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Document 62000CJ0115

    Arrêt de la Cour du 2 juillet 2002.
    Andreas Hoves Internationaler Transport-Service SARL contre Finanzamt Borken.
    Demande de décision préjudicielle: Finanzgericht Münster - Allemagne.
    Transports de marchandises par route - Taxe sur les véhicules automoteurs - État membre d'immatriculation.
    Affaire C-115/00.

    Recueil de jurisprudence 2002 I-06077

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2002:409

    62000J0115

    Arrêt de la Cour du 2 juillet 2002. - Andreas Hoves Internationaler Transport-Service SARL contre Finanzamt Borken. - Demande de décision préjudicielle: Finanzgericht Münster - Allemagne. - Transports de marchandises par route - Taxe sur les véhicules automoteurs - État membre d'immatriculation. - Affaire C-115/00.

    Recueil de jurisprudence 2002 page I-06077


    Sommaire
    Parties
    Motifs de l'arrêt
    Décisions sur les dépenses
    Dispositif

    Mots clés


    1. Transports - Transports par route - Admission des transporteurs non résidents aux transports nationaux de marchandises - Règlement n° 3118/93 - Perception dans l'État membre d'accueil d'une taxe sur les véhicules automoteurs frappant les véhicules immatriculés dans l'État membre d'établissement et bénéficiant d'une autorisation de cabotage - Inadmissibilité

    (Règlement du Conseil n° 3118/93, art. 6)

    2. Transports - Transports par route - Dispositions fiscales - Harmonisation des législations - Taxes sur certains véhicules utilisés pour le transport de marchandises par route et charges routières pour l'utilisation de certaines infrastructures - Directive 93/89 - Perception dans l'État membre d'accueil d'une taxe sur les véhicules automoteurs frappant les véhicules immatriculés dans l'État membre d'établissement et bénéficiant d'une autorisation de cabotage - Inadmissibilité

    (Règlement du Conseil n° 3118/93; directive du Conseil 93/89, art. 5)

    Sommaire


    1. L'article 6 du règlement n° 3118/93 fixant les conditions de l'admission de transporteurs non résidents aux transports nationaux de marchandises par route dans un État membre, qui prévoit que l'exécution des transports de cabotage est soumise aux dispositions législatives, réglementaires et administratives en vigueur dans l'État membre d'accueil dans un certain nombre de domaines, ceux-ci constituant une liste limitative dans laquelle ne figurent ni l'obligation d'immatriculer le véhicule dans l'État membre d'accueil ni l'obligation d'y payer la taxe sur les véhicules automoteurs, s'oppose à des dispositions nationales d'un État membre d'accueil entraînant la perception, par celui-ci, de la taxe sur les véhicules automoteurs frappant l'utilisation de véhicules automobiles pour le transport de marchandises par route au motif que ces véhicules auraient leur point d'attache habituel sur le territoire de cet État membre d'accueil, et devraient, dès lors, y être immatriculés, alors qu'ils sont immatriculés dans l'État membre d'établissement et sont utilisés dans l'État membre d'accueil pour faire du cabotage routier, conformément à des autorisations régulièrement délivrées par l'État membre d'établissement.

    En effet, obliger le transporteur à immatriculer le véhicule dans l'État membre d'accueil serait la négation même de la liberté de prestation du service de cabotage routier, dont l'exercice suppose que le véhicule à moteur soit immatriculé dans l'État membre d'établissement. De même, contraindre un transporteur à payer une taxe sur les véhicules automoteurs dans l'État membre d'accueil, alors qu'il a déjà payé une telle taxe dans l'État membre d'établissement, serait contraire à l'objectif du règlement n° 3118/93 qui vise à l'élimination de toutes restrictions à l'égard du prestataire de services en raison de sa nationalité ou de la circonstance qu'il est établi dans un État membre autre que celui où la prestation doit être fournie.

    ( voir points 54-56, 59, disp. 1 )

    2. L'article 5 de la directive 93/89, relative à l'application par les États membres des taxes sur certains véhicules utilisés pour le transport de marchandises par route, ainsi que des péages et droits d'usage perçus pour l'utilisation de certaines infrastructures, lequel prévoit que les taxes sont perçues «uniquement par l'État membre d'immatriculation», s'oppose à des dispositions nationales d'un État membre d'accueil, au sens de l'article 1er, paragraphe 1, du règlement n° 3118/93 fixant les conditions de l'admission de transporteurs non résidents aux transports nationaux de marchandises par route dans un État membre, entraînant la perception, par celui-ci, de la taxe sur les véhicules automoteurs frappant l'utilisation de véhicules automobiles pour le transport de marchandises par route au motif que ces véhicules auraient leur point d'attache habituel sur le territoire de cet État membre d'accueil, et devraient, dès lors, y être immatriculés, alors qu'ils sont immatriculés et que la taxe visée à l'article 3, paragraphe 1, de ladite directive est acquittée dans l'État membre d'établissement et que ces véhicules sont utilisés dans l'État membre d'accueil pour faire du cabotage routier, conformément à des autorisations régulièrement délivrées par l'État membre d'établissement.

    En effet, si la directive 93/89, qui a harmonisé les systèmes nationaux de taxes sur certains véhicules utilitaires, ne contient pas de règle de conflit de lois permettant de déterminer l'État membre compétent en matière d'immatriculation et, partant, de taxation, l'objectif du règlement n° 3118/93, à savoir favoriser le développement de la prestation du service de cabotage routier, combiné avec l'harmonisation des taxes mise en oeuvre par la directive 93/89, ne pourrait être atteint si l'État membre d'accueil pouvait, au motif qu'un véhicule entre dans le champ d'application de la loi nationale relative à la taxation des véhicules, contraindre un transporteur utilisant ce véhicule pour effectuer du cabotage à acquitter pour ce véhicule une des taxes visées à ladite directive, alors qu'une telle taxe a déjà été payée dans l'État membre d'établissement.

