de mesures de surveillance et de contrôle. Cet allégement de l’exigence de la preuve pour la Commission s’explique par le fait que c’est l’État membre qui est le mieux placé pour recueillir et vérifier les données nécessaires à l’apurement des comptes du FEOGA, et auquel il incombe, en conséquence, de présenter la preuve la plus détaillée et complète de la réalité de ses contrôles ou de ses chiffres et, le cas échéant, de l’inexactitude des affirmations de la Commission.

(cf. points 33-36)

L’article 5, paragraphe 2, sous c), cinquième alinéa, du règlement nº 729/70, relatif au financement de la politique agricole commune, tel que modifié par le règlement nº 1287/95, limite dans le temps les dépenses sur lesquelles peut porter un refus de financement par le FEOGA. Ainsi, ledit article prévoit qu’un refus de financement ne peut pas porter sur les dépenses effectuées antérieurement aux vingt-quatre mois ayant précédé la communication écrite par la Commission à l’État membre concerné des résultats des vérifications de la Commission. Le contenu de cette communication écrite est spécifié à l’article 8, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement nº 1663/95, établissant les modalités d’application du règlement nº 729/70 en ce qui concerne la procédure d’apurement des comptes du FEOGA, section «garantie». La Commission est tenue de respecter, dans les relations avec les États membres, les conditions qu’elle s’est imposées à elle-même par des règlements d’application. En effet, le non-respect de ces conditions peut, selon son importance, vider de sa substance la garantie procédurale accordée aux États membres par l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement nº 729/70.

(cf. points 67-68, 70)

Le terme «évaluation» des dépenses qui figure à l’article 8, paragraphe 1, du règlement nº 1663/95, établissant les modalités d’application du règlement nº 729/70 en ce qui concerne la procédure d’apurement des comptes du FEOGA, section «garantie», comme ses équivalents dans les différentes versions linguistiques, doit être interprété en ce sens qu’une indication chiffrée du montant des dépenses en cause n’est pas nécessaire et qu’il suffit que soient indiqués les éléments permettant de calculer ce montant au moins approximativement.

(cf. point 74)

L’article 15, paragraphe 3, du règlement nº 1765/92, instituant un régime de soutien aux producteurs de certaines cultures arables, qui prescrit que les paiements visés à ce règlement doivent être versés intégralement aux bénéficiaires, interdit que les autorités nationales opèrent une déduction sur les versements effectués ou qu’elles exigent le paiement de frais administratifs afférents aux demandes ayant pour effet de diminuer le montant des aides. Il en va de même pour les associations de coopératives agricoles intervenant dans le paiement des aides en cause.

L’obligation découlant de ladite disposition est une obligation de résultat, de sorte qu’il est sans importance que des plaintes aient été enregistrées ou que des accords entre les bénéficiaires et les coopératives aient été conclus concernant la retenue d’une partie de l’aide.

(cf. points 111-112)




ARRÊT DE LA COUR (première chambre)
24 février 2005(1)

«FEOGA – Cultures arables – Règlement (CEE) n° 729/70 – Article 5, paragraphe 2, sous c) – Discordances entre les déclarations annuelles des dépenses et les dépenses éligibles – Délai de 24 mois – Retenue du montant de l'aide aux agriculteurs»

Dans l'affaire C-300/02,

ayant pour objet un recours en annulation au titre de l'article 230 CE, introduit le 21 août 2002,

République hellénique, représentée par MM. I. Chalkias et G. Kanellopoulos, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

Commission des Communautés européennes, représentée par M me M. Condou-Durande, en qualité d'agent, assistée de M e N. Korogiannakis, dikigoros, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,



LA COUR (première chambre),,



composée de M. P. Jann, président de chambre, M. K. Lenaerts, M me N. Colneric (rapporteur), MM. E. Juhász et M. Ilešič, juges,

avocat général: M. P. Léger,
greffier: M me L. Hewlett, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du 16 septembre 2004,

vu la décision prise, l'avocat général entendu, de juger l'affaire sans conclusions,

rend le présent



Arrêt



1
Par sa requête, la République hellénique demande l’annulation de la décision 2002/524/CE de la Commission, du 26 juin 2002, écartant du financement communautaire certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), section «Garantie» [notifiée sous le numéro C(2002) 2281] (JO L 170 p. 77, ci-après la «décision attaquée»).

2
Par cette décision, la Commission a procédé dans le secteur des cultures arables à des «corrections forfaitaires pour insuffisances de contrôles clés» et a écarté du financement communautaire la somme de 103 513 610 euros pour les exercices financiers 1996 à 1999.

3
Les motifs spécifiques de ces corrections financières ont été résumés dans le rapport de synthèse AGRI 60720/2002-FR-Final, du 23 mai 2002, relatif aux résultats des contrôles dans l’apurement des comptes du FEOGA, section «Garantie», au titre de l’article 5, paragraphe 2, lettre c, du règlement (CEE) n°729/70 et l’article 7, paragraphe 4, du règlement (CE) n° 1258/1999 en ce qui concerne les fruits et légumes, les produits laitiers, les primes animales, les cultures arables, le développement rural et les délais de paiement (ci-après le «rapport de synthèse»).

4
Le présent recours vise trois types de corrections:

une correction de 49 385 195 euros en raison de discordances entre les dépenses déclarées et les surfaces éligibles aux aides communiquées, appliquée au titre des campagnes de commercialisation 1994, 1995, 1996 et 1998;

une correction forfaitaire de 5 % en raison de défaillances relatives à la mise en place du système intégré de gestion et de contrôle, appliquée au titre des campagnes de commercialisation 1998 et 1999, soit 44 591 189 euros;

une correction forfaitaire de 2 % en raison de retenues pratiquées par les associations de coopératives agricoles, appliquée au titre des campagnes de commercialisation 1998 et 1999, soit 18 200 485 euros.


Le cadre juridique

La réglementation générale

5
L’article 3, paragraphe 1, du règlement (CEE) n° 729/70 du Conseil, du 21 avril 1970, relatif au financement de la politique agricole commune (JO L 94, p. 13), tel que modifié par le règlement (CE) n° 1287/95 du Conseil, du 22 mai 1995 (JO L 125, p. 1, ci-après le «règlement n° 729/70»), dispose:

«Sont financées, au titre de l’article 1 er , paragraphe 2, sous b), les interventions destinées à la régularisation des marchés agricoles, entreprises selon les règles communautaires dans le cadre de l’organisation commune des marchés agricoles.»

6
L’article 5 du règlement n° 729/70 régit l’apurement des comptes annuels présentés par les agences nationales habilitées à effectuer des dépenses à cet effet.

7
Cet article 5, paragraphes 1 et 2, dispose:

«1.     Les États membres transmettent périodiquement à la Commission les informations suivantes, concernant les organismes payeurs agréés et les organismes de coordination visés à l’article 4, et afférentes aux opérations financées par la section ‘garantie’ du FEOGA:

a)
déclarations de dépenses et états prévisionnels des besoins financiers;

b)
comptes annuels, accompagnés des informations nécessaires à leur apurement ainsi que d’un certificat de l’intégralité, de l’exactitude et de la véracité des comptes transmis.

2.        La Commission, après consultation du comité du Fonds:

[...]

b)
apure avant le 30 avril de l’année suivant l’exercice en cause, sur la base des informations visées au paragraphe 1 point b), les comptes des organismes payeurs.

