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Document 61998CJ0432

    Arrêt de la Cour du 5 octobre 2000.
    Conseil de l'Union européenne contre Christiane Chvatal et autres, Antoinette Losch et Cour de justice des Communautés européennes.
    Pourvoi - Fonctionnaires - Cessation définitive des fonctions à l'occasion de l'adhésion de nouveaux Etats membres - Exception d'illégalité du règlement (CE, Euratom, CECA) nº 2688/95 - Irrecevabilité de l'exception.
    Affaires jointes C-432/98 P et C-433/98 P.

    Recueil de jurisprudence 2000 I-08535

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2000:545

    61998J0432

    Arrêt de la Cour du 5 octobre 2000. - Conseil de l'Union européenne contre Christiane Chvatal et autres, Antoinette Losch et Cour de justice des Communautés européennes. - Pourvoi - Fonctionnaires - Cessation définitive des fonctions à l'occasion de l'adhésion de nouveaux Etats membres - Exception d'illégalité du règlement (CE, Euratom, CECA) nº 2688/95 - Irrecevabilité de l'exception. - Affaires jointes C-432/98 P et C-433/98 P..

    Recueil de jurisprudence 2000 page I-08535


    Sommaire
    Parties
    Motifs de l'arrêt
    Décisions sur les dépenses
    Dispositif

    Mots clés


    1 Pourvoi - Recevabilité - Appréciation par rapport au litige objet de l'instance - Institution intervenue en première instance ayant partiellement ou totalement succombé en ses conclusions - Condition suffisante

    (Statut de la Cour de justice CE, art. 49)

    2 Fonctionnaires - Cessation définitive des fonctions - Dégagement - Mesure nécessitant une base juridique spécifique - Règlement du Conseil n_ 2688/95 autorisant le Parlement européen à prendre des mesures de dégagement en faveur de son personnel - Recours de fonctionnaires de la Cour de justice invoquant, par voie d'exception, l'illégalité du règlement n_ 2688/95 - Irrecevabilité

    (Règlement du Conseil n_ 2688/95)

    Sommaire


    1 Les conditions de recevabilité des pourvois fixées par l'article 49 du statut CE et les dispositions correspondantes des statuts CECA et CEEA de la Cour de justice s'apprécient par rapport au litige objet de l'instance et à lui seul. La circonstance que les motifs d'une décision du Tribunal qui serait devenue définitive accueillent une exception d'illégalité soulevée contre un acte réglementaire n'interdit pas à l'auteur d'un pourvoi recevable de contester, dans un autre litige, l'illégalité du même règlement.

    Il résulte, en outre, de l'article 49, deuxième alinéa, du statut CE et des dispositions correspondantes des statuts CECA et CEEA de la Cour de justice qu'il suffit à une institution intervenue en première instance d'avoir partiellement ou totalement succombé en ses conclusions pour être recevable à former un pourvoi devant la Cour. (voir points 22-23)

    2 Des mesures de cessation définitive des fonctions, telles que celles qui ont été permises par le règlement n_ 2688/95 du Conseil, ne trouvent pas leur origine légale dans le statut et ne constituent donc pas un élément ordinaire de la carrière des personnes concernées. De telles mesures, dites de «dégagement des cadres», doivent au contraire être analysées comme une pratique à laquelle la Communauté a eu recours de façon ponctuelle dans l'intérêt du bon fonctionnement de ses institutions.

    Il en résulte, d'une part, qu'une demande d'inscription sur une liste de personnes ayant manifesté leur intérêt pour une telle mesure suppose l'existence d'une disposition réglementaire spécifique et légale qui lui fournisse une base juridique et, d'autre part, que, même en présence d'une telle disposition, l'institution concernée n'est tenue ni de faire droit aux demandes qui lui sont présentées ni d'utiliser, même partiellement, la faculté qui lui est offerte de décider de la cessation définitive des fonctions d'une partie de ses fonctionnaires.

