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Document 61995CC0070

Conclusions de l'avocat général Fennelly présentées le 6 février 1997.
Sodemare SA, Anni Azzurri Holding SpA et Anni Azzurri Rezzato Srl contre Regione Lombardia.
Demande de décision préjudicielle: Tribunale amminstrativo regionale per la Lombardia - Italie.
Libre établissement - Libre prestation des services - Résidences pour personnes âgées - Absence de but lucratif.
Affaire C-70/95.

Recueil de jurisprudence 1997 I-03395

ECLI identifier: ECLI:EU:C:1997:55

61995C0070

Conclusions de l'avocat général Fennelly présentées le 6 février 1997. - Sodemare SA, Anni Azzurri Holding SpA et Anni Azzurri Rezzato Srl contre Regione Lombardia. - Demande de décision préjudicielle: Tribunale amminstrativo regionale per la Lombardia - Italie. - Libre établissement - Libre prestation des services - Résidences pour personnes âgées - Absence de but lucratif. - Affaire C-70/95.

Recueil de jurisprudence 1997 page I-03395


Conclusions de l'avocat général


I - Introduction

1 La question que soulève la présente affaire a pour origine la réglementation en vigueur dans la région italienne de Lombardie. Cette région rembourse les services d'assistance sociale à caractère sanitaire fournis par les personnes qui gèrent sans but lucratif des résidences pour personnes âgées. L'exclusion des résidences gérées de manière commerciale, combinée au fait que les résidences gérées sans but lucratif sont nécessairement presqu'exclusivement italiennes, a-t-elle pour effet de rendre le système contraire, notamment, à l'article 52 du traité? Telle est la principale question que soulève la présente demande préjudicielle, qui a été déférée à la Cour dans le contexte d'un recours formé par une société luxembourgeoise et par ses filiales italiennes.

II - Contexte juridique et factuel

2 Le droit italien fait une distinction entre les activités générales d'assistance sociale et les activités d'assistance sociale à caractère sanitaire. En vertu d'un décret du 8 août 1985, ces dernières sont directement et de façon prépondérante destinées à la protection de la santé du citoyen par la prévention, les soins et la rééducation physique et psychologique (1). Cette notion peut s'appliquer aux hospitalisations dans des structures protégées tournées vers les soins dispensés aux personnes âgées infirmes qui ne peuvent pas être soignées à domicile. Lorsque les services sanitaires nécessaires ne peuvent pas être séparés des services généraux d'assistance sociale, les autorités régionales peuvent conclure des conventions, dans le cadre des disponibilités financières du Fondo sanitario nazionale (Fonds sanitaire national, ci-après le «FSN»), avec des organismes publics ou, à défaut, avec des organismes privés disposant du personnel et des équipements nécessaires pour fournir ces services. Les coûts sont répartis entre le FSN et les autorités d'assistance sociale en fonction de la proportion que représentent respectivement, dans le service fourni, l'élément sanitaire et les autres éléments d'assistance sociale (2).

3 L'article 5, paragraphe 1, de la Legge Regionale Lombardia (loi régionale lombarde) n_ 1 du 7 janvier 1986, concernant la réorganisation et la programmation des services d'assistance sociale (3) (ci-après la «loi de 1986»), garantit, conformément à l'article 38 de la Constitution italienne, la liberté de toute personne, association ou autre entité d'exercer des activités d'assistance sociale, sous réserve du respect des règles définies par la loi. En vertu des paragraphes 1, 2 et 5 de l'article 50 de la loi de 1986, l'ouverture d'une résidence - qu'il s'agisse d'une maison de repos ou d'une structure protégée - pour les personnes âgées ou pour les personnes partiellement ou totalement non autonomes est subordonnée à l'octroi d'une autorisation délivrée par la province compétente. Les critères d'autorisation en matière, par exemple, de nombre de membres du personnel et de qualifications de ceux-ci, d'équipements disponibles et de fonctionnement de la résidence, sont fixés par le Piano regionale socio assistenziale (plan régional d'assistance sociale, ci-après le «PSA») (4). Le PSA fixe également les conditions du droit de conclure une convention au titre de l'article 18, paragraphe 3, de la Legge Regionale Lombardia n_ 39 du 11 avril 1980, concernant l'organisation et le fonctionnement des unités socio-sanitaires locales (5) (ci-après la «loi de 1980»). En réponse à une question posée par la Cour, le gouvernement italien a indiqué que le PSA actuellement en vigueur (6) imposait les mêmes normes structurelles (en matière d'hygiène, de prévention contre l'incendie, de chauffage, de nombre maximal de pensionnaires par chambre, etc.) pour toutes les résidences pour personnes âgées, mais imposait aux structures protégées, qui s'occupent des personnes totalement non autonomes, des normes plus élevées en matière de présence de personnel infirmier, de médecins et de physiothérapeutes, qu'aux maisons de repos, qui accueillent des personnes partiellement non autonomes. Toutefois, les normes en matière de personnel sont également plus élevées, à l'intérieur de chacune de ces deux catégories de résidences, pour celles qui concluent des conventions au titre de la loi de 1980 que pour celles qui sont exclues du régime de conventionnement.

4 Les paragraphes 1 et 2 de l'article 12 de la loi de 1986 prévoient que les PSA fixent les critères d'accès aux services d'assistance sociale; en même temps, ces paragraphes posent le principe des droits prioritaires des personnes en état de besoin et imposent que les coûts des services fournis aux autres personnes soient supportés en tout ou en partie par ces dernières ou par leur commune (7). L'article 59 examine les conditions d'accès aux services d'assistance sociale. L'article 9 permet aux citoyens italiens et aux étrangers résidant en Lombardie, ainsi qu'aux citoyens italiens et aux étrangers ne demeurant en Lombardie qu'à titre temporaire, s'ils se trouvent dans une situation de besoin exigeant une assistance aux fins de laquelle il n'est pas possible de les diriger vers leur région ou État d'origine, de bénéficier des services d'assistance sociale.

5 La loi de 1980 régit la conclusion, par des organismes publics et privés, de conventions portant sur la fourniture de services d'assistance sociale, comprenant des services à caractère sanitaire (8). Ces contrats sont conclus avec les Unità Socio-Sanitarie Locali (unités socio-sanitaires locales, ci-après les «USSL»).

6 L'article 18 de la loi de 1980 définit les conditions auxquelles des conventions peuvent être conclues entre les USSL et les organismes privés. Le paragraphe 2 de l'article 18, lu en combinaison avec le paragraphe 5 de ce même article, prévoit que les associations, fondations et institutions privées qui entendent participer à la programmation et à l'organisation des services des USSL obtiennent de la région, sur leur demande, un certificat d'aptitude à la conclusion de conventions avec les USSL. L'article 18, paragraphe 3, de la loi de 1980 subordonne l'obtention de ce certificat aux conditions suivantes: a) les organismes concernés ne doivent pas avoir de but lucratif (9), et b) ces organismes doivent atteindre un niveau approprié de qualité des services, de qualification du personnel et d'efficacité des structures, conformément aux indications du PSA (10). En vertu de l'article 18, paragraphe 10, les conventions doivent être conclues pour une durée ne dépassant pas trois ans, mais sont renouvelables. Elles règlent les rapports financiers avec l'autorité publique signataire, prévoient le paiement par remboursement des prestations individuelles, sur la base de tarifs prédéterminés, dans les limites fixées par les PSA, qui assurent, en toute hypothèse, le remboursement des coûts réels. En outre, l'article 18, paragraphe 11, dispose que les conventions doivent assurer à l'autorité signataire la possibilité de contrôler les éléments de coût et la qualité des services fournis sur la base de ces mêmes conventions.

7 Dans la région de Lombardie, 425 des 430 résidences pour personnes âgées qui existent au total ont conclu des conventions avec les différentes USSL (11). Environ 95 % des places disponibles sont fournies par des résidences conventionnées (14,5 % de ces places sont fournies par le secteur public, et le reste par des résidences conventionnées privées) (12).

8 La région finance les coûts des services d'assistance sociale à caractère sanitaire (c'est-à-dire les frais de personnel correspondant aux membres du personnel mentionnés ci-dessus) dans les résidences conventionnées, à concurrence d'un montant maximal de remboursement de 50 000 LIT par jour et par pensionnaire non autonome, indépendamment de l'éventuel état de besoin de celui-ci. En revanche, dans le cadre d'un régime de sécurité sociale distinct, lorsque des pensionnaires âgés sont considérés comme étant en état de besoin, leurs frais de séjour dans les résidences sont remboursés en tout ou en partie par leur commune, en fonction des disponibilités financières de celle-ci, indépendamment du point de savoir si les résidences en question ont conclu des conventions avec les USSL compétentes (13). Selon les demanderesses au principal, les coûts des prestations sanitaires des résidences pour personnes âgées non autonomes, qui sont pris en charge par la région dans le cas des résidences conventionnées, représentent environ un tiers de leurs coûts totaux (14).

9 Sodemare SA, qui est une société de droit luxembourgeois, détient la totalité des parts d'une société italienne, Anni Azzurri Holding Spa, laquelle détient, à son tour, la totalité des parts de différentes sociétés qui gèrent des résidences pour personnes âgées, parmi lesquelles la société Residenze Anni Azzurri Rezzato Srl Cette dernière société a été autorisée, par un décret du président de la province de Brescia, à exploiter une structure protégée pour les personnes non autonomes (15). Le 29 avril 1993, elle a demandé au conseil régional de Lombardie de lui délivrer un certificat d'aptitude à conclure une convention avec l'USSL compétente. Par décision du 3 décembre 1993, le conseil régional a, conformément à l'avis négatif de l'USSL, rejeté cette demande, au motif que la société ne remplissait pas la condition d'absence de but lucratif, imposée par l'article 18, paragraphe 3, sous a), de la loi de 1980 (16). Les taux d'occupation des trois résidences exploitées en Lombardie par Sodemare et par ses filiales sont respectivement de 45 % (dans le cas de Residenze Anni Azzurri Rezzato), de 60 % et de 80 %. Le taux d'occupation de leur résidence située dans la région voisine du Piémont, où des subventions publiques peuvent être obtenues pour les services d'assistance sociale à caractère sanitaire, est de 90 %, tandis que celui des résidences conventionnées de la région de Lombardie était en 1995 de 97,4 %. Des listes d'attente existent également en Lombardie pour obtenir des places dans les résidences conventionnées. En réponse à une question posée par la Cour, les demanderesses au principal ont indiqué que 2 % de leurs pensionnaires étaient des ressortissants de pays autres que l'Italie, qui séjournaient habituellement dans leurs résidences pour des périodes comprises entre un et trois ans. Environ 10 % du nombre, beaucoup plus élevé, de demandes de renseignements reçues chaque année proviennent de personnes résidant dans d'autres États membres. A l'audience, le conseil des demanderesses au principal a indiqué qu'un ressortissant d'un État membre autre que l'Italie avait, dans le passé, séjourné dans une de leurs résidences pour une courte période de convalescence post opératoire, et qu'elles avaient reçu un certain nombre de demandes de renseignements concernant de tels séjours de courte durée.

