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Document 61999CJ0207

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 9 novembre 2000.
Commission des Communautés européennes contre Claudine Hamptaux.
Pourvoi - Fonctionnaires - Promotion - Examen comparatif des mérites.
Affaire C-207/99 P.

Recueil de jurisprudence 2000 I-09485

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2000:613

61999J0207

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 9 novembre 2000. - Commission des Communautés européennes contre Claudine Hamptaux. - Pourvoi - Fonctionnaires - Promotion - Examen comparatif des mérites. - Affaire C-207/99 P.

Recueil de jurisprudence 2000 page I-09485


Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés


Fonctionnaires - Promotion - Examen comparatif des mérites - Promotion automatique des fonctionnaires ayant figuré sur la liste des plus méritants de l'année précédente - Illégalité - Arrêt du Tribunal ayant constaté cette illégalité - Contradiction dans les motifs - Erreur de droit - Absence

(Statut des fonctionnaires, art. 45, § 1, al. 1)

Sommaire


$$Pour chaque exercice de promotion, l'article 45, paragraphe 1, premier alinéa, du statut impose à l'autorité investie du pouvoir de nomination l'obligation de procéder à un examen comparatif des mérites des fonctionnaires susceptibles d'être promus ainsi que des rapports dont ils ont fait l'objet.

Si l'exigence d'un examen comparatif des mérites n'exclut pas que l'autorité investie du pouvoir de nomination puisse prendre en considération la circonstance qu'un candidat a déjà figuré sur la liste des fonctionnaires les plus méritants lors d'un exercice antérieur, elle requiert néanmoins que les mérites de chaque candidat soient appréciés par rapport à ceux des autres candidats à la promotion, y compris les fonctionnaires qui, antérieurement, ne figuraient pas sur la liste des plus méritants.

Il n'est pas incohérent de juger que, d'une part, dans le cadre de la procédure de promotion en cause, les fonctionnaires qui ont figuré sur la liste des plus méritants l'année précédente ne sont inscrits sur la liste de l'exercice en cours qu'à la condition de ne pas avoir démérité et que, d'autre part, ce faisant, l'autorité investie du pouvoir de nomination n'a pas procédé à un examen comparatif des mérites des candidats à une promotion, conformément aux exigences de l'article 45, paragraphe 1, premier alinéa, du statut. En effet, l'appréciation du démérite éventuel d'un candidat, laquelle présente un caractère purement individuel, n'implique pas qu'il ait été procédé à un véritable examen comparatif des mérites de l'ensemble des fonctionnaires susceptibles d'être promus.

Pour le même motif, le Tribunal ne commet pas d'erreur de droit en considérant que l'examen du démérite éventuel d'un fonctionnaire ayant vocation à la promotion n'équivaut pas à un examen comparatif des mérites tel que l'exige l'article 45, paragraphe 1, premier alinéa, du statut. (voir points 18-19, 23-24)

Parties


Dans l'affaire C-207/99 P,

Commission des Communautés européennes, représentée par Mmes C. Berardis-Kayser et F. Duvieusart-Clotuche, membres du service juridique, en qualité d'agents, assistées de Me D. Waelbroeck, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. C. Gómez de la Cruz, membre du même service, Centre Wagner, Kirchberg,

partie requérante,

ayant pour objet un pourvoi formé contre l'arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes (quatrième chambre) du 25 mars 1999, Hamptaux/Commission (T-76/98, RecFP p. I-A-59 et II-303), et tendant à l'annulation de cet arrêt,

l'autre partie à la procédure étant:

Claudine Hamptaux, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Bruxelles (Belgique), représentée par Me L. Vogel, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de Me C. Kremer, 6, rue Heinrich Heine,

partie demanderesse en première instance,

LA COUR

(cinquième chambre),

composée de MM. A. La Pergola, président de chambre, M. Wathelet (rapporteur), D. A. O. Edward, P. Jann et L. Sevón, juges,

avocat général: M. P. Léger,

greffier: M. R. Grass,

vu le rapport du juge rapporteur,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 15 juin 2000,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt


1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 31 mai 1999, la Commission des Communautés européennes a, en vertu de l'article 49 du statut CE de la Cour de justice, formé un pourvoi contre l'arrêt du Tribunal de première instance (quatrième chambre) du 25 mars 1999, Hamptaux/Commission (T-76/98, RecFP p. I-A-59 et II-303, ci-après l'«arrêt attaqué») par lequel celui-ci a annulé la décision de la Commission de ne pas promouvoir Mme Hamptaux au grade B 2 au titre de l'exercice de promotion 1997 (ci-après la «décision litigieuse»).