    ( voir points 67, 70-72, disp. 2 )

    Parties


    Dans l'affaire C-115/00,

    ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 234 CE, par le Finanzgericht Münster (Allemagne) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

    Andreas Hoves Internationaler Transport-Service Sàrl

    et

    Finanzamt Borken,

    une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation des articles 6 du règlement (CEE) n_ 3118/93 du Conseil, du 25 octobre 1993, fixant les conditions de l'admission de transporteurs non-résidents aux transports nationaux de marchandises par route dans un État membre (JO L 279, p. 1), et 5 de la directive 93/89/CEE du Conseil, du 25 octobre 1993, relative à l'application par les États membres des taxes sur certains véhicules utilisés pour le transport de marchandises par route, ainsi que des péages et droits d'usage perçus pour l'utilisation de certaines infrastructures (JO L 279, p. 32),

    LA COUR,

    composée de M. G. C. Rodríguez Iglesias, président, M. P. Jann, Mmes F. Macken et N. Colneric, et M. S. von Bahr, présidents de chambre, MM. C. Gulmann, D. A. O. Edward, A. La Pergola, J.-P. Puissochet, M. Wathelet (rapporteur), R. Schintgen, V. Skouris et J. N. Cunha Rodrigues, juges,

    avocat général: M. D. Ruiz-Jarabo Colomer,

    greffier: M. H. A. Rühl, administrateur principal,

    considérant les observations écrites présentées:

    - pour Andreas Hoves Internationaler Transport-Service Sàrl, par Mme B. Jansen-Weber et M. A. Hoves, gérants de ladite société,

    - pour le gouvernement français, par Mme K. Rispal-Bellanger et M. S. Seam, en qualité d'agents,

    - pour la Commission des Communautés européennes, par Mme M. Wolfcarius et M. E. Traversa, en qualité d'agents, assistés de Me A. Böhlke, Rechtsanwalt,

    vu le rapport d'audience,

    ayant entendu les observations orales du Finanzamt Borken, représenté par M. W. Busch, en qualité d'agent, du gouvernement du Royaume-Uni, représenté par Mme P. Whipple, barrister, et de la Commission, représentée par Mme M. Wolfcarius, assistée de Me A. Böhlke, à l'audience du 16 octobre 2001,

    ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 27 novembre 2001,

    rend le présent

    Arrêt

    Motifs de l'arrêt


    1 Par ordonnance du 23 février 2000, parvenue à la Cour le 27 mars suivant, le Finanzgericht Münster a posé, en application de l'article 234 CE, deux questions préjudicielles relatives à l'interprétation des articles 6 du règlement (CEE) n_ 3118/93 du Conseil, du 25 octobre 1993, fixant les conditions de l'admission de transporteurs non-résidents aux transports nationaux de marchandises par route dans un État membre (JO L 279, p. 1), et 5 de la directive 93/89/CEE du Conseil, du 25 octobre 1993, relative à l'application par les États membres des taxes sur certains véhicules utilisés pour le transport de marchandises par route, ainsi que des péages et droits d'usage perçus pour l'utilisation de certaines infrastructures (JO L 279, p. 32).

    2 Ces questions ont été soulevées dans le cadre d'un litige opposant Andreas Hoves Internationaler Transport-Service Sàrl (ci-après la «société Hoves») au Finanzamt Borken au sujet d'une taxe sur les véhicules automoteurs réclamée par ce dernier en application du droit allemand pour des camions immatriculés par la société Hoves au Luxembourg et exerçant une activité de cabotage en Allemagne.

    Le cadre juridique

    La réglementation communautaire

    3 Un premier régime transitoire de cabotage a été instauré par le règlement (CEE) n_ 4059/89 du Conseil, du 21 décembre 1989, fixant les conditions de l'admission de transporteurs non résidents aux transports nationaux de marchandises par route dans un État membre (JO L 390, p. 3).

    4 Ce règlement prévoyait que, à partir du 1er juillet 1990, tout transporteur de marchandises par route pour compte d'autrui établi dans un État membre (ci-après l'«État membre d'établissement»), conformément à la législation de celui-ci, et qui y était habilité à effectuer des transports internationaux de marchandises par route était admis, pour autant qu'il disposait d'une autorisation de cabotage, à effectuer, à titre temporaire, des transports nationaux dans un autre État membre (ci-après l'«État membre d'accueil») sans y disposer d'un siège ou d'un autre établissement.

    5 Le règlement fixait un contingent communautaire correspondant à un certain nombre d'autorisations de cabotage d'une durée de deux mois, susceptible d'être augmenté chaque année par la Commission, et déterminait le mode de répartition de ces autorisations entre les différents États membres. La Commission remettait les autorisations de cabotage aux États membres d'établissement. Les autorités compétentes de ces derniers les délivraient ensuite aux transporteurs qui en faisaient la demande.

    6 Ce régime transitoire était applicable jusqu'au 31 décembre 1992. Il était en effet prévu, à l'article 9 du règlement n_ 4059/89, que le Conseil adopte, avant le 1er juillet 1992, un règlement définissant le régime définitif du cabotage qui entrerait en vigueur le 1er janvier 1993.

    7 Par arrêt du 16 juillet 1992, Parlement/Conseil (C-65/90, Rec. p. I-4593), la Cour a annulé le règlement n_ 4059/89 pour violation des formes substantielles, mais elle a maintenu les effets de celui-ci jusqu'à l'adoption, en bonne et due forme, d'une nouvelle réglementation.

    8 Le 25 octobre 1993, le Conseil a adopté le règlement n_ 3118/93, applicable à partir du 1er janvier 1994. Ce règlement prévoyait l'admission aux transports nationaux de tout transporteur de marchandises titulaire de la licence communautaire prévue par le règlement (CEE) n_ 881/92 du Conseil, du 26 mars 1992, concernant l'accès au marché des transports de marchandises par route dans la Communauté exécutés au départ ou à destination du territoire d'un État membre, ou traversant le territoire d'un ou de plusieurs États membres (JO L 95, p. 1).

    9 Le règlement n_ 3118/93 organisait un nouveau régime transitoire d'autorisation et de contingentement communautaires des transports de cabotage. Il fixait un contingent communautaire correspondant à un certain nombre d'autorisations de cabotage d'une durée de deux mois et déterminait le mode de répartition de ces autorisations entre les différents États membres. L'augmentation annuelle de ce contingent était prévue par ledit règlement selon une proportion fixe.

    10 L'article 12, paragraphe 2, du règlement n_ 3118/93 prévoyait que le régime d'autorisation et de contingentement communautaires cesserait de s'appliquer le 1er juillet 1998. Le paragraphe 3, premier alinéa, de ladite disposition précisait que, à compter de cette date, tout transporteur non-résident répondant aux conditions dudit règlement serait admis à effectuer, à titre temporaire et sans restrictions quantitatives, des transports nationaux de marchandises par route dans un autre État membre, sans y disposer d'un siège ou d'un autre établissement.