10 Les trois sociétés précitées ont engagé devant le Tribunale amministrativo regionale per la Lombardia (ci-après la «juridiction nationale») un recours tendant à l'annulation de la décision et de l'avis négatif, et demandant à cette juridiction de refuser d'appliquer l'article 18, paragraphe 3, sous a), de la loi de 1980. L'ASBL Fédération des maisons de repos privées de Belgique (ci-après «Femarbel») est intervenue au soutien des conclusions des sociétés demanderesses.

11 Par ordonnance du 2 mars 1995, la juridiction nationale a suspendu la procédure afin d'adresser à la Cour une demande préjudicielle au titre de l'article 177 du traité instituant la Communauté européenne (ci-après le «traité»). Dans son ordonnance, la juridiction nationale observe que les sociétés demanderesses, bien qu'économiquement actives, fonctionnent en dessous de leurs possibilités réelles. Le taux d'occupation de leurs résidences est faible. En conséquence, leur chiffre d'affaires, qui est constitué, dans une large mesure, des pensions de séjour payées par les pensionnaires, est très éloigné du niveau optimal. La juridiction nationale relève en outre que l'article 18 de la loi de 1980 a pour conséquence que la fourniture des services d'assistance sociale en cause (à savoir ceux qui ont un caractère sanitaire) est essentiellement réservée aux sociétés sans but lucratif (17). Enfin, toujours selon la juridiction nationale, «le fait de réserver les financements aux seules sociétés sans but lucratif a pour conséquence de faire supporter aux usagers des services d'une société qui poursuit un but lucratif un coût économique dont ils sont exemptés s'ils requièrent la même prestation d'une société sans but lucratif».

12 La juridiction nationale a posé les questions suivantes à la Cour:

«1) Une réglementation nationale qui, bien qu'elle concerne une matière entrant `dans le champ d'application' des traités communautaires, est dépourvue de toute motivation doit-elle être tenue pour illégale au regard du droit communautaire en application de l'article 190 du traité et, donc, inapplicable par le juge national, ces conséquences étant limitées aux cas - auxquels semble appartenir la présente espèce - où la règle nationale crée une situation de fait ambiguë en laissant les sujets de droit concernés dans un état d'incertitude quant aux possibilités qui leur sont réservées de faire appel au droit communautaire?

[Il s'agit des cas dans lesquels l'État membre a «l'obligation» (qui selon la Corte costituzionale italienne est une `obligation précise', voir Corte cost. sent. (4 juillet), 11 juillet 1989, n_ 389: point 4 des motifs, dernier alinéa) d'éliminer de son ordre juridique interne les dispositions incompatibles avec le droit communautaire (en ce qui concerne cette obligation d'éliminer de telles règles, voir l'arrêt de la Cour du 24 mars 1988, Commission/Italie, 104/86, Rec. p. 1799). Cette obligation a été énoncée par la Cour à `plusieurs reprises'.]

2) Une règle nationale qui réserve (sans motiver) aux `sociétés' sans but lucratif la fourniture d'une catégorie entière de services, également importants sur le plan financier, est-elle contraire à l'article 58 du traité dans la mesure où elle opère une distinction stricte entre les sociétés à but lucratif et les sociétés sans but lucratif?

3) Les articles 52, 58 et 59 du traité s'opposent-ils à ce qu'une réglementation nationale fasse obstacle à l'exercice d'une activité libérale en imposant, à une entreprise d'un État membre qui souhaite s'établir en application du traité dans un autre État membre, de choisir entre l'exercice de cette activité sous une forme non économique, adoptant dans ce cas une structure juridique formellement prescrite qui n'a rien à voir avec la structure requise aux fins de l'établissement, et - si elle entend exercer son activité sous une forme économique - la prise en charge du coût de prestations qui devrait être supporté par le service de santé publique?

4) L'article 59 du traité s'oppose-t-il à ce qu'une réglementation nationale dirige, selon les modalités établies par l'ordre juridique interne, les usagers des services sociaux - auxquels l'ordre juridique interne reconnaît le droit de choisir leur prestataire - exclusivement vers les entreprises auxquelles l'État rembourse, uniquement en raison de leur structure juridique, les coûts des prestations de santé que toute entreprise autorisée est tenue de fournir, cette réglementation ayant pour effets, d'une part, de canaliser la demande de services vers des prestataires déterminés et, d'autre part, de priver l'usager d'une réelle liberté de choix ?

5) Les articles 3, sous f) (18), 5, 85 et 86, éventuellement lus en relation avec l'article 90, du traité s'opposent-ils à la réglementation en question en ce que, du fait du mécanisme prévu par l'ordre interne, elle permet:

a) aux seules sociétés qui présentent une structure juridique déterminée d'offrir, sans coûts à charge de l'entreprise, des prestations qui complètent les services qu'elles offrent à titre onéreux,

b) à ces mêmes sociétés de se présenter sur le marché comme une catégorie d'entreprises possédant des caractéristiques analogues sur les plans qualitatif et quantitatif et, en conséquence, d'être considérées dans une large mesure par les usagers comme une entité unitaire,

c) de canaliser vers les entreprises visées à la lettre b) la demande de prestations de services dans le secteur de l'assistance aux personnes âgées,

d) d'imposer aux entreprises l'obligation de fournir, à leur charge, des prestations complétant les services qu'elles offrent à titre onéreux,

et a pour conséquence:

e) de susciter des ententes ayant pour effet d'imposer aux entreprises qui n'en font pas partie l'obligation de fournir, à leur charge, des prestations complétant les services qu'elles offrent, et d'en répercuter les coûts sur les usagers,

f) d'obliger à transférer sur ces derniers la charge économique de ces prestations qui sont gratuites lorsque les usagers s'adressent aux entreprises participant à l'entente.»

III - Observations présentées devant la Cour

13 Des observations écrites ont été présentées par les demanderesses au principal, par Femarbel, par les gouvernements italiens et néerlandais et par la Commission. Les demanderesses au principal, le gouvernement italien et la Commission ont présenté des observations orales.

IV - Analyse

14 Nous examinerons tout d'abord la question de recevabilité soulevée par le gouvernement italien. Ensuite, nous passerons aux questions déférées par la juridiction nationale dans l'ordre indiqué ci-dessus. Toutefois, pour les raisons qui seront exposées ci-après, les deuxième et troisième questions seront examinées ensemble.

A - Quant à la recevabilité

15 Le gouvernement italien fait valoir que les troisième, quatrième et cinquième questions doivent être déclarées irrecevables, au motif que la juridiction nationale n'a donné que des raisons superficielles (pour les troisième et quatrième questions) ou même n'a donné aucune raison (pour la cinquième) justifiant sa demande de décision préjudicielle, et s'est bornée à renvoyer aux arguments invoqués par les parties dans la procédure au principal, qui n'étaient pas reproduits dans l'ordonnance de renvoi. Selon le gouvernement italien, cela porte atteinte au droit des États membres intéressés de présenter des observations (19). Selon nous, cet argument n'est pas fondé. La raison pour laquelle la juridiction nationale a posé la troisième question est semblable à celle qui sous-tend la deuxième question: elle se demande si l'octroi d'avantages aux sociétés sans but lucratif constitue une restriction à l'établissement des sociétés commerciales. Dans l'ordonnance de renvoi, la juridiction nationale explique que la quatrième question vise les pensionnaires potentiels établis dans d'autres États membres, dont le choix en faveur de telle ou telle résidence pourrait être canalisé vers certains prestataires par le fait que celui qui choisit une société commerciale supporte une charge financière plus élevée. Enfin, si la juridiction nationale n'a pas donné expressément de motifs séparés en ce qui concerne la cinquième question, la série de conditions qui figurent dans la question elle-même, lue dans le contexte des faits de l'affaire, montre clairement qu'elle s'interroge sur une éventuelle application des règles communautaires de concurrence à la situation décrite.

B - La première question

16 Il ressort à l'évidence de l'ordonnance de renvoi que cette question concerne les mesures législatives nationales, et en particulier les dispositions de la loi de 1980 (20). Les demanderesses au principal, le gouvernement italien et la Commission estiment tous que les États membres ne sont obligés de motiver les actes qui affectent l'exercice des droits conférés par l'ordre juridique communautaire que dans le cas des décisions de portée individuelle. Toutefois, les demanderesses au principal soutiennent que les dispositions de la loi de 1980 constituent une décision de ce type, parce qu'elles ne visent en réalité pas la société dans son ensemble, mais un nombre limité de personnes qui gèrent des résidences pour personnes âgées. A l'appui de cette thèse, elles invoquent une analogie avec l'article 173, quatrième alinéa, du traité.

17 L'obligation de motiver les décisions nationales affectant l'exercice des droits conférés par l'ordre juridique communautaire ne résulte pas d'une quelconque extension de l'article 190 du traité, mais du principe général de droit communautaire qui découle des traditions constitutionnelles communes aux États membres, selon lequel les particuliers doivent, dans ce cas, disposer de recours de nature juridictionnelle (21).

