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Document 62000TO0095

Ordonnance du Tribunal de première instance (troisième chambre) du 3 avril 2001.
Tamara Zaur-Gora et Danielle Dubigh contre Commission des Communautés européennes.
Fonctionnaires - Concours - Non-admission - Limite d'âge - Demande de réexamen - Délai de réclamation - Recevabilité - Détournement de pouvoir - Discrimination - Recours manifestement non fondé.
Affaires jointes T-95/00 et T-96/00.

Recueil de jurisprudence - Fonction publique 2001 I-A-00079; II-00379

ECLI identifier: ECLI:EU:T:2001:114

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (troisième chambre)

3 avril 2001 ( *1 )

«Fonctionnaires — Concours — Non-admission — Limite d'âge — Demande de réexamen — Délai de réclamation — Recevabilité — Détournement de pouvoir — Discrimination — Recours manifestement non fondé»

Dans les affaires jointes T-95/00 et T-96/00,

Tamara Zaur-Gora, agent auxiliaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Lodelinsart (Belgique),

Danielle Dubigh, agent auxiliaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Bruxelles (Belgique),

représentées par Mes J.-N. Louis et V. Peere, avocats, ayant élu domicile à Luxembourg,

parties requérantes,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. J. Curali et M(tm) C. Berardis-Kayser, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d'annulation des décisions du jury du concours COM/C/2/99 ne pas admettre les requérantes audit concours,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),

composé de MM. J. Azizi, président, K. Lenaerts et M. Jaeger, juges,

greffier: M. H. Jung,

rend la présente

Ordonnance

Faits et procédure

1

Le 2 février 1999, la défenderesse a publié, au titre de l'article 29, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le «statut»), l'avis de concours général COM/C/2/99 pour la constitution d'une réserve de recrutement de dactylographes (C 5/C 4) de langue française (ci-après l'«avis de concours») (JO C 27 A, p. 10).

2

En ce qui concerne les conditions d'admission à ce concours, il était précisé au point IV B 1 de l'avis de concours: «Les candidats doivent être nés avant le 19 mars 1978 et après le 19 mars 1953.» L'annexe de cet avis prévoyait toutefois, en son point 1, que cette limite d'âge n'était pas applicable aux candidats possédant, depuis plus d'un an et de manière ininterrompue, la qualité de fonctionnaire ou d'agent des Communautés européennes à la date limite pour le dépôt des candidatures, à savoir le 19 mars 1999.

3

Les requérantes ont posé, en temps utile, leurs candidatures au concours général COM/C/2/99 (ci-après le «concours»).

4

Par lettres du 17 mai 1999, les requérantes ont reçu communication des décisions portant rejet de leurs demandes d'admission au concours au motif qu'elles ne satisfaisaient pas à la condition d'admission relative à la limite d'âge (ci-après les «décisions de non-admission»).

5

Conformément au point VI de l'avis de concours, Mme Zaur-Gora et Mme Dubigh ont demandé, respectivement, par courrier électronique et par lettre du 3 juin 1999, le réexamen de la décision de non-admission les concernant.

6

À la suite du réexamen de ces décisions, effectué par le jury dudit concours, celui-ci a informé Mme Zaur-Gora et Mme Dubigh, respectivement, par lettres du 14 et du 22 juin 1999, de ses décisions portant confirmation des décisions de non-admission (ci-après les «décisions prises après réexamen»).

7

Les requérantes ont ensuite introduit, chacune, le 24 septembre 1999, au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut, une réclamation contre la décision prise après réexamen les concernant. Par décision du 12 janvier 2000, l'autorité investie du pouvoir de nomination a rejeté ces réclamations aux motifs que, pour autant qu'elles visaient à faire requalifier les contrats d'intérimaire en contrats d'agent temporaire, elles étaient hors délais et, pour autant qu'elles visaient les décisions du jury, ce dernier avait correctement appliqué les dispositions de l'avis de concours. Les requérantes en ont été informées par lettres du 12 janvier 2000. Mme Zaur-Gora et Mme Dubigh ont pris connaissance de ces lettres, respectivement, le 19 et le 20 janvier 2000.

8

Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 12 juillet 2000, la partie défenderesse a soulevé une exception d'irrecevabilité dans chacun des recours au titre de l'article 114 du règlement de procédure du Tribunal. Les requérantes ont déposé leurs observations sur l'exception les concernant.

