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Έγγραφο 61995CC0191(01)

Conclusions de l'avocat général présentées le 17 février 1998.
Commission des Communautés européennes contre République fédérale d'Allemagne.
Manquement d'Etat - Avis motivé - Principe de collégialité - Droit des sociétés - Directives 68/151/CEE et 78/660/CEE - Comptes annuels - Sanctions en cas d'absence de publication.
Affaire C-191/95.

Recueil de jurisprudence 1998 I-05449

Αναγνωριστικό ECLI: ECLI:EU:C:1998:62

61995C0191(01)

Conclusions de l'avocat général Cosmas présentées le 17 février 1998. - Commission des Communautés européennes contre République fédérale d'Allemagne. - Manquement d'Etat - Avis motivé - Principe de collégialité - Droit des sociétés - Directives 68/151/CEE et 78/660/CEE - Comptes annuels - Sanctions en cas d'absence de publication. - Affaire C-191/95.

Recueil de jurisprudence 1998 page I-05449


Conclusions de l'avocat général


I - Observations liminaires

L'occasion - agréable ou déplaisante - nous est donnée de nous exprimer à nouveau sur l'affaire C-191/95, au sujet de laquelle nous avons déjà présenté des conclusions le 5 juin 1997. Nous ne considérons pas que la réouverture de la procédure orale ait permis aux parties d'invoquer des éléments qui ruinent tant le raisonnement que nous avons suivi que les conclusions auxquelles nous sommes parvenu. Nous estimons, toutefois, opportun de formuler un certain nombre d'observations complémentaires, dans la mesure où, à l'audience, la Commission a entrepris d'esquisser une réalité juridique différente de celle que nous avons décrite dans nos précédentes conclusions. Nous nous bornerons, toutefois, à développer les questions juridiques auxquelles la nouvelle procédure orale a été essentiellement consacrée, c'est-à-dire celles concernant la légalité formelle de l'avis motivé de la Commission qui a précédé le présent recours; dans cet avis motivé, la Commission a reproché à la République fédérale d'Allemagne de ne pas avoir transposé correctement la première directive 68/151/CEE du Conseil, du 9 mars 1968, tendant à coordonner, pour les rendre équivalentes, les garanties qui sont exigées, dans les États membres, des sociétés au sens de l'article 58 deuxième alinéa du traité, pour protéger les intérêts tant des associés que des tiers (JO L 65, p. 8), et la quatrième directive 78/660/CEE du Conseil, du 25 juillet 1978, fondée sur l'article 54 paragraphe 3 sous g) du traité et concernant les comptes annuels de certaines formes de sociétés (JO L 222, p. 11), relatives aux sanctions que les États membres doivent infliger aux sociétés de capitaux qui ne publient pas leurs comptes annuels.

II - Faits et procédure devant la Cour

1 Au sujet des faits qui ont amené la Commission à agir devant la Cour, nous renvoyons au point 1 des conclusions que nous avons présentées le 5 juin 1997. Pour la procédure qui a eu lieu devant la Cour jusqu'à la présentation de nos conclusions initiales, nous renvoyons aux points 2 à 6 de ces conclusions. Nous estimons, cependant, opportun de rappeler rapidement que la République fédérale d'Allemagne a, dès le début, soulevé une exception d'irrecevabilité, en soutenant que les décisions de la Commission qui sont à l'origine du présent recours sont entachées de vices de forme substantiels. Elle a formulé des doutes particulièrement quant au point de savoir si l'avis motivé et la décision de saisir la Cour du présent recours avaient été adoptés conformément au principe de collégialité et dans le respect des formes imposées par le règlement intérieur de la Commission. Elle a, en outre, demandé à cette dernière de préciser si ces actes avaient été pris par le collège des commissaires ou en vertu d'une habilitation et elle a demandé également à pouvoir disposer d'une copie de ces décisions. La Commission n'ayant pas répondu à ces demandes, la défenderesse a demandé à la Cour d'exiger de la requérante qu'elle produise les éléments pertinents qui avaient été réclamés. Par son ordonnance du 23 octobre 1996, la Cour a invité la Commission à produire les décisions, adoptées en collège et dans le respect des formes imposées par son règlement intérieur, en vertu desquelles elle a, premièrement, formulé l'avis motivé adressé à la République fédérale d'Allemagne et, deuxièmement, décidé d'introduire le présent recours. La Commission a produit devant la Cour une série d'éléments auxquels nous ferons plus amplement référence dans la suite (1) et qui, à notre avis, ne correspondent pas à ce que la Cour lui avait demandé dans son ordonnance. Eu égard aux éléments produits devant la Cour ainsi qu'aux affirmations formulées par les deux parties au cours de la procédure orale et aux arguments qu'elles ont développés en cette occasion, nous avons présenté le 5 juin 1997 des conclusions où nous avons suggéré à la Cour de rejeter le recours comme irrecevable en raison du non-respect du principe de collégialité lors de l'adoption de l'avis motivé. Nous avons également affirmé que, en tout cas, l'avis motivé ne pouvait être adopté en vertu d'une habilitation et qu'il n'était donc pas possible de remédier ainsi aux vices dont nous avons constaté que l'avis motivé en cause était entaché quant au respect du principe de collégialité. Par son ordonnance du 14 octobre 1997, la Cour, eu égard à l'importance de la question des conditions d'adoption de l'avis motivé en ce qui concerne la recevabilité du recours, a ordonné la réouverture de la procédure orale et a invité les parties à présenter leurs points de vue lors d'une nouvelle audience consacrée à cette question. Alors que la République fédérale d'Allemagne est demeurée sur ses positions initiales, la Commission a développé un raisonnement selon lequel l'avis motivé, du fait de sa nature, était un acte qui ne pouvait être adopté en vertu d'une habilitation et était régi par le principe de collégialité, mais qu'il n'était pas soumis aux conditions strictes, formelles dont nous avions signalé le non-respect dans nos conclusions du 5 juin 1997.

2 Nous ne pouvons qu'accueillir favorablement la position de la Commission lorsqu'elle proclame, même si c'est seulement au niveau des principes, l'obligation de respecter le principe de collégialité lors de l'adoption d'un avis motivé. Comme nous l'expliquerons ultérieurement de manière plus détaillée, nous maintenons toutefois quelques réserves sur le point de savoir si, tout en excluant sur le plan du droit la possibilité d'adopter un avis motivé en vertu d'une habilitation, la Commission n'introduit pas, en pratique, avec son raisonnement, une méthode d'habilitation indirecte, contraire aux règles de la collégialité.

En tout cas, il suffit de souligner à titre liminaire que l'intérêt que présente l'affaire ici examinée concerne essentiellement les règles formelles découlant du principe de collégialité et régissant les décisions de la Commission relatives à l'envoi d'un avis motivé.

III - Recevabilité du recours

A - Principe de l'action collégiale de la Commission

3 Selon la jurisprudence, le principe de l'action collégiale de la Commission occupe une place primordiale dans l'ordre juridique communautaire et exprime la philosophie institutionnelle de la Communauté (et de l'Union). Il est formulé à l'article 17 du traité de fusion et à l'article 163 du traité CE; ce dernier prévoit expressément que «les décisions de la Commission sont acquises à la majorité du nombre des membres...». De même, l'article 1er du règlement intérieur de la Commission indique que «la Commission agit en collège conformément aux dispositions du présent règlement».

4 Dans l'arrêt PVC (2), la Cour rappelle, d'abord, la règle générale (3) selon laquelle «le fonctionnement de la Commission est régi par le principe de collégialité» (4). Elle indique également que «le respect de ce principe, et spécialement la nécessité que les décisions soient délibérées en commun par les membres de la Commission, intéresse nécessairement les sujets de droit concernés par les effets juridiques qu'elles produisent, en ce sens qu'ils doivent être assurés que ces décisions ont été effectivement prises par le collège et correspondent exactement à la volonté de ce dernier» (5). En ce qui concerne les décisions de la Commission devant obligatoirement être motivées, la Cour estime que «le dispositif d'une décision de ce genre ne peut se comprendre et sa portée être mesurée qu'à la lumière des motifs. Le dispositif et la motivation d'une décision constituant dès lors un tout indivisible, c'est uniquement au collège qu'il appartient, en vertu du principe de collégialité, d'adopter à la fois l'un et l'autre» (6). Enfin, l'arrêt PVC indique expressément que la procédure d'authentification des actes de la Commission, prévue par l'article 12 du règlement intérieur, «a pour but d'assurer la sécurité juridique en figeant, dans les langues faisant foi, le texte adopté par le collège» (7).