18 Il importe de faire une distinction entre les mesures législatives de portée générale et les décisions d'exécution affectant les particuliers. Selon nous, le fait d'imposer que, lors de son adoption, une législation nationale, même potentiellement susceptible d'affecter l'exercice de droits conférés par l'ordre juridique communautaire, soit motivée constituerait une atteinte injustifiée et non nécessaire à la compétence des États membres. L'existence d'une éventuelle violation du droit communautaire par des mesures législatives nationales doit être appréciée sur la base de critères objectifs. Rien ne démontre que cette approche porte atteinte à l'efficacité de la protection juridictionnelle.

19 La loi de 1980 n'est pas une décision de portée individuelle. La catégorie des personnes qui gèrent des résidences pour personnes âgées dans la région de Lombardie est une catégorie ouverte (22). En effet, la présente affaire concerne, dans une large mesure, les conditions auxquelles des membres potentiels déjà établis dans d'autres États de la Communauté ont accès à cette catégorie.

20 Nous concluons que les États membres ne sont pas tenus d'exposer les motifs de l'adoption d'actes législatifs de portée générale, même lorsque ces actes sont susceptibles d'affecter l'exercice de droits conférés par l'ordre juridique communautaire.

C - Les deuxième et troisième questions

La pertinence de l'article 58 du traité

21 Afin de décider de la manière d'aborder ces questions, il est nécessaire de clarifier la portée de l'article 58 du traité, qui est la seule disposition invoquée dans la deuxième question, et qui est également mentionné dans la troisième. Selon nous, l'article 58 ne concerne que le champ d'application personnel du chapitre 2 du titre III du traité. Sa fonction est d'assimiler, aux fins de l'application du chapitre relatif au droit d'établissement, les sociétés et les autres personnes morales, à l'exception des sociétés qui ne poursuivent pas de but lucratif (ci-après, sauf indication contraire, les «sociétés commerciales»), aux personnes physiques ressortissantes des États membres (23). Les sociétés et autres personnes morales qui ne poursuivent pas de but lucratif ne bénéficient donc pas de la liberté d'établissement. L'article 58 n'affecte pas le champ d'application matériel de cette liberté. Pour prendre l'exemple des circonstances de la présente affaire, l'article 58 n'a pas à lui seul pour effet d'exclure du champ d'application du chapitre 2 du titre III du traité des règles nationales qui traitent les sociétés sans but lucratif autrement que les personnes physiques ou les sociétés commerciales, si ces règles ont pour effet de restreindre la liberté d'établissement de ces mêmes personnes physiques ou sociétés commerciales. S'il n'en était pas ainsi, le simple fait d'exclure une catégorie de personnes morales du bénéfice des droits conférés par le traité affecterait l'étendue des droits dont les autres catégories bénéficient. Aux fins de la présente affaire, l'article 58 ne crée pas de droits matériels qui différeraient de ceux que confèrent les autres dispositions du chapitre 2, et en particulier l'article 52. En conséquence, dans cette partie de notre analyse, nous nous concentrerons uniquement sur la réponse qui doit être donnée à la troisième question.

La pertinence de l'article 59 du traité

22 La troisième question se réfère aux articles 52, 58 et 59 du traité. L'établissement dans un État membre d'une entreprise ou d'un travailleur indépendant est apprécié sur la base de la permanence de ses activités par rapport à celles d'un prestataire de services qui ne se déplace que d'une manière temporaire dans un autre État membre pour y exercer ses activités. L'établissement implique la participation stable et continue d'une entreprise ou d'un travailleur indépendant à la vie économique d'un État membre autre que son État d'origine (24). Il est donc clair que Sodemare et ses filiales, dans la mesure où elles exercent une activité économique par l'intermédiaire des résidences pour personnes âgées qu'elles possèdent en Lombardie et qui sont stables et fonctionnent en permanence, doivent être considérées comme y ayant exercé leur droit d'établissement, et non comme étant des personnes fournissant des prestations de services en Lombardie de manière temporaire à partir d'un autre État membre, tel que le grand-duché de Luxembourg. En conséquence, nous n'examinerons, dans notre réponse à cette question, que les articles 52 à 58. L'éventuelle application de l'article 59 du traité aux relations de Sodemare avec ses pensionnaires et pensionnaires potentiels d'autres États membres que la République italienne sera examinée dans le cadre de la quatrième question (25).

Les systèmes de sécurité sociale et le traité

23 Avant d'aller plus loin, il est nécessaire de se demander si le régime de conventionnement en vigueur en Lombardie échappe au champ d'application des dispositions précitées du traité au motif qu'il fait partie d'un système de sécurité sociale. Les gouvernements italien et néerlandais invoquent tous deux l'arrêt Poucet et Pistre (26). Le gouvernement néerlandais souligne en particulier que l'arrêt Duphar e.a. (27) confirme le principe selon lequel le droit communautaire ne porte pas atteinte à la compétence des États membres pour aménager leurs systèmes de sécurité sociale.

24 Dans l'arrêt Hoefner et Elser (28), la Cour a déclaré que, dans le contexte du droit de la concurrence, la notion d'entreprise comprenait toute entité exerçant une activité économique, indépendamment du statut juridique de cette entité et de son mode de financement. Dans l'affaire Poucet et Pistre, précitée, deux organismes sans but lucratif, contrôlés par l'État, demandaient le paiement de cotisations obligatoires aux régimes de sécurité sociale qu'ils géraient respectivement. MM. Poucet et Pistre s'opposaient à ces demandes de paiement, en faisant valoir que ce système de cotisations obligatoires était contraire au droit communautaire de la concurrence; ils revendiquaient le droit de souscrire une assurance privée équivalente. La Cour a toutefois réitéré le principe posé dans l'arrêt Duphar et a estimé que ces organismes n'exerçaient pas d'activités économiques. Le système de cotisations obligatoires était indispensable à l'application du principe de la solidarité et à l'exercice de la fonction exclusivement sociale que remplissaient les régimes. Cette fonction sociale comportait, pour l'un des deux régimes, une fonction de redistribution de revenus et, pour l'autre, le financement des pensions des travailleurs retraités par les cotisations versées par les travailleurs en activité; en outre, elle se manifestait par la solidarité entre régimes, les excédents faisant en cas de besoin l'objet de transferts entre régimes. La gestion concrète des régimes, en ce qui concerne les taux des cotisations et des prestations, était régie en détail par la loi (29).

25 Si l'arrêt Poucet et Pistre concernait expressément les règles de concurrence, il n'en est pas moins clair que l'analyse qui s'y trouve a une portée plus large. Dans l'arrêt García e.a. (30), la Cour a suivi l'avis exprimé par l'avocat général M. Tesauro dans ses conclusions, selon lequel la troisième directive «assurance non vie» (31) ne pouvait pas réglementer la matière de la sécurité sociale parce qu'elle avait «été adoptée sur la base de dispositions du traité tendant à la réalisation de la liberté d'établissement et de la libre prestation de services (articles 57, paragraphe 2, et 66)», alors que «la matière de la sécurité sociale reste régie par d'autres dispositions spécifiques» (32).

26 Le principe de la solidarité a joué un rôle essentiel dans les deux affaires qui viennent d'être citées. Par contraste avec l'arrêt Poucet et Pistre, la Cour a estimé dans un autre arrêt qu'un organisme à but non lucratif, chargé de la gestion d'un régime d'assurance vieillesse complémentaire et facultatif, bien que légal, destiné aux agriculteurs indépendants, et dont les éléments de solidarité étaient extrêmement limités, exerçait une activité économique en concurrence avec les sociétés d'assurance sur la vie (33).

27 Les États membres sont donc libres d'aménager leurs systèmes de sécurité sociale, et «la substitution des institutions de sécurité sociale aux consommateurs pour la prise en charge des frais médicaux», qui a pour conséquence que ces institutions déterminent, dans une large mesure, les possibilités de commercialisation des médicaments, «ne saurait être considérée en elle-même comme constituant une restriction à la liberté d'importation garantie par l'article 30 du traité, si certaines conditions se trouvent réunies» (34).

28 Toutefois, il n'en résulte pas que les systèmes de sécurité sociale des États membres échappent, dès lors qu'ils sont organisés sur la base de la solidarité, à l'obligation de respecter les règles du traité. Les États membres ne peuvent pas exercer de discriminations au détriment des importations dans le choix des médicaments dont les coûts sont remboursés (35). Dans le même ordre d'idées, les règles qui fixent les conditions auxquelles les laboratoires doivent répondre pour que le coût de leurs analyses médicales soit remboursé (36), ou qui déterminent les conditions auxquelles doivent répondre les sociétés qui souhaitent soumissionner pour obtenir des marchés de systèmes informatiques auprès des autorités publiques, y compris celles du système de santé publique, doivent exclure toute discrimination en raison de la nationalité (37), tout comme les règles en matière d'emploi applicables à de tels systèmes (38). Les règles d'application des systèmes nationaux de sécurité sociale, que ce soit en matière de cotisations ou de prestations, ne peuvent pas contenir de discriminations fondées sur la nationalité, dans la mesure où elles affectent l'exercice de droits conférés par l'ordre juridique communautaire (39), ni imposer des restrictions à la libre circulation (40).

29 Aux fins de l'application de l'article 52 du traité, il est possible de tirer quelques enseignements généraux de cette jurisprudence très diverse. Premièrement, l'existence de systèmes de sécurité sociale institués par les États membres sur la base du principe de la solidarité ne constitue pas, en elle-même, une activité économique, de sorte qu'une restriction inhérente à l'existence de ces systèmes et affectant la libre circulation des marchandises, des services ou des personnes ne peut entraîner l'application des dispositions du traité. La solidarité sociale vise l'acte intrinsèquement non commercial que constitue le subventionnement involontaire d'un groupe social par un autre. Les règles étroitement liées au financement de tels systèmes sont plus susceptibles que d'autres d'échapper au champ d'application des dispositions du traité en matière d'établissement et de prestations de services. Ainsi, la poursuite d'objectifs sociaux sur la base de la solidarité peut amener des États membres à retirer aux opérateurs économiques privés, en tout ou en partie, l'accès aux opérations qui relèvent des systèmes de sécurité sociale.

