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Document 62001CC0487

Conclusions de l'avocat général Tizzano présentées le 3 juin 2003.
Gemeente Leusden (C-487/01) et Holin Groep BV cs (C-7/02) contre Staatssecretaris van Financiën.
Demandes de décision préjudicielle: Hoge Raad der Nederlanden - Pays-Bas.
Taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée - Article 17 de la sixième directive 77/388/CEE - Déduction de la taxe payée en amont - Modification de la législation nationale qui supprime la possibilité d'opter pour la taxation de la location de biens immeubles - Régularisation des déductions - Application aux contrats en cours.
Affaires jointes C-487/01 et C-7/02.

Recueil de jurisprudence 2004 I-05337

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2003:321

Conclusions

CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL
M. ANTONIO TIZZANO
présentées le 3 juin 2003(1)



Affaire jointes C-487/01 et C-7/02



Gemeente Leusden(C-487/01)
et
Holin Groep BV c. s. (C-7/02)
contre
Staatssecretaris van Financiën


[demande de décision préjudicielle formée par le Hoge Raad der Nederlanden (Pays-Bas)]

«Sixième directive TVA – Déduction de la taxe payée en amont – Faculté d'opter pour la taxation de la location des biens immeubles – Suppresseion de cette possibilité – Régularisation des déductions – Application aux contrats de bail en cours – Protection de la confiance légitime»






1.        Par arrêts des 14 et 21 décembre 2001, le Hoge Raad der Nederlanden (Pays-Bas) a soumis à la Cour, en vertu de l'article 234 CE, plusieurs questions préjudicielles ayant trait à l'interprétation de la sixième directive TVA  (2) (ci-après la «directive»). La juridiction de renvoi demande notamment si les principes de la confiance légitime et de la sécurité juridique s'opposent à ce qu'un État membre, à la suite d'une modification législative, impose à un assujetti, en vertu soit de l'article 20, soit de l'article 5, paragraphe 7, sous a), de la directive, la restitution totale ou partielle de la TVA qu'il a déduite en application de la directive. La juridiction de renvoi demande aussi à la Cour de préciser la portée de ladite modification législative sur les contrats de bail de biens immeubles existants à la date où elle est entrée en vigueur. Enfin, elle demande à la Cour de préciser si la réponse à la première question est différente si l'on ne tient compte que de la période postérieure à l'annonce du projet de loi comportant la modification législative en cause.

I –   Cadre juridique

A –   Les dispositions pertinentes de la directive

2.        L'article 2 de la directive dispose que:

«Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée:

1.
les livraisons de biens et les prestations de services, effectuées à titre onéreux à l'intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel [...]».

3.        L'article 4, paragraphe 1, de la directive prévoit que:

«Est considéré comme assujetti quiconque accomplit, d'une façon indépendante et quel qu'en soit le lieu, une des activités économiques mentionnées au paragraphe 2, quels que soient les buts ou les résultats de cette activité.»

4.        D'après l'article 5, paragraphe 7, sous a), de la directive:

«Les États membres peuvent assimiler à une livraison effectuée à titre onéreux:

a)
l'affectation par un assujetti aux besoins de son entreprise d'un bien produit, construit, extrait, transformé, acheté ou importé dans le cadre de son entreprise dans le cas où l'acquisition d'un tel bien auprès d'un autre assujetti ne lui ouvrirait pas droit à la déduction complète de la taxe sur la valeur ajoutée [...]».

5.        D'après l'article 10, paragraphe 2, de la directive:

«[...] la taxe devient exigible au moment où la livraison du bien ou la prestation de services est effectuée [...]».

6.        D'après l'article 11, A, de la directive:

«1.     La base d'imposition est constituée:

[...]

b)
pour les opérations visées à l'article 5 paragraphes 6 et 7, par le prix d'achat des biens ou de biens similaires ou, à défaut de prix d'achat, par le prix de revient, déterminés au moment où s'effectuent ces opérations».

7.        D'après l'article 13, B, de la directive:

«Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les États membres exonèrent, dans les conditions qu'ils fixent en vue d'assurer l'application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels:

[...]

b)
l'affermage et la location de biens immeubles [...]».

8.        Toutefois, d'après l'article 13, C, de la directive:

«Les États membres peuvent accorder à leurs assujettis le droit d'opter pour la taxation:

a)
de l'affermage et de la location de biens immeubles [...]

Les États membres peuvent restreindre la portée du droit d'option; ils déterminent les modalités de son exercice».

9.        D'après l'article 17 de la directive:

«1.
Le droit à déduction prend naissance au moment où la taxe déductible devient exigible.

2.
Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de ses opérations taxées, l'assujetti est autorisé à déduire de la taxe dont il est redevable:

a)
la taxe sur la valeur ajoutée due ou acquittée pour les biens qui lui sont ou lui seront livrés et pour les services qui lui sont ou lui seront rendus par un autre assujetti;

[...]

c)
la taxe sur la valeur ajoutée due conformément à l'article 5, paragraphe 7, sous a) [...]».

10.      Enfin, d'après l'article 20 de la directive:

«1.
La déduction initialement opérée est régularisée suivant les modalités fixées par les États membres, notamment:

a)
lorsque la déduction est supérieure ou inférieure à celle que l'assujetti était en droit d'opérer;

b)
lorsque des modifications des éléments pris en considération pour la détermination du montant des déductions sont intervenues postérieurement à la déclaration, notamment en cas d'achats annulés ou en cas de rabais obtenus; toutefois, il n'y a pas lieu à régularisation en cas d'opérations totalement ou partiellement impayées, en cas de destruction, de perte ou de vol dûment prouvés ou justifiés et en cas de prélèvements effectués pour donner des cadeaux de faible valeur et des échantillons visés à l'article 5 paragraphe 6. Toutefois, les États membres ont la faculté d'exiger la régularisation pour les opérations totalement ou partiellement impayées et en cas de vol.

2.
En ce qui concerne les biens d'investissement, une régularisation est opérée pendant une période de cinq années, dont celle au cours de laquelle le bien a été acquis ou fabriqué. Chaque année, cette régularisation ne porte que sur le cinquième de la taxe dont ces biens ont été grevés. Cette régularisation est effectuée en fonction des modifications du droit à déduction intervenues au cours des années suivantes, par rapport à celui de l'année au cours de laquelle le bien a été acquis ou fabriqué.

Par dérogation au premier alinéa, les États membres peuvent, lors de la régularisation, se baser sur une période de cinq années entières à compter du début de l'utilisation du bien.

En ce qui concerne les biens d'investissement immobiliers, la durée de la période servant de base au calcul des régularisations peut être portée jusqu'à dix ans  (3) .

3.
En cas de livraison pendant la période de régularisation, le bien d'investissement est considéré comme s'il était resté affecté à une activité économique de l'assujetti jusqu'à l'expiration de la période de régularisation. Cette activité économique est présumée être entièrement taxée pour le cas où la livraison dudit bien est taxée; elle est présumée être entièrement exonérée pour le cas où la livraison est exonérée. La régularisation se fait en une seule fois pour tout le temps de la période de régularisation restant à courir [...]».

B –   Les dispositions pertinentes de la législation néerlandaise

11.      Le royaume des Pays-Bas a transposé la directive au moyen d’une loi du 28 décembre 1978  (4) , qui a modifié la Wet op de omzetbelasting 1968  (5) (loi relative à la taxe sur le chiffre d’affaire de 1968, ci-après la «loi de 1968»). La loi de 1968 a été de nouveau modifiée par la Wet houdende wijziging van de Wet op de Omzetbelasting 1968  (6) (loi du 18 décembre 1995 portant modification de la loi de 1968 sur le chiffre d’affaires, ci-après la «loi de 1995»).

12.      En application de l'article 13, parties B et C, de la directive, l'article 11, paragraphe 1, sous b), point 5, de la loi de 1968 prévoyait, avant la modification introduite par la loi de 1995, que la location de biens immeubles était exonérée de TVA, en laissant toutefois au bailleur et au locataire la faculté d'opter, par une demande conjointe à l'administration fiscale, pour l'assujettissement à la TVA de la location de ces biens à d'autres fins que l'habitation.

13.      Or, par suite de la modification introduite par la loi de 1995, la faculté d'exercer l'option en question a été restreinte aux seuls cas dans lesquels le locataire utilise les biens immeubles loués à des fins qui lui permettent de déduire totalement ou presque la TVA.

14.      D'après son article V, paragraphe 1, la loi de 1995 est entrée en vigueur le 29 décembre 1995, mais avec effet rétroactif à partir du 31 mars 1995, 18 heures, date à laquelle le ministère des Finances néerlandais a émis un communiqué de presse annonçant que le Conseil des ministres avait l'intention de modifier la loi de 1968 avec effet rétroactif à la date du communiqué lui-même. L'article V, paragraphe 9, prévoit toutefois que la règle nouvelle ne s'applique pas, pendant une période comprise entre le premier exercice comptable au cours duquel le bailleur a commencé à utiliser le bien immobilier et le début du dixième exercice comptable, aux contrats de bail conclus par écrit au 31 mars 1995, 18 heures, et répondant à certaines conditions.

15.      Les modalités de régularisation de la TVA déduite dans le cas de biens immeubles sont fixées par l'article 13, paragraphe 2, du décret d'application de la loi de 1968 (ci-après le «décret d'application de 1968»). Celui-ci, conformément aux dispositions de l'article 20 de la directive, prévoit que la déduction afférente aux biens immobiliers est régularisée sur une période de neuf exercices comptables qui suivent celui au cours duquel l'agent économique a utilisé le bien pour la première fois et que la régularisation porte chaque année sur un dixième du montant de TVA déduit.