    Dès lors que le règlement n_ 2688/95 du Conseil n'a autorisé que le Parlement européen à prendre des mesures de dégagement, et qu'il ne saurait donc fournir une base juridique aux demandes de fonctionnaires d'autres institutions, c'est à tort que le Tribunal a déclaré recevable une exception d'illégalité de ce règlement invoquée par des fonctionnaires de la Cour de justice dans le cadre d'un litige ayant pour objet l'annulation d'une décision de l'autorité investie du pouvoir de nomination rejetant leur demande d'inscription sur la liste des fonctionnaires intéressés par des mesures de dégagement. En effet, la légalité des réponses faites par l'autorité investie du pouvoir de nomination ne saurait être affectée par les vices dont serait entaché un règlement ne s'appliquant pas à la Cour de justice. (voir points 28-34)

    Parties


    Dans les affaires jointes C-432/98 P et C-433/98 P,

    Conseil de l'Union européenne, représenté par MM. J.-P. Jacqué, directeur au service juridique, D. Canga Fano et Mme T. Blanchet, membres du même service, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. A. Morbilli, directeur général de la direction des affaires juridiques de la Banque européenne d'investissement, 100, boulevard Konrad Adenauer,

    partie requérante,

    soutenu par

    Royaume d'Espagne, représenté par Mme N. Díaz Abad, abogado del Estado, en qualité d'agent, ayant élu domicile à Luxembourg au siège de l'ambassade d'Espagne, 4-6, boulevard Emmanuel Servais,

    partie intervenante au pourvoi,

    ayant pour objet des pourvois formés contre les arrêts du Tribunal de première instance des Communautés européennes (cinquième chambre) du 30 septembre 1998, Chvatal e.a./Cour de justice (T-154/96, RecFP p. I-A-527 et II-1579), et Losch/Cour de justice (T-13/97, RecFP p. I-A-543 et II-1633), et tendant à l'annulation de ces arrêts, les autres parties à la procédure étant: Christiane Chvatal e.a., fonctionnaires de la Cour de justice des Communautés européennes, représentés par Mes J.-N. Louis et T. Demaseure, avocats au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg au siège de la Société de gestion fiduciaire, boîte postale 585, Antoinette Losch, fonctionnaire de la Cour de justice des Communautés européennes, représentée par Mes J.-N. Louis et T. Demaseure, avocats au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg au siège de la Société de gestion fiduciaire, boîte postale 585, parties demanderesses en première instance, Cour de justice des Communautés européennes, L - 2925 Luxembourg, partie défenderesse en première instance, et Royaume des Pays-Bas, Bezuidenhoutseweg, 67, La Haye, partie intervenante en première instance,

    LA COUR,

    composée de MM. G. C. Rodríguez Iglesias, président, J. C. Moitinho de Almeida, D. A. O. Edward, L. Sevón et R. Schintgen, présidents de chambre, C. Gulmann, A. La Pergola, J.-P. Puissochet (rapporteur), H. Ragnemalm, M. Wathelet et V. Skouris, juges,

    avocat général: M. S. Alber,

    greffier: Mme D. Louterman-Hubeau, administrateur principal,

    vu le rapport d'audience,

    ayant entendu les parties en leur plaidoirie à l'audience du 11 avril 2000,

    ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 6 juin 2000,

    rend le présent

    Arrêt

    Motifs de l'arrêt


    1 Par deux requêtes déposées au greffe de la Cour le 1er décembre 1998, le Conseil de l'Union européenne a, en vertu de l'article 49 du statut CE et des dispositions correspondantes des statuts CECA et CEEA de la Cour de justice, formé, d'une part, un pourvoi contre l'arrêt du Tribunal de première instance du 30 septembre 1998, Chvatal e.a./Cour de justice (T-154/96, RecFP p. I-A-527 et II-1579), et, d'autre part, un pourvoi contre l'arrêt du Tribunal de première instance du 30 septembre 1998, Losch/Cour de justice (T-13/97, RecFP p. I-A-543 et II-1633, ci-après les «arrêts attaqués»), par lesquels le Tribunal a annulé les décisions de la Cour de justice portant rejet de la demande de certains agents l'invitant à inscrire leur nom sur la liste des personnes ayant manifesté leur intérêt pour faire l'objet d'une mesure de cessation définitive des fonctions telle que prévue par le règlement (CE, Euratom, CECA) n_ 2688/95 du Conseil, du 17 novembre 1995, instituant, à l'occasion de l'adhésion de l'Autriche, de la Finlande et de la Suède, des mesures particulières de cessation définitive des fonctions de fonctionnaires des Communautés européennes (JO L 280, p. 1).