5 Il résulte de ce qui précède que le principe de l'adoption collégiale des décisions est la règle s'imposant, d'une manière générale, à l'action de la Commission. En particulier, en ce qui concerne les actes devant être motivés, soit en vertu d'une disposition donnée, soit du fait de leur nature, la collégialité requiert que le dispositif et les motifs de l'acte soient adoptés simultanément. Le respect du principe en question est assuré par la procédure d'authentification des décisions prises par la Commission, que prévoit le règlement intérieur.

a) Position de la Commission concernant le principe de collégialité

6 La Commission, avec les arguments qu'elle a développés lors de la nouvelle procédure orale, propose sa propre interprétation du principe de collégialité et limite le champ d'application de la jurisprudence PVC aux actes produisant des effets directs et contraignants. Elle constate, à juste titre, d'une part, que l'arrêt PVC concernait l'application d'une amende, c'est-à-dire un acte administratif exécutoire, et, d'autre part, que la Cour, avant d'arrêter sa position définitive, a pris en considération le fait que les sanctions pécuniaires en question produisent des effets juridiques affectant des sujets de droit (8). Partant de cette constatation, la Commission en arrive à soutenir que le principe de collégialité n'impose pas le respect des mêmes conditions formelles pour l'ensemble des décisions qu'elle prend; elle propose, en effet, de faire une distinction entre les actes produisant des effets juridiques directs - pour lesquels valent les prescriptions strictes énoncées par la Cour dans la jurisprudence PVC - et ceux ne présentant pas cette caractéristique - pour lesquels il suffit que le collège des commissaires, après avoir été informé, prenne une «décision de base» (sic) (9) concernant les faits qui lui ont été soumis et leur qualification juridique. Selon la Commission, une fois la «décision de base» (sic) adoptée en collège par les commissaires, le traitement ultérieur des actes de la seconde catégorie, qui ont un caractère préparatoire, est confié désormais à ceux de ses services qui sont compétents dans la matière concernée (10). Elle affirme encore qu'il suffit que la «décision de base» (sic) soit adoptée par le collège des commissaires pour qu'il soit satisfait aux exigences du principe de collégialité telles qu'elles sont énoncées au point 63 de l'arrêt PVC, exigences impliquant que la décision soit délibérée en commun et que la Commission soit collectivement responsable (11).

7 Transposant son raisonnement dans le cadre de la présente affaire, la Commission indique que, au moment où ils ont pris la «décision de base» (sic) concernant l'envoi d'un avis motivé à la République fédérale d'Allemagne pour transposition incorrecte des directives 68/151 et 78/660, les commissaires avaient, de toute manière, devant eux la fiche d'infraction; cette fiche consiste dans une proposition, parfaitement documentée sur le plan des faits et du droit, élaborée par les services compétents et recommandant aux commissaires l'adoption de l'avis motivé concerné. Ils pouvaient, en outre, recourir, pour disposer d'une documentation plus détaillée ou de plus amples informations, au dossier administratif concernant le manquement en cause de la République fédérale d'Allemagne. Par conséquent, affirme la Commission, les commissaires, lorsqu'ils ont décidé l'envoi d'un avis motivé à la République fédérale d'Allemagne, comme l'attestent les procès-verbaux de leurs réunions (12), étaient parfaitement informés de ce qu'ils décidaient et donc aussi du dispositif et des motifs de l'avis motivé. De ce point de vue, la Commission considère qu'il était pleinement satisfait aux conditions procédurales imposées par le principe de l'action collégiale; elle souligne encore que la pratique qu'elle suit généralement [dans le cadre de la procédure prévue par l'article 169 du traité, le collège des commissaires se borne à adopter une «décision de base» (sic), fondée sur la fiche d'infraction et sur le dossier administratif concernant le manquement en cause, tandis que le soin de rédiger le texte de l'avis motivé est laissé aux services administratifs, sous la surveillance du commissaire compétent] est absolument légale et est pleinement conforme au principe de l'action collégiale.

b) Notre point de vue concernant l'interprétation élaborée par la Commission

8 Pour notre part, nous ne pouvons, en aucun cas, nous rallier à cette thèse.

i) En ce qui concerne le présent recours

9 Dans un premier temps, il y a lieu de souligner que, même si on l'acceptait, la construction juridique de la Commission que nous avons décrite ci-dessus ne contredirait pas les conclusions que nous avons présentées le 5 juin 1997, où nous affirmions que le recours était irrecevable en raison des vices de forme dont l'avis motivé est entaché. La Commission n'a produit devant la Cour, comme elle le devait, ni la fiche d'infraction ni le dossier sur la base duquel la «décision de base» (sic) est supposée avoir été prise par le collège des commissaires. En particulier, la Commission n'a communiqué ces éléments ni lorsque la République fédérale d'Allemagne a contesté la régularité formelle de l'avis motivé ni lorsque la Cour l'a invitée à produire les décisions concernant le présent recours qu'elle a prises en collège et dans le respect des formes imposées par son règlement intérieur. L'agent de la Commission a comparu à l'audience et, au mépris des délais de procédure applicables, a tenté de montrer pour la première fois à l'auditoire ce qu'il affirmait être une fiche d'infraction et un dossier administratif. Après la réouverture de la procédure orale et lors de la seconde audience, l'agent de la Commission a proposé d'envoyer ces textes à la Cour, pour le cas où cette dernière souhaiterait en prendre connaissance à ce stade de la procédure.

10 Cependant, des éléments que la Commission a produits dans les délais - à savoir ceux qu'elle a envoyés à la Cour conformément à l'ordonnance précitée rendue par cette dernière le 20 octobre 1996 (13) - et qui consistaient dans des extraits des procès-verbaux de certaines réunions de la Commission ainsi que des documents mentionnés dans ces procès-verbaux, il résulte ce qui suit: lors de sa 1 071e réunion, du 31 juillet 1991, la Commission a approuvé les propositions des services compétents contenues dans le document SEC(91) 1387. Ce dernier document comporte une liste sommaire, établie au départ de données informatiques, dont l'un des points mentionne la directive en cause en l'espèce et propose (en un seul mot) d'adresser un avis motivé à la République fédérale d'Allemagne. Le procès-verbal de la réunion de la Commission du 18 décembre 1991 [COM(91) PV 1087] indique que la Commission approuve la proposition contenue dans le document SEC(91) 2213; ce document proposait, sans plus d'explications, d'exécuter immédiatement la décision précitée de la Commission du 31 juillet 1991, relative à la notification d'un avis motivé à la République fédérale d'Allemagne. Enfin, d'après ce qui est indiqué, en des termes aussi succincts, dans le procès-verbal de sa réunion du 13 décembre 1994 [COM(95) PV 1227)], la Commission a approuvé la proposition, contenue dans le document SEC(94) 1808, d'introduire devant la Cour, au titre de l'article 169 du traité, un recours dirigé contre la République fédérale d'Allemagne.