    11 L'article 1er, paragraphe 1, du règlement n_ 3118/93 est libellé comme suit:

    «Tout transporteur de marchandises par route pour compte d'autrui qui est titulaire de la licence communautaire prévue au règlement (CEE) n_ 881/92 est admis, aux conditions fixées dans le présent règlement, à effectuer, à titre temporaire, des transports nationaux de marchandises par route pour compte d'autrui dans un autre État membre, ci-après dénommés respectivement `transports de cabotage' et `État membre d'accueil', sans y disposer d'un siège ou d'un autre établissement.»

    12 L'article 3, paragraphe 3, premier et deuxième alinéas, du règlement n_ 3118/93 dispose:

    «L'autorisation de cabotage est établie au nom du transporteur. [...] [Elle] ne peut être utilisée que pour un véhicule à la fois.

    Par `véhicule' on entend un véhicule à moteur immatriculé dans l'État membre d'établissement ou un ensemble de véhicules couplés dont au moins le véhicule à moteur est immatriculé dans l'État membre d'établissement, destinés exclusivement au transport de marchandises.»

    13 Aux termes de l'article 6, paragraphes 1 et 3, du règlement n_ 3118/93, qui est rédigé en des termes presque identiques à ceux de l'article 5, paragraphes 1 et 2, du règlement n_ 4059/89:

    «1. L'exécution des transports de cabotage est soumise, sous réserve de l'application de la réglementation communautaire, aux dispositions législatives, réglementaires et administratives en vigueur dans l'État membre d'accueil, dans les domaines suivants:

    a) prix et conditions régissant le contrat de transport;

    b) poids et dimensions des véhicules routiers [...];

    c) prescriptions relatives aux transports de certaines catégories de marchandises, notamment les marchandises dangereuses, les denrées périssables, les animaux vivants;

    d) temps de conduite et de repos;

    e) taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur les services de transport. [...]

    [...]

    3. Les dispositions visées au paragraphe 1 doivent être appliquées aux transporteurs non-résidents dans les mêmes conditions que celles que cet État membre impose à ses propres ressortissants, afin d'empêcher toute discrimination, manifeste ou déguisée, fondée sur la nationalité ou le lieu d'établissement.»

    14 Le 25 octobre 1993, le Conseil a également adopté la directive 93/89. Celle-ci vise à l'élimination des distorsions de concurrence entre les entreprises de transport des États membres grâce à l'harmonisation des systèmes de prélèvement et l'institution de mécanismes équitables d'imputation des coûts d'infrastructure aux transporteurs. En vertu de son article 13, paragraphe 1, premier alinéa, cette directive devait être transposée avant le 1er janvier 1995.

    15 L'article 1er, premier alinéa, de ladite directive prévoit ainsi que les États membres procèdent, si nécessaire, notamment à l'aménagement de leurs systèmes de taxes sur les véhicules.

    16 Selon l'article 2 de la directive 93/89, on entend par «véhicule» au sens de celle-ci «un véhicule à moteur ou un ensemble de véhicules couplés destinés exclusivement au transport de marchandises par route et ayant un poids total en charge autorisé égal ou supérieur à 12 tonnes».

    17 Les taxes sur les véhicules visées par la directive 93/89 sont énumérées à l'article 3, paragraphe 1, de celle-ci, disposition qui mentionne:

    «- Allemagne: Kraftfahrzeugsteuer,

    [...]

    - Luxembourg: taxe sur les véhicules automoteurs,

    [...]»

    18 L'article 5 de la directive 93/89 dispose:

    «En ce qui concerne les véhicules immatriculés dans les États membres, les taxes visées à l'article 3 sont perçues uniquement par l'État membre d'immatriculation.»

    19 Par arrêt du 5 juillet 1995, Parlement/Conseil (C-21/94, Rec. p. I-1827), la Cour a annulé la directive 93/89, mais elle en a maintenu les effets jusqu'à l'adoption d'une nouvelle réglementation. Celle-ci est la directive 1999/62/CE du Parlement européen et du Conseil, du 17 juin 1999, relative à la taxation des poids lourds pour l'utilisation de certaines infrastructures (JO L 187, p. 42), qui est entrée en vigueur le 20 juillet 1999.

    La réglementation nationale

    20 La réglementation nationale pertinente, telle que décrite par la juridiction nationale dans l'ordonnance de renvoi, est la suivante.

    21 En premier lieu, il s'agit du Kraftfahrzeugsteuergesetz (loi allemande sur le régime fiscal des véhicules automoteurs, ci-après le «KraftStG»), dont l'article 1er, intitulé «Objet de la taxe», dispose, dans sa version applicable jusqu'au 31 décembre 1994:

    «1) Est soumise à la taxe sur les véhicules automoteurs:

    [...]

    2. la détention de véhicules étrangers destinés à la circulation sur la voie publique, dès lors que les véhicules se trouvent sur le territoire national;

    3. l'utilisation illégale de véhicules; [...]»

    22 Dans sa version applicable à partir du 1er janvier 1995, ladite disposition du KraftStG énonce:

    «1) Est soumise à la taxe sur les véhicules automoteurs

    [...]

    2. la détention de véhicules étrangers destinés à la circulation sur la voie publique, dès lors que les véhicules se trouvent sur le territoire national. Sont exceptés les seuls véhicules et ensembles de véhicules couplés destinés exclusivement au transport de marchandises par route et ayant un poids total en charge autorisé égal ou supérieur à 12 000 kg, qui sont immatriculés dans un autre État membre des Communautés européennes conformément à l'article 5 de la directive 93/89/CEE du Conseil, du 25 octobre 1993 (JO L 279, p. 32); à l'exception toutefois des cas énoncés sous 3.;

    3. l'utilisation illégale de véhicules; [...]»

    23 L'article 2 du KraftStG, intitulé «Définitions, collaboration des autorités compétentes en matière de circulation», dispose:

    «[...]

    4) Un véhicule est un véhicule étranger s'il est immatriculé dans un autre État membre.

    5) Il y a utilisation illégale, au sens de la présente loi, si un véhicule est mis en circulation sur la voie publique sur le territoire national sans être immatriculé conformément au droit national. Il n'y a pas lieu à perception de la taxe pour utilisation illégale si la détention est exonérée de la taxe ou si la taxe est déjà due en application de l'article 1er, paragraphe 1, sous 1. ou 2.»