Le cadre juridique

2 Aux termes de l'article 45, paragraphe 1, premier alinéa, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le «statut»):

«La promotion est attribuée par décision de l'autorité investie du pouvoir de nomination. Elle entraîne pour le fonctionnaire la nomination au grade supérieur de la catégorie ou du cadre auquel il appartient. Elle se fait exclusivement au choix, parmi les fonctionnaires justifiant d'un minimum d'ancienneté dans leur grade, après examen comparatif des mérites des fonctionnaires ayant vocation à la promotion ainsi que des rapports dont ils ont fait l'objet.»

Les faits

3 Les faits qui sont à l'origine du pourvoi sont exposés dans l'arrêt attaqué dans les termes suivants:

«1 La requérante a été recrutée au sein de la Commission, le 1er octobre 1972, en qualité d'agent auxiliaire. Elle a été nommée fonctionnaire stagiaire de grade C 3 dès le 1er décembre 1972 et a été titularisée dans son emploi le 1er juin 1973.

2 Elle a été lauréate du concours interne de passage de catégorie COM/B/2/82 et a, en conséquence, été promue au grade B 5 le 1er septembre 1985. Depuis le 1er avril 1992, la requérante a le grade B 3.

3 Au cours de l'exercice de promotion 1997, sur proposition de la direction générale Personnel et administration (DG IX), elle a été classée en treizième position sur quatorze, selon la liste publiée aux Informations administratives n_ 992 du 16 mai 1997.

4 A la suite de cette publication, la requérante a introduit le 30 mai 1997 un recours auprès du comité de promotion afin qu'il reconsidère son dossier.

5 Par note du 9 juillet 1997, le président du comité de promotion pour la catégorie B lui a répondu que le comité avait examiné son cas mais qu'il n'avait pas été en mesure de mentionner son nom sur le projet de liste des fonctionnaires jugés les plus méritants.

6 Le nom de la requérante ne figure ni sur la liste des fonctionnaires les plus méritants pour la promotion au grade B 2 publiée aux Informations administratives n_ 998 du 8 août 1997 ni parmi les fonctionnaires promus dont la liste est publiée aux Informations administratives n_ 999 du 12 août 1997.

7 Par une note du 8 octobre 1997 enregistrée au secrétariat général le 9 octobre 1997, la requérante a introduit une réclamation au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut ... contre ces deux décisions de l'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après `AIPN').

8 Le 30 janvier 1998, cette réclamation a fait l'objet d'une décision explicite de rejet qui a été notifiée à la requérante le 11 février 1998.»

L'arrêt attaqué

4 Dans son recours devant le Tribunal, Mme Hamptaux a conclu, en premier lieu, à l'annulation de la décision litigieuse et, en second lieu, à la condamnation de la Commission au paiement d'une indemnité de 833 000 BEF à titre de réparation du préjudice subi.

5 À l'appui de son recours, Mme Hamptaux a invoqué deux moyens tirés, d'une part, de l'incompétence du signataire de la décision du 30 janvier 1998 de l'AIPN, rejetant sa réclamation et, d'autre part, de la violation des articles 5, paragraphe 3, et 45, paragraphe 1, du statut. Ce second moyen était articulé en deux branches. Dans la première branche, la requérante en première instance reprochait à la Commission de ne pas avoir procédé à un examen comparatif des mérites des fonctionnaires ayant vocation à la promotion. Dans la seconde branche, elle faisait grief à la Commission, en premier lieu, d'avoir privilégié d'autres critères que ceux liés aux mérites et, en second lieu, d'avoir fait une discrimination entre les fonctionnaires qui ont passé une partie de leur carrière dans une catégorie inférieure à celle dont ils relèvent et les autres fonctionnaires.

6 Après avoir rejeté le premier moyen, le Tribunal a accueilli la première branche du second moyen en jugeant ce qui suit:

«35 Il convient de rappeler, tout d'abord, qu'il ressort d'une jurisprudence constante que l'AIPN a le pouvoir statutaire, en décidant des promotions, de faire un choix sur la base d'un examen comparatif des mérites des candidats promouvables réalisé suivant la méthode qu'elle juge la plus appropriée (voir l'arrêt de la Cour du 1er juillet 1976, de Wind/Commission, 62/75, Rec. p. 1167, point 17, et les arrêts du Tribunal Mergen/Commission, précité, point 33, et du 6 juin 1996, Baiwir/Commission, T-262/94, RecFP p. II-739, point 65).