30 Deuxièmement, les rapports entre d'autres personnes, agissant en qualité de fournisseurs de marchandises ou de prestataires de services, et de tels systèmes de sécurité sociale, peuvent néanmoins avoir un caractère économique. Le droit communautaire exige que ces systèmes soient conformes aux règles du traité, dans la mesure où ils affectent les activités économiques d'autres personnes d'une manière qui n'est pas essentielle à l'accomplissement de leurs objectifs sociaux. Dans les affaires citées au point 28 ci-dessus, les mesures d'application en cause étaient des mesures susceptibles d'être soumises aux règles du traité sur la libre circulation sans que le fonctionnement du système en soit compromis. Ainsi, dans la mesure où les États membres font entrer des opérateurs économiques privés dans leurs systèmes de sécurité sociale, délèguent par contrat la fourniture de certaines prestations à ces opérateurs ou subventionnent des activités à caractère social qu'exercent ces opérateurs, ils doivent, en principe, se conformer aux règles du traité, et notamment à celles qui concernent la liberté d'établissement.

31 Selon nous, la présente affaire concerne une situation à laquelle les règles du traité s'appliquent. Les coûts supportés par les résidences conventionnées pour fournir des services d'assistance sociale à caractère sanitaire sont remboursés au moyen de fonds publics, sur la base de la solidarité entre l'ensemble de la population et les membres âgés de la société. Toutefois, à la différence de l'affaire Poucet et Pistre, ni le financement de cet élément du système de sécurité sociale ni le niveau expressément exigé des prestations des résidences conventionnées ne seraient affectés si les règles relatives au droit de conclure des conventions avec les USSL étaient soumises aux dispositions du traité en matière d'établissement. L'autorisation de gérer une résidence dépend du respect de normes en matière de soins, d'équipements et de personnel qui sont déterminées par les autorités publiques, indépendamment du point de savoir si le propriétaire poursuit ou non un but lucratif. Le fait que les résidences conventionnées sont soumises à des normes plus élevées n'y change rien. En dehors de leur obligation de respecter ces exigences réglementaires de base, les résidences conventionnées n'appartenant pas au secteur public au sens strict du terme sont gérées de manière indépendante. En outre, il convient de relever que les services à caractère sanitaire ne représentent qu'une partie des activités de ces résidences. Les aspects de leurs activités qui concernent le séjour des pensionnaires sont, comme nous l'avons déjà indiqué, soumis à un régime de sécurité sociale différent, fondé sur les ressources, avec pour conséquence que les pensionnaires des résidences conventionnées qui ne sont pas en état de besoin doivent payer l'intégralité du coût de ces prestations concernant le séjour.

L'existence d'une discrimination

32 Il convient à présent de se demander si le fait que le droit de conclure des conventions avec les USSL pour la fourniture de services d'assistance sociale à caractère sanitaire est, en vertu de l'article 18, paragraphe 3, de la loi de 1980, réservé aux organismes privés sans but lucratif, constitue une discrimination fondée sur la nationalité, en violation de la liberté d'établissement. Les termes mêmes de la disposition sont neutres, dans la mesure où ils ne se réfèrent ni à la nationalité ni (dans le cas des sociétés) au siège social (41) des propriétaires des résidences conventionnées. Toutefois, le principe de l'égalité de traitement, que l'article 52 concrétise dans un domaine déterminé, prohibe non seulement les discriminations ostensibles fondées sur la nationalité, mais aussi les formes de discrimination qui, par l'application d'autres critères de distinction, aboutissent en fait au même résultat (42). La Cour a, à maintes reprises, observé que les articles 48, 52 et 59 du traité étaient fondés sur les mêmes principes en ce qui concerne l'interdiction de toute discrimination exercée en raison de la nationalité, et nous nous référerons à la jurisprudence existante dans tous ces domaines pour identifier ce qu'elle entend par discrimination déguisée ou indirecte (43).

33 Dans l'affaire O'Flynn (44), la Cour a eu l'occasion d'analyser les différents types de circonstances de fait qui ont donné lieu à la jurisprudence dans laquelle elle avait conclu à l'existence d'une discrimination indirecte en raison de la nationalité à l'encontre des travailleurs salariés:

«18 Ainsi, doivent être regardées comme indirectement discriminatoires les conditions du droit national qui, bien qu'indistinctement applicables selon la nationalité, affectent essentiellement (45) ou dans leur grande majorité les travailleurs migrants (46), ainsi que les conditions indistinctement applicables qui peuvent être plus facilement remplies par les travailleurs nationaux que par les travailleurs migrants (47) ou encore qui risquent de jouer, en particulier, au détriment des travailleurs migrants (48).

19 Il n'en va autrement que si ces dispositions sont justifiées par des considérations objectives, indépendantes de la nationalité des travailleurs concernés, et que si elles sont proportionnées à l'objectif légitimement poursuivi par le droit national (49).

20 Il ressort de l'ensemble de cette jurisprudence que, à moins qu'elle ne soit objectivement justifiée et proportionnée à l'objectif poursuivi, une disposition de droit national doit être considérée comme indirectement discriminatoire dès lors qu'elle est susceptible, par sa nature même, d'affecter davantage les travailleurs migrants que les travailleurs nationaux et qu'elle risque, par conséquent, de défavoriser plus particulièrement les premiers.

21 Il n'est pas nécessaire, à cet égard, de constater que la disposition en cause affecte, en pratique, une proportion substantiellement plus importante de travailleurs migrants. Il suffit de constater que cette disposition est susceptible de produire un tel effet. Il convient d'ajouter que les motifs pour lesquels un travailleur migrant choisit de faire usage de sa liberté de circulation à l'intérieur de la Communauté ne sauraient être pris en compte pour apprécier le caractère discriminatoire d'une disposition nationale. En effet, la possibilité de se prévaloir d'une liberté aussi fondamentale que la liberté de circulation des personnes ne saurait être limitée par de telles considérations, d'ordre purement subjectif.»

34 En matière de liberté d'établissement, la Cour a identifié comme étant susceptibles d'être discriminatoires, une législation qui «risque de jouer principalement au détriment des ressortissants d'autres États membres» (50), ainsi que des règles qui «favorisent essentiellement des sociétés [nationales]» (51). La Cour a estimé que ce dernier critère était rempli dans le cas d'une règle nationale favorisant un type de sociétés d'origine essentiellement nationale, même si les sociétés nationales actives dans le secteur en question ne tiraient pas toutes un avantage de la mesure en cause (52). A titre de variation sur ce thème, tel est également le cas lorsque les sociétés nationales favorisées sont concentrées dans une partie de l'État membre en question (53). Parmi les critères que la Cour a identifiés comme étant des sources potentielles de discrimination indirecte figurent le lieu de résidence des travailleurs indépendants, le lieu du principal établissement de la société (54), l'appartenance des entreprises à l'État (55) et la possession de diplômes délivrés dans un État membre déterminé et auxquels les diplômes délivrés dans certains autres États membres sont équivalents (56). Ce n'est pas la distinction entre les organismes sans but lucratif et les autres en tant que telle qui est intéressante dans la présente affaire, mais bien la question de savoir si le type d'organismes favorisés est essentiellement national par rapport aux autres types. Si un État membre devait réserver un sort particulier, favorable ou défavorable, à une ou plusieurs des multiples formes juridiques que peuvent revêtir les entreprises, parmi les catégories étendues des entités ayant ou non la personnalité juridique, des associations, des sociétés publiques et privées, à responsabilité limitée ou non, il lui incomberait également de fournir une justification objective au cas où le résultat favoriserait, dans les faits, ses propres ressortissants.

35 Dans l'ordonnance de renvoi, la juridiction nationale observe que l'article 18 de la loi de 1980 a essentiellement pour effet de réserver la fourniture des services sanitaires en cause aux sociétés sans but lucratif, et que les résidences des demanderesses fonctionnent bien en dessous de leur capacité. Cet effet correspond au très petit nombre de résidences commerciales non conventionnées pour personnes âgées. Selon nous, cette législation favorise donc nécessairement les organismes nationaux. Il est vrai qu'il existe des organisations caritatives internationales et que certaines ont peut-être des activités dans le secteur des soins aux personnes âgées, mais «charité bien ordonnée commence par soi-même», et la plupart des actions caritatives dans ce domaine sont entreprises au niveau national, régional ou local. Tel est certainement le cas en Lombardie, puisque toutes les résidences privées conventionnées sont gérées par des organismes établis dans la région. Nous sommes donc en droit de présumer que les sociétés autres qu'italiennes ne sont guère disposées à revêtir une forme juridique sans but lucratif pour pouvoir exercer leurs activités en Lombardie (57). Comme dans l'affaire O'Flynn, il n'y a pas lieu de comparer les mobiles des sociétés commerciales à ceux des sociétés sans but lucratif (58). Comme nous l'avons vu, le fait que les sociétés commerciales italiennes n'ont pas la possibilité de conclure des conventions avec les USSL de Lombardie, ou que les sociétés sans but lucratif d'autres régions italiennes ne sont peut-être pas plus tentées de s'établir en Lombardie que les sociétés d'autres États membres, est également dénué de pertinence (59).

Différences objectives et justification

36 «En vertu d'une jurisprudence constante, une discrimination consiste dans l'application de règles différentes à des situations comparables ou bien dans l'application de la même règle à des situations différentes» (60). Une différence de traitement entre deux catégories de contribuables «peut être qualifiée de discrimination au sens du traité dès lors qu'il n'existe aucune différence de situation objective de nature à fonder une différence de traitement sur ce point entre les deux catégories de contribuables» (61). En conséquence, s'il existe des différences évidentes entre les sociétés sans but lucratif et les sociétés commerciales, il n'en est pas moins nécessaire de déterminer s'il existe des différences objectives justifiant la différence de traitement en cause dans la présente affaire (62).

