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Document 62001CC0063

    Conclusions de l'avocat général Alber présentées le 24 octobre 2002.
    Samuel Sidney Evans contre The Secretary of State for the Environment, Transport and the Regions et The Motor Insurers' Bureau.
    Demande de décision préjudicielle: High Court of Justice (England & Wales), Queen's Bench Division - Royaume-Uni.
    Rapprochement des législations - Directive 84/5/CEE - Assurance obligatoire de la responsabilité civile automobile - Dommages causés par des véhicules non identifiés ou insuffisamment assurés - Protection des victimes - Transposition incorrecte de la directive - Responsabilité de l'État membre.
    Affaire C-63/01.

    Recueil de jurisprudence 2003 I-14447

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2002:615

    62001C0063

    Conclusions de l'avocat général Alber présentées le 24 octobre 2002. - Samuel Sidney Evans contre The Secretary of State for the Environment, Transport and the Regions et The Motor Insurers' Bureau. - Demande de décision préjudicielle: High Court of Justice (England & Wales), Queen's Bench Division - Royaume-Uni. - Rapprochement des législations - Directive 84/5/CEE - Assurance obligatoire de la responsabilité civile automobile - Dommages causés par des véhicules non identifiés ou insuffisamment assurés - Protection des victimes - Transposition incorrecte de la directive - Responsabilité de l'État membre. - Affaire C-63/01.

    Recueil de jurisprudence 2003 page 00000


    Conclusions de l'avocat général


    I - Introduction

    1 La présente demande de décision préjudicielle formée par la High Court of Justice (England & Wales), Queen's Bench Division (Royaume-Uni), soulève des questions d'interprétation et d'application des directives relatives à l'assurance de la responsabilité civile automobile. Il s'agit en particulier de savoir si l'indemnisation d'un dommage causé par un véhicule non identifié, laquelle est versée par un organisme désigné à cette fin par l'État, doit aussi inclure le versement d'intérêts et de dépens. Il convient par ailleurs de préciser si la solution adoptée en Grande-Bretagne remplit les exigences de droit communautaire en matière de protection juridictionnelle effective, si l'organisme chargé de l'indemnisation peut être considéré comme dûment agréé au sens de la directive concernée, et si d'éventuelles lacunes dans la transposition de la directive constituent une violation des obligations qui lui incombent suffisamment grave pour fonder un droit à réparation contre l'État membre défaillant selon les principes du droit communautaire.

    II - Cadre juridique

    A - Les dispositions de droit communautaire

    Directive 72/166/CEE du Conseil, du 24 avril 1972, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à l'assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation de véhicules automoteurs, et au contrôle de l'obligation d'assurer cette responsabilité (1) (ci-après la «première directive»)

    2 L'article 3, paragraphe 1, de cette directive stipule:

    «Chaque État membre prend toutes les mesures utiles, sous réserve de l'application de l'article 4, pour que la responsabilité civile relative à la circulation des véhicules ayant leur stationnement habituel sur son territoire soit couverte par une assurance. Les dommages couverts ainsi que les modalités de cette assurance sont déterminés dans le cadre de ces mesures.»

    Deuxième directive 84/5/CEE du Conseil, du 30 décembre 1983, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à l'assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation des véhicules automoteurs (2) (ci-après la «deuxième directive»)

    3 L'article 1er, paragraphes 1 et 4, de la deuxième directive dispose:

    «1. L'assurance visée à l'article 3 paragraphe 1 de la directive 72/166/CEE couvre obligatoirement les dommages matériels et les dommages corporels.

    2. [...] [(3)]

    [...]

    4. Chaque État membre crée ou agrée un organisme ayant pour mission de réparer, au moins dans les limites de l'obligation d'assurance, les dommages matériels ou corporels causés par un véhicule non identifié ou pour lequel il n'a pas été satisfait à l'obligation d'assurance visée au paragraphe 1. Cette disposition ne porte pas atteinte au droit des États membres de donner ou non à l'intervention de cet organisme un caractère subsidiaire, ainsi qu'à celui de réglementer les recours entre cet organisme et le ou les responsables du sinistre et d'autres assureurs ou organismes de sécurité sociale tenus d'indemniser la victime pour le même sinistre.

    La victime peut en tout cas s'adresser directement à l'organisme qui, sur la base des informations fournies à sa demande par la victime, est tenu de lui donner une réponse motivée quant à son intervention.

    Toutefois, les États membres peuvent exclure de l'intervention de cet organisme les personnes ayant de leur plein gré pris place dans le véhicule qui a causé le dommage, lorsque l'organisme peut prouver qu'elles savaient que le véhicule n'était pas assuré.

    Les États membres peuvent limiter ou exclure l'intervention de cet organisme en cas de dommages matériels causés par un véhicule non identifié. Ils peuvent également autoriser, pour les dommages matériels causés par un véhicule non assuré, une franchise, opposable à la victime, ne dépassant pas 500 Écus.

    Par ailleurs, chaque État membre applique à l'intervention de cet organisme ses dispositions législatives, réglementaires et administratives, sans préjudice de toute autre pratique plus favorable aux victimes.»

    B - Les dispositions nationales

    4 En raison des lacunes dans la couverture des dommages corporels causés par des conducteurs non assurés ou non identifiés, des compagnies d'assurances chargées d'assurer la responsabilité civile pour les véhicules automobiles ont, en accord avec le ministère des Transports, créé en Grande-Bretagne dès 1946 le Motor Insurers' Bureau (ci-après le «MIB»). Le MIB est un sujet de droit privé dont les associés sont des compagnies d'assurances de droit privé qui proposent des polices d'assurance automobile.

    5 L'obligation d'indemniser les dommages causés par des conducteurs non assurés ou non identifiés résulte d'accords entre le MIB et le Secretary of State for the Environment, Transport and the Regions (4). Ces accords ont été plusieurs fois modifiés ou adaptés. On mentionnera ici, d'une part, le Motor Insurers' Bureau Agreement «Compensation of Victims of Uninsured Drivers» (5) (accord relatif à l'indemnisation des victimes de conducteurs non assurés), du 21 décembre 1988, ainsi que le Motor Insurers' Bureau Agreement «Compensation of Victims of Untraced Drivers» (accord relatif à l'indemnisation des victimes de conducteurs non identifiés), du 22 novembre 1972, dans la version modifiée de 1977, accord litigieux en l'espèce. Ce dernier est aussi dénommé ci-après «accord relatif aux conducteurs non identifiés» ou seulement «accord».

    6 L'accord pertinent en l'espèce contient les dispositions suivantes:

    - L'accord s'applique dans tous les cas où une demande est adressée au MIB en vue d'obtenir une indemnisation en raison du décès d'une personne ou d'un dommage corporel subi par une personne trouvant son origine dans l'utilisation d'un véhicule automoteur sur une route au Royaume-Uni lorsque, sous réserve de certaines conditions sans intérêt en l'espèce, le demandeur de l'indemnisation n'est pas en mesure de trouver une personne responsable du décès ou du dommage corporel (clause 1).

    - Le MIB est tenu, lorsqu'il est saisi d'une demande dans un cas auquel s'applique l'accord, de payer une somme qui doit être déterminée dans les mêmes conditions que celles selon lesquelles une juridiction fixerait, en appliquant les dispositions en vigueur en la matière au Royaume-Uni, le montant des dommages-intérêts que le demandeur aurait été fondé à obtenir de la personne responsable non identifiée (clause 3).

    - Le MIB est tenu d'examiner toute demande qui lui est adressée en vue de l'obtention d'une indemnisation au titre de l'accord et de décider s'il y a lieu de l'accorder (clause 7).

    - Lorsqu'il y a lieu d'accorder une indemnisation, le MIB a l'obligation de notifier au demandeur le montant qu'il se propose de lui verser, en précisant la méthode selon laquelle a été calculée l'indemnisation. Si le demandeur décide d'accepter cette indemnisation, le MIB est tenu de lui en payer le montant (clauses 9 et 10).

    - Le demandeur a un droit de recours intégral auprès d'un arbitre contre toute décision du MIB (clause 11).

    - Le demandeur a le droit, avant d'introduire un recours, de présenter au MIB des observations relatives à la décision et de produire d'autres éléments de preuve concernant sa demande. Le MIB peut examiner ces nouveaux éléments et doit communiquer au demandeur le résultat de cet examen ainsi que toute modification apportée à la décision (clause 13).

    - En statuant sur le recours, l'arbitre décide s'il y a lieu pour le MIB de verser une indemnisation au titre de l'accord et, dans l'affirmative, le montant à accorder par le MIB au demandeur (clause 16).

    - L'arbitre est choisi sur une liste d'arbitres composée d'avocats de la Couronne (Queen's Counsels) désignés par le Lord Chancellor ou le Lord Advocate (clause 18).

    - L'arbitre statue sur le recours en se fondant sur les documents qui lui sont soumis, bien qu'il/elle ait le droit d'inviter le MIB à procéder à tout examen complémentaire qu'il/elle estime souhaitable et sur les résultats duquel le demandeur a le droit de présenter des observations (clause 17).

    - Chacune des parties au recours supporte ses propres dépens afférents à l'arbitrage (clause 21). Le MIB a l'obligation de payer les honoraires de l'arbitre, sauf dans le cas où l'arbitre estime qu'il n'existait pas de motifs justifiant raisonnablement l'introduction du recours, auquel cas l'arbitre peut décider que le demandeur est tenu de lui payer ses honoraires (clause 22).

    7 L'accord ne contient aucune disposition expresse concernant l'octroi d'intérêts sur l'indemnisation allouée ni sur le remboursement des dépens afférents à la procédure devant le MIB.

    III - Faits et procédure

    8 Le 25 décembre 1991, M. Samuel Sidney Evans (ci-après le «demandeur») a été victime d'un accident qui lui a causé un dommage corporel. Il a été heurté par une voiture alors que, de la chaussée, il se baissait vers sa voiture en stationnement pour y prendre un paquet. Le conducteur de l'autre véhicule impliqué n'a pas été identifié.

    9 Le 11 juin 1992, le demandeur a saisi le MIB d'une demande d'indemnisation au titre de l'accord susvisé. Le 11 janvier 1996, le MIB a informé le demandeur qu'il avait décidé de fixer l'indemnisation à 50 000 GBP. Le demandeur a saisi l'arbitre d'un recours contre cette décision suivant la procédure prévue dans l'accord.

    10 Le 27 août 1996, l'arbitre a communiqué sa sentence. Il a estimé que, sur la base d'une responsabilité intégrale de l'auteur du dommage, l'indemnisation à verser aurait été de 58 286 GBP. Mais pour tenir compte de la faute concurrente de la victime - vraisemblablement parce qu'elle déchargeait sa voiture côté rue - il y avait lieu de réduire l'indemnisation de 20 %, en la ramenant donc à 46 629 GBP. Compte tenu de certains éléments de preuve, à savoir une vidéo tournée ultérieurement par un détective privé - dont il semblait résulter que l'infirmité du demandeur n'était pas si importante -, l'arbitre a considéré que le demandeur avait fait preuve de mauvaise foi et, en conséquence, il l'a condamné à payer ses honoraires (voir à cet égard la clause 22 citée au point 6). Il ne lui a pas accordé d'intérêts sur l'indemnisation allouée.

    11 Le MIB a versé au demandeur la somme de 46 629 GBP, augmentée d'une somme de 770 GBP, correspondant aux frais exposés par le représentant du demandeur, d'une somme de 150 GBP, accordée à titre gracieux, et de la TVA.

    12 Le 16 septembre 1996, le demandeur a demandé à la Commercial Court de l'autoriser à faire appel de la sentence arbitrale. Le 16 décembre 1996, l'appel a été autorisé sur la question de savoir si l'arbitre est compétent pour accorder des intérêts. Le 29 juillet 1997, cet appel a été rejeté. Le 30 septembre 1998, un autre appel du demandeur a été rejeté par la Court of Appeal (England & Wales). Cette juridiction a exposé que ce que le Royaume-Uni a mis en place pour transposer la directive ne constitue «pas un organe ou un rapport permettant de mettre en oeuvre la directive contre quiconque (si ce n'est peut-être contre soi-même au sens de la jurisprudence Francovich)». Le 18 janvier 1999, la House of Lords a refusé d'autoriser le demandeur à faire un nouvel appel.

    13 Le 25 février 1999, le demandeur a introduit un recours en indemnisation contre le ministre des Transports, c'est-à-dire le ministère compétent, pour non-transposition ou transposition incorrecte des première et deuxième directives. Il faisait en premier lieu valoir que le Royaume-Uni a omis de créer ou d'agréer un organisme - en tout cas sous une forme obéissant au principe de la sécurité juridique - ayant pour mission d'accorder des indemnisations conformément à l'article 1er, paragraphe 4, de la deuxième directive. Si la directive avait été correctement transposée, les juges n'auraient pas pu déclarer que le MIB n'est pas tenu d'accorder des indemnisations conformément à la première ou à la deuxième directive. Le demandeur alléguait en outre que l'accord en cause entre le MIB et le ministre des Transports ne prévoit pas d'indemnisation «au moins dans les limites de l'obligation d'assurance» - comme le dit la directive - , ne donne pas aux victimes de conducteurs non identifiés de droit de recours contre le MIB ni d'accès aux tribunaux.

