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Document 62001CC0185
Opinion of Mr Advocate General Léger delivered on 19 September 2002. # Auto Lease Holland BV v Bundesamt für Finanzen. # Reference for a preliminary ruling: Bundesfinanzhof - Germany. # Sixth VAT Directive - Place of taxable transactions - Refund of VAT paid in another Member State - Motor vehicle made available under a leasing contract - Fuel management agreement - Person having been supplied with fuel. # Case C-185/01.
Conclusions de l'avocat général Léger présentées le 19 septembre 2002.
Auto Lease Holland BV contre Bundesamt für Finanzen.
Demande de décision préjudicielle: Bundesfinanzhof - Allemagne.
Sixième directive TVA - Lieu des opérations imposables - Remboursement de la TVA acquittée dans un autre État membre - Véhicule automobile mis à disposition au moyen d'un contrat de leasing - Accord relatif à la gestion du carburant - Personne ayant reçu livraison de carburant.
Affaire C-185/01.
Conclusions de l'avocat général Léger présentées le 19 septembre 2002.
Auto Lease Holland BV contre Bundesamt für Finanzen.
Demande de décision préjudicielle: Bundesfinanzhof - Allemagne.
Sixième directive TVA - Lieu des opérations imposables - Remboursement de la TVA acquittée dans un autre État membre - Véhicule automobile mis à disposition au moyen d'un contrat de leasing - Accord relatif à la gestion du carburant - Personne ayant reçu livraison de carburant.
Affaire C-185/01.
Recueil de jurisprudence 2003 I-01317
ECLI identifier: ECLI:EU:C:2002:515
Conclusions de l'avocat général Léger présentées le 19 septembre 2002. - Auto Lease Holland BV contre Bundesamt für Finanzen. - Demande de décision préjudicielle: Bundesfinanzhof - Allemagne. - Sixième directive TVA - Lieu des opérations imposables - Remboursement de la TVA acquittée dans un autre État membre - Véhicule automobile mis à disposition au moyen d'un contrat de leasing - Accord relatif à la gestion du carburant - Personne ayant reçu livraison de carburant. - Affaire C-185/01.
Recueil de jurisprudence 2003 page I-01317
1. Par le présent renvoi préjudiciel, la Cour est amenée à interpréter les articles 5 et 2, point 1, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme .
2. Le litige au principal oppose Auto Lease Holland BV , une société de leasing ayant son siège aux Pays-Bas, à l'autorité fiscale allemande. Il porte sur le refus de celle-ci d'accorder à Auto Lease le remboursement de la TVA payée en Allemagne à l'occasion du ravitaillement par ses clients - preneurs de leasing ayant conclu avec elle un accord de gestion du carburant - des véhicules donnés en leasing.
I - Cadre juridique
3. L'article 2 de la sixième directive TVA définit le champ d'application de la TVA. Son point 1 prévoit:
«Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée:
1. les livraisons de biens et les prestations de services, effectuées à titre onéreux à l'intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel».
4. Les notions de «livraisons de biens» et de «prestations de services», auxquelles se réfère l'article 2, sont définies aux articles 5 et 6 de la sixième directive TVA. L'article 5, paragraphe 1, prévoit qu'«est considéré comme livraison d'un bien le transfert du pouvoir de disposer d'un bien corporel comme un propriétaire». Selon l'article 6, paragraphe 1, «est considérée comme prestation de services toute opération qui ne constitue pas une livraison d'un bien au sens de l'article 5».
5. Les articles 8 et 9 de la sixième directive TVA concernent le lieu des opérations taxables. L'article 8, paragraphe 1, sous b), qui a trait à la livraison de biens, prévoit que, dans le cas où le bien n'est pas expédié ou transporté, le lieu d'une livraison de biens est réputé se situer à l'endroit où le bien se trouve au moment de la livraison.
6. Aux termes de l'article 9, paragraphe 1:
«Le lieu d'une prestation de services est réputé se situer à l'endroit où le prestataire a établi le siège de son activité économique ou un établissement stable à partir duquel la prestation de services est rendue [...]»
7. Conformément à l'article 11, A, paragraphe 1, sous a), de la sixième directive TVA, la base d'imposition pour les livraisons ou les prestations de services à l'intérieur du pays est constituée «par tout ce qui constitue la contrepartie obtenue ou à obtenir par le fournisseur ou le prestataire pour ces opérations de la part de l'acheteur, du preneur ou d'un tiers [...]».