II –  Faits, procédure devant la juridiction nationale et questions préjudicielles

L'affaire C-487/01

16.      Au cours des années 1990-1991, la commune de Leusden a fait procéder, sur un terrain de sport qui lui appartenait, au remplacement d'un gazon naturel par un gazon artificiel. Le 1er janvier 1992, ledit terrain a été donné en location au Mixed Hockey Club Leusden (ci-après le «club de hockey»).

17.      Comme le club de hockey n'avait pas le droit de déduire la taxe sur le chiffre d'affaires, il a opté, en accord avec la commune de Leusden, pour l'assujettissement du loyer à la TVA au titre de l'article 11 de la loi de 1968. Cela aurait permis à la commune de Leusden, sur la base de l'article 17 de la directive, selon lequel la TVA sur les biens ou les services est déductible seulement si ces biens ou services sont utilisés pour des opérations également soumises à la TVA, de déduire intégralement la TVA afférente aux travaux qu'elle a fait exécuter sur le terrain de sport.

18.      La modification introduite par la loi de 1995 a privé la commune de Leusden et le club de hockey de la faculté de soumettre à la TVA la location du terrain de sport en question. Partant, l'administration fiscale a décidé de demander à la commune de Leusden, en application de l'article 13 du décret d'application de 1968, de régulariser la déduction de la TVA afférente aux travaux susmentionnés. Cette régularisation, notamment, ne portait que sur une fraction de la TVA déduite à l'origine, c'est-à-dire celle qui concernait les années restant à courir, après l'entrée en vigueur de la loi de 1995, de la période décennale de régularisation partant de la première utilisation du terrain de sport.

19.      La commune de Leusden a attaqué sans succès cette décision devant le Gerechtshof te Amsterdam. Elle a fait appel devant le Hoge Raad, soutenant entre autres que la régularisation de la déduction de TVA à la suite de cette modification législative serait contraire aux principes de la confiance légitime et de la sécurité juridique évoqués parla Cour de justice dans les arrêts du 3 décembre 1998, Belgocodex  (7) , et du 8 juin 2000, Schloßstraße  (8) .

20.      Ayant des doutes sur l'interprétation à donner aux dispositions pertinentes de la directive en raison de certaines différences entre les présents faits et ceux qui sous-tendaient les deux arrêts précités, le Hoge Raad du Nederlanden a suspendu l'examen de l'affaire et saisi la Cour des questions préjudicielles dont l'énoncé suit:

«1.
Les articles 20, paragraphe 2, et 17 de la sixième directive, ou les principes de la protection de la confiance légitime et de la sécurité juridique qui font partie de l'ordre juridique communautaire s'opposent-ils à ce que la TVA déduite par un assujetti – dans un cas dénué de fraude ou d'abus et sans modifier l'utilisation envisagée, au sens des points 50 et 51 de l'arrêt que la Cour de justice a rendu dans l'affaire Schloßstraße – qu'il a acquittée pour un bien (immobilier) qui lui a été livré en vue de le donner en location (opération soumise à la TVA), soit régularisée au titre de l'article 20, paragraphe 2, précité, au seul motif que l'assujetti n'a plus le droit de renoncer à l'exonération pour cette mise en location à la suite d'une modification législative, pour les années de la période de régularisation non encore écoulées au moment où cette option a disparu (en l'espèce le 1er janvier 1996 en fait)?

2.
Si la première question appelle une réponse affirmative, la modification législative est-elle inapplicable à la seule déduction de taxe visée à la première question ou est-elle également inapplicable à la taxation (par application de l'article 13, C, de la sixième directive) de la mise en location visée à la première question – jusqu'à l'expiration de la période de régularisation?»

L'affaire C-7/02

21.      La société G&S Properties BV (ci-après «G&S»), membre du Holin Groep BV cs (ci-après le «groupe Holin»), a fait construire en 1994 et en 1995, sur un terrain qui lui appartenait, un complexe immobilier de locaux à usage de bureaux, déduisant la TVA qui lui avait été facturée à ce titre.

22.      Vers la mi-1994, G&S a entrepris des négociations en vue de la location d'une partie du complexe de bureaux, ou de la vente du complexe, avec l'ING Bank NV (ci-après «ING»). Lors des négociations, G&S et ING sont convenues, en cas de conclusion du contrat de bail, d'opter pour la taxation du loyer au sens de l'article 11 de la loi de 1968. ING aurait affecté le bien loué à son activité bancaire propre, exemptée de TVA en vertu de la loi.

23.      Or, G&S soutient avoir été empêchée de louer les biens immobiliers en cause à ING avant le 31 mars 1995. Le contrat de bailn'a été conclu par écrit qu'en décembre 1995, avec effet au 1er janvier 1996.

24.      Par la suite, ING et le groupe Holin ont présenté à l'inspection des contributions une demande de dérogation à l'exemption de TVA en application de l'article 11 de la loi de 1968. Mais la demande a été rejetée, l'entrée en vigueur de la loi de 1995 ayant modifié l'article 11 de la loi de 1968 et le contrat de bail, faute d'avoir été conclu par écrit au 31 mars 1995, 18 heures, ne pouvait bénéficier du régime transitoire visé à l'article V, paragraphe 9, de la loi de 1995.

25.      L'inspection des contributions a établi en outre que le groupe Holin avait produit les biens immobiliers en question dans le cadre de sa propre entreprise, qu'il les affectait aux besoins de cette entreprise et que, si lesdits biens avaient été acquis auprès de tiers, le groupe Holin n'aurait pu déduire la TVA. Partant, l'inspection, en application de l'article 3, paragraphe 1, sous h), de la loi de 1968, fondé sur l'article 5, paragraphe 7, sous a), de la directive, a imposé au groupe Holin de payer la TVA afférente aux travaux de construction des immeubles en cause, qu'il avait déduite auparavant.

26.      Le groupe Holin a attaqué sans succès cette décision devant le Gerechtshof te Amsterdam. Il a fait appel devant le Hoge Raad, soutenant que, en lui imposant de payer la TVA en application de la disposition nationale fondée sur l'article 5, paragraphe 7, sous a), de ladirective, la décision attaquée violait les principes de la confiance légitime et de la sécurité juridique évoqués par la Cour de justice dans les arrêts précitées.

27.      Ayant des doutes sur l'interprétation à donner aux dispositions pertinentes de la directive en raison de certaines différences entre les présents faits et ceux qui sous-tendaient les deux arrêts précités, le Hoge Raad der Nederlanden a suspendu l'examen de l'affaire et saisi la Cour des questions préjudicielles dont l'énoncé suit:

«1)
Les articles 5, paragraphe 7, sous a), et 17 de la sixième directive (1), ou les principes de la protection de la confiance légitime et de la sécurité juridique s'opposent-ils – dans un cas dénué de fraude ou d'abus et sans modifier l'utilisation envisagée, au sens des points 50 et 51 de l'arrêt que la Cour de justice a rendu dans l'affaire Schloßstraße (2) – à une imposition au titre de cet article 5, paragraphe 7, sous a), dans un cas où l'assujetti a déduit la TVA qu'il a acquittée pour des biens qui lui ont été livrés ou pour des prestations qui lui ont été fournies en vue de la mise en location envisagée d'un bien immeuble déterminé, soumise à la TVA, au seul motif que l'assujetti n'a plus le droit de renoncer à l'exonération pour cette mise en location à la suite d'une modification législative?

2)
La réponse affirmative que la première question appelle éventuellement vaut-elle également pour le droit à déduction né dans la période allant de l'annonce de la modification législative visée à la première question jusqu'à son entrée en vigueur; autrement dit, si la première question appelle une réponse affirmative, les éléments du prix de revient visé à l'article 11, A, paragraphe 1, sous b), de la sixième directive, qui ont été exposés après le jour de cette annonce, peuvent-ils bel et bien être imposés au titre de cet article 5, paragraphe 7, sous a)?»

III –  La procédure devant la Cour

28.      Lors de la phase écrite de la procédure, la commune de Leusden, le royaume des Pays-Bas, la République française et la Commission ont déposé des observations dans l'affaire C-487/01, le royaume des Pays-Bas, la République française, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord et la Commission dans l'affaire C-7/02. Les deux affaires ont été jointes par ordonnance du 6 novembre 2002, en vertu de l'article 43 du règlement de procédure de la Cour. La commune de Leusden, le groupe Holin, le royaume des Pays-Bas et la Commission ont participé à l'audience qui a eu lieu le 9 janvier 2003.

IV –  Analyse juridique

A –   Les premières questions préjudicielles posées dans les affaires C-487/01 et C-7/02

29.      Par la première question posée dans l'affaire C-487/01, la juridiction de renvoi demande en substance à la Cour de lui dire si les principes de la confiance légitime et de la sécurité juridique s'opposent à ce qu'un État membre, à la suite d'une modification législative, impose, en application de l'article 20 de la directive, à un assujetti de rembourser la taxe qu'il a déduite.

30.      La première question posée dans l'affaire C-7/02 est en substance identique, à la réserve près que c'est l'article 5, paragraphe 7, sous a), de la directive qui est invoqué au lieu de son article 20.