    14 Le demandeur part de l'idée que les lacunes de la transposition lui ont causé un préjudice et que ces manquements constituent une violation suffisamment caractérisée du droit communautaire pour qu'il ait le droit d'exiger une réparation de la part du ministre des Transports.

    15 Dans ces circonstances, la juridiction de renvoi a, par ordonnance du 17 mai 2000, posé à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

    «1) La directive 84/5/CEE du Conseil, du 30 décembre 1983, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à l'assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation des véhicules automoteurs (ci-après la `deuxième directive sur l'assurance automobile'), doit-elle être interprétée en ce sens que:

    a) les dispositions concernant l'octroi d'une réparation par l'organisme créé ou agréé conformément à l'article 1er, paragraphe 4, doivent prévoir le versement d'intérêts sur les sommes dues au titre de l'indemnisation des dommages matériels ou corporels subis?

    b) Si la question a) appelle une réponse affirmative, à compter de quelle date et sur quelle base ces intérêts doivent-ils être calculés?

    2) Lorsque l'organisme auquel incombe la réparation est lui-même tenu d'évaluer le préjudice subi par la victime (et d'encourir les dépenses liées à cette opération, y compris le coût des rapports médicaux et d'autres rapports), l'article 1er, paragraphe 4, de la deuxième directive sur l'assurance automobile doit-il être interprété en ce sens que:

    a) les dispositions concernant l'octroi d'une réparation par ledit organisme doivent prévoir le paiement des frais exposés par la victime à l'occasion de la préparation et du dépôt de la demande qu'elle introduit auprès de cet organisme en vue d'obtenir réparation?

    b) Si la question a) appelle une réponse affirmative, sur quelle base ces frais doivent-ils être calculés lorsque cet organisme a fait une offre à la victime excédant le montant final de la réparation et que la victime a refusé cette offre?

    3) Dans l'hypothèse où l'organisme qui statue sur la demande de réparation introduite par la victime n'est pas une juridiction, l'article 1er, paragraphe 4, de la deuxième directive sur l'assurance automobile doit-il être interprété en ce sens que la victime doit disposer d'un droit d'appel intégral contre cette décision devant une juridiction, portant à la fois sur des questions de fait et de droit, plutôt que d'un droit de recours auprès d'un arbitre indépendant répondant aux caractéristiques principales suivantes:

    i) le recours formé par la victime auprès de l'arbitre peut porter à la fois sur des questions de fait et de droit;

    ii) dans le recours qu'elle introduit devant l'arbitre, la victime peut formuler de nouvelles allégations et fournir de nouveaux éléments de preuve à l'organisme auquel incombe la réparation, au vu desquels celui-ci peut modifier sa décision d'indemnisation avant que le recours ne soit examiné;

    iii) la victime reçoit à l'avance un exemplaire de tous les documents devant être communiqués à l'arbitre et a la possibilité d'adjoindre tout document qu'elle souhaite en réponse;

    iv) sans procéder à une audience, l'arbitre rend sa décision, dans laquelle il ou elle fixe l'indemnisation que devra verser l'organisme auquel incombe la réparation, et motive cette décision;

    v) si la victime n'est pas satisfaite de cette décision, elle est en droit d'interjeter appel devant les tribunaux, mais uniquement pour irrégularité grave entachant l'arbitrage ou sur une question de droit (visant, notamment, à déterminer si une conclusion particulière de l'arbitre est étayée par des éléments de preuve ou si une conclusion particulière n'est pas telle qu'aucun arbitre n'y serait raisonnablement parvenu sur la base des éléments de preuve disponibles) et, dans le cas d'un appel sur une question de droit, l'appel doit être autorisé par la juridiction, autorisation qui ne sera accordée que si la décision de l'arbitre est manifestement erronée et s'il apparaît juste et approprié pour la juridiction, au vu de l'ensemble des circonstances, de statuer sur cette question?

    4) Si les questions 1 a) et/ou 2 a) et/ou 3 appellent une réponse affirmative, doit-on considérer qu'un État membre a dûment agréé un organisme conformément à l'article 1er, paragraphe 4, de la deuxième directive sur l'assurance automobile lorsqu'un organisme existant a pour mission d'accorder une indemnisation aux victimes uniquement en vertu d'un accord conclu avec l'autorité compétente de l'État membre, dont les termes ne correspondent pas, à cet égard, aux dispositions de la deuxième directive sur l'assurance automobile et:

    a) lorsque cet accord crée l'obligation légale envers l'autorité compétente de l'État membre, dont elle peut se prévaloir directement, d'accorder une indemnisation aux victimes et ne confère pas auxdites victimes le droit, dont elles pourraient se prévaloir directement, de contester les décisions de cet organisme, et lorsque, néanmoins, la victime peut s'adresser au juge afin que celui-ci ordonne à l'autorité compétente de mettre en oeuvre l'accord, dans l'éventualité où ladite autorité manquerait à cette obligation;

    b) lorsque l'organisme précité s'acquitte de cette obligation en admettant et en liquidant les demandes émanant des victimes conformément à cet accord; et

    c) lorsque l'État membre a considéré de bonne foi que les dispositions de cet accord garantissaient aux victimes une protection au moins aussi grande que celle qui résulte des exigences de la deuxième directive sur l'assurance automobile?

    5) Si la question 1 a), la question 2 a) ou la question 3 appellent une réponse affirmative, et/ou si la question 4 appelle une réponse négative, le manquement à la deuxième directive sur l'assurance automobile à cet égard constitue-t-il de la part de l'État membre une violation suffisamment grave pour engager sa responsabilité pécuniaire en droit communautaire, si la réalité du préjudice est établie?»

    16 Ont pris part à la procédure devant la Cour le demandeur, le gouvernement du Royaume-Uni, représentant également le défendeur au principal, le MIB en qualité de partie intervenante dans la procédure au principal à l'appui du défendeur et la Commission.

    IV - Prises de position

    17 À l'audience, le représentant du demandeur a souligné que, indépendamment du contenu et de l'ordre des questions préjudicielles, le demandeur était d'avis que le Royaume-Uni n'avait pas ou pas dûment transposé la deuxième directive en droit national. Le problème central de l'affaire est de savoir si un État membre doit accorder une réparation à un particulier qui fait partie des bénéficiaires de la directive, lorsque l'État membre n'a rien entrepris pour permettre à ceux-ci d'invoquer la directive contre qui que ce soit.

    18 Pour des raisons de clarté, il convient toutefois examiner les questions préjudicielles dans l'ordre.

    1. La question du versement d'intérêts et du remboursement des dépens - Première et deuxième questions

    Thèse des parties

    19 Les arguments avancés relativement aux première et deuxième questions étant largement parallèles, ils appellent une présentation commune.

    20 Le demandeur défend l'idée qu'une interprétation littérale de l'article 1er, paragraphes 1 et 4, de la deuxième directive en liaison avec l'article 3, paragraphe 1, de la première directive montre qu'en cas de dommages corporels causés par un conducteur non identifié l'organisme agréé est tenu de les réparer - «au moins dans les limites de l'obligation d'assurance» - de la même manière et dans les mêmes conditions que celles prévues par le droit national pour un dommage causé par un conducteur identifié et assuré. Cette interprétation est étayée par le fait que, lorsque la directive entend réserver aux victimes de conducteurs non identifiés un traitement différent de celui des victimes de conducteurs non assurés, elle le dit expressément, comme pour les dommages matériels.

    21 Si la deuxième directive n'impose pas directement l'égalité de traitement entre les victimes de conducteurs non identifiés et celles de conducteurs assurés ou non, cette obligation résulte en tout état de cause du principe général d'égalité de traitement. Or, au Royaume-Uni les victimes de conducteurs non identifiés ne sont pas traitées de la même manière que celles de conducteurs assurés ou insuffisamment assurés. Contrairement à ces dernières, et sans aucune justification objective, les victimes de conducteurs non identifiés n'obtiennent pas une indemnisation incluant intérêts et dépens et ne jouissent pas non plus des mêmes garanties procédurales, y compris l'accès aux tribunaux.

    22 En renvoyant à l'arrêt de la Cour dans l'affaire Marshall (6), dans lequel celle-ci avait constaté, concernant un licenciement discriminatoire, que l'octroi d'intérêts doit être considéré comme une composante indispensable d'un dédommagement, le demandeur fait valoir que ce principe doit aussi s'appliquer à l'indemnisation des victimes de conducteurs non identifiés, prévue par la deuxième directive.

    23 Ces considérations s'appliquent aussi, selon lui, au remboursement des dépens. C'est ce que confirme par ailleurs la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, selon laquelle la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la «CEDH») a pour but de protéger des droits concrets et effectifs (7).

    24 Le gouvernement du Royaume-Uni est d'avis que les dispositions pertinentes des deux directives montrent qu'elles devaient assurer des garanties minimales mais ne visaient pas à harmoniser les ordres juridiques des États membres. Aucune des dispositions de ces directives ne régit les éléments financiers d'une indemnisation, pas plus qu'elles ne prévoient que l'organisme chargé de l'indemnisation doit octroyer le même montant que celui qui serait accordé par les juridictions nationales à la victime d'un conducteur assuré. Une différence de traitement des deux groupes de personnes en droit national est justifiée objectivement parce que l'organisme tenu d'indemniser la victime n'est pas l'auteur du dommage et ne peut à plus forte raison pas être considéré comme l'auteur d'un dommage retenant de façon injustifiée une somme due au demandeur. De son côté, la directive laisse, dans l'article 1er, paragraphe 4, dernier alinéa, la porte ouverte à une différence de traitement.

    25 En renvoyant à l'arrêt de la Cour dans l'affaire Sutton (8), le gouvernement du Royaume-Uni fait valoir qu'en droit communautaire il n'y a pas de principe général selon lequel l'obligation de verser une indemnisation doit nécessairement inclure aussi le versement d'intérêts. Les mêmes considérations devraient aussi s'appliquer au remboursement des dépens.

    26 Le MIB défend pour l'essentiel les mêmes positions que le gouvernement du Royaume-Uni. À titre liminaire, le MIB explique toutefois qu'en droit anglais les dommages et intérêts sont estimés par les tribunaux à la date du jugement. Rompant avec ce principe de common law, l'article 35 A de la Supreme Court Act de 1981 est certes venu leur donner la faculté d'allouer, sous certaines conditions, des intérêts dans le cadre de demandes d'indemnisation, mais cette faculté ne peut être exercée que dans le cadre de procédures judiciaires.

    27 La Commission souligne d'abord que ni la première ni la deuxième directive ne contiennent de disposition expresse concernant l'octroi d'intérêts ou le remboursement des dépens. Il n'en résulte pas davantage que ceux-ci font partie intégrante de l'obligation d'assurance.

    28 La Commission examine ensuite la question de savoir si l'article 1er, paragraphe 4, de la deuxième directive autorise un État membre à traiter une catégorie de victimes moins favorablement qu'une autre. À cet égard, la Commission est d'avis que, sous réserve des exceptions expresses, la deuxième directive oblige, au vu de son objectif général, à fournir aux victimes de conducteurs non assurés ou non identifiés le même degré de couverture qu'aux victimes couvertes par l'assurance obligatoire.

    29 La Commission recherche enfin si une réglementation nationale qui ne prévoit pas l'octroi d'intérêts aux victimes de conducteurs non identifiés méconnaît la notion d'«indemnisation suffisante» qui est l'objectif de la deuxième directive. Sous cet aspect, elle se réfère en premier lieu à la jurisprudence de la Cour, favorable à l'octroi d'intérêts, en matière de responsabilité non contractuelle de la Communauté (9) et en matière d'égalité de traitement entre hommes et femmes (10). Elle se réfère en second lieu aux objectifs de la deuxième directive, tels qu'ils sont énoncés dans son préambule, et relève que son article 1er, paragraphe 4, précise clairement les cas dans lesquels les États membres peuvent limiter le montant de l'indemnisation, sans pour autant indiquer que l'octroi d'intérêts peut être exclu. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, la Commission incline à penser que l'octroi d'intérêts, conformément aux règles nationales applicables, doit être considéré comme une composante essentielle de la réparation visée à l'article 1er, paragraphe 4, de la deuxième directive.