11 En bref, il ressort des éléments susmentionnés que les commissaires, au moment où ils ont adopté leur «décision de base» (sic), avaient devant eux un document administratif qui mentionnait, premièrement, le numéro de la directive non correctement transposée, deuxièmement, le nom de l'État membre auquel le manquement était imputable, et, troisièmement, la proposition (tenant en un seul mot), faite par les services compétents, d'adopter une décision concernant l'envoi d'un avis motivé. Ce sont les seuls éléments dont nous pouvons être sûr, du point de vue juridique, qu'ils étaient connus des commissaires et qu'ils ont été à la base de leur décision. En conséquence, même si l'on admet la thèse de la Commission selon laquelle il n'est pas porté atteinte au principe de collégialité si les commissaires décident en collège l'envoi d'un avis motivé en faisant référence à la fiche d'infraction ou aux éléments du dossier administratif, en l'espèce, la décision prise est, néanmoins, défectueuse. En conséquence, nous réaffirmons la thèse que nous avons développée dans nos conclusions du 5 juin 1997, à savoir que la Commission n'a pas produit devant la Cour des éléments de preuve suffisants d'où il ressortirait que le principe de collégialité a été respecté, bien que ce soit à elle qu'incombait la charge de la preuve (14).

ii) En général

12 Il est inévitable que notre analyse du point de droit qui est décisif en l'espèce aille au-delà des limites du présent recours. Il convient d'examiner si [indépendamment de la manière dont les agents de la Commission ont traité le présent recours, quant à la production en temps opportun de la fiche d'infraction et du dossier administratif relatif à l'avis motivé en cause] il est juridiquement concevable, comme il a été soutenu à l'audience, que la décision de notifier l'avis motivé ait été adoptée sur la base d'une procédure où les commissaires n'ont pas élaboré le texte de cet avis motivé en collège ni n'ont décidé sur la base d'un projet de texte qui leur aurait été précédemment soumis par les services compétents; en d'autres termes, il y a lieu d'examiner s'il faut admettre que les commissaires, disposant seulement de la fiche d'infraction et du dossier administratif de l'affaire, prennent une «décision de base» (sic), tenant en un seul mot, concernant l'avis motivé et laissent le soin de préparer et de rédiger le texte de ce dernier aux services administratifs, sous le contrôle du commissaire compétent. Comme nous l'avons déjà indiqué, la Commission affirme que cette procédure, qu'elle suit constamment, est conforme au principe de l'action collégiale.

13 Nous estimons que le raisonnement de la Commission est, tout d'abord, juridiquement mal fondé. Il n'est pas basé sur les textes existants du droit communautaire primaire et dérivé ni sur les conclusions de la jurisprudence de la Cour. En particulier, tant le législateur communautaire que le juge communautaire ont consacré le principe de l'action collégiale de la Commission de manière absolue et uniforme. La distinction faite entre les décisions adoptées selon qu'elles produisent ou non des effets juridiques directs et contraignants, utilisée comme critère permettant de déterminer la manière dont le principe de l'action collégiale se concrétisera dans des règles procédurales spécifiques, va à l'encontre des conceptions admises jusqu'à présent en droit communautaire. En effet, il n'a pas encore été admis jusqu'à présent que ce principe ait une double nature, c'est-à-dire qu'il impose une procédure stricte, formelle pour l'adoption des décisions comportant des conséquences juridiques directes et une procédure plus souple pour les autres décisions de la Commission. Le fait que, dans l'arrêt PVC, la Cour ait eu à connaître d'un acte administratif exécutoire adopté par la Commission ne signifie pas, comme cette dernière le pense à tort, que les conditions procédurales essentielles découlant du principe de collégialité que le juge communautaire a consacrées dans cette affaire concernent seulement l'élaboration des actes administratifs exécutoires. Une telle interprétation est, à notre avis, erronée, comme nous tenterons de l'expliquer de manière plus détaillée ci-après.

14 De plus, si l'on soutient une thèse selon laquelle un organe collégial, lorsqu'il adopte une «décision de base» (sic) qui ne se cristallise pas dans un texte précis et laisse à d'autres services le soin d'élaborer ce texte, respecte le principe général de collégialité, principe exigeant qu'il adopte simultanément le dispositif et les motifs de sa décision, on aboutit inévitablement à des contradictions logiques. D'après ce que les agents de la Commission ont affirmé lors de la nouvelle procédure orale, lorsque le collège des commissaires adopte la «décision de base» (sic) concernant un avis motivé, il laisse seulement à l'administration le soin de concevoir «le libellé du texte», c'est-à-dire qu'il la charge «d'élaborer, de peaufiner, de mettre la dernière main au texte» (15). Si ces services administratifs se bornaient réellement à effectuer les opérations secondaires susmentionnées, la question de la référence au principe de collégialité ne pourrait se poser. Comment, cependant, est-il possible que ces services se limitent à ce rôle secondaire lorsqu'il n'existe même pas un texte qui contienne cette «décision de base» (sic) du collège des commissaires?

15 En pratique, ce que les agents de la Commission qualifient de «décision de base» est une décision sans substance, sans contenu, c'est-à-dire une «décision-fantôme». En réalité, le principe de collégialité signifie, comme le juge communautaire l'indique à juste titre, que l'organe collégial adoptant une décision est tenu d'arrêter lui-même collégialement le contenu de sa décision quant à ses points essentiels et indispensables, en n'assignant aux services administratifs qu'un rôle absolument secondaire. En d'autres termes, si l'on nous permet cette comparaison, la valeur ajoutée par les services administratifs à la décision adoptée doit être, sinon nulle, à tout le moins insignifiante. Dans le cas, cependant, où l'on adopte la pratique mentionnée ci-dessus et décrite par la Commission, la participation des services administratifs ne peut être ni insignifiante ni même secondaire. De plus, comment pourrait-il y avoir un contrôle juridictionnel de la relation entre le texte élaboré par les services administratifs et la décision initiale adoptée par le collège des commissaires lorsque cette décision initiale (ou «décision de base», si vous voulez) n'existe pas en tant que telle, pas même sous la forme d'un projet?

16 En particulier, en ce qui concerne les décisions devant être motivées, la Cour a adopté une position claire qui n'est pas susceptible d'interprétation: «Le dispositif et la motivation d'une décision constituant dès lors un tout indivisible, c'est uniquement au collège qu'il appartient, en vertu du principe de collégialité, d'adopter à la fois l'un et l'autre» (16). Il y a lieu de répéter que la Cour ne fait aucune distinction entre les décisions devant être motivées qui comportent des effets juridiques directs et les décisions devant être motivées qui ont un caractère préparatoire. Cette règle vaut pour l'avis motivé, comme l'indique son nom même. Comment, cependant, est-il possible que les motifs de la décision prise soient adoptés de manière précise, lorsqu'il n'existe, avant la réunion du collège des commissaires, aucun projet de décision soumis à leur approbation qui contienne ces éléments, ni, après cette réunion, de texte approuvé contenant les éléments en question?

17 C'est là essentiellement que se situe, à notre avis, l'erreur commise par la Commission lorsqu'elle tente de définir le contenu sémantique du principe de collégialité. L'obligation d'agir collégialement incombant à la Commission ne se limite pas à la nécessité de débattre collégialement des décisions adoptées et à la responsabilité collégiale des commissaires, mais elle s'étend à l'obligation d'attester que la collégialité a été respectée. En d'autres termes, la Commission, en tant qu'organe collégial, est liée par les règles procédurales particulières qui découlent du principe de collégialité et visent à garantir et à attester que ce principe a été respecté. Ainsi, ces principes coïncident et assurent la transparence et, en dernière analyse, la moralité, car, conformément à la maxime consignée par les historiens, il faut non seulement que la femme de César soit honnête, mais aussi qu'elle paraisse telle (17). Sinon, c'est-à-dire s'il n'est pas possible de prouver qu'une décision donnée a réellement été prise collégialement, ce principe général n'est plus que lettre morte, sans aucune valeur juridique. La seule manière sûre d'établir que ce principe a été respecté, c'est d'incorporer le contenu de la décision prise dans un texte où se trouve consigné le résultat de l'examen collégial de l'affaire par le collège des commissaires et qui circonscrit l'étendue de la responsabilité collégiale des commissaires qui y ont participé (18). En outre, il est nécessaire qu'il y ait un lien entre ce texte et le débat collégial y afférent, au cours duquel il a été approuvé ou élaboré. Pour ce motif, le règlement intérieur de la Commission a prévu la procédure d'authentification de l'original de la décision prise; cette procédure constitue la meilleure manière de prouver que le principe de collégialité a été respecté.