37 En ce qui concerne la fourniture de services d'assistance sociale à caractère sanitaire financés par des fonds publics, les sociétés sans but lucratif et les sociétés commerciales peuvent, selon nous, remplir les mêmes fonctions. Elles doivent, les unes comme les autres, obtenir une autorisation de gérer des résidences pour les personnes âgées, conformément à l'article 50 de la loi de 1986 et aux conditions plus détaillées fixées par le PSA. Ces dispositions définissent le niveau de soins et d'équipements que les résidences doivent atteindre, indépendamment des caractéristiques de leurs propriétaires. Contrairement à ce que soutient le gouvernement italien, le fait que les résidences conventionnées sont tenues de respecter des normes plus élevées en termes de personnel compétent en matière sanitaire est dénué de pertinence. Même si une société commerciale souhaitait se conformer à ces exigences, elle n'aurait pas le droit de conclure une convention. La présente affaire ne porte pas sur des différences objectives entre les parties concernées. Au contraire, la différence en matière de niveau de soins imposé aux résidences conventionnées et aux résidences non conventionnées découle précisément de la réglementation qui donne lieu à la discrimination. En outre, les coûts des prestations sanitaires des résidences conventionnées sont remboursés intégralement, sous réserve de plafonds bien déterminés. Il n'a pas été soutenu qu'il existait un quelconque rapport entre les coûts supplémentaires qu'entraînent les normes plus élevées en matière de personnel et le remboursement. Il n'existe pas de différence pertinente entre les services non sanitaires (c'est-à-dire ceux qui concernent le séjour) fournis par les organismes commerciaux et ceux fournis par les organismes sans but lucratif, puisque les uns et les autres sont tenus d'accomplir les mêmes tâches et de respecter les mêmes normes, et sont soumis au même régime de remboursement en ce qui concerne les pensionnaires en état de besoin.

38 Pour justifier la différence de traitement, le gouvernement italien a invoqué la solidarité sociale en se référant, notamment, à l'article 38 de la Constitution italienne, ainsi qu'au pouvoir d'appréciation laissé aux régions, qui leur permet de limiter la participation au régime de conventionnement aux organismes dont la première priorité est de poursuivre des objectifs sociaux. De cette manière, toujours selon le gouvernement italien, les fonds publics dépensés servent exclusivement à couvrir le coût de base des services sanitaires fournis aux pensionnaires âgés des résidences, sans qu'une partie en soit détournée pour assurer un profit à leurs propriétaires. A l'audience, le conseil du gouvernement italien a invoqué le rôle social traditionnel des organisations caritatives religieuses, considérées comme plus dévouées à l'assistance aux indigents que les sociétés commerciales. Comme il s'agit d'organisations sans but lucratif, les subventions accordées par la région représentent pour elles une importante source de financement. En outre, toujours selon le gouvernement italien, les services à caractère sanitaire ne peuvent, dans le cas de ces organisations, être financés au moyen de bénéfices provenant d'autres aspects de leurs activités.

39 Selon nous, le gouvernement italien n'est pas parvenu à démontrer que la décision de la région de Lombardie d'exclure les résidences exploitées à titre commercial du remboursement des coûts des services sanitaires était justifiée. Premièrement, il importe de rappeler que les résidences commerciales sont autorisées à fournir aux personnes âgées tous les services liés à leur séjour, y compris les services sanitaires en question, et que, comme l'a souligné le gouvernement italien, ce droit est garanti par la Constitution italienne. Deuxièmement, les normes plus élevées dont il a été affirmé qu'elles s'imposent aux résidences conventionnées s'appliqueraient également aux résidences commerciales si elles avaient accès au régime. Troisièmement, rien n'empêche la région d'accorder aux résidences commerciales un remboursement tel qu'elles ne puissent tirer aucun bénéfice de la fourniture des services sanitaires, et de les placer ainsi, à cet égard, sur le même pied que les résidences sans but lucratif existantes. En réalité, cette exigence paraît déjà ressortir implicitement des paragraphes 10 et 11 de l'article 18 de la loi de 1980. Une telle approche serait plus transparente et restreindrait moins l'exercice des droits conférés par l'ordre juridique communautaire que l'exclusion pure et simple du régime. Les résidences commerciales pourraient continuer à chercher à tirer des bénéfices de l'aspect de leurs activités qui concerne uniquement le séjour, ou de services sanitaires supplémentaires fournis aux frais des pensionnaires eux-mêmes. Quatrièmement, si les sociétés commerciales avaient accès au régime de conventionnement, cela n'aurait pas pour effet d'exclure du système les organisations caritatives traditionnelles.

La pertinence de l'article 90, paragraphe 2, du traité

40 Il est nécessaire d'examiner brièvement l'éventuelle application de l'article 90, paragraphe 2, du traité dans le contexte d'une restriction à la liberté d'établissement. Même à supposer que l'article 90, paragraphe 2, permette de déroger à toutes les règles du traité (63), et même si les résidences conventionnées devaient être considérées comme des entreprises chargées de la gestion d'un service d'intérêt économique général, nous ne pensons pas que cela modifierait le résultat de l'analyse qui précède. L'article 90, paragraphe 2, ne permet de déroger aux règles du traité que dans la mesure où leur application ferait échec à l'accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie. Au point 31 ci-dessus, nous avons observé que ni le financement des services d'assistance sociale à caractère sanitaire fournis dans les résidences pour personnes âgées ni le niveau expressément exigé des prestations ne seraient compromis par l'application à la région de Lombardie des règles du traité sur la liberté d'établissement. Au point 37 ci-dessus, nous avons indiqué qu'il n'existait pas, entre les résidences sans but lucratif et les résidences commerciales, de différence objective concernant l'accomplissement des tâches que la loi leur assigne, qui justifierait l'exclusion des résidences commerciales du régime de conventionnement. En conséquence, la condition de l'application de l'article 90, paragraphe 2, du traité n'est pas remplie.

Conclusion en ce qui concerne les deuxième et troisième questions

41 Nous concluons de l'analyse qui précède que le fait de réserver aux organismes privés sans but lucratif le droit de conclure des conventions avec les USSL pour la fourniture de services d'assistance sociale à caractère sanitaire constitue une discrimination indirecte en raison de la nationalité, et constitue en conséquence une restriction à la liberté d'établissement interdite par le traité.

D - La quatrième question

42 Pour répondre à la quatrième question, il est nécessaire de se demander si les parties demanderesses au principal sont en droit de se prévaloir des dispositions du traité en matière de libre prestation des services. Selon nous, elles ne le sont pas.

43 Il ressort clairement, entre autres, de l'arrêt Alpine Investments que «le droit à la libre prestation des services peut être invoqué par une entreprise à l'égard de l'État où elle est établie, dès lors que les services sont fournis à des destinataires établis dans un autre État membre» (64). Cette conception n'est nullement incompatible avec la déclaration de la Cour dans l'arrêt Gebhard, selon laquelle «les dispositions relatives aux services ne trouvent application que si celles relatives au droit d'établissement ne s'appliquent pas» (65). Ce dernier point de vue, qui correspond à celui que nous avons exprimé au point 22 des présentes conclusions, indique qu'une entreprise considérée comme s'étant établie dans un État membre autre que son État d'origine ne peut être en même temps considérée comme fournissant des prestations de services dans cet État. Elle peut cependant, à partir de cet État, fournir des prestations de services dans un troisième État membre (ou même dans son État d'origine), ou en fournir à des personnes résidant dans ce troisième État ou dans son État d'origine, et, dans ce cas, les articles 59 et 60 sont applicables.

44 Néanmoins, nous ne pensons pas que les activités des parties demanderesses constituent des prestations de services en faveur de personnes établies dans des États membres autres que l'Italie. Les demanderesses au principal ont déclaré que 2 % de leurs pensionnaires étaient des ressortissants de pays autres que l'Italie, qui séjournaient habituellement dans leurs résidences pour des périodes comprises entre un et trois ans, tandis qu'environ 10 % des demandes de renseignements reçues chaque année provenaient de personnes résidant dans d'autres États membres. Ces parties font valoir qu'elles fournissent des prestations de services équivalentes à celles d'un hôtel et que les personnes qui résident dans d'autres États membres ont, en vertu du droit communautaire, le droit de se rendre en Italie pour bénéficier de ces prestations (66). Nous ne pensons pas que cette analogie soit convaincante, étant donné que la durée du séjour des pensionnaires dans les résidences des demanderesses est généralement beaucoup plus longue que la durée d'un séjour à l'hôtel.

45 Dans l'arrêt Debauve e.a. (67), la Cour a déclaré que «les dispositions du traité relatives à la libre prestation des services ne pourraient s'appliquer aux activités dont tous les éléments pertinents se cantonnent à l'intérieur d'un seul État membre» (68). Dans l'arrêt Steymann (69), la Cour a déclaré qu'«il ressort du libellé même de l'article 60 qu'une activité exercée à titre permanent ou, en tout cas, sans limitation prévisible de durée ne saurait relever des dispositions communautaires relatives aux prestations de services. En revanche, de telles activités peuvent tomber dans le champ d'application, suivant les cas, des articles 48 à 51 et 52 à 58 du traité». La Cour a conclu que «les articles 59 et 60 du traité ne visent pas la situation d'un ressortissant d'un État membre qui se rend sur le territoire d'un autre État membre et y établit sa résidence principale en vue d'y fournir ou d'y bénéficier de services pendant une durée indéterminée» (70).

46 Nous ne voyons aucune raison de nous écarter de cette jurisprudence. Premièrement, elle correspond au texte de l'article 59 du traité, qui vise les prestataires de services «établis dans un pays de la Communauté autre que celui du destinataire de la prestation». Les exceptions à cette exigence prévue par le texte ne sont autorisées que dans la mesure où tous les éléments pertinents de l'activité en cause ne se cantonnent pas à l'intérieur d'un seul État membre, comme lorsqu'une personne fournit des prestations de services limitées dans le temps dans un État membre autre que celui dans lequel elle est établie à un bénéficiaire établi dans le même État qu'elle (71). Cette approche préserve la notion d'«`échanges' transfrontières de produits ... qui ne sont pas des `marchandises'» (72).