    Appréciation

    30 Pour vérifier si les intérêts et les dépens font partie de la prestation qu'au sens de l'article 1er, paragraphe 4, de la deuxième directive un organisme doit verser pour les dommages causés par un véhicule non identifié (11), il y a lieu de partir d'abord du texte des première et deuxième directives. Il n'est expressément question d'intérêts ou de dépens ni dans la première directive ni dans la deuxième. L'article 1er, paragraphe 1, de la deuxième directive renvoie, pour la définition de l'objet de l'assurance, à l'article 3, paragraphe 1, de la première directive. Or cette disposition ne dit rien de plus que le fait que chaque État membre prend toutes les mesures utiles pour que la responsabilité civile relative à la circulation des véhicules ayant leur stationnement habituel sur son territoire soit couverte par une assurance. Elle énonce que «les dommages couverts ainsi que les modalités de cette assurance sont déterminés dans le cadre de ces mesures».

    31 Quant à la portée du droit à réparation contre l'organisme au sens de l'article 1er, paragraphe 4, de la deuxième directive, il est dit dans cet article qu'il a pour mission de réparer les dommages «au moins dans les limites de l'obligation d'assurance». En ce qui concerne l'étendue de l'obligation d'assurance, le cinquième considérant de la deuxième directive énonce que: «les montants à concurrence desquels l'assurance est obligatoire doivent permettre en tout état de cause de garantir aux victimes une indemnisation suffisante quel que soit l'État membre où le sinistre est survenu» (12). Il convient donc de vérifier si, d'après le sens et la finalité des dispositions, l'«obligation d'assurance» inclut les intérêts et les dépens. Dans ce cadre, il faudra aussi établir si la nature du droit à réparation exige éventuellement l'octroi d'intérêts et le remboursement des dépens.

    32 On partira d'abord du fait qu'il incombe en principe aux États membres de définir, sur la base des première et deuxième directives, l'obligation de couverture (13). Dans la première directive, cette mission était laissée aux seuls États membres. Cela ne résulte pas seulement de son article 3, paragraphe 1, mais cette tendance se dessine aussi dans le paragraphe 2 de cette disposition selon lequel chaque État membre prend par exemple toutes les mesures utiles pour que le contrat d'assurance couvre également les dommages causés sur le territoire des autres États membres selon les législations en vigueur dans ces États.

    33 Les différences quant à l'étendue de l'obligation d'assurance dans les États membres (14) ont conduit, dans le cadre de la deuxième directive, à étendre l'obligation d'assurance à la responsabilité engagée à l'occasion de dommages matériels (15). On a également fixé des montants minimaux pour la couverture de dommages corporels et de dommages matériels (16). La troisième directive (17) va un pas plus loin dans cette direction, dans la mesure où elle pose des exigences minimales pour le cercle de personnes à assurer (18).

    34 Au-delà de ces exigences minimales à chaque fois plus sévères, il faut pourtant partir du principe qu'aujourd'hui comme hier il incombe aux États membres de déterminer les caractéristiques du droit à réparation. L'article 1er, paragraphe 4, dernier alinéa, de la deuxième directive stipule expressément que, en ce qui concerne l'intervention de l'organisme agréé, chaque État membre applique - sans préjudice de toute autre pratique plus favorable aux victimes - ses dispositions législatives, réglementaires et administratives.

    35 On pourrait ici faire une étude de droit comparé des dispositions des États membres en matière de responsabilité civile pour vérifier si l'octroi d'intérêts et le remboursement des dépens sont habituellement inclus dans l'assurance obligatoire. Même s'il en résultait que les intérêts et les dépens sont généralement inclus dans cette assurance, ce résultat ne devrait néanmoins pas valoir obligatoirement pour tous les États membres. Le renvoi aux dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres serait sinon sans objet.

    36 Il faut donc creuser la question de savoir si éventuellement la nature du droit à réparation permet de conclure que des intérêts doivent être accordés et les dépens remboursés. L'assurance de la responsabilité civile automobile repose dans le principe sur un droit à réparation de droit civil. L'obligation d'assurance prescrite par la loi est liée à ce droit et sert à la protection économique d'un droit à réparation fondé.

    37 On pourrait se demander si la nature juridique du droit change lorsque la réparation des dommages matériels ou corporels doit être assurée par un organisme au sens de l'article 1er, paragraphe 4, de la deuxième directive. On peut envisager différentes manières pour un État membre de remplir son obligation de créer ou d'agréer un organisme au sens du même article. Il peut s'agir tant d'un service administratif, d'un organe public que, comme en l'espèce, d'un organisme privé. En tout cas, l'État membre doit lui confier la mission en cause. La nature du droit pourrait donc changer en fonction de l'entité contre laquelle ce droit est invoqué.

    38 L'article 1er, paragraphe 4, de la deuxième directive stipule cependant expressément que: «Cette disposition ne porte pas atteinte au droit des États membres de donner ou non à l'intervention de cet organisme un caractère subsidiaire, ainsi qu'à celui de réglementer les recours entre cet organisme et le ou les responsables du sinistre [...]».

    39 Cette formulation montre que la façon d'agir contre l'organisme ne peut pas être détachée du droit initial à réparation. Cela incite à considérer aussi les droits dérivés comme des droits à caractère civil. Cette opinion est encore confortée par le fait qu'en l'espèce le contexte juridique est un contexte de droit privé. Les accords entre le MIB et le ministre des Transports relèvent du droit privé et le MIB est une société de droit privé. Pour la suite de l'analyse, il y a donc lieu de partir d'abord de l'idée qu'il s'agit d'un droit à réparation de droit privé.

    40 La jurisprudence de la Cour fournit quelques indications sur le point de savoir dans quelle mesure les intérêts sont une composante indispensable d'un dédommagement. Dans l'affaire Marshall (19), citée par les parties, il s'agissait d'une «réparation adéquate» (20) du préjudice subi du fait d'un licenciement discriminatoire, donc d'un droit à réparation de droit privé. Le droit national prévoyait un plafond pour ces indemnités. Les tribunaux semblaient en outre ne pas être compétents pour accorder des intérêts sur les montants en cause (21). La Cour a déclaré à cet égard «qu'une réparation intégrale du préjudice subi du fait d'un licenciement discriminatoire ne saurait faire abstraction d'éléments, tels que l'écoulement du temps, susceptibles d'en réduire, en fait, la valeur. L'octroi d'intérêts, selon les règles nationales applicables, doit donc être considéré comme une composante indispensable d'un dédommagement permettant le rétablissement d'une égalité de traitement effective» (22).

    41 Dans l'affaire Ireks-Arkady/Conseil et Commission (23), il s'agissait de savoir si une demande d'intérêts faite en rapport avec la responsabilité non contractuelle de la Communauté en vertu de l'article 215, deuxième alinéa, du traité CE (devenu article 288 CE) est en principe admissible. La Cour a déduit des principes généraux communs aux droits des États membres l'existence d'un droit à des intérêts naissant de l'arrêt qui constate l'obligation de réparer le préjudice (24).

    42 La Cour est parvenue à la même conclusion dans l'affaire Grifoni/CEEA (25). Le fait dommageable litigieux était un accident. La Cour a déclaré: «la réparation du préjudice a pour objet de reconstituer autant que possible le patrimoine de la victime d'un accident. Il s'ensuit qu'il doit effectivement être tenu compte de l'érosion monétaire postérieure à l'événement préjudiciable» (26). La Cour a reconnu un droit à percevoir des intérêts à compter du prononcé de l'arrêt.

    43 Dans les trois affaires citées, il s'agissait de demandes d'indemnisation pour des motifs différents. Ces arrêts ont toutefois en commun le fait que, sous certaines conditions à préciser, la Cour a en principe reconnu que l'octroi d'intérêts est une caractéristique du droit à réparation.

    44 Étant donné, toutefois, que les intérêts ne font précisément pas nécessairement partie intégrante d'un droit à réparation, il a été renvoyé, au cours de la procédure écrite, à l'arrêt Sutton (27). Cette affaire portait sur la question de savoir s'il y a lieu de payer des intérêts sur des arriérés de prestations de sécurité sociale, lorsque le retard dans le versement de la prestation est dû à une discrimination fondée sur le sexe. La Cour a dit sur ce point: «des montants versés au titre d'une prestation de sécurité sociale ne présentent pas de caractère indemnitaire (28), de sorte que le paiement d'intérêts ne saurait être imposé sur la base de l'article 6 de la directive 76/207, pas plus qu'en vertu de l'article 6 de la directive 79/7» (29). La question de savoir si un droit à percevoir des intérêts résulte d'une éventuelle action en responsabilité contre l'État membre a été laissée ouverte par la Cour qui a renvoyé sur ce point au droit national (30).

    45 Cependant, comme il s'agit en l'espèce en principe d'un droit à réparation et non de prestations de sécurité sociale, l'arrêt Sutton ne peut pas être invoqué pour exclure d'emblée un droit à percevoir des intérêts. La jurisprudence citée en matière de droit à réparation (31) fait au contraire apparaître que les intérêts sont plutôt une composante de ce droit.

    46 Avant d'appliquer ce principe au cas d'espèce, il y a lieu de vérifier si les objectifs de la directive confortent cette façon de penser.

    47 Les directives en matière de responsabilité civile automobile établissent des normes minimales pour la protection des victimes d'accidents de la route. Dans la première directive, il n'est d'abord question que de la portée de la protection de l'assurance, avec à l'arrière-plan l'objectif déclaré de «libéraliser davantage le régime de circulation des personnes et des véhicules automoteurs dans le trafic de voyageurs entre les États membres» (32).

    48 Les victimes de véhicules non identifiés n'ont été prises en compte par la réglementation communautaire qu'avec l'adoption de la deuxième directive. Dans la mesure où il faut créer ou agréer un organisme devant réparer, «au moins dans les limites de l'obligation d'assurance» (33), les dommages causés, l'obligation régulière d'indemnisation des victimes de véhicules assurés est clairement soulignée. Le critère pour l'étendue du dédommagement devrait donc être le montant habituel du dédommagement dans les accidents causés par des véhicules assurés. Lorsque la directive prévoit des dérogations à cette règle, elle les mentionne expressément et les justifie sur le fond.

    49 Seul l'article 1er, paragraphe 4, quatrième alinéa, se rapporte aux dommages causés par un véhicule non identifié. Les États membres peuvent limiter ou exclure l'intervention de l'organisme en cas de dommages matériels. Comme l'énoncent expressément les considérants (34), cette possibilité est accordée aux États membres pour faire face aux «risques de fraude».

    50 En dehors de cette exception, il y a lieu de partir de l'idée que les victimes de véhicules non identifiés doivent être indemnisées comme les victimes de véhicules identifiés et assurés. Le fait qu'il s'agit d'une exigence minimale résulte d'une part de la formule «au moins dans les limites de l'obligation d'assurance» (35). D'autre part, la formule de l'article 1er, paragraphe 4, dernier alinéa, de la deuxième directive - à savoir «sans préjudice de toute autre pratique plus favorable aux victimes» - met en évidence le fait que les victimes de véhicules non identifiés doivent bénéficier d'une protection minimale selon la directive.

    51 Pour pouvoir répondre à la question de l'octroi d'intérêts et du remboursement des dépens dans le cas d'espèce, il importe donc de savoir comment on procède en cas d'accidents causés par des véhicules assurés. Si, dans ces cas, des intérêts et des dépens sont normalement versés, la victime d'un véhicule non identifié doit alors aussi y avoir droit.

    52 Le gouvernement du Royaume-Uni a toutefois fait valoir qu'il existe des raisons objectives à l'inégalité de traitement entre les victimes de véhicules assurés et les victimes de véhicules non identifiés. Il y a lieu de lui opposer que, même si la procédure pour obtenir l'indemnisation est fondamentalement différente, l'étendue de l'indemnisation ne doit pas être inférieure à celle des victimes de véhicules dûment assurés.

    53 Les termes de l'article 1er, paragraphe 4, dernier alinéa, de la deuxième directive, selon lesquels, «par ailleurs, chaque État membre applique à l'intervention de cet organisme ses dispositions législatives, réglementaires et administratives [...]», que le gouvernement du Royaume-Uni invoque, ne conduisent pas à une conclusion différente. Il est vrai que cette disposition renvoie aux dispositions des États membres. Néanmoins, dans l'application du droit communautaire, en l'espèce donc de la protection minimale des victimes de véhicules non identifiés, il convient de respecter les principes élaborés par la Cour dans sa jurisprudence constante.

    54 Il s'agit à cet égard du principe d'équivalence et du principe d'effectivité. Ces principes, qui n'ont reçu cette qualification que dans la jurisprudence la plus récente de la Cour (36), s'appuient sur une jurisprudence constante remontant loin dans le passé (37). Selon ces principes, les modalités procédurales des recours destinés à assurer la sauvegarde des droits que les justiciables tirent du droit communautaire ne peuvent être moins favorables que celles concernant des recours similaires de nature interne ni rendre en pratique impossible ou excessivement difficile l'exercice des droits conférés par l'ordre juridique communautaire (38).