31.      Ces deux questions étant largement similaires, elles seront examinées conjointement ci-après.

Synthèse des observations présentées à la Cour

32.      La commune de Leusden rappelle qu'elle a conçu des plans d'investissement et fixé le loyer de la location du terrain de sport au club de hockey en se fiant, à l'époque de l'exécution des travaux de restructuration dudit terrain, à la législation en vigueur, qui lui reconnaissait le droit de déduire intégralement la TVA grevant les dépenses afférentes à ces travaux. En l'absence, dans le contrat de bail, d'une clause qui lui permette, en cas de modification législative telle que celle qui est examinée ici, d'adapter le loyer de façon à faire supporter au locataire la charge financière en découlant, elle se verrait contrainte,pour ne pas subir cette charge, d'engager un recours en justice, à l'issue à l'évidence incertaine, afin de réviser le contrat en vertu de l'article 258 du livre VI du code civil néerlandais.

33.     À l'appui de ses motifs, la commune de Leusden renvoie à l'arrêt Schloßstraße et aux conclusions de l'avocat général Geelhoed dans l'affaire Sudholz  (9) . Il en découlerait que les principes de la sécurité juridique et de la protection de la confiance légitime s'opposent en règle générale à ce que le droit à déduction de la TVA, une fois acquis, puisse être remis en cause par une modification législative ultérieure. À la lumière des principes susmentionnés, la commune de Leusden conclut qu'il est impossible d'exiger d'elle une régularisation, au sens de l'article 20 de la directive, de la TVA déduite. Partant, il y a lieu, selon elle, de répondre par l'affirmative à la première question.

34.      Le groupe Holin affirme lui aussi s'être fié, au moment où il a engagé les travaux de construction du bâtiment donné par la suite en location à ING, à la faculté d'opter pour l'assujettissement de cette location à la TVA sur la base de la version qui était alors en vigueur de l'article 11 de la loi de 1968. Ce bâtiment aurait été érigé spécialement en vue d'être loué à ING, ainsi que le montre le fait qu'il a été pourvu de coffres-forts. De plus, selon le groupe, il se serait lié dès le 31 mars 1995, par un engagement antérieur au contrat, à l'égard d'ING, sur la location future des biens immeubles et sur l'assujettissement du loyer à la TVA.

35.      Partant, le groupe Holin considère que, à la lumière des principes de la confiance légitime et de la sécurité juridique, et plus particulièrement de l'application qu'en a faite la Cour dans l'arrêt Schloßstraße, précité, la modification de l'article 11 de la loi de 1968 ne permettait pas à l'administration fiscale néerlandaise d'exiger le remboursement de la TVA qu'il avait déduite, que ce soit par la voie d'une régularisation au sens de l'article 20 de la directive ou par celle de l'imposition d'une taxe en application de l'article 5, paragraphe 7, sous a), de la directive. Il conclut donc que la première question posée dans l'affaire C-7/02 appelle une réponse affirmative.

36.      Le royaume des Pays-Bas, la République française et la Commission, de même que, pour l'affaire C-7/02, seule affaire dans laquelle il ait présenté des observations, le Royaume-Uni, ne sont pas de cet avis.

37.      Pour ce qui est, d'abord, de l'affaire C-487/01, le royaume des Pays-Bas observe que, d'après l'article 20 de la directive, il y a lieu de procéder à une régularisation de la déduction de la TVA dès lors que les biens ou les services concernés par la déduction n'ont pas été utilisés, ou l'ont été d'une façon différente de celle que l'assujetti a déclarée à l'origine. Cette règle vaudrait non seulement dans les cas où l'utilisation réelle des biens ou des services diffère de celle qui était prévue à l'origine du fait de la volonté de l'assujetti, mais aussi dans les cas où cette utilisation est rendue impossible par une modification législative. De fait, poursuit le royaume des Pays-Bas, si le législateur avait entendu exclure que des circonstances étrangères à la volonté de l'assujetti puissent déclencher une régularisation, il aurait dû le dire expressément. Au contraire, l'article 20, paragraphe 1, sous b), de la directive prévoit que, même en cas de vol, c'est-à-dire dans une circonstance manifestement étrangère à la volonté de l'assujetti, les États membres sont en droit d'exiger le remboursement de la déduction.

38.      Certes, poursuit le royaume des Pays-Bas, suivi à cet égard par la République française et par la Commission, l'article 20 de la directive n'a pas l'ambition d'énumérer tous les cas de régularisation, mais seulement quelques-uns, qui ont valeur d'exemples, comme l'indique l'emploi du mot «notamment» au paragraphe 1, première phrase, de cette disposition. La directive n'exclurait donc pas l'hypothèse qu'une régularisation ait sa source dans une modification législative.

39.      Par ailleurs, soulignent le royaume des Pays-Bas et la Commission, la présente affaire se distingue de celle dont la Cour a eu à connaître dans l'affaire Schloßstraße. Dans celle-ci, il était question en effet d'une modification législative qui mettait en cause, avec effet rétroactif, une déduction déjà accordée, privant ainsi totalement l'assujetti d'un droit à déduction de la TVA qu'il avait acquis précédemment, alors que, dans le présent cas, il s'agit de régulariser légitimement une déduction, sur la base de l'article 20 de la directive, sans effet rétroactif mais seulement pour les années de la période décennale de régularisation qui n'avaient pas encore commencé à courir à la date d'entrée en vigueur de la modification législative.

40.      Le royaume des Pays-Bas soutient encore que la commune de Leusden aurait pu éviter le préjudice économique provoqué par la régularisation en convenant d'une révision du loyer avec le club de hockey ou en saisissant la justice sur la base de l'article 258 du livre VI du code civil néerlandais.

41.      Il ajoute enfin que, si la Cour excluait la possibilité de procéder à une régularisation au sens de l'article 20 de la directive, la commune de Leusden bénéficierait d'un droit à déduction portant sur des biens dont l'utilisation est exemptée de TVA. D'après lui, ce serait contraire au principe – qui apparaît aux points 44 de l'arrêt Becker  (10) , 14 à 16 de l'arrêt Weissgerber  (11) et 23 de l'arrêt Monte dei Paschi di Siena  (12) – en vertu duquel un assujetti qui entend exercer une activité exonérée ne saurait faire valoir de droit à déduction.

42.      Pour ce qui est de l'affaire C-7/02, le royaume des Pays-Bas observe que l'assujettissement du groupe Holin à la TVA en application de l'article 5, paragraphe 7, sous a), de la directive ne serait qu'une conséquence indirecte de la modification législative en cause. D'après cette disposition, en effet, la taxe deviendrait exigible au moment où l'assujetti affecte le bien aux besoins de son entreprise. En l'occurrence, c'est ce qui se serait produit au 1er janvier 1996, date d'entrée en vigueur du contrat de bail, c'est-à-dire à une date postérieure à la modification législative. La présente affaire se distinguerait donc substantiellement de l'affaire Schloßstraße dans laquelle l'assujetti s'était vu priver d'un droit à déduction déjà acquis par une modification législative dotée d'un effet rétroactif.

43.      Poursuivant, le royaume des Pays-Bas constate que l'assujettissement du groupe Holin à la TVA en vertu de l'article 5, paragraphe 7, sous a), de la directive reposerait sur la considération que, s'il avait acquis l'immeuble en question d'un tiers à la même date pour le donner en location à ING, il n'aurait pas eu le droit de déduire la TVA sur le prix d'achat et cela dans la mesure où l'immeuble est affecté à une activité, la location à une banque, qui ne peut plus être soumise à la TVA en vertu de la législation qui vient d'entrer en vigueur. Partant, l'assujettissement à la TVA dans le cas d'espèce ne violerait pas les principes de la protection de la confiance légitime et de la sécurité juridique.

44.      La Commission s'est ralliée à cette thèse à l'audience, s'écartant ainsi de la position qu'elle avait défendue dans ses observations écrites  (13) .

45.      Quant au Royaume-Uni, il fait valoir que le but de l'article 5, paragraphe 7, sous a), de la directive n'est pas de régulariser la déduction de la TVA mais de respecter le principe de la neutralité fiscale. De plus, observe-t-il, il incombe aux assujettis, lorsqu'ils passent des contrats avec des tiers, d'y insérer des clauses destinées à éviter les effets négatifs éventuels de modifications législatives à venir. Or, le groupe Holin a renoncé à cette précaution lorsqu'il a négocié le contrat de bail avec ING. Le Royaume-Uni remarque enfin que les circonstances de l'affaire Schloßstraße ne sont pas comparables à celles de la présente espèce, en ce que celle-ci ne porte pas sur l'obligation de rembourser la TVA que l'assujetti avait déduite auparavant en raison de la survenance d'une modification législative, mais sur la possibilité d'exiger le paiement de la TVA en application de l'article 5, paragraphe 7, sous a), de la directive.

46.      Pour ce qui concerne les deux affaires, le royaume des Pays-Bas se réfère à la jurisprudence de la Cour et, en particulier, aux arrêts Racke  (14) , Decker  (15) et Zuckerfabrik Süderdithmarschen et Zuckerfabrik Soest  (16) , selon lesquels il est possible, exceptionnellement, d'admettre que les effets d'un acte communautaire dans le temps partent d'une date antérieure à sa publication lorsque le but à atteindre l'exige et lorsque la confiance légitime des intéressés est dûment respectée. D'après le royaume des Pays-Bas, ce serait le cas dans les deux affaires. D'abord, la loi de 1995 visait à mettre fin à certains abus que permettait l'article 11 de la loi de 1968 avant d'être modifié. Ensuite, la loi avait prévu un régime transitoire applicable à de nombreux contrats de bail en cours. Toutefois, ce régime transitoire ne s'appliquait pas à des contrats de bail qui – tels que celui passé entre la commune de Leusden et le club de hockey – prévoyaient un loyer excessivement bas par rapport au montant de l'investissement dans l'immeuble supporté par le bailleur ou qui – tels que celui passé entre le groupe Holin et ING – n'avaient pas été mis par écrit avant le 31 mars 1995, afin d'éviter que puissent bénéficier de la règle abrogée des contrats dont il y avait lieu de présumer qu'ils avaient été conclus dans le but de commettre les abus auxquels la même loi entendait mettre fin. Enfin, le principe de la confiance légitime aurait été respecté dès lors que le ministère des Finances néerlandais avait fait connaître, dès le 21 décembre 1994, l'intention de modifier les dispositions concernées, intention qu'il avait confirmée tant dans une réponse à une question parlementaire du 21 mars 1995 que dans un communiqué de presse du 31 mars 1995.