9

Par ordonnance du Tribunal du 25 octobre 2000, les affaires T-95/00 et T-96/00 ont été jointes pour la suite de la procédure, conformément à l'article 50 du règlement de procédure.

10

Par ordonnance du même jour, les exceptions d'irrecevabilité susvisées ont été jointes au fond et les dépens ont été réservés.

Conclusions des parties

11

Mme Dubigh conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

annuler la décision du jury rejetant sa candidature au concours;

condamner la défenderesse aux dépens.

12

Mme Zaur-Gora conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

annuler la décision du jury rejetant sa candidature au concours;

condamner la défenderesse aux dépens.

13

La défenderesse conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

à titre principal, rejeter les recours comme manifestement irrecevables;

à titre subsidiaire, rejeter les recours comme non fondés;

statuer comme de droit sur les dépens.

En droit

14

En vertu de l'article 114, paragraphe 3, du règlement de procédure, la suite de la procédure sur l'exception d'irrecevabilité est orale, sauf décision contraire du Tribunal.

15

En vertu de l'article 111 du règlement de procédure, lorsqu'un recours est dépourvu de tout fondement en droit, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d'ordonnance motivée.

16

En l'espèce, le Tribunal s'estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application de ces dispositions, de statuer sans poursuivre la procédure.

Sur la recevabilité

Arguments des parties

17

Dans ses exceptions d'irrecevabilité, la défenderesse avance que les requérantes n'ont pas respecté les délais statutaires en ce qui concerne l'introduction de leurs réclamations dans la mesure où, les actes faisant grief étant les décisions de non-admission, datées du 17 mai 1999, les réclamations introduites le 24 septembre 1999 à l'encontre de ces décisions étaient manifestement tardives.

18

Quant aux décisions prises après réexamen, il s'agit, selon la défenderesse, de décisions purement confirmatives des décisions de non-admission.

19

Elle précise que les décisions prises après réexamen n'ont pas été précédées d'un véritable réexamen de la situation des requérantes et ne contiennent aucun élément nouveau par rapport aux décisions initiales (arrêts du Tribunal 15 octobre 1997, IPK-München/Commission, T-331/94, Rec. p. II-1665, point 24, ainsi que la jurisprudence citée, et du 21 octobre 1998, Vicente-Nuñez/Commission, T-100/96, RecFP p. I-A-591 et II-1779, point 37).

20

À cet égard, la défenderesse estime qu'il y a lieu de se référer à l'ordonnance du Tribunal du 17 mai 2000, Borrego Alias/Comité des régions (T-28/00, non publiée au Recueil). Dans ce cas d'espèce, le requérant, qui demandait l'annulation de la décision du jury de ne pas l'admettre à un concours, avait laissé passer les délais prévus par l'article 90, paragraphe 2, du statut. Il faisait néanmoins valoir que, dans la mesure où une lettre confirmative de la décision antérieure de non-admission lui avait été notifiée après réexamen de son dossier, il avait respecté les délais prévus en présentant sa réclamation dans un délai de trois mois suivant cette décision confirmative. Le Tribunal a rejeté le recours comme manifestement irrecevable, dans la mesure où la seconde décision du jury devait être considérée comme purement confirmative.

21

Les requérantes contestent, dans leurs observations du 13 septembre 2000, l'irrecevabilité de leurs recours.

22

Elles considèrent en effet que les décisions prises après réexamen ne constituent pas des décisions purement confirmati ves, puisque le jury a réexaminé leurs demandes d'admission en tenant compte de leurs griefs. Mme Zaur-Gora expose, en particulier, que, dans sa demande de réexamen, elle a fait valoir que le jury devait tenir compte du fait que c'était en raison de problèmes budgétaires au sein de la défenderesse qu'elle-même ne disposait pas de l'ancienneté requise par l'avis de concours. Quant à Mme Dubigh, elle a demandé au jury de réexaminer sa demande d'admission au vu du fait qu'il y avait une «discrimination non motivée dans les conditions d'accès» prévues, d'une part, par l'avis du concours (plus d'un an de service) et, d'autre part, par l'avis de concours EUR/C/140, paru au Journal officiel du 5 juin 1998, portant recrutement de secrétaires de langue anglaise (au moins un an de service). Selon les requérantes, le jury a tenu compte de ces nouveaux éléments dans le cadre de son réexamen, de sorte que les décisions prises après réexamen se sont substituées aux décisions de non-admission.