    24 En deuxième lieu, il s'agit de la Strassenverkehrs-Zulassungsordnung (règlement sur la mise en circulation des véhicules à moteur, ci-après la «StVZO»), dont l'article 18, intitulé «Obligation d'immatriculation», est libellé comme suit:

    «Les véhicules à moteur ayant une vitesse maximale par construction dépassant 6 kilomètres par heure et leurs remorques (véhicules tirés par des véhicules à moteur à l'exception de véhicules hors d'état de marche, de véhicules qui sont dépannés et d'essieux de traînage) ne peuvent circuler sur la voie publique que s'ils ont été admis à la circulation après réception ou homologation communautaire par type de véhicule et attribution d'un numéro d'immatriculation pour véhicules à moteur ou remorques par l'autorité administrative (l'autorité compétente en matière d'immatriculation des véhicules).»

    25 L'article 23, paragraphe 1, de la StVZO, intitulé «Attribution des numéros d'immatriculation», prévoit:

    «L'attribution d'un numéro d'immatriculation pour un véhicule à moteur ou une remorque doit être sollicitée par le propriétaire auprès de l'autorité administrative (l'autorité compétente en matière d'immatriculation des véhicules) de la circonscription du point d'attache habituel du véhicule. [...]»

    26 En troisième lieu, l'article 1er, paragraphe 1, de la Verordnung über internationalen Kraftfahrzeugverkehr (règlement relatif à la circulation automobile internationale, en abrégé «IntKfzVO»), du 12 novembre 1934 (RGBl. 1934 I, p. 1137), dans la version applicable à la période en cause au principal, dispose:

    «Les véhicules à moteur étrangers et leurs remorques sont admis à circuler temporairement sur le territoire couvert par le présent règlement si l'autorité compétente leur a délivré:

    [...]

    b) un certificat d'immatriculation étranger et qu'ils n'ont pas leur point d'attache habituel sur le territoire couvert par le présent règlement. [...]»

    Le litige au principal et les questions préjudicielles

    27 Il ressort de l'ordonnance de renvoi que la société Hoves, constituée au Luxembourg par acte du 6 juin 1989, est une société de droit luxembourgeois établie au grand-duché de Luxembourg. Depuis le 13 septembre 1993, M. Hoves est l'associé unique de cette société. Dans un premier temps, il était le gérant unique de celle-ci, puis, par acte notarié du 24 mars 1998, Mme Bettina Jansen-Weber a également été nommée gérante. Les deux gérants sont autorisés à représenter ensemble ladite société. M. Hoves est également gérant de la société de droit allemand Hoves Speditionsgesellschaft mbH, établie à Rhede (Allemagne) (ci-après la «GmbH»).

    28 L'objet de la société Hoves est le transport national et international de marchandises. Jusqu'à la fin de l'année 1995, elle agissait exclusivement comme transporteur pour le compte de la GmbH. Les conditions dans lesquelles s'exerçait cette activité étaient stipulées dans un contrat du 27 janvier 1993. Conformément à ce contrat, la GmbH se chargeait de la planification de l'utilisation des véhicules et de l'activité des chauffeurs. Après l'exécution des ordres de transport, les comptes étaient réglés avec la société Hoves par voie d'inscription à son crédit.

    29 Quinze camions étaient immatriculés au nom de la société Hoves au Luxembourg. Pour ces véhicules, cette dernière a payé la taxe luxembourgeoise sur les véhicules automoteurs. Les autorités luxembourgeoises lui ont délivré des autorisations de cabotage, conformément à l'article 5 du règlement n_ 4059/89. Cette société employait huit chauffeurs, résidant tous en Allemagne.

    30 Dans le cadre d'un litige fiscal relatif aux années 1993 et 1994, distinct du présent litige au principal et pendant devant le Finanzgericht Köln (Allemagne), le Bundesamt für Finanzen a demandé aux autorités luxembourgeoises leur assistance juridique et administrative afin de déterminer le lieu de la direction de la société Hoves. Par courrier du 12 juillet 1996, la direction luxembourgeoise des contributions directes a fourni un certain nombre de renseignements conformément à la directive 77/799/CEE du Conseil, du 19 décembre 1977, concernant l'assistance mutuelle des autorités compétentes des États membres dans le domaine des impôts directs (JO L 336, p. 15).

    31 Selon ces renseignements, tels qu'exposés par la juridiction de renvoi, la société Hoves ne disposerait au Luxembourg ni d'un atelier propre ni d'un parking pour ses camions. Dans la mesure où son activité au Luxembourg se limiterait pour l'essentiel à la gestion des opérations de transport et dès lors que les décisions importantes concernant ladite société seraient prises exclusivement par M. Hoves, lequel aurait son domicile en Allemagne et y séjournerait le plus souvent, le lieu de la direction de la société Hoves, au sens de l'article 3, paragraphe 6, de la convention tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d'assistance administrative réciproque en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune et en matière d'impôt commercial et d'impôt foncier, conclue entre le grand-duché de Luxembourg et la République fédérale d'Allemagne le 23 août 1958 (BGBl. 1959 II, p. 1270), dans sa version modifiée le 15 juillet [lire: juin] 1973 (BGBl. 1978 II, p. 111), se situerait non pas au Luxembourg, mais en Allemagne. Toutefois, une réponse claire ne pourrait être apportée à la question de savoir si les bureaux de Remich et d'Esch-sur-Alzette (Luxembourg) constituent un établissement au sens de ladite convention. Il serait possible qu'un établissement existe à Bertrange (Luxembourg) depuis le 9 février 1996.

    32 Les autorités fiscales allemandes ont suivi l'analyse des autorités luxembourgeoises. Elles ont retenu que le lieu de la direction de la société Hoves se situait à Rhede et elles ont dès lors évalué les bases d'imposition aux fins de l'impôt sur les sociétés et de la taxe sur le chiffre d'affaires pour les années 1989 à 1995, de l'impôt sur la fortune pour l'année 1992 ainsi que de l'impôt sur les salaires pour les années 1989 à 1994. Les réclamations contre ces décisions n'avaient pas encore obtenu de réponse à la date du prononcé de l'ordonnance de renvoi.

    33 Le Finanzamt Borken a en outre évalué les bases d'imposition aux fins du calcul de la taxe sur les véhicules immatriculés au nom de la société Hoves et a fixé la taxe sur les véhicules automoteurs pour les périodes allant de 1991 à 1996. Le recours devant le Finanzgericht Münster est dirigé contre les décisions et avis d'imposition relatifs à la taxe sur les véhicules automoteurs.