8. L'article 17 de la sixième directive TVA concerne le droit à déduction, clé de voûte du système de la TVA. Il dispose:
«2. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de ses opérations taxées, l'assujetti est autorisé à déduire de la taxe dont il est redevable:
a) la taxe sur la valeur ajoutée due ou acquittée pour les biens qui lui sont ou lui seront livrés et pour les services qui lui sont ou lui seront rendus par un autre assujetti;
[...]
3. Les États membres accordent également à tout assujetti la déduction ou le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée visée au paragraphe 2 dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins:
a) de ses opérations relevant des activités économiques visées à l'article 4 paragraphe 2, effectuées à l'étranger, qui ouvriraient droit à déduction si ces opérations étaient effectuées à l'intérieur du pays;
[...]»
9. Les modalités d'application des remboursements prévus à l'article 17, paragraphe 3, sont fixées par la huitième directive 79/1072/CEE du Conseil, du 6 décembre 1979, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Modalités de remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée aux assujettis non établis à l'intérieur du pays . Aux termes de cette directive, tout assujetti établi dans un État membre qui a payé la TVA pour les services qui lui sont rendus ou pour les biens qui lui ont été livrés à l'intérieur d'un autre État membre peut demander à ce dernier le remboursement de cette TVA à la condition, notamment, qu'il n'ait pas effectué des livraisons de biens ou des prestations de services réputées se situer à l'intérieur de cet État membre .
II - Les faits et la procédure au principal
10. Auto Lease est une société de leasing qui met des véhicules automobiles à la disposition de ses clients. Elle offre, en outre, au preneur de leasing la possibilité de conclure avec elle un «accord relatif à la gestion du carburant». En vertu de cet accord, le preneur de leasing reçoit d'Auto Lease un document appelé «ALH-Pass» ainsi qu'une carte de crédit de carburant émise par la société de cartes de crédit allemande DKV. Cette carte désigne Auto Lease comme cliente de DKV. Elle permet au preneur de leasing de ravitailler en carburant le véhicule loué et d'acheter de façon ponctuelle des produits pétroliers «au nom et pour le compte d'Auto Lease». DKV règle régulièrement ses comptes avec Auto Lease. Chaque mois, le preneur de leasing paie à Auto Lease un douzième des frais d'essence probables et, à la fin de l'année, les comptes de la consommation réelle sont établis. Il verse, en outre, une rémunération à Auto Lease au titre de la gestion du carburant .
11. Il ressort de l'ordonnance de renvoi qu'Auto Lease paie aux Pays-Bas l'impôt pour tous les services de leasing «y inclus les frais de carburant» .
12. Dans la mesure où les frais de carburant trouvent leur source dans des livraisons faites par des entreprises allemandes, Auto Lease a sollicité le remboursement de la TVA perçue par les autorités allemandes sur les livraisons de carburant pendant les années 1989 à 1993.
13. L'autorité fiscale allemande, le Bundesamt für Finanzen, a, tout d'abord, fait droit à cette demande pour les années 1989 à 1991, mais a, ensuite, modifié les décisions de remboursement en fixant leur montant à 0 DEM et en exigeant le reversement des montants antérieurement remboursés. Il a rejeté d'emblée les demandes de remboursement concernant les années 1992 et 1993.
14. Les réclamations administratives formées par Auto Lease à l'encontre de ces décisions ont été rejetées. Saisi en première instance, le Finanzgericht (Allemagne) a estimé qu'il n'y avait pas de livraisons de carburant des sociétés pétrolières à Auto Lease et que, dès lors, celle-ci ne pouvait pas demander le remboursement de la TVA. Il a donc rejeté le recours.
15. Auto Lease a introduit un recours en «Revision» contre cette décision devant le Bundesfinanzhof (Allemagne).
III - La question préjudicielle
16. C'est dans ce contexte que, par ordonnance du 22 février 2001, le Bundesfinanzhof a décidé de surseoir à statuer et de déférer à la Cour la question préjudicielle suivante:
«Y a-t-il une livraison de carburant du donneur de leasing au preneur de leasing lorsque ce dernier ravitaille en carburant, auprès de postes d'essence, la voiture donnée en leasing au nom et pour le compte du premier et cette livraison est-elle taxable au lieu de livraison visé à l'article 8, paragraphe 1, sous b), de la [sixième directive TVA], ou la livraison subséquente s'incorpore-t-elle dans le service du donneur de leasing taxable aux termes de l'article 9 de la [sixième directive TVA]?»