23

De plus, les requérantes relèvent, à titre subsidiaire, que, dans la mesure où elles disposaient du droit de demander le réexamen des décisions de non-admission en vertu du point VI de l'avis de concours, ces décisions ne deviennent définitives à leur égard qu'après que le jury a pris une nouvelle décision au terme du réexamen de leurs dossiers de candidature.

Appréciation du Tribunal

24

Selon une jurisprudence bien établie, un recours en annulation formé contre une décision purement confirmative d'une décision antérieure non attaquée dans les délais est irrecevable, étant entendu que cette qualification suppose que l'acte ne contienne aucun élément nouveau par rapport à cette décision et qu'il n'ait pas été précédé d'un réexamen de la situation du destinataire de celle-ci (arrêt Vicente-Nuñez/Commission, cité au point 19 ci-dessus, points 37 et suivants, et IPK-München/Commission, cité au point 19 ci-dessus, point 24). Ainsi, en principe, un recours en annulation dirigé contre une décision du jury, prise après réexamen, confirmant une décision antérieure de non-admission ne saurait être déclaré recevable que si cette décision comporte des éléments nouveaux par rapport à la décision antérieure et si elle s'est, par conséquent, substituée à celle-ci (arrêt du Tribunal du 3 mars 1994, Cortes Jimenez e.a./Commission, T-82/92, RecFP p. I-A-69 et II-237, point 14).

25

II convient toutefois de relever que, dans le cas d'espèce, c'est en vertu du point VI de l'avis de concours, c'est-à-dire en vertu d'une règle que la défenderesse s'est engagée à respecter, et qui, dès lors, la lie (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 17 décembre 1991, Hercules Chemicals/Commission, T-7/89, Rec. p. II-1711, point 53, et, spécifiquement en matière de fonction publique, arrêts du Tribunal du 17 février 1991, Ferreira de Freitas/Commission, T-2/90, Rec. p. II-103, points 56 et 61, et Vicente-Nuñez/Commission, cité au point 19 ci-dessus, point 67), que les personnes dont les candidatures au concours avaient été rejetées pouvaient demander le réexamen des décisions de non-admission.

26

Dans une telle situation, il n'y a pas lieu de rechercher si la décision prise après réexamen est ou non confirmative de la décision antérieure de non-admission. L'existence d'un droit procédural au réexamen dans le chef des requérantes a, en effet, nécessairement pour conséquence que c'est la décision prise après réexamen et non la décision initiale qui doit être considérée comme l'acte faisant grief au sens de l'article 90, paragraphe 2, du statut.

27

À cet égard, il convient, en particulier, d'observer que la position contraire aurait pour conséquence de priver une telle voie de recours instaurée par la défenderesse en faveur des personnes souhaitant participer à des concours communautaires de son effet utile ou, à tout le moins, d'en réduire la pertinence (voir, en ce sens, mais dans un autre contexte, arrêt de la Cour du 4 octobre 1983, Fediol/Commission, 191/82, Rec. p. 2913, point 31). En effet, si seule la décision antérieure de non-admission devait être considérée comme un acte faisant grief, les personnes souhaitant demander le réexamen d'une telle décision se verraient contraintes, afin d'éviter un éventuel dépassement du délai, d'introduire, en même temps que leur demande, une réclamation au sens de l'article 90, paragraphe 2, du statut ou un recours devant le Tribunal, ce qui enlèverait toute utilité à la procédure de réexamen. Une telle situation serait également contraire au principe de l'économie de la procédure.

28

Par conséquent, il y a lieu de considérer que, lorsqu'une partie dont la demande d'admission à un concours communautaire a été rejetée demande le réexamen de cette décision sur la base d'une disposition précise liant l'administration, c'est la décision prise par le jury après réexamen qui constitue l'acte faisant grief au sens de l'article 90, paragraphe 2, ou, le cas échéant, l'article 91, paragraphe 1, du statut. En conséquence, dès lors que la procédure de réexamen repose sur une disposition spécifique, il n'y a pas lieu de vérifier si, dans une telle situation, la décision prise après réexamen peut éventuellement être considérée comme un acte purement confirmatii.