36 Pour évaluer les mérites à prendre en considération dans le cadre d'une décision de promotion au titre de l'article 45 du statut, l'AIPN dispose donc d'un large pouvoir d'appréciation, et le contrôle du juge communautaire doit se limiter à la question de savoir si, eu égard aux voies et moyens qui ont pu conduire l'administration à son appréciation, celle-ci s'est tenue dans des limites non critiquables et n'a pas usé de son pouvoir de manière manifestement erronée. Le Tribunal ne saurait donc substituer son appréciation des qualifications et mérites des candidats à celle de l'AIPN (voir arrêts du Tribunal du 30 janvier 1992, Schönherr/CES, T-25/90, Rec. p. II-63, point 20, du 25 février 1992, Schloh/Conseil, T-11/91, Rec. p. II-203, point 51, et Baiwir/Commission, précité, point 66).

37 Il ressort du guide [pratique à la procédure de promotions des fonctionnaires à la Commission des Communautés européennes] et des explications que la Commission a fournies lors de l'audience que les fonctionnaires figurant déjà l'année précédente sur la liste des plus méritants, établie par l'AIPN, mais qui n'avaient pas été promus, figurent automatiquement sur la liste des plus méritants l'année suivante sauf s'ils ont démérité. La Commission a ajouté que, dans ces conditions, ces fonctionnaires sont automatiquement promus.

38 Il convient de vérifier si cette procédure a violé les droits de la requérante dans le cadre de la procédure de promotion.

...

41 Il ressort de l'article 45, paragraphe 1, premier alinéa, du statut que tout fonctionnaire ayant vocation à la promotion, c'est-à-dire justifiant d'un minimum d'ancienneté dans son grade, a le droit de voir l'AIPN procéder à un examen comparatif de ses mérites et des rapports dont il a fait l'objet (arrêt du Tribunal du 11 juin 1998, Skrikas/Parlement, T-167/97, RecFP p. II-857, point 37).

42 Il s'ensuit que la requérante disposait du droit de voir l'AIPN procéder à un examen comparatif de ses mérites ainsi que des rapports dont elle avait fait l'objet, dans le cadre de la procédure de promotion litigieuse.

43 L'article 45, paragraphe 1, du statut ne distingue pas la situation des fonctionnaires ayant déjà figuré l'année précédente sur la liste des plus méritants, établie par l'AIPN, de celle des autres fonctionnaires. En effet, il ne formule aucune condition supplémentaire à celle du minimum d'ancienneté dans le grade (arrêt Skrikas/Parlement, précité, point 38).

44 Il ressort tant des écrits déposés par la Commission que des explications de cette dernière, lors de l'audience, que les fonctionnaires ayant figuré l'année précédente sur la liste des plus méritants, établie par l'AIPN, qui n'avaient pas été promus figurent automatiquement sur la liste des plus méritants l'année suivante et sont automatiquement promus, sauf s'ils ont démérité. En conséquence, contrairement à l'obligation que lui impose l'article 45, paragraphe 1, du statut, l'AIPN n'a pas procédé, dans le cadre de la procédure de promotion litigieuse, à l'examen comparatif des mérites de la requérante ainsi que des rapports dont elle avait fait l'objet avec ceux des deux fonctionnaires déjà inscrits l'année précédente sur la liste des plus méritants établie par l'AIPN, violant ainsi un droit incontestable de la requérante dans le cadre de la procédure de promotion.

45 Lors de l'audience, la Commission a justifié cette démarche en soutenant que les mérites de la requérante avaient été comparés l'année précédente à ceux de l'ensemble de ses collègues. Elle a ajouté que les propositions de l'année précédente ont créé une attente légitime auprès des fonctionnaires proposés. Enfin, elle a souligné avec insistance que le fait d'avoir été inscrit par l'AIPN sur la liste des plus méritants est considéré par la Commission comme un droit acquis pour les plus méritants qui n'ont pas été promus l'année précédente et qui n'ont pas démérité.