IV - L'objet de la question préjudicielle
17. Par sa question, le juge national cherche à savoir si le donneur de leasing (Auto Lease) peut obtenir ou non le remboursement de la TVA afférente au carburant acheté, en Allemagne, par les preneurs de leasing pour ravitailler les véhicules donnés en leasing.
18. Il ressort des motifs de l'ordonnance de renvoi que la demande du Bundesfinanzhof soulève deux questions.
19. La première question porte sur l'interprétation de l'article 5 de la sixième directive TVA. Elle vise à savoir s'il y a, dans les circonstances de l'espèce, une livraison de carburant du donneur au preneur de leasing lorsque ce dernier ravitaille en carburant, auprès de postes d'essence, la voiture donnée en leasing. Toutefois, cette question oblige à se demander s'il y a eu, préalablement, livraison de carburant des sociétés pétrolières à Auto Lease ou si celles-ci l'ont livré directement au preneur de leasing. En effet, si les sociétés pétrolières ont livré directement le carburant au preneur de leasing et non à Auto Lease, la question de qualification de la livraison subséquente prétendument réalisée ensuite par celle-ci au preneur de leasing ne se pose pas.
20. La seconde question ne se pose que dans l'hypothèse où les sociétés pétrolières ont livré le carburant à Auto Lease. Dans ce cas, il s'agit de déterminer si la livraison subséquente de celle-ci au preneur de leasing est une livraison autonome, taxable au lieu où se trouvait le carburant au moment de la livraison (Allemagne), ou si elle fait partie du service de leasing, taxable au lieu où le donneur de leasing a établi son siège social (Pays-Bas). La question vise donc à obtenir des précisions sur les critères applicables pour déterminer si l'on est en présence d'une prestation unique ou de deux prestations autonomes.
21. L'enjeu est le suivant. Si la Cour constate que les sociétés pétrolières ont livré le carburant à Auto Lease et que la livraison subséquente au preneur de leasing s'incorpore au service de leasing, Auto Lease aurait droit au remboursement de la TVA. En effet, dans ce cas, elle relèverait du champ d'application de la huitième directive TVA puisqu'elle aurait payé la TVA grevant le bien qui lui a été livré en Allemagne et ne réaliserait aucune livraison ni prestation de bien dans ce pays. Elle se trouverait dans la situation d'un assujetti établi dans un État membre (Pays-Bas) ayant payé la TVA grevant les biens qui lui sont livrés dans un autre État membre (Allemagne) et n'ayant pas effectué de livraison ou de prestation de services à l'intérieur de cet État membre (Allemagne) auquel elle demanderait le remboursement de ladite TVA.
22. En revanche, si la Cour constate que la livraison subséquente réalisée en faveur du preneur de leasing constitue une livraison autonome, taxable en Allemagne, Auto Lease n'aurait pas droit au remboursement de la TVA. En effet, dans ce cas, les conditions prévues par la huitième directive TVA pour accorder le droit au remboursement ne se trouveraient pas réunies. En particulier, Auto Lease aurait réalisé une opération taxable sur le territoire du pays où elle a payé la TVA et elle devrait alors suivre la procédure ordinaire de déduction de la TVA applicable en Allemagne.
23. Nous examinerons successivement les deux questions identifiées ci-dessus.
V - La réponse aux questions préjudicielles
Sur la première question
24. La première question vise à interpréter la notion de «livraison d'un bien» contenue à l'article 5 de la sixième directive TVA. La juridiction de renvoi demande qui, du donneur ou du preneur de leasing, doit être considéré comme ayant reçu la livraison du carburant effectuée par les sociétés pétrolières dans un cas où, comme en l'espèce, le preneur de leasing ravitaille en carburant la voiture donnée en leasing «au nom et pour le compte» du donneur de leasing.
25. La juridiction de renvoi considère que, en l'espèce, le bien est livré au donneur de leasing. Cette solution découle du fait que la carte de crédit utilisée par le preneur de leasing est au nom de la société de leasing, Auto Lease, et qu'il ressort du contenu de la carte de crédit que celui-ci achète le carburant «au nom et pour le compte» de cette société. La Commission des Communautés européennes et le gouvernement allemand adoptent une position contraire. Ils estiment que le bien est livré à la personne à laquelle il est physiquement remis (à savoir le preneur de leasing), d'autant plus que celle-ci supportera finalement l'intégralité du prix, y compris la TVA, même s'il a été réglé dans un premier temps par la société de leasing.