29

En outre, il doit être constaté que c'est à tort que la défenderesse se réfère à l'ordonnance Borrego Alias/Comité des régions, citée ci-dessus au point 20. S'il est vrai que l'affaire ayant donné lieu à cette ordonnance avait trait à un cas d'espèce assez analogue à celui en cause dans les présents recours, il existe, néanmoins, une différence essentielle entre ces derniers et celle-là. Il ressort, en effet, du point 20 de cette dernière ordonnance que, contrairement aux requérantes dans les présents recours, le requérant dans l'ordonnance précitée n'avait jamais demandé le réexamen du rejet de sa demande d'admission, mais s'était limité à demander des précisions à cet égard.

30

Au vu de ce qui précède, il convient de considérer que, contrairement à ce que fait valoir la défenderesse, les réclamations introduites par les requérantes le 24 septembre 1999 n'étaient pas tardives puisqu'elles l'ont été dans un délai de trois mois à compter de la prise de connaissance des décisions prises après réexamen.

31

Dès lors, il n'y a pas lieu d'accueillir les exceptions d'irrecevabilité soulevées par la défenderesse à l'égard des recours introduits par les requérantes.

Sur lefond

Arguments des parties

32

Les requérantes invoquent un moyen unique à l'appui de leurs recours en annulation des décisions du jury rejetant leurs candidatures. Elles font valoir que le jury a commis une erreur d'appréciation en constatant dans lesdites décisions qu'elles ne satisfaisaient pas à la condition relative à la limite d'âge, alors que cet état de fait résultait de pratiques administratives illégales de la défenderesse.

33

Ce moyen comporte deux branches.

34

Dans une première branche, les requérantes exposent qu'elles ont été affectées, de manière permanente, aux mêmes fonctions au sein de la défenderesse, depuis le 12 mai 1997 en ce qui concerne M(tm) Dubigh et depuis le 22 mai 1997 en ce qui concerne Mme Zaur-Gora, mais que, à cette fin, elles ont été engagées successivement sous des statuts d'agent auxiliaire et d'intérimaire.

35

Ainsi, Mme Dubigh précise qu'elle a été engagée par la société d'intérim Manpower et mise à la disposition de la direction générale «Transports» (DG VII) et du Centre commun de recherche (CCR) durant la période allant du 1er avril au 11 mai 1997 puis de l'unité 2 «Recherche agro-industrielle» de la direction E «Actions de RDT: sciences et technologies du vivant» de la direction générale «Science, recherche et développement» (DG XII) durant la période du 12 mai au 31 octobre 1997. Ensuite, elle expose que, du 1er novembre 1997 au 31 octobre 1998, elle a exercé, en tant qu'agent auxiliaire, les mêmes fonctions de dactylographe au sein de la même unité de la DG XII. Du 1er novembre 1998 au 30 avril 1999, elle avance qu'elle a de nouveau été engagée en tant qu'intérimaire par la société Vedior Interim et mise à la disposition de la même unité de la DG XII. Enfin, depuis le 1er mai 1999, la requérante prétend qu'elle exerce les mêmes fonctions au sein de la même unité en tant qu'agent auxiliaire.

36

Quant à Mme Zaur-Gora, elle fait observer qu'elle été a engagée par la société d'intérim Manpower et mise à la disposition de la direction générale «Industrie» (DG III) du 22 mai 1997 au 30 septembre 1997. Ensuite, du 1er octobre 1997 au 31 décembre 1998, elle précise qu'elle a exercé, en tant qu'agent auxiliaire, les mêmes fonctions de dactylographe au sein de l'unité 1 «Questions horizontales PHARE» de la direction B «Relations avec les pays de l'Europe centrale» de la direction générale «Relations extérieures Europe et nouveaux États indépendants, politique étrangère et de sécurité commune, service extérieur» (DG IA). Du 1er janvier 1999 au 30 juin 1999, elle rappelle qu'elle a de nouveau été engagée en tant qu'intérimaire par la société Vedior Interim et mise à la disposition de la même unité de la DG IA. Enfin, depuis le 1er juillet 1999, la requérante signale qu'elle exerce les mêmes fonctions au sein de la même unité en tant qu'agent auxiliaire.