    34 La juridiction de renvoi rappelle que le point d'attache habituel au sens de l'article 23, paragraphe 1, de la StVZO, tel qu'interprété par la jurisprudence, est le lieu à partir duquel le véhicule est directement mis en circulation sur la voie publique et où il est mis en stationnement à la fin du trajet; dans le transport interrégional, comme au principal, c'est le lieu où sont prises les décisions concernant l'utilisation du véhicule, y compris le temps de repos des chauffeurs. En l'espèce, le point d'attache habituel des véhicules serait situé à Rhede.

    35 Ayant un point d'attache situé en Allemagne, les véhicules devraient y être immatriculés, conformément à l'article 18 de la StVZO. L'assujettissement à la taxe allemande sur les véhicules automoteurs résulterait de l'article 1er, paragraphe 1, point 2, du KraftStG, jusqu'au 31 décembre 1994, et des dispositions combinées de l'article 1er, paragraphe 1, point 2, deuxième phrase, deuxième partie, du KraftStG, ainsi que du point 3 de cette même disposition, à partir du 1er janvier 1995. Les véhicules auraient, en effet, été utilisés illégalement au sens de l'article 2, paragraphe 5, première phrase, du KraftStG.

    36 Selon la juridiction de renvoi, une exonération de la taxe sur les véhicules automoteurs ne résulterait ni du droit national ni de la convention tendant à éviter les doubles impositions du 23 août 1958. Ladite juridiction examine successivement plusieurs dispositions nationales et précise que la convention bilatérale relative au régime fiscal des véhicules à moteur, conclue avec le grand-duché de Luxembourg (voir décret du Reichsminister der Finanzen du 1er juillet 1930, RStBl. 1930, p. 454), suppose également un séjour purement temporaire des véhicules en Allemagne.

    37 La juridiction de renvoi a cependant des doutes quant à la conformité de cette situation juridique au regard des dispositions communautaires, plus particulièrement les articles 6 du règlement n_ 3118/93 et 5 de la directive 93/89.

    38 Le Finanzgericht Münster relève que, conformément à l'arrêt du 9 mars 1999, Centros (C-212/97, Rec. p. I-1459), le siège social d'une société devrait être déterminé par les statuts de celle-ci. La société Hoves aurait son siège social ainsi qu'un établissement au Luxembourg et la question de savoir si le lieu de sa direction se situe au même endroit serait sans importance. Au cours de la période en cause au principal, ladite société n'aurait eu en Allemagne ni filiale ni agence, non plus qu'aucune succursale ni aucun autre établissement secondaire au sens d'une installation fixe à durée indéterminée, c'est-à-dire un établissement stable au sens du droit fiscal. Ni la gestion par la GmbH des véhicules de la société Hoves ni le fait que le gérant de cette dernière a son domicile dans ledit État membre ne permettraient de conclure à l'existence d'un tel établissement. En outre, le grand-duché de Luxembourg aurait accordé les autorisations pour le transport par route.

    39 S'agissant de l'objectif visant à empêcher l'évasion fiscale et à exclure les abus, la juridiction nationale rappelle que la société Hoves ne faisait qu'utiliser les possibilités légales existant à l'intérieur de la Communauté européenne, même si c'était dans le but de réaliser une économie d'impôts en payant la taxe sur les véhicules automoteurs dans un État membre ayant un régime fiscal avantageux.

    40 Eu égard à ces éléments, le Finanzgericht Münster a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

    «1) L'article 6 du règlement (CEE) n_ 3118/93 du Conseil, du 25 octobre 1993 (JO L 279, p. 1), s'oppose-t-il à des dispositions nationales entraînant la perception de la taxe sur les véhicules automoteurs frappant l'utilisation de véhicules automobiles pour le transport de marchandises par route, qui sont immatriculés dans un autre État membre de l'Union européenne, pour lesquels une autorisation de cabotage a été délivrée dans ce pays, qui exercent l'activité de cabotage en République fédérale d'Allemagne et qui y ont leur point d'attache habituel?

    2) Dans des cas comme ceux visés sous 1, l'article 5 de la directive 93/89/CEE du Conseil, du 25 octobre 1993 (JO L 279, p. 32), fait-il obstacle à une législation nationale telle que celle prévue par les dispositions combinées de l'article 1er, paragraphe 1, point 2, deuxième phrase, deuxième partie, du Kraftfahrzeugsteuergesetz et de l'article 1er, paragraphe 1, point 3, de la même loi?»

    Sur la première question

    41 Par sa première question, la juridiction de renvoi demande en substance si l'article 6 du règlement n_ 3118/93 s'oppose à des dispositions nationales d'un État membre d'accueil entraînant la perception, par celui-ci, de la taxe sur les véhicules automoteurs frappant l'utilisation de véhicules automobiles pour le transport de marchandises par route au motif que ces véhicules auraient leur point d'attache habituel sur le territoire de cet État membre d'accueil, alors qu'ils sont immatriculés dans l'État membre d'établissement et sont utilisés dans l'État membre d'accueil pour faire du cabotage routier, conformément à des autorisations régulièrement délivrées par l'État membre d'établissement.

    Observations soumises à la Cour

    42 S'exprimant sur les deux questions en même temps, la société Hoves propose de répondre par l'affirmative à celles-ci. Elle fait valoir que le ministère des Transports luxembourgeois a délivré pour tous les véhicules des licences ou des autorisations de cabotage communautaires et qu'il vérifiait chaque année le respect des différentes conditions auxquelles l'octroi de celles-ci est subordonné, ce qui incluait la détermination du siège social de la société et du lieu de rattachement des véhicules ainsi que la vérification du respect des normes techniques et économiques. Affirmer que la délivrance des autorisations de transport au Luxembourg serait dépourvue de signification laisserait entendre que l'action du ministère des Transports luxembourgeois ne serait pas conforme au droit communautaire, puisque la délivrance de licences et l'accès au marché des entreprises de transports sont réglementés de manière harmonisée au niveau communautaire.

    43 La société Hoves ne conteste pas qu'elle n'a jamais eu au Luxembourg un atelier propre ni des places de stationnement pour les poids lourds. Elle estime cependant que ce n'était pas obligatoire. Selon elle, si ces conditions étaient un préalable à l'exploitation d'une entreprise de transports, le ministère des Transports n'aurait pas délivré les licences correspondantes.