    55 Lorsque, dans des procès en responsabilité civile devant des juridictions nationales concernant des accidents causés par des véhicules assurés, des intérêts et des dépens sont accordés, il doit en être de même, en application des principes précités, pour les actions en réparation introduites par les victimes de véhicules non identifiés. Cette obligation résulte de la deuxième directive en liaison avec les principes d'application du droit communautaire.

    56 Le fait que le MIB ainsi que l'accord entre le MIB et le ministre des Transports relatif aux conducteurs non identifiés existaient déjà avant l'adoption de la deuxième directive ne change rien à cela. La deuxième directive parle expressément, dans l'article 1er, paragraphe 4, d'agréer un organisme et part donc de l'idée que dans certains États membres un tel organisme et les dispositions y afférentes existent le cas échéant déjà. Cela ne libère cependant pas le législateur national de l'obligation de prévoir les normes minimales en matière d'indemnisation prescrites par la directive. Si les victimes de véhicules non identifiés sont dans une situation plus défavorable que celles de véhicules assurés, il pourrait s'agir d'un problème de transposition correcte de la directive, sujet sur lequel nous reviendrons.

    57 Comme conclusion intermédiaire à la première et à la deuxième question, il y a lieu de retenir que les intérêts et les dépens sont une composante indispensable d'un droit à réparation pour les victimes de véhicules non identifiés si et dans la mesure où ces éléments font partie du droit à réparation des victimes de véhicules dûment assurés et identifiés. Cette constatation vaut tant sur le fond qu'en ce qui concerne les modalités de la liquidation.

    58 Le gouvernement du Royaume-Uni et le MIB ont fait valoir que, en droit national, les intérêts et les dépens ne font en réalité pas partie du droit à réparation, mais que les tribunaux sont habilités par la loi à octroyer des intérêts.

    59 On remarquera à ce sujet que, dans la comparaison du montant du dédommagement pour les dommages causés par des véhicules non identifiés, d'un côté, et ceux causés par des véhicules dûment assurés, de l'autre, il faut considérer les choses sous l'angle financier. Le fait que pour un même dommage le montant alloué soit en principe différent selon son auteur ne peut pas être justifié, face aux exigences du droit communautaire, par des arguments d'économie des dispositions de droit interne.

    60 L'objection du gouvernement du Royaume-Uni et du MIB, selon laquelle des intérêts ne peuvent être accordés que par les tribunaux, implique en outre que pour les périodes antérieures au prononcé d'un arrêt il n'y a en principe pas de versement d'intérêts.

    61 Le calcul des intérêts d'une indemnisation dépend en principe du moment dont on part. Cela peut être le fait dommageable, mais cela peut être aussi le prononcé de l'arrêt lorsque, par exemple, l'étendue des dommages, tenant compte de l'écoulement du temps (39), est définie dans l'arrêt. Les arrêts cités plus haut (40), Ireks-Arkady/Conseil et Commission (41) et Grifoni/CEEA (42), peuvent aussi être compris dans ce sens. On peut appliquer les règles habituelles en vigueur dans l'État membre concerné, à condition que le résultat ne soit pas défavorable aux situations juridiques reposant sur le droit communautaire.

    62 Par rapport au cas d'espèce, un problème se pose pourtant si les intérêts ne sont accordés que par les tribunaux, l'accès aux tribunaux étant à vrai dire rendu excessivement difficile. La procédure pourrait donc en soi déjà être problématique du point de vue du droit communautaire. Nous reviendrons sur ce problème plus loin.

    63 La clause 3 de l'accord applicable en l'espèce (voir plus haut au point 6) stipule cependant que la réparation à payer par le MIB doit être déterminée dans les mêmes conditions que si elle était fixée par un tribunal. L'objection selon laquelle des intérêts ne peuvent être accordés que par les tribunaux ne devrait donc pas empêcher un calcul du dédommagement conforme au droit communautaire.

    64 À titre complémentaire, on soulignera encore qu'une indemnisation dans le cadre de l'accord concernant des conducteurs non assurés peut aussi être assortie d'intérêts et de dépens. Le fait que ce ne soit pas l'assurance compétente qui soit tenue d'intervenir mais un organisme collectif ne peut donc pas être avancé comme une justification objective du calcul différent de la réparation selon l'accord concernant les conducteurs non identifiés.

    2. La procédure arbitrale - Troisième question

    Thèse des parties

    65 Le demandeur fait valoir que la procédure arbitrale prévue dans l'accord concernant les conducteurs non identifiés ne remplit pas les exigences d'une protection juridictionnelle effective, telle qu'elles ont été énoncées par la Cour dans son arrêt Johnston (43), ni celles d'un «procès équitable» au sens de l'article 6 de la CEDH (44) (45). Il n'y a pas d'audience et la sentence arbitrale ne peut être attaquée qu'en cas d'irrégularités graves de la procédure arbitrale ou sur des questions de droit à la condition que l'appel concernant celles-ci soit autorisé.

    66 Le traitement différent sur le plan de la procédure constitue, à son avis, une violation du principe d'égalité de traitement qui exige que les victimes de conducteurs non identifiés au Royaume-Uni jouissent de la même protection juridique que celles de conducteurs assurés ou non. Le fait que la victime d'un conducteur non identifié ne puisse pas poursuivre ce dernier en justice ne peut pas constituer une justification objective de l'inégalité de traitement. L'exception au détriment des victimes de conducteurs non identifiés n'a en outre été prévue que pour des raisons d'économies de coûts.

    67 Le gouvernement du Royaume-Uni et le MIB allèguent d'abord que l'article 1er, paragraphe 4, de la deuxième directive n'impose que des exigences minimales d'ordre procédural. La victime doit s'adresser directement à l'organisme prévu. Par ailleurs, la directive renvoie aux dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres.

    68 En ce qui concerne le principe de la protection juridictionnelle effective, le gouvernement du Royaume-Uni fait valoir que l'ensemble des voies de recours offertes à la victime d'un conducteur non identifié, loin de rendre impossible ou excessivement difficile la protection juridictionnelle, constituent un système à multiples degrés de protection. L'absence d'audience devant l'arbitre n'a pas empêché le demandeur de présenter son argumentation de la manière la plus complète et de répondre aux allégations de faute concurrente.

    69 Quant au principe d'égalité de traitement, la victime d'un conducteur non identifié se trouve, à certains égards, dans une situation plus favorable que la victime d'un conducteur non assuré. La procédure instituée permet souvent de vider le litige de manière plus rapide et moins onéreuse que par la voie d'une procédure judiciaire.

    70 En ce qui concerne l'article 6 de la CEDH, tant le gouvernement du Royaume-Uni que le MIB émettent des doutes quant à la question de savoir si le litige au principal porte sur des «droits et obligations de caractère civil». En tout état de cause, également à la lumière de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (46), la procédure doit être considérée dans sa globalité, y compris les voies de recours. Même si la procédure suivie par le MIB ne répond pas pleinement en soi aux conditions imposées par l'article 6 de la CEDH, la procédure devant l'arbitre y répond en tout état de cause. Son indépendance et son impartialité sont garanties et il exerce sa compétence de pleine juridiction sous le contrôle de la High Court. Étant donné qu'il n'y a pas d'audience devant l'arbitre, le représentant du gouvernement du Royaume-Uni a, à l'audience, quand même émis des doutes sur la compatibilité de la procédure arbitrale avec l'article 6 de la CEDH.

    71 La Commission est d'avis que l'article 1er, paragraphe 4, de la deuxième directive confère un droit à réparation aux victimes de dommages causés par des conducteurs non identifiés et que, par conséquent, il appartient aux États membres d'assurer un contrôle juridictionnel effectif sur le respect de ce droit. La Commission examine ensuite si la procédure arbitrale satisfait aux exigences de l'article 6 de la CEDH. Sur la base des éléments figurant dans l'ordonnance de renvoi et sous réserve de précisions supplémentaires, elle estime que la procédure présente des lacunes par rapport aux critères développés par la Cour européenne des droits de l'homme. Celles-ci concernent en particulier le statut de l'arbitre eu égard à son indépendance, l'absence d'audience et la portée très limitée du droit d'interjeter appel de la sentence arbitrale.

    Appréciation

    72 Par la troisième question, la juridiction de renvoi souhaiterait savoir si la procédure prévue par l'accord pour obtenir l'indemnisation satisfait aux exigences de droit communautaire en matière de protection juridictionnelle effective. L'analyse ne se limite en cela toutefois pas à la procédure que prévoit l'accord devant le MIB pour faire appel à l'arbitre mais aussi à la possibilité s'y rattachant d'attaquer la sentence arbitrale dans certaines limites devant les tribunaux ordinaires, comme le montre le point V de la troisième question préjudicielle.

    73 Pour apprécier cette question, il faut d'abord déterminer les droits accordés par le droit communautaire pour l'application desquels la protection juridictionnelle est réclamée. Il convient de partir de l'article 1er, paragraphe 4, de la deuxième directive, qui est à lire en combinaison avec le sixième considérant de la directive. Les passages pertinents sont les suivants:

    «Chaque État membre crée ou agrée un organisme ayant pour mission de réparer [...] les dommages matériels ou corporels causés par un véhicule non identifié ou pour lequel il n'a pas été satisfait à l'obligation d'assurance [...].

    La victime peut en tout cas s'adresser directement à l'organisme qui [...] est tenu de lui donner une réponse motivée quant à son intervention.»

    Le sixième considérant énonce que:

    «considérant qu'il est nécessaire de prévoir qu'un organisme garantira que la victime ne restera pas sans indemnisation dans le cas où le véhicule qui a causé le sinistre n'est pas assuré ou n'est pas identifié; qu'il est important [...] de prévoir que la victime d'un tel sinistre puisse s'adresser directement à cet organisme comme premier point de contact».

    74 Indépendamment de la possibilité laissée aux États membres de conférer à l'intervention de cet organisme un caractère subsidiaire (47), la victime a un droit à réparation, et ce au moins dans les limites de l'obligation d'assurance. Il s'agit en cela d'une situation juridique clairement définie, conférée par le droit communautaire au cercle de personnes déterminé par la directive.

    75 L'application de ce droit doit bénéficier d'une protection juridictionnelle effective. La directive ne mentionne certes pas expressément une exigence de protection juridictionnelle de ce droit. Cela résulte toutefois des principes généraux du droit communautaire.

    76 La Cour a eu plusieurs fois l'occasion de se prononcer sur le principe de la protection juridictionnelle effective en tant que principe général du droit communautaire. Ainsi elle a dû prendre position à cet égard à la fois dans l'affaire Johnston (48) et dans l'affaire Coote (49) dans le cadre de l'application de l'article 6 de la directive en matière d'égalité de traitement entre hommes et femmes sur le plan de l'emploi (50). La Cour a déclaré à ce propos dans l'arrêt Johnston: «Le contrôle juridictionnel imposé par cet article est l'expression d'un principe général de droit qui se trouve à la base des traditions constitutionnelles communes aux États membres. Ce principe a également été consacré par les articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, du 4 novembre 1950. Comme il a été reconnu [...] par la jurisprudence de la Cour, il convient de tenir compte des principes dont s'inspire cette convention dans le cadre du droit communautaire» (51).

    77 La Cour a poursuivi dans l'arrêt Johnston: «Il appartient aux États membres d'assurer un contrôle juridictionnel effectif sur le respect des dispositions applicables du droit communautaire et de la législation nationale destinée à mettre en oeuvre les droits prévus par la directive» (52).

    78 Ces considérations de principe ne sont en aucune façon limitées au contexte de la directive sur l'égalité de traitement, mais leur portée s'étend à d'autres domaines juridiques, ainsi que la formulation générale des constatations le montre. Dans le contexte du droit communautaire fondamental de l'accès à l'emploi, la Cour a rappelé dans l'affaire Heylens e.a. (53) par exemple ses déclarations de principe de l'arrêt Johnston.

    79 En ce qui concerne les exigences du principe de la protection juridictionnelle, il y a lieu de renvoyer d'une part à l'article 6 de la CEDH. Son paragraphe 1, première phrase, prévoit: «Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera [...] des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil [...]».

    80 On renverra en outre à l'article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne (54), qui n'a certes pas encore directement d'effets juridiques contraignants mais peut néanmoins servir de critère de comparaison, au moins dans la mesure où elle aborde les principes du droit reconnus de façon générale. Conformément à l'article 51, la charte s'applique aussi aux États membres dans l'application du droit de l'Union. Les deux premiers alinéas de l'article 47 de la charte sont ainsi libellés:

    «Toute personne dont les droits et libertés garantis par le droit de l'Union ont été violés a droit à un recours effectif devant un tribunal dans le respect des conditions prévues au présent article.

    Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi. [...]»

    81 Le principe, ancré dans le droit communautaire, de la protection juridictionnelle effective inclut donc, d'une part, les exigences prévues dans les dispositions citées et confère, d'autre part, aux tribunaux des États membres une obligation de collaboration dans l'octroi de la protection juridictionnelle (55).