La décision d’apurement des comptes porte sur l’intégralité, l’exactitude et la véracité des comptes transmis.

Elle ne préjuge pas de la prise de décisions ultérieures selon le point c);

c)
décide des dépenses à écarter du financement communautaire visé aux articles 2 et 3, lorsqu’elle constate que des dépenses n’ont pas été effectuées conformément aux règles communautaires.

Préalablement à toute décision de refus de financement, les résultats des vérifications de la Commission ainsi que les réponses de l’État membre concerné font l’objet de communications écrites, à l’issue desquelles les deux parties tentent de parvenir à un accord sur les suites à y donner.

En cas d’absence d’accord, l’État membre peut demander l’ouverture d’une procédure visant à concilier leurs positions respectives dans un délai de quatre mois, et dont les résultats font l’objet d’un rapport communiqué à la Commission et examiné par celle-ci, avant une décision du refus de financement.

La Commission évalue les montants à écarter au vu notamment de l’importance de la non-conformité constatée. La Commission tient compte, à cet effet, de la nature et de la gravité de l’infraction, ainsi que du préjudice financier causé à la Communauté.

Un refus de financement ne peut pas porter sur les dépenses effectuées antérieurement aux vingt-quatre mois ayant précédé la communication écrite par la Commission à l’État membre concerné des résultats de ces vérifications. Toutefois, cette disposition ne s’applique pas aux conséquences financières à tirer:

des cas d’irrégularités aux sens de l’article 8, paragraphe 2,

suite à des aides nationales ou à des infractions pour lesquelles les procédures visées aux articles 93 et 169 du traité ont été engagées.»

8
L’article 8, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n° 729/70 dispose:

«Les États membres prennent, conformément aux dispositions législatives, réglementaires et administratives nationales, les mesures nécessaires pour:

s’assurer de la réalité et de la régularité des opérations financées par le Fonds,

prévenir et poursuivre les irrégularités,

récupérer les sommes perdues à la suite d’irrégularités ou de négligences.»

9
L’article 8, paragraphe 2, dudit règlement prévoit:

«À défaut de récupération totale, les conséquences financières des irrégularités ou des négligences sont supportées par la Communauté, sauf celles résultant d’irrégularités ou de négligences imputables aux administrations ou organismes des États membres.

Les sommes récupérées sont versées aux organismes payeurs agréés et portées par ceux-ci en diminution des dépenses financées par le Fonds. Les intérêts afférents aux sommes récupérées ou payées tardivement sont versés au Fonds.»

10
Aux termes de l’article 9, paragraphe 1, du même règlement:

«Les États membres mettent à la disposition de la Commission toutes les informations nécessaires au bon fonctionnement du Fonds et prennent toutes les mesures susceptibles de faciliter les contrôles que la Commission estimerait utile d’entreprendre dans le cadre de la gestion du financement communautaire, y compris des vérifications sur place.

Les États membres communiquent à la Commission les dispositions législatives, réglementaires et administratives qu’ils ont adoptées pour l’application des actes communautaires ayant trait à la politique agricole commune, pour autant que ces actes comportent une incidence financière pour le Fonds.»

11
La procédure de conciliation visée à l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70 est régie par la décision 94/442/CE de la Commission, du 1 er juillet 1994, relative à la création d’une procédure de conciliation dans le cadre de l’apurement des comptes du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), Section «garantie» (JO L 182, p. 45). Selon l’article 1 er , paragraphe 1, de cette décision, il est institué un organe de conciliation. Aux termes du paragraphe 2, sous a), de cet article, «la position prise par l’organe de conciliation ne préjuge pas la décision définitive de la Commission en matière d’apurement des comptes».

12
L’article 8, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1663/95 de la Commission, du 7 juillet 1995, établissant les modalités d’application du règlement n° 729/70 en ce qui concerne la procédure d’apurement des comptes du FEOGA, section «garantie» (JO L 158, p. 6), dispose:

«Si, à l’issue d’une enquête, la Commission considère que les dépenses n’ont pas été effectuées conformément aux règles communautaires, elle communique ses constatations à l’État membre concerné, et indique les mesures correctives à prendre pour garantir à l’avenir le respect des règles précitées, ainsi qu’une évaluation des dépenses qu’elle envisage d’exclure au titre de l’article 5 paragraphe 2 point c) du règlement (CEE) n° 729/70. La communication fait référence au présent règlement. L’État membre répond dans un délai de deux mois et la Commission peut modifier sa position en conséquence. Dans des cas justifiés, la Commission peut accorder une prorogation de ce délai.

Après l’expiration du délai accordé pour la réponse, la Commission convoque une discussion bilatérale et les deux parties essayent d’arriver à un accord sur les mesures à prendre. La Commission communique ensuite formellement ses conclusions à l’État membre en faisant référence à la décision 94/442/CE de la Commission.»

13
En vertu de l’article 8, paragraphe 2, du règlement n° 1663/95, les décisions visées à l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70 doivent être prises après examen de tout rapport établi par l’organe de conciliation en application des dispositions de la décision 94/442.

14
Les orientations pour l’application des corrections forfaitaires ont été définies dans le document n° VI/5330/97 de la Commission, du 23 décembre 1997, intitulé «Orientations concernant le calcul des conséquences financières lors de la préparation de la décision d’apurement des comptes du FEOGA-Garantie» (ci-après le «document n° VI/5330/97»). Lorsque les informations fournies par l’enquête ne permettent pas d’évaluer les pertes subies par la Communauté, à partir d’une extrapolation de ces pertes, par des moyens statistiques ou par référence à d’autres données vérifiables, une correction forfaitaire peut être envisagée. Le taux de correction appliqué dépend de l’importance des manquements constatés dans la mise en œuvre des contrôles.

15
Dans l’annexe 2 de ce document, intitulée «Conséquences financières pour l’apurement des Comptes de la Section Garantie du FEOGA, des carences des contrôles effectués par les États membres», la Commission distingue deux catégories de contrôles:

«–
Les contrôles clés sont les vérifications physiques et administratives requises pour contrôler les éléments quant au fond, en particulier la réalité de l’objet de la demande, la quantité et les conditions qualitatives, y compris le respect des délais, les exigences de récoltes, les délais de rétention, etc. Ils sont effectués sur le terrain et par recoupement avec des informations indépendantes, telles que les registres cadastraux.

Les contrôles secondaires sont les opérations administratives nécessaires pour traiter correctement les demandes, telles que la vérification du respect des délais de soumission, l’identification de demandes en doublon pour un même objet, l’analyse du risque, l’application de sanctions et la supervision adéquate des procédures.»

16
Aux termes de l’annexe 2 du document n° VI/5330/97, la Commission applique les taux de correction forfaitaire suivants:

«Lorsqu’un ou plusieurs contrôles clés ne sont pas effectués ou sont si mal ou si rarement réalisés qu’ils sont inefficaces pour déterminer l’éligibilité d’une demande ou prévenir les irrégularités, il convient alors d’appliquer une correction à hauteur de 10 %, car il est raisonnablement permis de penser qu’il existait un risque élevé de pertes importantes pour le FEOGA.