    44 S'agissant du «point d'attache habituel» d'un véhicule permettant de déterminer si la taxe est due, la société Hoves conteste que sa définition puisse être le «lieu où sont prises les décisions concernant l'utilisation du véhicule». En effet, si tel était le cas, n'importe quelle société de transports importante pourrait échapper à l'assujettissement à la taxe sur les véhicules automoteurs en déplaçant son département prenant de telles décisions dans un État membre où la taxe est plus basse. Appliquer en l'espèce le critère de rattachement prévu par la loi allemande affecterait de nombreuses sociétés en Europe, dès lors que la GmbH gérait l'affectation des véhicules non seulement de la société Hoves, mais également de sociétés de transports établies en Italie, en Espagne et au Portugal, dans le capital desquelles elle n'avait aucune participation.

    45 Selon la société Hoves, le centre d'opération doit être défini par des critères objectifs. Elle relève à cet égard que:

    - les véhicules étaient affectés en grande majorité à l'étranger;

    - les temps de pause des poids lourds au Luxembourg étaient au moins aussi longs que ceux applicables en Allemagne;

    - l'immatriculation et la taxation des véhicules avaient lieu au Luxembourg;

    - les contrôles techniques étaient effectués au Luxembourg;

    - le plein de carburant était fait en majeure partie au Luxembourg;

    - les poids lourds étaient assurés au Luxembourg, les chauffeurs étaient enregistrés et assurés dans cet État membre;

    - des licences de transport luxembourgeoises, faisant chaque année l'objet d'une nouvelle demande, étaient utilisées;

    - la réglementation et les conditions d'accès à la profession en vigueur au Luxembourg étaient respectées;

    - la société Hoves était régulièrement contrôlée et assujettie à l'impôt.

    46 Le gouvernement français, dans ses observations écrites, et le Finanzamt Borken, dans ses observations orales lors de l'audience, soutiennent que l'article 6 du règlement n_ 3118/93 ne s'oppose pas à des dispositions nationales relatives à la taxe sur les véhicules automoteurs, même si elles entraînent la perception de la taxe sur des véhicules utilisés pour le transport de marchandises par route qui sont immatriculés dans un autre État membre et pour lesquels une autorisation de cabotage a été délivrée dans cet État. La taxe sur les véhicules automoteurs ne serait pas expressément mentionnée dans ladite disposition, mais celle-ci serait applicable «sous réserve de la réglementation communautaire». La matière des taxes sur certains véhicules utilisés pour le transport de marchandises par route aurait fait l'objet de la directive 93/89, mais le délai prévu pour la transposition de celle-ci dans les ordres juridiques des États membres n'expirait que le 1er janvier 1995. Jusqu'à cette date, le règlement n_ 3118/93, en tant que tel, ne s'opposait pas à l'application de la réglementation des États membres relative à la taxation des véhicules automoteurs.

    47 Dans ses observations présentées lors de l'audience, le gouvernement du Royaume-Uni soutient que chaque État membre a compétence pour déterminer les circonstances dans lesquelles il peut exiger l'immatriculation et la taxation d'un véhicule. Le droit communautaire prévoirait cependant un certain nombre d'exceptions à cette liberté, dont le règlement n_ 3118/93 ferait partie. Exiger le versement de la taxe de circulation pour un véhicule utilisant les routes de l'État membre de manière temporaire en application d'une autorisation de cabotage irait à l'encontre de l'objectif dudit règlement, qui est précisément de permettre le transport temporaire dans un autre État membre.

    48 La Commission considère que, les dispositions visées à l'article 6 du règlement n_ 3118/93 étant limitatives et ne comprenant pas la taxe sur les véhicules automoteurs, cet article s'oppose à la perception d'une telle taxe par l'État membre d'accueil, pendant la durée de l'autorisation de cabotage délivrée par l'État membre d'établissement, quel que soit le point d'attache habituel du véhicule automobile utilisé pour le transport de marchandises par route pendant la période en cause.

    49 Elle relève que la société Hoves a bénéficié d'autorisations de cabotage, d'une durée de deux mois, qui ont été délivrées successivement pendant plusieurs années, mais elle ajoute que la régularité de la délivrance des autorisations de cabotage pendant ces années par les autorités luxembourgeoises n'est pas l'objet du litige. Elle fait valoir à cet égard que, en sa qualité d'État membre d'accueil, le République fédérale d'Allemagne peut vérifier la régularité des transports de cabotage et, en cas d'irrégularité grave, adopter des sanctions ou solliciter l'intervention de l'État membre d'établissement. Toutefois, il ne semblerait pas que de telles démarches aient été effectuées en ce sens auprès des autorités luxembourgeoises.

    Réponse de la Cour

    50 Conformément à l'article 61 du traité CE (devenu, après modification, article 51 CE), la libre circulation des services, en matière de transports, est régie par les dispositions du titre relatif aux transports.

    51 L'article 75 du traité CE (devenu, après modification, article 71 CE) prévoit que, en vue de réaliser la politique commune des transports et compte tenu des aspects spéciaux de ceux-ci, le Conseil est tenu d'établir, selon une procédure déterminée, notamment les conditions d'admission de transporteurs non-résidents aux transports nationaux dans un État membre. Le Conseil s'est acquitté de cette obligation en adoptant successivement les règlements nos 4059/89 et 3118/93, tous deux fondés sur l'article 75 du traité.

    52 Les bénéficiaires de cette liberté d'effectuer des transports nationaux dans un autre État membre sont, selon l'article 1er du règlement n_ 3118/93, «[t]out transporteur de marchandises par route pour compte d'autrui qui est titulaire de la licence communautaire prévue au règlement (CEE) n_ 881/92». Ce dernier règlement précise, à son article 3, paragraphe 2, que la licence communautaire est délivrée à «tout transporteur de marchandises par route pour compte d'autrui qui [...] est établi dans un État membre [...] conformément à la législation de celui-ci» et qui «est habilité dans cet État membre, conformément à la législation de la Communauté et de cet État en matière d'accès à la profession de transporteur, à effectuer des transports internationaux de marchandises par route».