18 Il y a, en outre, lieu de souligner la place qu'occupe le principe de l'action collégiale de la Commission dans le système juridique communautaire. Il est significatif que, dans l'arrêt PVC, la Cour commence son raisonnement en disant que «le fonctionnement de la Commission est régi par le principe de collégialité» (19). Ce principe n'intéresse pas seulement les destinataires de la décision prise, dont les effets directs affectent la situation juridique, mais aussi le fonctionnement correct de la Commission en tant qu'institution communautaire et, donc, également, dans un contexte plus vaste, l'application correcte du droit communautaire. De plus, pour ce motif, les questions procédurales de nature formelle correspondantes et les vices éventuels compromettant la légalité de l'action des organes collégiaux relèvent, dans la plupart des ordres juridiques, de la sphère du contrôle juridictionnel exercé d'office. Les conditions juridiques strictes découlant du principe fondamental de l'action collégiale de la Commission ne concernent donc pas seulement l'élaboration des actes administratifs exécutoires que cette institution est habilitée à adopter, mais l'ensemble des décisions par lesquelles s'exprime la volonté politique et juridique définitive de cette institution. On serait, à notre avis, en présence d'une situation incompatible avec les conceptions généralement admises en matière de théorie juridique et de logique, si le principe de collégialité s'appliquait de manière plus complète lorsque la Commission décide d'infliger une amende à une entreprise en vertu des articles 85 et 86 du traité que lorsqu'elle s'engage sur des questions politiques et juridiques importantes, en adoptant, par exemple, une proposition de règlement ou une recommandation. Il est possible que ces dernières décisions ne lient pas directement les sujets de droit, mais elles engagent la Commission et, pour ce motif, il convient que le principe de collégialité soit respecté. En outre, le principe en question est directement lié non seulement au fonctionnement institutionnel du traité, mais aussi à la sécurité juridique et, pour cette raison, il faudra que l'on puisse prouver facilement et de manière certaine qu'il a été respecté. C'est pourquoi il est indispensable que la collégialité soit liée à des règles procédurales précises et absolument contraignantes, indépendamment de la nature de la décision prise. Cela signifie qu'il faut que la Commission revête ses décisions d'une «tenue procédurale stricte» et non d'une simple «feuille de vigne», comme celle dont ont paru se satisfaire ses agents lors de la nouvelle procédure orale.

19 Nous pensons, en outre, que le raisonnement de la Commission rappelé ci-dessus est contraire non seulement à la jurisprudence de la Cour relative au principe de collégialité, mais aussi à la position du juge communautaire en ce qui concerne la question de la délégation de compétences. Avec la thèse que la Commission a développée concernant la distinction entre les actes comportant des conséquences juridiques directes, pour lesquels il y a lieu de respecter une procédure stricte, et les décisions à caractère préparatoire, pour lesquelles l'adoption d'une «décision de base» (sic) par l'organe collégial suffit à satisfaire au principe de collégialité, tandis que l'élaboration du texte est confiée à des services administratifs, elle tente, en réalité, d'introduire une procédure indirecte de délégation de compétences. Nous rappelons que, conformément à la jurisprudence de la Cour (20), la collégialité constitue la règle s'imposant à l'action de la Commission, tandis que la délégation de compétences permettant l'adoption d'une décision est possible, mais a un caractère exceptionnel (21). Pour qu'il ne soit pas porté atteinte au principe de collégialité, il faudra, d'une part, que le délégataire ne dispose pas d'un pouvoir autonome et, d'autre part, que la délégation soit, par hypothèse, exclue pour les «décisions de principe». En tout cas, le principe de la sécurité juridique et celui de la transparence des actes administratifs imposent la publication des décisions prévoyant une délégation de compétences.

20 La procédure que la Commission déclare suivre constamment pour l'adoption des avis motivés comporte encore moins de garanties quant à la sécurité juridique que la procédure exceptionnelle de la délégation. En particulier, s'il était possible d'utiliser la délégation pour l'adoption d'un avis motivé (22), la Commission devrait, au moins, adopter collégialement une décision prévoyant l'octroi de la délégation, qui assigne des limites à l'action de l'organe délégataire et en définisse les lignes directrices et qui devrait être publiée. En revanche, dans le cadre de la pratique décrite ci-dessus, que la Commission suit constamment pour l'adoption des avis motivés, ses agents, alors qu'ils défendent le principe de collégialité, en compromettent, en réalité, l'application; ils substituent à la décision prévoyant la délégation, qui devrait être prise collégialement conformément à des conditions procédurales et formelles déterminées, une obscure «décision de base» (sic), qui n'est pas publiée et n'a ni substance ni contenu sur la base duquel on puisse contrôler les actes des services administratifs qui sont appelés à la concrétiser. Sous cet angle, la pratique qu'invoquent les agents de la Commission, consistant dans l'élaboration d'une «décision de base» (sic) par le collège des commissaires, est moins sûre que la procédure de délégation.

21 En conclusion, nous pensons que le principe de l'action collégiale de la Commission, qui est un des fondements du système communautaire, est indissolublement lié au principe de l'incorporation de la volonté véritable du collège des commissaires dans un texte qui contienne les points essentiels, les motifs et le dispositif de la décision prise; il faudra, en outre, que l'on puisse établir le lien entre ce texte et les réunions correspondantes de l'organe collégial au cours desquelles la décision a été prise. Cette règle, évidente dans tout ordre juridique, est contenue dans l'article 12 du règlement intérieur de la Commission, dans la version qui était en vigueur au moment où a été prise la décision relative à l'avis motivé ici concerné. Nous croyons que la Commission aurait dû respecter cette forme procédurale précise prévue par le règlement intérieur avant de former le présent recours et que c'est à juste titre que la Cour a, par son ordonnance avant dire droit, invité la Commission à produire les éléments indispensables démontrant que la disposition en question avait été respectée. Toutefois, même si l'on voulait admettre que la procédure d'authentification, telle que prévue par le règlement intérieur de la Commission, ne concerne pas l'adoption de l'avis motivé (23), le principe de l'action collégiale et le principe accessoire de l'incorporation imposent à la Commission des obligations correspondantes. En tout cas, lors de l'adoption d'un avis motivé, il est indispensable que le projet ait été préalablement communiqué au collège des commissaires en vue de son approbation ou, au moins, que, une fois les travaux du collège achevés, il existe un texte approuvé, qui contienne les éléments indispensables de l'avis motivé que nous avons énumérés ci-dessus; de plus, ce texte doit être contenu dans le procès-verbal de la réunion correspondante ou avoir avec celui-ci un lien qui puisse être aisément démontré.

22 Quant aux difficultés pratiques que cette procédure entraînerait pour la conduite normale de l'action de la Commission, comme ses agents l'ont soutenu, nous renverrons à un point ultérieur des présentes conclusions (24). Il est, toutefois, urgent de souligner l'importance particulière que revêt le respect des formes procédurales susmentionnées (et, donc, du principe de collégialité), spécialement pour l'adoption et l'envoi de l'avis motivé visé à l'article 169 du traité CE.

B - Nature de l'avis motivé

23 Dans nos conclusions précitées du 5 juin 1997, nous avons analysé la nature de l'avis motivé visé à l'article 169 du traité quant au point de savoir s'il constitue un «acte d'administration ou de gestion» ou une «décision de principe», pour déterminer s'il pouvait être adopté par délégation (25). Bien que la Commission ne conteste plus que l'avis motivé ne puisse pas faire l'objet d'une délégation, elle soutient que le principe de collégialité, spécialement en ce qui concerne l'adoption d'un avis motivé, n'impose pas le respect des formes procédurales strictes qui régissent l'adoption d'actes ayant des effets juridiques contraignants. En conséquence, il est nécessaire que nous revenions à la question de la nature juridique de l'avis motivé.