Lorsque tous les contrôles clés sont effectués, mais sans respecter le nombre, la fréquence ou la rigueur préconisés par les règlements, il convient alors d’appliquer une correction à hauteur de 5 %, car il peut raisonnablement être conclu que ces contrôles n’offrent pas le niveau attendu de garantie de régularité des demandes et que le risque de perte pour le FEOGA était significatif.

Lorsqu’un État membre effectue correctement les contrôles clés, mais omet complètement d’effectuer un ou plusieurs contrôles secondaires, il convient alors d’appliquer une correction à hauteur de 2 %, compte tenu du risque plus faible de perte pour le FEOGA et de la gravité moindre de l’infraction.»

La réglementation dans le domaine des cultures arables

17
Par le règlement (CEE) n° 3508/92 du Conseil, du 27 novembre 1992, établissant un système intégré de gestion et de contrôle [ci-après le «SIGC»] relatif à certains régimes d’aides communautaires (JO L 355, p. 1), a été créé un nouveau système intégré s’appliquant notamment au régime de soutien financier dans le secteur des cultures arables.

18
Aux termes de l’article 2 de ce règlement:

«Le système intégré comprend les éléments suivants:

a)
une base de données informatisées;

b)
un système alphanumérique d’identification des parcelles agricoles;

c)
un système alphanumérique d’identification et d’enregistrement des animaux;

d)
des demandes d’aides;

e)
un système intégré de contrôle.»

19
L’article 7 de ce règlement prévoit que le système intégré de contrôle porte sur l’ensemble des demandes d’aide présentées, notamment en ce qui concerne les contrôles administratifs, les contrôles sur place et, le cas échéant, les vérifications par télédétection aérienne ou spatiale.

20
Aux termes de l’article 8 dudit règlement:

«1.     L’État membre procède à un contrôle administratif des demandes d’aides.

2.        Les contrôles administratifs sont complétés par des contrôles sur place portant sur un échantillon des exploitations agricoles. Pour l’ensemble de ces contrôles, l’État membre établit un plan d’échantillonnage.

3.        Chaque État membre désigne une autorité chargée d’assurer la coordination des contrôles prévus par le présent règlement.

4.       Les autorités nationales peuvent, dans des conditions à fixer, utiliser la télédétection pour déterminer les superficies des parcelles agricoles, pour en identifier l’utilisation et pour en vérifier l’état.

5.        Lorsque les autorités compétentes de l’État membre confient certaines parties des travaux à effectuer en application du présent règlement à des organismes ou à des entreprises spécialisés, elles doivent en garder la maîtrise et la responsabilité.»

21
L’article 13, paragraphe 1, du règlement n° 3508/92, tel que modifié par le règlement (CE) n° 2466/96 du Conseil, du 17 décembre 1996 (JO L 335, p. 1), dispose:

«1.     Le système intégré est applicable:

a)
à partir du 1 er février 1993, pour ce qui concerne les demandes d’aides, un système alphanumérique d’identification et d’enregistrement des espèces bovines et le système intégré de contrôle visé à l’article 7;

b)
pour ce qui concerne les autres éléments visés à l’article 2, au plus tard à partir du:

1 er janvier 1998 pour l’Autriche, la Finlande et la Suède,

1 er janvier 1997 pour les autres États membres.»

22
Le règlement (CEE) n° 1765/92 du Conseil, du 30 juin 1992, instituant un régime de soutien aux producteurs de certaines cultures arables (JO L 181, p. 12) prévoit, à son article 15, paragraphe 3:

«Les paiements visés au présent règlement doivent être versés intégralement aux bénéficiaires.»

23
Selon l’article 9, paragraphe 2, troisième alinéa, du règlement (CEE) n° 3887/92 de la Commission, du 23 décembre 1992, portant modalités d’application du système intégré de gestion et de contrôle relatif à certains régimes d’aides communautaires (JO L 391, p. 36), tel que modifié par le règlement (CE) n° 1648/95 de la Commission, du 6 juillet 1995 (JO L 156, p. 27), s’il s’agit d’une fausse déclaration faite délibérément ou par négligence grave, l’exploitant en cause est exclu du bénéfice du régime d’aides concerné au titre de l’année civile en cause.


Sur le fond

Sur la correction appliquée au titre des campagnes de commercialisation 1994, 1995, 1996 et 1998 en raison de différences entre les déclarations annuelles des paiements et les superficies éligibles

Sur la régularité alléguée des dépenses

24
Il résulte du point B.7.3.1.1 du rapport de synthèse que, en ce qui concerne les campagnes de commercialisation 1994, 1995, 1996 et 1998, les services de la Commission ont mis en évidence d’énormes différences (totalisant 49 385 195 euros de dépenses en trop), à la suite du rapprochement des dépenses déclarées par la République hellénique dans le cadre de ses déclarations annuelles par rapport aux superficies éligibles aux aides selon la communication finale sur la superficie de base soumise par les autorités grecques.

– Arguments des parties

25
Selon le gouvernement grec, en raison d’une interprétation et d’une application erronées de l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70, en combinaison avec l’annexe 2 du document n° VI/5330/97, la Commission a considéré que les discordances existant entre les déclarations annuelles des dépenses et les dépenses éligibles constituent de réelles discordances et pertes pour le FEOGA. Celle-ci aurait déduit du financement communautaire le montant correspondant, qu’elle avait imputé en tant que correction financière à la République hellénique. La Commission aurait procédé ainsi au motif que ces discordances seraient les conséquences purement comptables de l’absence d’un réseau informatique commun et qu'elles ne représenteraient pas des montants correspondant à des dépenses précises réalisées par l’État membre en violation de certaines règles communautaires, au détriment des ressources de la Communauté. Or, il ne s’agirait pas de discordances réelles, mais de discordances fictives, qui reflètent les faiblesses du système de gestion résultant de l’absence d’un système informatique commun homogène.

26
Le gouvernement grec fait valoir à cet égard que:

ou bien les données ne sont pas fiables et alors les différences entre elles sont fictives,

ou bien elles sont fiables et les différences entre elles sont réelles.

27
Selon ce gouvernement, ces deux hypothèses ne peuvent coexister, en ce sens que des données qui ne seraient pas fiables ne pourraient donner lieu à des différences qui seraient réelles, ainsi que le soutient la Commission.

28
D’ailleurs, l’existence de différences dans les données ne signifierait pas nécessairement que les paiements qui dépassent les paiements réguliers normaux sont réels. Cela vaudrait à plus forte raison lorsque ces données ne sont pas fiables du fait de l’absence d’un système informatique compatible commun. Il s’ensuivrait que la partie qui prétend que les différences sont réelles devrait également apporter la preuve de ses allégations. Or, la position de la Commission, consistant à se borner à invoquer l’existence de ces différences, ne satisferait pas à cette exigence.

29
Le fait que les discordances invoquées ne sont pas réelles serait d’ailleurs également établi par les investigations concernant la récolte 1997, menées par les autorités grecques, postérieurement à la consultation bilatérale avec les services de la Commission en date du 27 mars 2001, et dont les conclusions ont été tenues pour exactes par ces derniers, de telle sorte qu’un montant de 24 160 441 768 GRD n’a pas été écarté du financement communautaire au titre de l’exercice 1997.