46 À cet égard, le Tribunal rappelle que les fonctionnaires disposent du droit de voir l'AIPN procéder à un examen comparatif de leurs mérites ainsi que des rapports dont ils ont fait l'objet, dans le cadre de la procédure de chaque promotion. Ce droit est d'autant plus important que les fonctionnaires ayant eu le plus de mérite l'année précédente ne sont pas nécessairement les mêmes l'année suivante. De même, la Commission n'a pas démontré non plus que les mérites de la requérante auraient été comparés au titre de l'exercice de promotion 1996 avec ceux des fonctionnaires les plus méritants de l'année 1996.

47 Le Tribunal ne peut retenir non plus les arguments de la Commission selon lesquels le principe de confiance légitime serait applicable dans le cas d'espèce. Le droit à la protection de la confiance légitime bénéficie à tout particulier qui se trouve dans une situation de laquelle il ressort que l'administration communautaire, en lui fournissant des assurances précises, a fait naître dans son chef des espérances fondées (arrêt du Tribunal du 30 septembre 1998, Adine-Blanc/Commission, T-43/97, RecFP p. II-1683, point 31, et la jurisprudence s'y référant). Cependant, des promesses qui ne tiennent pas compte des dispositions statutaires ne sauraient créer une confiance légitime dans le chef de celui auquel elles s'adressent (arrêt de la Cour du 6 février 1986, Vlachou/Cour des comptes, 162/84, Rec. p. 481, point 6, et arrêt du Tribunal du 27 mars 1990, Chomel/Commission, T-123/89, Rec. p. II-131, point 30).

48 En conséquence, même si la Commission avait donné des assurances aux fonctionnaires figurant l'année précédente sur la liste des plus méritants, ces assurances seraient manifestement illégales et ne pourraient pas créer une confiance légitime dans le chef desdits fonctionnaires. Du reste, la Commission n'a pas prétendu leur avoir donné des `assurances précises' ayant pu créer une confiance légitime. Au contraire, il est constant que, au moins lors de la publication de cette liste en 1997, il y a eu un avertissement selon lequel `les fonctionnaires inscrits sur ces listes et non promus à cette date ne [jouiraient] pas d'un droit à figurer d'office sur les listes ultérieures' (voir Informations administratives n_ 998 du 8 août 1997, p. 4).

49 Quant à l'argument selon lequel les fonctionnaires figurant l'année précédente sur la liste des plus méritants, établie par l'AIPN, auraient un droit acquis à être promus l'année suivante sauf s'ils ont démérité, il y a lieu de rappeler que le statut ne confère aucun droit à une promotion, même aux fonctionnaires qui réunissent toutes les conditions pour pouvoir être promus (voir les arrêts du Tribunal du 9 février 1994, Latham/Commission, T-3/92, RecFP p. II-83, point 50, du 30 novembre 1995, Branco/Cour des comptes, T-507/93, RecFP p. II-797, point 28, et Baiwir/Commission, précité, point 67).

50 Il résulte de tout ce qui précède que la procédure de promotion litigieuse est entachée d'une irrégularité constitutive d'un vice substantiel, en ce qu'il n'a pas été satisfait à l'examen comparatif des mérites de l'intéressée et des deux fonctionnaires figurant l'année précédente sur la liste des plus méritants, établie par l'AIPN, exigé par l'article 45, paragraphe 1, du statut (voir arrêt du Tribunal du 21 novembre 1996, Michaël/Commission, T-144/95, RecFP p. II-1429, point 62).»

7 Dans ces conditions, le Tribunal a annulé la décision litigieuse, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens d'annulation invoqués par Mme Hamptaux, et a, par ailleurs, rejeté la demande en indemnité présentée par cette dernière.

Le pourvoi

8 Par son pourvoi, la Commission demande l'annulation de l'arrêt attaqué ainsi que le rejet du recours en annulation de Mme Hamptaux et, à titre subsidiaire, le renvoi de l'affaire devant le Tribunal.

9 À l'appui de son pourvoi, la Commission invoque un moyen unique tiré d'une contradiction dans les motifs de l'arrêt attaqué et d'une erreur de droit.

10 La Commission fait valoir qu'il existe une contradiction entre l'affirmation, au point 44 de l'arrêt attaqué, selon laquelle la procédure mise en place par elle ne satisferait pas à l'exigence d'un examen comparatif des mérites des fonctionnaires susceptibles d'être promus et la constatation, au point 37, selon laquelle, en vertu de cette procédure, les fonctionnaires ayant figuré l'année précédente sur la liste des plus méritants et n'ayant pas été promus ne sont inscrits sur cette même liste l'année suivante qu'à la condition de n'avoir pas «démérité».