    82 Pour vérifier maintenant dans le détail si la procédure permettant aux victimes de véhicules non identifiés d'obtenir une indemnisation remplit les exigences du droit communautaire, il faut d'abord examiner les exigences procédurales posées par la directive et ensuite les conditions s'y ajoutant en vertu du principe de la protection juridictionnelle effective.

    83 Il y a lieu de considérer l'article 1er, paragraphe 4, deuxième alinéa, comme une exigence procédurale minimale, lorsqu'il dit que la victime peut en tout cas s'adresser directement à l'organisme qui est tenu de lui donner une réponse motivée quant à son intervention. Du fait que la victime peut, sur la base de l'accord, s'adresser directement au MIB (56), qui doit examiner la demande (57) et statuer (58), ces conditions minimales sont remplies. Le gouvernement du Royaume-Uni est d'avis que l'on ne peut déduire de la directive aucune autre exigence procédurale.

    84 Comme nous l'avons déjà exposé plus haut, la directive confère aussi par son contenu à la victime un droit dont le cas échéant la protection en justice résulte du droit communautaire. Il convient donc de vérifier si les critères caractérisant une protection juridictionnelle effective sont remplis. L'article 6 de la CEDH fait sien par le droit communautaire et l'article 47 de la charte des droits fondamentaux, qui ont un contenu largement identique, doivent servir de fil conducteur.

    85 Pour mettre en cause cette façon de procéder, le gouvernement du Royaume-Uni a cependant souligné qu'il est déjà douteux que les droits de la victime constituent des «droits de caractère civil» au sens de l'article 6 de la CEDH. Dans l'examen de la nature du droit pour en tirer éventuellement des conséquences sur un droit à des intérêts (59), nous avons pris position sur la qualité de droit civil du droit à réparation. Sur cette base, on devrait ici partir du principe qu'il s'agit d'un droit à caractère civil. Mais, même si pour quelque raison que ce soit il devait s'agir d'un droit à caractère public, cela ne pourrait pas justifier le fait que la victime ne jouisse pas de la protection juridictionnelle dans son application. On ne saurait par ailleurs déduire de l'article 47 de la charte des droits fondamentaux une limitation comparable aux droits à caractère civil. Il suffit donc qu'il s'agisse d'un «droit garanti par le droit de l'Union». Le droit à réparation de l'article 1er, paragraphe 4, de la deuxième directive est incontestablement à considérer comme tel.

    86 L'article 6 de la CEDH et l'article 47 de la charte des droits fondamentaux ont en commun le fait que la protection juridictionnelle doit être assurée par un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi et qui doit en outre procéder publiquement dans le cadre d'un procès équitable.

    87 Le droit de recours devant le MIB, qui n'a d'abord pour objet qu'un contrôle de la décision proposée en tenant compte des éventuels éléments de preuve supplémentaires apportés par la victime, ne répond pas aux exigences de contrôle juridictionnel ainsi définies. La première phase de la procédure d'opposition est comparable à une procédure de réclamation administrative. Il n'y a ni indépendance complète ni impartialité de l'organisme d'indemnisation. Le MIB prend une décision qui - dans la mesure où elle l'accepte - est applicable à la victime et qui a un caractère contraignant à son égard. Mais même l'introduction du droit de recours dans le cadre de l'accord, qui, comme nous l'avons déjà souligné (60), a un caractère de droit privé, ne peut être considéré comme «établi par la loi».

    88 Cela serait toutefois sans conséquence si une voie de recours était ouverte contre une telle décision. Il faut à cet égard se rallier à l'avis du gouvernement du Royaume-Uni, selon lequel il convient de considérer l'ensemble des possibilités de protection juridictionnelle. Dans un premier temps, il y a donc lieu de s'arrêter à la procédure arbitrale, mais sans toutefois en rester là.

    89 La question se pose d'abord de savoir si la procédure arbitrale prévue dans l'accord constitue une procédure juridictionnelle. Sur la base de la jurisprudence de la Cour sur la définition des caractéristiques d'une juridiction au sens de l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), il y a lieu de citer cinq critères. Il s'agit de l'origine légale de l'organe, sa permanence, le caractère obligatoire de sa juridiction, la nature contradictoire de la procédure et l'application de règles de droit (61).

    90 Si l'on part de l'idée que la procédure arbitrale est créée dans l'accord entre le MIB et le ministre des Transports, l'origine légale de l'organe est déjà douteuse. D'un autre côté l'organe ne doit pas nécessairement appartenir à l'organisation judiciaire de l'État membre (62). Si l'arbitre agit dans le cadre des Arbitration Acts (63), cela pourrait toutefois plaider pour une origine légale de l'organe.

    91 En fait, l'arbitre dans une procédure arbitrale résultant de l'accord entre le MIB et le ministre des Transports est désigné ad hoc. Y voir un «organe permanent» est donc tout à fait problématique, à moins que l'on considère la tenue des listes d'arbitres potentiels des avocats de la Couronne comme une institution permanente, le recours aux listes ou la saisine de l'organe ne dépendant que de nécessités pratiques.

    92 L'autre critère du caractère obligatoire de la juridiction doit par contre être considéré comme rempli - si l'on admet qu'il s'agit d'une juridiction en tant que telle - parce que - suivant ce qui résulte de l'ensemble des éléments avancés dans le présent litige - il n'existe pas d'autre voie de recours judiciaire contre une décision du MIB (64).

    93 La nature contradictoire de la procédure arbitrale semble à nouveau extrêmement douteuse. Il est vrai que les deux parties, le MIB et la victime, peuvent présenter leur point de vue en ayant connaissance de la thèse des autres parties. Au cours de la procédure devant la Cour, il s'est avéré qu'un comportement de mauvaise foi lors de l'introduction de son recours avait été imputé au demandeur sans qu'il ait la possibilité de répondre à ce grief. Il s'agit d'une lacune de la procédure, qui est à de nombreux égards problématique.

    94 En application des règles procédurales d'un procès de droit civil, pour lequel s'applique le principe de l'administration de la preuve par les parties, la juridiction ne devrait asseoir sa décision sur aucun élément qui n'ait pas été apporté au procès par les parties et sur lequel la partie adverse n'ait pas pu se prononcer. Mais même si l'on voulait conférer à la procédure arbitrale en tant que suite de la procédure administrative devant le MIB - sous réserve - un caractère de droit public, les droits de la défense (65) du demandeur seraient violés. Même dans une procédure, à laquelle s'applique le principe inquisitorial (66), les droits de la défense doivent être sauvegardés, une partie devant pouvoir prendre position sur les faits qui lui sont reprochés.

    95 En ce qui concerne enfin le cinquième critère, «l'application de règles de droit», il est à considérer comme rempli lorsque l'organe tranche en droit et non pas selon l'équité. Pour décider définitivement si ce cinquième critère est rempli, il faut encore approfondir la question. La décision, dans la sentence arbitrale, de mettre les dépens à la charge du demandeur, en se fondant sur sa prétendue mauvaise foi - voir à ce sujet la clause 22 de l'accord, citée au point 6 - sans que le demandeur ait pu prendre position à cet égard, incite à penser que des considérations d'équité peuvent servir de base à la décision.

    96 Comme conclusion intermédiaire, il y a donc lieu de retenir que l'organe arbitral ne remplit pas pleinement les critères relativement stricts de l'article 177 du traité pour constituer une juridiction.

    97 En ce qui concerne maintenant les critères d'impartialité et d'indépendance découlant de l'article 6 de la CEDH en liaison avec l'article 47 de la charte des droits fondamentaux, selon les déclarations des parties à la présente procédure il y a lieu de partir du principe que les avocats de la Couronne figurant sur les listes décrites offrent toute garantie d'indépendance. La question se pose néanmoins de savoir si, étant donné leur position dans la procédure et leur proximité du MIB, ils offrent la même garantie d'impartialité. L'arbitre peut exiger du MIB tout autre examen complémentaire qu'il juge souhaitable. Il y a donc une sorte de terrain de négociation entre lui et le MIB. Lorsque l'arbitre a rendu sa sentence, celle-ci est d'abord uniquement signifiée au MIB, qui est ensuite responsable de sa communication à la victime.

    98 Par ailleurs, il n'y a devant l'arbitre pas de débat public au sens de l'article 6 de la CEDH en liaison avec l'article 47 de la charte des droits fondamentaux, puisqu'il statue sur la base des documents qui lui sont soumis (voir clause 17, citée au point 6). La collaboration prévue entre l'arbitre et le MIB ne peut pas être considérée comme un débat public. La victime n'est pas associée à ces discussions comme une procédure contradictoire l'exige. Le principe de l'oralité au cours de la procédure judiciaire est dans cette mesure apparenté à celui de la publicité des débats. Enfin, la forme de la signification de la décision ne peut pas être considérée comme une publication au sens de l'article 6 de la CEDH. Le caractère public de la procédure ne semble donc pas assuré de façon satisfaisante.

    99 La procédure arbitrale prévue par l'accord soulève donc de nombreuses interrogations.

    100 La Cour a déjà eu à se prononcer dans l'arrêt Nordsee (67) sur le caractère judiciaire d'un organe arbitral privé eu égard à l'article 177 du traité. La Cour y a déclaré que la solution dépend des particularités de la procédure arbitrale dans le cas d'espèce. Dans cet arrêt, la Cour n'a pas reconnu la qualité de juridiction à l'instance arbitrale concernée au motif que, d'une part, au moment de la conclusion du contrat, les parties contractantes étaient libres de laisser la solution de leurs litiges éventuels aux juridictions ordinaires (68) et, d'autre part, que les autorités publiques n'étaient pas impliquées dans le choix de la voie de l'arbitrage, et n'étaient pas non plus appelées à intervenir d'office dans le déroulement de la procédure devant l'arbitre (69).

    101 Si l'on considère la procédure arbitrale dans la présente espèce face à ces considérations, il apparaît que les autorités publiques par l'entremise du ministre des Transports étaient tout à fait impliquées dans le choix de la voie de l'arbitrage. Par ailleurs, la victime potentielle est tenue de chercher protection dans le cadre d'un accord auquel elle n'a pas pris part et qui a été conclu entre des parties qui sont complètement distinctes d'elle et sur lesquelles elle n'a aucune influence.

    102 Face à toutes les réserves déjà émises sur la création et la façon de procéder de l'instance arbitrale, il est donc décisif de savoir comment la protection de la victime s'organise.

    103 Comme le laisse entendre la troisième question, point v), de l'ordonnance de renvoi, et comme le confirment les affirmations concordantes à cet égard avancées par les parties, la victime peut faire appel de la sentence arbitrale devant les juridictions ordinaires. Il ne s'agit cependant pas d'une voie de recours illimitée, l'accès aux tribunaux et la portée du contrôle étant soumis à plusieurs conditions restrictives.

    104 Selon ce qu'a exposé la juridiction de renvoi, les modalités du recours sont les suivantes. La sentence arbitrale peut être attaquée pour irrégularités graves l'affectant ou pour des motifs de droit, ces derniers incluant le fait de savoir si une constatation déterminée de l'arbitre était étayée par des preuves ou si un arbitre, de manière raisonnable, n'aurait pas dû tirer telle constatation des preuves produites. Un recours sur des points de droit doit être autorisé par le tribunal, l'autorisation n'étant accordée que si la sentence arbitrale est manifestement erronée et que, au vu des circonstances, une décision judiciaire en l'espèce semble juste et équitable.

    105 Ces conditions restrictives pour l'accès aux tribunaux ont les caractéristiques d'un pur contrôle de droit ou de plausibilité. Le contrôle de droit et l'autorisation de faire appel sont souvent réservés aux juridictions supérieures dans la procédure de pourvoi. Le contrôle de l'introduction d'un recours visant à savoir si la sentence arbitrale est manifestement erronée et si une décision judiciaire est juste et équitable au vu des circonstances a un effet plus restrictif. L'accès aux tribunaux ordinaires pour les victimes d'un véhicule non identifié est rendu nettement plus difficile. Face aux exigences d'une protection juridictionnelle effective, c'est extrêmement problématique.

    106 Si l'on prend en compte le fait qu'au cours de cette phase de la procédure il s'agit d'une procédure de première instance devant une juridiction ordinaire, les exigences d'une protection juridictionnelle effective ne sont alors pas remplies. La victime doit avoir la possibilité, au moins dans une instance, d'obtenir une pleine protection juridictionnelle eu égard aux questions de fait et de droit.

    107 La comparaison de cette voie de recours avec la protection accordée aux victimes de conducteurs assurés ou non de véhicules identifiés - qui disposent des voies de recours ordinaires - montre que la protection accordée aux victimes de conducteurs non identifiés est largement inférieure à la leur. Les possibilités de protection des deux catégories de personnes ne doivent en droit communautaire pas nécessairement être identiques, la protection doit toutefois être qualitativement équivalente. Appliqué au cas d'espèce, ce principe signifie que le recours aux juridictions ordinaires doit être garanti.