47 Deuxièmement, si des personnes ayant exercé leur liberté de circulation au titre des chapitres relatifs à la libre circulation des travailleurs ou à la liberté d'établissement pouvaient continuer à être traitées comme des destinataires de prestations de services dans l'État membre dans lequel elles se sont rendues, cela serait incompatible avec le fait que, en vertu de l'article 60, le chapitre du traité relatif aux prestations de services est subordonné aux chapitres qui viennent d'être mentionnés. Il est vrai que les ressortissants d'un État membre qui se rendent à titre permanent ou pour une durée indéterminée dans un autre État membre, mais qui ne sont pas économiquement actifs (tel est très probablement le cas des pensionnaires des résidences des parties demanderesses), ne relèvent pas du champ d'application des articles 48 à 51 ou 52 à 58 du traité. Toutefois, bien que, dans les conclusions qu'il a présentées sous l'arrêt Commission/France (73), l'avocat général M. Lenz ait indiqué qu'il fallait éviter les lacunes, il serait anormal que ces personnes soient traitées comme des destinataires de services, alors que les travailleurs salariés et indépendants qui séjournent également à titre permanent ou pour une durée indéterminée dans l'État membre en question ne le seraient pas (74). Le droit des résidents permanents de se fonder, en qualité de destinataires de services, sur les dispositions du traité en matière de prestations de services, varierait sinon en fonction du point de savoir si la personne en question exerce une activité économique et pourrait dès lors se modifier au fil du temps, et ce même dans le cas d'un particulier quelconque.

48 Il est donc inhérent à la notion de prestations de services au sens du traité que la durée du séjour des destinataires dans un autre État membre soit temporaire ou prédéterminée, et non permanente ou indéterminée (75). Pour des raisons pratiques, cet élément ne peut être apprécié, en tout cas dans les circonstances de la présente affaire, qu'en examinant la nature du «produit» offert. En l'espèce, tous les éléments pertinents de l'activité des parties demanderesses se cantonnent sur le territoire italien. Le seul élément transfrontière est la nationalité autre qu'italienne de certains des pensionnaires et pensionnaires potentiels. Toutefois, on peut présumer au départ qu'une personne qui se rend d'un État membre dans un autre pour s'installer dans une résidence pour personnes âgées le fait à titre permanent ou pour une durée indéterminée, même si elle change ensuite d'avis et retourne vivre dans son État d'origine (76). Cette approche est particulièrement convaincante lorsque les dispositions du traité en matière de prestations de services sont invoquées par le prestataire du prétendu service, qui offre ce dernier dans le monde entier et ne démontre pas l'existence préalable d'un destinataire identifiable (77), plutôt que par un destinataire déterminé, qui pourrait être en mesure d'apporter, en ce qui le concerne personnellement, des preuves de son intention de n'effectuer qu'un séjour purement temporaire. A l'audience, les parties demanderesses au principal ont mentionné le cas d'un ressortissant d'un pays de la Communauté autre que l'Italie, qui avait, conformément à l'intention qu'il avait exprimée, séjourné de manière temporaire dans une de leurs résidences en Lombardie afin d'y passer sa convalescence après une opération chirurgicale. Toutefois, les éléments de preuve qui figurent au dossier indiquent que les parties demanderesses offrent essentiellement aux personnes âgées de les accueillir pour une durée indéterminée ou à titre permanent. Nous ne pensons pas qu'il soit approprié d'élargir l'objet de la présente analyse sur la base de cas isolés dont la juridiction nationale n'a pas traité dans son ordonnance de renvoi, comme celui qui vient d'être mentionné.

49 Nous concluons des développements qui précèdent que les parties demanderesses au principal ne sont pas en droit d'invoquer les dispositions du traité relatives à la libre prestation des services.

E - La cinquième question

50 Les articles 85 et 86, lus en combinaison avec l'article 5 du traité, imposent aux États membres de ne pas prendre ou maintenir en vigueur des mesures, même de nature législative, susceptibles d'éliminer l'effet utile des règles de concurrence applicables aux entreprises (78). Rien dans l'ordonnance de renvoi ou dans les autres éléments soumis à la Cour n'indique que les sociétés publiques et les sociétés privées sans but lucratif qui ont conclu des conventions avec les USSL afin de gérer des résidences pour personnes âgées dans la région de Lombardie aient conclu des accords anticoncurrentiels ou aient pris part à des pratiques concertées contraires à l'article 85 du traité, et rien ne permet non plus de déduire l'existence de tels accords ou pratiques des règles qui font l'objet de la présente affaire (79). On ne peut donc pas soutenir que la région de Lombardie ait imposé ou favorisé la conclusion de tels accords ou pratiques ou en ait renforcé les effets. En outre, rien n'indique que la région ait retiré à ses propres règles leur caractère législatif en déléguant à des opérateurs privés le pouvoir de prendre des décisions relevant normalement de l'autorité publique (80). En ce qui concerne l'article 86 du traité, il n'a jamais été soutenu qu'une entreprise quelconque jouissait d'une position dominante dans une partie substantielle du marché commun (81).

51 La Cour a indiqué que le simple fait de créer une position dominante en accordant des droits spéciaux ou exclusifs au sens de l'article 90, paragraphe 1, du traité, n'était pas, en tant que tel, incompatible avec l'article 86 du traité (82). Toutefois, la simple existence d'un monopole peut constituer un abus de position dominante lorsque l'entreprise à laquelle le droit exclusif a été accordé n'est manifestement pas en mesure de satisfaire la demande que présente le marché, au préjudice des demandeurs du service en cause (83). Cependant, même si la conclusion de conventions avec les USSL dans la région de Lombardie devait être considérée comme un octroi de droits spéciaux au sens de l'article 90, paragraphe 1, du traité, l'existence d'un tel abus inhérent aux circonstances n'a pas été établie en l'espèce. Dans le contexte d'un régime de sécurité sociale, le fait que les résidences conventionnées fonctionnent à leur pleine capacité, combiné avec l'existence de listes d'attente dans certaines zones, peut s'expliquer simplement par les limites inhérentes aux dépenses publiques, plutôt que par un échec à satisfaire la demande du marché (dans la mesure où cette expression a un sens en matière de fourniture de services financés par des fonds publics). Une libre concurrence existe apparemment dans la petite partie du marché du séjour en résidence pour personnes âgées dans laquelle les services d'assistance sociale à caractère sanitaire ne sont pas financés par des fonds publics, ce qui permet de satisfaire une éventuelle demande supplémentaire au moyen de fonds privés.

52 Nous concluons de ce qui précède que les circonstances décrites dans la cinquième question ne constituent pas une violation des articles 3, sous g), 5, 85, 86 ou 90 du traité.

V - Conclusion

53 Pour les raisons qui précèdent, nous proposons à la Cour de statuer comme suit:

«1) Les États membres ne sont pas tenus d'exposer les motifs de l'adoption d'actes législatifs de portée générale, même lorsque ces actes sont susceptibles d'affecter l'exercice de droits conférés par l'ordre juridique communautaire.

2) Une disposition nationale qui réserve aux organismes privés sans but lucratif le droit de conclure avec les autorités locales de sécurité sociale des conventions portant sur la fourniture de services d'assistance sociale à caractère sanitaire financés par des fonds publics constitue une discrimination indirecte en raison de la nationalité et constitue, en conséquence, une restriction à la liberté d'établissement, lorsqu'il est très vraisemblable que les organismes sans but lucratif concernés seront des organismes établis dans l'État membre en question.

3) Les demanderesses au principal ne sont pas en droit d'invoquer les dispositions du traité en matière de libre prestation des services.

4) La législation nationale en cause dans la procédure au principal ne constitue pas une violation des articles 3, sous g), 5, 85, 86 ou 90 du traité.»

(1) - Article 1er du Decreto del Presidente del Consiglio dei Ministri (décret du président du Conseil des ministres) du 8 août 1985, adopté sur la base de la loi n_ 833 du 23 décembre 1978, GURI n_ 191, 14 août 1985, p. 5727 (ci-après le «décret»).

(2) - Article 6 du décret. Les communes sont les autorités de sécurité sociale compétentes en ce qui concerne le remboursement à ces résidences de leurs coûts ordinaires de séjour: voir le point 8 ci-après.

(3) - Bollettino Ufficiale della Regione Lombardia n_ 2 du 8 janvier 1986, 1er supplément.

(4) - Article 50, paragraphe 3, de la loi de 1986.

(5) - Bollettino Ufficiale della Regione Lombardia n_ 15 du 11 avril 1980, 3e supplément. Cette condition est inscrite à l'article 50, paragraphe 4, de la loi de 1986, ainsi qu'aux paragraphes 1 et 7 de l'article 18 de la loi de 1980.

(6) - PSA pour 1988-1990, approuvé par le Consiglio Regionale della Lombardia (conseil régional de la Lombardie) par le décret n_ 871 du 23 décembre 1987, modifié et prorogé par le décret n_ V/122 du 12 février 1991 et par le décret n_ V/1425 du 7 mars 1995.

(7) - L'article 12, paragraphe 3, de la loi de 1986 définit la notion de personne en état de besoin à l'aide de différents critères - revenu familial, absence totale ou partielle d'autonomie, risque de marginalisation.

(8) - Les conventions en matière de services purement sanitaires sont régies par la Legge Regionale Lombardia n_ 833 du 3 décembre 1978.

(9) - Le PSA actuellement en vigueur définit les organismes sans but lucratif comme étant ceux qui, selon leurs statuts, ne poursuivent pas d'objectif à caractère économique et ne distribuent pas leurs bénéfices à leurs actionnaires ou à leurs membres.

(10) - En vertu de l'article 18, paragraphe 9, de la loi de 1980, la convention doit prévoir l'obligation, pour l'organisme contractant, de fournir ses services en faveur des catégories de personnes indiquées dans la convention et d'adapter les procédures d'admission des bénéficiaires individuels à celles prévues par les structures et services publics analogues.

(11) - Ces chiffres, cités par les demanderesses au principal, sont extraits du Bollettino Ufficiale della Regione Lombardia du 12 janvier 1995, 3e supplément extraordinaire.

(12) - Ces chiffres, cités par les demanderesses au principal, sont extraits du Progetto Obbiettivo Anziani Regione Lombardia, approuvé par décret du conseil régional n_ 48808, du 1er mars 1994.

(13) - Ces informations ont été communiquées par le gouvernement italien en réponse à une question posée par la Cour.