    Les faits à l'origine des litiges

    2 À l'occasion de l'adhésion de la république d'Autriche, de la république de Finlande et du royaume de Suède, la Commission, après avoir obtenu le 21 juin 1995 l'avis favorable du comité du statut, a présenté, le 7 juillet 1995, une proposition de règlement instituant des mesures particulières de cessation définitive des fonctions de fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après la «proposition initiale»). Cette proposition, qui fixait le nombre des fonctionnaires susceptibles de faire l'objet d'une mesure de «dégagement des cadres» au Parlement, au Conseil, à la Commission, à la Cour de justice, à la Cour des Comptes et au Comité économique et social, a été soumise pour avis aux institutions concernées et a reçu un avis favorable du Parlement, de la Cour de justice et de la Cour des comptes.

    3 La Commission ayant scindé sa proposition initiale, le Conseil a adopté, le 17 novembre 1995, le règlement n_ 2688/95 autorisant le Parlement, jusqu'au 30 juin 2000, à prendre à l'égard de ses fonctionnaires ayant atteint l'âge de 55 ans, à l'exception de ceux classés dans les grades A 1 et A 2, des mesures de cessation définitive des fonctions.

    4 Mme Chvatal e.a. et Mme Losch, fonctionnaires de la Cour de justice, ont demandé séparément, par lettres adressées entre le 6 février et le 16 juillet 1996 au greffier de la Cour de justice en sa qualité d'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l'«AIPN»), que leur nom figure sur la liste des personnes ayant manifesté leur intérêt pour une mesure de cessation définitive des fonctions à l'occasion de l'adhésion de la république d'Autriche, de la république de Finlande et du royaume de Suède.

    5 Le greffier de la Cour de justice leur a répondu, par des lettres adressées entre le 28 février et le 22 juillet 1996 (ci-après les «lettres litigieuses»), qu'il n'était pas en mesure de donner une suite favorable à leurs demandes, l'état de la réglementation ne permettant pas aux institutions autres que le Parlement de prendre des mesures de cessation définitive des fonctions, mais que l'intérêt qu'ils avaient manifesté ne manquerait pas d'être pris en considération dans le cas où le Conseil viendrait à accepter la proposition initiale de la Commission en tant qu'elle visait également les fonctionnaires des autres institutions.

    6 Mme Chvatal e.a. et Mme Losch ont introduit séparément, entre le 21 mai et le 24 septembre 1996, des réclamations contre les décisions contenues, selon eux, dans les lettres litigieuses. Ces réclamations ont été rejetées par le comité chargé des réclamations de la Cour de justice au motif qu'elles tendaient exclusivement à mettre en cause la validité du règlement n_ 2688/95, notamment en ce qu'il ne s'appliquait pas aux fonctionnaires de la Cour de justice, alors qu'il n'appartenait pas à l'AIPN de cette institution d'apprécier la validité d'un règlement du Conseil.

    7 À la suite de ces rejets, notifiés entre le 11 juillet et le 23 octobre 1996, Mme Chvatal e.a. et Mme Losch ont, par deux requêtes déposées au greffe du Tribunal respectivement le 8 octobre 1996 et le 20 janvier 1997, formé des recours en vue de faire constater l'illégalité du règlement n_ 2688/95 et d'obtenir par voie de conséquence l'annulation des décisions de l'AIPN rejetant leurs demandes contenues dans les lettres litigieuses.

    Les arrêts attaqués

    8 Le Tribunal a d'abord rejeté les moyens d'irrecevabilité des requêtes présentés par la Cour de justice, défenderesse en première instance, et par le Conseil et le royaume des Pays-Bas, intervenus en première instance au soutien des conclusions de cette dernière.

    9 Il a en effet considéré, d'une part, que l'exercice par un fonctionnaire du droit de demander à l'AIPN de prendre à son égard une décision, conformément à l'article 90, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le «statut»), n'était soumis à aucune condition et, d'autre part, que les décisions prises par l'AIPN, en refusant de façon définitive de prendre en considération les demandes présentées, affectaient directement et immédiatement la situation juridique de Mme Chvatal e.a. et de Mme Losch et leur faisaient ainsi grief.

    10 Ensuite, s'agissant de la contestation par voie d'exception de la légalité du règlement n_ 2688/95, le Tribunal a estimé qu'elle était également recevable.