30
La Commission fait observer que le gouvernement grec reconnaît l’existence d’écarts entre les dépenses payées conformément aux déclarations annuelles et les surfaces éligibles aux paiements, conformément à la communication finale de la surface de base soumise par les autorités grecques, et qu'il ne conteste pas le montant de ceux-ci. Elle souligne que le gouvernement grec ne présente pas d’autres éléments établissant le montant des dépenses et les surfaces qui seraient, d’après lui, exactes et fiables.

31
La Commission relève à cet égard que l’argument du gouvernement grec tiré des «écarts fictifs» revient à soutenir soit que le montant qu’il a lui-même déclaré avoir versé aux producteurs n’est pas exact, soit que les surfaces qu’il a déclarées comme étant éligibles ne sont pas exactes, soit que ces deux éléments sont faux. Quel que soit l’argument ainsi avancé, il appartiendrait à la République hellénique de fournir les chiffres «exacts» aux services de la Commission.

– Appréciation de la Cour

32
À titre liminaire, il convient de rappeler que le FEOGA ne finance que les interventions effectuées conformément aux dispositions communautaires dans le cadre de l’organisation commune des marchés agricoles (voir, notamment, arrêts du 6 mars 2001, Pays-Bas/Commission, C-278/98, Rec. p. I-1501, point 38, et du 8 mai 2003, Espagne/Commission, C-349/97, Rec. p. I-3851, point 45).

33
Il y a lieu également de rappeler qu’il appartient à la Commission de prouver l’existence d’une violation des règles de l’organisation commune des marchés agricoles (voir, notamment, arrêt du 19 février 1991, Italie/Commission, C‑281/89, Rec. p. I-347, point 19). Par conséquent, la Commission est obligée de justifier sa décision constatant l’absence ou les défaillances des contrôles mis en œuvre par l’État membre concerné (voir arrêt Espagne/Commission, précité, point 46).

34
Toutefois, la Commission est tenue non pas de démontrer d’une façon exhaustive l’insuffisance des contrôles effectués par les administrations nationales ou l’irrégularité des chiffres transmis par celles-ci, mais de présenter un élément de preuve du doute sérieux et raisonnable qu’elle éprouve à l’égard de ces contrôles ou de ces chiffres (voir arrêt du 21 janvier 1999, Allemagne/Commission, C‑54/95, Rec. p. I-35, point 35).

35
L’État membre concerné, pour sa part, ne saurait infirmer les constatations de la Commission sans étayer ses propres allégations par des éléments établissant l’existence d’un système fiable et opérationnel de contrôle. Dès lors qu’il ne parvient pas à démontrer que les constatations de la Commission sont inexactes, celles-ci constituent des éléments susceptibles de faire naître des doutes sérieux quant à la mise en place d’un ensemble adéquat et efficace de mesures de surveillance et de contrôle (voir arrêt du 28 octobre 1999, Italie/Commission, C‑253/97, Rec. p. I-7529, point 7).

36
Cet allégement de l’exigence de la preuve pour la Commission s’explique par le fait que c’est l’État membre qui est le mieux placé pour recueillir et vérifier les données nécessaires à l’apurement des comptes du FEOGA, et auquel il incombe, en conséquence, de présenter la preuve la plus détaillée et complète de la réalité de ses contrôles ou de ses chiffres et, le cas échéant, de l’inexactitude des affirmations de la Commission (arrêts précités Allemagne/Commission, point 35, et Pays-Bas/Commission, point 41).

37
C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner les éléments de preuve fournis par le gouvernement grec à l’encontre des constatations sur lesquelles la Commission a fondé la décision attaquée.

38
Il est constant qu’un écart existe entre les dépenses payées conformément aux déclarations annuelles et les surfaces éligibles aux paiements conformément à la communication finale de la surface servant de base aux paiements soumise à la Commission par les autorités helléniques.

39
En mettant en cause, sur le fondement des chiffres contradictoires présentés par le gouvernement grec, la régularité des paiements d’aides effectués, la Commission a présenté un élément de preuve de l’existence d’un doute sérieux et raisonnable.

40
En conséquence, il incombait aux autorités helléniques de présenter la preuve la plus détaillée et complète que ces paiements n’ont pas été effectués en violation du droit communautaire.

41
Contrairement à la position du gouvernement grec, il ne saurait par conséquent être soutenu qu’il incombe à la Commission d’apporter la preuve que les différences constatées sont réelles, en ce sens que des données fiables concernant la superficie éligible devraient être fournies par la Commission.

42
Le gouvernement grec n’a pas démontré que les paiements n’ont pas dépassé ceux qui correspondent aux surfaces éligibles aux aides en cause. Il s’est borné à affirmer que l’existence de données contradictoires ne signifie pas nécessairement que les paiements effectués ont réellement dépassé les paiements réguliers normaux.

43
Il résulte de ce qui précède que le gouvernement grec n’est pas parvenu à infirmer les constatations de la Commission à l’égard des différences entre les déclarations annuelles des paiements et les superficies éligibles.

Sur l’application alléguée d’une seconde correction financière pour les mêmes motifs

– Arguments des parties

44
Le gouvernement grec fait valoir que des corrections forfaitaires ont déjà été appliquées au titre des récoltes des années 1994, 1995 et 1996 pour les mêmes motifs. Il précise que des corrections financières forfaitaires avaient déjà été appliquées à la République hellénique en raison des insuffisances du SIGC, pendant la période correspondant aux récoltes des années 1994, 1995, 1996 et 1998, dans le secteur des cultures arables, par la décision 2000/449/CE de la Commission, du 5 juillet 2000, écartant du financement communautaire certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), section «garantie» (JO L 180 p. 49). Ces corrections financières forfaitaires mises à la charge de cet État membre auraient été, d’une part, de 2 % au titre la récolte de 1994, et, d’autre part, en ce qui concerne les récoltes des années 1995, 1996 et 1997, de 5 % des dépenses déclarées pour les demandes qui ont fait l’objet d’un contrôle sur place et de 2 % pour celles qui ont fait l’objet d’un contrôle par télédétection. Ces corrections auraient été appliquées en raison des insuffisances et des retards dans la mise en place du SIGC. Parmi ces insuffisances du SIGC figurerait l’absence d’un système commun de saisie informatique. Par conséquent, il faudrait admettre que les corrections financières forfaitaires effectuées au titre des récoltes précitées couvraient également l’absence d’un système commun de saisie informatique, ce qui ne permettrait pas l’application d’une seconde correction financière pour le même motif.

45
Le gouvernement grec soutient par ailleurs que les discordances constatées en ce qui concerne la récolte de 1997 ont été exclues de la présente correction financière sans que soit clairement établie la raison pour laquelle les différences relevées au titre de la campagne 1997, d’un montant de 77 millions d’euros, n’ont pas été écartées du financement communautaire. La Commission donnerait clairement à entendre que les discordances constatées au titre des autres années de récolte, à l’exclusion de l’année 1997, étaient dues à des causes autres que l’absence d’un réseau informatique commun. Selon ce gouvernement, pour accepter le point de vue de la Commission, il faudrait effectivement admettre le scénario le moins convaincant, selon lequel, alors qu'au titre des campagnes 1994, 1995 et 1996, les différences constatées sont réelles et que des paiements ont été réellement effectués en sus des paiements communautaires, en revanche, en ce qui concerne la campagne 1997, ces mêmes différences sont dues à l’absence d’un système informatique compatible commun. Par conséquent, ces dernières ne sont pas réelles et les montants correspondants ne sont, par conséquent, pas écartés du financement communautaire. Or, par la suite, lors de la campagne 1998, les différences constatées sont de nouveau réelles et des paiements en sus des paiements réguliers auraient été effectués.