11 Selon la Commission, le démérite d'un fonctionnaire signifierait qu'il ne serait plus justifié que l'intéressé figure, lors de l'exercice suivant, sur la liste des fonctionnaires les plus méritants. Une appréciation de cet ordre supposerait une comparaison avec les mérites des autres candidats à la promotion. En cela, l'examen du démérite s'apparenterait à un «examen comparatif des mérites» au sens de l'article 45, paragraphe 1, premier alinéa, du statut.

12 La Commission ajoute que les fonctionnaires ayant figuré sur la liste des plus méritants, mais qui n'ont pas été promus, bénéficient d'une «présomption réfragable» quant à leur réinscription sur la liste des plus méritants au cours de l'exercice subséquent. En effet, dans la grande majorité des cas, les fonctionnaires auraient un niveau de prestation relativement constant au fil des années et il serait rare qu'un candidat jugé plus méritant qu'un autre lors d'un exercice «démérite» subitement l'année suivante. En outre, les mérites d'un candidat à la promotion ne sauraient être appréciés par rapport à une seule année, mais devraient être évalués sur une période plus longue, sauf à favoriser indûment les fonctionnaires qui se limiteraient à faire des efforts ponctuels pendant les exercices au cours desquels ils peuvent espérer une promotion.

13 La Commission relève que l'absence de promotion d'un fonctionnaire au cours d'un exercice, bien qu'il ait figuré sur la liste des plus méritants, résulte des contraintes budgétaires limitant le nombre des emplois disponibles dans le grade supérieur.

14 En conséquence, il serait justifié, voire nécessaire, que l'AIPN, lorsqu'elle procède à l'examen comparatif des mérites prévu à l'article 45, paragraphe 1, premier alinéa, du statut, prenne en considération le fait qu'un candidat a déjà figuré sur la liste des fonctionnaires les plus méritants au cours de l'exercice précédent. La Commission se réfère, à cet égard, à la jurisprudence constante selon laquelle l'AIPN n'est pas tenue, dans l'appréciation des mérites, de s'appuyer uniquement sur les rapports de notation des candidats, mais peut également fonder son appréciation sur d'autres aspects de leurs mérites, tels que des informations concernant leur situation administrative et personnelle de nature à relativiser l'appréciation portée uniquement au regard des rapports de notation (voir, notamment, arrêt du Tribunal du 25 novembre 1993, X/Commission, T-89/91, T-21/92 et T-89/92, Rec. p. II-1235, points 49 et 50).

15 Mme Hamptaux soutient que le raisonnement de la Commission repose sur une prémisse erronée, selon laquelle l'examen d'un éventuel «démérite» d'un fonctionnaire, qui a été inscrit sur la liste des plus méritants au cours d'un exercice antérieur, impliquerait qu'une appréciation est portée quant à la question de savoir si un tel fonctionnaire est encore susceptible de figurer en rang prioritaire sur la liste des fonctionnaires pouvant être promus. Or, la constatation du «démérite» d'un fonctionnaire nécessiterait uniquement une appréciation individuelle de ses qualités professionnelles au fil du temps et ne procéderait nullement d'une comparaison entre les prestations de l'intéressé et les mérites professionnels des autres candidats à la promotion.

16 Ainsi, selon Mme Hamptaux, la seule circonstance qu'un fonctionnaire ait été «plus méritant» au cours d'un exercice de promotion et qu'il n'ait pas «démérité» - ce qui signifierait que ses qualités professionnelles personnelles n'ont pas diminué au fil du temps - n'impliquerait nullement que, au cours d'un exercice subséquent, l'intéressé soit resté «plus méritant» en comparaison des mérites professionnels d'autres candidats à la promotion qui, éventuellement, n'étaient pas susceptibles d'être promus au cours de l'exercice précédent.

17 Certes, l'AIPN, lors de l'établissement de la liste des plus méritants, pourrait tenir compte de la circonstance qu'un fonctionnaire a déjà été inscrit sur la liste établie au titre de l'année précédente, mais elle ne serait pas dispensée de procéder à une comparaison des mérites de l'intéressé avec les qualités de l'ensemble des candidats à la promotion pour l'exercice en cours. Mme Hamptaux met précisément en cause la réinscription automatique par l'AIPN des «reliquats» de l'année précédente sur la liste des fonctionnaires les plus méritants de l'exercice en cours.