37

Selon les requérantes, cette pratique, qui ne répond nullement aux besoins du service, est dictée par des contraintes budgétaires et a pour seul but d'échapper aux obligations statutaires qui incombent à la défenderesse. Elle constituerait dès lors un détournement de pouvoir de la part de la défenderesse (arrêt de la Cour du 6 décembre 1989, Mulfingere.a./Commission, 249/87, Rec. p. 4127). Les requérantes estiment que cette conclusion s'impose d'autant plus que, en raison de la permanence de leurs fonctions au sein de la défenderesse, elles ne peuvent être engagées sur la base d'un statut d'agent auxiliaire, lequel, selon la jurisprudence, est caractérisé par son caractère précaire et ne peut être utilisé pour confier, durant de longues durées, des tâches permanentes (arrêt de la Cour du 1er février 1979, Deshormes/Commission, C-17/78, Rec. p. I-189, points 37 et 38). Il conviendrait plutôt de considérer les contrats qu'elles ont conclus depuis le 12 mai 1997 (Mme Dubigh) et le 22 mai 1997 (Mme Zaur-Gora) comme des contrats d'agent temporaire.

38

Les requérantes exposent, en second lieu, que, en raison d'une pratique particulière au sein de la DG XII ainsi que de la DG IA, il n'est jamais accordé deux contrats d'agent auxiliaire consécutifs, mais ceux-ci doivent toujours être séparés par une période de six mois effectuée en tant qu'intérimaire. En raison de cette pratique, qui n'existerait pas dans les autres directions générales de la défenderesse, les requérantes ainsi que toutes les personnes engagées en tant qu'agents auxiliaires au sein de ces deux directions générales seraient discriminées par rapport à celles employées dans d'autres directions générales quant à leur participation à des concours dont les conditions d'admission prévoient, par exception à la limite d'âge, un minimum d'un an d'ancienneté. Cette pratique serait également contraire à l'article 27 du statut, selon lequel le recrutement doit viser à assurer le concours de fonctionnaires possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d'intégrité.

39

La défenderesse conteste que le jury ait commis une erreur d'appréciation en rejetant les candidatures des requérantes.

40

Elle fait valoir, à titre liminaire, que le présent recours ne concerne que les décisions de rejet des candidatures des requérantes et non la régularisation de la situation de ces dernières, laquelle ferait l'objet d'un recours distinct (T-375/00). Elle fait observer que la plupart des arguments avancés par les requérantes ne peuvent se comprendre que dans le cadre de ce second recours et que, aux fins du présent recours, seul l'argument concernant l'erreur d'appréciation manifeste s'avère pertinent.

41

En ce qui concerne cet argument, elle fait observer que, ainsi qu'il ressort clairement du dossier, les requérantes étaient engagées en tant qu'intérimaires au moment de leur candidature au concours, de sorte que l'exception à la condition d'admission relative à la limite d'âge n'était pas applicable.

42

Elle fait observer également que l'argument des requérantes selon lequel le jury aurait dû considérer qu'elles avaient un statut d'agent temporaire est sans intérêt, dans la mesure où le jury ne pouvait pas préjuger de cette question pour laquelle il n'était, d'ailleurs, nullement compétent. Elle note également que le jury ne pouvait pas savoir que les requérantes entendaient faire valoir cette prétention, dans la mesure où elles n'ont fait leurs prétendues demandes de régularisation que le 24 septembre 1999 (dans le cadre de leurs réclamations) et n'ont produit les documents à l'appui de ces demandes que dans le cadre de leur recours dans l'affaire T-375/00.

43

À titre subsidiaire, la défenderesse aborde les autres arguments invoqués par les requérantes.

44

En ce qui concerne les arguments relatifs au détournement de pouvoir invoqués par les requérantes à l'appui de leurs «demandes de régularisation», la défenderesse relève que ces questions ont déjà été abordées par le Tribunal dans son arrêt du 10 mai 2000, Simon/Commission (T-177/97, RecFP p. I-A-75 et II-319, points 38 à 48). Selon la défenderesse, il ressort, en effet, de cet arrêt qu'une personne employée par un tiers afin de fournir des services au sein des institutions communautaires n'a pas la qualité de membre du personnel de celles-ci et qu'elle ne saurait obtenir cette qualité dans le cadre d'une procédure de régularisation. La défenderesse estime qu'une conclusion similaire s'impose en l'espèce, dans la mesure où les requérantes n'avaient pas de relations contractuelles avec la défenderesse, étant engagées par des sociétés d'intérim.