46
Le gouvernement grec en conclut que la décision attaquée doit être annulée, conformément à l’article 253 CE, pour défaut de motivation ou, du moins, pour insuffisance de motivation, en raison d’une erreur sur les faits, d’une mauvaise appréciation des éléments factuels et d’un défaut de prise en compte d’éléments déterminants et, subsidiairement, que ladite décision doit être modifiée, de telle sorte que les montants correspondant aux discordances susévoquées ne soient pas écartés du financement communautaire.

47
La Commission ne partage pas l’avis du gouvernement grec selon lequel il existe une double correction financière au titre des mêmes récoltes et pour les mêmes motifs. Les corrections précédentes seraient fondées sur les risques de pertes pour le FEOGA, résultant d’un ensemble d’insuffisances relevées, en Grèce, dans le système de paiement et de contrôle, sur le fondement du document n° VI/5330/97. Par la suite, les services de la Commission auraient reçu de la République hellénique, en application du règlement (CE) n° 658/96 de la Commission, du 9 avril 1996, relatif à certaines conditions d’octroi des paiements compensatoires dans le cadre du régime de soutien aux producteurs de certaines cultures arables (JO L 91, p. 46), et de l’annexe VIII de ce règlement, des informations sur les récoltes des années 1994 et 1996, qui leur ont permis de procéder à des comparaisons entre des surfaces éligibles et les paiements effectués et de constater qu’il existait des différences importantes et des pertes réelles pour le FEOGA. La nouvelle correction appliquée s’appuierait donc sur la constatation de certains écarts qui ont conduit à des dépenses irrégulières.

48
Pour ce qui est de la récolte de 1997, la Commission souligne que le gouvernement grec a fourni des données et des explications qui lui ont permis d’estimer séparément les incidences financières et les problèmes constatés concrètement. De tels éléments auraient dû être également produits pour les années suivantes. Or, aucune explication ou information n’aurait été fournie à cet égard. Le fait que, en 1997, aucun écart n’a été constaté ne constituerait pas un argument suffisant pour conclure, sans autre élément d’information, à l’absence d’écarts en ce qui concerne les années 1994, 1995, 1996 et 1998.

– Appréciation de la Cour

49
À titre liminaire, il convient de constater que le grief tiré d’un défaut de motivation de la décision attaqué en ce qui concerne la double correction financière alléguée n’est pas invoqué par le gouvernement grec comme un moyen indépendant, mais apparaît plutôt lié à l’ensemble des appréciations de la Commission. Ce grief ne saurait donc être examiné d’une manière distincte.

50
Ainsi qu’il ressort du point 32 du présent arrêt, le FEOGA ne finance que les interventions effectuées conformément aux dispositions communautaires dans le cadre de l’organisation commune des marchés agricoles. La Commission n’est pas tenue d’établir l’existence d’un préjudice, mais peut se contenter de présenter des indices sérieux en ce sens (arrêt Espagne/Commission, précité, point 146).

51
En l’espèce, il est constant, s’agissant des paiements qui n’ont pas été fondés sur les superficies éligibles, que de tels indices ont été fournis par la Commission et que le gouvernement grec n’a pas pu démontrer la régularité de ces paiements.

52
Quant à la récolte de 1997, la Commission soutient à bon droit que le fait que, au titre de cette année, aucun écart n’ait été constaté ne constitue pas en soi un argument suffisant pour conclure, sans autre information, à l’absence d’écarts pour d’autres années.

53
S’agissant des corrections déjà appliquées au titre des récoltes des années 1994, 1995 et 1996, elles ont été effectuées en raison d’insuffisance du SIGC et ont un caractère forfaitaire, alors que les corrections en cause ont été appliquées de manière non forfaitaire à partir d’une évaluation précise des pertes.

54
Certes, il ne saurait être d’emblée exclu que les risques constatés au cours des années 1994 et suivantes et qui ont amené la Commission à imposer une correction forfaitaire ont déjà inclus le risque lié aux écarts entre les superficies éligibles et les paiements d’aides effectués.

55
Toutefois, la Commission a démontré d’une manière détaillée que les corrections appliquées au titre des années précédentes n’ont pas été motivées par un tel risque, mais par d’autres raisons spécifiques.

56
S’agissant de l’année 1994, il ressort du point B.7.3.1.5 du rapport de synthèse que la correction appliquée au titre de cette année ne concernait que des aspects secondaires du système de contrôle et ne couvrait pas l’absence de système informatique commun compatible, qui est la justification de la présente correction financière.

57
Pour ce qui est des corrections appliquées au titre des campagnes de commercialisation 1995 et 1996, elles étaient liées aux défaillances relevées en ce qui concerne les contrôles sur place et n’étaient pas motivées par l’absence de système informatique commun compatible. En effet, ainsi que la Commission le soutient dans sa défense, sans être contredite par le gouvernement grec, les corrections financières appliquées au titre des campagnes 1995 et 1996 concernaient, notamment, des insuffisances liées aux retards dans la réalisation des contrôles par télédétection et des contrôles sur place ainsi qu’à l’absence de cadastre et de contrôles croisés.

58
Ces constats ne sont pas infirmés par le gouvernement grec qui soutient plus spécifiquement que parmi les insuffisances reprochées figurait également l’absence d’un système commun de saisie informatique.

59
Selon la décision 2000/449, la correction appliquée au titre des exercices 1996-1998 avait pour motif le risque de pertes pour le FEOGA découlant des «[d]éfaillances SIGC».

60
Bien que, selon l’article 2 du règlement n° 3508/92, un système commun de saisie informatique est un élément du SIGC, celui-ci est composé de plusieurs autres éléments. En effet, le SIGC comprend également les contrôles administratifs, les contrôles sur place et, le cas échéant, les vérifications par télédétection aérienne ou spatiale.

61
Par conséquent, les corrections imposées par la décision 2000/449 ont été fondées sur un ensemble d’insuffisances. L’écart constaté entre les paiements effectués et les surfaces éligibles n’était pas pris en compte en tant que tel par les corrections antérieures.

62
Dès lors, le grief tiré d’une double correction financière pour les mêmes périodes et les mêmes motifs doit être écarté.

Sur l’incompétence ratione temporis alléguée de la Commission

– Arguments des parties

63
Le gouvernement grec avance à titre subsidiaire que l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70 dispose qu’un refus de financement ne peut porter sur des dépenses effectuées antérieurement aux 24 mois ayant précédé la communication écrite par la Commission à l’État membre concerné des résultats de ces vérifications.

64
D’après le gouvernement grec, à la lecture de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95, le droit pour la Commission de procéder à des corrections financières pendant la durée de la période qui débute 24 mois avant la communication écrite des résultats du contrôle à l’État membre concerné présuppose que cette communication écrite des vérifications opérées durant le contrôle contienne également une évaluation des dépenses pouvant être exclues en vertu de l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70. Par conséquent, une communication des résultats du contrôle qui ne contient pas également une telle évaluation des dépenses susceptibles d’être exclues ne remplirait pas les conditions réglementaires exigées.