24 A première vue, l'avis motivé, comme le donne à penser le choix du terme effectué par le législateur communautaire, n'est même pas un «acte». De plus, en vertu du dernier alinéa de l'article 189 du traité, «les recommandations et les avis ne lient pas»; en conséquence, si l'on admettait que l'«avis motivé» visé à l'article 169 est un «avis» au sens de l'article 189, on pourrait éventuellement soutenir qu'un texte dépourvu de caractère contraignant ne peut, par définition, relever de ces compétences de la Commission pour lesquelles le principe de collégialité doit être respecté de la manière la plus stricte.

25 Il faut noter, toutefois, que le juge communautaire ne se borne pas à ce critère littéral ni ne le considère comme déterminant. La jurisprudence qu'il a développée en ce qui concerne la détermination des actes des institutions communautaires susceptibles de faire l'objet d'un recours en annulation fondé sur l'article 173 du traité est particulièrement révélatrice sur ce point; la Cour n'examine pas tellement l'apparence extérieure sous laquelle se présente l'acte soumis à son examen, mais elle insiste sur l'évaluation de son contenu et de ses effets juridiques (26).

26 En ce qui concerne ce dernier critère, il faut souligner, d'abord, que, conformément aux conclusions de la jurisprudence, l'avis motivé visé à l'article 169 du traité ne constitue pas un acte administratif exécutoire et ne peut pas faire l'objet du recours prévu à l'article 173 du traité (27). Cela ne signifie, cependant, pas que l'avis motivé soit dépourvu de conséquences juridiques ni que celles-ci soient dénuées d'importance ou n'aient qu'une importance secondaire.

27 L'arrêt Essevi et Salengo est éclairant en ce qui concerne cette question (28). Dans cet arrêt, la Cour a jugé que «les avis émis par la Commission en vertu de l'article 169 n'ont un effet juridique que par rapport à la saisine de la Cour, dans le cadre des recours en manquement d'État, et que la Commission ne saurait, par des prises de position dans le cadre de cette procédure, délier un État membre de ses obligations ou porter atteinte aux droits que les particuliers tiennent du traité» (29). Parallèlement, l'avis motivé est qualifié de «procédure préliminaire», qui, «a pour fonction de définir l'objet du litige» (30). Cependant, la Cour a évité de qualifier expressément l'avis motivé de mesure interne non contraignante ou de considérer que cet acte appartenait à la catégorie des «avis» et des «recommandations» visés à l'article 189 du traité, bien que les parties aient invoqué cet argument (31). A notre avis, il est plus correct de ne pas assimiler l'avis motivé visé à l'article 169 avec les recommandations et les avis non contraignants dont parle l'article 189 et de le considérer comme un acte sui generis ayant une place et un fonctionnement spécifiques au sein de l'ordre juridique communautaire (32).

28 En tout cas, le fait que l'avis motivé ne soit pas un acte administratif exécutoire ne signifie pas qu'il constitue automatiquement une décision de la seconde catégorie et qu'il est, de ce fait, justifié de renoncer au formalisme strict qui doit caractériser l'action de la Commission. Contrairement à ce que cette dernière soutient, la circonstance que l'avis motivé n'a pas de conséquences juridiques directes pour ses destinataires n'est pas une raison suffisante pour que, dans les cas en question, on applique le principe de collégialité d'une manière moins contraignante pour la Commission, c'est-à-dire sans que les règles formelles indissolublement liées à ce principe général soient respectées.

29 Ce qui importe, c'est que, en cas de recours formé devant la Cour au titre de l'article 169 du traité, l'avis motivé contienne, au moins sur certains points, l'appréciation finale de la Commission et produise des effets juridiques définitifs dans le cadre de cette procédure. En particulier, l'avis motivé détermine les domaines dans lesquels l'État membre concerné a manqué à ses obligations, indique les moyens sur lesquels sont fondés les griefs de la Commission et circonscrit l'objet du litige dont la Cour est saisie. La Commission ne peut modifier cet objet; elle peut soit renoncer à agir devant la Cour soit se désister du recours introduit.

30 Cela signifie que l'importance juridique de l'avis motivé ne résulte pas principalement des effets directs que sa notification produit au détriment de son destinataire (33), mais des conséquences juridiques qu'il comporte dans le cadre de la procédure prévue par l'article 169, du fait qu'il lie la Commission quant au contenu et à la portée des griefs qu'elle peut faire valoir en justice et qu'il limite, parallèlement, l'étendue du contrôle juridictionnel (34). Il faut, en outre, insister sur la signification et la place particulières de la procédure prévue par l'article 169 au sein de l'ordre juridique communautaire, d'un point de vue tant juridique que politique. Il serait, pensons-nous, contraire à l'économie du traité de sous-estimer le rôle que joue la Commission dans le cadre de cette procédure, en qualifiant l'avis motivé d'acte à caractère accessoire.

31 Nous pensons que la thèse exposée ci-dessus est confortée aussi par les conceptions admises par la jurisprudence en ce qui concerne les effets juridiques de l'avis motivé. Comme nous l'avons déjà indiqué, c'est ce dernier qui circonscrit l'objet du litige dont la Cour est saisie, dans la mesure où tant le recours que l'avis motivé doivent être fondés sur les mêmes moyens et arguments (35); la Commission ne peut formuler de nouveaux griefs ni même étendre son argumentation en invoquant de nouveaux éléments dans le cadre des mêmes griefs (36). Parallèlement, les pouvoirs de la Cour, lorsqu'elle connaît d'un recours fondé sur l'article 169, sont clairement circonscrits; ils se limitent au contrôle de la légalité des éléments qui étaient contenus dans l'avis motivé et ont été repris dans la requête (37). Pour comprendre le rôle de l'avis motivé dans la procédure prévue par l'article 169, il est important de se référer à la jurisprudence selon laquelle, même si l'État membre a remédié au manquement après l'expiration du délai fixé par l'avis motivé, le manquement était déjà constitué et la procédure engagée conserve de ce fait son objet (38). Enfin, la distinction que fait la Cour entre la lettre de mise en demeure et l'avis motivé est significative. Tandis que la première ne se caractérise pas par un formalisme strict, le second doit être parfait du point de vue formel et procédural, parce qu'il «conclut la procédure précontentieuse» prévue à l'article 169 du traité (39). Pour ce motif, en outre, la Cour exerce un contrôle plus strict sur l'avis motivé que sur la lettre de mise en demeure (40).

32 Il résulte de ce qui précède que la formulation de l'avis motivé constitue, en ce qui concerne le poids politique et les effets juridiques, la plus importante contribution de la Commission à la procédure prévue par l'article 169. Un texte qui contient l'expression juridique définitive de la volonté politique de la Commission dans une procédure qui occupe une place primordiale dans le mécanisme institutionnel du traité et a un lien direct avec le rôle de la Commission en tant que «gardienne des traités» (41) ne peut être rabaissé au rang d'acte de second ordre. Comme nous l'avons indiqué (42), les conditions formelles strictes découlant du principe fondamental de l'action collégiale de la Commission ne concernent pas seulement l'élaboration des actes administratifs exécutoires que cette institution est habilitée à adopter, mais l'ensemble des décisions exprimant la volonté politique et juridique définitive de cette institution.

33 Particulièrement en ce qui concerne l'avis motivé, il faudra évaluer adéquatement l'importance des conséquences que peut produire pour un État membre l'accomplissement de la procédure prévue par les articles 169 et suivants du traité. Si l'avis motivé concerne un manquement d'un État membre déjà constaté judiciairement et fait grief à ce dernier de ne pas s'être conformé à l'arrêt de la Cour le condamnant dans le cadre d'un recours formé au titre de l'article 169, cet État, en cas de nouvelle condamnation judiciaire éventuelle, peut, en vertu de l'article 171 du traité (43), se voir réclamer le paiement d'une somme forfaitaire ou d'une astreinte. En d'autres termes, un État membre auquel est adressé un avis motivé ne risque pas simplement une condamnation judiciaire vague et dénuée de conséquences, mais cet avis motivé peut avoir pour lui d'importantes incidences de nature financière. En outre, même si l'avis motivé ne constitue pas la constatation juridiquement contraignante du manquement commis par l'État membre, il est susceptible d'inciter les sujets de droit affectés par le comportement irrégulier présumé de cet État membre à engager, conformément à la jurisprudence récente de la Cour, une procédure visant à la réparation du dommage causé par ce comportement (44).