    108 Étant donné qu'il s'agit d'un litige de droit civil relatif à une prestation d'indemnisation, dans lequel la victime et la compagnie d'assurances s'opposent, nous estimons indispensable une instance portant sur les faits. L'arrêt Upjohn (70) n'est pas contraire à cette constatation. Dans cette affaire, la Cour a considéré qu'un contrôle de pleine juridiction n'était pas indispensable. Mais le cas était très différent. Les autorités compétentes pour accorder ou retirer une autorisation de mise sur le marché de médicaments devaient réaliser des appréciations complexes relevant du domaine médico-pharmacologique (71). À cet effet, il existait un certain pouvoir d'appréciation, dès lors que la personne concernée avait la possibilité, en introduisant une nouvelle demande, de provoquer une nouvelle appréciation de la décision administrative (72).

    109 Le gouvernement du Royaume-Uni et le MIB ont souligné, pour justifier les dispositions existantes, qu'elles permettent en règle générale de régler ces cas plus rapidement et à un moindre coût.

    110 Le fait dommageable qui est à l'origine du présent litige s'est déroulé le 25 décembre 1991. Presque cinq ans après, le 27 août 1996, l'arbitre a rendu sa sentence arbitrale. Jusqu'à cette date, il n'était pas encore question de la saisine d'une juridiction ordinaire.

    111 Même si la procédure prévue par l'accord devait être plus rapide et moins coûteuse que les procès en responsabilité civile devant les juridictions ordinaires, cela ne justifie pas de priver la victime d'une protection juridictionnelle effective sous la forme d'une instance de pleine juridiction devant une juridiction ordinaire.

    112 Enfin, il appartiendra à la juridiction de renvoi d'évaluer les lacunes dans la protection juridique et d'en tirer les conséquences en droit. Elle devra à cet égard tenir compte du fait que l'absence de contrôle juridictionnel, englobant les questions de droit et de fait, sur les constatations de l'arbitre portant sur un droit résultant de la deuxième directive ne remplit pas les exigences de droit communautaire en matière de protection juridictionnelle effective.

    3. La transposition correcte de la directive - Quatrième question

    Thèse des parties

    113 Le demandeur est d'avis que la deuxième directive n'a pas été dûment transposée dès lors que l'État membre n'a pas imposé à l'organe agréé l'obligation d'indemniser la victime d'un conducteur non identifié dans la même mesure qu'une assurance obligatoire au sens de la première directive. Au Royaume-Uni, la deuxième directive n'a pas été transposée avec le caractère impératif remplissant les exigences de sécurité juridique. En dehors du fait que l'indemnisation prévue dans l'accord ne correspond pas en tous points à celle prévue dans la deuxième directive, les victimes devraient s'appuyer sur un accord auquel elles ne sont pas parties et s'en remettre à une simple pratique du MIB de ne pas invoquer devant les tribunaux le fait que la victime ne saurait tirer aucun droit de l'accord.

    114 Le gouvernement du Royaume-Uni et le MIB estiment qu'il n'y a pas lieu de prendre position sur la quatrième question. Ils rappellent toutefois que lors de la transposition d'une directive le choix de la forme et des moyens incombe à l'État membre. Si le droit national remplit déjà les exigences de la directive, aucune modification n'est plus nécessaire. Tel a été le cas lors de la transposition de la deuxième directive au Royaume-Uni: l'accord remplissait les exigences de précision, de clarté et de transparence et était donc conforme au principe de sécurité juridique.

    115 Selon ce qu'a exposé la Commission dans ses observations écrites, le MIB est un organisme agréé au sens de l'article 1er, paragraphe 4, de la deuxième directive, puisqu'il a été chargé par les autorités de l'État membre concerné de remplir les missions définies par la deuxième directive et qu'il n'est pas seulement en mesure mais est aussi tenu d'indemniser les victimes. Les victimes peuvent également s'adresser directement à cet organisme, qui doit leur donner une réponse motivée. Par ailleurs, une procédure légale est prévue lorsque la victime n'est pas satisfaite de l'indemnisation proposée.

    116 À l'audience, le représentant de la Commission a toutefois émis des doutes qui s'appuient sur la jurisprudence dans l'affaire White/White (73) citée par les parties, ainsi que sur l'arrêt de la Court of Appeal (74) rejetant le recours du demandeur. Dans la mesure où le droit national considère le MIB comme un organe exclusivement privé et l'accord entre celui-ci et le ministre comme de nature purement privée, avec pour conséquence qu'il n'y a aucune obligation d'appliquer les critères de la deuxième directive, cet organisme ne serait en réalité pas dûment agréé au sens de l'article 1er, paragraphe 4, de la deuxième directive.

    Appréciation

    117 Par la quatrième question, la juridiction de renvoi souhaite savoir si le Royaume-Uni a rempli l'obligation que lui impose l'article 1er, paragraphe 4, de la deuxième directive, d'agréer un organisme chargé de réparer les dommages causés par un véhicule non identifié ou non assuré. Elle se demande à cet égard si tel est le cas lorsqu'un organisme existant déjà doit réparer ces dommages sur la base d'un accord conclu avec l'autorité compétente, mais que les victimes n'ont aucun droit direct contre cet organisme. La juridiction de renvoi voudrait en outre savoir si pour répondre à cette question il est déterminant que l'État membre soit de bonne foi parti de l'idée que l'accord protège les victimes au moins aussi bien que la deuxième directive.

    118 La création du MIB remonte à 1946 et les accords sur l'indemnisation des victimes de conducteurs non assurés ou non identifiés datent dans leur première version de cette époque. Le Royaume-Uni avait donc prévu longtemps avant l'adoption de la deuxième directive une indemnisation des victimes d'accidents de la circulation dont les auteurs n'étaient pas assurés ou pas identifiés.

    119 Ainsi qu'il résulte du dossier, après l'adoption de la deuxième directive le 30 décembre 1983 le gouvernement du Royaume-Uni a entamé une procédure de consultation sur la question de savoir si la transposition de la directive nécessitait l'adoption de modalités d'exécution autonomes. Ces réflexions ont conduit à la conclusion que la protection existante de la victime remplissait pleinement les conditions et qu'il n'était donc pas nécessaire de prendre d'autres mesures de transposition. Cette appréciation a manifestement été partagée par la Commission puisqu'elle n'a formulé aucun grief concernant la transposition de la deuxième directive. Du fait que dans la pratique aussi - comme les parties à la présente procédure le confirment toutes - le MIB a toujours rempli les obligations que lui imposent les deux accords concernant les conducteurs non assurés et les conducteurs non identifiés, rien n'incitait à douter de la transposition correcte de la deuxième directive.

    120 L'idée que la transposition de la directive ne nécessitait pas d'autres mesures trouvait aussi confirmation dans le texte de l'article 1er, paragraphe 4, de la deuxième directive, qui prévoit expressément la possibilité d'agréer un organisme existant. C'est ainsi qu'au Royaume-Uni il n'y a pas eu d'autre acte formel de transposition de la deuxième directive, bien que le délai de transposition fixé par l'article 5, paragraphe 1, de la deuxième directive ait expiré le 31 décembre 1987 et que la Commission n'ait pas critiqué cette circonstance en quinze ans ou presque.

    121 Le fait qu'il doit y avoir malgré tout un problème dans la transposition de la deuxième directive résulte non seulement de la présente procédure mais aussi de l'arrêt, cité à maintes reprises, de la House of Lords du 1er mars 2001 dans l'affaire White/White (75) concernant l'accord parallèle sur les conducteurs non assurés. La House of Lords ne s'est pas sentie en mesure, comme l'exige la jurisprudence Marleasing de la Cour (76), d'interpréter l'accord dans un sens qui aurait contribué à mettre en oeuvre le contenu de la directive (voir ci-dessous point 127). La House of Lords a motivé cette attitude par le fait que l'accord est un contrat de droit privé, même si l'une des parties est un organisme d'État. Les parties au contrat sont donc seulement liées par ce qu'elles ont conclu. La House of Lords a déclaré que les principes de l'arrêt Marleasing devaient donc être écartés, bien qu'à un autre endroit dans son arrêt elle ait expressément exposé que l'accord MIB de 1988 ait été conclu dans l'optique de transposer la directive (77).

    122 On tirera aussi de nombreux enseignements de l'arrêt de la Court of Appeal rejetant le recours du demandeur, à un stade de la procédure antérieur à la présente affaire. Cette juridiction a déclaré que ce que le Royaume-Uni avait entrepris pour mettre en oeuvre la directive ne constituait pas «un organe ou un rapport» permettant de mettre en oeuvre la directive contre quiconque (si ce n'est peut-être contre soi même au sens de la jurisprudence Francovich e.a. (78)).

    123 Le demandeur est donc en l'espèce d'avis que le Royaume-Uni n'a pas transposé la deuxième directive.

    124 Les obligations des États membres en matière de transposition d'une directive sont établies par une jurisprudence constante. Il y a lieu d'en récapituler ici les traits principaux. La Cour a déclaré ce qui suit à propos de l'article 189, troisième alinéa, du traité CE (devenu article 249 CE):

    «Il ressort de cette disposition que la transposition d'une directive n'exige pas nécessairement une action législative dans chaque État membre. En particulier, l'existence des principes généraux de droit constitutionnel ou administratif peut rendre superflue la transposition par des mesures législatives ou réglementaires spécifiques à condition, toutefois, que ces principes garantissent effectivement la pleine application de la directive par l'administration nationale et qu''au cas où la directive vise à créer des droits pour les particuliers, la situation juridique découlant de ces principes soit suffisamment précise et claire et que les bénéficiaires soient mis en mesure de connaître la plénitude de leurs droits et, le cas échéant, de s'en prévaloir devant les juridictions nationales. Cette dernière condition est particulièrement importante, lorsque la directive en cause vise à accorder des droits aux ressortissants d'autres États membres, car ces ressortissants ne sont normalement pas au courant de ces principes» (79).

    125 Cette jurisprudence a été confirmée dans de nombreux arrêts (80). En réalité, la Cour a été amenée dans un autre contexte à préciser que: «[...] afin de garantir la pleine application des directives, en droit et non seulement en fait, les États membres doivent prévoir un cadre légal précis dans le domaine concerné» (81).

    126 En ce qui concerne les exigences de sécurité juridique, la Cour a déclaré: «Ainsi, les dispositions d'une directive doivent être mises en oeuvre avec une force contraignante incontestable, avec la spécificité, la précision et la clarté requises, afin que soit satisfaite l'exigence de la sécurité juridique qui requiert que, au cas où la directive vise à créer des droits pour les particuliers, les bénéficiaires soient mis en mesure de connaître la plénitude de leurs droits» (82). La Cour a réitéré cette opinion en des termes similaires dans d'autres arrêts (83).

    127 Dans l'arrêt Marleasing (84), la Cour a confirmé que l'obligation des États membres d'atteindre l'objectif prévu par une directive s'impose «à toutes les autorités des États membres», y compris, «dans le cadre de leurs compétences, les autorités juridictionnelles. Il s'ensuit qu'en appliquant le droit national, qu'il s'agisse de dispositions antérieures ou postérieures à la directive, la juridiction nationale appelée à l'interpréter est tenue de le faire dans toute la mesure du possible à la lumière du texte et de la finalité de la directive pour atteindre le résultat visé par celle-ci et se conformer ainsi à l'article 189, troisième alinéa, du traité» (85).

    128 Comme nous l'avons déjà souligné dans le cadre de l'examen de la troisième question, l'objectif de la directive est de conférer aux victimes de véhicules non assurés ou non identifiés un droit contre un organisme de l'État membre concerné. Dans la mesure où l'article 249 CE laisse aux instances nationales le soin de choisir la forme et les moyens pour atteindre l'objectif obligatoire de la directive, le fait de fonder les droits des victimes sur un accord entre une autorité et un organisme de droit privé n'est en soi pas contestable. Cependant, les droits doivent pouvoir être reconnus et invoqués avec la clarté et la sécurité nécessaires.

    129 À l'audience, le représentant du demandeur a mis en évidence les divergences de contenu entre la deuxième directive et l'accord, lesquelles ne font toutefois pas toutes l'objet de la présente procédure. On accordera cependant une importance fondamentale aux questions touchant au droit des victimes et à sa mise en oeuvre.

    130 Ainsi, suivant la description unanime du rapport entre les victimes et le MIB, les victimes n'ont aucun droit contre le MIB. Certes, il semble que le MIB ne refuse pas l'indemnisation malgré l'absence de rapport juridique contractuel avec la victime, parce qu'il est tenu à réparation par l'accord avec le ministre des Transports. Toutefois, lorsque la victime s'estime lésée, elle doit le cas échéant agir en justice contre le ministre afin que celui-ci l'oblige au respect de l'accord.