    11 En effet, après avoir considéré que le règlement n_ 2688/95 constituait la base juridique directe des décisions de l'AIPN, dans la mesure où il excluait, implicitement mais nécessairement, de son champ d'application les fonctionnaires des institutions autres que le Parlement, le Tribunal a jugé que l'exception d'illégalité soulevée à l'encontre dudit règlement n'était ni prématurée - puisqu'aucune mesure de «dégagement» n'avait été adoptée, à la suite du règlement n_ 2688/95, pour les autres institutions et que la proposition initiale de la Commission était devenue partiellement caduque - ni abusive, et ce alors même que l'AIPN n'avait pas d'autre choix que de rejeter les demandes qui lui étaient soumises.

    12 Sur le fond, enfin, le Tribunal, examinant l'exception d'illégalité du règlement n_ 2688/95 dont il était saisi, a retenu deux motifs d'illégalité de ce règlement.

    13 Il a, en premier lieu, considéré, dans l'exercice d'un contrôle limité à l'erreur manifeste et au détournement de pouvoir, que le règlement n_ 2688/95, en tant qu'il limitait au seul Parlement le droit de recourir à des mesures de «dégagement», instituait une différenciation arbitraire, ou manifestement inadéquate par rapport à l'objectif poursuivi, entre des situations tout à fait similaires et était en tant que tel contraire au principe d'égalité, principe fondamental du droit communautaire. En effet, la situation de la Cour de justice n'était pas différente de celle du Parlement au regard de la nécessité de réaménager la composition du corps des fonctionnaires à leur service à l'occasion de l'adhésion de nouveaux États membres.

    14 Le Tribunal a, en second lieu, jugé que le règlement n_ 2688/95 était entaché d'une violation des formes substantielles pour ne pas avoir été précédé d'une nouvelle consultation du Parlement et du comité du statut à l'occasion de la modification par la Commission de sa proposition initiale.

    15 Il a en effet considéré que la modification apportée à la proposition initiale présentait un caractère substantiel, puisqu'elle en réduisait considérablement la portée, et aurait dû, de ce fait, être soumise, d'une part, au Parlement, en vertu de l'article 24 du traité instituant un Conseil unique et une Commission unique des Communautés européennes, et, d'autre part, au comité du statut, en vertu de l'article 10, deuxième alinéa, deuxième phrase, du statut. Or tel n'a pas été le cas.

    16 Par ces motifs, le Tribunal a annulé les décisions de la Cour de justice adressées à Mme Chvatal e.a. et à Mme Losch et refusant d'inscrire leur nom sur la liste des personnes ayant manifesté leur intérêt pour une mesure de cessation définitive des fonctions telle que prévue par le règlement n_ 2688/95.

    Les pourvois

    17 Le Conseil conclut qu'il plaise à la Cour annuler les arrêts attaqués. À l'appui de ses pourvois, il articule six moyens, dont trois sont relatifs à la recevabilité soit des recours formés devant le Tribunal, soit de l'exception d'illégalité qu'ils soulèvent, et trois portent sur la légalité du règlement n_ 2688/95.

    18 Mme Chvatal e.a. et Mme Losch demandent à la Cour de déclarer les pourvois irrecevables, subsidiairement de les déclarer non fondés, et de condamner le Conseil aux dépens.

    19 Par ordonnances du président de la Cour du 19 avril 1999, le royaume d'Espagne a été admis à intervenir dans les affaires C-432/98 P et C-433/98 P à l'appui des conclusions du Conseil. Il demande à la Cour d'annuler les arrêts attaqués.

    20 Par ordonnance du président de la Cour du 17 mars 2000, les affaires C-432/98 P et C-433/98 P ont été jointes aux fins de la procédure orale et de l'arrêt.

    Sur la recevabilité des pourvois

    21 Mme Chvatal e.a. et Mme Losch demandent à la Cour de déclarer les pourvois irrecevables. Ils exposent, à cet effet, que les arrêts attaqués sont analogues dans leurs motifs et dans leur dispositif à l'arrêt du Tribunal du 30 septembre 1998, Busacca e.a./Cour des comptes (T-164/97, RecFP p. I-A-565 et II-1699). Or, le Conseil n'étant pas intervenu dans l'affaire T-164/97, le pourvoi qu'il a formé contre ledit arrêt serait manifestement irrecevable. Les parties à la procédure T-164/97 n'ayant pas formé de pourvoi, l'arrêt du Tribunal Busacca e.a./Cour des comptes, précité, serait passé en force de chose jugée. Déclarer le Conseil recevable à se pourvoir contre les arrêts attaqués reviendrait par conséquent à l'autoriser à remettre en cause la force de chose jugée dont serait revêtu l'arrêt Busacca e.a./Cour des comptes, précité, alors qu'il aurait sciemment renoncé à intervenir dans cette affaire et qu'il appartiendrait désormais à l'institution concernée d'arrêter les mesures que comporte l'exécution de cet arrêt.