47.      La République française et le royaume des Pays-Bas soutiennent enfin qu'il serait porté atteinte au principe de neutralité fiscale si la commune de Leusden et le groupe Holin n'étaient pas soumis, l'une à la régularisation au sens de l'article 20 de la directive, l'autre à la TVA au sens de l'article 5, paragraphe 7, sous a), de la directive. D'après ces États membres, cela entraînerait en effet une discrimination injustifiée envers tous les assujettis qui voudraient, après l'entrée en vigueur de la loi de 1995, faire effectuer des travaux sur des biens immeubles qu'ils ont l'intention de donner en location. Ils n'auraient en effet aucun droit à déduire la TVA bien qu'ils se trouvent dans le même cas que la commune de Leusden et le groupe Holin.

Appréciation

48.      Avant de répondre aux questions posées, il nous semble utile de rappeler quelques principes que la Cour a énoncés quant au droit à déduire la TVA visé à l'article 17 de la directive.

49.      Ce qui ressort tout d'abord de la jurisprudence, c'est que ce droit naît au moment où la TVA devient exigible en application de l'article10 de la directive et que, «[p]ar conséquent, seule la qualité en laquelle un particulier agit à ce moment peut déterminer l'existence d'un droit à déduction»  (17) .

50.      La Cour a précisé ensuite que celui qui acquiert des biens ou des services dans l'intention, confirmée par des éléments objectifs, de les affecter à l'exercice d'une activité économique agit en qualité d'assujetti, au sens de l'article 4 de la directive, et acquiert ainsi le droit de déduire la TVA qui grève ses dépenses  (18) . Ce droit, à défaut de dispositions de la directive qui permettent aux États membres d'en restreindre la portée, peut être exercé immédiatement sur toutes les taxes qui ont grevé les opérations effectuées en amont, sous réserve d'éventuelles régularisations postérieures en application de l'article 20 de la directive  (19) .

51.      Mais il ressort avant tout de nombreux arrêts de la Cour que les principes de la sécurité juridique et de la protection de la confiance légitime s'opposent, en règle générale, à ce que, une fois acquis, le droit à déduction de la TVA soit ensuite soumis à des restrictions en raison de faits, circonstances ou événements étrangers à la volonté de l'assujetti  (20) .

52.      Plus précisément, pour ce qui nous intéresse ici, la Cour a affirmé, dans l'arrêt Schloßstraße, que, «dès lors que la juridiction nationale constate que l'intention de commencer des activités économiques donnant lieu à des opérations taxées a été déclarée de bonne foi et que cette intention est confirmée par des éléments objectifs, l'assujetti bénéficie du droit de déduire immédiatement la TVA due ou acquittée sur les biens ou services fournis en vue des activités économiques qu'il envisage de réaliser et les principes de la protection de la confiance légitime et de la sécurité juridique s'opposent à ce qu'une modification législative postérieure à la fourniture de ces biens ou de ces services le prive, avec effet rétroactif, d'un tel droit»  (21) .

53.      Cela dit, il convient avant tout, pour répondre aux deux questions examinées, de vérifier si, à la lumière de la jurisprudence que nous venons de rappeler, la commune de Leusden et le groupe Holin ont effectivement acquis, avant le 29 décembre 1995, c'est-à-dire avant l'entrée en vigueur de la modification de l'article 11 de la loi de 1968, un droit à déduire la TVA en vertu de l'article 17 de la directive. Il faudra ensuite rechercher, toujours à la lumière de cette jurisprudence, si l'administration fiscale néerlandaise avait le pouvoir, en l'occurrence, de réclamer à la commune de Leusden la régularisation de la TVA au sens de l'article 20 de la directive et/ou de taxer le groupe Holin en application de l'article 5, paragraphe 7, sous a).

Quant à l'acquisition, par la commune de Leusden et le groupe Holin, d'un droit à déduire la TVA en vertu de la directive

54.      Pour ce qui est du premier point évoqué ci-dessus, nous rappelons au préalable que la question de savoir si «un assujetti, dans un cas particulier, a acquis des biens pour les besoins de ses activités économiques» et donc, pour autant que ces activités soient soumises à la TVA, s'il a acquis un droit à déduction au sens de l'article 17 de la directive «est une question de fait qui doit être appréciée compte tenu de l'ensemble des données de l'espèce, parmi lesquelles figurent la nature des biens visés et la période écoulée entre l'acquisition des biens et leur utilisation aux fins des activités économiques de l'assujetti»  (22) .

55.      En appliquant ces principes à l'affaire C-487/01, nous remarquons d'emblée que, d'après ses dires, la commune de Leusden avait l'intention, dès le moment où elle a entrepris les travaux de restructuration du terrain de sport, non seulement de le donner en location, mais aussi d'exercer, avec le locataire futur, l'option d'assujettissement du loyer à la TVA, sur la base du texte alors en vigueur de l'article 11 de la loi de 1968. Que cette intention existait toujours au moment où la TVA afférente à ces travaux est devenue exigible au sens de l'article 10 de la directive, lequel moment est antérieur à l'entrée en vigueur de la loi de 1995, fait que personne ne met en doute et qui nous semble de plus confirmé amplement par les circonstances suivantes: les travaux ont été terminés en 1991, le terrain de sport a été donné en location au club de hockey à compter du 1er janvier 1992, et le choix de l'assujettissement du loyer à la TVA a été effectivement exercé.

56.      Il faut donc reconnaître, sur la base des principes rappelés ci-dessus, que la commune de Leusden a acquis, en vertu de l'article 17 de la directive, le droit de déduire la TVA grevant les travaux en question et qu'elle a donc exercé légitimement ce droit dans sa plénitude pendant les années 1990 et 1991.

57.      Cela vaut aussi pour le groupe Holin, lequel, d'après l'ordonnance de renvoi, a acquis, au sens de l'article 17 de la directive, le droit de déduire la TVA grevant les travaux de construction de l’immeuble donné en location à ING  (23) et a aussi exercé ce droit dans sa plénitude  (24) .

58.      Cela étant dit, nous en venons maintenant au point de savoir si, dans les cas qui nous intéressent, l'administration fiscale néerlandaise avait le pouvoir de réclamer à la commune de Leusden la régularisation de la TVA en application de l'article 20 de la directive et/ou de taxer le groupe Holin en application de l'article 5, paragraphe 7, sous a).

L'applicabilité de l'article 20 de la directive à la commune de Leusden

59.      Pour ce qui est de la régularisation au sens de l'article 20 de la directive, il ne nous semble pas douteux que la seule raison pour laquelle elle a été exigée de la commune de Leusden est que, à la suite de l'entrée en vigueur de la loi de 1995, la location du terrain de sport au club de hockey, aux fins de laquelle la commune avait acquis et exercé le droit de déduction au sens de l'article 17 de la directive, ne pouvait plus désormais être assujettie à la TVA.

60.      En d'autres termes, il nous semble indéniable qu'il existe en l'occurrence un lieu de causalité entre l'entrée en vigueur de cette loi et la demande faite à la commune de Leusden de rembourser, par la voie d'une régularisation au sens de l'article 20 de la directive, la TVA précédemment déduite en vertu de ce droit.

61.      Or, l'application en pareilles circonstances d'une régularisation au sens de l'article 20 de la directive équivaut, à notre avis, à révoquer le droit à déduction qu'un assujetti avait acquis en vertu de la directive, pour la seule et unique raison qu'une modification législative a supprimé la possibilité de soumettre une certaine activité à la TVA.

62.      Or, une telle situation nous semble en parfaite opposition avec les observations de la Cour dans l'affaire Schloßstraße, à savoir qu'une modification de la législation nationale ne saurait priver le redevable d'un droit à déduction qu'il a acquis de bonne foi en vertu de la directive (voir le point 52 ci-dessus).

63.      Et pourtant, en dépit de cette jurisprudence, le royaume des Pays-Bas soutient que l'article 20 de la directive est applicable aussi dans des cas où l'utilisation effective des biens ou des services diffère de celle qui était prévue à l'origine pour des raisons étrangères à la volonté de l'assujetti, telles que le vol du bien, et il n'y aurait donc pas de raison de ne pas appliquer cette disposition également dans le cas de modifications législatives.

64.      Nous ne voyons pourtant pas comment l'ensemble du dossier pourrait confirmer la thèse du royaume des Pays-Bas. La règle générale de l'article 20, sous b), de la directive est en fait qu'il n'y a pas lieu à régularisation en cas de «destruction, de perte ou de vol dûment prouvés ou justifiés», c'est-à-dire dans des circonstances qui sont manifestement étrangères à la volonté de l'assujetti, et c'est uniquement dans les cas de vol que les États membres peuvent déroger à la règle. Il nous semble donc que la disposition est plutôt de nature à conforter la thèse qui s'oppose à celle du royaume des Pays-Bas, parce qu'elle confirme que, sous réserve des dérogations explicitement prévues dans cet article, il n'est pas possible de procéder à une régularisation dans un cas où l'impossibilité d'affecter un bien à l'activité imposable prévue initialement est due à une cause étrangère à la volonté de l'assujetti.