Appréciation de la Cour

18 Pour chaque exercice de promotion, l'article 45, paragraphe 1, premier alinéa, du statut impose à l'AIPN l'obligation de procéder à un examen comparatif des mérites des fonctionnaires susceptibles d'être promus ainsi que des rapports dont ils ont fait l'objet.

19 Si l'exigence d'un examen comparatif des mérites n'exclut pas, ainsi que l'a relevé à juste titre la Commission, que l'AIPN puisse prendre en considération la circonstance qu'un candidat a déjà figuré sur la liste des fonctionnaires les plus méritants lors d'un exercice antérieur, elle requiert néanmoins que les mérites de chaque candidat soient appréciés par rapport à ceux des autres candidats à la promotion, y compris les fonctionnaires qui, antérieurement, ne figuraient pas sur la liste des plus méritants.

20 Or, le Tribunal a jugé, à cet égard, au point 44 de l'arrêt attaqué:

«Il ressort tant des écrits déposés par la Commission que des explications de cette dernière, lors de l'audience, que les fonctionnaires ayant figuré l'année précédente sur la liste des plus méritants, établie par l'AIPN, qui n'avaient pas été promus figurent automatiquement sur la liste des plus méritants l'année suivante et sont automatiquement promus, sauf s'ils ont démérité. En conséquence, contrairement à l'obligation que lui impose l'article 45, paragraphe 1, du statut, l'AIPN n'a pas procédé, dans le cadre de la procédure de promotion litigieuse, à l'examen comparatif des mérites de la requérante ainsi que des rapports dont elle avait fait l'objet avec ceux des deux fonctionnaires déjà inscrits l'année précédente sur la liste des plus méritants établie par l'AIPN, violant ainsi un droit incontestable de la requérante dans le cadre de la procédure de promotion.»

21 Le Tribunal a également jugé, au point 46, que «la Commission n'a pas démontré non plus que les mérites de la requérante auraient été comparés au titre de l'exercice de promotion 1996 avec ceux des fonctionnaires les plus méritants de l'année 1996».

22 Force est de constater que la Commission se borne à réitérer devant la Cour l'argumentation déjà défendue devant le Tribunal, qui tend à démontrer que, lorsqu'elle vérifie le démérite éventuel d'un fonctionnaire inscrit sur la liste des plus méritants établie l'année précédente, l'AIPN procède à une comparaison des mérites de l'ensemble des fonctionnaires ayant vocation à la promotion ainsi que des rapports dont ils ont fait l'objet. La Commission n'établit cependant pas que la motivation de l'arrêt attaqué et la conclusion qu'en infère le Tribunal sont, à cet égard, contradictoires.

23 En effet, il n'est pas incohérent de juger que, d'une part, dans le cadre de la procédure de promotion en cause, les fonctionnaires qui ont figuré sur la liste des plus méritants l'année précédente ne sont inscrits sur la liste de l'exercice en cours qu'à la condition de ne pas avoir démérité et que, d'autre part, ce faisant, l'AIPN n'a pas procédé à un examen comparatif des mérites des candidats à une promotion, conformément aux exigences de l'article 45, paragraphe 1, premier alinéa, du statut. En effet, l'appréciation du démérite éventuel d'un candidat, laquelle présente un caractère purement individuel, n'implique pas qu'il ait été procédé à un véritable examen comparatif des mérites de l'ensemble des fonctionnaires susceptibles d'être promus.

24 Pour le même motif, le Tribunal n'a pas commis d'erreur de droit en considérant que l'examen du démérite éventuel d'un fonctionnaire ayant vocation à la promotion n'équivalait pas à un examen comparatif des mérites tel que l'exige l'article 45, paragraphe 1, premier alinéa, du statut.

25 L'unique moyen invoqué par la Commission au soutien de son pourvoi ne pouvant être accueilli, il y a lieu, en conséquence, de rejeter celui-ci.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

26 Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, rendu applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l'article 118, la partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Mme Hamptaux ayant conclu à la condamnation de la Commission et cette dernière ayant succombé en son unique moyen, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Dispositif


Par ces motifs,

LA COUR

(cinquième chambre)

déclare et arrête:

1) Le pourvoi est rejeté.

2) La Commission des Communautés européennes est condamnée aux dépens.

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