65
Dès lors, ce gouvernement fait valoir que la présente correction financière ne peut couvrir les récoltes des années 1994 à 1996 et 1998, puisque, conformément à cet article 5, paragraphe 2, sous c), elle ne peut concerner des dépenses qui ont été effectuées 24 mois avant la notification officielle des conclusions de la Commission relatives aux résultats des contrôles effectués par ses services dans le cadre des investigations enregistrées sous les numéros 214/99, 219/99 et 1/2000.

66
La Commission rétorque que la République hellénique ne peut pas tirer profit de sa propre omission de déposer en temps utile des données exactes à la Commission concernant lesdites années. Elle souligne que ses services maintenaient un dialogue permanent avec les autorités helléniques en ce qui concerne les écarts en cause. La Commission mentionne à cet égard, notamment, sa lettre du 23 juin 1998 (n° VI/25149, version grecque: EL 32539, du 24 août 98) dans laquelle elle aurait indiqué aux autorités helléniques son intention d’exclure certaines dépenses du financement communautaire. Dans sa lettre du 5 février 2001 (n° VI/003644), la Commission aurait indiqué qu’elle avait l'intention de proposer l’exclusion des dépenses qui n’étaient pas conformes aux surfaces cultivées pour les années 1994 à 1998.

– Appréciation de la Cour

67
L’article 5, paragraphe 2, sous c), cinquième alinéa, du règlement n° 729/70 prévoit qu’«[u]n refus de financement ne peut pas porter sur les dépenses effectuées antérieurement aux vingt-quatre mois ayant précédé la communication écrite par la Commission à l’État membre concerné des résultats [des] vérifications [de la Commission]».

68
Le règlement n° 1663/95, qui est le règlement d’application du règlement n° 729/70, précise, à son article 8, paragraphe 1, premier alinéa, le contenu de la communication écrite par laquelle la Commission communique le résultat de ses vérifications aux États membres (voir arrêt du 24 janvier 2002, Finlande/Commission, C‑170/00, Rec. p. I-1007, point 26).

69
Aux termes de cet article, ladite communication indique les mesures correctives à prendre pour garantir à l’avenir le respect des règles concernées, comporte une évaluation des dépenses que la Commission envisage d’exclure et fait référence au règlement n° 1663/95.

70
Conformément à la jurisprudence de la Cour, la Commission est tenue de respecter, dans les relations avec les États membres, les conditions qu’elle s’est imposées à elle-même par des règlements d’application (voir arrêt Finlande/Commission, précité, point 34). En effet, le non-respect de ces conditions peut, selon son importance, vider de sa substance la garantie procédurale accordée aux États membres par l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70, qui limite dans le temps les dépenses sur lesquelles peut porter un refus de financement par le FEOGA (voir, notamment, arrêt du 13 juin 2002, Luxembourg/Commission, C-158/00, Rec. p. I-5373, point 24).

71
Il convient donc de vérifier dans quelle mesure la lettre du 23 juin 1998 répond aux conditions énoncées à l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95.

72
Dans cette lettre, faisant référence à l’article 8 du règlement n° 1663/95, la Commission a indiqué aux autorités helléniques son intention d’exclure du financement communautaire une partie des dépenses déclarées, au titre d’une période maximale de 24 mois précédant la date de la réception formelle de cette lettre, en application de l’article 7, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 296/96 de la Commission, du 16 février 1996, relatif aux données à transmettre par les États membres et à la prise en compte mensuelle des dépenses financées au titre de la section «garantie» du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA) et abrogeant le règlement (CEE) n° 2776/88 (JO L 39, p. 5).

73
S’agissant de l’évaluation des dépenses, la Commission a indiqué aux autorités helléniques que cette partie des dépenses était à déterminer sur le fondement des dispositions applicables en la matière.

74
Il ressort de la jurisprudence que le terme «évaluation» des dépenses qui figure à l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95, comme ses équivalents dans les différentes versions linguistiques, doit être interprété en ce sens qu’une indication chiffrée du montant des dépenses en cause n’est pas nécessaire et qu’il suffit que soient indiqués les éléments permettant de calculer ce montant au moins approximativement (voir, notamment, arrêt du 13 septembre 2001, Espagne/Commission, C-375/99, Rec. p. I-5983, point 16).

75
Cette interprétation littérale est corroborée par le fait que, ainsi qu’il a été rappelé au point 36 du présent arrêt, c’est l’État membre qui est le mieux placé pour recueillir et vérifier les données nécessaires à l’apurement des comptes du FEOGA.

76
En l’occurrence, le rapport de contrôle annexé à ladite lettre du 23 juin 1998 et intitulé «Rapport de contrôle au titre de l’apurement des comptes du FEOGA – section garantie – cultures arables – récoltes 1996 et 1997», fait explicitement référence, aux points 1.3.2, 3.7 et 3.8, au fait que les données reçues ont révélé l’impossibilité de concilier les totaux issus des données informatiques avec les dépenses déclarées au FEOGA durant la même période et que des données essentielles ont fait défaut. Des différences importantes ont été constatées.

77
Or, ces informations ne suffisent pas pour constituer une «évaluation» au sens de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95. Le rapport relève de nombreux points de critiques relatives aux défaillances constatées dans la mise en place du SIGC et aux dysfonctionnements relevés au titre des récoltes de 1996 et 1997. La lettre n’indique pas que la Commission envisageait une correction non forfaitaire. S’agissant de ces deux récoltes, les autorités grecques n’étaient donc pas en mesure de calculer le montant des corrections éventuelles, même approximativement. En outre, les récoltes de 1994 et 1995 n’étaient visées ni dans ladite lettre ni dans le rapport annexé.

78
La lettre du 23 juin 1998 ne constitue donc pas une communication au sens de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95.

79
Celle du 13 juin 2000 ne mentionne pas non plus le type de correction envisagée.

80
La première communication de la Commission qui est, en l’espèce, conforme aux exigences de cette disposition est la lettre du 20 août 2001.

81
La Commission ne saurait s’opposer aux effets du délai prévu à l’article 5, paragraphe 2, sous c), cinquième alinéa, du règlement n° 729/70 en invoquant le fait que les autorités helléniques n’ont pas suffisamment collaboré à l’éclaircissement des écarts constatés. En effet, rien ne s’oppose à ce que la Commission procède à une évaluation des pertes par voie d’extrapolation à partir de tels écarts, dans la communication prévue par ladite disposition.

82
Il s’ensuit qu’il y a lieu d’annuler la décision attaquée en tant qu’elle exclut du financement communautaire des dépenses effectuées par la République hellénique dans le secteur des cultures arables antérieurement au 20 août 1999 pour autant que lesdites dépenses sont visées par la correction en raison de discordances entre les dépenses déclarées et les surfaces éligibles aux aides communiquées.

Sur la correction forfaitaire de 5 % appliquée au titre des campagnes de commercialisation 1998 et 1999 en raison des défaillances dans la mise en place du SIGC

83
La Commission expose en détail, au point B.7.3.1.1 du rapport de synthèse, que la République hellénique n’avait pas encore mis en place le SIGC.