65.      Le royaume des Pays-Bas et la Commission font valoir encore cependant – et, selon nous, il s'agit là du pivot de leur argumentation – que l'article 20 de la directive n'épuise pas tous les cas de rectification. La première phrase du paragraphe 1 de cette disposition, et, en particulier, l'emploi du mot «notamment», indiquerait clairement que l'énumération qui suit n'est pas à comprendre comme limitative. La directive n'exclurait donc pas l'hypothèse qu'une régularisation ait sa source dans une modification législative.

66.      Nous devons cependant observer que, même s'il ne nous paraît pas douteux que l'article 20 comporte une énumération non limitative des circonstances susceptibles d'entraîner une régularisation, il nous semble pour le moins difficile de soutenir que des modifications législatives pourraient entrer dans les cas non prévus expressément, dans la mesure où cela remettrait en question des principes fondamentaux du droit communautaire. En effet, il nous semble évident, étant donné les conséquences d'une régularisation dans cette éventualité, que le législateur aurait dû l'envisager expressément s'il avait entendu l'inclure dans les dispositions de l'article 20. Par son silence, il entendait donc forcément exclure cette hypothèse, ce qui est du reste logique au regard de la règle générale que nous venons de rappeler.

67.      S'il en est bien ainsi, il nous semble que tombe l'allégation du royaume des Pays-Bas et de la Commission, selon laquelle le présent cas se distinguerait de toute façon des circonstances de l'affaire Schloßstraße, du fait que, dans celle-ci, il était question d'une modification législative qui portait atteinte, avec effet rétroactif, à une déduction déjà accordée alors que, dans le cas d'espèce, il s'agit de régulariser légitimement une déduction, en application de l'article 20 de la directive, et seulement pour les années de la période décennale de régularisation, qui n'avaient pas encore commencé à courir à la date de l'entrée en vigueur de la modification législative.

68.      Cette thèse est insoutenable, d'abord parce qu'elle repose sur l'interprétation extensive de l'article 20 que nous venons de réfuter mais aussi parce que, si fine que soit l'argumentation, on ne voit pas comment on pourrait réfuter le caractère rétroactif d'une modification législative pour la seule raison qu'elle ne s'avance pas jusqu'à mettre fin à des situations juridiques désormais caduques mais qu'elle «se limite» à exclure pour l'avenir la jouissance d'un droit légitimement acquis dans le régime précédent.

69.      Enfin, cette thèse est insoutenable, nous semble-t-il, parce qu'elle repose sur un cercle vicieux. D'après la Commission, en effet, la Cour a mentionné, dans l'arrêt Schloßstraße, l'application éventuelle de l'article 20 de la directive comme l'un des cas où il est permis de révoquer un droit à déduction. La Commission en déduit la légitimité de toute révocation de ce droit sur la base de cette disposition et, partant, aussi la révocation consécutive à la modification législative en question. Qu'il nous soit cependant permis d'observer que, dans sa démonstration, la Commission part précisément de ce qu'elle veut établir, parce que, en l'occurrence, il ne s'agit pas de savoir si l'article 20 permet de revenir sur un droit à déduction (ce que personne ne conteste) mais s'il permet de le faire en toute circonstance, et en particulier dans le cas d'une modification législative qui, avec un effet rétroactif, supprime la possibilité d'assujettir une certaine activité à la TVA. Or, ainsi que nous l'avons expliqué ci-dessus, l'article 20 ne le permet pas et le renvoi à l'arrêt Schloßstraße, où cette disposition est employée à d'autres fins et dans un autre sens, ne permet pas d'inférer le contraire.

70.      Ainsi qu'on l'a vu, le royaume des Pays-Bas tente pourtant aussi de justifier, dans des termes plus généraux et convaincants, la légitimité du caractère rétroactif de la modification législative en cause. Mais nous y reviendrons plus loin, parce que l'argumentation concerne surtout l'affaire C-7/02 (voir les points 85 à 101 ci-après).

71.      Nous allons maintenant examiner d'autres arguments évoqués par le royaume des Pays-Bas à l'appui de sa thèse. Il soutient d'abord que le principe de la confiance légitime n'aurait pas été violé parce que, dès décembre 1994, le ministère des Finances avait annoncé l'intention de modifier l'article 11 de la loi de 1968, intention confirmée ensuite le 21 mars 1995 dans une réponse à une question parlementaire et le 31 mars 1995 dans un communiqué de presse.

72.      Cet argument ne nous semble pas davantage admissible. Le dossier indique que la commune de Leusden a acquis le droit à déduction en cause bien avant les déclarations dont nous venons de faire état. Partant, aucune de celles-ci n'a pu avoir d'incidence sur la constitution, dans le chef de la commune, d'une confiance légitime dans l'imprescriptibilité de ce droit.

73.      Le royaume des Pays-Bas cite ensuite à l'appui de sa thèse les arrêts Becker  (25) , Weissgerber  (26) et Monte dei Paschi di Siena  (27) , dont ressort le principe selon lequel celui qui entend exercer une activité exonérée ne peut prétendre à un droit à déduction.

74.      On objectera cependant que, en l'occurrence, ainsi que nous l'avons expliqué ci-dessus, la commune de Leusden a acquis ce droit avant que la location du terrain de sport ne soit exonérée de la TVA.

75.      Nous ne sommes pas non plus convaincu par l'argument, défendu par la République française et le royaume des Pays-Bas, selon lequel, si la commune de Leusden échappait à toute obligation de régulariser, cela entraînerait une discrimination injustifiée envers tous les assujettis qui, bien qu'ils se trouvent après l'entrée en vigueur de la loi de 1995 dans le même cas que la commune de Leusden avant cette entrée en vigueur, ne pourraient pas, à la différence de cette dernière, bénéficier du droit de déduire la TVA.

76.      Il nous semble en effet évident qu'une telle «disparité de traitement» est la conséquence naturelle de toute règle nouvelle qui, venant modifier une règle existante, dispose seulement pour l'avenir, en application du principe de non-rétroactivité, établissant ainsi inévitablement une différence entre les situations juridiques déjà acquises sous l'empire de la règle modifiée et les situations qui naîtront ensuite.

77.     À la lumière des considérations énoncées ci-dessus, nous estimons donc que les principes de la protection de la confiance légitime et de la sécurité juridique s'opposent à ce que, dans les circonstances de l'espèce, une régularisation au sens de l'article 20 de la directive soit appliquée à la commune de Leusden.

L'applicabilité au groupe Holin de l'article 5, paragraphe 7, sous a), de la directive

78.      Venons-en maintenant à l'examen, dans le cas d'espèce, de l'applicabilité au groupe Holin de l'article 5, paragraphe 7, sous a), de la directive. Nous rappelons que celui-ci a acquis, avant l'entrée en vigueur de la loi de 1995, un droit à déduction de la TVA afférente aux travaux de construction de l'immeuble donné en location à ING (voir le point 57 ci-dessus).

79.      Nonobstant, le royaume des Pays-Bas, le Royaume-Uni et la Commission affirment que la TVA afférente à ces travaux serait applicable au groupe Holin en vertu de la directive parce que le fait générateur de la taxe – c'est-à-dire l'«affectation» par le groupe Holin «aux besoins de son entreprise» du bien immeuble en question selon les termes de l'article 5, paragraphe 7, sous a), de la directive – qui coïnciderait en l'occurrence avec le début de la prise en location du bien immeuble par ING, est intervenu le 1er janvier 1996, soit à une date à laquelle la loi de 1995 était déjà en vigueur. En substance, ils réfutent donc le caractère rétroactif de cette loi.

80.      Or, cet argument ne nous semble pas fondé. Même en admettant, en effet, que soit exacte la thèse selon laquelle, dans les circonstances présentes, le fait générateur de la taxe au sens de l'article 5, paragraphe 7, sous a), de la directive soit survenu postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi de 1995, cela n'enlève rien au fait que, avant cette entrée en vigueur, un autre fait générateur de la taxe au sens de la directive – à savoir, l’exécution (et la facturation correspondante) des travaux de construction du bien immobilier au groupe Holin – était déjà survenu, et que ce groupe avait déjà acquis à cette occasion un droit à déduction de la TVA.

81.      Si, en pareilles circonstances, on admettait que l'article 5, paragraphe 7, sous a), de la directive s'applique au groupe Holin pour les mêmes travaux, cela reviendrait en fait, comme l'ont remarqué à juste titre la juridiction de renvoi  (28) et la Commission dans ses observations écrites, à contraindre le groupe Holin à rembourser la TVA précédemment déduite et, partant, à lui retirer un droit à déduction acquis avant l'entrée en vigueur de la loi.

82.     À notre avis, il ne saurait faire de doute que c'est justement à la suite de l'entrée en vigueur de cette loi que les conditions de l'applicabilité au groupe Holin de l'article 5, paragraphe 7, sous a), de la directive ont été remplies. Cette disposition, en effet, ne s'applique que si l'acquisition éventuelle auprès d'un tiers du bien affecté par un assujetti aux besoins de son entreprise ne lui donne pas droit à la déduction intégrale de la TVA.

83.      En effet, c'est uniquement parce que la loi de 1995 a supprimé la possibilité de soumettre à la TVA la location du bien immeuble à ING que le groupe Holin ne pourrait plus désormais faire valoir aucun droit à déduction de la TVA s'il avait acquis ce bien auprès de tiers.