    22 Il suffit à cet égard de rappeler que les conditions de recevabilité des pourvois fixées par l'article 49 du statut CE et les dispositions correspondantes des statuts CECA et CEEA de la Cour de justice s'apprécient par rapport au litige objet de l'instance et à lui seul. La circonstance que les motifs d'une décision du Tribunal qui serait devenue définitive accueillent une exception d'illégalité soulevée contre un acte réglementaire n'interdit pas à l'auteur d'un pourvoi recevable de contester, dans un autre litige, l'illégalité du même règlement.

    23 Il résulte, en outre, de l'article 49, deuxième alinéa, du statut CE et des dispositions correspondantes des statuts CECA et CEEA de la Cour de justice qu'il suffit à une institution intervenue en première instance d'avoir partiellement ou totalement succombé en ses conclusions pour être recevable à former un pourvoi devant la Cour.

    24 Tel étant le cas du Conseil dans les affaires qui ont donné lieu aux arrêts attaqués, cette institution est recevable à se pourvoir contre lesdits arrêts, sans que cette recevabilité puisse être affectée par l'état de la procédure dans d'autres affaires, même si celles-ci soulèvent des questions de droit semblables.

    Sur le bien-fondé des pourvois

    Sur l'exception d'illégalité du règlement n_ 2688/95

    25 Le Conseil expose que le Tribunal a fait une application erronée de l'article 184 du traité CE (devenu article 241 CE) en déclarant recevable l'exception d'illégalité dirigée contre le règlement n_ 2688/95.

    26 Il est constant que l'unique motif retenu par le Tribunal pour annuler les décisions incriminées est l'illégalité de l'acte réglementaire qui forme la base juridique de ces décisions. Il en résulte que, si c'est à tort que le Tribunal s'est jugé saisi d'une contestation recevable, par voie incidente, de la légalité du règlement n_ 2688/95, une telle erreur de droit devra nécessairement entraîner l'annulation des arrêts attaqués.

    27 Il ressort des arrêts attaqués que Mme Chvatal e.a. et Mme Losch ont demandé à l'AIPN de faire figurer leur nom sur la liste des personnes ayant manifesté leur intérêt pour une mesure de cessation définitive des fonctions. Par les lettres litigieuses, qui ont été déférées au Tribunal, l'AIPN a répondu à ces fonctionnaires que, en l'état actuel du dossier, elle n'était pas en mesure de donner une suite favorable à leurs demandes, le règlement n_ 2688/95 étant seulement applicable aux fonctionnaires du Parlement et la réglementation ne permettant donc pas aux autres institutions de prendre à l'égard de leur personnel des mesures de cessation définitive des fonctions.

    28 Il convient d'observer, à titre liminaire, que des mesures de cessation définitive des fonctions, telles que celles qui ont été permises par le règlement n_ 2688/95, ne trouvent pas leur origine légale dans le statut et ne constituent donc pas un élément ordinaire de la carrière des personnes concernées. De telles mesures, dites de «dégagement des cadres» doivent au contraire être analysées comme une pratique à laquelle la Communauté a eu recours de façon ponctuelle dans l'intérêt du bon fonctionnement de ses institutions.

    29 Il en résulte, d'une part, qu'une demande d'inscription sur une liste de personnes ayant manifesté leur intérêt pour une telle mesure suppose l'existence d'une disposition réglementaire spécifique et légale qui lui fournisse une base juridique et, d'autre part, que, même en présence d'une telle disposition, l'institution concernée n'est tenue ni de faire droit aux demandes qui lui sont présentées ni d'utiliser, même partiellement, la faculté qui lui est offerte de décider de la cessation définitive des fonctions d'une partie de ses fonctionnaires.

    30 En l'espèce, la seule base juridique qui pouvait être invoquée par des fonctionnaires pour solliciter le bénéfice de mesures de dégagement était le règlement n_ 2688/95, lequel n'autorisait que le Parlement à prendre de telles mesures.