Arguments des parties

84
La République hellénique soutient d’abord que le taux des contrôles effectués sur place a été, au plan national, plus de deux fois supérieur à celui de 5 % prévu par le règlement n° 3887/92. En 1998, il se serait élevé à 13,55 % des demandes d’aides. Cet élément de fait, en relation avec le morcellement des terres et le grand nombre des demandes d’aides qui ont été déposées, aurait rendu l’augmentation du taux des contrôles sur place demandée par la Commission superflue, d’une part, abusive, d’autre part, eu égard au coût administratif et financier important qu’une telle augmentation impliquait. En ce qui concerne les retards dans la mise en œuvre de ces contrôles, surtout après la récolte, ces retards n’auraient pas empêché une identification efficace des cultures, fût-ce après la récolte, grâce aux résidus de cultures encore présents en bon état, en raison de la température élevée et de la sécheresse. Par conséquent, tant le taux que la qualité des contrôles auraient été satisfaisants.

85
En ce qui concerne les écarts identifiés entre les contrôles communiqués aux services de la Commission et les contrôles réalisés par des méthodes de télédétection, ils ne seraient pas réels et seraient dus à des erreurs introduites lors de la saisie informatique des données.

86
Par ailleurs, en ce qui concerne la qualité des contrôles par télédétection, il conviendrait de noter que la tolérance de +/- 6,2 m a été appliquée durant les années 1998 et 1999 conformément au cahier des charges élaboré par le Centre commun de recherche (ISPRA), et que cette approche n’aurait pas fonctionné de manière satisfaisante en Grèce en raison du morcellement des terres. Une opération pilote en vue de définir la tolérance optimale aurait démontré ultérieurement que la tolérance optimale pour la Grèce était de +/- 3 m, et c’est cette tolérance qui serait appliquée depuis l’année 2000. Il conviendrait d’admettre que les éventuelles insuffisances relevées n’étaient pas d’une gravité telle qu’elles exposaient le FEOGA à des risques de pertes financières.

87
S’agissant du défaut d’achèvement du cadastre et de la difficulté corrélative d’identification des parcelles agricoles, il faudrait noter que, dans le cadre de la création d’un support cartographique pour le SIGC, les autorités grecques, en collaboration avec les services compétents de l’Union européenne et du Centre commun de recherche (ISPRA), avaient commencé dès 1994 à travailler en ce sens, afin que les déclarations du SIGC soient couvertes à raison d’environ 90 %. Ce travail aurait compris la réalisation d’orthophotographies et de diapositives d’unités et il se serait achevé en 1997, alors qu’en 1998, il aurait été testé dans certains départements du pays. Il aurait été entièrement appliqué en 1999 et aurait couvert environ 75 % des parcelles agricoles du SIGC.

88
À la lumière de ce qui précède, et compte tenu surtout du taux d’achèvement de la mise en œuvre du casier viticole et oléicole, soit 75 %, et de la perspective de son achèvement imminent, les autorités grecques font valoir que le fait que cette mise en œuvre ne soit pas complètement terminée ne constitue pas une insuffisance grave, dont il résulterait un risque réel de perte pour les ressources communautaires.

89
Enfin, s’agissant de l’absence de sanctions et de l’inexistence d’un système de contrôle approprié, les autorités grecques soutiennent, d’une part, que les sanctions prévues à l’article 9 du règlement n° 3887/92 n’ont pas été appliquées dans les cas de superficies déclarées comme étant irriguées alors que les producteurs n’en apportaient pas la preuve, aux motifs que les cultures existaient, qu’il ne s’agissait pas d’une fausse déclaration intentionnelle et que, en tout état de cause, de telles sanctions ne s’appliquent qu’à partir de l’année 2000, lorsqu’une superficie séparée importante a été créée en vue d’y cultiver du maïs.

90
Pour ces raisons, le gouvernement grec soutient que les structures et le régime de contrôle national se sont améliorés par rapport à ce qui existait auparavant et que la correction financière forfaitaire de 5 % qui a été appliquée est disproportionnée. Il rappelle que le même taux de correction avait été appliqué pour les récoltes précédentes.

91
La Commission fait valoir que, en 1998, dans un nombre important de régions, un taux élevé d’irrégularités importantes a été relevé. Toutefois, pendant ladite année, les autorités helléniques n’auraient pas effectué de contrôles complémentaires et le pourcentage des demandes contrôlées en 1999 n’aurait pas augmenté comme le prévoyait l’article 9 du règlement n° 3887/92. Pour les années 1999 et 2000, les autorités helléniques n’auraient pas été en mesure de fournir les données statistiques relatives aux contrôles étant donné que le logiciel informatique contenant les données statistiques centralisées n’était pas encore en service.

92
En outre, la Commission fait état des défaillances relatives aux taux et à la qualité des contrôles par télédétection, à la qualité des contrôles classiques effectués sur place, au système de reconnaissance des parcelles agricoles, aux contrôles des cultures irriguées et à la supervision globale des procédures.

93
La Commission fait valoir que le gouvernement grec reconnaît et admet l’ensemble des conclusions des contrôles ainsi que les écarts constatés et les insuffisances du système et des contrôles. Ce gouvernement reconnaîtrait notamment que le nombre des contrôles n’aurait pas augmenté en 1999, que le nombre des contrôles par télédétection qui a été déclaré était inexact et que les contrôles sur place ont été réalisés avec retard, voire après la récolte, que la tolérance de 6,2 m admise pour la photographie aérienne ne serait pas adaptée à la situation des petites cultures rencontrées en Grèce, que l’élaboration du cadastre était loin d’être achevée pendant la période en cause et que les sanctions prévues à l’article 9 du règlement n° 3887/92 n’ont pas été infligées en raison d’interprétations arbitraires de cette disposition.

94
Compte tenu de la gravité des lacunes affectant le système de contrôle pendant la période en litige et du risque élevé de perte pour le FEOGA en résultant, la correction de 5 % doit, selon la Commission, être considérée comme justifiée.

Appréciation de la Cour

95
En application de la jurisprudence citée aux points 33 à 35 du présent arrêt, il incombait au gouvernement grec de démontrer que, pour les campagnes de commercialisation 1998 et 1999, la République hellénique avait appliqué un système de contrôle fiable et efficace et que les griefs formulés par la Commission à la suite des vérifications matérielles effectuées par ses services n’étaient pas fondés.

96
Or, le gouvernement grec ne conteste pas, en ce qui concerne la mise en œuvre du SIGC, que la base de données informatisée prévue aux articles 2 et 3 du règlement n° 3508/92 n’a pas été créée dans le délai imparti et ne fonctionnait pas pendant les campagnes en cause. Il fait uniquement valoir que les structures et le régime de contrôle national ont été améliorés par rapport à ce qu’elles étaient dans le passé et que les faits invoqués par la Commission ne constituent pas une insuffisance grave, dont il résulterait un risque réel de perte pour les ressources communautaires.

97
À cet égard, il y a lieu de rappeler d’emblée l’importance que revêt la mise en place du SIGC, sans qu’il soit nécessaire d’examiner en détail la question de la qualité des contrôles par télédétection ou du taux de contrôle effectués sur place. En effet, l’identification des parcelles agricoles à elle seule, non encore intégralement achevée en Grèce, constitue un élément clé de l’application correcte d’un régime lié à la superficie. L’absence d’un système fiable d’identification des parcelles implique en soi un risque élevé de préjudice pour le budget communautaire.

98
Pour ce qui est des sanctions prévues par le règlement n° 3887/92, il suffit de constater que des producteurs ont déclaré leurs terres comme irriguées sans pouvoir en apporter la preuve. La sanction prévue à l’article 9, paragraphe 2, dudit règlement consiste à exclure les parcelles concernées du financement communautaire. Contrairement à ce que soutient le gouvernement grec cette sanction était déjà applicable aux exercices en cause.