84.      Il existe donc, à notre sens, un lien de causalité précis entre l'entrée en vigueur de la loi de 1995 et la révocation du droit à déduction de la TVA que le groupe Holin avait acquis précédemment par son assujettissement à la TVA en application de l'article 5, paragraphe 7, sous a), de la directive. Ce qui confirme, à notre avis, qu'il a été fait en l'occurrence une application rétroactive de cette loi.

85.      Le royaume des Pays-Bas fait valoir encore que, en tout état de cause, seraient réunies en l'occurrence les conditions qui, à la lumière de la jurisprudence de la Cour rapportée ci-dessus (voir le point 46), justifient l'adoption d'un acte communautaire doté d'effet rétroactif. D'après cette jurisprudence, en effet, une telle possibilité est admise exceptionnellement «lorsque le but à atteindre l'exige et lorsque la confiance légitime des intéressés est dûment respectée»  (29) .

86.      Ces conditions, de l'avis du royaume des Pays-Bas, seraient l'une et l'autre pleinement satisfaites en l'occurrence. D'une part, en effet, les innovations de la loi de 1995 visaient à mettre fin à certains abus découlant de l'application de l'article 11 de la loi de 1968. D'autre part, les assujettis avaient été informés de la possibilité que cette disposition soit modifiée par plusieurs déclarations du ministère des Finances néerlandais ainsi que par un communiqué de presse du 31 mars 1995.

87.      Or, pour ce qui est des déclarations du ministère des Finances néerlandais, nous remarquons que, s'il s'avérait, comme c'est le cas pour la commune de Leusden (voir le point 74 ci-dessus), que le groupe Holin a acquis le droit à déduction de la TVA à une date antérieure à ces déclarations, il faudrait, en toute logique, exclure que celles-ci aient pu empêcher la constitution, dans le chef du groupe, d'une confiance légitime dans l'imprescriptibilité de ce droit.

88.      La seconde question préjudicielle  (30) , toutefois, donne à penser que le groupe Holin a acquis le droit en question après ces déclarations.

89.      Même dans ce cas, on serait cependant enclin à exclure, comme le fait la Commission dans ses observations écrites, qu'un communiqué de presse, portant sur un simple projet de loi, dont le sort était donc encore incertain, ait pu avoir une incidence sur la constitution, dans le chef de la commune, d'une confiance légitime dans l'imprescriptibilité d'un droit acquis sous la législation en vigueur.

90.      Même en admettant que le groupe Holin, qui devait désormais s'attendre à la modification législative à venir, ne pouvait plus avoir une confiance totale dans l'imprescriptibilité de ce droit, il faudrait encore, en l'occurrence, que soit remplie l'autre condition que la Cour exige pour admettre la rétroactivité d'une mesure, à savoir que cette rétroactivité soit indispensable pour en réaliser la finalité déclarée  (31) .

91.     À cet égard, on se rappelle que le royaume des Pays-Bas se contente d'affirmer que l'objectif de la loi de 1995 était de combattre les abus découlant de l'inadaptation de la loi en vigueur précédemment.

92.      Or, outre le fait que la juridiction de renvoi a expressément exclu, dans la question préjudicielle, que le groupe ait commis en l'occurrence des fraudes ou des abus, il nous semble que la thèse défendue par le royaume des Pays-Bas ne tire pas toutes les conséquences de la portée réelle de la jurisprudence invoquée.

93.      Il nous semble, en effet, que ce serait faire piètre cas de cette jurisprudence que de conclure que la seule nécessité de poursuivre l'objectif déclaré d'une mesure puisse suffire en soi à justifier que cette mesure lèse des droits acquis, pour la raison évidente que ce qu'il convient de justifier ici, c'est justement cette lésion et non la simple adoption de la mesure. Autrement dit, ce qu'il faut démontrer, c'est que le fait de doter la mesure d'effets rétroactifs constitue la conséquence nécessaire de la poursuite des objectifs visés par la mesure, conséquence que, de surcroît, il n'est pas possible d'éviter autrement et qui est proportionnée au but recherché.

94.      En l'espèce, ainsi que la Commission l'a relevé elle aussi dans ses observations écrites, il ne nous semble pas que le royaume des Pays-Bas ait démontré que ces conditions aient été remplies ni que cela ressorte avec évidence d'un examen objectif de l'affaire. Il nous paraît plutôt que c'est l'inverse qui est vrai, compte tenu de ce que nous avons dit de l'irréprochabilité du comportement du groupe Holin pour ce qui nous intéresse ici.

95.      Le Royaume-Uni soutient cependant que la rétroactivité de la loi de décembre 1995 à la date du 31 mars 1995, c'est-à-dire au moment où le ministère des Finances a émis le communiqué de presse qui annonçait l'intention d'adopter cette loi, était nécessaire afin d'éviter un type d'abus – connu au Royaume-Uni sous le nom de «prepayment scheme» (paiement anticipé) – qui, sinon, pourrait être commis par certains assujettis dans la période qui sépare l'annonce de la loi de son entrée en vigueur.

96.      Ce type d'abus consisterait en particulier, de la part d'une entreprise, à fixer artificiellement, avec l'aide d'une ou de plusieurs entreprises complaisantes, le fait générateur de la taxe au sens de la directive à une date antérieure à l'entrée en vigueur de la loi.

97.      Cet argument ne nous convainc cependant pas davantage. En fait, même s'il nous semble tout à fait raisonnable et souhaitable de sanctionner ce type d'abus, nous ne pensons pas que cette fin impliquait nécessairement de conférer un effet rétroactif à la loi de 1995.

98.      En effet, comme l'a dit la Cour à plusieurs reprises, il est possible de dégager de la directive un principe selon lequel «[d]ans les situations frauduleuses ou abusives [...] l'administration fiscale peut demander, avec effet rétroactif, le remboursement des sommes déduites [...]»  (32) .

99.      Le fait, pour une entreprise, de fixer artificiellement la date à laquelle survient le fait générateur de la taxe nous apparaît comme l'exemple même d'une situation frauduleuse et abusive de nature à justifier, en application de la directive, la restitution intégrale de la TVA que cette entreprise a pu déduire.

100.    Or, la juridiction de renvoi a exclu en l'occurrence, ainsi que nous l'avons rappelé ci-dessus, que le groupe Holin se soit rendu coupable de fraudes ou d'abus. Partant, si la loi de 1995 lui était appliquée, il serait injustement privé, avec effet rétroactif, d'un droit à déduction acquis de bonne foi.

101.    Les considérations qui précèdent nous amènent donc à conclure qu'il n'est pas justifié de faire en l'occurrence une application rétroactive de la loi de 1995.

102.    Pour les raisons que nous avons déjà exposées ci-dessus (voir les points 75 et 76), nous ne pensons pas non plus pouvoir admettre l'argument de la République française et du royaume des Pays-Bas selon lequel le non-assujettissement du groupe Holin à la taxe en cause entraînerait une discrimination injustifiée envers tous les assujettis qui, bien qu'ils se trouvent après l'entrée en vigueur de la loi de 1995 dans le même cas que le groupe Holin avant cette entrée en vigueur, ne pourraient pas, à la différence de ce dernier, bénéficier du droit de déduire la TVA.

103.    Pour les raisons que nous avons déjà énoncées, nous estimons que, dans le cas d'espèce, les principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime s'opposent également à l'application au groupe Holin de l'article 5, paragraphe 7, sous a), de la directive.

Conclusions sur les deux questions examinées

104.    Nous fondant sur les considérations qui précèdent, nous estimons donc qu'il convient de répondre à la première question préjudicielle dans les deux affaires que les principes de la protection de la confiance légitime et de la sécurité juridique s'opposent à l'application d'une régularisation au sens de l'article 20 de la directive ou d'une taxe au sens de son article 5, paragraphe 7, sous a), à un assujetti au seul motif qu'une modification législative l'empêche désormais de soumettre à la TVA l'activité aux fins de laquelle il avait acquis un droit à déduction au sens de la directive.

B –   Sur la seconde question préjudicielle de l'affaire C-487/01

105.    Par cette question, la juridiction de renvoi demande en substance à la Cour de lui dire si, en cas de réponse affirmative à la première question, la loi de 1995 est inapplicable, jusqu'à l'expiration de la période de régularisation, à des locataires qui ont opté pour la taxation du loyer sur la base de la règle en vigueur, entraînant la conséquence que, pendant cette période, le club de hockey resterait tenu de payer la TVA sur le loyer du terrain de sport.

106.    D'après le royaume des Pays-Bas, il n'y a pas lieu de répondre à cette question puisque la réponse à la première question est négative.

107.    La République française est du même avis. Cependant, elle déclare que, si la Cour répondait affirmativement à la première question, la seconde appellerait la même réponse, en vertu du principe de la neutralité fiscale et afin de garantir le bon fonctionnement du système de la TVA.

108.    La commune de Leusden et la Commission n'ont pas présenté d'observation sur cette question.

109.    Pour ce qui nous concerne, nous rappellerons d'emblée que, s'«il appartient au seul juge national [...] d'apprécier, au regard des particularités de l'affaire, tant la nécessité d'une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre son jugement que la pertinence des questions qu'il pose à la Cour»  (33) , celle-ci n'en a pas moins, à plusieurs reprises, «estimé ne pas pouvoir statuer sur une question préjudicielle posée par une juridiction nationale lorsqu'il apparaît de manière manifeste que l'interprétation ou l'appréciation de la validité d'une règle communautaire, demandées par la juridiction nationale, n'ont aucun rapport avec la réalité ou l'objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique»  (34) .