    31 À supposer par conséquent que ce règlement ait été entaché d'illégalité, pour quelque motif que ce soit, et qu'il ait de ce fait été inapplicable, cette circonstance n'aurait pu avoir pour effet de fournir une base juridique aux demandes de fonctionnaires appartenant à des institutions exclues de son champ d'application.

    32 La légalité des réponses faites par l'AIPN à Mme Chvatal e.a. et à Mme Losch ne saurait donc être affectée par les vices dont serait entaché un règlement ne s'appliquant pas à la Cour de justice.

    33 Il en résulte que les fonctionnaires en cause n'étaient pas recevables à contester par voie incidente la légalité d'un règlement dont les décisions contestées ne constituent pas des mesures d'application. Dès lors, c'est à tort que, par les arrêts attaqués, le Tribunal a accepté de statuer sur l'exception d'illégalité du règlement n_ 2688/95 invoquée par les requérants.

    34 Il découle de ce qui précède que le moyen tiré d'une application erronée de l'article 184 du traité est fondé et que les arrêts attaqués doivent, à ce titre, être annulés sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés par le Conseil.

    Sur le moyen tiré de l'absence de reconsultation du comité du statut

    35 Le Conseil invite néanmoins la Cour, dans l'hypothèse où elle ne se prononcerait pas sur la légalité du règlement n_ 2688/95, à examiner, parmi les moyens de fond retenus par le Tribunal, celui tenant à la violation des formes substantielles que constituerait l'absence de reconsultation du comité du statut après que la proposition initiale de la Commission a été scindée.

    36 Toutefois, la demande présentée au Tribunal par Mme Chvatal e.a. et Mme Losch de se prononcer par voie d'exception sur la légalité du règlement n_ 2688/95 n'étant pas recevable, il n'y a pas lieu pour la Cour, après avoir constaté cette irrecevabilité, de se prononcer sur le bien-fondé des considérations émises par le Tribunal sur le fond du droit.

    Sur les recours introduits devant le Tribunal

    37 Conformément à l'article 54 du statut CE et des dispositions correspondantes des statuts CECA et CEEA de la Cour de justice, lorsque le pourvoi est fondé, la Cour annule la décision du Tribunal. Elle peut alors statuer elle-même définitivement sur le litige, lorsque celui-ci est en état d'être jugé. Tel est le cas en l'espèce.

    38 Il résulte des points 26 à 34 du présent arrêt que les recours présentés respectivement par Mme Chvatal e.a. et par Mme Losch devant le Tribunal doivent être rejetés.

    Décisions sur les dépenses


    Sur les dépens

    39 Aux termes de l'article 122, premier alinéa, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi est fondé et que la Cour juge elle-même définitivement le litige, elle statue sur les dépens.

    Sur les dépens exposés en première instance

    40 Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Aux termes de l'article 87, paragraphe 4, les États membres et les institutions qui sont intervenus au litige supportent leurs dépens. Aux termes de l'article 88, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent, en principe, à la charge de celles-ci.

    41 Mme Chvatal e.a. et Mme Losch ayant succombé en leurs moyens, chacune des parties, ainsi que chacun des intervenants, supportera ses propres dépens.

    Sur les dépens exposés à l'occasion du pourvoi

    42 Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l'article 118, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Aux termes de l'article 69, paragraphe 4, également applicable à la procédure de pourvoi, les États membres et les institutions qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens. Aux termes de l'article 70, applicable aux pourvois formés par les institutions en vertu des articles 118 et 122, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent, sans préjudice d'autres dispositions, à la charge de celles-ci.

    43 Mme Chvatal e.a. et Mme Losch ayant succombé en leurs conclusions, chaque partie, ainsi que le royaume d'Espagne, qui est intervenu au pourvoi, supportera ses propres dépens.

    Dispositif


    Par ces motifs,

    LA COUR

    déclare et arrête:

    1) Les arrêts du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 30 septembre 1998, Chvatal e.a./Cour de justice (T-154/96), et Losch/Cour de justice (T-13/97), sont annulés.

    2) Les recours introduits devant le Tribunal dans les affaires T-154/96 et T-13/97 sont rejetés.

    3) Mme Chvatal e.a. et Mme Losch, la Cour de justice des Communautés européennes, le Conseil de l'Union européenne, le royaume d'Espagne et le royaume des Pays-Bas supporteront chacun leurs propres dépens, exposés tant en première instance qu'à l'occasion du pourvoi.

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