    131 Cette façon de procéder comporte tant d'impondérables qu'elle ne remplit pas les exigences de sécurité juridique décrites. Cette conclusion est encore renforcée par les problèmes de protection juridictionnelle examinés dans le cadre de la troisième question.

    132 La situation devient toutefois tout à fait inacceptable par rapport à l'attitude des juridictions nationales. Il aurait été pour le moins nécessaire que les juridictions nationales en tout état de cause eu égard au contenu des droits des victimes au sens de la jurisprudence Marleasing fassent une interprétation des droits découlant des accords entre le MIB et le ministre des Transports à la lumière de la deuxième directive, dès lors que la House of Lords partait de l'idée que l'accord de 1988 concernant les conducteurs non assurés avait été conclu dans l'intention de transposer la deuxième directive.

    133 Comme, en raison de la structure des rapports de droit, les juridictions britanniques n'ont pas estimé pouvoir agir de la sorte, il est clair que la deuxième directive n'a pas été transposée au Royaume-Uni avec la précision et la clarté nécessaires en droit national. L'obligation de sécurité juridique n'est donc pas remplie.

    134 La juridiction de renvoi souhaite enfin savoir si pour répondre à la question il importe de savoir si l'État membre était de bonne foi quant à la transposition correcte de la directive. L'appréciation de la transposition d'une directive en droit national est en principe un examen objectif. La bonne ou mauvaise foi d'un État membre est sans importance pour constater que la transposition ne remplit pas les exigences du droit communautaire. La question peut néanmoins très bien avoir de l'importance dans le cadre d'un éventuel droit à réparation.

    135 Il y a donc lieu de répondre à la quatrième question que la deuxième directive n'a pas été dûment transposée en droit national tant que la victime ne dispose pas d'un droit qu'elle peut invoquer contre l'organisme chargé par les autorités de l'État membre de l'indemnisation des victimes de véhicules non identifiés (ou non assurés).

    4. Le droit à réparation contre l'État membre - Cinquième question

    Thèse des parties

    136 Le demandeur fait valoir que les conditions requises pour engager la responsabilité du Royaume-Uni du fait de la non-transposition de la deuxième directive sont réunies. Le résultat prescrit par la directive comporte manifestement l'attribution d'un droit au profit des particuliers, les victimes de conducteurs non identifiés ou non assurés, catégorie dont le requérant fait clairement partie. Le contenu de ce droit peut être identifié sur la base des dispositions de la directive. Il s'agit d'obtenir une indemnisation d'un organisme agréé. La Cour n'a pas à examiner la question du lien de causalité qui relève de l'appréciation de la juridiction nationale. Enfin, la violation est suffisamment caractérisée, le Royaume-Uni s'étant abstenu d'adopter toute mesure en vue de transposer la directive.

    137 Pour le gouvernement du Royaume-Uni, les violations alléguées concernant les intérêts et les dépens soulèvent une série d'interrogations. Même si l'on se refusait à suivre l'interprétation défendue par le gouvernement du Royaume-Uni, la violation du droit communautaire ne serait pas suffisamment caractérisée pour engager la responsabilité du Royaume-Uni. De même, le Royaume-Uni pouvait raisonnablement considérer que la procédure mise en place satisfaisait à l'exigence d'un contrôle juridictionnel effectif. Enfin, en admettant que l'organisme n'a pas été agréé d'une façon conforme à la directive, le demandeur n'a en tout état de cause subi aucun préjudice de ce fait.

    138 Le MIB est d'avis qu'il appartient au défendeur au principal de répondre à la cinquième question.

    139 La Commission estime qu'il incombe à la juridiction nationale d'établir s'il existe en l'espèce une violation suffisamment caractérisée du droit communautaire. À cet égard, elle souligne cependant que les notions d'intérêts et de dépens ne sont pas mentionnées en tant que telles dans la deuxième directive et qu'il n'existe aucune jurisprudence sur ces points. La Commission ajoute qu'elle ne les a jamais soulevés auparavant à propos de la transposition de la deuxième directive. La question relative à la compatibilité de la procédure arbitrale avec les exigences d'une protection juridictionnelle effective exigerait des précisions supplémentaires.

    Appréciation

    140 Par la cinquième question, la juridiction de renvoi souhaite savoir si le manquement à la deuxième directive constitue une violation suffisamment caractérisée du droit communautaire pour engager la responsabilité pécuniaire de l'État membre concerné.

    141 Ainsi qu'il résulte des explications qui précèdent, la transposition de la deuxième directive ou l'application pratique des mesures considérées comme assurant sa transposition suscite des doutes à plusieurs égards. En premier lieu, le montant de l'indemnisation est fonction des dédommagements à verser en règle générale dans le cadre de l'assurance obligatoire, de sorte qu'il n'est très vraisemblablement pas approprié d'exclure le versement d'intérêts et de dépens lors du calcul de l'indemnisation sur la base de l'accord. Ensuite les voies de recours ouvertes à la victime ne remplissent pas à tous égards les exigences de la protection juridictionnelle effective. Enfin, il existe des lacunes dans l'agrément de l'organisme conformément à l'article 1er, paragraphe 4, de la deuxième directive sous la forme du MIB, dans la mesure où les victimes n'ont pas un droit direct contre cet organisme leur permettant aussi d'intenter une action en justice.

    142 On peut donc partir de l'idée que ces lacunes constituent une violation du droit communautaire en matière de transposition d'une directive. On peut toutefois se demander si cette violation peut engager la responsabilité de l'État membre concerné.

    143 La jurisprudence de la Cour en matière de responsabilité d'un État membre en droit communautaire remonte à l'arrêt Francovich e.a. (86) (cette affaire avait pour origine la non-transposition en droit national dans le délai fixé de la directive concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à la protection des travailleurs salariés en cas d'insolvabilité de l'employeur (87)). Sur le principe de la responsabilité de l'État, la Cour déclare de façon fondamentale:

    «Il y a lieu de constater que la pleine efficacité des normes communautaires serait mise en cause et la protection des droits qu'elles reconnaissent serait affaiblie si les particuliers n'avaient pas la possibilité d'obtenir réparation lorsque leurs droits sont lésés par une violation du droit communautaire imputable à un État membre.

    La possibilité de réparation à charge de l'État membre est particulièrement indispensable lorsque, comme en l'espèce, le plein effet des normes communautaires est subordonné à la condition d'une action de la part de l'État et que, par conséquent, les particuliers ne peuvent pas, à défaut d'une telle action, faire valoir devant les juridictions nationales les droits qui leur sont reconnus par le droit communautaire» (88).

    144 Les conditions dans lesquelles la responsabilité ouvre un droit à réparation dépendent «de la nature de la violation du droit communautaire qui est à l'origine du dommage causé» (89).

    145 En cas de violation de l'article 189, troisième alinéa, du traité, dont la Cour est partie dans l'affaire Francovich e.a., trois conditions doivent être remplies pour ouvrir un droit à réparation:

    «La première de ces conditions est que le résultat prescrit par la directive comporte l'attribution de droits au profit de particuliers. La deuxième condition est que le contenu de ces droits puisse être identifié sur la base des dispositions de la directive. Enfin, la troisième condition est l'existence d'un lien de causalité entre la violation de l'obligation qui incombe à l'État et le dommage subi par les personnes lésées» (90).

    146 Par la suite, la Cour a plusieurs fois précisé cette jurisprudence (91). Dans les arrêts Brasserie du pêcheur et Factortame (92), il s'agissait d'abord de savoir si la responsabilité de l'État pouvait aussi être engagée par la violation du droit primaire par le législateur national (93). La Cour a donné à cette question une réponse de principe affirmative (94). Dans cet arrêt, la Cour a pour la première fois déclaré que la violation devait être suffisamment caractérisée.

    147 Quant au critère de la «violation suffisamment caractérisée», la Cour a expliqué qu'il s'agit de «la méconnaissance manifeste et grave, par un État membre [...], des limites qui s'imposent à son pouvoir d'appréciation» (95).

    «À cet égard, parmi les éléments que la juridiction compétente peut être amenée à prendre en considération, il y a lieu de relever le degré de clarté et de précision de la règle violée, l'étendue de la marge d'appréciation que la règle enfreinte laisse aux autorités nationales ou communautaires, le caractère intentionnel ou involontaire du manquement commis ou du préjudice causé, le caractère excusable ou inexcusable d'une éventuelle erreur de droit, la circonstance que les attitudes prises par une institution communautaire ont pu contribuer à l'omission, l'adoption ou au maintien de mesures ou de pratiques nationales contraires au droit communautaire» (96).

    148 À la question de la faute comme critère de responsabilité, la Cour a répondu en ce sens qu'elle n'est pas en soi nécessaire, «certains éléments objectifs et subjectifs qui, dans le cadre d'un système juridique national, peuvent être rattachés à la notion de faute, sont ainsi pertinents pour apprécier si une violation du droit communautaire est ou non caractérisée» (97).

    149 La Cour a appliqué les conditions comparativement plus strictes de l'arrêt Brasserie du pêcheur et Factortame dans l'arrêt British Telecommunications (98) également dans une affaire où la transposition insuffisante d'une directive constituait le fait dommageable.

    150 Dans l'arrêt Hedley Lomas (99), la Cour a toutefois mis en évidence le fait que même la simple violation du droit communautaire pouvait remplir le critère d'une violation suffisamment caractérisée lorsque l'État membre en cause, «au moment où il a commis l'infraction, n'était pas confronté à des choix normatifs et disposait d'une marge d'appréciation considérablement réduite, voire inexistante» (100).

    151 Dans l'arrêt dans l'affaire Dillenkofer e.a. (101), qui, comme l'affaire Francovich e.a., avait pour origine une non-transposition d'une directive dans le délai fixé, de sorte que le demandeur estime ces arrêts pertinents en l'espèce, la Cour a précisé que «la condition d'une violation suffisamment caractérisée, dont il n'a certes pas été fait mention dans l'arrêt Francovich e.a. [...] était néanmoins inhérente aux circonstances de l'affaire» (102).

    152 Dans cette mesure, il y a lieu de considérer comme acquis que tout droit à réparation éventuellement ouvert contre un État membre suppose une violation suffisamment caractérisée.

    153 En s'appuyant sur les développements relatifs à une marge d'appréciation considérablement réduite voire inexistante dans l'arrêt Hedley Lomas, la Cour a déclaré dans l'arrêt Dillenkofer e.a.: «Dès lors, lorsque, comme dans l'affaire Francovich e.a., un État membre, en violation de l'article 189, troisième alinéa, du traité, ne prend aucune des mesures nécessaires pour atteindre le résultat prescrit par une directive, dans le délai que celle-ci a imparti, cet État membre méconnaît, de manière manifeste et grave, les limites qui s'imposent à l'exercice de ses pouvoirs» (103).

    154 Pour répondre à la cinquième question, il importe donc de savoir si les violations établies au droit communautaire constituent chacune en soi ou dans leur globalité une violation suffisamment caractérisée. En s'appuyant sur les arrêts Francovich e.a. et Dillenkofer e.a., on pourrait partager l'avis du demandeur selon lequel l'inaction du Royaume-Uni constitue une méconnaissance manifeste et grave des limites qui s'imposent à l'exercice de ses pouvoirs (104). Toutefois, étant donné que l'État membre concerné pouvait en tout état de cause invoquer une infrastructure existante, en partie expressément conforme à la directive, cette façon de penser paraît un peu courte. La question se pose donc de savoir dans quelle mesure une intervention du législateur national était nécessaire pour atteindre l'objectif prescrit par la directive (105).

    155 La création d'un organisme au sens de l'article 1er, paragraphe 4, de la deuxième directive n'était manifestement plus nécessaire. Cependant, la directive accorde à la victime un droit à réparation contre cet organisme, comme nous l'avons exposé plus haut (106). Pour créer et mettre en oeuvre un droit, il ne suffit pas que la victime potentielle puisse s'adresser de n'importe quelle façon à l'organisme. La directive est claire et précise sur ce point. Comme les accords MIB avec le ministre des Transports n'accordent pas à la victime un droit de cette nature, le législateur aurait dû intervenir. Son intervention était nécessaire pour créer au profit de la victime un droit qui puisse être invoqué en justice au moins dans les limites de l'obligation d'assurance. Que cela ait nécessité un acte législatif ou une adaptation du contenu de l'accord est une décision qui relève au bout du compte du pouvoir d'appréciation de l'État membre. La directive laisse à cet égard une certaine marge de manoeuvre à l'État membre. Néanmoins, l'État membre aurait dû établir de façon impérative l'obligation de résultat résultant de la directive en ce qui concerne les droits de la victime, et ce tant sur le fond que pour ce qui est de la procédure.

    156 Comme il existait déjà une structure fonctionnant, le problème n'est d'abord pas apparu, et c'est aussi la raison pour laquelle la Commission n'a pas agi contre le manquement du Royaume-Uni en ce qui concerne la directive. Ces circonstances n'enlèvent toutefois pas au manquement son caractère de violation par l'État membre de ses obligations de prendre les mesures nécessaires découlant de l'article 249, troisième alinéa, CE.