110.    D'après cette jurisprudence, «[s]'il apparaît que la question posée n'est manifestement pas pertinente pour la solution de ce litige, la Cour doit constater le non-lieu à statuer»  (35) . La Cour a dit aussi, dans la même optique, que, «[a]fin de [lui] permettre de remplir sa mission conformément au traité, il est indispensable que les juridictions nationales expliquent, lorsque ces raisons ne découlent pas sans équivoque du dossier, les raisons pour lesquelles elles considèrent qu’une réponse à leurs questions est nécessaire à la solution du litige»  (36) .

111.    Cela dit, nous remarquons que ni l'ordonnance de renvoi, ni aucune autre pièce du dossier ne livrent d'indices susceptibles d'expliquer en quoi une réponse éventuelle à la question posée aiderait la juridiction de renvoi à résoudre le litige dont elle est saisie.

112.    Il ressort en fait du dossier que le litige entre la commune de Leusden et l'administration fiscale néerlandaise est né exclusivement de la décision de la seconde d'exiger de la première une régularisation en vertu de l'article 20 de la directive. Il n'apparaît cependant pas que la juridiction de renvoi se soit préoccupée de savoir si le club de hockey restait tenu de payer la TVA sur le loyer malgré l'entrée en vigueur de la loi de 1995.

113.    Il nous semble pouvoir déduire par ailleurs que cette dernière question n'entre pas dans le cadre du litige porté devant le Hoge Raad soit du fait que ni le royaume des Pays-Bas ni la commune de Leusden n'ont jugé utile de soumettre à la Cour des observations à ce propos, soit du fait que le club de hockey, qui serait bien sûr concerné au premier chef par une réponse éventuelle, non seulement ne s'est jamais manifesté dans la présente affaire, mais n'a même pas été impliqué, à notre connaissance, dans la procédure nationale.

114.    Les considérations qui précèdent nous amènent donc à conclure que la seconde question posée par le Hoge Raad dans l'affaire C-487/01 est de nature hypothétique et doit donc être déclarée irrecevable.

115.    Dans l'hypothèse toutefois où la Cour ne nous suivrait pas, nous observons ce qui suit:

116.    Une réponse positive à cette question aurait pour effet pratique de suspendre purement et simplement, pendant le reste de la période de régularisation, l'applicabilité de la loi de 1995 aux contrats de bail en cours à son entrée en vigueur, ce qui garantirait l'afflux dans les caisses du Trésor public néerlandais d'une taxe que, sinon, celui-ci ne pourrait plus percevoir. Autrement dit, une telle réponse permettrait au Trésor public néerlandais de suppléer l'absence, dans la loi de 1995, d'une règle transitoire prévoyant pour le locataire, qui serait dispensé du paiement de la TVA en vertu de cette loi, l'obligation de continuer d'acquitter la taxe jusqu'au terme de la période de régularisation.

117.   À la lumière de ces considérations, il nous semble que cette question relève plutôt de l'interprétation du droit national que de celle du droit communautaire. S'il s'avérait – comme nous l'avons expliqué dans la réponse à la première question – que les principes de la sécurité juridique et de la protection de la confiance légitime comportent pour un État membre, lorsqu'il modifie la loi nationale sur l'assujettissement à la TVA de la location de biens immobiliers, l'obligation de respecter le droit à la déduction que des locataires de biens immeubles ont acquis sous l'empire de cette loi, aucun principe du droit communautaire ne s'oppose, à notre avis, à ce que, lorsqu'il procède à cette modification, l'État membre – fût-ce involontairement – prive son propre Trésor public de la possibilité de continuer à percevoir la taxe auprès des bailleurs de ces immeubles.

118.    La République française soutient pourtant que, si le Trésor public néerlandais ne se voyait pas reconnaître le droit de continuer à percevoir la TVA sur des bailleurs de biens immeubles qui avaient opté, sous l'empire de la loi ancienne, pour le paiement de cette taxe, la neutralité de la TVA et le bon fonctionnement du système y afférent se trouveraient compromis.

119.    Cet argument nous semble toutefois discutable. Si nous l'entendons bien, en effet, il repose sur une violation prétendue de deux principes résultant de la directive: celui selon lequel «tous les entrepreneurs doivent être traités de manière neutre sur le plan fiscal, indépendamment de la question de savoir s'ils ne procèdent qu'à des activités préparatoires ou s'ils effectuent déjà des opérations imposables»  (37) , ainsi que celui qui veut qu'un assujetti puisse déduire la TVA prélevée dans une opération effectuée en amont seulement dans la mesure où cette opération lui sert aux fins d'une opération effectuée en aval.

120.    Or, il ne nous semble pas que l'un ou l'autre de ces principes ait été violé en l'occurrence. Lorsque la commune de Leusden a déduit la TVA qui grevait ses travaux de restructuration du terrain de sport, elle l'a fait en vue d'une activité – la location de ce terrain au club dehockey – imposable en vertu de la réglementation nationale qui était alors en vigueur. Partant, la commune de Leusden a acquis le droit de déduire la TVA d'une façon tout à fait conforme aux principes énoncés ci-dessus.

121.    Puisqu'il nous semble donc que la réponse à la question ne dépend pas de l'interprétation de dispositions de la directive ou de l'application de principes du droit communautaire, nous considérons que, si la question est jugée recevable, il convient d'y répondre qu'il revient au juge national d'apprécier, en se fondant sur les principes de son propre ordre juridique, si les bailleurs qui ont opté pour l'assujettissement de la location à la TVA en se fondant sur la réglementation en vigueur lorsque le contrat de bail a été rédigé continuent d'être tenus de payer la taxe même après l'entrée en vigueur d'une modification législative qui supprime la possibilité de soumettre cette location à la TVA.

C –   La seconde question préjudicielle dans l'affaire C-7/02

122.    Par sa seconde question préjudicielle dans l'affaire C-7/02, si nous l'entendons bien, la juridiction de renvoi demande en réalité à la Cour d'éclaircir deux points. Elle demande d'abord si la réponse affirmative éventuelle à la première question, c'est-à-dire l'imprescriptibilité du droit à déduction acquis par le groupe Holin, vaut également pour la période postérieure au communiqué de presse du 31 mars 1995 par lequel le ministère des Finances a annoncé le projet de modification de l'article 11, de la loi de 1968. En cas de réponse négative, le Hoge Raad demande si le groupe est tenu d'acquitter une taxe, au titre de l'article 5, paragraphe 7, sous a), à calculer, en vertu de l'article 11 A, paragraphe 1, sous b), de la directive  (38) , sur la base des coûts de la construction des biens immobiliers loués à ING qui ont été exposés après l'émission du communiqué.

123.    Le groupe Holin soutient que ledit communiqué de presse est postérieur aux obligations qu'il a contractées envers ING quant à la location à venir du bien immeuble et à l'assujettissement de cette location à la TVA et que, partant, une taxation éventuelle des travaux qu'il a fait exécuter sur ledit bien après la date de ce communiqué est contraire aux principes de la confiance légitime et de la sécurité juridique.

124.    Quant à la République française, elle soutient que, si la Cour, dans sa réponse à la première question, estime que la taxe visée à l'article 5, paragraphe 7, sous a), de la directive ne saurait servir à rectifier une déduction de TVA effectuée en vue d'une activité imposable qui a cessé de l'être à la suite d'une modification législative, cette taxe serait inapplicable au groupe Holin pour toute la période quia précédé la modification législative. La République française considère en outre qu'il ne serait pas possible, en vertu de l'article 11, A, paragraphe 1, sous b), de la directive, de calculer la taxe sur la seule base des coûts de la construction du bien immeuble en cause qui ont été exposés après la date du communiqué de presse.

125.    Or, le royaume des Pays-Bas et le Royaume-Uni ne sont pas de cet avis. D'après eux, en effet, le groupe Holin était au courant, tout au moins après le 31 mars 1995, qu'il aurait été assujetti à la taxe visée à l'article 5, paragraphe 7, sous a), de la directive, s'il avait décidé de donner en location à ING le bien immobilier sur lequel il exécutait des travaux. C'est pourquoi ces États membres considèrent qu'il ne saurait être question que le groupe Holin invoque les principes de la confiance légitime et de la sécurité juridique pour la période postérieure au 31 mars 1995 et, par voie de conséquence, que la taxe calculée sur la base des coûts exposés pendant cette période lui serait applicable.

126.    Quant à la Commission, enfin, elle remarque dans ses observations écrites  (39) que le communiqué de presse n'a pu avoir d'incidence sur la constitution, dans le chef du groupe Holin, d'une confiance légitime dans la possibilité de soumettre à la TVA la location à venir du bien immobilier en cause. D'après la Commission, ce communiqué ne concernait en fait qu'un projet de loi du gouvernement néerlandais, dont on ne pouvait être certain qu'il serait adopté, ou adopté tel quel, par le Parlement. Cette institution en déduit que, même pour la période comprise entre le communiqué de presse et l'adoption définitive de la règle nouvelle, la législation en vigueur était susceptible de créer une confiance légitime dans le chef des redevables.

127.    Pour notre part, nous estimons que, dans cette question, la juridiction de renvoi ne fait que reformuler la première question posée dans la même affaire en mettant l'accent sur le fait que la modification législative avait été annoncée par un communiqué de presse.