26. Il convient de rappeler que l'article 5 de la sixième directive TVA définit la livraison d'un bien comme «le transfert du pouvoir de disposer d'un bien corporel comme un propriétaire». Saisie de la question de savoir si la notion de «livraison d'un bien» exige le transfert de la propriété juridique du bien en cause, la Cour a répondu, dans l'arrêt du 8 février 1990, Shipping and Forwarding Enterprise Safe , que cette notion inclut toute opération de transfert d'un bien corporel par une partie qui habilite l'autre partie à en disposer en fait comme si elle en était le propriétaire. Il résulte de cet arrêt que la notion de «livraison d'un bien» a un contenu plus économique que juridique. Elle se rattache davantage à la possibilité pour la personne ayant reçu la livraison de se servir du bien qu'à la transmission de la propriété effective au sens du droit civil des États membres. En effet, comme la Cour l'a constaté, seule une définition économique de cette notion est compatible avec les objectifs de la sixième directive TVA puisque:
«Cette conception est conforme à la finalité de la directive, qui vise, entre autres, à fonder le système commun de TVA sur une définition uniforme des opérations taxables. Or, cet objectif pourrait être compromis si la constatation d'une livraison de biens, qui est l'une des trois opérations taxables, était soumise à la réalisation de conditions qui varient d'un État membre à l'autre, comme c'est le cas de celles relatives au transfert de propriété en droit civil» .
27. En l'espèce, il convient donc d'analyser à qui, donneur ou preneur de leasing, les sociétés pétrolières ont transféré ce pouvoir de disposer, en fait, du carburant. Sur ce point, il nous semble que ce pouvoir a bel et bien été reçu par le preneur de leasing sans qu'Auto Lease intervienne en aucune manière. Dans un cas où, comme en l'espèce, le bien est physiquement remis entre les mains du preneur qui l'utilise comme il l'entend, il apparaît contraire à la logique économique de la sixième directive TVA de prétendre que la société de leasing a eu, fût-ce momentanément, le pouvoir de disposer du carburant et qu'elle a pu céder ce pouvoir au preneur de leasing. En effet, le preneur de leasing achète directement le carburant auprès des postes d'essence et Auto Lease n'a, à aucun moment, le pouvoir de décider comment le carburant doit être utilisé et à quelles fins.
28. En outre, la thèse selon laquelle le carburant serait livré au donneur de leasing, parce qu'il en avance le prix, ne saurait être retenue. D'une part, elle conduirait à considérer que le carburant a été livré non pas à la société de leasing, mais à la société de cartes de crédit allemande qui le paie en premier aux sociétés pétrolières et qui procède ultérieurement au règlement de ses comptes avec Auto Lease de la même façon que cette dernière le fait avec les preneurs de leasing. D'autre part, cette thèse conduirait à la conclusion, pour le moins surprenante, que, chaque fois qu'une personne achète un bien en bénéficiant du financement proposé par le vendeur ou par un tiers, ce bien ne lui serait pas directement livré, au sens de la sixième directive TVA, mais serait livré directement au prestataire du service de financement qui, après avoir obtenu la livraison, le rétrocéderait à l'acheteur.
29. La clause du contrat de crédit, selon laquelle le preneur de leasing achète le carburant «au nom et pour le compte» du donneur de leasing, ne saurait infirmer cette conclusion. En effet, tout au plus, cette clause pourrait avoir comme conséquence d'attribuer la propriété du carburant au donneur de leasing. Or, nous l'avons vu, la détention de la propriété juridique n'est pas déterminante dans la définition de la notion de «livraison d'un bien» au sens de l'article 5 de la sixième directive TVA.