34 Cette remarque est particulièrement intéressante en l'espèce. Nous rappelons que la Commission reproche à la République fédérale d'Allemagne de n'avoir pas transposé correctement les directives 68/151 et 78/660 du Conseil, relatives aux sanctions que les États membres doivent infliger aux sociétés de capitaux qui ne publient pas leurs comptes annuels. Sur cette question, la Cour a jugé, dans le récent arrêt Daihatsu Deutschland (45), qu'il n'est pas exclu que l'absence de transposition correcte des dispositions précitées entraîne pour les États membres l'obligation de réparer les dommages que ce manquement cause aux particuliers (46). En conséquence, l'envoi d'un avis motivé, dans la mesure où il exprime solennellement la conviction de la Commission, en tant que «gardienne des traités», qu'un État membre a enfreint le droit communautaire, est susceptible d'inciter les citoyens à demander par la voie judiciaire à être dédommagés de cette irrégularité, même si l'avis motivé ne conclut pas à la condamnation de l'État membre par la Cour dans le cadre d'un recours formé au titre de l'article 169 du traité.

35 En bref, l'avis motivé a une incidence sur la situation juridique de son destinataire et peut être pour lui la source de graves conséquences financières. L'avis motivé peut donc ne pas avoir des effets juridiques défavorables directs pour son destinataire, tels qu'une amende infligée au titre de l'article 85 ou 86 du traité, mais il porte atteinte aux intérêts de l'État membre et comporte des conséquences peut-être plus graves que celles qu'ont pour leurs destinataires les actes de la Commission constatant la violation des règles de concurrence ou l'illégalité d'une aide d'État.

36 En résumé, même si l'on admettait que le principe de collégialité peut être respecté de deux manières, l'une plus stricte, l'autre plus souple, comme le soutient la Commission, l'avis motivé appartient au groupe des décisions de la Commission pour lesquelles valent pleinement les conclusions auxquelles la Cour est parvenue dans l'affaire PVC.

C - Difficultés que comporte le respect strict du principe de collégialité

37 Lors de leur intervention à l'audience, les agents de la Commission ont, de nombreuses fois, évoqué la charge de travail qu'implique le traitement des procédures en manquement. Ils ont indiqué que, ces dernières années, environ 5 000 procédures de ce type étaient pendantes en permanence, que, pour 1996 en particulier, plus de 1 000 lettres de mise en demeure avaient été adressées aux États membres et que 93 affaires étaient pendantes devant la Cour. A un autre moment, ils ont insisté sur le retard qu'entraînerait l'application de la jurisprudence PVC à la procédure d'adoption de l'avis motivé, dans la mesure où elle exigerait que le projet de décision soit transmis aux commissaires dans les trois langues de travail du collège et que, ultérieurement, il soit traduit dans les onze langues de l'Union.

38 Nous pourrions nous abstenir d'aborder la question de la charge de travail résultant du nombre de manquements. Après avoir signalé que le nombre officiel d'avis motivés adoptés n'est pas aussi élevé que le laissent entendre les agents de la Commission (47), nous nous bornerons à exprimer une évidence, à savoir que, si la pratique constamment suivie jusqu'à présent par la Commission pour l'adoption des avis motivés est illégale, ce n'est pas la fréquence de l'anomalie ni les difficultés qu'entraînerait le respect de la légalité qui feront que cette pratique soit conforme au droit. En outre, les retards que sont supposés entraîner les traductions des textes dans différentes langues constituent, en réalité, un faux problème.

39 Nous nous expliquons: les agents de la Commission ont tenté de démontrer à la Cour que les commissaires, lorsqu'ils adoptent ce qu'ils appellent une «décision de base» (sic) relative à un avis motivé, le font en parfaite connaissance des données de l'affaire parce qu'ils ont devant eux la fiche d'infraction et, éventuellement, le dossier administratif complet de l'affaire. Cependant, en vertu du règlement intérieur de la Commission, ces données devraient être communiquées aux commissaires dans les trois langues de travail du collège, à savoir en français, en anglais et en allemand. En conséquence, même si l'on admettait qu'il n'est pas nécessaire que le texte de l'avis motivé adopté existe, mais qu'il suffit que les commissaires aient devant eux la fiche d'infraction, cette dernière devrait, en tout cas, être traduite dans les trois langues de travail de la Commission, ce qui exigerait plus de temps et de labeur. Toutefois, ce que les agents de la Commission n'ont pas dit lors de la nouvelle procédure orale, c'est que la fiche d'infraction n'est pas communiquée aux commissaires dans les trois langues précitées, mais uniquement dans une seule, l'anglais ou le français. Donc, même si l'on raisonne ainsi, on ne peut admettre que les commissaires ont pleinement connaissance de la «décision de base» qu'ils prennent!

40 En d'autres termes, sur la base de la pratique que les agents de la Commission ont décrite, le travail préparatoire consistant dans la traduction de la fiche d'infraction, qui est une condition du respect du principe de collégialité, ne peut être évité. Nous ne voyons donc pas pourquoi ce que l'on affirme être jusqu'à présent la pratique constante présente moins de difficultés que le respect des formes procédurales, conforme à la règle et présentant toutes les garanties de sécurité.

41 En réalité, ce qu'exigent le principe de collégialité et le principe accessoire de l'incorporation des décisions de la Commission dans un texte, c'est seulement que le contenu de l'avis motivé, qui est déjà en germe dans la fiche d'infraction, soit transposé sous la forme d'un projet d'avis motivé avant l'adoption de la décision par le collège des commissaires. Le travail que doivent accomplir, de toute façon, les services administratifs compétents de la Commission, à savoir la rédaction du texte de l'avis motivé, devra simplement être effectué plus tôt qu'il ne l'est actuellement. Nous ne pensons donc pas qu'un travail qui doit être accompli de toute façon puisse court-circuiter le mécanisme administratif de la Commission s'il est programmé plus tôt pour des raisons de légalité. En ce qui concerne les traductions, nous signalons simplement que, au lieu de porter sur la fiche d'infraction, dans les langues de travail de la Commission (comme cela devrait de toute façon se faire), elles porteront, comme il est préférable pour des raisons de sécurité juridique, sur le texte du projet d'avis motivé, qui sera traduit dans ces mêmes langues et, en plus, - chose qui ne sera, de toute façon, pas contestée - dans la langue de l'État membre visé par l'avis motivé.

42 En bref, le principe de l'action collégiale de la Commission, correctement appliqué, exige seulement que le projet d'avis motivé soit préparé, avec les points essentiels des motifs et du dispositif, avant qu'ait lieu la réunion des commissaires, qui prendront une décision à son sujet, de telle sorte, que, à la fin de la réunion, le texte en question soit approuvé et qu'il puisse en être fait mention dans le procès-verbal de la réunion. Ce texte, qui existe en trois ou quatre langues, peut certainement être, par la suite, reformulé et peaufiné par les services administratifs compétents de la Commission, sous la responsabilité du commissaire compétent, pourvu qu'il ne soit pas porté atteinte à son contenu essentiel (48).

D - Demande visant à obtenir que les effets du présent arrêt soient limités dans le temps

43 La Commission demande, en conclusion, à la Cour, pour le cas où elle ne suivrait pas le raisonnement qu'elle lui propose et rejetterait le recours comme irrecevable pour violation des formes substantielles lors de l'adoption de l'avis motivé, de limiter les effets de son arrêt de manière à ce qu'ils valent seulement ex nunc et uniquement dans les cas où sont pendantes des procédures dans lesquelles, au niveau de la phase précontentieuse, la légalité de l'avis motivé est contestée pour les mêmes motifs (49).