128.    Nous nous bornerons donc à rappeler ce que nous avons déjà dit de la première question, à savoir que si, d'une part, il est pour le moins discutable, comme le remarque à juste titre la Commission, que, après le communiqué de presse, le groupe Holin n'ait plus pu se fier entièrement à son droit à déduction acquis (voir le point 89 ci-dessus), d'autre part, la révocation de ce droit par la loi de 1995 ne semble pas reposer en l'occurrence sur une justification valable (voir les points 90 à 101 ci-dessus).

129.    Par ces motifs, donc, nous considérons qu'il convient de répondre que la réponse donnée à la première question vaut également pour la période postérieure à l'annonce, dans le communiqué de presse du ministère des Finances, de l'intention du royaume des Pays-Bas d'apporter des modifications à la réglementation en vigueur en matière de TVA. En application de l'article 13, parties B et C, de la directive, l'article 11, paragraphe 1, sous b), 5ème, de la loi de 1968, prévoyait, avant la modification introduite par la loi de 1995, que la location de biens immeubles était exonérée de TVA, en laissant toutefois au bailleur et au locataire la faculté d'opter, par une demande conjointe à l'administration fiscale, pour l'assujettissement à la TVA de la location de ces biens à d'autres fins que l'habitation.

V –  Conclusions

130.   À la lumière des considérations qui précèdent, nous suggérons donc à la Cour de répondre ce qui suit:

«1)
Quant aux premières questions posées dans les affaires C-487/01 et C-7/02: les principes de la protection de la confiance légitime et la sécurité juridique s’opposent à ce qu’un assujetti fasse l’objet d’une régularisation au titre de l’article 20 de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme, ou d’une taxation au titre de l’article 5, paragraphe 7, sous a), au seul motif que, en raison d’une modification intervenue dans la réglementation, il n’a plus la possibilité de soumettre à la TVA l’activité aux fins de laquelle il avait acquis un droit à déduction en vertu de la directive.

2)
Quant à la seconde question posée dans l’affaire C-487/01: cette question est irrecevable. En tout état de cause, il revient au juge national d’apprécier, en se fondant sur les principes de son propre ordre juridique, si les bailleurs qui ont opté pour l’assujettissement de la location à la TVA en se fondant sur la réglementation en vigueur lorsque le contrat de bail a été rédigé continuent d’être tenus de payer la taxe même après l’entrée en vigueur d’une modification législative qui supprime la possibilité de soumettre cette location à la TVA.

3)
Quant à la seconde question posée dans l’affaire C-7/02: la réponse donnée à la première question vaut également pour la période postérieure à l’annonce, dans le communiqué de presse du ministère des Finances, de l’intention du royaume des Pays-Bas de modifier la réglementation en vigueur en matière de TVA.»


1
Langue originale: l'italien.


2
Sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1).


3
Aux termes de l’article 1er, point 4, de la directive 95/7/CE du Conseil, du 10 avril 1995, modifiant la directive 77/388/CEE et portant nouvelles mesures de simplification en matière de taxe sur la valeur ajoutée – champ d’application de certaines exonérations et modalités pratiques de leur mise en œuvre (JO L 102, p. 18), cet alinéa est remplacé par le texte suivant: «En ce qui concerne les biens d’investissement immobiliers, la durée de la période servant de base au calcul des régularisations peut être portée jusqu’à vingt ans».


4
.Staatsblad 1978, p. 677.


5
.Staatsblad 1968, p. 329.


6
.Staatsblad 1995, p. 659.


7
C-381/97, Rec. p. I-8153.


8
C-396/98, Rec. p. I-4279.


9
Conclusions présentées le 24 octobre 2002 dans l’affaire Sudholz (C-17/01, affaire pendante devant la Cour).


10
Arrêt du 19 janvier 1982 (8/81, Rec. p. 53).


11
Arrêt du 14 juillet 1988 (207/87, Rec. p. 4433).


12
Arrêt du 13 juillet 2000 (C-136/99, Rec. p. I-6109).


13
Dans ces observations, la Commission était partie en effet de la prémisse que, pour établir si la taxe visée à l’article 5, paragraphe 7, sous a), de la directive pouvait s’appliquer au groupe Holin, il conviendrait de déterminer la date à laquelle le contrat de bail a été conclu plutôt que celle où son exécution a commencé. Partant donc de la prémisse que ce contrat avait été conclu avant le 29 décembre 1995, elle avait soutenu que, puisque la location pouvait encore être soumise à la TVA en vertu de la législation en vigueur, l’administration des finances néerlandaise avait violé les principes de la confiance légitime et de la sécurité juridique en appliquant au groupe Holin la taxe en question.


14
Arrêt du 25 janvier 1979 (98/78, Rec. p. 69, point 20).


15
Arrêt du 25 janvier 1979 (99/78, Rec. p. 101, point 8).


16
Arrêt du 21 février 1991 (C-143/88 et C-92/89, Rec. p. I-415 , point 49).


17
Voir arrêt du 11 juillet 1991, Lennartz (C-97/90, Rec. p. I-3795, point 8).


18
Voir arrêts du 14 février 1985, Rompelman (268/83, Rec. p. 655, points 22 à 24); du 29 février 1996, Inzo (C-110/94, Rec. p. I-857, points 15 à 19); du 15 janvier 1998, Ghent Coal Terminal (C-37/95, Rec. p. I-1, point 17); du 21 mars 2000, Gabalfrisa e.a. (C-110/98 à C-147/98, Rec. p. I-1577, point 47); Schloßtraße, précité note 8, point 36, et du 8 juin 2000, Breitsohl (C‑400/98, Rec. p. I-4321, point 34).


19
Voir arrêts du 21 septembre 1988, Commission/France (50/87, Rec. p. 4797, points 16 et 21), et Lennartz, précité note 7, point 27.


20
Voir arrêts Inzo, précité note 18, points 21, 24 et 25 ; Ghent Coal Terminal, précité note 18, points 20 et 22 ; Belgocodex, précité note 7, point 26 ; Schloßstraße, précité note 8, point 42, et Breitsohl, précité note 18, point 41. Dans le même sens, voir aussi les conclusions que l’avocat général Geelhoed a présentées le 24 octobre 2002 dans l’affaire Sudholz, précitée note 9, point 48.


21
Arrêt précité note 8, point 47 ; voir aussi arrêt du 11 juillet 2002, Marks & Spencer (C-62/00, Rec. p. I-6325, point 45).


22
Arrêt Lennartz précité note 17, point 21.


23
Voir point 3.4.5 de l’ordonnance de renvoi du Hoge Raad: «En l’espèce […] il s’agit d’une taxation au titre de l’article 5, paragraphe 7, sous a), de la sixième directive qui a […] en pratique pour effet de régulariser le droit à déduction né conformément à l’article 17 de la sixième directive» (souligné par nous).


24
Voir point 3.1.1 de l’ordonnance de renvoi du Hoge Raad: «L’intéressée a déduit la taxe sur le chiffre d’affaires qui lui a été facturée à ce titre».


25
Précité note 10.


26
Précité note 11.


27
Précité note 12.


28
Voir point 3.4.5 de l’ordonnance de renvoi, précité note 23.


29
Voir, entre autres, arrêt Zuckerfabrik Süderdithmarschen et Zuckerfabrik Soest, précité note 16, point 49, avec d’autres références.


30
Nous nous référons en particulier au passage où il est question d’un «[…] droit à déduction né dans la période allant de l’annonce de la modification législative visée à la première question jusqu’à son entrée en vigueur […]».


31
Voir, entre autres, arrêts du 30 septembre 1982, Amylum/Conseil (108/81, Rec. p. 3107, points 5 et 6), et Zuckerfabrik Süderdithmarschen et Zuckerfabrik Soest, précité note 16, points 50 à 54.


32
Arrêts Inzo, précité note 18, point 24; Gabalfrisa e.a., précité note 18, point 46, et Schloßstraße, précité note 8, point 40.


33
Arrêt du 21 janvier 2003, Bacardi-Martini et Cellier des Dauphins (C-318/00, Rec. p. I-905, point 41). Dans le même sens, voir, entre autres, les arrêts du 15 décembre 1995, Bosman (C‑415/93, Rec. p. I-4921, point 59); du 15 juin 1999, Tarantik (C-421/97, Rec. p. I-3633, point 33), et du 13 juillet 2000, Idéal Tourisme (C-36/99, Rec. p. I-6049, point 20).


34
Arrêt Bacardi-Martini et Cellier des Dauphins, précité note 33, point 43. Voir aussi arrêts du 16 juillet 1992, Lourenço Dias (C-343/90, Rec. p. I-4673, points 17 et 18); du 16 juillet 1992, Meilicke (C-83/91, Rec. p. I-4871, point 25); Bosman, précité note 33, point 61; du 9 mars 2000, EKW et Wein & Co (C-437/97, Rec. p. I-1157, point 52), et Idéal Tourisme, précité note 33, point 20.


35
Arrêt Lourenço Dias, précité note 34, point 20.


36
Arrêt du 16 décembre 1981, Foglia (244/80, Rec. p. 3045, point 17).


37
Voir conclusions de l’avocat général Lenz présentées le 23 novembre 1995 dans l’affaire Inzo, précitée note 18, point 27, ainsi que l’arrêt Rompelman, précité note 18, point 23.


38
D’après cette disposition, la base d’imposition est constituée, pour les opérations visées à l’article 5, paragraphes 6 et 7, par le prix d’achat des biens ou de biens similaires ou, à défaut, par le prix de revient, déterminés au moment où s’effectuent ces opérations.


39
Si, à l’audience, la Commission a changé de position par rapport à ses observations écrites quant à la première des deux questions posées dans l’affaire en cause (voir point 43 ci-dessus), elle ne s’est cependant pas prononcée davantage sur la seconde.

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