30. De même, l'accord relatif à la gestion du carburant n'est pas de nature à infirmer notre appréciation. Comme la Commission et le gouvernement allemand l'ont souligné, cet accord n'est pas un contrat de livraison du carburant mais s'analyse plutôt comme un contrat de financement de l'achat du carburant. En effet, le donneur de leasing n'achète pas le carburant pour le revendre par la suite au preneur de leasing, mais ce dernier achète le carburant, en choisissant librement sa qualité et sa quantité ainsi que le moment de l'achat. Il se limite simplement à utiliser les facilités de paiement offertes par la société de leasing. Celle-ci agit comme n'importe quel établissement financier ou de crédit et son rôle ne doit pas être distingué de celui joué par la société de cartes de crédit, dont personne ne prétend qu'elle aurait reçu livraison du carburant. Dans le cadre de cet accord, la société de leasing se borne à rembourser à la société de cartes de crédit le prix, y compris la TVA, qu'elle paie aux sociétés pétrolières. En outre, pour effectuer ces paiements, elle n'est pas nécessairement tenue d'avancer les fonds correspondants, puisqu'elle reçoit chaque mois des preneurs de leasing une partie des frais annuels probables. Si la consommation est inférieure à celle estimée, elle se limitera à rembourser la société de cartes de crédit avec l'argent qui lui a été versé par les preneurs de leasing.
31. Contrairement à ce que semble indiquer le juge de renvoi, l'arrêt Intiem n'est pas non plus de nature à infirmer notre analyse. Dans cette affaire, la Cour était saisie de la question de savoir si un employeur pouvait déduire la TVA afférente au carburant qui n'avait pas été livré à ce dernier, mais à ses employés. La Cour, à la lumière des circonstances de l'espèce, et notamment du fait que le carburant avait été utilisé par les employés exclusivement pour les besoins de l'activité professionnelle de l'employeur, avait considéré que ce dernier avait droit à la déduction de la TVA. Le juge de renvoi fait référence à cet arrêt et semble en déduire qu'il fonde la thèse selon laquelle les sociétés pétrolières auraient livré le carburant à Auto Lease et non aux preneurs de leasing. Or, nous estimons que le raisonnement suivi par la Cour dans l'arrêt Intiem, précité, n'est pas directement transposable en l'espèce. Dans l'affaire Intiem, précitée, la question de savoir à qui, de l'employeur ou des employés, la livraison avait été faite avait déjà été tranchée par le juge national avant qu'il ne renvoie à la Cour la question portant sur la possibilité de déduction de la TVA. En effet, il ressort de l'arrêt Intiem, précité, que cette question avait fait l'objet de discussion lors de la procédure devant les juridictions nationales et que celles-ci avaient rejeté la thèse selon laquelle le carburant avait été livré à l'employeur. Ainsi, le point 6 dudit arrêt énonce que:
«Le Hoge Raad a d'abord rejeté le grief de l'intéressée selon lequel le Gerechtshof aurait constaté à tort que la livraison de l'essence s'effectue directement aux employés. Il s'est ensuite demandé si la circonstance que l'essence est, selon cette constatation, directement livrée aux employés fait obstacle à la déduction de la TVA sur cette essence par l'employeur» .
32. La Cour elle-même a résumé la question qui lui avait été posée dans les termes suivants:
«[L]e présent litige soulève le problème de savoir si cette règle fait obstacle à la déduction de la TVA, lorsque les biens ont été achetés par l'assujetti et utilisés, après avoir été livrés à ses employés, pour les besoins de l'entreprise» .
33. Il en résulte que, dans l'arrêt Intiem, précité, la Cour n'avait pas à se prononcer sur la question soulevée par la présente affaire et qu'elle n'a pas non plus émis de réserves sur la prémisse sur laquelle reposait la question préjudicielle, à savoir que le carburant avait été livré aux employés. Il nous semble, donc, que cet arrêt n'est pas pertinent pour répondre à la question préjudicielle et ne permet pas de considérer qu'Auto Lease a reçu la livraison du carburant.
34. Sur la base des considérations qui précèdent, nous proposons donc à la Cour de répondre que l'article 5 de la sixième directive TVA doit être interprété en ce sens qu'il n'y pas livraison de carburant du donneur de leasing au preneur de leasing lorsque ce dernier ravitaille en carburant, auprès de postes d'essence, la voiture donnée en leasing dans un cas comme celui de l'espèce.
Sur la seconde question
35. Compte tenu de la réponse que nous proposons d'apporter à la première question préjudicielle, la seconde question préjudicielle devient sans objet.
Conclusion
36. Nous proposons donc à la Cour de répondre de la manière suivante aux questions posées par le Bundesfinanzhof:
«L'article 5 de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme, doit être interprété en ce sens qu'il n'y a pas livraison de carburant du donneur de leasing au preneur de leasing lorsque ce dernier ravitaille en carburant, auprès de postes d'essence, la voiture donnée en leasing dans un cas comme celui de l'espèce.»