(14) - Ce calcul repose sur des extrapolations effectuées à partir du coût journalier moyen des séjours dans les résidences, calculé par l'ISTAT, et des dépenses nationales annuelles effectuées par le FSN en matière de subventions sanitaires versées aux résidences. La proportion des coûts totaux que représentent les dépenses sanitaires, calculée sur cette base, est apparemment, dans le cas de la Lombardie, supérieure à un tiers.

(15) - Décret n_ 728/20/92 du 3 décembre 1992, adopté au titre de l'article 50 de la loi de 1986.

(16) - Décision n_ 2157 du conseil régional de Lombardie; avis négatif n_ 41 de l'USSL, rendu par résolution n_ 1976 du 7 septembre 1993.

(17) - Cette opinion est exprimée de manière plus catégorique encore dans la deuxième question, qui parle d'une catégorie entière de services réservée aux sociétés sans but lucratif.

(18) - L'article 3, sous f), du traité CEE est devenu l'article 3, sous g), du traité CE.

(19) - Voir l'arrêt du 1er avril 1982, Holdijk e.a.(141/81, 142/81 et 143/81, Rec. p. 1299, point 6).

(20) - Dans les présentes conclusions, la notion de mesure nationale s'étend aux mesures adoptées par les autorités publiques compétentes à des niveaux inférieurs à celui de l'État lui-même, comme celui des autorités régionales, provinciales ou locales.

(21) - Arrêt du 15 octobre 1987, Heylens e.a. (222/86, Rec. p. 4097, points 14 et 15). Voir également les arrêts du 19 mars 1991, Commission/Belgique (C-249/88, Rec p. I-1275, point 25); du 7 mai 1991, Vlassopoulou (C-340/89, Rec. p. I-2357, point 22), et du 31 mars 1993, Kraus (C-19/92, Rec. p. I-1663, point 40).

(22) - Voir l'article 5, paragraphe 1, de la loi de 1986, qui est fondé sur l'article 38 de la Constitution italienne. En ce qui concerne la distinction entre les catégories ouvertes et fermées dans le contexte de l'article 173 du traité, voir, par exemple, les arrêts du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission (25/62, Rec. p. 197), et du 7 décembre 1993, Federmineraria e.a./Commission (C-6/92, Rec. p. I-6357).

(23) - Arrêt du 6 novembre 1984, Fearon (182/83, Rec. p. 3677, point 8).

(24) - Voir l'arrêt du 30 novembre 1995, Gebhard (C-55/94, Rec. p. I-4165, points 25 à 27).

(25) - Voir le point 43 ci-après.

(26) - Arrêt du 17 février 1993 (C-159/91 et C-160/91, Rec. p. I-637).

(27) - Arrêt du 7 février 1984 (238/82, Rec. p. 523).

(28) - Arrêt du 23 avril 1991 (C-41/90, Rec. p. I-1979, point 21).

(29) - Aux points 62 à 64 de ses conclusions sous l'arrêt du 14 décembre 1995, Van Schijndel et Van Veen (C-430/93 et C-431/93, Rec. p. I-4705), l'avocat général M. Jacobs a appliqué à un régime fort différent l'approche suivie dans l'arrêt Poucet et Pistre. La Cour n'a pas pris position sur cette question dans son arrêt.

(30) - Arrêt du 26 mars 1996 (C-238/94, Rec. p. I-1673, point 13).

(31) - Directive 92/49/CEE du Conseil, du 18 juin 1992, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie et modifiant les directives 73/239/CEE et 88/357/CEE (troisième directive «assurance non vie») (JO L 228, p. 1).

(32) - Point 9 des conclusions.

(33) - Arrêt du 16 novembre 1995, Fédération française des sociétés d'assurance e.a. (C-244/94, Rec. p. I-4013).

(34) - Arrêt Duphar e.a., précité, points 16 et 20, souligné par nous. Pour des raisons similaires, la Cour a estimé que les cours dispensés dans le cadre du système d'éducation nationale d'un État membre, que celui-ci établit et maintient pour accomplir sa mission dans les domaines social, culturel et éducatif envers sa population, et non pour réaliser des bénéfices, et qui est financé par le budget public et non par les élèves ou leurs parents, ne peuvent pas être considérés comme constituant des prestations de services au sens de l'article 59 du traité: arrêts du 27 septembre 1988, Humbel (263/86, Rec. p. 5365, points 17 à 20), et du 7 décembre 1993, Wirth (C-109/92, Rec. p. I-6447, point 15).

(35) - Arrêt Duphar e.a., précité à la note 27, points 16 et 21, et arrêt du 19 mars 1991, Commission/Belgique, précité à la note 21, point 31.

(36) - Arrêt du 12 février 1987, Commission/Belgique (221/85, Rec. p. 719, points 9 à 11).

(37) - Arrêt du 5 décembre 1989, Commission/Italie (C-3/88, Rec. p. 4035, points 2 et 9).

(38) - Arrêts du 3 juin 1986, Commission/France (307/84, Rec. p. 1725), qui concernait le personnel infirmier du système de santé publique, et du 2 juillet 1996, Commission/Luxembourg (C-473/93, Rec. p. I-3207), qui concernait les emplois dans les administrations publiques de l'éducation et de la santé.

(39) - Voir les arrêts du 14 janvier 1988, Commission/Italie (63/86, Rec. p. 29), et du 14 novembre 1995, Svensson et Gustavsson (C-484/93, Rec. p. I-3955), qui concernaient l'accès à l'aide sociale en faveur du logement, ainsi que l'arrêt du 2 février 1989, Cowan (186/87, Rec. p. 195), qui concernait l'indemnisation par l'État des victimes d'agression. Dans ces trois affaires, les autorités publiques ont, sans succès, invoqué les objectifs sociaux de la législation concernée ou le fait qu'elle était fondée sur le principe de la solidarité: voir, respectivement, les points 11, 13 et 16 des trois arrêts précités.

(40) - L'article 51 du traité prévoit spécifiquement cette condition en matière de libre circulation des travailleurs, mais la Cour l'a également appliquée en matière de liberté d'établissement: voir l'arrêt du 10 juillet 1986, Segers (79/85, Rec. p. 2375, point 17) et les arrêts du 7 juillet 1988, Stanton (143/87, Rec. p. 3877), et Wolf e.a. (154/87 et 155/87, Rec. p. 3897); au point 10 de ces deux derniers arrêts, la Cour déclare que, même si, en l'absence de réglementation communautaire, les États membres demeurent compétents pour légiférer en matière de sécurité sociale des travailleurs indépendants, ils n'en restent pas moins tenus de respecter la norme, inscrite à l'article 52 du traité, qui prescrit la suppression des restrictions à la liberté d'établissement.

(41) - Le siège social d'une société, s'il indique, dans la plupart des cas, la «nationalité» de celle-ci, est, dans certaines circonstances, plutôt assimilable au lieu de résidence des personnes physiques, lequel peut constituer une base de distinction admissible, par exemple en matière fiscale. Voir l'arrêt du 28 janvier 1986, Commission/France (270/83, Rec. p. 273, points 18 et 19).

(42) - Arrêts du 29 octobre 1980, Boussac (22/80, Rec. p. 3427, point 9); du 5 décembre 1989, Commission/Italie, précité à la note 37, point 8, et du 12 avril 1994, Halliburton (C-1/93, Rec. p. I-1137, point 15).

(43) - Arrêts du 8 avril 1976, Royer (48/75, Rec. p. 497, point 23); du 20 mai 1992, Ramrath (C-106/91, Rec. p. I-3351, point 17), et du 27 juin 1996, Asscher (C-107/94, Rec. p. I-3089, point 29).

(44) - Arrêt du 23 mai 1996 (C-237/94, Rec. p. I-2617). Les notes sous la citation qui suit reprennent les renvois à la jurisprudence qui figurent dans le texte même de l'arrêt.

(45) - Voir arrêts du 15 janvier 1986, Pinna (41/84, Rec. p. 1, point 24); du 30 mai 1989, Allué et Coonan (33/88, Rec. p. 1591, point 12), et du 21 novembre 1991, Le Manoir (C-27/91, Rec. p. I-5531, point 11).

(46) - Voir arrêts du 17 novembre 1992, Commission/Royaume-Uni (C-279/89, Rec. p. I-5785, point 42), et du 20 octobre 1993, Spotti (C-272/92, Rec. p. I-5185, point 18).

(47) - Voir arrêts du 10 mars 1993, Commission/Luxembourg (C-111/91, Rec. p. I-817, point 10), et du 4 octobre 1991, Paraschi (C-349/87, Rec. p. I-4501, point 23).

(48) - Voir arrêts du 8 mai 1990, Biehl (C-175/88, Rec. p. I-1779, point 14), et du 28 janvier 1992, Bachmann (C-204/90, Rec. p. I-249, point 9).

(49) - Voir, en ce sens, arrêts Bachmann, précité à la note 48, point 27; Commission/Luxembourg, précité à la note 47, point 12, et du 2 août 1993, Allué e.a. (C-259/91, C-331/91 et C-332/91, Rec. p. I-4309, point 15).

(50) - Arrêt Asscher, précité à la note 43, point 38.

(51) - Arrêt du 5 décembre 1989, Commission/Italie, précité à la note 37, point 9.

(52) - Arrêt du 5 décembre 1989, Commission/Italie, précité à la note 37; dans cette affaire, les sociétés italiennes actives dans le secteur de l'informatique qui n'appartenaient pas aux pouvoirs publics étaient exclues de la conclusion de contrats avec l'État, de même que les sociétés étrangères; voir également l'arrêt du 25 juillet 1991, Commission/Pays-Bas (C-353/89, Rec. p. I-4069, point 25).

(53) - Arrêt du 3 juin 1992, Commission/Italie (C-360/89, Rec. p. I-3401, points 8 et 9).

(54) - Arrêts Halliburton, précité à la note 42; du 13 juillet 1993, Commerzbank (C-330/91, Rec. p. I-4017); du 11 août 1995, Wielockx (C-80/94, Rec. p. I-2493), et Asscher, précité à la note 43.

(55) - Arrêt du 5 décembre 1989, Commission/Italie, précité à la note 37.