44 Nous comprenons l'inquiétude de la Commission, mais nous ne croyons pas que le danger qu'elle évoque existe réellement ou, en tout cas, qu'il faille y faire face en limitant dans le temps les effets du présent arrêt. Comme l'agent de la République fédérale d'Allemagne l'a fait observé à juste titre lors de la nouvelle procédure orale, il n'est pas possible, au regard du droit procédural, que les effets des arrêts déjà rendus par la Cour sur des recours fondés sur un avis motivé adopté irrégulièrement soient remis en cause. Il faut admettre la même chose pour les recours pendants devant la Cour pour lesquels la procédure orale est terminée. Conformément à l'interprétation des règles de procédure qui est, à notre avis, la plus correcte, aucune réouverture de la procédure orale ni aucune demande de révision ne sont possibles dans ces cas. Sur cette question, nous renvoyons à l'analyse détaillée à laquelle nous avons procédé dans le cadre des affaires «polypropylène» (50).

45 En conséquence, sans considérer qu'il y ait là une erreur, nous n'estimons pas qu'il soit indispensable de limiter dans le temps les effets du présent arrêt de manière à ce qu'ils valent seulement ex nunc.

IV - Conclusion

46 Eu égard à l'ensemble des considérations qui précèdent, nous proposons à la Cour:

1) de rejeter le présent recours comme irrecevable, et

2) de condamner la Commission à la totalité des dépens.

(1) - Voir point 10 ci-après.

(2) - Arrêt du 15 juin 1994, Commission/BASF e.a. (C-137/92 P, Rec. p. I-2555, point 62).

(3) - Dans la mesure où la collégialité est la règle pour l'action de la Commission, la Cour évite de définir avec précision son champ d'application. C'est pour ce motif, en outre, que la Cour, lorsqu'elle fait référence au principe de collégialité, indique qu'il s'applique «en particulier» aux actes administratifs exécutoires de la Commission, comme ceux ayant pour objet de constater des infractions aux règles de concurrence, d'adresser des injonctions et d'infliger des sanctions pécuniaires aux entreprises concernées, en vertu du règlement n_ 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d'application des articles 85 et 86 du traité (JO 1962, 13, p. 204) (point 65). Ce serait, donc, une erreur d'affirmer que, dans les cas où l'action de la Commission ne consiste pas à adopter des actes administratifs exécutoires, le respect du principe de collégialité n'est pas indispensable.

(4) - Voir l'arrêt Commission/BASF e.a. (déjà cité à la note 2, point 62).

(5) - Voir l'arrêt Commission/BASF e.a. (déjà cité à la note 2, point 64).

(6) - Ibidem, point 67.

(7) - Ibidem, point 75.

(8) - En réalité, la Cour indique que le respect du principe de collégialité intéresse «nécessairement» les sujets de droit concernés par les effets juridiques des décisions et admet que ceux qui ont un intérêt légitime peuvent invoquer la violation de la forme substantielle que constitue l'authentification des actes de la Commission, qui est prévue par l'article 12 du règlement intérieur, pour faire obstacle à ce que l'acte adopté irrégulièrement par la Commission produise des effets juridiques (arrêt Commission/BASF e.a., déjà cité à la note 2, point 75).

(9) - Tel est le terme français utilisé par l'agent de la Commission lors de la nouvelle procédure orale. Il convient de noter que ce terme ne figure dans aucun texte réglementaire pertinent ni dans la jurisprudence de la Cour avec le contenu et la signification que lui confèrent en l'espèce les agents de la Commission. Lorsque le juge communautaire recourt à cette expression, il fait référence à une décision d'une institution communautaire parfaitement régulière et adoptée dans le respect des formes prévues par le traité et les règlements intérieurs pertinents, qui définit le cadre légal et réglementaire essentiel concernant une question à régler et sur laquelle s'appuieront les actes communautaires plus spécifiques ou postérieurs (voir, à titre indicatif, le point 2 des conclusions de l'avocat général M. Jacobs sous l'arrêt du 16 octobre 1997, Banque Indosuez e.a., C-177/96, Rec. p. I-5659, et le point 62 de l'ordonnance du Tribunal du 9 août 1995, Greenpeace e.a./Commission, T-585/93, Rec. p. II-2205). L'usage inadéquat de cette notion par les agents de la Commission ne doit donc pas inciter à en tirer des conclusions erronées.

(10) - D'après les termes précis utilisés par les agents de la Commission lors de la nouvelle procédure orale, «le collège se prononce sur la base d'actes préparatoires de ses services et ... il ne prend qu'une décision de base, tandis qu'il laisse le soin à ses services d'élaborer, de peaufiner, de mettre la dernière main au texte, sous la responsabilité du commissaire compétent».

(11) - «... le principe de collégialité ainsi établi repose sur l'égalité des membres de la Commission dans la participation à la prise de décision et implique notamment, d'une part, que les décisions soient délibérées en commun et, d'autre part, que tous les membres du collège soient collectivement responsables, sur le plan politique, de l'ensemble des décisions arrêtées» (arrêt Commission/BASF e.a., déjà cité à la note 2, point 63).

(12) - Pour être précis, disons que la Commission fait référence à ce qu'elle appelle la «décision de base» (sic) concernant l'avis motivé en cause.

(13) - Voir point 4 de nos conclusions (précitées) du 5 juin 1997.

(14) - Dans ce cas, la règle selon laquelle il incombe à chaque partie d'administrer la preuve de ses affirmations concernant les faits est renversée. Comme il est admis par la jurisprudence, la charge de la preuve est renversée chaque fois que les éléments de preuve sont détenus exclusivement par la partie adverse (voir l'arrêt du 1er décembre 1965, 45/64, Commission/Italie, Rec. p. 1057) ou que cette dernière a, par son comportement, rendu impossible l'accès à ces éléments de preuve (arrêt du 28 avril 1966, Ferriere e Acciaierie Napoletane/Haute Autorité de la CECA, 49/65, Rec. p. 103). Pour ces motifs, il incombe à la Commission de prouver qu'elle a respecté le principe de collégialité et les formes procédurales liées à ce principe.

(15) - Tels sont les mots qu'a utilisés l'agent de la Commission lors de la nouvelle procédure orale.

(16) - Arrêt BASF e.a./Commission (déjà cité à la note 2, point 67).

(17) - Cette maxime est attribuée à César lui-même, qui justifiait ainsi sa décision de répudier sa femme Pompéia, bien que, cité comme témoin contre Clodius, l'amant présumé de celle-ci, il ne l'ait pas accusée d'adultère. Ce fait est rapporté, notamment, dans les «Oeuvres morales» de Plutarque: «Ðïìðçßáí äå ôçí ãõíáßêá êáêþò áêïýóáóáí åðß Êëùäßù ðáñáéôçóÜìåíïò, åßôá ôïõ Êëùäßïõ öåýãïíôïò åðß ôïýôù äßêçí ìÜñôõò åéóá÷èåßò ïõäÝí åßðå öáýëïí ðåñß ôçò ãõíáéêüò· åñïìÝíïõ äå ôïõ êáôçãüñïõ `äéÜ ôß ôïßíõí åîÝâáëåò áõôÞí' `üôé ôçí Êáßóáñïò' Ýöç `ãõíáßêá êáé äéáâïëÞò Ýäåé êáèáñÜí åßíáé'.» (ÐëïõôÜñ÷ïõ ÇèéêÜ, ÂáóéëÝùí áðïöèÝãìáôá êáé óôñáôçãþí, 59, 206 á) [«Ayant répudié sa femme Pompéia, taxée d'inconduite pour relations avec Clodius, et ce dernier étant ensuite poursuivi à ce sujet, il fut cité comme témoin, mais ne fit aucune déclaration défavorable sur le compte de sa femme; l'accusateur lui posant la question `Alors pourquoi l'as-tu chassée?', `Parce que la femme de César, répondit-il, devait être à l'abri même de la calomnie'.» (Plutarque: Oeuvres morales, t. III, trad. F. Fuhrmann, éd. Les Belles-Lettres, Paris, 1988)].

(18) - En l'absence de texte, il est impossible, en cas de contrôle, de discerner la volonté véritable de l'organe collégial. Comme l'affirme le dicton latin bien connu, verba volant, scripta manent.