    53 Il s'ensuit qu'une société telle que la société Hoves, régulièrement constituée conformément à la législation luxembourgeoise et habilitée, au grand-duché de Luxembourg, à effectuer des transports internationaux de marchandises par route, fait partie des bénéficiaires de la liberté d'effectuer des transports nationaux dans un autre État membre, pour autant qu'elle obtient des autorisations de cabotage délivrées par les autorités compétentes de l'État membre d'établissement, soit, dans l'affaire au principal, les autorités luxembourgeoises.

    54 Ainsi que le prévoit l'article 6 du règlement n_ 3118/93, l'exécution des transports de cabotage est soumise aux dispositions législatives, réglementaires et administratives en vigueur dans l'État membre d'accueil dans un certain nombre de domaines. Il ressort du libellé de cette disposition que les domaines énoncés au paragraphe 1, sous a) à e), de celle-ci constituent une liste limitative dans laquelle ne figurent ni l'obligation d'immatriculer le véhicule dans l'État membre d'accueil ni l'obligation d'y payer la taxe sur les véhicules automoteurs.

    55 À cet égard, il y a lieu de constater qu'obliger le transporteur à immatriculer le véhicule dans l'État membre d'accueil serait la négation même de la liberté de prestation du service de cabotage routier, dont l'exercice suppose, ainsi que le prévoit l'article 3, paragraphe 3, deuxième alinéa, du règlement n_ 3118/93, que le véhicule à moteur soit immatriculé dans l'État membre d'établissement.

    56 De même, contraindre un transporteur à payer une taxe sur les véhicules automoteurs dans l'État membre d'accueil, alors qu'il a déjà payé une telle taxe dans l'État membre d'établissement, serait contraire à l'objectif du règlement n_ 3118/93 qui, selon son deuxième considérant, vise à l'élimination de toutes restrictions à l'égard du prestataire de services en raison de sa nationalité ou de la circonstance qu'il est établi dans un État membre autre que celui où la prestation doit être fournie.

    57 Il est sans incidence à cet égard que, au sens de la jurisprudence allemande, le point d'attache des véhicules, justifiant la perception de la taxe allemande sur les véhicules automoteurs, soit situé en Allemagne en raison du fait que c'est dans cet État membre que se trouve le lieu où sont prises les décisions concernant l'utilisation des véhicules. Une société telle que la société Hoves était en effet en droit de collaborer avec une société située dans un autre État membre et de confier à cette dernière certaines décisions en matière d'organisation des transports, sans pour autant cesser d'être une société prestataire de services de cabotage routier.

    58 En tout état de cause, l'article 8, paragraphe 1, du règlement n_ 3118/93 prévoit que les États membres s'accordent mutuellement assistance pour l'application de ce règlement. Si les autorités allemandes avaient des doutes sur la régularité des autorisations de cabotage délivrées par les autorités luxembourgeoises, il leur appartenait de saisir ces dernières de cette question afin que, au besoin, elles réexaminent la situation. En qualité d'autorités de l'État membre d'accueil, les autorités allemandes n'étaient cependant pas en droit de ne pas respecter des licences de cabotage délivrées par l'État membre d'établissement ou d'imposer une condition d'exercice du cabotage routier non prévue par le règlement n_ 3118/93 (voir, en ce sens, par analogie, arrêts du 10 février 2000, FTS, C-202/97, Rec. p. I-883, points 51 à 56, et du 30 mars 2000, Banks e.a., C-178/97, Rec. p. I-2005, points 38 à 43).

    59 Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre à la première question que l'article 6 du règlement n_ 3118/93 s'oppose à des dispositions nationales d'un État membre d'accueil entraînant la perception, par celui-ci, de la taxe sur les véhicules automoteurs frappant l'utilisation de véhicules automobiles pour le transport de marchandises par route au motif que ces véhicules auraient leur point d'attache habituel sur le territoire de cet État membre d'accueil, alors qu'ils sont immatriculés dans l'État membre d'établissement et sont utilisés dans l'État membre d'accueil pour faire du cabotage routier, conformément à des autorisations régulièrement délivrées par l'État membre d'établissement.

    Sur la seconde question

    60 Par sa seconde question, la juridiction nationale demande en substance si l'article 5 de la directive 93/89 s'oppose à des dispositions nationales d'un État membre d'accueil, au sens de l'article 1er, paragraphe 1, du règlement n_ 3118/93, entraînant la perception, par celui-ci, de la taxe sur les véhicules automoteurs frappant l'utilisation de véhicules automobiles pour le transport de marchandises par route au motif que ces véhicules auraient leur point d'attache habituel sur le territoire de cet État membre d'accueil, alors qu'ils sont immatriculés et que la taxe visée à l'article 3, paragraphe 1, de ladite directive est acquittée dans l'État membre d'établissement et que ces véhicules sont utilisés dans l'État membre d'accueil pour faire du cabotage routier, conformément à des autorisations régulièrement délivrées par l'État membre d'établissement.

    Observations soumises à la Cour

    61 Le Finanzamt Borken souligne le lien existant entre le droit, pour un État membre, d'exiger l'immatriculation d'un véhicule et celui de requérir le paiement de la taxe sur ce véhicule. Puisqu'il n'existe pas de disposition communautaire d'harmonisation en matière d'immatriculation, deux États membres pourraient considérer que l'immatriculation est nécessaire dans une situation donnée et, par voie de conséquence, exiger tous deux la taxation. L'article 5 de la directive 93/89 ne s'y opposerait pas.

    62 Le gouvernement français rappelle la finalité de la directive 93/89 telle qu'elle ressort de son premier considérant, à savoir «l'harmonisation des systèmes de prélèvement». Selon lui, cette harmonisation prend la forme d'une attribution exclusive du droit de perception de la taxe sur les véhicules automoteurs à l'État membre d'immatriculation et, corrélativement, d'une exonération des taxes similaires applicables dans les autres États membres. Il considère à cet égard qu'il va de soi que l'État d'immatriculation est l'État d'immatriculation légale des véhicules.

    63 Le gouvernement du Royaume-Uni a fait état, lors de l'audience, de son accord avec le gouvernement français et avec la Commission. Il propose de répondre à la seconde question que l'article 5 de la directive 93/89 s'oppose à des règles nationales liant l'assujettissement à la taxe visée à l'article 3, paragraphe 1, de la directive 93/89 à l'usage illégal d'un véhicule sur la voie publique lorsque cet usage illégal est défini comme l'absence d'immatriculation.