45

Quant à l'argument relatif à la prétendue illégalité de la politique du personnel en raison de la discrimination exercée envers les agents auxiliaires employés par la DG XII et la DG IA, la défenderesse considère que cet argument est irrecevable, dans la mesure où il n'a pas été soulevé dans le cadre de la procédure précontentieuse.

46

Selon la défenderesse, cet argument est également non fondé, dans la mesure où, contrairement à ce qu'affirment les requérantes, ces directions générales n'ont aucune politique particulière en la matière, ainsi qu'il ressort d'ailleurs d'une lettre de l'administration à Mme Zaur-Gora lui précisant la position du service du personnel à cet égard. Dans la mesure où cet argument concerne la condition de l'avis de concours relative à la limite d'âge, la défenderesse fait observer que, dans son arrêt du 21 novembre 2000, Carrasco Benítez/Commission (T-214/99, RecFP p. I-A-257 et II-1169, points 59 à 63), le Tribunal a rejeté un recours mettant en cause une condition posée par un avis de concours qui limitait la participation audit concours aux personnes justifiant de dix ans d'ancienneté. Enfin, elle note que les dates des contrats d'embauché relevant du hasard, le statut d'un candidat à un concours, tel celui des requérantes, ne saurait en soi être considéré comme source de discrimination, même s'il a pour conséquence que certaines personnes peuvent participer à un concours, d'autres pas ou que certaines personnes peuvent participer à davantage de concours que d'autres (arrêts du Tribunal du 5 février 1997, Ibarra Gil/Commission, T-207/95, RecFP p. I-A-13 et II-31, point 70, et Petit-Laurent/Commission, T-211/95, RecFP p. I-A-21 et II-57, point 58).

Appréciation du Tribunal

47

À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, nonobstant son pouvoir d'appréciation, le jury est lié par le texte de l'avis de concours tel qu'il a été publié. En effet, le rôle essentiel de l'avis de concours, tel qu'il a été conçu par le statut, consiste à informer les intéressés d'une façon aussi exacte que possible de la nature des conditions requises pour occuper le poste dont il s'agit, afin de les mettre en mesure d'apprécier, d'une part, s'il y a lieu pour eux de faire acte de candidature et, d'autre part, quelles pièces justificatives sont d'importance pour les travaux du jury et doivent, par conséquent, être jointes aux actes de candidature (voir arrêts du Tribunal du 28 novembre 1991, Van Hecken/CES, T-158/89, Rec. p. II-1341, point 23, et du 21 mai 1992, Almeida Antunes/Parlement, T-54/91, Rec. p. II-1739, point 39).

48

En l'espèce, l'avis de concours prévoyait explicitement à son point IV B 1 que, afin d'être admis au concours, les candidats devaient être nés avant le 19 mars 1978 et après le 19 mars 1953. Selon le point 1 de l'annexe de l'avis de concours, cette limite d'âge ne s'appliquait toutefois pas «au candidat qui [possédait], depuis plus d'un an et de manière ininterrompue, la qualité de fonctionnaire ou d'agent des Communautés européennes à la date limite pour le dépôt des candidatures».

49

Il est constant entre les parties que les requérantes ne satisfaisaient pas à la condition d'admission prévue au point IV B 1 de l'avis de concours, puisqu'elles sont nées avant le 19 mars 1953.

50

Quant à l'exception prévue au point 1 de l'annexe de l'avis de concours, il ressort clairement du dossier que, à la date limite pour le dépôt des candidatures (à savoir le 19 mars 1999), les requérantes n'avaient pas la qualité de fonctionnaire ou d'agent des Communautés européennes. En effet, à cette date, les requérantes étaient engagées en tant qu'intérimaires par la société Vedior Interim et mises à la disposition de la défenderesse. Or, ainsi qu'il ressort, notamment, de l'arrêt de la Cour du 11 juillet 1985, Salerno e.a./Commission et Conseil (87/77, 130/77, 22/83, 9/84 et 10/84, Rec. p. 2523, points 42 et 43), la qualité d'agent des Communautés ne saurait être reconnue à une personne dont l'employeur était non pas la défenderesse ou une autre institution des Communautés, mais une personne morale soumise au droit d'un État membre, qui ne peut être assimilée à une entité administrative de l'institution en cause.