(19) - Arrêt BASF e.a./Commission, déjà cité à la note 2, point 62 (souligné par nous).

(20) - Voir, en particulier, l'arrêt du 23 septembre 1986, AKZO Chemie/Commission (5/85, Rec. p. 2585).

(21) - Voir l'arrêt du 17 janvier 1984, VBVB et VBBB/Commission (43/82 et 63/82, Rec. p. 19).

(22) - Chose qui, comme nous l'avons exposé de manière détaillée dans nos conclusions précitées du 5 juin 1997, n'est pas, à notre avis, juridiquement possible.

(23) - Il est possible que l'on puisse défendre cette interprétation dans le cadre du règlement intérieur en vigueur à l'heure actuelle.

(24) - Voir point 37 et suiv. ci-après.

(25) - Voir points 17 à 26 de nos conclusions du 5 juin 1997.

(26) - C'est pour ce motif que la Cour a fréquemment jugé recevables des recours dirigés contre des «instructions internes» ou des «communications»; voir, par exemple, les arrêts du 9 octobre 1990, France/Commission (C-366/88, Rec. p. I-3571); du 13 novembre 1991, France/Commission (C-303/90, Rec. p. I-5315), et du 16 juin 1993, France/Commission (C-325/91, Rec. p. I-3283), ainsi que les conclusions présentées par l'avocat général M. Tesauro le 16 janvier 1997 sous l'arrêt du 20 mars 1997, France/Commission (C-57/95, Rec. p. I-1627, points 8 à 11).

(27) - Arrêt du 27 mai 1981, Essevi et Salengo (142/80 et 143/80, Rec. p. 1413). De plus, pour ce motif, est irrecevable le recours dirigé contre le refus de la Commission d'engager la procédure de l'article 169 contre un État membre (arrêt du 1er mars 1966, Lütticke/Commission, 48/65, Rec. p. 27). Voir aussi, plus récemment, l'ordonnance du 12 novembre 1996, SDDDA (T-47/96, non publiée au Recueil): la Commission ne peut être obligée d'adopter un acte non exécutoire.

(28) - Déjà cité à la note 27.

(29) - Ibidem, point 18.

(30) - Ibidem, point 15.

(31) - Ibidem, Rec. p. 1420.

(32) - Lorsque les parties ont développé leur point de vue lors de la nouvelle procédure orale, elles ont paru admettre que l'on qualifie l'avis motivé d'acte sui generis.

(33) - Comme nous l'avons déjà dit, le manquement à ses obligations imputable à l'État membre ne résulte pas du seul envoi par la Commission d'un avis motivé ayant ce contenu. Cependant, ce dernier n'est pas dépourvu de conséquences et, dans la pratique, l'État membre ne peut l'ignorer (voir points 33 et suiv. ci-après). Pour ce motif, la Cour est particulièrement exigeante lorsqu'elle pose la question du respect du droit de défense de l'État à l'encontre des griefs que la Commission lui a adressés par son avis motivé.

(34) - Voir directement le point 31 ci-après.

(35) - Voir, à titre indicatif, les arrêts du 7 février 1984, Commission/Italie (166/82, Rec. p. 459, point 16); du 1er décembre 1993, Commission/Danemark (C-234/91, Rec. p. I-6273, point 16), et du 12 janvier 1994, Commission/Italie (C-296/92, Rec. p. I-1, point 11).

(36) - Voit l'arrêt du 7 février 1984, Commission/Italie (déjà cité à la note 35).

(37) - Ainsi, le juge communautaire ne peut substituer un nouveau délai à celui fixé par l'avis motivé. Voir les arrêts du 10 novembre 1981, Commission/Italie (28/81, Rec. p. 2577), et Commission/Italie (29/81, Rec. p. 2585).

(38) - Voir les arrêts du 7 février 1973, Commission/Italie (39/72, Rec. p. 101); du 5 juin 1986, Commission/Italie (103/84, Rec. p. 1759); du 21 juin 1988, Commission/Belgique (283/86, Rec. p. 3271), et du 12 décembre 1990, Commission/France (C-263/88, Rec. p. I-4611).

(39) - Voir l'arrêt du 31 janvier 1984, Commission/Irlande (74/82, Rec. p. 317, point 13).

(40) - Voir, par exemple, l'arrêt du 28 mars 1985, Commission/Italie (274/83, Rec. p. 1077, points 20 et 21): «Ainsi que la Cour l'a déclaré dans son arrêt du 11 juillet 1984 (Commission/Italie, 51/83, Rec. 1984, p. 2793), la possibilité pour l'État membre concerné de présenter ses observations constituant - même s'il estime ne pas devoir en faire usage - une garantie essentielle voulue par le traité, le respect de cette garantie est une condition de la régularité de la procédure en manquement d'État. S'il en résulte que l'avis motivé visé à l'article 169 du traité CEE doit contenir un exposé cohérent et détaillé des raisons ayant amené la Commission à la conviction que l'État intéressé a manqué à une des obligations qui lui incombent en vertu du traité, la Cour ne saurait poser des exigences de précision aussi strictes à l'égard de la mise en demeure, laquelle ne peut nécessairement consister qu'en un premier résumé succinct des griefs...». Voir aussi l'arrêt du 17 septembre 1996, Commission/Italie (C-289/94, Rec. p. I-4405).

(41) - L'article 155 du traité indique que la Commission «...veille à l'application des dispositions du présent traité ainsi que des dispositions prises par les institutions en vertu de celui-ci».

(42) - Voir point 18 ci-dessus.

(43) - Devenu maintenant l'article 228 de l'édition consolidée du traité instituant la Communauté européenne (adoptée lors de la conférence d'Amsterdam, mais non encore ratifiée).

(44) - Le droit communautaire impose aux États membres de réparer les dommages qu'ils ont causés aux particuliers du fait de la non-transposition ou de la transposition incorrecte d'une directive. Voir les arrêts du 5 mars 1996, Brasserie du pêcheur et Factortame (C-46/93 et C-48/93, Rec. p. I-1029, point 51), et du 26 mars 1996, British Telecommunications (C-392/93, Rec. p. I-1631, point 39).

(45) - Arrêt du 4 décembre 1997 (C-97/96, non encore publié au Recueil).

(46) - Arrêt Daihatsu Deutschland (déjà cité à la note 45, point 25).

(47) - La Commission a adopté et envoyé 411 avis motivés en 1991, 248 en 1992, 352 en 1993, 546 en 1994 et 192 en 1995. Ces données statistiques proviennent des services de la Commission et figurent dans le «Treizième rapport annuel sur le contrôle de l'application du droit communautaire (1995)», COM(96) 600 final, du 29 mai 1996.

(48) - Sur ce point, nous n'aurions aucune objection si la Cour laissait aux services administratifs de la Commission chargés de la formulation définitive de l'avis motivé une marge de manoeuvre plus importante que dans le cas des actes administratifs individuels produisant des effets juridiques directs. Pour ces derniers, la Cour estime qu'ils ne peuvent faire l'objet que de rectifications de nature grammaticale ou orthographique (voir l'arrêt du 23 février 1988, Royaume-Uni/Conseil, dit «des poules pondeuses», 131/86, Rec. p. 905). En tout cas, plus le texte de l'avis motivé qui est envoyé à l'État membre est proche de celui qui est adopté en collège par la Commission, moins nombreuses seront les contestations possibles.

(49) - Sur ce point, les agents de la Commission nous rappellent le roi du conte d'Andersen qui était apparu nu à ses sujets, car il avait été trompé par des gens habiles qui l'avaient persuadé qu'il était revêtu de ses plus beaux habits. Ainsi, les agents de la Commission, comme un autre roi nu, demandent à la Cour, si elle découvre l'irrégularité, de réagir de la manière la moins solennelle possible.

(50) - Voir nos conclusions du 15 juillet 1997, surtout celles relatives à l'affaire Hüls/Commission (C-199/92 P, non encore publiée au Recueil, points 70 et suiv.).

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