    64 La Commission relève que la directive crée un lien indissociable entre le droit à la taxation et l'immatriculation, sans cependant s'immiscer dans l'immatriculation elle-même. Les critères relatifs à l'immatriculation des véhicules affectés au transport de marchandises par route n'étant pas encore harmonisés, les conflits en matière d'immatriculation seraient inévitables et devraient être résolus. Ils n'autoriseraient cependant pas, en tant que tels, à rompre le lien indissociable existant entre le droit à la taxation et l'immatriculation. Ils ne sauraient aboutir à la création contra legem de faits générateurs d'une taxe sur les véhicules automoteurs autres que celui résultant de l'immatriculation.

    65 La Commission estime dès lors que, selon la directive 93/89, la taxe sur les véhicules automoteurs est la conséquence de l'immatriculation et non son substitut. Elle propose, par conséquent, de répondre à la question que l'article 5 de la directive s'oppose, pendant la durée de l'immatriculation dans un autre État membre, à une disposition nationale qui rattache la perception de la taxe visée à l'article 3 de la directive à l'utilisation illicite du véhicule, à savoir son utilisation sur la voie publique sans qu'il soit régulièrement immatriculé conformément à la législation sur la circulation routière.

    Réponse de la Cour

    66 Le litige au principal résulte d'un conflit positif de lois en matière d'immatriculation des véhicules et, par voie de conséquence, en matière de taxation de ceux-ci. D'un côté, la législation luxembourgeoise exige l'immatriculation des véhicules de la société Hoves dans la mesure où cette société a son siège social au Luxembourg, tandis que, de l'autre côté, la législation allemande impose l'immatriculation des mêmes véhicules au motif qu'ils auraient leur point d'attache habituel en Allemagne. En raison du lien existant entre l'immatriculation des véhicules et leur taxation, la perception de la taxe sur les véhicules automoteurs serait requise en application de chacune desdites législations.

    67 Il convient à cet égard de constater que, dans le but d'éliminer les distorsions de concurrence entre les entreprises de transport des États membres, la directive 93/89 a harmonisé les systèmes nationaux de taxes sur certains véhicules utilitaires dont le poids total en charge excède un niveau donné.

    68 Cette directive détermine des taux minimaux à appliquer pour les taxes sur les véhicules concernés et prévoit que celles-ci ne peuvent être perçues que par l'État membre d'immatriculation.

    69 Il résulte en effet de l'économie générale de la directive 93/89 que celle-ci ne suppose l'existence que d'un seul et unique État membre d'immatriculation des véhicules. C'est ainsi que l'article 5 de cette directive prévoit que les taxes sont perçues «uniquement par l'État membre d'immatriculation».

    70 La directive 93/89 ne contient cependant pas de règle de conflit de lois permettant de déterminer l'État membre compétent en matière d'immatriculation.

    71 Il convient néanmoins de constater que l'objectif du règlement n_ 3118/93, à savoir favoriser le développement de la prestation du service de cabotage routier, combiné avec l'harmonisation des taxes sur certains véhicules utilitaires mise en oeuvre par la directive 93/89, ne pourrait être atteint si l'État membre d'accueil pouvait, au motif qu'un véhicule entre dans le champ d'application de la loi nationale relative à la taxation des véhicules, contraindre un transporteur utilisant ce véhicule pour effectuer du cabotage, conformément à des autorisations régulièrement délivrées par l'État membre d'établissement, à acquitter pour ce véhicule l'une des taxes visées à l'article 3, paragraphe 1, de ladite directive, alors qu'une telle taxe a déjà été payée dans l'État membre d'établissement.

    72 Il s'ensuit qu'il y a lieu de répondre à la seconde question que l'article 5 de la directive 93/89 s'oppose à des dispositions nationales d'un État membre d'accueil, au sens de l'article 1er, paragraphe 1, du règlement n_ 3118/93, entraînant la perception, par celui-ci, de la taxe sur les véhicules automoteurs frappant l'utilisation de véhicules automobiles pour le transport de marchandises par route au motif que ces véhicules auraient leur point d'attache habituel sur le territoire de cet État membre d'accueil, alors qu'ils sont immatriculés et que la taxe visée à l'article 3, paragraphe 1, de ladite directive est acquittée dans l'État membre d'établissement et que ces véhicules sont utilisés dans l'État membre d'accueil pour faire du cabotage routier, conformément à des autorisations régulièrement délivrées par l'État membre d'établissement.

    Décisions sur les dépenses


    Sur les dépens

    73 Les frais exposés par les gouvernements français et du Royaume-Uni, ainsi que par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

    Dispositif


    Par ces motifs,

    LA COUR,

    statuant sur les questions à elle soumises par le Finanzgericht Münster, par ordonnance du 23 février 2000, dit pour droit:

    1) L'article 6 du règlement (CEE) n_ 3118/93 du Conseil, du 25 octobre 1993, fixant les conditions de l'admission de transporteurs non-résidents aux transports nationaux de marchandises par route dans un État membre, s'oppose à des dispositions nationales d'un État membre d'accueil entraînant la perception, par celui-ci, de la taxe sur les véhicules automoteurs frappant l'utilisation de véhicules automobiles pour le transport de marchandises par route au motif que ces véhicules auraient leur point d'attache habituel sur le territoire de cet État membre d'accueil, alors qu'ils sont immatriculés dans l'État membre d'établissement et sont utilisés dans l'État membre d'accueil pour faire du cabotage routier, conformément à des autorisations régulièrement délivrées par l'État membre d'établissement.

    2) L'article 5 de la directive 93/89/CEE du Conseil, du 25 octobre 1993, relative à l'application par les États membres des taxes sur certains véhicules utilisés pour le transport de marchandises par route, ainsi que des péages et droits d'usage perçus pour l'utilisation de certaines infrastructures, s'oppose à des dispositions nationales d'un État membre d'accueil, au sens de l'article 1er, paragraphe 1, du règlement n_ 3118/93, entraînant la perception, par celui-ci, de la taxe sur les véhicules automoteurs frappant l'utilisation de véhicules automobiles pour le transport de marchandises par route au motif que ces véhicules auraient leur point d'attache habituel sur le territoire de cet État membre d'accueil, alors qu'ils sont immatriculés et que la taxe visée à l'article 3, paragraphe 1, de ladite directive est acquittée dans l'État membre d'établissement, et que ces véhicules sont utilisés dans l'État membre d'accueil pour faire du cabotage routier, conformément à des autorisations régulièrement délivrées par l'État membre d'établissement.

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