99
Bien que des améliorations soient à constater, ledit gouvernement ne saurait soutenir que, en raison de ce constat et compte tenu du fait que, antérieurement déjà, un taux de correction de 5 % avait été appliqué, le taux des corrections à effectuer doit être réduit. En effet, en dépit de ces améliorations, aussi méritoires soient-elles, le risque de préjudice pour le FEOGA a été très élevé, et cela depuis l’expiration du délai imparti pour la mise en œuvre du SIGC, à savoir le 1 er janvier 1997, de sorte que la correction de 5 %, imposée pour les années antérieures, pourrait être jugée indulgente.

100
Par conséquent, les corrections forfaitaires de 5 % appliquées pour les années 1998 et 1999 paraissent conformes aux orientations établies par la Commission dans le document n° VI/5330/97.

Sur la correction forfaitaire de 2 % appliquée au titre des campagnes de commercialisation 1998 et 1999 en raison des retenues pratiquées par les associations de coopératives agricoles

101
Il ressort du point B.7.3.1.5 du rapport de synthèse que, en 1998 et 1999, les associations de coopératives agricoles ont retenu automatiquement environ 2 % du montant de l’aide versée aux agriculteurs pour couvrir leurs frais de fonctionnement.

Arguments des parties

102
Le gouvernement grec fait valoir que le cadre juridique national ne permet plus les retenues depuis les récoltes litigieuses. Selon ce gouvernement, l’arrêt du 11 janvier 2001, Grèce/Commission, (C‑247/98, Rec. p. I-1), dont il ressort que de telles retenues sont interdites, se réfère expressément à des retenues antérieures à la date d’entrée en vigueur de la loi n° 2538/97, à savoir le 1 er décembre 1997. L’article 37 de ladite loi aurait ajouté un second alinéa à l’article 2 de la loi n° 1409/83, qui dispose que «[la] retenue du montant prévu à l’alinéa précédent ne concerne pas les montants qui sont mis à la charge du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), à moins que les dispositions communautaires en disposent autrement». Dès lors, le cadre juridique national s’opposerait directement aux retenues, quelles qu’elles soient, sur les aides du FEOGA.

103
Le gouvernement grec admet que l’obligation pour l’État membre d’assurer le versement de l’intégralité des aides ne se limite pas à l’institution d’un cadre juridique national y relatif, mais s’étend aussi au strict respect de celui-ci et à son application, de sorte que les retenues sur les aides éventuellement constatées puissent être récupérées au motif qu’elles ont été indûment ou illégalement effectuées. Or, ce dernier point présupposerait une plainte de la part du bénéficiaire de l’aide et, plus généralement, l’absence de tout accord contraire entre les associations agricoles et les bénéficiaires. En l’espèce, il n’y aurait pas de violation d’une disposition communautaire ou nationale puisque le bénéficiaire de l’aide versée aurait consenti expressément à la retenue d’une partie de cette aide.

104
Lors de l’audience dans la présente affaire, le gouvernement grec a ajouté que, après le vote de la loi n° 2538/97, l’administration, par différentes circulaires, avait attiré l’attention de tous les services compétents en la matière afin que cette loi soit strictement respectée et que les contrevenants soit renvoyés devant les tribunaux.

105
Eu égard aux mesures qui ont été prises et aux améliorations relevées dans ce domaine, il serait infondé, du moins extrêmement injuste et disproportionné, d’écarter du financement communautaire une part des aides versées aux bénéficiaires égale à 2 % de celles-ci.

106
La Commission fait valoir que le gouvernement grec reconnaît que la retenue de 2 % appliquée par les associations de coopératives agricoles est contraire au droit communautaire et qu’il ne conteste pas le résultat des contrôles de la Commission démontrant que ces associations retenaient un montant égal à 2 % des sommes versées aux bénéficiaires.

107
Bien que les autorités grecques aient supprimé la loi qui autorisait les associations de coopératives agricoles à compenser les frais liés à la gestion du versement des aides en retenant un montant égal à 2 % de ces dernières, elles n’auraient pas pris les mesures adéquates pour empêcher la poursuite de la pratique de ces retenues par lesdites associations. La Commission rappelle que les États membres devraient empêcher tout contournement direct ou indirect, par des pratiques non transparentes, de l’obligation de verser intégralement l’aide aux producteurs.

108
La Commission ajoute qu’elle a reçu une série de plaintes émanant de producteurs en ce qui concerne cette retenue.

Appréciation de la Cour

109
L’article 15, paragraphe 3, du règlement n° 1765/92 dispose que les paiements visés à ce même règlement doivent être versés intégralement aux bénéficiaires.

110
Malgré l’adoption de la loi n° 2538/97 qui s’oppose à des retenues ainsi interdites, il est constant que, pendant les années 1998 et 1999, les associations de coopératives agricoles ont retenu automatiquement, pour couvrir leurs frais de fonctionnement, un montant représentant environ 2 % de l’aide versée aux agriculteurs.

111
Or, le régime de soutien aux producteurs de certaines cultures arables ne prévoit aucune exception autorisant une telle retenue. Ainsi, la Cour a jugé que l’article 15, paragraphe 3, du règlement n° 1765/92 interdit que les autorités nationales opèrent une déduction sur les versements effectués ou qu’elles exigent le paiement de frais administratifs afférents aux demandes ayant pour effet de diminuer le montant des aides (arrêt du 22 octobre 1998, Kellinghusen, C-36/97 et C‑37/97, Rec. p. I-6337, point 21). Il en va de même pour les associations de coopératives agricoles intervenant dans le paiement des aides en cause.

112
L’obligation découlant de l’article 15, paragraphe 3, du règlement n° 1765/92 est une obligation de résultat, de sorte qu’il est sans importance que des plaintes aient été enregistrées ou que des accords entre les bénéficiaires et les coopératives aient été conclus concernant la retenue d’une partie de l’aide.

113
La correction de 2 % imposée par la Commission est égale au pourcentage retenu par les associations de coopératives agricoles. Le moyen tiré du caractère disproportionné de celle-ci ne saurait donc être accueilli.

114
Par conséquent, la Commission a pu, à bon droit, appliquer la correction litigieuse.

115
Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le recours pour le surplus.


Sur les dépens

116
Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Toutefois, en vertu de la l’article 69, paragraphe 3, de ce même règlement, la Cour peut répartir les dépens ou décider que chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs. En l’espèce, chaque partie ayant partiellement succombé en ses moyens, il y a lieu de décider que chacune supporte ses propres dépens.

Par ces motifs, la Cour (première chambre) déclare et arrête:

1)
La décision 2002/524/CE de la Commission, du 26 juin 2002, écartant du financement communautaire certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), section «Garantie», est annulée en tant qu’elle exclut du financement communautaire des dépenses effectuées par la République hellénique dans le domaine des cultures arables antérieurement au 20 août 1999 pour autant que lesdites dépenses sont visées par la correction en raison de discordances entre les dépenses déclarées et les surfaces éligibles aux aides communiquées.

2)
Le recours est rejeté pour le surplus.

3)
Chacune des parties supporte ses propres dépens.

Signatures


1
Langue de procédure: le grec.

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