51

Il ressort de ce qui précède que le jury n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en rejetant les candidatures des requérantes au motif qu'elles ne satisfaisaient pas à la condition d'admission relative à la limite d'âge prévue par l'avis de concours.

52

Les requérantes font toutefois valoir que le jury aurait dû tenir compte du fait que c'est en raison de pratiques illégales et discriminatoires de la défenderesse qu'elles ne disposaient pas, à la date limite du dépôt des candidatures, de la qualité d'agent des Communautés telle que requise par l'annexe de l'avis de concours.

53

Il convient de constater que, par cette argumentation, les requérantes ne contestent ni l'appréciation portée par le jury de concours sur la base des pièces produites par elles à l'appui de leurs candidatures, ni, a fortiori, la légalité de la disposition de l'avis de concours relative à la limite d'âge sur la base desquelles le jury a pris sa décision. Les requérantes contestent plutôt le fait que le jury n'a pas tenu compte, dans le cadre de son appréciation de la satisfaction des conditions d'admission, du fait que c'est en raison de pratiques administratives illégales de la défenderesse qu'elles n'étaient pas en mesure de satisfaire à ces conditions.

54

Cette argumentation ne saurait être retenue.

55

Il convient, en effet, de souligner que, ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, le jury est lié par l'avis de concours et, en particulier, par les conditions d'admission fixées par celui-ci. Afin de vérifier si ces conditions sont satisfaites, le jury peut, uniquement, tenir compte des indications fournies par les candidats dans leur acte de candidature et des pièces justificatives qu'il leur incombe de produire à l'appui de celui-ci (voir, en ce sens, le point V 5 de l'avis de concours).

56

En revanche, aux fins de l'appréciation de la satisfaction des conditions d'admission, le jury ne saurait, en aucun cas, tenir compte d'éléments factuels et/ou juridiques permettant de justifier la non-satisfaction par un candidat des conditions d'admission. En particulier, il n'appartient pas au jury de faire abstraction, dans le cadre de son appréciation de la satisfaction de la condition relative à la qualité d'agent des Communautés, de la nature de l'engagement liant un candidat à son employeur au moment du dépôt de la candidature. Si, comme en l'espèce, il ressort des pièces produites par ce candidat qu'il n'a pas la qualité requise, il incombe au jury de rejeter la candidature. En aucun cas, le jury n'est habilité à requalifier la nature de cet engagement, même si celle-ci est la conséquence éventuelle de pratiques illégales au sein d'une institution communautaire.

57

Enfin, il convient de préciser que, si, ainsi qu'il a été souligné ci-dessus aux points 54 à 56, les requérantes ne sauraient demander l'annulation des décisions d'un jury de concours en invoquant l'illégalité de certaines pratiques administratives au sein des institutions communautaires ayant eu pour conséquence qu'elles-mêmes n'ont pas été en mesure de satisfaire à une condition d'admission audit concours, en revanche rien ne les empêche de s'opposer, par les voies de droit prévues à cet effet, aux actes affectant leur situation juridique qu'elles considèrent être la manifestation de ces pratiques illégales.

58

Au vu de ce qui précède, le moyen unique doit être rejeté comme manifestement non fondé.

Sur les dépens

59

En vertu des dispositions combinées de l'article 87, paragraphe 1, et de l'article 88 du règlement de procédure du Tribunal, chacune des parties supportera ses propres dépens, y compris ceux relatifs aux exceptions d'irrecevabilité.

 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

ordonne:

 

1)

Les recours sont déclarés recevables.

 

2)

Les recours sont rejetés comme manifestement non fondés.

 

3)

Chacune des parties supportera ses propres dépens, y compris ceux relatifs aux exceptions d'irrecevabilité.

 

Fait à Luxembourg, le 3 avril 2001.

Le greffier

H. Jung

Le président

J. Azizi


( *1 ) Langue de procedure- le français.

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