(56) - Arrêt du 28 avril 1977, Thieffry (71/76, Rec. p. 765). Cela ressort implicitement de l'arrêt de la Cour, qui a estimé que l'arrêt en question constituait une restriction à la liberté d'établissement, et ce après avoir cité, au point 13 des motifs, le titre III, sous b), du programme général pour la suppression des restrictions à la liberté d'établissement, adopté par le Conseil le 18 décembre 1961 en application de l'article 54 du traité (JO 1962, p. 36), qui concerne les discriminations indirectes. Dans ses conclusions (p. 790), l'avocat général M. Mayras a expressément qualifié cette règle de «discrimination déguisée».

(57) - Ces considérations sont bien distinctes de l'argumentation présentée par les demanderesses au principal, selon laquelle le fait que les sociétés sans but lucratif ne bénéficient pas de la liberté d'établissement avait pour conséquence que toute société autre qu'italienne souhaitant choisir cette forme juridique pouvait être exclue d'Italie. Il semble que, en réalité, la législation italienne ne fasse pas obstacle à l'établissement de sociétés étrangères sans but lucratif.

(58) - Voir le point 21 de l'arrêt, précité à la note 44.

(59) - Voir les arrêts du 5 décembre 1989 et du 3 juin 1992, Commission/Italie, respectivement précités aux notes 37 et 53; ces arrêts ont été examinés au point 34 ci-dessus.

(60) - Arrêt Wielockx, précité à la note 54, point 17; arrêt Asscher, précité à la note 43, point 40.

(61) - Arrêt Asscher, précité à la note 43, point 42, souligné par nous. Semblablement, le fait de réserver un avantage fiscal aux sociétés ayant une résidence fiscale dans un État membre peut constituer une discrimination à l'égard des sociétés établies dans d'autres États membres, parce que ces dernières ont généralement aussi une résidence fiscale en dehors du territoire du premier État membre, à moins qu'une différence objective pertinente puisse être établie entre les deux catégories: arrêt Commerzbank, précité à la note 54, points 15 et 16.

(62) - Dans l'arrêt Commission/Pays-Bas, précité à la note 52, la Cour a déclaré que constituait une restriction à la libre prestation des services une disposition néerlandaise en vertu de laquelle les tiers n'étaient pas autorisés à retirer des bénéfices de la publicité diffusée dans le cadre de programmes télévisés provenant d'autres États membres et destinés aux Pays-Bas, au motif que cette disposition contraignait les opérateurs étrangers à se conformer au modèle néerlandais. Elle a ensuite observé que «pour garantir le pluralisme qu'il souhaite maintenir, le gouvernement néerlandais peut fort bien se borner à élaborer le statut de ses propres organismes de manière appropriée» (point 42 de l'arrêt). Si cette déclaration reflète le principe selon lequel les États membres sont plus libres de réglementer les activités des entreprises établies sur leur territoire que celles des entreprises qui fournissent des prestations à partir du territoire d'un autre État, qui peut lui-même faire en sorte que leurs activités soient réglementées dans l'intérêt général, elle n'implique pas qu'une règle nationale favorisant le secteur sans but lucratif ne puisse pas constituer une restriction à la liberté d'établissement.

(63) - Voir les arrêts du 19 mars 1991, France/Commission (C-202/88, Rec. p. I-1223, point 12); du 10 décembre 1991, Merci convenzionali porto di Genova (C-179/90, Rec. p. I-5889, point 27); du 19 mai 1993, Corbeau (C-320/91, Rec. p. I-2533, point 14); comparer avec l'arrêt du 10 juillet 1984, Campus Oil e.a. (72/83, Rec. p. 2727, point 19). Aux points 86 à 90 des conclusions qu'il a présentées le 26 novembre 1996 dans les affaires jointes C-157/94, C-158/94, C-159/94 et C-160/94, Commission/Pays-Bas, Italie, France et Espagne, l'avocat général M. Cosmas examine cette jurisprudence et conclut que l'article 90, paragraphe 2, devrait être applicable en ce qui concerne les règles du traité relatives à la libre circulation des marchandises.

(64) - Arrêt du 10 mai 1995 (C-384/93, Rec. p. I-1141, point 30); voir aussi les arrêts du 13 décembre 1989, Corsica Ferries France (C-49/89, Rec. p. I-4441, points 10 et 11); du 17 mai 1994, Corsica Ferries Italia (C-18/93, Rec. p. I-1783, point 30); du 14 juillet 1994, Peralta (C-379/92, Rec, p. I-3453, point 48); et du 5 octobre 1994, Commission/France (C-381/93, Rec. p. I-5145, point 14).

(65) - Arrêt précité à la note 24, point 22.

(66) - Arrêt du 31 janvier 1984, Luisi et Carbone (286/82 et 26/83, Rec. p. 377, point 10).

(67) - Arrêt du 18 mars 1980 (52/79, Rec. p. 833).

(68) - Point 9 de l'arrêt; voir également l'arrêt du 26 février 1991, Commission/France (C-154/89, Rec. p. I-659, point 9). Au point 14 de ses conclusions sous l'arrêt Cowan, précité à la note 39, l'avocat général M. Lenz a déclaré, que «la seule condition, à cet égard, [est] que le prestataire de services et le destinataire de services ne résident pas au même endroit».

(69) - Arrêt du 5 octobre 1988 (196/87, Rec. p. 6159, point 16).

(70) - Point 17 de l'arrêt, repris dans le dispositif de celui-ci, souligné par nous.

(71) - Arrêt du 26 février 1991, Commission/France, précité à la note 68, points 7 et 10.

(72) - Cette définition large des prestations de services a été proposée par l'avocat général M. Lenz au point 13 des conclusions qu'il a présentées sous l'arrêt Cowan, précité à la note 39, et au point 17 de celles qu'il a présentées sous l'arrêt du 26 février 1991, Commission/France, précité à la note 68.

(73) - Arrêt du 26 février 1991, précité à la note 68, point 19 des conclusions.

(74) - Une personne qui n'est pas économiquement active peut néanmoins séjourner durablement dans un État membre autre que celui dont elle est ressortissante, si elle remplit les conditions définies dans la directive 90/364/CEE du Conseil, du 28 juin 1990, relative au droit de séjour (JO L 180, p. 26), ou dans la directive 90/365/CEE du Conseil, du 28 juin 1990, relative au droit de séjour des travailleurs salariés et non salariés ayant cessé leur activité professionnelle (JO L 180, p. 28). L'article 8 A du traité, inséré par le traité sur l'Union européenne, a entre-temps institué un droit de séjour des citoyens de l'Union.

(75) - L'exigence, inscrite à l'article 4, paragraphe 2, de la directive 73/148/CEE du Conseil, du 21 mai 1973, relative à la suppression des restrictions au déplacement et au séjour des ressortissants des États membres à l'intérieur de la Communauté en matière d'établissement et de prestations de services (JO L 172, p. 14), qui impose aux États membres de délivrer un titre de séjour comme preuve du droit de séjour des personnes qui fournissent ou reçoivent des services pendant une durée supérieure à trois mois, montre que la durée pendant laquelle un destinataire de services séjourne dans un État membre ne doit pas nécessairement être insignifiante, mais ne modifie pas la conclusion à laquelle nous sommes parvenu dans la présente affaire, à savoir que le séjour doit toujours être de nature temporaire ou être soumis à une limitation de temps pour relever du champ d'application des dispositions du traité sur les prestations de services. Voir également l'article 1er de la directive 64/221/CEE du Conseil, du 25 février 1964, pour la coordination des mesures spéciales aux étrangers en matière de déplacement et de séjour justifiées par des raisons d'ordre public, de sécurité publique et de santé publique (JO 1964, 56, p. 850).

(76) - Cela est conforme au point de vue exprimé par l'avocat général M. Lenz aux points 28 et 29 de ses conclusions sous l'arrêt Cowan, précité à la note 39, où il a donné la préférence à un raisonnement ex ante, selon lequel la qualité de destinataire de services est appréciée au commencement du voyage, par rapport à une approche ex post se référant aux services effectivement utilisés.

(77) - Voir l'arrêt Alpine Investments, précité à la note 64, point 19.

(78) - Arrêt du 17 octobre 1995, DIP e.a. (C-140/94, C-141/94 et C-142/94, Rec. p. I-3257, point 14). En ce qui concerne l'article 85 du traité, voir également les arrêts du 21 septembre 1988, Van Eycke (267/86, Rec. p. 4769, point 16); du 17 novembre 1993, Reiff (C-185/91, Rec. p. I-5801, point 14), et du 9 juin 1994, Delta Schiffahrts- und Speditionsgesellschaft (C-153/93, Rec. p. I-2517, point 14); en ce qui concerne l'article 86, voir l'arrêt du 16 novembre 1977, GB-Inno-BM (13/77, Rec. p. 2115, point 31).

(79) - Arrêt Reiff, précité à la note 78, point 15; arrêt Delta Schiffahrts- und Speditionsgesellschaft, également précité à la note 78, point 15.

(80) - Arrêt Van Eycke, précité à la note 78, point 16; arrêt Reiff, précité à la note 78, point 14; arrêt Delta Schiffahrts- und Speditionsgesellschaft, également précité à la note 78, point 14.

(81) - Pour qu'une position dominante collective existe, il faut, selon les arrêts du 27 avril 1994, Almelo e.a. (C-393/92, Rec. p. I-1477, point 42), et DIP e.a., précité à la note 78 (point 26), que les entreprises du groupe en cause soient suffisamment liées entre elles pour adopter une même ligne d'action sur le marché, ce qui n'a pas été établi en l'espèce. Au point 27 de l'arrêt DIP e.a., la Cour a indiqué qu'un trait caractéristique de la position dominante collective consistait dans l'absence de rapports concurrentiels entre les opérateurs, circonstance qui n'a pas été établie en ce qui concerne les résidences conventionnées de la région de Lombardie.

(82) - Arrêts du 3 octobre 1985, CBEM (311/84, Rec. p. 3261, point 17), et Hoefner et Elser, précité à la note 28, point 29.

(83) - Arrêt Hoefner et Elser, précité à la note 28, points 30 et 31.

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