    157 Il appartient au juge national d'apprécier si le demandeur a subi un préjudice - et le cas échéant dans quelle mesure - et si la violation par l'État membre de ses obligations en a été la cause. En n'ayant pas accordé aux victimes de véhicules non identifiés un droit qui puisse être invoqué en justice au moins dans les limites de l'obligation d'assurance contre l'organisme au sens de l'article 1er, paragraphe 4, de la deuxième directive, le Royaume-Uni a commis une violation suffisamment caractérisée du droit communautaire au sens de la jurisprudence de la Cour en matière de droit à réparation contre les États membres. V - Conclusion158 Sur la base des considérations qui précèdent, nous proposons la réponse suivante aux questions préjudicielles:«1) Les intérêts et dépens constituent une composante indispensable d'un droit à réparation pour les victimes de véhicules non identifiés si et dans la mesure où ces éléments font partie du droit à réparation des victimes de véhicules dûment assurés et identifiés. Cela vaut tant sur le fond qu'en ce qui concerne les modalités de la liquidation.2) Dans les circonstances décrites dans la troisième question, pour des raisons de protection juridictionnelle effective, la victime doit avoir un droit de recours à une juridiction ordinaire, incluant les questions de fait et de droit.3) En ce qui concerne les droits des victimes, la deuxième directive 84/5/CEE du Conseil, du 30 décembre 1989, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à l'assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation des véhicules automoteurs, n'a pas été transposée en droit national avec la précision et la clarté requises pour satisfaire au principe de sécurité juridique.4) En n'ayant pas accordé aux victimes de véhicules non identifiés un droit qui puisse être invoqué en justice au moins dans les limites de l'obligation d'assurance contre l'organisme au sens de l'article 1er, paragraphe 4, de la deuxième directive, le Royaume-Uni a commis une violation suffisamment caractérisée du droit communautaire.»

    (1) - JO L 103, p. 1.

    (2) - JO 1994, L 8, p. 17.

    (3) - Le paragraphe 2 régit les montants minimaux de la couverture.

    (4) - Ci-après aussi le «ministre des Transports».

    (5) - Ci-après aussi l'«accord relatif aux conducteurs non assurés».

    (6) - Arrêt du 2 août 1993 (C-271/91, Rec. p. I-4367, point 31).

    (7) - Voir Cour eur. D. H., arrêt Aerey c. Irlande du 9 octobre 1979, série A n_ 32, § 24).

    (8) - Arrêt du 22 avril 1997 (C-66/95, Rec. p. I-2163).

    (9) - Arrêts du 4 octobre 1979, Ireks-Arkady/Conseil et Commission (C-238/78, Rec. p. 2955, point 20), et du 3 février 1994, Grifoni/CEEA (C-308/87, Rec. p. I-341, point 40).

    (10) - Arrêt Marshall, précité dans la note 7, point 31.

    (11) - Dans la suite de ces conclusions, il sera question tant de véhicule non identifié que de conducteur non identifié. La terminologie différente repose sur le fait que les directives se rapportent au véhicule alors que les accords entre le MIB et le ministre des Transports ont trait au conducteur.

    (12) - C'est nous qui soulignons.

    (13) - Voir arrêt du 14 septembre 2000, Mendes Ferreira et Delgado Coneia Ferreira (C-348/98, Rec. p. I-6711, point 32); voir aussi ordonnance du 14 octobre 2002, Withers (C-158/01, non encore publiée au Recueil, point 18).

    (14) - Voir troisième considérant de la deuxième directive.

    (15) - Voir quatrième considérant et article 1er, paragraphe 1, de la deuxième directive.

    (16) - Voir cinquième considérant et article 1er, paragraphe 2, de la deuxième directive.

    (17) - Troisième directive 90/232/CEE du Conseil, du 14 mai 1990, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à l'assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation des véhicules automoteurs

    (JO L 129, p. 33).

    (18) - Voir article 1er de la directive 90/232.

    (19) - Voir arrêt précité dans la note 7.

    (20) - Ibidem, point 30.

    (21) - Ibidem, point 6.

    (22) - Ibidem, point 31.

    (23) - Arrêt précité dans la note 10.

    (24) - Arrêt Ireks-Arkady/Conseil et Commission, précité dans la note 10, point 20 et point 2 du dispositif.

    (25) - Arrêt précité dans la note 10.

    (26) - Arrêt Grifoni/CEEA, précité dans la note 10, point 40.

    (27) - Arrêt précité dans la note 9.

    (28) - Mis en italique par nos soins.

    (29) - Arrêt Sutton, précité dans la note 9, point 27.

    (30) - Ibidem, point 33 et dispositif.

    (31) - Voir ci-dessus, aux points 40 à 42.

    (32) - Voir cinquième considérant de la première directive.

    (33) - Voir article 1er, paragraphe 4, de la deuxième directive.

    (34) - Voir sixième considérant de la deuxième directive.

    (35) - Voir article 1er, paragraphe 4, de la deuxième directive; mis en italique par nos soins.

    (36) - Voir, par exemple, arrêts du 15 septembre 1998, Edis (C-231/96, Rec. p. I-4951, point 34); du 17 novembre 1998, Aprile (C-228/96, Rec. p. I-7141, point 18), et du 21 janvier 1999, Upjohn (C-120/97, Rec. p. I-223, point 32).

    (37) - Voir, par exemple, arrêts du 16 décembre 1976, Rewe (33/76, Rec. p. 1989, point 5), et Comet (45/76, Rec. p. 2043, points 12 à 16).

    (38) - Voir arrêt du 14 décembre 1995, Peterbroeck (C-312/93, Rec. p. I-4599, point 12, et autres références citées).

    (39) - Voir arrêt Marshall, précité dans la note 7, point 31.

    (40) - Voir points 41 et 42.

    (41) - Précité dans la note 10.

    (42) - Précité dans la note 10.

    (43) - Arrêt du 15 mai 1986 (222/84, Rec. p. 1651, points 18 et 19).

    (44) - Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950.

    (45) - Voir Cour eur. D. H., arrêt Scarth c. Royaume-Uni du 22 juillet 1999.

    (46) - Voir Cour eur. D. H., arrêt Bryan/Royaume-Uni, du 22 novembre 1995, série A n_ 335.

    (47) - Voir article 1er, paragraphe 4, deuxième phrase.

    (48) - Arrêt précité dans la note 44.

    (49) - Arrêt du 22 septembre 1998 (C-185/97, Rec. p. I-5199).

    (50) - Directive 76/207/CEE du Conseil, du 9 février 1976, relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail (JO L 39, p. 40, ci-après la «directive sur l'égalité de traitement»).

    (51) - Voir arrêts Johnston, précité note 44, point 18, et Coote, précité note 50, point 21.

    (52) - Voir arrêts Johnston, précité note 44, point 19, et Coote, précité note 50, point 22.

    (53) - Arrêt du 15 octobre 1987 (222/86, Rec. p. 4097, point 14).

    (54) - Voir JO 2000, C 364, p. 1.

    (55) - Voir arrêt Peterbroek, précité note 39, point 12.

    (56) - La clause 1 dit que « [...] this Agreement applies to any case in which an application is made to M.I.B. for a payment in respect of the death of or bodily injury to any person caused by or arising out of the use of a motor vehicle on a road in Great Britain [...]». Voir aussi ci-dessus, point 6.

    (57) - Selon la clause 7: «M.I.B. shall cause any application made to them for a payment under this Agreement to be investigated [...]». Voir aussi ci-dessus, point 6.

    (58) - Aux termes de la clause 9: «M.I.B. shall notify their decision to the applicant [...]». Voir aussi ci-dessus, point 6.

    (59) - Voir ci-dessus, points 36 et suiv.

    (60) - Voir ci-dessus, point 39.

    (61) - Arrêt du 6 octobre 1981, Broekmeulen (246/80, Rec. p. 2311).

    (62) - Voir, par exemple, caractère judiciaire du conseil des avocats, ordonnance du 18 juin 1980, Borker (138/80, Rec. p. 1975).

    (63) - Lois sur l'arbitrage; voir à cet égard les indications fournies dans l'ordonnance de renvoi, points 111 et 114.

    (64) - Voir arrêt du 17 septembre 1997, Dorsch Consult (C-54/96, Rec. p. I-4961, points 28 et 29).

    (65) - Sur la protection des droits de la défense comme critère à prendre en compte voir arrêt du 14 décembre 1995, Van Schijndel et Van Veen (C-430/93 et C-431/93, Rec. p. I-4705, point 19).

    (66) - En règle générale dans les litiges de droit public et dans les procédures pénales.

    (67) - Arrêt du 23 mars 1982 (102/81, Rec. p. 1095).

    (68) - Ibidem, point 11.

    (69) - Ibidem, point 12.

    (70) - Précité note 37.

    (71) - Ibidem, point 33.

    (72) - Ibidem, point 40.

    (73) - Arrêt de la House of Lords du 1er mars 2001 [2001] UKHL 9.

    (74) - Voir ci-dessus, point 12.

    (75) - Précité note 74.

    (76) - Voir arrêt du 13 novembre 1990 (C-106/89, Rec. p. I-4135).

    (77) - «The MIB-Agreement was entered into with the specific intention of giving effect to the Directive.»

    (78) - Arrêt du 19 novembre 1991 (C-6/90 et C-9/90, Rec. p. I-5357).

    (79) - Voir arrêt du 23 mai 1985, Commission/Allemagne (29/84, Rec. p. 1661, point 23). En ce sens, voir aussi arrêt du 20 mars 1997, Commission/Allemagne (C-96/95, Rec. p. I-1653, point 35).

    (80) - Arrêt du 8 juillet 1987, Commission/Belgique (247/85, Rec. p. 3029, point 9); dans le même sens, voir aussi arrêts du 20 mai 1992, Commission/Pays-Bas (C-190/90, Rec. p. I-3265, point 17), et du 9 septembre 1999, Commission/Allemagne (C-217/97, Rec. p. I-5087, points 31 et 32).

    (81) - Arrêt du 15 mars 1990, Commission/Pays-Bas (C-339/87, Rec. p. I-851, point 25), c'est nous qui mettons en italique.

    (82) - Arrêt du 13 mars 1997, Commission/France (C-197/96, Rec. p. I-1489, point 15).

    (83) - Arrêt du 8 juillet 1999, Commission/France (C-354/98, Rec. p. I-4927, point 11).

    (84) - Précité note 77.

    (85) - Arrêt Marleasing, précité dans la note 77, point 8.

    (86) - Arrêt précité note 79, point 41.

    (87) - Directive 80/987/CEE du Conseil, du 20 octobre 1980 (JO L 283, p. 23).

    (88) - Points 33 et 34 de l'arrêt Francovich e.a., précité note 79.

    (89) - Point 38 de l'arrêt Francovich e.a., précité note 79.

    (90) - Voir point 40 de l'arrêt Francovich e.a., précité note 79.

    (91) - Voir arrêts du 5 mars 1996, Brasserie du pêcheur et Factortame (C-46/93 et C-48/93, Rec. p. I-1029); du 26 mars 1996, British Telecommunications (C-392/93, Rec. p. I-1631); du 23 mai 1996, Hedley Lomas (C-5/94, Rec. p. I-2553); du 8 octobre 1996, Dillenkofer e.a. (C-178/94, C-179/94, C-188/94 à C-190/94, Rec. p. I-4845); du 24 septembre 1998, Brinkmann (C-319/96, Rec. p. I-5255); du 1er juin 1999, Konle (C-302/97, Rec. p. I-3099); du 4 juillet 2000, Haim (C-424/97, Rec. p. I-5123), et du 18 janvier 2001, Stockholm Lindöpark (C-150/99, Rec. p. I-493).

    (92) - Précité note 92.

    (93) - Il s'agissait de la violation des articles 30 et 52 du traité CE (devenus, après modification, articles 28 CE et 43 CE). Voir arrêts Brasserie du pêcheur et Factortame, précité note 92, points 23 et 36.

    (94) - Voir arrêts Brasserie du pêcheur et Factortame, précité note 92, points 40 et suiv.

    (95) - Ibidem, point 55.

    (96) - Ibidem, précité dans la note 92.

    (97) - Ibidem, point 78.

    (98) - Arrêt précité dans la note 92, point 40.

    (99) - Précité dans la note 92.

    (100) - Voir arrêt Hedley Lomas, précité dans la note 92, point 28; dans le même sens par la suite, arrêt Stockholm Lindöpark, précité dans la note 92, point 40.

    (101) - Précité dans la note 92.

    (102) - Ibidem, point 23.

    (103) - Ibidem, point 26; c'est nous qui mettons en italique.

    (104) - Ibidem, point 26.

    (105) - Ibidem, points 26 et 47.

    (106) - Voir points 74 et suiv.

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